Sparse 24 (sep. 2018)

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Concours de force, stock-car chasse aux fantômes, lanceurs d’alerte... 84 pages de courage à deux mains + Philippe Bertrand • Antoine Deltour Cousin Uber • Benoît Huot

sparse magazine mieux

sparse | numéro 24 | trimestriel

sep. oct. nov. 2018 • www.sparse.fr imprimé à 200 millions d’exemplaires à lire aux cabinets

GRATUIT • BOURGOGNE-FRANCHE-COMTÉ


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*Là où ça se passe

sparse magazine

photo : Louise Vayssié

Wohin es geht*

De l’autre côté.


édito. La question devenait de plus en plus évidente au fur et à mesure de mes étés. Cette année encore, caressé par les embruns et les odeurs de churros à Port Barcarès en plein mois d’août, heureux au milieu de mes congénères humains de ce bain de foule suant, et, bien que particulièrement enthousiaste à l’idée de créer une Europe des amitiés face à la montée des nationalismes, je me demandais, en écoutant mes voisins de table rosis par le soleil comme des petits porcelets et posés au Pacha Club pendant la fameuse soirée karaoké du jeudi, je me demandais : peut-on créer une loi interdisant la pratique du néerlandais en public ? C’est d’une violence ! On ne les empêche pas de venir, pas de problème. Libre circulation des personnes, liberté mec ! Mais qu’on les empêche de parler. Ou, alors, qu’on leur donne le droit de parler anglais, ou français, ou même italien. Tout ce que tu veux mais pas le néerlandais, bordel ! Trop hardcore. Une suite de borborygmes et de crachats éructés qui ne sont pas sans rappeler les heures de rush dans les usines Peugeot à Sochaux. Ou l’année 1916 à Verdun. Ça fait flipper! L’Europe, c’est la paix. La langue néerlandaise, c’est la guerre. Stop. Par Chablis Winston Photo : Louise Vayssié


sommaire ÉDITO CONTRIBUTEURS 8. GUESTLIST 10. LOOSEUR/WINNEUR 12. GAUTEL & RATIER 14. CINÉMA 3. 6.

ours Ce magazine est édité par Sparse Média. Siret : 750 725 806 00020 - APE : 9499Z www.sparse.fr - contact@sparse.fr

REPORTAGE

DIRECTEUR DE PUBLICATION Pierre-Olivier Bobo

16. L’HOMME

RÉDACTEUR EN CHEF Antoine Gauthier

24. DELTOUR

CONTRIBUTEURS Badneighbour, Pierre-Olivier Bobo, Nicdasse Croasky, Maître Fougnard, Clément Guillet, Chloé Guillot, Frank Le Tank, Cédric de Montceau, JC Polien, Martial Ratel, Augustin Traquenard, Chablis Winston, James Granville forever DIRECTION ARTISTIQUE INTERNETINTERNET

PHOTOGRAPHIES Alexandre Claass, Raphaël Helle, Calamity Jane, JC Polien, Louise Vayssié ILLUSTRATIONS Mr. Choubi, Yannick Grossetête, Michael Sallit, Hélène Virey COMITÉ DE RELECTURE Alix Blk, Martin Caye, Marion Godey, Lise Lejoncour, Aurore Schaferlee COUVERTURE Photo : Raphaël Helle IMPRIMEUR Est Imprim (25)

LE PLUS FORT DU MORVAN

ENTRETIEN & RENAHY, LANCEURS D’ALERTE

IMMERSION VÉLO, PÉDALER DANS LA PRÉCARITÉ

32. À

REPORTAGE 40. VOITURES,

FUN ET POUSSIÈRES

RENCONTRE 50. GHOSTBUSTERS

À MONTCEAU

PORTRAIT BESTIOLES DE BENOIT HUOT

56. LES

INTERVIEW 62. PHILIPPE

68. PSYCHO

BERTRAND EN CAMPAGNE

TEST

70. ABONNEMENT 72. AVOCATS

ET ASSOCIÉS PHOTO 78. HOROSCOPITONE 80. COURRIER DES LECTEURS 82. FROM HELLE 74. ROMAN

Dépôt légal : à la sortie du magazine ISSN : 2260-7617 Tous droits réservés © 2018 Merci à nos partenaires ainsi qu’à celles et ceux qui ont permis la réalisation de ce numéro. Prochain numéro : décembre 2018

© Raphaël Helle / Signatures

Sparse bénéficie du soutien du Ministère de la culture et de la communication, fonds de soutien aux médias d’information sociale de proximité.


MONDE E L T E E U IQ S LA MU 28 SEPT. 7 OCT. 2018 DIJON COM

TFRESITBIVAUL

TRIBUFESTIVAL.

guide moderne de la vie magazine gratuit

Graphisme : studio Indélebil

JEANNE ADDED | MELISSA LAVEAUX | WINSTON MCANUFF & FIXI BALOJI | ANTHONY JOSEPH | THE BUSY TWIST THÉO CECCALDI - FREAKS | THE MAUSKOVIC DANCE BAND | SIMON WINSÉ EXPEKA TRIO (CASEY, SONNY TROUPÉ, CELIA WA) | ESTÈRE BIM (BÉNIN INTERNATIONAL MUSICAL) | SARO FIDEL FOURNEYRON QUE VOLA ? | BLINKY BILL | OLIBA INTERNATIONAL BOX OFFICE | ALEXINHO | ZE TRIBU BRASS BAND : RUMBA EXPERIENCE SOUL BÉTON (SMILE CITY) | KAMPIRE | KONGÔ BLUE RÉUNION TU PEUX R’BOIRE | DIANE BLONDEAU GÉRALDINE KELLER & ALEXANDROS MARKEAS ORCHESTRE DES QUARTIERS | LES ATELIERS DE L’ESM BFC |...


contributeurs

Par Chablis Winston Photos : DR

Nom : Polien Prénom : JC Âge : respect, mec. Fonction : avant, juste photographe, maintenant, tout. Signe particulier : un flegme à toute épreuve. Spécialité : le verre de blanc. Fait de gloire : Joe Strummer est un de ses 3 meilleurs potes, avec Angus Young et Corbier.

Nom : Guillet Prénom : Clément Âge : châtain clair. Fonction : Leo Di Caprio dans les infiltrés. Signe particulier : aucun, mais alors aucun. C’est pour ça qu’il s’immisce si bien dans la masse en scred. Spécialité : l’immersion glauque. Fait de gloire : la Foire aux célibataires de Nuits-St-Georges en 2006. Une boucherie.

Nom : Virey Prénom : Hélène Âge : idéal. Fonction : illustrateuse. Signe particulier : meuf de Nicolas. Spécialité : traîner à la cafet’. Fait de gloire : une série AB sur TF1 pendant 10 ans.

Nom : Claass Prénom : Alexandre Âge : 21 selon ses conquêtes, 76 selon l’intérieur de son corps. Fonction : photographe d’urgence. Signe particulier : sait ce qu’il se passe sur internet à l’instant T. Spécialité : le réseau social. Fait de gloire : 7284 likes pour une photo de petit chat qui lèche un esquimau en 2012 (la glace hein, pas l’inuit).

Nom : Praud Prénom : Pascal Âge : 20h Foot. Fonction : sous-Éric Zemmour. Signe particulier : ose tout, c’est même à ça qu’on le reconnaît. Spécialité : faire croire qu’il s’y connaît et dire un truc ultra-réac’. Fait de gloire : Téléfoot ! Là au moins il était à sa place. Il parlait de ce qu’il connaissait

et il se faisait gifler par Bernard Tapie. C’était drôle.

Nom : Bobo Prénom : Pierre-Olivier Âge : n°6, milieu defensif. Fonction : coach de bien-être en entreprise. Signe particulier : une vain dieu de Mercedes dans le garage. Spécialité : le départ de soirée sans dire au revoir. Il est là et... hop ! Il est plus là. Fait de gloire : Une 3ème place à la Mèche Cup 2018, au Cap d’Agde.

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Lloyd Cole solo Colin Stetson My Brightest Diamond Lord Esperanza Casual Gabberz Regal William Z. Villain Sentimental Rave Inüit Vox Low

Sept. Oct. Nov. Déc.

: Trafik.fr

Étienne Daho Moha La Squale Arthur H Her Jeanne Added Cadillac (Stupeflip) Columbine Agar Agar

lavapeur .com

Dijon

Illustration

Scène de musiques actuelles

Johnny Mafia Championnat de France de human beatbox ...

31/07/2018 10:39

© Jérôme Gaillard

2018-Jose_A3.indd 1

SEPT. -> déc. 2018


guestlist

Par Chloé Guillot et Chablis Winston Photos : Samuel Offredi / Zo / JC Polien

FENC/S

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popeux, Dijon

Entre une tournée à Los Angeles et un festival à Gray, les 4 gars de FENC/S ont pris le temps de répondre à nos questions dans leur hélicoptère. Putain comme c’est sympa ! L’album Geyser est chez tous les bons disquaires. NB : À prononcer ‘Fènciz’. Parce que sinon tu le prononces comment le «/», hein ?

C’est quoi cette barre au milieu de votre nom de groupe ? C’est la raison pour laquelle SP/RSE aurait été un blaze bien plus stylé pour ton mag de bobos mais aussi parce que FENCES c’était déjà pris. Geyser est votre premier album, pourquoi ce nom ? Ça reflète notre musique : une pop inoffensive en surface mais qui couvre en profondeur des giclées de noise imprévisibles. Plutôt Pagny ou Obispo ? Obispo a chanté Zinedine après 98, donc on va dire Pagny pour qu’il nous sorte un Kylian dans les mois qui viennent.

José Shungu

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Pourquoi du foutre sur la pochette de votre dernier album ? Car c’est la réaction physiologique naturelle que provoque l’écoute de notre disque. Où a-t-on le plus un problème avec l’alcool : dans le milieu culturel ou à la SNCF ? À la SNCF on boit pour oublier qu’on fait grève alors que dans la culture on boit pour oublier qu’on peut pas faire grève. Spritz ou Ricard ? Question piège... Pontarlier. Le Tour de France, c’est pas le Derrick du mois de juillet ? On s’endort pas devant Derrick.

MC de Green Shop, Besançon

Ancien de La Cédille ou encore du Festival des échanges urbains (FEU) à Besac, José aime les mots, beaucoup. Avec lui, c’est un jeu de mots par phrase. Vous l’avez ? Vain dieu de poète. Antipodes, l’album de Green Shop, est dans les bacs depuis le printemps. Le combo hip-hop/soul de qualité sera, lui, en live le 27 octobre au Moulin de Brainans.

Comme t’es trop une star, tu vas où pour être tranquille pour boire ton coup à Besançon ? Au Buena Vista !

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Pourquoi le Dijonnais se la joue ? Parce que l’amour tarde à monter.

Plutôt Alexandre Benalla ou Charles Pasqua ? Barbouze père ou fils ? Je ne sais pasqua choisir.

PNL, Booba ou Roméo Elvis ? Roméo Elvis.

L’équipe de France de foot peut-elle guérir le cancer et renflouer le trou de la sécu ? Le football, c’est pour divers tirs...


A-t-on une idée de ce que va devenir Sophie Montel ? Sophie qui ?

À quoi ça sert le CBD si ça défonce pas ? Pour ceux qui en prennent, Terre a peu tics...

Plutôt « Qu’ils viennent me chercher » ou « Casse toi pauv’ con »? Macron + Sarko = Macro.

Pourquoi les gens vont en vacances à la Grande Motte ? C’est pour être à la p(l)age.

T’es allé chercher du CBD en coffee shop, toi ? Non.

Quel est l’intérêt de regarder le Tour de France à part faire la sieste ? L’intérêt avec la sieste, c’est paix d’aller...

Valérie Guy |

directrice de la Citadelle, Besançon

Après un passage par le site de Solutré, Valérie règne sur la Citadelle de Besançon, qui fête cette année ses 10 ans au classement de l’Unesco. Si tu essaies d’envahir Besac, c’est elle qui donnera l’ordre de te tirer dessus depuis les fortifications. Alors fais pas le chaud, elle te regarde d’en haut.

C’est qui l’animal le plus balaise du zoo de la Citadelle ? Moi ou la salamandre tâchetée pour sa stratégie de reproduction. On m’a raconté que la femelle a la capacité de garder en elle la semence du mâle durant plusieurs années ! Cela permet à la salamandre de donner de nouvelles générations sur de longues périodes sans forcément avoir de partenaire sexuel ! Ouf, non ? Quand est-ce qu’on construit un téléphérique jusqu’en haut de la Citadelle ? Quand les poules de la petite ferme du parc zoologique de la Cita auront des dents… Au classement UNESCO, bras de fer entre Climats de Bourgogne et Citadelle de Besac, qui gagne ? La Cita sans aucun doute mais on est pas contre sortir de notre minéralité pour fêter le classement en plein Climats. Morbier ou Epoisses ? Ni l’un ni l’autre mais toujours avec un rouge de la côte chalonnaise ! Plutôt Clash ou Ramones ? Clash.

Plutôt « Qu’ils viennent me chercher » ou « Casse toi pauv’ con » ? Definitly « qu’ils viennent me chercher »... Tu sais ce qu’il y a, toi, dans les grattons ? Ben voui… Que deviennent les vieilles cabines téléphoniques ? Dans les collections au musée Comtois de la Cita. Qui est la plus grande star de BFC ? Antoineeeeeee Griezmann ! Un festival coup de coeur dans la région ? ... (sniff)... nostalgique des Francogourmandes à Tournus. Quel magazine traîne dans tes WC ? Marianne, catalogue promos Sephora... Pour un week-end peinard en BFC, tu vas où ? At home dans le Clunysois. Ta bonne résolution de la rentrée ? Ne pas rater une seule occas’ de fiesta en bonne compagnie !

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la hype Par Augustin Traquenard Photos : DR

LE WINNEUR DE L’AUTOMNE Yohann Gourcuff (footballeur) Pour muscler son milieu de terrain, le DFCO fait cette saison appel à Yohann Gourcuff. Bombardé au rang de ‘nouveau Zidane’ à la fin des années 2000 après avoir brillé avec les Girondins de Bordeaux, la carrière du Breton a connu un sérieux coup de frein. C’était en 2010, après son passage chez Jean-Mi Aulas, à Lyon qui a voulu en faire sa nouvelle star. Plombé par le mondial où il se prend des tartes à l’arrière du bus par Ribéry, pendant la désormais mythique grève de Knysna, sa santé physique et mentale part en couille. Du coup, Yoyo cire le banc et multiplie les stages à l’infirmerie. Depuis, la carrière de l’ancien prodige n’a jamais vraiment rebondi, et le Stade Rennais le laisse sans contrat à la fin de la saison dernière. Gourcuff a aujourd’hui 32 ans. Et alors ? En 2018, il joue au DFCO et c’est une très bonne nouvelle. À Dijon, on s’en fout de sa réputation de babtou sensible et fragile. Il va pouvoir s’épanouir sans pression, faire des tours de Porsche Cayenne avec son épouse, Karine Ferry, sur la place du marché le samedi soir, après les matchs, sans se faire emmerder par des ultras ou des paparazzis. Yohann, à Dijon, il va briller sur le terrain, claquer des buts à la pelle même s’il ne joue que 10 minutes par match. Yohann, on le croisera au Carrefour Market, on lui fera un petit signe de tête et il nous répondra par un sourire, tranquille.

LES LOOSEURS DE L’AUTOMNE Bernard Giudicelli et Guy Forget (président de la FFT et directeur de Roland-Garros)

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Roland-Garros, c’est la vitrine du tennis français. « Un bel écrin dont tout le monde a envie de profiter » précise Nanard Giudicelli. Attention cependant selon lui à « respecter le jeu et l’endroit ». Effectivement, on ne s’attend pas à voir Jeff Tuche brailler en loge comme un putois lors d’une finale Nadal-Federer. Selon Nanard, afin d’en profiter un max, il s’agit avant tout de se tenir bien. Ça vaut pour les joueurs. Enfin surtout pour les joueuses, notamment Serena Williams à qui il compte bien refuser le droit de porter sa tenue Black Panther l’an prochain. « Elle est allée trop loin », avec sa combinaison noire et sa ceinture rose. Problème, la combi est tape à l’œil mais est aussi un dispositif médical pour Williams qui souffre de problèmes de circulation sanguine. À cela, Guy Forget a la solution : « s’il lui faut porter des bas de contention, aucun souci. Et ça passera sans problème si elle porte par exemple une jupe pardessus. » Nanard et Guy recevront, sans doute bientôt, le soutien de Eric Zemmour qui considère que si t’es une fille, tu mets une jupe. Les collants, c’est pour les danseurs, et les combinaisons, pour les cosmonautes. Dégagez-moi ces guignols qui vivent au 19ème siècle !


