Rapport d'Etudes de Licence

Page 1

ENSA NORMANDIE 2017-2018 S5/S6 RAPPORT D’ETUDES

Thomas Lasserre

LA MAISON D'HÔTES DU CAMPUS DE XIANGSHAN

LA NOTION D'IDENTITÉ DANS L'ARCHITECTURE CHINOISE CONTEMPORAINE

SITUATIONS BÂTIES DU XXIE SIÈCLE TRAVAIL ENCADRÉ PAR RÉMI FERRAND



Le présent rapport est issu d’une démarche collective réalisée dans le cadre du travail de rapport d’études de la troisième année de Licence de l’Ecole d’Architecture de Normandie. Il a pour ambition d’analyser une situation bâtie du XXIème siècle et de la placer dans la perspective d’un certain nombre d’enjeux contemporains. Les tendances, opportunités ou risques exposés ici, tracent des pistes pour l’architecture dans le monde qui vient, celui de la civilisation urbaine globale.


« Un peuple défaille et meurt quand pour lui même s’invalide sa tradition, qu’il la fige, la retient, la perçoit comme archaïque sans jamais l’adapter aux temps qui changent, sans jamais la penser, et avancer riche d’elle dans la modernité. » Patrick Chamoiseau (Antan d’enfance)

Iwan Baan (https://iwan.com/portfolio/wa-shan-guesthouse-hangzhou-china/) 4


TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION

7

CONTEXTE MÉTROPOLITAIN

8

CONTEXTE URBAIN

10

ARTICULATIONS ARCHITECTURALES

12

1

LA MAISON D’HÔTES DU CAMPUS XIANGSHAN

14

15

ENTRE LA RIVIERE ET LA MONTAGNE...

...UN PAYSAGE MORCELÉ... ...S'OFFRE À LA DÉAMBULATION

17 19

CONSTRUIRE, C’EST PRENDRE POSITION

21

AMATEUR ARCHITECTURE STUDIO

23

2

UNE HISTOIRE DE RÉVOLUTIONS

25

25

206 AV. JC - 1912 : DE LA DYNASTIE HAN À LA DYNASTIE QING

1842 - 1947 : LE TEMPS DES CONCESSIONS APRÈS 1949 : LES NOUVEAUX VILLAGES OUVRIERS

27 27

À PARTIR DES ANNÉES 80 : LE MÉGA-BLOC

3

29

L'IDENTITÉ EN ARCHITECTURE : ENTRE TRADITION ET MODERNITÉ

31

31

WILLIAM MORRIS ET LE MOUVEMENT ARTS & CRAFTS

LE CORBUSIER, LES CIAM ET LE MOUVEMENT MODERNE KENNETH FRAMPTON ET LE RÉGIONALISME CRITIQUE

33 35

WANG SHU ET L'ARTISAN-ARCHITECTE

37

CONCLUSION

39

BIBLIOGRAPHIE

40

ANNEXES

42 5


OBJET DE L’ÉTUDE : WA SHAN, ACADÉMIE D’ART DE CHINE PROGRAMME : MAISON D’HÔTES SURFACE : 5000 M² ARCHITECTE : AMATEUR ARCHITECTURE STUDIO (WANG SHU & LU WENYU) ANNÉE DE CONSTRUCTION : 2011-2013

PAYS : CHINE VILLE : HANGZHOU ADRESSE : CAMPUS DE XIANGSHAN, ZHUANTANG STRAIGHT STREET COORDONNÉES : 30°09’21.6"N 120°04’21.9"E

6


INTRODUCTION L’exercice du rapport d’étude nous permet, à travers un travail de recherche sur un sujet choisi, d’effectuer un retour en arrière sur nos années de licence en mobilisant les différentes compétences assimilées pendant ces trois ans. Mais au-delà du caractère factuel, il nous alloue du temps pour prendre conscience, préciser et mettre des mots sur notre parcours, ainsi que sur les idées et les sentiments qui ont germés pendant cette période. Si je suis arrivé dans cette école, c’est grâce à Patrick Chamoiseau, ou plutôt grâce à « L’empreinte à Crusoé » - autobiographie imaginaire d’un Robinson amnésique à la recherche de son identité - que je lisais à cette période et qui avait suscité un certain intérêt de la part de mon jury. Ce livre que je lisais alors pour la première fois, je ne le comprenais pas, mais j’avais plaisir à le lire. Toutes les questions qu’il soulève sur l’identité, et en particulier sur notre rapport à un territoire, à son histoire et au langage résonnaient avec mon histoire personnelle marquée par l’itinérance. En effet pour suivre les évolutions de carrière de mes parents, j’ai dû déménager et changer d’école à de nombreuses reprises. Depuis le CM1, je ne suis jamais resté plus de deux ans au même endroit. Je suis né à Châlons-en-Champagne mais j’ai principalement vécu dans la banlieue sud de Paris (Antony et Châtenay-Malabry) et en Guadeloupe (Gosier et Petit-Bourg). A chaque fois il a fallu que je m’adapte. Que vous changiez de quartier, de ville, de région voire de culture le travail est toujours le même. Il faut réapprendre les lieux et les gens, retrouver des habitudes et souvent une nouvelle notion du temps. En résulte chez moi une capacité à analyser rapidement les situations et les rapports entre les individus afin de me faire accepter et de pouvoir m’intégrer. Cependant j’avais toujours en tête le fait que j’allais repartir. J’étais là, mais un peu à distance. Cette situation eut l’avantage de mon faire découvrir l’influence d’une géographie, d’un climat, d’une culture sur les lieux et les gens, dans leurs habitudes. L’impression que j’ai aujourd’hui, c’est que ce contexte s’est mondialisé. Il n’est plus seulement marqué par sa propre langue, sa société, son territoire mais par le monde entier auquel il est relié dans un flux continu, d’idées et d’images, à l’origine d’une identité globale. C’est cette notion d’identité que j’ai souhaité approfondir dans mon rapport d’études, à partir de l’analyse d’un édifice de référence : la maison d’hôtes du campus de l’Académie des Beaux-Arts de Chine, réalisée par Amateur Architecture Studio. Dans un premier temps, je vous propose de découvrir et de comprendre le bâtiment à travers sa situation, sa morphologie, son fonctionnement, ses matériaux et la démarche de ses architectes. Le portrait de cette architecture en tête, nous nous intéresserons à l’Histoire du pays, synthétisée pour une question de temps en quatre périodes, afin d’entrevoir le contexte dans lequel s’insèrent les travaux d’Amateur Architecture Studio. Enfin, dans une dernière partie, nous nous poserons la question de l’identité en architecture par l’analyse de trois mouvements architecturaux occidentaux - les Arts & Crafts, le mouvement moderne et le régionalisme critique - choisis de façon totalement subjective pour les réponses singulières qu’ils ont apportées à cette question. Nous les mettrons alors en perspective avec la démarche de Wang Shu et d’Amateur Architecture Studio à travers le regard de Kenneth Frampton.

