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DVL


Phil Zwijsen

Plusieurs méthodes peuvent être utilisées pour virer une bande de skateurs d’un spot. Aujourd’hui, nous avons droit au gars qui gueule beaucoup pour une personne qui n’a pas grand chose à dire… Ça reste un mystère, mais souvent, ces personnes désireuses de nous faire déguerpir s’adressent au photographe plutôt qu’au responsable direct des méfaits. Le gars sort un appareil photo qu’il pointe en ma direction, je lui rends la pareille avec le mien et ça suffit pour lui faire abandonner sa mission du jour. Le calme revient et Phil peut tranquillement rentrer son wallride melon…


Backside lipslide

Roger Ferrero

"La première

C’est Rick MacCrank qui a trouvé le nom de votre crew, les Trunk Boyz, c’est bien ça ? Oui, c’était lors d’une tournée en Amérique Centrale. On était agglutiné dans un van, serré comme des sardines. J’étais dans le coffre avec Cory Kennedy, Raven et Elijah et McCrank a commencé à dire : “We’re all in the trunk. Trunk style. Trunk Boyz !”. Et puis Raven a hurlé “Trunk Boyz !” et c’est parti de là…

Et qui a inventé le signe TB avec les mains que l’on peut voir dans la vidéo ? C’est Raven qui l’a trouvé, il était à bloc : “Regardez signe de gang, c’est parfait board Girl que j’ai eue a fini ce pour nous !”. C’est ce petit écrasée sous une voiture…” geste qui a tout déclenché… Qui fait partie des Trunk Boyz aujourd’hui ? Il y a donc Elijah, Vincent, Brian Anderson, Cory Kennedy, McCrank, Kenny [Anderson], moi… Tous ceux qui étaient à cette tournée en Amérique Centrale. [Sam] Smythe et Chico [Brenes] font partie du truc aussi. Et vous acceptez des nouveaux membres ? Bien sûr ! Tous ceux qui veulent se rallier à notre cause sont les bienvenus !

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Il y a une sorte de bizutage ou un rite initiatique ? Non, il faut juste être prêt à faire du skate, faire la fête et s’entasser dans un coffre ! Pour l’instant, ce sont les exigences de base. On doit sortir une série de t-shirts Lakai “TB” ainsi que plusieurs coloris spéciaux de chaussures, un pour Vincent, un pour Raven et un pour moi. On est à fond ! Bon, on va un peu revenir aux questions classiques… Comment as-tu commencé à t’intéresser au skate ? J’avais 8 ou 9 ans et j’ai vu du skate à la télé, j’ai trouvé ça cool et j’ai voulu en faire. Il me semble que c’était Tony Hawk aux X-Games… Juste après ça, j’ai vu des gars skater dans une rue de mon quartier, je me suis dit que c’était le truc le plus cool que je n’avais jamais vu et je m’y suis mis ! [rires] Tu es né à Los Angeles… C’est là que tu as grandi aussi, c’est bien ça ? Oui voilà, je suis né dans la vallée de San Fernando, puis j’ai vécu pendant quelque temps à Huntington Park avant de revenir dans la vallée. Je skatais souvent dans une école, pas très loin de chez moi, l’endroit s’appelait Madison. Il y avait tout le temps des gars qui skataient là-bas, c’était assez pratique pour rencontrer du monde. Je n’ai jamais trop traîné dans les skateparks…


Frontside hurricane Roger Ferrero

Tu avais quel âge quand tu as rencontré Elijah ? J’étais jeune, je devais avoir 13 ans… J’avais l’habitude d’aller à West LA pour skater avec un pote du skateshop Nine Star. Il skatait avec Elijah de temps en temps et parfois on prenait le bus ensemble pour aller à Century City ou pour descendre à Santa Monica Beach. Et puis Elijah s’est fait sponsorisé par le shop et est entré dans le crew par la même occasion.