L'AUDITORIUM 2018 / 2019

ouverture billetterie le 18 septembre The Kühn concert OnL Quatuor Bela Tony Allen Sclavis - Pifarely - Courtois Ensemble Café Zimmermann Le Grand Symphonique Frida Kahlo Othello Claudia Solal & Benjamin Moussay Jeune Ballet du CNSMD de Lyon Jacques Rebotier Philharmonique de la Roquette ... 71100 Chalon-sur-Saône conservatoire.legrandchalon.fr l’auditorium

CNV / FCM / SACEM / SCPP / SPEDIDAM / SPPF / STUDIO DES VARIÉTÉS



Retrouvez l’ensemble de la programmation sur www.bourgognefranchecomte.fr/idylle

Création graphique - conception

LES ARTISTES S’INVITENT DANS L’YONNE ET DANS LE JURA

www.thesuperb-agency.com

DU 12 OCTOBRE AU 10 NOVEMBRE 2018


le casque et l’enclume Le faux film progressiste LES INDESTRUCTIBLES 2

The Incredibles 2 – 2018 – Réalisateur : Brad Bird

Pitch Après avoir tout cassé en ville, la gentille famille de super-héros indestructibles est foutue au placard. Un milliardaire des médias décide de l’en sortir pour redorer la réputation des ‘super’ auprès de la populace en mal de sécurité. Niveau Disney world company contre le reste du monde. La vision de Frank Ok, je sais ce que vous pensez, les films d’animation n’ont pas leur place dans le casque et l’enclume, cette chronique où les sommets du cinéma se rencontrent (cf. la qualité du deuxième film présenté dans ce numéro pour s’en rendre compte). Moi, j’ai toujours aimé les films de Pixar, et ce depuis Toy Story. Le premier Indestructibles est sorti il y a 14 ans et j’avais emmené ma petite sœur au cinoche. Elle était jeune, on avait mangé du popcorn et on était bien. Je suis parti voir le deuxième volet dans le même esprit. Dans une interview, Brad Bird, le réalisateur du film, parlait de l’évolution de la société, de la place des femmes, des nouvelles formes d’éducation. J’ai trouvé la prospective intéressante et assez loin de l’image Disney qui nous a fait bouffer de la princesse et du prince charmant depuis 50 ans. Après, je suis certain que beaucoup crieront à la théorie du complot et à une pseudo ouverture post-Weinstein de Disney alors que l’on peut y voir juste un film léger, mais pas lourd, source de divertissement pour les petits et les grands. Le contrechamp de Nicdasse Déjà, j’avais pas vu le premier que je regrette d’avoir vu le 2ème. Disney est bien plus vicieux que le Vatican pour préserver la morale de l’american way of life, planqué derrière un scénario progressiste qui joue la parité. Papa Indestructible reste au foyer avec des gosses infects, maman Indestructible s’éclate au boulot en sauvant le monde. Le réal et le scénariste sont en fait deux vieux réac’, pervers assumés. Le méchant s’appelle l’Hypnotiseur et c’est un digest de Guy Debord qui voudrait sortir les veaux humains de leur léthargie médiatique. Super maman le fout en taule, lui et ses idées progressistes. Et, à la fin, c’est toujours papa qui conduit la voiture avec maman sagement assise à la place du mort. Disney préserve les fondamentaux: travail, famille, sécurité, bonheur dans la consommation… Quand aux multiples gros plans sur le cul de la maman, ils ne servent qu’à exciter John Lasseter, un des createurs de Pixar tombé pour harcelement sexuel ! Ça a beau être visuellement sophistiqué, les gosses méritent mieux bordel… Verdict final Idéal si vous aimez aller roter au Mc Do après le flim.

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Par Frank Le Tank et Nicdasse Croasky Photos : DR


Le film qui fait plein de promesses

(mais n’en tient aucune)

GOAL OF THE DEAD

2014 – Réalisateurs : Benjamin Rocher et Thierry Poiraud

Pitch L’Olympique de Paris (1ère division) vient défoncer la petite ville de Capelongue (loser) pour un match. L’attaquant de l’OP est un enfant de Capelongue parti sans se retourner et les Capelonguais veulent sa peau… jusqu’à utiliser des produits hautement toxiques. Niveau Navet français bas du tableau. La vision de Nicdasse Champions du monde 2018 oblige, quoi de mieux qu’un film sur le foot pour rendre hommage à l’art de Didier Deschamps et consorts. La feuille de match était si séduisante : une brochette d’acteurs pas trop pourris dont le Dijonnais Alban Lenoir (vu à la TV dans Hero Corp), des zombies au scénario, la promesse d’une vengeance sanglante digne des plus grands Scorsese… Bref tout pour faire du beau jeu, euh un bon flim. Problème : c’est pas Zidane à la réal. Non c’est Thierry Poiraud. Et si ça se laisse regarder, surtout les scènes où les zombies vomissent (très réussies), tout le reste tombe malheureusement un peu à plat, me laissant le même souvenir qu’un Guingamp-Auxerre en 2003. Le contre champ de Frank Guingamp-Auxerre ? Je pense plutôt à un Genlis-Bligny-sur-Ouche quand j’avais 15 berges. Si tu remplaces les râles de zombies par des ados qui muent et les giclées de vomi par de l’acné juvénile en masse, on arrive peu ou prou au même résultat. Ce film est un double navet puisqu’il est divisé en deux parties. Tu cites Thierry Poiraud, le responsable de la seconde partie, mais rendons aussi hommage à Benjamin Rocher (encore un nom improbable, à croire qu’ils ont signé sous pseudos pour ne pas se faire tricard par la profession), le responsable de la première bouse, pardon mitemps, de ce film infâme. On peut penser à Shaun of the Dead, référence pour moi du film zombie-comique, mais ici pas de Winchester et pas de séquence marrante, juste de la gêne. J’ai bien fait de ne pas le regarder en entier. Verdict final À quand le deuxième opus ?

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Passage en force Par Chablis Winston, à Étang-sur-Arroux Photos : Raphaël Helle

Soulever des charges de 200 kg, tirer des tracteurs d’1 tonne et demi, faire rouler des meules de foin, boire de la gnôle. Tous les ans, au bord de l’Arroux, les costauds, les têtes brûlées et les marlous du coin viennent se défier, simplement pour le plaisir, dans le concours de force le plus détendu de France, où tout commence et tout finit au centre du monde : la buvette. On était à la 21e édition de L’homme le plus fort du Morvan. 17


Le kop, juste avant de craquer des fumis.

O

n appelle le candidat n°16 au micro. C’est Jérôme, grand chauve souriant qui s’approche dans le coin de l’arène chauffée à blanc qu’est devenu le stade municipal. Jérôme s’approche de l’énorme pneu de tracteur posé sur l’herbe, harnache sa ceinture de force sur ses reins, se tartine les mains de magnésie pour ne pas riper, se penche lentement, et commence à forcer comme un bœuf. 350 kilos à retourner. Le pneu, c’est l’épreuve-reine. Jérôme pousse des petits cris, Jérôme sue comme un cochon, Jérôme donne tout ce qu’il a, les veines qui parcourent son crâne luisant sont prêtes à exploser. On a tous peur que Jérôme explose ou fasse un arrêt cardiaque. « Mon dieu, on dirait qu’il va se chier dessus », ose ma voisine en tribune. Puis Jérôme coupe son effort, ré-essaie, tente de trouver une prise plus pratique. Le public massé dans ce coin du terrain l’encourage en hurlant. Jérôme est à fond, mais Jérôme n’y arrivera pas… La minute

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impartie pour l’épreuve est passée. Le juge arbitre fait signe à Jérôme que ce n’est plus la peine. Il repart à sa place, la tête basse et le souffle court, mais le sourire aux lèvres sous les applaudissements nourris. 350 kg à bout de bras, c’est dur, même quand on a la carrure d’une armoire bretonne. Cet après-midi, tout le Morvan s’est donné rendez-vous à Étang-sur-Arroux, au pied du Mont Beuvray, pays de petites montagnes vertes en pleine Bourgogne ambiance Comté du Seigneur des anneaux, la Charolaise en plus, où les hivers sont aussi durs que les étés brûlants. On vient d’Autun, de Luzy, du Creusot, pour voir les colosses. Plus de 2000 personnes sur le petit stade de la ville écrasé par le soleil du début de l’été. Des gens du coin, des Morvandiaux, quelques touristes anglais ou hollandais qui fondent sur la région l’été. Beaucoup de familles qui peuvent aussi profiter du videgrenier et de la petite fête foraine, installés pour l’occas’ à côté du champ de bataille. On transpire à grosses gouttes, la buvette tourne à plein régime. Jeannine Bonabé a installé sa chaise à l’ombre contre la main courante. À 86 ans, cette habitante d’Étang-sur-Arroux n’a jamais raté une édition de


Les Basques ont leur concours de force depuis la nuit des temps. Pourquoi pas les Morvandiaux ?

l’Homme le plus fort du Morvan. « Mon fils l’a déjà gagnée, et mon petit-fils, Thibault, participe encore cette année ». Elle a l’air d’aimer la compet’, « l’important, c’est pas de participer, c’est de gagner. Faut gagner.» 25 gars se sont inscrits à l’épreuve. « On en a refusés beaucoup cette année », annonce Samuel, le speaker et juge-arbitre en chef improvisé de la compétition. Il faut dire que le concours a déjà sa réputation. Plus de 20 ans que les mâles se défient à Étang à la fin juin.

Julien Dray, Intervilles et la buvette. Tout a commencé en 1997 à la

buvette du stade après un match de foot. Des dirigeants et des joueurs du club se toisent à savoir qui est le plus balaise. Roger Fouillet est un de ceux-là. Et reste un des responsables de l’organisation depuis tout ce temps : « En fait, tout part de Julien Dray, vous connaissez ? » Julien Dray ? L’ancien député socialiste ? Touche pas à mon pote ? Les grosses montres ? Non. L’autre, l’homonyme, le Strongman. Pour les moins connaisseurs en concours de force, Julien Dray a gagné le titre de l’Homme le plus fort de France en 2013. À la fin des années 90, Julien Dray participe à Intervilles plusieurs fois (ouais, Intervilles, TF1, les vachettes, Olivier Chiabodo, etc.) en tant que capitaine de l’équipe du Creusot, ville située à une vingtaine de bornes d’Étang. « À la télé, il n’arrêtait pas de répéter : je suis l’homme le plus fort du Morvan ». À la buvette ce fameux soir, Roger et ses collègues ont décidé de lui disputer le titre. « Un des gars était maçon. Il a sorti des sacs de ciment et on a lancé un concours. Le premier. On a décidé de l’officialiser, on l’a ouvert à tous, et maintenant c’est devenu une institution dans le coin ». Les Basques ont leur concours de force depuis la nuit des temps. Pourquoi pas les Morvandiaux ? On ne va pas se mentir, l’homme aime montrer ses muscles et se frotter à ses congénères en prouvant qu’il en a une plus grosse que lui depuis des lustres. Mais il a été obligé de structurer ça sans se massacrer, parce qu’une guerre et des centaines de morts à chaque

fois, ça fait désordre. Les concours de force de type compétition à épreuves (et pas juste coup de poing dans la gueule) remontent à... pfou... beaucoup. Les plus prestigieux, les highlands games, concours de forces et d’agilité écossais, remontent au 11e siècle. Les seigneurs les utilisaient pour savoir qui d’eux avaient les guerriers les plus valeureux, ou alors juste pour entrainer leurs armées. Au Pays Basque, les hommes se défient pour l’honneur de leur village ou de leur ferme depuis un temps que les historiens n’arrivent même pas à dater. Là-bas, les épreuves correspondent aux travaux des champs ; lever des bottes de paille, scier du bois, soulever des charrettes... Un peu comme dans le Morvan. On appelle ça « force basque » ou Herri Kirolak (sports du peuple en Basque). Ce genre de concours aura une énorme popularité à la fin du 19e siècle au Canada et aux USA, plutôt en mode freak show que compétition, avec des champions comme Louis Syr, le Québecois. Plus près de nous, The world’s strongest man, créé en 1977, est le concours mondialisé. Des fédérations dans tous les pays (les strongmen), des retransmissions télé, des plages aux Bahamas pour cadre, des bimbos, des sponsors en masse... Et des golgoths farcis aux protéines. De la poésie.

Qui est chaud pour un bras de fer ?

Tom a toujours le pneu qu’il faut pour sa Clio.


De dos, Jeannot, catégorie vétéran.

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Le concours dans le Morvan ? À peu près le même que tous les concours de force classiques, à ça près qu’ici, y’a pas de bimbos ni de sponsors, mis à part le supermarché du coin, et que tout le monde met la main à la pâte pour la prépa. Le tracteur d’1 tonne et demi à tirer sur 15 mètres est prêté par un agriculteur du coin, les bottes de foin à faire rouler aussi. Les barils remplis de béton sont filés par le garagiste, etc. Tellement une institution que l’année dernière, Strongman France, une des structures officielles des concours de force du pays, les a contacté pour qu’ils deviennent une des étapes de championnat. « On a accepté, d’autant qu’on connaissait bien Julien Dray, qui est venu plusieurs fois, nous confie Roger Fouillet, mais on ne le refera pas. Ces gars-là, ils font des galas sur des parkings de supermarché. C’est pas drôle, pas impressionnant, pas authentique ». Donc cette année, c’est retour aux sources, c’est annoncé sur la com’. C’est l’Homme le plus fort du Morvan. Donc le mec doit venir du Morvan. Ou de Bourgogne en tout cas. Tu viens de Lyon ? Tu dégages. De Paris ? Tu dégages. Ça se passe à l’ancienne, avec les gars du cru. Même s’il n’y a pas de contrôle à l’inscription. D’un point du vue sécurité aussi, y’a pas beaucoup

de contrôles. Hormis une décharge signée par les concurrents déclarant ne pas avoir de problème de santé, pas grand-chose à part une consigne du speaker : « Vous vous blessez pas les gars hein ? ». Et pour les secours : « Y’a les pompiers pas loin ». De l’authentique, y’en a, et des gros morceaux. Les concurrents viennent des patelins alentours mais aussi de Nevers, Mâcon, Chalon-sur-Sâone. Tom, le tenant du titre, est de Château-Chinon et son pote Sylvain, de Saulieu. Nico, petit trapu, est routier à Paray-leMonial, et passe ses journées de boulot à porter des quartiers de viande charolaise. Il nous propose de la goutte. « Y’a pas de contrôle anti-dopage ». Jérôme, lui, vient de la Nièvre et s’est pointé avec sa mère, relax. Didier, catogan et marcel ajusté sur sa panse à bière, participe avec Mickaël, son fils de 18 ans : « J’ai vu mon père au concours et je me suis dit : dès que j’ai l’âge, j’en suis ». On trouve aussi les rugbymen d’un club voisin, venus se tester entre potes. Y’a une belle ambiance de camaraderie, de 18 à 52 ans. Les gars se tapent dans les mains, s’encouragent entre eux, mais le panel est plutôt hétérogène. Quelques golgoths des salles de sport, mais pas tant que ça. Des maçons, des gars du bâtiment, des rugbymen,


LES 8 TRAVAUX D’HERCULE La marche du fermier. 2 poids de 50 kg à porter à bout de bras pendant 1 minute.

La remorque. 350 kg à soulever et tourner pendant une

minute.

Le joug. 2 bidons remplis de ciments de 150 kg chacun

accrochés à une barre horizontale. À porter sur les épaules le plus loin possible pendant 1 minute.

Les bras en croix. Tenir à bout de bras tendus des bouteilles d’eau le plus longtemps possible. Pas que de la force pure. Les charrettes. Tirer un tracteur d’1 tonne et demi sur

15 mètres, puis pousser une brouette de 280 kg sur 20 mètres.

Les boules de l’Atlas. 4 boules (80, 90, 100, 110 kg), à décoller du sol et poser sur une table (solide, la table). Le pneu. Énorme pneu de tracteur de 350 kg à retourner autant de fois possible en 1 minute.

Le final. Une meule de foin à pousser sur 20 mètres,

une croix en métal de 140 kg à porter sur 20 mètres, un attelage de 900 kg à porter sur 20 mètres. Une boucherie.

de belles baraques mais aussi des carrures beaucoup moins impressionnantes, des mecs là pour déconner, qui vont jouer le jeu, mais qui n’ont pas non plus l’intention de se casser les reins. On le ressentira à la présentation publique des concurrents à la foule. Certains annoncent être venus « surtout pour boire des bières », d’autres espèrent « ne pas se péter une veine du cul », Jérôme est là pour « passer un dimanche tranquille », un des balaises du jour est carrément égaré à la buvette au moment du début officiel de la compet’. On le ressentira pendant les épreuves aussi. Certains n’arriveront à rien et boiront de la gnôle tout l’après-midi, d’autre se tireront la bourre sur les différents travaux d’Hercule de la compet’. Côté public, on vient ici comme on passerait au vide-grenier du coin. Hervé, la trentaine, venu avec sa compagne : «Certains organisent des tournois de pétanque, eux, c’est ça. C’est original, c’est bien ». Roger renchérit : « Ici, on est un peu loin de tout, alors on doit s’arranger pour faire bouger le coin nous-mêmes ». Rémi Bonabé, fils de Jeannine et ancien gagnant, grosse moustache et béret sur la tête, est là pour ravitailler ceux qui le veulent en gnôle fraîche. Son avis de spécialiste nous éclaire : « Nom de Dieu, ce que je peux dire, c’est qu’ils en chient comme des hélices ». Les spectateurs sont massés autour de l’aire de force, qui n’est autre que le terrain de foot du village. Ça crie, ça chambre, ça applaudit, et c’est très impressionné. « Quand ils y arrivent pas, on a envie d’aller les aider ».

Remorque 350 kg, tracteurs et gros pneu.

Malgré l’ambiance bon enfant d’une foule qui a l’air de ne pas se rendre compte qu’elle assiste certainement au plus grand concours de force indépendant du pays, dans l’arène, c’est du lourd. Une ambiance digne d’une énorme kermesse, mais un concours à en faire pâlir les pros. Une petite dizaine de concurrents sont des monstres, tout simplement. Tom, un métis de 2 mètres de large, David, déjà gagnant 2 fois ici-même, une masse bodybuildée, Sylvain, encouragé par sa petite amie qui a l’air d’avoir la même passion pour la salle de muscu que lui, Thibault, le local de l’étape et petit-fils de Jeanine, qui a intérêt à gagner s’il veut pas prendre une trempe, et quelques 2e et 3e lignes de l’ovalie. Les bidons de 50 kg chacun à porter à bout de bras, que toi tu portes sur 4 mètres maximum ? Eh bien David il fait 168 mètres avec. Un joug de 150 kg posé sur les épaules ? Tom fait 87 mètres avec à l’aise. Une remorque de 350 kg à déplacer? Pas de problème, demande à Sylvain. Tom et David plient le game au moment de déplacer le tracteur et une brouette de 280 kg. Que Jordan, un gigantesque gars à crête ne parviendra jamais à bouger. Le pneu de 350 kg finira de départager les costauds, seuls 4 concurrents arriveront à le retourner. « Cette année, c’est une grosse année. Avec des grosses performances », nous précise Samuel, le speaker/ arbitre. Tom ne pense pas que ce soit seulement un truc de bourrin : « c’est 50 % force, 50 % technique ». En effet quelques épreuves sont vicieuses. Les ‘bras en croix’ consiste à tenir le plus longtemps possible les bras tendus avec une

Caca dans la culotte.

« Nom de Dieu, ce que je peux dire, c’est qu’ils en chient comme des hélices » 21


Il devait vraiment ĂŞtre balaise, JĂŠsus.

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bouteille d’eau pleine dans chaque main. Pas facile. À ce jeu-là, c’est Didier, notre catogan, loin d’être le plus balaise en force pure, qui fume tout le monde. Pour les boules de l’Atlas aussi, c’est technar’. Quatre boules de pierre de 90 à 110 kg à décoller et à poser à un mètre du sol. « Y’a pas de prise, c’est lisse. Faut connaître le truc pour arriver à les attraper », nous explique Sylvain. Oui… avant ça, faut être capable de porter 100 kg quand même. Pour certains, l’entraînement, c’est la salle, ou le boulot. Pour d’autres... « L’entraînement ? Ah, ça se passe pas. Je m’entraîne pas du tout. C’est le seul concours que je fais dans l’année. Dans la vie, mon boulot c’est de faire des confitures, je suis artisan ». Sans entraînement, à la cool, Tom gagnera encore le concours cette année, devant David (beaucoup plus entraîné lui mais peut-être moins cool), d’une courte tête. Michaël, le fils de Didier, terminera loin derrière pour sa première expérience. « J’en ai chié, c’est dur, mais je vais revenir ». Son père connaît la raison de son échec relatif : « Il bosse sur les chantiers, mais aujourd’hui les sacs de ciment, ils sont moins lourds qu’avant ». Nico, notre routier, est loin aussi mais là n’est pas le problème, il a bu quelques canons entre potes. Thibault a fini 5ème, sa grand-mère sera fière quand même, va.

Pour le plaisir. Tom n’empochera rien. Pas de

prize money ici. L’homme le plus fort du Morvan, c’est pour la gloire, c’est tout. Tous les concurrents le savent. « Il n’est pas question d’argent, sinon ça pourrirait le truc », nous explique Roger Fouillet. Régis, son fils, qui tient la table de marque toute la journée, enchaîne : « Le concours a été créé par le club de foot du village, tous les bénéfices vont au club, pour acheter des ballons, des chasubles et tous ces trucs-là aux gamins ». Et certainement à remplir la buvette. Samuel, qui est aussi le président dudit club aime cet état d’esprit. « Côté public, ça fait un vrai événement populaire qui marche, et côté concurrents, tout le monde bosse demain, personne n’est là pour se casser ». Le trophée sera remis au vainqueur par Miss Val d’Arroux, c’est dire l’importance de l’événement. Les filles aussi ont eu leur concours parallèle, pendant deux éditions. « Mais on a arrêté, avoue Roger. C’était trop compliqué à organiser, trop long, trop d’épreuves ». On a qu’à faire une année sur deux. Allez Roger… Le mieux, en fait, ce serait d’organiser aussi un concours où il faut porter les verres à la buvette. Du comptoir jusqu’à sa bouche. Parce que là, on a croisé quelques champions qui ont soulevé plusieurs tonnes en une journée. Des athlètes, tout simplement, des grands. // C.W.

Sylvain, 3ème. Tom, vainqueur. David, 2ème.

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Comme les dinosaures, les paradis fiscaux auraient disparu. Pourtant parfois, quand on creuse, on tombe sur un os. Nous avons rencontré deux insiders du offshore, deux repentis qui pendant des années ont siphonné les comptes publics : Antoine Deltour, auditeur pour un énorme cabinet d’expertise comptable au Luxembourg, devenu le symbole des lanceurs d’alerte et Maxime Renahy, juriste dans un cabinet d’avocats de Jersey, devenu un temps agent secret pour la DGSE. Par Martial Ratel et Chablis Winston, à Autun Illustrations : Michael Sallit

Interview réalisée pendant le Festival des histoires vraies à Autun en juillet 2018, en collaboration avec Radio Dijon Campus

CAMPING PARADIS (fiscal) En 2009, le président des contribuables français, Nicolas Sarkozy, le disait haut et fort après un G20 à Londres : « Les paradis fiscaux, le secret bancaire, c’est terminé ». Malgré tout, certains ont continué à gratter, à enquêter derrière la masse obscure des décrets, lois et autres chambres de compensation et sociétés écrans. Et, surprise thaumaturge, ils ont trouvé une forme d’existence par-delà la mort officielle des eden tax. Ça a donné l’affaire Cahuzac, les Panama ou Paradise Papers et le scandale LuxLeaks. Des révélations qui, à leur tour, nous ont offert beaucoup d’affirmations plus ou moins outragées et outrageantes, comme un ancien ministre de la République, Gérard Longuet, justifiant en novembre 2017 l’existence quasi sociale des paradis fiscaux : « Les gens se battent pour

leur pouvoir d’achat (...) c’est tout à fait moral. Si ces centaines de milliards d’euros ne viennent pas dans les caisses de l’État, tant mieux, parce que l’État les gaspille assez largement et dépense de l’argent inutilement». Un prêche syndical de classe du très haut de son fauteuil de sénateur de la Meuse. Sparse, pour soigner ce début de nausée qui vous monte aux lèvres, vous offre un point de vue de l’intérieur de ces pratiques illégales. Maxime Renahy, scandalisé par ce qu’il découvrait et par le cynisme des ultra-riches, prend contact avec la DGSE en 2007. Il devient l’agent secret de Jersey. Il met à jour un grand nombre de montages financiers alors inconnus des services français et, via des révélations sur l’entreprise Samsonite, fait chuter

Mitt Romney, un candidat aux présidentielles américaines, rien de moins. Antoine Deltour aspire, lui, un listing de clients exilés au Luxembourg et livre le tout à un journaliste. En 2012, il devient le lanceur d’alerte de LuxLeaks. On découvre alors que le Luxembourg joue contre les autres états européens en offrant à des entreprises multinationales des rescrits fiscaux, des réducs énormes sur les impôts, des promos encore mieux que Vente-Privée. Après de multiples procès, Antoine Deltour s’en sort avec quasiment les remerciements de la justice luxembourgeoise, le prix du citoyen européen lui est décerné en 2015 par le Parlement européen et l’ONG de lutte contre la corruption Anticor lui remet son « prix Éthique ». De son côté, Maxime Renahy, après avoir rompu avec les services français et l’exil fiscal, conseille dorénavant des associations et des syndicats. Les deux affirment que c’est d’abord en mettant en lumière les pratiques des ultra-riches, en faisant la publicité de leurs pratiques, que l’on pourra stopper ce qu’ils qualifient «d’industrie du vol ». Alors, nous, quand on peut aider...

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M

axime Renahy, d’abord, qu’êtesvous allé faire à Jersey ? Après mes études de droit, le métier d’avocat ne me plaisait plus tant que ça. Comme je voulais apprendre l’anglais, je suis allé à Bristol dans un cabinet de droit, je faisais du para-légal, le travail de secrétariat pour des avocats. Par une avocate de ce cabinet, j’ai eu l’opportunité d’aller à Jersey, pour des clients français. Je ne savais pas trop ce que c’était et j’y suis allé. Je me suis retrouvé dans le plus gros cabinet d’avocats de l’île, Mourant Limited. Au bout de quelques semaines, je me suis rendu compte qu’il y avait en fait d’énormes dossiers assez incroyables qui me passaient devant ou à coté. J’ai assez vite décidé de contacter la DGSE. Et j’ai travaillé avec eux pendant cinq ans. Au bout de quelques semaines, vous vous dites, en voyant les dossiers : « je ne peux pas laisser passer ça ». Oui, et il faut se rappeler qu’en 2007, on n’entendait pas trop parler de ces problèmes d’évasion fiscale. Il n’y avait pas encore eu LuxLeaks ou les Panama Papers. Le grand public n’était pas informé. Et moi, à l’époque, je fais partie du grand public. Il y avait très peu d’informations au cœur du système. C’est aussi pour cette raison que je n’ai pas contacté en premier les médias. Il n’y avait pas encore les lanceurs d’alerte. Antoine Deltour, pourquoi êtesvous allé vous « égarer » au Luxembourg ? Je viens d’une famille plutôt engagée mais à l’époque j’avais choisi mon « emploiabilité ». Je suis né avec le chômage de masse et j’ai été sensibilisé à comment m’insérer socialement. Au Luxembourg, j’étais très bien payé et à l’époque ça comptait énormément pour moi. Ensuite, j’en suis revenu. J’ai pris un virage.

LuxLeaks, c’est la possibilité pour des multinationales de payer très peu d’impôts en Europe grâce à des arrangements avec l’état luxembourgeois. C’est de l’optimisation fiscale pour des grandes entreprises. Les tax ruling. Oui, c’est une interprétation tout à fait « créative » de la

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législation du droit fiscal qui révèle que l’interprétation du droit permet de ne presque pas payer d’impôts. Le Luxembourg et les entreprises disent que c’est tout à fait légal. Et c’est tout le problème : comment faire pour que ça ne le soit plus à l’avenir. C’est pour cela que contrairement à Maxime, je n’ai pas contacté d’autorité, qui m’aurait répondu qu’il n’y avait rien d’illégal. Je ne pouvais travailler qu’avec des journalistes, en informant l’opinion, en suscitant des débats. Le problème est moral... et politique. À l’échelle de l’Union européenne, une commission a été mise sur pied suite à vos révélations. Antoine, est-ce que ça a secoué le cocotier, tout en sachant que le Luxembourg, la Belgique et les Pays-Bas, d’autres paradis fiscaux, sont au cœur des institutions ? J’ai énormément de respect pour le Parlement européen qui anime un débat démocratique à l’échelle du continent, c’est remarquable dans l’idée. Après, la commission Taxe qui s’est intéressée à l’évasion fiscale a mené une enquête approfondie en se donnant beaucoup de moyens. Elle a mis en lumière de nombreuses pratiques pour changer la donne. Malheureusement, le Parlement manque de pouvoir. Le résultat, c’est un rapport très intéressant avec des propositions très ambitieuses, adoptées par le Parlement, mais à part ça on ne peut pas faire grand chose de plus. Ensuite, tout doit passer par la Commission, présidée par JeanClaude Juncker, impliqué par ailleurs dans Luxleaks et, enfin, par les états qui sont souverains et dont il faut l’unanimité sur ces sujets-là. Si Malte, l’Irlande ou

"La finance, ça nous concerne tous ! C'est parce qu'on l'a laissée aux mains d'experts, que la démocratie a abandonné le pouvoir sur la finance, que nous sommes dans cette situation" ANTOINE DELTOUR le Luxembourg s’y opposent, la réforme est rejetée. Il y a un manque de volonté politique sur ces questions. Actuellement, on privilégie la compétitivité des grandes entreprises européennes au détriment de l’égalité devant l’impôt, et donc du consentement. La démocratie a besoin d’écoles et de routes. Rappelons qu’Apple ou Amazon utilisent ces routes pour livrer leurs colis. Pourquoi ne payeraientils pas les routes ?


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Maxime, vous donnez aux services français des circuits financiers savants et totalement inconnus. On a tendance à penser, à cause de la propagande hollywoodienne, que les services secrets connaissent tout. C’est vrai qu’ils ont un potentiel colossal de hacking, d’écoute électromagnétique, mais tout cela est limité et l’analyse de ces informations peut prendre des années. Par contre, quand vous êtes comme moi dans un endroit clef, c’est facile de dire : « À tel endroit, il y a telle chose. » Vous

gagnez en rapidité et la rapidité, c’est un facteur extrêmement important dans l’espionnage. Vous avez mis à jour le montage crapuleux fait par Bain Capital, un fond américain, sur le dos de l’entreprise Samsonite basée dans le nord de la France. Oui, le mécanisme est le suivant : le fonds de pension rachète une entreprise qui ne va pas si mal mais qui a besoin de cash. À partir de là, le fonds fait s’endetter l’entreprise auprès d’elle, elle en devient le banquier. Elle récupère donc les intérêts de la dette. Le fonds est également actionnaire, donc face à l’arrivée de tout ce cash dans l’entreprise, l’actionnaire augmente les dividendes versées. Double enrichissement. L’entreprise en sort exsangue, elle ferme, mais le fonds prend bien soin de conserver les brevets. Le fonds a demandé à l’entreprise d’investir des millions et il a récolté des milliards. Avec ça, c’est le site d’Hénin-Beaumont qui a fermé pour le groupe, la marque Samsonite existe toujours, les valises sont fabriquées en Asie. Et malheureusement, ce qui m’intéressait, c’était de montrer aussi que cette forme de capitalisme brutal et illégal venait nourrir l’extrême-droite en France. Ce n’est peutêtre pas un hasard si à Hénin-Beaumont, Steeve Briois arrive à des scores pareils après que des centaines de salariés aient été virés.