Et tu as vite eu un goût prononcé pour Girl et Chocolate… Oui, j’ai toujours été fan de ces marques. La première board Girl que j’ai eue a fini écrasée sous une voiture… J’avais le cœur brisé ! [rires] Je me souviens qu’avec Elijah, on regardait la Yeah Right, on était à bloc des interludes entre chaque part… À force de la regarder en boucle, on a fini par connaître la vidéo par cœur…

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Un récit alcoolisé et des photographies de Kévin Métallier.


Amateurs d’art abstrait, de poésie lyrique, de physique quantique et de sensations extrêmes, soyez les bienvenus dans ces quelques pages. Nixon, (pas Richard, le 37ème président américain qui est décédé en 94 à New York des suites d’une attaque cérébrale, mais bel et bien la marque de tocantes) est heureux de vous présenter « HAPPY F*KNG TRIP », sa première expédition de planche à roulettes sur le vieux continent. Une super production où rien n’a été laissé au hasard, où tout a été mis en œuvre pour vous garantir un show époustouflant et des cascades plus folles les unes que les autres. Un budget colossal, des destinations paradisiaques, des spots inédits, des moyens techniques sans précédent, le tout associé à un casting digne des plus belles productions hollywoodiennes… Encore plus fort que Taïg Khris (qui a passé toute une après-midi à se prendre des boîtes, en se jetant en rollers depuis le premier étage de la Tour Eiffel), plus fou que Felix Baumgartner (pour les ermites, c’est l’autre taré qui s’est fait un petit saut de l’ange depuis la stratosphère…) et plus rapide qu’Usain Bolt (si si, même en switch nosemanual les yeux bandés, les gars du team sont plus rapides que le Jamaïcain), bref, en un mot comme en mille, préparez-vous à en prendre plein les mirettes, ça va envoyer sec ! Voici donc, en exclusivité mondiale dolby surround, les premières images 100% biodégradables et réalisées sans trucages, de ce joyeux p*tain de voyage… PS : Désolé pour les fans d’art étrange, de rimes à la con et de théories physiques nées au 20 ème siècle et auxquelles on entrave que dalle, c’était de la publicité mensongère. Vous risquez peutêtre de rester un peu sur votre faim, mais bon, c’est la crise là, et la production m’a demandé de ratisser large en terme de public. Sur ce, sans rancune et à la prochaine… PS2 : Comme ces images sensationnelles parlent d’elles-mêmes, et que, de surcroît, je n’ai pas grand chose de passionnant à vous raconter (j’ai mis le paquet dans l’intro…), je vais me contenter de vous donner quelques informations temporelles en guise de légendes, parce que tout est une question de temps, et encore plus pendant une tournée organisée par une marque de montres.


Backside heelflip

Bon, commençons par le commencement. Tu es né en Colombie donc parle-nous un peu de ton enfance là-bas et de ton arrivée en France… Je suis né à Cali, une ville située à la fin de la Cordillère des Andes. J’ai vécu en Colombie jusqu’à mes 6 ans et j’ai beaucoup bougé avec mes parents dans plusieurs grandes villes du pays avant d’aller vivre à Bogota, la capitale. C’est à ce moment-là que mes parents ont décidé de venir s’installer en France.

Pourquoi un tel changement radical de vie ? C’est surtout pour des raisons de sécurité. Il faut savoir que la Colombie est un pays où la violence est omniprésente, particulièrement dans les années 90. Mes parents occupaient des postes à hautes responsabilités dans de grandes entreprises et ça devenait un peu chaud pour eux… Je me souviens qu’un des potes de mon père s’était fait kidnapper par des truands et je crois que c’est ça qui a déclenché notre exil. Ma mère ne voulait plus rester vivre là-bas et, comme nous avions un peu de famille en France, mon père a préféré que l’on vienne s’installer à Paris. C’est vraiment pour votre sécurité que vous avez quitté la Colombie ? Oui, c’est la raison principale, mais il n’y avait pas que ça. Le fait de grandir à Bogota m’aurait obligé à suivre mes études dans des écoles privées très préservées de tout ça, où tu ne peux pas sortir dans la rue, tout est surveillé et ultra protégé et ma mère était radicalement contre ça. Tu ne vis pas dans la vraie vie… Du coup, à l’âge de 6 ans tu débarques à Paris avec tes parents… Exact, dans le 18ème arrondissement .