"Nous sommes tous concernés : avec votre banque de détail, si vous avez une assurance vie, elle finit offshore. Si vous allez en centre-villle c'est plein de franchises d'assurances qui sont offshore, votre carte de crédit c'est offshore, votre banque est offshore..." MAXIME RENAHY

Comment se passaient vos contacts avec la DGSE ? Je les voyais une fois toutes les six semaines et il y avait trois critères. D’abord « la

liste de courses » qu’ils me donnaient en me disant : « on a besoin de ça, si tu peux nous le trouver... ». C’était par exemple d’éventuels schémas de rétro commissions étrangères sur des marchés d’armes ou de possibles OPA faites par des fonds étrangers sur des entreprises françaises. Après, il y a avait « la carte blanche » : prendre tout ce que je pouvais car j’avais une position idéale pour avoir accès à certaines infos. Et la troisième, c’était trouver d’éventuels profils, des Français qu’ils pourraient approcher et recruter pour créer un réseau sur Jersey. Lorsque vous proposez vos services, vous le faites par patriotisme et citoyenneté. Et finalement, vous découvrez que vos infos sur les montages financiers illégaux vont servir des entreprises françaises afin que, dans le jeu de la concurrence économique, elles réalisent ellesmêmes ces montages illégaux ! Je me suis rendu compte que le patriotisme que j’avais servait les multinationales françaises, donc le capitalisme mondial. Ça m’a dérangé que ça ne serve pas les salariés français. C’est pour ça en partie que j’ai arrêté de collaborer en 2012. Ce n’est pas un peu dangereux ce jeu d’agent secret pour quelqu’un comme vous, pas spécialement formé ? Il peut vous arriver des bricoles. Oui, mais je n’ai pas d’enfant à charge et je ne suis pas marié, ça limite les risques quand même. Et bon, je pense que c’était un rêve de gosse de servir dans le contre-espionnage. Il y a du hasard mais ce hasard, on se le crée en partie. Il y avait des risques mais c’est de l’espionnage économique, ce n’est pas non plus aller en Russie ou des choses comme ça. Antoine, ça fait quoi d’être devenu une icône des lanceurs d’alerte ? C’est assez absurde de parler d’icône. C’est tout le contraire de ce que j’ai essayé de porter. Il s’agit de pratiques de la finance qui nous nuisent à tous. En tant que citoyen français, contribuable, nous avons un manque à gagner de milliers de milliards. Il faut mettre en lumière ces pratiques opaques. Le rôle de l’icône signifierait que les gens n’ont pas à s’en occuper, que l’icône se charge de ces sujets complexes, que l’affaire est entre

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"Je risquais jusqu'à 10 ans de prison et je m'en sors avec 1 euro de dommages et intérêts." ANTOINE DELTOUR

les mains de spécialistes. Mais il ne faut surtout pas laisser ce sujet aux mains de spécialistes ! La finance, ça nous concerne tous ! C’est parce qu’on l’a laissée aux mains d’experts que la démocratie a abandonné le pouvoir sur la finance, que nous sommes dans cette situation. Elle est compliqué votre vie, votre quotidien, après LuxLeaks ? On peut passer à autre chose ? Je suis un très mauvais exemple des difficultés que peut rencontrer un lanceur d’alerte. J’ai eu mes affaires judiciaires, 4 procès. Je risquais jusqu’à 10 ans de prison et je m’en sors avec 1 euro de dommages et intérêts. Ceux qui souffrent le plus, ce sont ceux qui ne sont pas visibles. La difficulté du lanceur d’alerte, c’est qu’il se met lui-même au ban de la société. On crache dans la soupe. On scie la branche sur laquelle on est assis. On risque donc d’être viré, de ne plus retrouver de travail dans sa branche et d’être sans ressource et induire des problèmes matériels, familiaux. Il y a besoin de visibilité pour avoir le soutien de l’opinion. C’est ce qui m’a sauvé. L’idéal serait d’avoir une protection légale des lanceurs d’alerte. Il y a un début à ça avec la loi Sapin 2. Mais elle couvre pas tout. Et sans oublier que la loi sur le secret des affaires, qui vient de passer, est une loi pour mettre des lanceurs d’alerte devant

les tribunaux. Pour équilibrer cette loi, qui est une retranscription d’une directive européenne, la Commission européenne (présidée par JeanClaude Juncker, ndlr) vient de proposer une directive pour protéger les lanceurs d’alerte. Maxime, vous parlez d’industrie du vol au sujet des paradis fiscaux. D’abord, je ne parle pas d’optimisation fiscale. L’optimisation, en France, ce sont les niches fiscales. Le Luxembourg a déjà été plusieurs fois condamné pour les taxes rolling, et continue car ces états sont au cœur du sytème. Nous payons pour les ultras riches, c’est vrai, mais uniquement parce que comme le dit Antoine Deltour, nous ne voulons pas nous occuper de la finance. Il ne faut pas laisser la finance aux mains des experts. Les gens et le monde associatif doivent s’emparer de ces questions. Il faut mettre, selon moi, en lumière ces pratiques sans mettre un aspect moral. Je pense qu’il faut arriver à être neutre, en étant très factuel.

offshore, votre carte de crédit c’est offshore, votre banque est offshore... On fait quoi pour changer ça ? Je n’ai pas la grande solution mais je pense qu’on peut déjà demander des comptes à l’État français en travaillant avec lui et le monde associatif en partenariat. Il faut aussi travailler avec des journalistes, des lanceurs d’alerte... À mon sens, il faut que ce soit une prise de conscience de travail apolitique pour mettre la lumière sur des agissements en disant : « Ce n’est plus acceptable, c’est illégal ». En plus, ça casse les notions d’entraide et de société. // M.R. et C.W.

Vous nous dites que le offshore, en fait, on y est tous. Nous sommes tous dans les paradis fiscaux. Nous sommes tous concernés : avec votre banque de détail, si vous avez une assurance vie, elle finit offshore. Si vous allez en centre-ville c’est plein de franchises d’assurances qui sont

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Cousin

Uber

Vous les avez forcément remarqués, ces bonhommes verts, turquoises ou orangés. Ils ont assiégé les centres-villes, dont celui de Dijon depuis 2017, afin de vous livrer toutes sortes de ripailles à domicile. Mais qu’est-ce qui poussent les petits jeunes à faire un boulot aussi précaire ? Par Frank Le Tank, à Dijon Photos : Calamity Jane


V

ous êtes désormais tous au fait du développement de ces nouvelles start-up qui ont retourné notre quotidien. Airbnb et Uber en tête, les deux sociétés américaines qui ont littéralement révolutionné notre façon de consommer, notamment via des applications directement implantées à la terminaison de nos doigts, vous savez nos smartphones « greffés » dont nous ne pouvons plus nous passer. Ces applications, sans contraintes pour l’utilisateur, ne sont toutefois pas sans contraintes pour « l’employé » qui n’en est pas vraiment un. Ce statut bâtard a déjà été décrié et a donné lieu à de nombreuses bastons digne d’un combat de catch WWF entre les chauffeurs VTC (Uber en tête) et les taxis parisiens. L’État, peu enclin de prime abord à intervenir dans ces bisbilles, a bien été obligé de légiférer pour réguler ce bazar. Cependant, rien ne laisse à penser que l’État interviendra dans un secteur de livraison à vélo où la concurrence n’existait pas vraiment avant, à moins que d’autres perturbateurs endocriniens (sécurité et code du travail) ne viennent squatter la fête… Mais comment ça marche ? Pour devenir livreur, rien de plus facile, il faut juste être majeur et auto-entrepreneur. Ce sont les conditions sine qua non pour intégrer une flotte de la ‘foodtech’ (pour food technology). À Dijon, on compte ces entreprises sur les doigts d’une tortue ninja : Fetch, Deliveroo et Uber Eats. En France et dans le monde, des dizaines d’autres compagnies se taillent la part du lion : Foodora, Just Eat, Allo Resto, Take it Easy, Stuart, Popchef, j’en passe et des meilleurs. En ce qui concerne le matériel, il faut bien sûr avoir un smartphone (tout se fait via l’application) et un vélo. Ceci dit, la propriété du vélo n’est pas vraiment précisée, c’est d’ailleurs pour cela que l’on voit énormément de livreurs faire des courses dans la capitale des Ducs avec des vélos partagés de type DiviaVélo ou DiviaVélodi. Cela va sans dire que le ratio performance / poids-d’un-âne-mort-dubiclou s’en voit altéré, mais bon, vous savez ce que l’on dit : quand on est à la dèche, on n’est pas regardant. Uber Eats, les plus curieux sur le papier, ajoute deux prérogatives supplémentaires : avoir un casier judiciaire vierge et avoir une carte d’identité européenne. Comme disait l’autre : « nique sa mère la réinsertion ». Des applications ont vu le jour pour simplifier la tâche de tous les allergiques de l’administratif. On peut devenir coursier à vélo slash microentrepreneur en 5 minutes montre en main. Pour info, vous avez le droit de faire un chiffre d’affaires de 70.000€ par an grâce à ce statut, ce qui représente un bon paquet de coups de pédales. Ah, et vous vous ferez taxer à 22% pour cette activité ludo-sportive. Vous n’alliez tout de même pas croire que Uber & Cie allaient payer vos charges, voyons !

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Your shift is gonna come. Comme disait Papy Mougeot : « Il n’y a pas mieux que de mettre les mains dans le cambouis pour y voir plus clair ». Du coup, j’enfourche ma bécane un dimanche aux alentours de 20h30 afin de me faire un shift avec Guillaume qui est coursier depuis les débuts de la livraison à vélo à Dijon, à savoir mai 2017. On se rejoint place du Théâtre, il a son cube Uber Eats sur le dos. C’est un peu le coup de bourre, il a même reçu un mail de la boîte américaine lui indiquant que les gens sont rentrés de vacances et qu’il va y avoir du boulot ! Guillaume, c’est un étudiant-rider, il a un fixie qui pèse rien et a l’habitude de faire du vélo. Il a tout de suite été séduit par le fait d’allier l’utile à l’agréable. D’abord avec Fetch, il a ensuite quitté la start-up française à cause des problèmes de gestion. « Fetch, c’était cool, plus convivial, on avait un super esprit d’équipe, ça m’a fait chier de partir mais l’organisation, c’était pas toujours ça. Avec l’informatique, parfois on attendait une heure dans un restaurant… ». Guillaume avait la bougeotte, besoin de changer d’air, surtout que l’avantage principal d’Uber Eats, c’est la liberté. « Pas besoin de s’inscrire sur un planning la semaine d’avant comme sur Fetch, Deliveroo ou les autres. Avec Uber Eats, tu ‘shiftes’ quand tu veux. Alors bien sûr, il y a plus de concurrence et tu peux attendre une course plus longtemps, mais c’est quand même plus pratique ».

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1000 Bornes. Guillaume reçoit d’ailleurs une notification sur l’appli pour une première course, ça fait environ 3 minutes que l’on s’est activé sur l’appli. Je vous le donne en mille, c’est du McDo, « comme la plupart des livraisons avec Uber Eats ». Même si une cinquantaine de restos sont disponibles sur l’appli, la junkfood est largement majoritaire. Direction donc McDonald’s, rue de la Liberté au cœur de ville dijonnais, là où tous les livreurs zonent pour choper la commande (l’algorithme de l’appli trouve les livreurs les plus près du restaurant). Sauf que cette recrudescence de livreurs qui attendent devant le McDo comme des vautours, ça fait mauvais genre. Guillaume me confie que certains restaurateurs méprisent ouvertement les livreurs, en les faisant attendre dehors, « même en plein hiver ». Un truc assez incompréhensible quand on sait que les mecs font gagner du pognon aux restos (en moyenne 20% du CA en 2017 selon Uber Eats). En attendant, on a récupéré notre colis dans cette jungle de livreurs. En le notifiant à l’appli, cette dernière nous donne la direction à suivre, cela évite de refuser des courses potentiellement trop loin du resto, pas cons les mecs ! Direction place de la Rép’, à quelques encablures du centre-ville. C’est la ride, l’aventure, l’adrénaline, sauf que je crève mon pneu à 40 mètres du départ… Failodrome. Je laisse partir Guillaume pour ne pas lui faire perdre du bif.


Uber Bonnisseur de La Bath. On se retrouvera plus tard au point de départ, place du Théâtre où il me prêtera un vélo de rechange pour la suite. En l’attendant, je me rends compte que la place est blindée de livreurs en tout genre. En un an à peine, le marché a explosé à Dijon et dans toute la France. Alex, livreur à Lyon pendant 3 ans, m’a lui aussi parlé de son activité. « Au début c’était cool, je me suis fait plein de potes, on s’entendait bien avec les restaurateurs, et on gagnait super bien notre vie mais j’ai l’impression que le service s’est dégradé ». Guillaume me le confirme : « On voit de plus en plus de gars à l’arrache avec des vélos tout pourris, ils se comportent mal, ils font ça juste pour la maille ». Fuckin lovin’ it. C’est reparti. Cette fois-ci on bouge près des facs, pour un McDo, again ! Moi qui ai la dalle comme si je sortais de taule, je vais livrer des burgers toute la soirée… Pas le temps de s’apitoyer, on doit livrer place du 30 octobre, à environ 7 minutes à vélo du resto. La livraison se fait sans accroc, et c’est là qu’on voit qu’on n’a absolument aucun contact avec le client. L’échange se résume par un « bonjour, bon appétit ». Guillaume nous l’avoue, c’est ce côté-là qui le saoule chez Uber Eats. « Tu rencontres jamais personne, pas d’entretien d’embauche, pas de city manager, les livreurs ne se calculent pas entre eux, et même pas d’échange avec le client ». D’ailleurs, ces derniers ne prennent même plus le temps de noter les livreurs. « Le truc est vite devenu banal, les gens s’en fichent du moment qu’ils reçoivent leur plat dans un délai raisonnable ». Alex, notre livreur à Lyon, ajoute : « Je ne sais pas si les gens n’ont plus le temps ou s’ils sont devenus trop fainéants, entre Amazon et ses livraisons en un jour et ça, tout va super vite ».

LES ENTREPRISES DE CE SECTEUR, MALGRÉ UNE CROISSANCE TRÈS RAPIDE, ONT DU MAL À TIRER UN PROFIT DE CE BUSINESS, ET SONT OBLIGÉES DE SE RESTRUCTURER.

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Make money, money, money. On arrête de rider pour discuter un peu, Guillaume a bossé une heure, on a fait deux courses et il a gagné à peu près 10 balles. Pas terrible, mais il faut dire que je n’ai pas été d’une aide particulièrement précieuse. Quand il est solo, Guillaume gagne entre 120 et 150 euros par semaine : « je bosse une ou deux fois par semaine et surtout le week-end, c’est plutôt cool en extra en tant qu’étudiant. Je ne pense pas me faire avoir en faisant livreur ». Même constat pour Alex qui en a fait son taf principal pendant près d’un an pour Foodora à Lyon. « Je faisais deux shifts par jour de 11h à 14h et de 18h à 22h30, 6 jours sur 7 ce qui me permettait de me dégager un chiffre d’affaires brut de 3.000 euros pour 200 heures de taf ». Bien sûr, restent les charges à payer soi-même, le vélo à entretenir, l’assurance à payer, la mutuelle... « Avec Foodora, ce qui était cool, c’est qu’il n’y avait pas de langue de bois, ils nous ont prévenus pour les pépins en cas d’accident, pour les arrêts de travail, du coup on a souscrit des trucs à côté pour se protéger. À mon avis Uber Eats s’en fiche pas mal ». Mon deuxième prénom, c’est Danger. On l’a tous constaté, le coursier à vélo est une véritable machine à ulcères pour n’importe quel moniteur d’auto-école. Feu rouge, stop, contre-sens, tout y passe. Une source de danger pour les autres usagers de la route, cependant, une fois encore, les entreprises de la foodtech ont pensé à tout : une responsabilité civile pour les coursiers, bim ! Si un tiers est blessé dans le cadre d’une course, il est protégé, magique ! Et le coursier ? Ah non, lui il prend tout plein fruit… Désolé. Alex me le confie par téléphone : « Des accrochages et autres petits accidents, j’en avais deux ou trois par semaine, plus tu shiftes, plus tu as de risques ». En plus de ces accrochages, on le sait, les automobilistes ne sont pas tendres avec les cyclistes. Guillaume m’a raconté qu’il s’était même fait agresser par des mecs boulevard Clémenceau à Dijon. « Il y avait deux mecs qui s’excitaient en voiture derrière moi car je roulais pas assez vite. Le chauffeur est descendu de sa voiture et m’a bousculé, je l’ai repoussé et son pote est sorti avec une barre de fer. J’ai détalé. Depuis, j’ai une bombe lacrymo sur moi, au cas où, mais c’est plus histoire de me rassurer ». Boys in the hood, qu’on te dit ! Bon, tout n’est pas tout noir pour Guillaume qui me confie tout de même qu’il a rencontré sa copine en faisant des livraisons. « Elle était livreuse chez Uber Eats et elle nous a rejoint chez Fetch, ça fait plus de 6 mois que l’on est ensemble maintenant, on fait même des shifts ensemble parfois », Uber Eats mieux que Tinder !

« TU RENCONTRES JAMAIS PERSONNE, PAS D’ENTRETIEN D’EMBAUCHE, PAS DE CITY MANAGER, LES LIVREURS NE SE CALCULENT PAS ENTRE EUX, ET MÊME PAS D’ÉCHANGE AVEC LE CLIENT » 36


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After the Goldrush. Les lions se partagent un marché hyper concurrentiel avec un principe de fonctionnement plutôt similaire. Cependant, ces derniers temps, ce marché semble évoluer plus rapidement, avec notamment la disparition de certaines forces en puissance. Fetch, qui était un des pionniers du centre-ville, a aujourd’hui disparu de Dijon pour se concentrer sur ses villes-phares de Lorraine. Foodora, leader allemand, quitte quant à lui la France pour se resserrer sur son pays. Les entreprises repensent leur implantation géographique rapidement ; en même temps pas besoin de faire de plans sociaux quand on n’a pas de salariés. Si on pousse la réflexion un peu plus loin, on peut voir également un balai étrange de chaises musicales qui pourrait ressembler à un partage de territoires à l’amiable (ce qui, en vue d’occuper un monopole sur un lieu donné, est interdit). En marge de cette redistribution sur l’échiquier, ne vous étonnez pas de voir arriver d’ici quelques semaines de nouvelles plateformes telles que Stuart, avec des livreurs comme Guillaume, qui vient de rencontrer un city manager à Dijon pour livrer via cette jeune plateforme. « Je vais retrouver un boulot de livreur avec de la nourriture, mais aussi des courses Monoprix, ou encore des chaussures qui reviendraient de chez le cordonnier. Ce qui est cool, c’est que cette société a l’air bien plus sérieuse qu’Uber Eats, j’en ai marre de rider pour eux de toute façon ». Une prise de conscience pour combien de nouvelles recrues chaque jour ? Le futur, que nous réserve-t-il ? Les entreprises de ce secteur, malgré une croissance très rapide, ont du mal à tirer un profit de ce business, et sont obligées de se restructurer. Cependant sur le plan social, pas grand chose de nouveau sous le soleil, à part l’accroissement du nombre de livreurs prêts à se précariser pour gagner (plus). Les Youtubeurs, qui représentent une source d’influence importante pour les ados et jeunes adultes, encensent cette nouvelle profession indépendante. Selon Harry JMG, Youtubeur loquace sur ce sujet, « quand t’es coursier à vélo tu es ton propre boss et pas un esclave comme à McDo ». Cette tendance chez les jeunes, être indépendant et faire du bif, ne devrait malheureusement pas changer avant un bout de temps, même si c’est l’arbre qui cache la forêt. Comment alors tirer la sonnette d’alarme et prévenir les livreurs que les acquis sociaux et le droit du travail qui nous protègent sont bafoués par ces compagnies ? Que leur futur en terme de couverture sociale, de stabilité de l’emploi et de qualité de vie est mise en danger par ce genre de business, si anodin de prime abord. Surtout que de plus en plus de plateformes similaires se développent. Aujourd’hui, on peut avoir un taxi ou un livreur, mais demain on pourra avoir un photographe, un graphiste, un juriste, une femme de ménage et j’en passe (des applications existent déjà, notamment aux Etats-Unis). Des mercenaires capables de vous remplacer à moindre coût. Guillaume me l’a même confié : « On est un peu des robots à qui on envoie des informations ». Terminatacos.

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Des coursiers à vélo ont récemment essayé de taper fort en faisant grève pendant les phases finales de la Coupe du monde, période rêvée pour exploser son chiffre d’affaires. Malgré un impact médiatique certain, cela ne change rien pour les boîtes de la foodtech : les livreurs ne sont pas salariés donc d’autres livreurs, ne se sentant pas concernés par le sujet, ont remplacé les grévistes sur ces shifts juteux. Ce sera donc sûrement à nous, consommateurs, de mettre le holà à ce genre de services, de se lever à nouveau, tant bien que mal, les dimanches avec notre gueule de bois, et de faire notre marche de la honte jusqu’au fast food ou kebab du coin, plutôt que de s’en remettre aux esclaves d’aujourd’hui en se disant que « c’est pas bien grave, ça fait taffer les p’tits jeunes ». À bon entendeur. // F.L.T.


MORVAN FURY ROAD Partie de Mad Max à La Celleen-Morvan, ou comment rester sur ses roues tout en détruisant les autres voitures. Bienvenue dans le chaudron du Fun Car.

Par Clément Guillet, à La Celle-en-Morvan Photos : Alexandre Claass

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Citroën Visa, le must en 2018 pour le fun car.

«

La différence entre le fun car et le stock car, c’est que nous, on en a de plus grosses ». Philippe me mime la taille de ses testicules par-dessus sa combinaison de course. En plein cœur du Morvan, environ 400 personnes sont agglutinées autour d’un gros nuage de poussière. Au milieu, sur une piste de terre en 8, ceinturée par une butte, des voitures bariolées de couleurs foncent à toute berzingue, se frôlent et se percutent jusqu’à ce que la plupart finissent les quatre roues en l’air et que seul le gagnant reste debout. Perché sur un bus, un MC commente la course et encourage les coureurs par leur prénom en chauffant le public. C’est la course de fun car de La Celle-en-Morvan.

Celui qui me fait part de son anatomie, c’est Philippe Guichard, 63 ans, garagiste, président du club local et organisateur de la journée. Cheveux blancs, bedaine joviale et gouaille de Morvandiau, Philippe, c’est le parrain du game. « Par rapport au stock car, on a plus de ferraille et on se croise dans le 8. Alors qu’eux, ils tournent en rond. Nous ici, il faut que ça percute : ça met un peu plus d’adrénaline pour les chauffeurs et pour le spectateur, c’est mieux à regarder. » Au moment où il finit sa phrase, un bruit de choc de tôle résonne et un nuage de poussière noie le croisement du 8 : deux voitures se sont percutées à l’intersection. Des arbitres, répartis autour de la piste, agitent alors des drapeaux pour faire ralentir la course. Soudain, du nuage émerge un jeune coureur qui se jette sur la butte. Deux arbitres le saisissent par la combinaison pour l’aider à la gravir. S’extraire le plus vite possible de sa voiture après s’être fait plier, c’est un peu une question de survie : le risque d’être écrasé par les autres voitures au milieu d’un nuage de poussière est bien réel.


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Pimp my ride. Street art du Jura.45


Essentiellement rural, le fun car est une déclinaison du stock car, en plus percutant. Deux types de voitures s’affrontent sur la piste. Les plus grosses, sont les « voitures vitesse ». Leur but : faire le plus de tours de piste possibles dans les 10 minutes que dure une manche. Avec la possibilité, si nécessaire de casser le train arrière des concurrents. Pour cela, elles sont renforcés de pare-chocs type parebuffle, ce qui fait qu’elles font parfois plus de 2 tonnes. « À part taper dans la portière du chauffeur et sur le train avant, tout est permis », m’explique Philippe en souriant. D’autres voitures plus petites qui roulent en même temps, avec des fanions à l’arrière, sont les « voitures spectacles ». Pour elles, la compétition c’est de faire le plus de tonneaux possibles. Capot ondulé, habitacle défoncé, elles se retrouvent rapidement sur le toit, les quatre roues en l’air. En fonction des points récoltés au bout des quatre manches et un finish, un vainqueur est proclamé dans chaque catégorie…. S’il arrive à finir la course

sur ses roues, « car il y a aussi des points de présentation, ça compte ! », souligne Philippe.

Le bruit et la fureur.

Lui, il concourt pour la vitesse. Six fois vice-champion de France, Philippe Guichard, c’est un peu le Poulidor du fun car. Mais il ne lâche rien. « J’ai fait du 2CV cross, puis de la cascade, puis course sur prairie. Et là, ça va faire 28 ans que je fais du fun car », m’explique le doyen de la course en se préparant pour la prochaine manche. « Hé papi, ça va être ton tour ! » lui crie un jeune conducteur. Le patriarche ferme alors sa combinaison, rajoute des mousses au niveau des épaules et ajuste un tendeur à l’intérieur de l’habitacle. Les portes étant scellées, il se glisse par le parebrise dans l’habitacle de sa R19, enfile son casque et rejoint la piste en faisant pétarader son engin. Dernière recrue du club de La Celle-en-Morvan, Séverine, elle aussi, se prépare. Jeune blonde frêle et timide de 28 ans, elle est pourtant vice-championne de France. Avec sa

Renault Super 5, elle concourt pour la catégorie des tonneaux. « Les roues pliées vers l’intérieur, c’est pour que ça tourne mieux », m’explique-t-elle. Toutes les vitres ont bien sûr été enlevées. À l’intérieur de sa voiture, l’habitacle a été vidé complètement, à l’exception du siège conducteur. Les commandes sont simplifiées au maximum. Du moteur, sont extraits la batterie et le réservoir d’essence, protégés par un bidon et mis au milieu de l’habitacle pour les éviter des chocs. Et le tout est renforcé par des arceaux et des étais, indispensables pour protéger les chauffeurs. « Des voitures comme ça, on les retape pas, ça va à la benne », dit Séverine en pointant sa Super 5 qui a déjà l’habitacle cabossé. « Mais les grosses voitures de vitesse, on a 4 mois pour les refaire l’hiver ».

Employée au Leclerc d’Autun, la course permet à Séverine d’épicer son quotidien à grand coup de vitesse et de tôle ondulées. « Le fun car, c’est une


Marcelo Bielsa.

LE RISQUE D’ETRE ECRASE PAR LES AUTRES VOITURES AU MILIEU D’UN NUAGE DE POUSSIERE EST BIEN REEL passion depuis l’enfance. On venait tout le temps avec mes parents car ils avaient des amis qui pratiquaient. Je m’y suis mise avant même d’avoir le permis. Et puis, j’ai connu mon copain qui était dedans et qui fait de la vitesse. » En 2015, seule fille de la compétition, elle arrive 2e au championnat de France au niveau tonneaux. Ses titres, elle les doit à une bonne technique. « Pour les tonneaux, il faut prendre de la vitesse, monter sur la butte, et donner un bon coup de volant », assure Séverine avant de mettre ses paroles en actes et de rejoindre la piste. Pendant que la course fait rage, un 3e fun cariste du club s’affaire autour de sa voiture afin de la réparer pour la prochaine manche. Emmanuel est le champion de France 2017. Pour lui, le fun car, c’est une passion familiale : ils sont deux frères dans le club et un 3e dans un autre. Tous mordus de mécanique et d’adrénaline. « Ce que j’aime, c’est les sensations que tu éprouves quand tu es dans la voiture : les percussions, les gens qui te frôlent », explique-t-il avec enthousiasme. « Quand on est dans le croisement et que ça passe tout près, parfois même qu’on tape les autres concurrents. On essaye de les sortir, de les percher, les mettre sur le toit. Il faut être le plus rapide », s’enflamme-t-il avec les yeux brillants. Avant de temporiser. « Mais attention, on essaie de calculer pour ne pas se faire de mal non plus. C’est une passion pour s‘amuser avant tout ». Je le regarde s’affairer le nez dans le moteur de sa Renaud 25TXI numéro 96. Casser la voiture est un jeu, mais la retaper fait partie du plaisir. « L’année dernière j’étais champion de France avec celle-là. Mais cette année, la saison a moins bien commencé pour moi. On va essayer de mieux préparer les voitures cet hiver et on verra l’année prochaine. » Autour de lui, les gamins du coin ouvrent de grands yeux admiratifs devant les coureurs et

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La Grand Motte ou La Celle-en-Morvan ?

leurs performances. Une petite de 15 ans m’affirme qu’elle n’attend que d’avoir le permis pour s’y mettre. Tandis que Vincent, 10 ans, arbore fièrement un t-shirt du club. La relève est assurée.

Rodéo mécanique.

Nouvelle manche. Philippe, Séverine et Emmanuel s’élancent à bord de leurs véhicules roses. Chaque club a une couleur différente et chaque voiture son numéro. Certaines arborent des messages comme « ma femme je t’aime ». Mignon. Les habitacles sont de plus en plus enfoncés au fur et à mesure des manches, si bien que certains coureurs ont du mal à garder la tête droite au volant. Avant d’entrer sur la piste, un commissaire contrôle sommairement les véhicules en testant leur capacité de freinage et en s’assurant que les candidats ont leur casque. Et la course est lancée. Les «voitures spectacles » commencent à virevolter et à verser de tous les côtés. Tandis que les «voitures vitesse» se percutent dans un nuage de poussière, certaines se retrouvent rapidement sur le côté ou sur le toit. Le pilote doit alors sortir très vite pour quitter la piste et se mettre à l’abri des autres voitures. Pour limiter les accidents, 7 commissaires sont sur les bords de l’anneau et contrôlent la course à coup de drapeau : jaune pour ralentir, rouge pour stopper la course et noir pour éliminer un coureur. Philippe « papi » Guichard se fait rapidement éjecter de la course avec perte et fracas. Emmanuel est longtemps en tête, pied au plancher, écartant ses concurrents à grands coups de pare-chocs. Il réussit à tracer sa route en évitant quelques tonneaux des autres voitures, jusqu’à

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ce qu’un autre candidat le percute et le mette sur la butte : impossible de repartir. Séverine enchaîne les tonneaux, mais une manœuvre mal calculée et elle se retrouve sur le côté, bloquée. Jusqu’à ce qu’un autre candidat d’un coup de pare-chocs bien placé lui permette de repartir. Un geste fair-play, salué par une salve d’applaudissements.

Le public de ce rodéo mécanique est familial : on vient avec ses gosses et sa grand-mère. Ce sont souvent des proches ou des locaux comme Mireille, 55 ans, venue braver le soleil écrasant de ce mois d’août avec sa chaise et son parasol. Cette commerçante du coin ne loupe jamais une course de fun car. « On les connaît, ça fait du spectacle... Certains arrivent même à faire 25 tonneaux dans la manche » indique-t-elle, admirative, en criant par-dessus le son des moteurs et de la techno des années 90 que crache

'’POUR LES TONNEAUX, IL FAUT PRENDRE DE LA VITESSE, MONTER SUR LA BUTTE, ET DONNER UN BON COUP DE VOLANT’’


la sono de la buvette. Pour les jeunes qui voudraient se lancer dans le game, il faut être clair : le fun car, c’est plus dangereux que le Mölkky. Une équipe médicalisée veille sur la course en cas de besoin. Frédéric est ambulancier sur le site pour la 14e année consécutive. « En général, on a un peu de casse, beaucoup de brûlures, de contusions » détaille-t-il. « Certains n’arrivent même plus à ressortir de l’habitacle ». À côté de lui, un médecin guette les chocs des voitures d’un œil inquiet. « Finalement, il y a peu de choses, vus les pètes qu’ils se prennent », sourit Frédéric. « Moi en tous cas, faudrait me payer cher pour monter là-dedans. Et pour me ressortir, il faudrait un ouvre-boîte ! »

« Si je te croise, je sais que je ne m’arrêterais pas ».

À la fin de la manche, toutes les voitures sont cassées ou bloquées. Le dernier coureur encore sur ses roues finit la course tranquillement tout seul. Lorsque

les arbitres sifflent la fin de la manche, les tracteurs et un manuscopique entrent en action pour redresser les voitures ou ce qu’il en reste. Certaines sont juste bloquées, d’autres ne redémarreront plus. Quelques pare-chocs explosés restent sur le bord de la butte. Puis, une séance d’arrosage permet de limiter la poussière et préparer la manche suivante. « Faut bien qu’ils arrosent », précise Mireille. « Sinon ils ne voient rien et c’est dangereux. Vaut mieux patiner un peu et avoir une bonne visibilité », explique mamie fun car. Seule blessure de la course à déplorer, « Papi » s’est pris un peu trop de poussière dans l’oeil, qu’il essaye de nettoyer avec du sérum physiologique.

Le plan pour s’échapper du Morvan est tatoué sur le dos des spectateurs.

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Mel Gibson rentre tranquillement au garage.

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Philippe ne s’est jamais emmerdé avec le concept de portière.

A LA FIN DE LA MANCHE, TOUTES LES VOITURES SONT CASSEES OU BLOQUEES. LE DERNIER COUREUR ENCORE SUR SES ROUES FINIT LA COURSE TRANQUILLEMENT TOUT SEUL « Ce serait plutôt du sérum bière qu’il te faudrait à toi ! » le chambre Frédéric. Philippe se marre, pas rancunier. « Ils m’ont jeté sur la butte en 4 minutes . J’étais en équilibre, impossible de me sortir de là, fallait attendre le tracteur. J’ai pas insisté, c’est le coup de casser un cardan ». Si, entre concurrents, on ne se fait pas de cadeaux sur la piste, on boit souvent un verre ensemble après la course. En m’offrant une Kro, Philippe me présente un autre vétéran du fun car, Christophe, du club de Chaumont. « Ça va faire presque 30 ans que je cours », raconte celui qui a été 8 fois champion de France. Mais pas cette fois, sa DS s’est bloquée au bout d’une manche : radiateur bouché et surchauffe. « On nettoie en espérant courir pour les dernières manches. » « Papi » propose de lui prêter une voiture. « Je veux bien, mais j’ai peur de tes voitures », lui lâche Christophe avant de m’expliquer sa philosophie du fun car. « Mon plaisir dans la course ? La vitesse. Et éjecter ce qu’il y a devant moi, taper dans le croisement », pose-t-il calmement. « Si on se croise dans le 8, on cherche à cogner ou à déplacer. En première manche, on essaye de se ménager, parce que le problème, c’est que ça casse beaucoup. Mais en 3e ou 4e manche et au finish, on se lâche. Avec l’expérience, on arrive à calculer, on se connaît mieux, on se ménage aussi. Le but, ça reste quand même de s’amuser et donner un beau spectacle », conclue-t-il sagement. Avant de lancer un regard vers « papi » en souriant : « Après, si je croise Philippe dans le 8, je sais que je ne m’arrêterais pas ». // C.G.