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Gros changement, gros choc culturel j’imagine… Oui, mais à 6 ans, c’est en fait assez facile à gérer. Tu ne réalises pas bien ce qu’il se passe, tu commences à peine à avoir conscience de qui tu es et de ce que tu fais... Après, c’était quand même un grand changement dans ma vie d’enfant. Je me rappelle de la première fois où je suis arrivé en classe à l’école et que la maîtresse m’a demandé mon nom, je ne parlais pas un mot de français et je donne mon nom : “Juan Estéban Saavedra”, et là tout le monde se met à rire, personne ne comprenait rien… Du coup j’ai rapidement abandonné “Estéban” pour me faire appeler Juan, c’était plus simple. Et tu es resté vivre à Paris jusqu’à quel âge ? En fait, je n’ai passé qu’une année à Paris. Ensuite on a déménagé en banlieue dans le 78, à Fontenay Le Fleuri, pas loin de Versailles, et j’y ai grandi jusqu’à mes 13 ans. C’était vraiment la campagne et c’était beaucoup plus cool pour moi, il y avait la forêt, c’était une meilleure qualité de vie qu’à Paris même. En plus, il y avait un skatepark pas loin de chez moi…


Frontside stalefish

Donc tu as commencé le skate dans ce petit bled de banlieue ? Oui exact, j’ai commencé le skate là-bas juste avant d’avoir 7 ans. C’est une histoire assez drôle d’ailleurs : je me souviens, j’étais en train de jouer à Tony Hawk Pro Skater 2, un jeu vidéo qu’un pote m’avait filé, je finis ma partie, c’était en été, et là je découvre la vidéo de fin du jeu. En fait, quand tu finis le jeu avec un personnage, tu peux voir une vraie vidéo. Je me souviens parfaitement, je jouais avec Koston et je découvre sa part ! Là c’est la révélation, c’est la première fois de ma vie que je vois du vrai skate, et je me dis : “Putain, mais c’est trop cool ce truc…”. En fait, à l’époque, j’avais un pote qui avait une vieille planche de skate, mais on se contentait juste de descendre des pentes assis dessus, c’est tout… Du coup, je me dis que je vais essayer et, depuis ce jour-là, je n’ai jamais arrêté… Quelques années plus tard, vers l’âge de 13 ans, nouveau tournant dans ta vie, tu pars vivre en Floride… Ouais, à la base je pars juste en vacances tout seul un été, visiter un oncle qui vit en Floride. J’arrive là-bas, trop bien, il fait trop beau, la plage, les palmiers… Je passe un mois sur place, puis un deuxième, arrive début septembre et là je commence à me demander quand est-ce que je vais rentrer

en France… Il faut préciser que je n’avais pas de billet retour, mes parents m’avaient juste acheté un billet aller… Bref, là je commence à me dire “Ok, génial c’est permanent vacations !”, jusqu’à ce que je reçoive un coup de téléphone de ma mère qui me demande si je me plais à Miami, si tout se passe bien… Je lui réponds que c’est vraiment cool et là elle me dit juste que si c’est cool pour moi, ils vont me rejoindre avec mon père et qu’on va s’installer en Floride désormais. Donc, là, j’hallucine un peu, mais en même temps, dans ma tête de gamin de 13 ans, je me dis juste que ça va être génial, je vais être en vacances toute l’année…

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Hendrik Herzmann


Finn Gerlach Frontside flip to fakie


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