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Par Cédric de Montceau, à Montceau Illustrations : Yannick Grossetête

EST

LA VÉRITÉ

AILLEURS

Dans ‘paranormal’, il y a ‘normal’. Aucune raison d’occulter l’occultisme. Le monde d’aujourd’hui est devenu tellement chiant qu’on a décidé de découvrir d’autres horizons en ouvrant de nouvelles fenêtres. Histoire d’aérer et de prendre des vacances par rapport au réel et d’entrevoir la possibilité de l’impossible. On a rencontré un explorateur de l’invisible en Saône-et-Loire, un chasseur d’autres vérités. Un chasseur de fantômes.

On trouve sur Internet un bon nombre de charlatans, de trafiquants de la pensée, d’illusionnistes et d’illuminés du bulbe. Comme pour l’article sur les OVNI (cf. Sparse numéro 22), après avoir épuisé la Toile et pour éviter le vomito de sur-information, on décide de trouver un spécialiste du genre dans notre BFC chère à notre coeur. Bingo ! On en déniche plusieurs mais la plupart sont discrets et refusent de s’exprimer dans les médias (c’est bon signe docteur ?). D’abord difficile à convaincre, un type de Montceau accepte finalement de nous rencontrer à l’apéro… L’homme est méfiant mais on le rassure sur notre approche. Ni acquis à la cause, ni fouille-merde, on veut comprendre pourquoi des gens comme lui se mettent à fond sur ce genre d’activité. Chasser les fantômes comment ça se passe ? Ça se mange ensuite ? On fait un méchoui ? Y’aura de la moutarde cosmique ? De la cancoillotte ectoplasmique ? Du rosé en gravitation ?

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L’homme se fait appeler Kristy. Il est très précis sur son activité, il sait très bien qu’on est juste curieux. Il se lance. « Tu sais dans le domaine du paranormal, il faut faire la part du vrai et du faux ». Parce que sur Internet, il y a à boire et à manger. Kristy a créé un concept : le Ghost Challenger Dream Line, qu’on trouve sur le web. L’idée est de filmer des phénomènes dits inexplicables aux yeux de la science. Sur une soixantaine d’enquêtes, il n’en a mis qu’une seule en ligne. « Sur tous les lieux que j’ai visités, je n’ai eu que très peu de trucs étonnants et inexpliqués à proposer à un public. Mais, dans cette vidéo, il s’est passé des choses vraiment étranges. On me voit provoquer la présence et une radio finit par s’allumer toute seule. Des bruits de pas, des coups dans les murs. On en pense ce qu’on en veut mais je t’assure, on était pas seuls, j’en tremble encore… »



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On sent tout de suite que notre homme est sincère ou alors c’est un excellent comédien. La peur, ça se voit dans les yeux… Quelques bières facilitent l’entrevue et rapidement on a besoin de concret entre deux cacahuètes. On le branche sur le matos : « pour détecter des phénomènes paranormaux ou pour éventuellement valider une présence, j’utilise la transcommunication instrumentale ». Il s’agit d’utiliser les moyens d’aujourd’hui, comme une radio, et d’enregistrer. On essaye de rentrer en contact avec l’aide d’une fréquence et d’un bruit blanc en posant des questions à voix haute. Ensuite on analyse. Certains le font avec des télévisions et des ‘écrans neiges’. Kristy provoque les présences : « c’est ma méthode. On dit que les esprits avec lesquels on communique sont des esprits errants, des esprits qui traînent ici, des esprits matérialistes, des énergies fortement liées à la matière. Il sont attachés à leur demeure. Du coup, je les provoque en leur disant que la maison va être vendue, détruite, qu’il va y avoir une boîte de nuit qui sera construite à la place, ce genre de choses. Bref, un truc qui peut éventuellement les déranger. À partir de ce moment-là, on peut avoir des réponses. » Il nous sort un boitier gris tout simple avec trois leds. Avec ce truc en plastique, on peut donc capter la présence de fantômes ? « C’est un boitier EMF ! » Electro Magnetic Field en anglais, un détecteur de champ magnétique en français. Apparemment on trouve ça facilement sur Amazon ou sur eBay. Décidément, ils sont vraiment trop forts ces chinois ! « Il faut savoir que je ne suis pas médium, je ne ressens rien donc j’utilise du matériel pour mesurer les énergies présentes». Il faut alors éviter d’avoir dans l’environnement proche des appareils électriques qui peuvent dégager des champs magnétiques type portable, four micro-ondes et installation électrique un peu foireuse. « Quand tout me semble suffisamment net, je provoque en demandant s’ils m’entendent. Je leur demande de se manifester, s’ils veulent que je les laisse tranquilles. Je leur demande par exemple de frapper trois fois pour voir s’ils me comprennent. Comme ça, ça évite les malentendus. Parfois, il n’y a aucun bruit mais mon EMF se met quand même dans le rouge trois fois de suite. Coïncidence ? ». Ses récits sont assez étonnants, c’est le moins qu’on puisse dire. Kristy nous raconte comment des objets se mettent en route seuls pendant ses enquêtes ou comment un assistant s’est fait griffer pendant « une investigation un peu poussée » en terme de provocation. Il nous dévoile encore un peu plus sa peur. Le pire, c’est qu’on la ressent. Mais son enthousiasme est bien réel, trop de choses troublantes pour s’arrêter ici manifestement. « Je suis prudent à l’idée de te dévoiler certains évènements, tu dois déjà me prendre pour un fou. Mais moi je sais ce que j’ai vu ».

Pourquoi ne pas admettre que la mort c’est autre chose que rien ?

Kristy « chasse » l’entité surtout par rapport à son vécu, l’envie de trouver des réponses à ses questions. « J’ai vécu des choses fortes par rapport à un décès dans ma famille... j’ai vu... et ça a changé ma vie ». Il se décrit comme « juste un technicien du paranormal, le reste du temps je suis fonctionnaire… Mais voilà, je cherche à comprendre ce qui est venu à moi. Du coup je m’organise des temps d’observation et des temps de recherche ». Par exemple, les hantises résiduelles, c’est par la physique que j’ai compris ça. Quand on va dans des lieux abandonnés, dits hantés, on ressent parfois des présences. En fait, c’est la matière, les murs, les sols, les objets qui captent et enregistrent des choses. Imaginez qu’on tienne énormément à notre maison et qu’on décède demain, il est possible que notre énergie résiduelle demeure dans le lieu. De l’énergie qu’on aurait émise de notre vivant. C’est comme un hologramme qui se répète en boucle et qui subsiste dans la matière. Comme un disque rayé. La matière peut restituer des choses et, plus elle est ancienne, plus elle est potentiellement chargée d’une forme de mémoire énergétique. La matière repasse le film. D’où le fait que certains phénomènes étranges soient recensés dans les constructions faites sur des cimetières ou d’anciens édifices chargés d’histoires et donc d’énergies. « Par contre, il y a également les hantises intelligentes, celles avec lesquelles on communique en les provoquant comme je le fais ou comme le fait le spiritisme. Ils sont dans des mondes parallèles, ils ont la capacité de nous entendre et donc de répondre en agissant sur la matière. C’est ce qu’on appelle les esprits frappeurs. Tout ça, c’est l’au-delà, au-delà de notre perception. Au-delà de notre dimension. Je crois en des mondes qui cohabitent et interfèrent avec le nôtre ». Ah ouais, carrément... Fox Mulder is watching you.

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«

On dit que les esprits avec lesquels on communique sont des esprits errants, des esprits qui trainent ici, des esprits matérialistes, des énergies fortement liées à la matière » Kristy, ghostbuster

Suite à ces mots, on repense immédiatement aux théories de la physique quantique. Oui, ça nous arrive. Quand on mesure une particule de matière, quand on la regarde, elle est bien présente, c’est notre vie au quotidien. Quand on se détourne d’une particule de matière, s’il n’y a personne pour l’observer, elle se transforme en onde, c’est-à-dire en pure potentialité. Elle n’existe plus vraiment, elle est noyée mais elle est partout en même temps. La réalité n’est pas seulement celle que vous voyez (cf. expérience des doubles fentes de Feynman à voir absolument !). Contrairement à la matière, la pensée est souple et ondulatoire. Nous avons le potentiel d’être une onde, d’être partout en même temps. C’est notre connexion à l’univers. Le monde matériel nous rappelle à une réalité unique alors que la physique quantique prouve l’existence de multiples possibilités simultanées. Il pourrait donc y avoir plusieurs mondes, plusieurs dimensions. La vie n’est pas seulement matérielle, elle existe sous forme de pensée, sous forme de conscience dématérialisée. Ça fait flipper. On pourrait vivre ou plus précisément exister en dehors du corps. D’ailleurs les témoignages de NDE (Near Death Expérience) ou d’EMI (Expérience de Mort Imminente) le prouvent. Un médecin français travaille sur le sujet, le docteur Jean-Jacques Charbonnier (médecin réanimateur à la clinique Saint Jean Languedoc). Il déclare que les gens qui ont connu des arrêts cardiaques ont ressenti la sensation de sortie de leur corps, la plupart du temps par le haut du crâne, et qu’ils ont vécu ces fameuses expériences de tunnel et de vision de lumière intense et extraordinaire. Parfois, ils se voient au-dessus de leur propre corps. Ils sont capables de décrire les manoeuvres de réanimation, de décrire ce qu’il se passe dans d’autres pièces ou même à des kilomètres de là.

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« Quand un cerveau cesse de fonctionner, notre électroencéphalogramme est plat. Le cerveau déconnecté des obligations organiques est capable de perception aigüe. Dans les arrêts cardiaques, dans les morts cliniques, dans les anesthésies générales, dans les comas, dans le sommeil, dans l’hypnose, l’activité du cerveau est ralentie et c’est à ce moment-là qu’on a des explosions de conscience ». C’est comme si on disait qu’une voiture va plus vite lorsque le moteur est arrêté. « La science dit que notre cerveau est une glande qui sécrète de la conscience mais si on n’a que ce dogme pour expliquer ces phénomènes, évidemment ça restera inexplicable et éternellement farfelu… ». En fouinant du côté des expériences faites sur les EMI et pour vérifier l’idée d’un monde « clairvoyant » en dehors de la matière, on découvre les travaux étonnants des américains Kenneth Ring (professeur de psychologie) et de Sharon Cooper (docteur en psychologie). Ils font une expérience simple : ils ont sélectionné des aveugles de naissance et des gens qui avaient perdu la vue avant cinq ans, tous ayant vécu une EMI. 90% d’entre eux déclarent clairement s’être vus sur leur lit d’hôpital, avoir vu une lumière intense et avoir visité les lieux en décrivant les scènes. Ils voyaient en dehors de leur réalité matérielle. En dehors de leur réalité corporelle. Si on admet que notre conscience survit après la mort clinique. Si on admet que notre science est certainement encore trop limitée pour expliquer le monde. Si on admet que la vie est une énigme. Pourquoi ne pas admettre que la mort c’est autre chose que rien ? Après cette enquête, on a décidé de se laisser pousser un troisième oeil parce que c’est toujours mieux qu’un furoncle d’hyper-matérialiste. Elargissons notre champ de perception. On ne sait jamais, peut-être que quelqu’un nous observe gentiment en ce moment même alors qu’on est tout nu dans la rédaction en train d’écrire cet article nébuleux en pleine canicule. // C.d.M.


Tout ça c’est l’au-delà. « Au-delà de notre perception. Au-delà de notre dimension. Je crois en des mondes qui cohabitent et interfèrent avec le nôtre. » Kristy, chasseur de fantômes

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Texte et photos : JC Polien, à Gray

GRAY’S ANATOMIE Il y a quelques semaines, Benoît Huot m’avait confié quelques animaux empaillés, chiens, têtes de brocards et chevreuils pour un travail personnel. À cette occasion, il était convenu que je lui rapporte ces pièces et que nous profiterions du moment pour déjeuner ensemble et réaliser quelques photographies avec cet artiste hors du commun. Il y a presque cinquante ans que je n’étais pas retourné à Gray, la ville où je suis né et où j’ai débuté ma scolarité chez les religieux. Pour un athée, c’est un comble. Et dans les combles, chez Benoît, on trouve parfois des animaux morts. Moteur demandé…

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Alcatraz-en-Charollais.

Là c’est tonton René et là, tata Monique.

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Benoît Huot sème le trouble. À travers un râteau quand, enfant, il grattait le sable du Doubs pour attirer le goujon, une espèce de petit poisson. À ne pas confondre avec un goujon, organe mécanique en forme de tige. Certains auteurs considèrent que l’écrou fait partie du goujon, comme c’est le cas pour le boulon. Bref, revenons à nos émotions, nos confusions, nos moutons vivants ou sur le grill, à Gray et ses 5 890 habitants, et la ‘pipetouille’. Je suis perdu dans la bourgade de ma petite enfance, l’artiste me guide par téléphone. Garé non loin de sa maison, je lui indique que j’ai des chiens. Il me répond « tu n’as qu’à les rentrer, nous les mettrons dans la cour ». Il avait oublié que je parlais taxidermie. Aussi je débarque chez lui, un cocker spaniel marron rouané sous le bras gauche et un setter anglais noir anthracite sous le bras droit. Benoît et sa compagne m’ont reçu dans leur antre, à la fois maison de vie, atelier et petit musée. Trophées. Originaire du pays de Montbéliard, étudiant aux BeauxArts de Besançon de 1984 à 1989, Gray est comme « un accident » dans son parcours. À la recherche d’une maison dans la région, ce fut le coup de cœur pour cette vaste demeure datant du dix-septième siècle. Au premier abord, impressionné par ce dédale d’animaux naturalisés et ces trophées de chasse ornés qui jonchent les murs et les étages, ces statues vaudoues à taille humaine, le travail de Benoît m’est apparu comme une œuvre autobiographique, une histoire personnelle d’une enfance à la campagne, relique d’un miroir, du sacré, du ‘qui on est’ et du ‘où on va ?’. Autour d’une table tout de rouge dressée, entre une tête de phacochère qui vous surveille et de coquettes belettes vêtues d’un camaïeu de couleur qui vous regardent, le temps s’arrête alors. L’artiste est humble, généreux, avenant, curieux du parcours et de la vie des autres. Marie, originaire du sud-ouest, mais qui a longtemps vécu au bord de la Méditerranée, nous a préparé une ‘pipetouille’, plat ainsi rebaptisé entre piperade et ratatouille. Benoît est un fou dingue de création, qui ne s’arrête jamais, et qui va vite. Créateur sans relâche, sa compagne se chargeant des relations presse, des médias, de la promo, de l’organisation des expos à venir. Pour exemple,

cette anecdote rapportée récemment par Jean-Phi, un ami brocanteur. Sur un déballage notre Graylois déniche deux crânes humains, moulages de fossiles à échelle x10. Heureux de sa trouvaille, il montre ces derniers au brocanteur. Une paire d’heures plus tard, Jean-Phi l’appelle pour savoir s’il est possible d’en racheter un. Benoît lui répond : « Trop tard, ils sont déjà sur socle ». Décalcomanies. Dans cet univers onirique, sont alors évoqués un récent séjour en Corse chez la princesse Marie-Eugénie, la visite, il y a quelques jours, de collectionneurs belges dont l’artiste imite l’accent à merveille, l’intérieur du ventre de la baleine où se retrouvent Pinocchio et Geppetto, et l’évocation des souvenirs d’enfance du plasticien. L’heure des premières vocations du jeune garçon qui collectionnait les albums Panini de footballeurs, d’une part, mais aussi, et comme par hasard, d’animaux. Puis les planches de décalcomanies de marque Décorama (À la ferme, Le Dernier des mohicans,

Le fameux « curé-sanglier ».

On est impressionné par ce dédale d’animaux naturalisés et ces trophées de chasse ornés qui jonchent les murs et les étages.

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Halte à la fourrure.

L’Invincible armada, Fort Alamo, Ben-Hur pour ne citer qu’eux) dont Benoît parle avec nostalgie, se souvenant qu’il redessinait au plus juste sur des cahiers d’enfant tout ce petit monde en quadrichromie, à quelques pas de la grisaille des usines Peugeot. Sa famille y travaillait depuis trois générations, dans un milieu social qu’il qualifie de difficile. Puis, dans la discussion, sont évoqués son amie canadienne, l’écrivaine Nancy Huston, et son texte inédit sur le Minotaure, Melik Ohanian, le lauréat 2015 du prix Marcel Duchamp, son aversion pour l’art conceptuel qui n’a pas contact avec la matière, ses études aux Beaux-Arts

de Besançon à la fin des années 80, la gravure, Picasso, l’atavisme, l’art abstrait des années cinquante dont il est un fervent défenseur, son travail avec des grenouilles pour le Granit à Belfort dans les années 90 et son CAP de mécanicien. On en revient alors au ‘goujon’, à l’écrou et au boulon. La boucle est alors bouclée. Charogne. Sur la route du retour, j’ai un regret, celui de ne pas lui avoir demandé de me montrer son stock de cornes de vaches qu’il possède au fond de sa propriété, et

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Bambi Cruz.

Il y a mes créations, le rouge, le noir, le vaudou, l’animal empaillé, le faisan, la maison, son architecture, les linteaux en pierre, la niche avec la vierge noire, les antiquités, ma passion pour l’art sacré et Sainte Anne, et, enfin, moi au milieu de tout ça.

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Haïti-sur-Saône.


D&CO.

dont il décrit si bien, à l’heure du dessert, l’odeur pestilentielle de charogne et de mort. Le lendemain, j’envoie quelques images par courriel à l’artiste qui me répond par ses mots : « j’aime tout particulièrement la première, prise dans le hall. Je trouve qu’elle dit tout de moi et de mon univers. Comme tu me l’as précisé, un portrait, pour toi, c’est un décor, un espace, puis une personne qui s’inscrit à l’intérieur de ce cadre. Dans cette photo il y

a mes créations, le rouge, le noir, le vaudou, l’animal empaillé, le faisan, la maison, son architecture (les linteaux en pierre, la niche avec la vierge noire), les antiquités, ma passion pour l’art sacré (Sainte-Anne), le religieux et, enfin, moi au milieu de tout ça, comme un élément de l’ensemble. J’aime beaucoup aussi celle aux deux crânes qui parle de mon rapport à la mort et au questionnement face à l’au-delà ». // J.-C.P.

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Par Martial Ratel et Chablis Winston, à Autun Illustrations : Yannick Grossetête Interview réalisée pendant le Festival des histoires vraies à Autun en juillet 2018, en collaboration avec Radio Dijon Campus

PHILIPPE LE HARDI Philippe Bertrand est bourguignon, du petit village d’Aignay-le-Duc dans le Châtillonnais, au nord de la Côted’Or. Il est tous les jours au micro de France Inter vers 12h30 pour son émission Carnets de campagne et c’est plutôt pour ça qu’il est connu.

En une dizaine d’années, son émission est devenue un rendez-vous incontournable pour des tas d’initiatives locales originales ou innovantes de l’économie sociale et solidaire. L’homme est sympathique et disponible alors on a profité de sa venue à Autun, au Festival des histoires vraies, pour parler de son métier et de son évolution. On a eu la grande chance de l’entendre imiter Johnny Hallyday – c’est là qu’il est le meilleur – ou Philippe Manœuvre. Un talent (?) d’imitateur que nous avons malheureusement dû expurger de cette retranscription.

«

... jamais

demandé ma carte de journaliste et je n’ai pas besoin de ça pour travailler. Si c’est pour avoir une réduction d’impôts, je m’en fous »

Est-ce que tu te considères comme un journaliste ? Non. Et je n’ai jamais eu, jamais demandé ma carte de journaliste et je n’ai pas besoin de ça pour travailler. Si c’est pour avoir une réduction d’impôts, je m’en fous. Si c’est pour rentrer gratos dans les musées, ça ne me correspond pas tout à fait... Je considère que je fais de l’information comme les autres, que je fais du reportage. Et depuis mes débuts, sur Radio Dijon Campus puis à Radio France, j’ai toujours été dans ‘les programmes’, en dehors des journaux

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et des flashs infos. L’avantage, c’est que je n’ai pas d’école, pas de règle, pas de contrainte. Et dans les ‘programmes’ on est toujours obligé de se remettre en cause, on est obligé d’avancer de nouvelles idées d’émissions qui sont négociables ou non. Parfois, on est obligé de mettre ses espoirs sous le mouchoir. Je suis employé à la saison depuis 35 ans ! Et ça étonne beaucoup mais ça se fait en toute liberté, je n’ai jamais eu quelqu’un derrière moi qui me disait : « tu ne dois pas parler de ça, tu ne dois pas recevoir tel invité ». Mais ça c’est un luxe, ce n’est pas la normalité. C’est un luxe ‘service public’ même si j’ai l’impression que les choses vont changer... Mais j’espère alors ne plus être là pour témoigner, que je serai dans mon petit village d’Aignay-le-Duc. Depuis tes débuts sur Radio Dijon Campus, dans les années 1980, à aujourd’hui sur France Inter, comment ton métier de producteur radio a-t-il évolué ? Je ne sais pas car nous, les producteurs, nous ne sommes pas un grand collectif qui s’aime et s’embrasse sur la bouche tous les matins. C’est plutôt une sorte d’usine, dans le bon sens du terme, où l’on est obligé, tous les matins de se remettre à la table. On n’est pas en concurrence ni en compétition mais en revanche on a la tête dans le guidon. L’évolution ? C’est qu’avant nous étions très ‘école publique’, dans tous les sens du terme. Public et privé sont devenus très perméables. Quelqu’un commençait sa carrière au service incendie ou au courrier, passait au standard puis au métier d’assistant et finissait producteur d’émission. Aujourd’hui, les échanges (radios)publiques/(radios)privées sont quasi quotidiens. La comparaison, c’est le mercato du football. Et ça c’est bien ? Ça peut avoir un bon côté dans l’échange, le mouvement... Ça peut avoir un bon côté, ça montre que c’est ouvert. Ce n’est pas non plus l’auberge espagnole. Le mauvais côté, c’est qu’on va prendre quelqu’un de l’extérieur, à un concurrent, en disant « il va nous apporter quelque chose d’extérieur par rapport à son image de marque, son expérience et on va prendre une nouvelle clientèle ». Mais... ça ne fonctionne pas exactement comme ça. On l’a vu dernièrement avec Patrick Cohen partant à Europe 1. Au bout d’un an, ça n’a pas révolutionné, remonté l’antenne.

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Donc ce n’est pas l’étiquette qui va faire la radio, c’est l’homme. Depuis le début des années 2000, tu as sacrément fait évoluer ta carrière : tu as animé des magazines culturels comme Trafic d’influences et puis, tu es passé au sociétal avec Carnets de Campagne. Tu en avais assez des interviews ‘promo’ pour la vente d’un bouquin, d’un spectacle ? Dans la vie, il n’y a pas de hasard. Les choses se décident à partir du moment où tu y contribues. C’est vrai qu’il y avait une lassitude après 2 ans de très forte exposition avec ce magazine de 9h00 à 10h00. D’abord tu n’arrêtes pas de bosser, contrairement à ce que l’on pense. Tu commences à écrire à 07h00 du matin, à 10h00 ton émission est finie mais tu enchaînes par exemple avec une projection de presse dans un autre endroit de Paris. Après, tu lis un bouquin et le soir tu vas voir une pièce de théâtre. Et à un moment donné, tu te dis : « qu’est-ce que je fais là ? ». Tu te retrouves à interviewer les mêmes personnes qui reviennent, et c’est normal. Et ce sont des gens qui sont forcés à faire ça. Tu joues dans un film, tu dois faire la promo. Paradoxalement, dans ton émission Carnets de campagne qui s’intéresse aux initiatives dans les régions, toi tu restes à Paris pour des interviews téléphoniques. Comment on fait pour se tenir au courant ? Il y a un pré-entretien avant la diffusion à l’antenne, et ils le racontent tellement bien de manière passionné. Avant l’entretien, ils me disent qu’ils ont les pétoches, qu’ils ne savent pas quoi dire. Je les rassures en disant « Allez ! Laissez-vous aller ! » et ça se passe très bien, les gens oublient la résonance possible de leurs propos. Ce sont des passionnés, des gens sincères ! Pour ce qui est de la frustration possible de ne pas être sur place, il faut savoir que, indépendamment de l’émission, je circule pas mal pour participer ou animer des tables rondes.

« Aujourd’hui, les échange (radios) publiques/(radios)privées sont quasi quotidiens. La comparaison, c’est le mercato du football. »


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Car de fait, tu es devenu une des voix médiatiques de l’économie sociale et solidaire. Oui, c’est quelque chose que je regrette... pas d’être cette voix mais d’être la seule ! J’aurais bien aimé que d’autres prennent la suite ou fassent un complément. Et pour rebondir sur le début de notre discussion au sujet du journalisme, le journaliste ne va pas s’arrêter sur la bonne fortune d’une société coopérative. Il va se dire que ça n’intéresse personne et il ne va pas forcément être très au courant du fonctionnement d’une telle entreprise. La fonction du journaliste n’est pas forcément de dire « tout va bien » et « les trains sont arrivés à l’heure ». C’est au contraire enquêter sur un dysfonctionnement, enquêter et l’expliquer. Il y a quelques années quelqu’un a inventé l’idée de ‘journalisme de solutions’ mais je ne me retrouve pas plus dans cette idée. Moi, je suis avec des gens qui ont des choses à dire, sur la réalité et le vécu, qu’il semble nécessaire voire vital de transmettre aux autres. Ça ne va pas plus loin que ça !

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Un dernier mot sur le Philippe Bertrand d’Aignayle-Duc, impliqué dans la création du Parc des forêts de Champagne et de Bourgogne. C’est un sacré bazar entre des agriculteurs, des exploitants forestiers pas très chauds pour la création de ce parc et les partisans comme toi. Ça en est où ? Ça en est que c’est parti pour être labellisé l’année prochaine, qu’il y a une opposition qui est un peu trop facilement considérée comme dépassée, j’ai même lu «arriérée». Selon, moi il y a un défaut de communication. Il faut avoir envie de faire bouger les choses et de les changer. Si on ne veut rien changer, on est contre... et c’est bien dommage. // M.R. et C.W.


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4-5-6 oct

13 oct

WEEK-END D’INAUGURATION ET D’OUVERTURE 28 > 30 SEPTEMBRE 2018

19 oct

THÉÂTRE, MUSIQUE, DANSE, EXPO, CINÉ-BRUNCH, DJ SET

20 oct

SAISON

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ESPACE-DES-ARTS.COM

28 oct 1er nov

VISUEL ESPACE DES ARTS RÉNOVÉ © PIERRE HEBBELINCK, PIERRE DE WIT – ATELIER HART BERTELOOT

SATCHIE NORO – SILVAIN OHL / ALEXIS MOATI / ORCHESTRE NATIONAL DE LYON / BENOÎT LAMBERT / LUCIANO / JEAN-CLAUDE GALLOTTA / JEAN-PIERRE VINCENT / FABRICE MELQUIOT – CAMILLE&MANOLO / SARAH MCKENZIE / CYRIL TESTE / FEMI KUTI / SERGE AIMÉ COULIBALY – ROKIA TRAORÉ – FELWINE SARR / LUC SANOU / TATIANA JULIEN / MARINA MASCARELL / PERE FAURA / MARCOS MORAU / ALBAN RICHARD – ARNAUD REBOTINI / AÏCHA M’BAREK – HAFIZ DHAOU / ÉDOUARD SIGNOLET / LAURENT FRÉCHURET / DAKH DAUGHTERS / MOURAD MERZOUKI / NOA / ITSIK ELBAZ / DOMINIQUE PITOISET – XAVIER DURRINGER / GALACTIK ENSEMBLE / MAXIME CONTREPOIS / CIE LES ENCOMBRANTS / IVO VAN HOVE / DEBORAH COLKER / MICHEL DIDYM / LISE VISINAND / JULIE BERÈS / TONY ALLEN / LÉNA BRÉBAN / LA CORDONNERIE / CCN – BALLET DE LORRAINE / ARTHUR PEROLE / TEATRO GIOCO VITA / CIE EN ATTENDANT… / CIE XOUY / THE AMAZING KEYSTONE BIG BAND / JACQUES REBOTIER / PAULINE BUREAU / JÉRÔME THOMAS / MATHIEU BAUER / ÉTIENNE ROCHEFORT / DAVID COLAS – SANTIAGO CODON GRAS / AMALA DIANOR – BBOY JUNIOR / HIPHOP ÉVOLUTION MAYOTTE / STORM / ADRIEN BÉAL / BALLET DE L’OPÉRA DE LYON / ROLAND AUZET / JANN GALLOIS / FLIP FABRIQUE / PHILIPPE DECOUFLÉ

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2 nov 11 nov 17 nov 22 nov

23 nov


psycho test

FAIS-MOI

Par Nicdasse Croasky Illustrations : Hélène Virey

PEUUUR

Ne faites pas les malins. Comme tout le monde, vous avez déjà eu la trouille jusqu’à vous faire dessus et c’est vraiment pas agréable. Mains moites, crise de panique, yeux exorbités, vomissements… Les situations ne manquent pas où votre santé mentale est mise à rude épreuve. Alors dîtesmoi, face à la peur, vous êtes plutôt 007 ou bien 0 tout court ? Et ne me parlez pas de votre mère ! 1. Vous êtes au cinoche, et alors que vous pensiez voir une comédie romantique désopilante, le générique du début est celui d’un film d’horreur, glauque à souhait. Que faites-vous ? A. Vous avalez une poignée de somnifères, histoire de roupiller tout le long du film. Mieux vaut prévenir que guérir. B. Vous faites un scandale : le projectionniste est un con, il s’est trompé de film. Vous faites plus de bruit que les hurlements des acteurs dans le film : vos voisins vous sortent de force, vous pétant la gueule au passage. C. Vous tentez de visionner le film, mais à bout de force au bout de 10 minutes, vous courez aux toilettes rendre votre peur. Encore un cinéma à éviter… D. Comme dans Orange mécanique, vous vous installez des écarteurs d’yeux pour être sûr de tenir pendant les scènes les plus horribles.

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2. La nuit est noire, vous marchez dans la rue à pas pressés. La lueur pâle des lampadaires et le claquement de bottes sur les pavés derrière vous aiguisent vos sens. A. D’une main moite, vous agrippez fermement votre couteau à cran d’arrêt. De l’autre, votre téléphone prêt à composer le 17, ou le 12, à moins que ce soit le 911 ?!?… vous ne savez jamais… tandis que vous cherchez sur internet le bon numéro, le bruit des pas se rapproche inexorab… AAAAAHHHHHHH !!! B. Vous sortez un mégaphone de votre sac, et vous gueulez : #metoo #metoo #balancetonsuiveur, #gaufresnutella !!! C. Vous vous mettez à marcher à reculons, certain de pouvoir voir qui vous suit (malin !). D. Complètement dégrisé(e), vous repensez soudain à votre dernière promenade nocturne quand vous avez suivi cette victime avec cette pointe de plaisir si sadique… 3. Vous devez prendre la parole en public dans une salle de 1.000 personnes lors d’un séminaire professionnel. A. Ça va pas la tête ? B. Vous vous pissez dessus, tout le monde se marre. Votre discours se transforme soudain en stand up comique involontaire. Vous poussez le truc jusqu’au bout, tout en réfléchissant au contenu de votre lettre de démission. C. C’est clair, vous êtes la cible du dernier groupe terroriste à la mode et de son meilleur sniper. Et plus vous parlez, plus vous sentez ce gros point rouge clignoter sur votre front. Vous fuyez en courant vous mettre au vert pour un long moment. D. Les mots restent bloqués en travers de votre gorge, faisant de vous la version low-cost de Jean Dujardin dans The Artist.


4. Jusqu’à quel âge avez-vous pissé au lit ? A. Aujourd’hui encore mais personne ne doit le savoir. B. 15 ans, la nuit de votre premier et dernier rapport sexuel. C. 7 ans : l’âge de raison. D. Jusqu’à 6 mois puis vous avez recyclé vos couches en gilet pare-balles pour vous amuser. 5. Au bar, vous êtes hypnotisé(e) par une créature de rêve accoudée au comptoir. A. Vous allez la voir, mais vos gestes saccadés, vos paroles incohérentes et vos yeux exorbités la terrorisent. Elle fuit en courant pensant avoir à faire à un alien lubrique. B. Vous textotez sans cesse votre psychiatre, attendant sa réponse pour savoir quel comportement adopter. La réponse ne vient malheureusement jamais. C. Vous en parlez à votre meilleur(e) ami(e). Il va la voir pour tâter le terrain et partent ensemble bras dessus, bras dessous. Vous lui devez une fière chandelle. D. Vous lui dites droit dans les yeux, la main sur le cœur, qu’elle vous fait peur mais que vous aimez ça. Ivre, elle rigole et vous paie un verre.

> Maximum de A

Vous êtes flippé solitaire

Peureux un jour, peureux toujours. Alors que le commun des mortels craint généralement la mort, vous êtes flippé de vivre : tout vous effraie. Le bruit d’une allumette qui craque, un rire dans votre dos, un chat noir sur votre route… Le pire est que vous en êtes conscient. Votre instinct de survie vous fait identifier tout ce qui n’est pas vous comme une menace potentielle et vous inspire la peur. Autant que possible, vous vivez seul, habillé en noir, dans un bunker souterrain, avec des rituels millimétrés, évitant ainsi tout risque de perturbation. Après votre mort, vos psychiatres donneront votre nom à la peur de la peur. Une gloire posthume, une gloire quand même. Votre film détesté : La Vie est belle. > Maximum de B

Vous êtes viral et vous refilez votre peur à tout le monde

6. Votre grille est complète pour le grand prix du loto de Perrignysur-l’Ognon : un voyage pension complète pour Ciudad Juarez, près de Mexico, charmante bourgade baignée de soleil mais dont le taux de criminalité est le plus élevé au monde. A. Vous ne dites surtout rien et vous laissez votre voisin gagner. B. Sans réfléchir vous criez victoire, vous rendant compte trop tard que c’est le début de grosses emmerdes… en plus vous êtes allergique au guacamole ! C. Vous pensez à votre meilleur ennemi de bureau pour vous accompagner, si jeune et dynamique et qui rêve de prendre votre place. Pas question de crever tout seul. D. Votre gilet pare-balles reçu en cadeau de Noël va enfin servir. C’est déjà ça.

Votre dernier bilan de compétences révèle que vous avez besoin de communiquer, et que vous êtes peureux, ce qui complique votre recherche d’emploi. 500 € foutus en l’air si vous voulez mon avis. Dès que vous ressentez le moindre danger (et votre échelle personnelle est la plus sensible de France), vous prévenez tout le monde. Les conséquences peuvent être dramatiques comme la dernière fois où vous avez hurlé dans un métro bondé parce que l’alarme de sécurité vous semblait désactivée. Bilan : 4 morts et 150 blessés. Allez-y mollo… Votre film préféré : Contagion.

7. Une pandémie de grippe du poulet sévit, menaçant la population mondiale qui doit se faire vacciner en urgence. A. Vous coupez la clim’ dans votre bunker, espérant échapper à la pandémie. B. Vous rejoignez une secte apocalyptique et vous incendiez tous les KFC de la ville. C. Vous avez une trouille bleue des aiguilles donc vous avalez le vaccin avec un bon rhum arrangé. Noyer sa peur dans l’alcool, génial ! D. Vous vous renseignez sur les effets secondaires du vaccin, espérant qu’il provoque des trips hallucinogènes de qualité. Marre de la chimie aseptisée.

Vous êtes peureux et vous le cachez bien !

8. Sur la route des vacances et pour ne pas faire comme tout le monde, vous choisissez un itinéraire bis. Un peu trop peut-être. Alors que vous roulez dans une forêt sinistre, vos pneus avant crèvent subitement. Au loin, vous voyez un homme avec une hache s’approcher d’un pas dodelinant vers votre véhicule. A. Sans vous en rendre compte, vous étiez arrivé. Et c’est votre père qui vient vers vous avec son sens de l’accueil si particulier. #francisheaulmestyle. B. Vous accélérez, un mauvais coup de volant et vous voilà dans la forêt, tuant au passage 4 sangliers, 2 biches et un garenne, tout ce sang… 30 millions d’amis porte plainte contre vous pour braconnage ! C. Vous espérez voir débouler un ours ou une meute de loup qui vous sauverait, même s’ils vous font très peur aussi. D. Vous aviez prévu le coup ayant vu Détour mortel 1, 2 et 3. Vous tirez sur tout ce qui bouge à la sulfateuse.

> Maximum de C

Un peu comme les alcooliques qui planquent leurs bouteilles un peu partout à la maison, vous avez vos stratégies dès qu’un début de feu rouge s’allume sous votre crâne et signifiant : danger, peur, MORT ! Mais jamais à une contradiction près, vous êtes également très sociable, multipliant ainsi les risques de situations crispantes et flippantes. Avec les niveaux de stress auxquels vous vous soumettez, les bookmakers anglais mettent votre infarctus au pari à la cote de 100 contre 1. Votre film préféré : La situation est grave mais pas désespérée. > Maximum de D

Vous en avez une plus grosse que la mort

Il y a deux catégories de gens dans la vie : ceux qui ont peur et ceux qui font peur. Vous faites résolument partie de la deuxième. Inconscient du danger depuis l’âge de 6 mois, vous n’avez jamais réellement compris cette manie des gens de crier dès qu’il y a un incendie, ou qu’un ours sauvage fonce dans leur direction. Quand vous avez peur, vous vous chargez d’adrénaline. Et, contrairement à ces 99,999% de flipettes qui vous entourent, quand un tsunami déboule sur la plage et que tout le monde fuit, vous prenez votre surf, la Go pro, et c’est parti mon kiki. Votre film préféré : Le Salaire de la peur.

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avocats et associés

Peut-on interdire les pauvres en centre-ville comme l’a fait si élégamment le maire de Besançon pendant l’été ? Bonjour Maître Fougnart. Ma femme et moi, nous tenons un commerce d’articles ‘pour la durée du couple’ dans une commune touristique de Côte-d’Or et nous en sommes fiers. Depuis l’arrêté ‘anti-mendicité’ de la Mairie de Besançon, des groupes de Bisontins viennent mendier au centre-ville avec des Brunos du Jura le plus souvent sans laisse. La Ville laisse ce phénomène se développer sans réaction. La présence de cette population, souvent sale et bruyante, dissuade les touristes asiatiques de franchir les portes de mon commerce. Vu le succès des mesures prises à Besançon, le maire de ma commune pourrait-il prendre un arrêté anti-mendicité permettant de déloger ces individus et de les inciter à travailler ou à retourner d’où ils viennent ? Gilles, 56 ans Maître Fougnard vous répond. Cher Monsieur, depuis l’entrée en vigueur du nouveau code pénal au début des années 1990, les mendiants ne sont plus des délinquants. Depuis le 1er mars 1994, la mendicité est donc légale. Sauf en cas de caractère menaçant, ou violent, prévu et réprimé par l’article 312-1 du code pénal. L’exploitation de la mendicité est également un délit réprimé à l’article 225-12-5 du code pénal. Cependant, quand bien même la mendicité libre et paisible est légale, le maire est le garant de la libre circulation dans les espaces publics, de la tranquillité, de la sûreté, de la salubrité et du bon ordre dans les lieux publics. C’est au nom de cette mission qu’il est autorisé à prendre des arrêtés municipaux interdisant certains comportements ou activités. Les mesures prises doivent être proportionnées et limitées dans le temps et l’espace. C’est à ce titre que le maire de Besançon a interdit, du 9 juillet 2018 au 30 septembre suivant et du 23 novembre 2018 au 31 décembre suivant, et dans un périmètre délimité correspondant au centre de la ville de Besançon : la consommation d’alcool, la mendicité, accompagnée ou non d’animaux, les regroupements, ainsi que la station assise ou allongée lorsqu’elle constitue une entrave à la circulation publique. Bien entendu, cet arrêté a fait l’objet de plusieurs recours de militants et associations impliqués dans la lutte contre la pauvreté et l’exclusion des sans-abri. Par une ordonnance du 29 août dernier, le tribunal administratif a rejeté la demande de suspension de l’arrêté d’un de ces militants qui soutenait que l’arrêté constituait une violation du principe constitutionnel de fraternité. Le tribunal a considéré que du

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principe de fraternité découlait la liberté fondamentale d’aider autrui dans un but humanitaire, mais que cette liberté ne revêtait toutefois pas un caractère général et absolu et devait être conciliée, notamment, avec l’objectif de préservation de l’ordre public. Bim ! Le tribunal a considéré que l’interdiction était limitée dès lors qu’elle ne concernait qu’une petite partie du territoire de Besançon, pour un temps limité correspondant aux périodes où le centre-ville est le plus fréquenté et qu’elle n’avait pas pour effet d’exclure, en renvoyant à l’extrême périphérie de la ville, les personnes concernées, et encore moins de les obliger à la quitter. Le tribunal a également considéré que l’arrêté attaqué ne rendait pas plus difficile le travail des associations et organismes en charge de l’aide aux plus démunis, ni qu’il privait les particuliers de leur liberté d’aider les personnes en détresse. Le tribunal a également relevé que les nombreuses mains-courantes de police ainsi que les courriers adressés à ses services par des riverains et commerçants attestaient de la réalité des troubles à l’ordre public. Le tribunal en a conclu que l’atteinte portée par l’arrêté du maire à la liberté d’aider autrui dans un but humanitaire n’était ni suffisamment grave, ni manifestement illégale. En gros, c’est pas très fraternel, voire franchement odieux, mais c’est légal. Donc ça peut passer dans d’autres villes, à l’aise. A fortiori dans des villes touristiques de Côte-d’Or qui sont loin d’avoir la réputation qu’avait Besançon, avant cet incident, de ville tolérante et accueillante. Mais les commerçants sont contents... Si vous ne savez pas comment emmerder le monde, n’hésitez pas, nous pouvons vous y aider : posez votre question, nous vous y répondons (ou pas).


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La rĂŠunion





Par Cédric de Montceau Illustrations : Mr. Choubi

hdroscopitone L’horoscope de ce magazine est à la hauteur des sciences parallèles ancestrales. On n’en a plus rien à foutre ma gueule, on a Facebook, Instagram, Snapchat, Amazon et Google. Les mayas c’était vraiment des boloss, les Égyptiens on s’en balek de ouf. La vraie connexion à l’univers, c’est la 4G frère !

C’est avec un signe de cet acabit qu’on finit coulé dans le ciment d’un centre social fraîchement subventionné. Tout ça parce que vous êtes incapable de garder le silence en slip et en chaussettes, attaché au radiateur du commissariat. Chance : ce n’est pas parce qu’une tartine est au beurre allégé qu’elle tombe du bon côté.

Evitez de croiser votre reflet dans le miroir, vous usez la glace ! Inutile de tenter de vous réfléchir, personne ne mérite de comprendre votre dangereuse personnalité. Même pas vous. Santé : les différentes facettes de votre personnalité sont égales à l’hypoténuse de votre égo.

FESTIVAL DE DANSE

INSTANCES

15 > 21 NOV. 2018

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ESPACE-DES-ARTS.COM

SOULÈVEMENT © HERVÉ GOLUZA

Il n’est pas raisonnable d’apporter du travail à la maison. Dans un souci d’intégration, il est préférable d’apporter de l’ennui au bureau. C’est la rentrée, soyez dépressif ou vous allez encore vous faire remarquer par votre manager. Travail : faites semblant, comme vos semblables.

LUC SANOU SERGE AIMÉ COULIBALY / ROKIA TRAORÉ / FELWINE SARR TATIANA JULIEN MARINA MASCARELL PERE FAURA MARCOS MORAU HAFIZ DHAOU / AÏCHA M’BAREK ALBAN RICHARD / ARNAUD REBOTINI


13 Dec 2016 VISUEL CRÉÉ PAR L’ÉTUDIANTE ÉMILIE QRcode FERREIRA À L’ISSUE D’UN

Contre-Courant CONCOURS INTERNE À L’ÉCOLE NATIONALE D’ART Url du QRcodeSUPÉRIEURE : https://www.dijon.fr/Dijon-au-quotidien/Etudier/Carte-culture-et DE DIJON (emilieferreiradesign@gmail.com).

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Avec la participation de Chenôve • Chevigny-Saint-Sauveur Fontaine-lès-Dijon • Longvic • Marsannay-la-Côte Quetigny • Saint-Apollinaire • Talant 13 Dec 2016 - Contre-Courant - http://www.contre-ourant.com Contre-Courant 12, rue Georges Bizot - 44300 Nantes - France Tél. : 02 40 40 40 27 - contact@contre-courant.com


courrier des lecteurs

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Salut ! Je me cherche un plan tranquille en province histoire de me refaire la cerise. Je suis spécialiste en sécurité, infiltration, tabassage de jeunes ouaouaches à terre. J’ai travaillé pour les plus grands, mais suite à une petite méprise, je me vois contraint de me délocaliser. Vous avez un offre à me faire ? P.S : J’ai l’habitude de travailler avec logement et voiture de fonction équipée d’un gyrophare. Alexandre, Paris (75)

réponse de la rédaction

‘Province’, ça ne se dit plus. C’est méprisant. Certains disent ‘en région’, mais c’est un peu sale aussi. On est déjà très en sécurité ici. Il ne faut pas croire la presse locale qui se nourrit de vilains faits divers. Reste chez toi Alexandre, et dégonfle.

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Bonjour madame, couverture de votr e dernier La dame en maillot de bain en ? Elle s’appelle comment ? magazine, vou s la connais sez der. m’ai de ci Vou s avez son 06 ? Mer Raymond, Tonnerre (89)

réponse de la rédaction C’est ma mère. Dégage.

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Salut grand observatoire de la société, toi qui connais tout aux rapports humains, laisse-moi te poser une question : j’ai rencontré une fille en vacances, au Cap Ferret. Une aventure passionnée et torride qui s’est terminée fin août. Depuis que nous nous sommes quittés, j’ai mal. Je suis triste et ça me brûle... Qu’est-ce que c’est ? Matisse, Morteau (25)

réponse de la rédaction

Déjà félicitations ! Le Cap Ferret, c’est très classe comme destination. C’est l’endroit de France où j’ai rencontré le plus de tas de gros connards pleins aux as. Mais, bref, pour ton problème, ça n’est qu’une petite chtouille. Ça se soigne très bien avec des antibiotiques, va consulter, fais vérifier que t’as pas une petite chlamydiose en même temps, c’est souvent lié. Et mets des capotes quand tu ne connais pas la fille ! C’est le B-a-ba, bordel !

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Salut les mecs, je reviens de vacances et je suis outrée. Qu’est-ce qu’on peut faire contre les mecs qui roulent sur la file du milieu sur l’autoroute ? Ces enfoirés se calent là pour ne pas avoir à déboiter de la file de droite. Ils emmerdent tout le monde et c’est très dangereux. Peut-on leur faire très mal ? Géraldine, Poligny (39)

réponse de la rédaction

Le problème pour toi, Geraldine, c’est qu’on n’a pas le droit de leur tirer dessus ou de les sortir de leur bagnole pour les tabasser, ce qui peut a priori sembler normal. Et il y a très peu de chance de les faire condamner à de la prison ferme pour une si petite infraction, même si elle emmerde tout le monde. Mais tu as raison, il faut trouver une solution pour que ce genre de fumier qui nous pourrit la route puisse être puni, car je rappelle quand même qu’une bagnole sur l’autoroute, c’est comme une arme chargée, c’est extrêmement dangereux. Mon conseil : fais (ou demande à un de tes covoitureurs de faire) tes besoins dans une bouteille, et jette lui le contenu sur le pare-brise, ou au visage. Si tu ne veux pas le tuer, et je suis sûr que te ne veux pas, il est plutôt conseillé de le faire à l’arrêt, sur une aire d’autoroute, après l’avoir suivi. Une bonne douche de pipi, ça fait réfléchir. Voilà. Quand on peut rendre service...

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Bonjour la soit disan t presse libre. Dites, si le ma ga zine est gratuit, pourquoi fau t-il payer pour s’a bo nner ? Ah ! Ah ! Tu t’y attendais pa s à celle -là ! Brice, Beaune (21)

réponse de la rédaction

Bien vu, l’aveugle ! Tu dois être un sacré rat dans la vie, toi. Mais quand on habite Beaune, le rapport au pognon c’est particulier, hein ? Je te répondrais rapidement que, d’une part, les timbres ne sont pas gratuits et que, d’autre part, la plupart des gens qui s’abonnent ne vivent pas dans les villes où le magazine est distribué, donc ne peuvent pas le chopper gratuit. Ensuite, même s’il est gratuit, faire ce magazine coûte de l’argent. Donc pour te livrer un bijou comme Sparse, il faut bien qu’on se débrouille... Vendre quelques pubs, quelques prestations, un peu de drogue et des abonnements. Tu ne peux pas tout avoir gratuitement, Brice. Quand il s’agit d’acheter un SUV à crédit, là, on ne se plaint plus que ce ne soit pas gratuit, hein ? Espèce de pince.

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2 Hello de Lu ! Avec mes potes on est très inquiets. Ça fait déjà , biennal C’est ? 2018 en ans. Vous refaites les Sparse Awards ? hein c’est ça Laurence, Le Creusot (71)

réponse de la rédaction

« Hello de Lu » ?!? Wahou ! Ça faisait longtemps que je l’avais pas entendue celle-là. Pour la peine, tu gagnes un sac banane Sparse. Pour en finir avec ce suspense insoutenable, oui, on refait les Sparse Awards. L’édition 2018 sera une cérémonie grandiose, un show incroyable, une production hollywoodienne, des trophées en pagaille pour la crème de la BFC qui bouge, une tension sexuelle palpable et un maximum de corruption. Ça se passe le 14 décembre au Théâtre mansart. On vous en dit plus très vite sur les internètes.

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from helle Dans chaque numéro, carte blanche au photographe Raphaël Helle

C’était il y a 10 ans au pied des écrans géants à Chicago, la ville de Barack Obama. État après état, on annonce les résultats. Ce soir du 4 novembre 2008 le rêve de Martin Luther King sera réalisé, un noir sera élu à la présidence de la plus puissante démocratie du monde.




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