7


CONTEXTE METROPOLITAIN

0

HANGZHOU

50 km

1

2

1

2

3 3

4

4

Plan de l’agglomération de Shanghaï 1

Nanjing

2

Shanghaï

3

Hangzhou

4

Ningbo

8

Campus Wa Shan

1

Nanjing

2

Shanghaï

3

Hangzhou

Campus Wa Shan


0

HANGZHOU

20 km

1

2

4

3 1 1

2

4

2

4

5

3 3

5 5

1

Centre ville

2

Lac de l’Ouest

3

Plantations de théiers

Plan de Hangzhou

(UNESCO)

(Parc National)

1

Centre ville 1 Centre ville

4

Académie d’Art de Chine

2

Lac de l’Ouest (UNESCO) 2 Lac de l’Ouest

5

Académie d’Art de Chine

Campus de Nanshan

Campus de Xiangshan

(UNESCO)

3

Plantations de théiers (Parc National) 3 Plantations de théiers

4

Académie d’Art de Chine Campus de Nanshan 4 Académie d’Art de Chine

(Parc National)

Campus de Nanshan

9


CONTEXTE URBAIN 0

200 m

Vue satellite du campus - 1:10 000e

10


0

200 m

2

4

Plan du campus - 1:10 000e Campus Wa Shan

11


ARTICULATIONS ARCHITECTURALES 0

Plan du Grand Pavillon - RDC - 1:100e 12

5m


13


1949

1981

1996

Etalement de la ville de Hangzhou,

2015

0

10 Km

Joan Busquets, « Hangzhou: Grids from Canal to Maxi-Blocks », Harvard Graduate School of Design, Applied Research & Design, juin 2017

Photographie aérienne du campus, Iwan Baan (https://iwan.com/portfolio/wa-shan-guesthouse-hangzhou-china/)

Photographie aérienne de la maison d'hôtes, Iwan Baan 14


1

LA MAISON D’HÔTES DU CAMPUS XIANGSHAN

ENTRE LA RIVIERE ET LA MONTAGNE... La Wa Shan, littéralement « montagne de tuiles » est une maison d’hôtes réalisée par l’architecte chinois Wang Shu entre 2011 et 2013. Elle est située sur le campus de la plus prestigieuse école de Beaux-Arts du pays, à 200km au sud de Shanghai, près de la ville de Hangzhou. Capitale culturelle plurimillénaires de la Chine, Hangzhou est une ville de plus de 8 millions d’habitants qui connait un développement fulgurant. En moins de 30 ans, 90% de son habitat traditionnel a été rasé pour laisser place à de gigantesques projets immobiliers. Massive et radicale, la transformation de son paysage urbain est à l’image des bouleversements qui secouent le pays depuis que la République populaire de Chine s’est largement ouverte à l’économie capitaliste. La Wa Shan est la phase finale d’un projet titanesque : la création d’un campus qui doit pouvoir accueillir 6000 étudiants. Le terrain choisi est un ancien site agricole, bordé par la colline de l’éléphant et traversé par une rivière. Wang Shu va y construire 25 bâtiments entre 2002 et 2007 en un temps de construction spectaculaire. Il garde pour la fin le dernier édifice, un lieu devant accueillir chercheurs, enseignants étrangers, parents et visiteurs. Wang Shu décide d’implanter la maison d’hôtes le long de la rivière sur une parcelle longue, étroite et occupée par une dizaine de maisons de paysans et quatre peupliers. Il décide de faire raser les maisons mais refuse catégoriquement de couper les arbres. Cette décision illustre un point fondamental de la démarche de Wang Shu. Selon lui, un bâtiment en tant qu’objet n’est rien. Il n’existe que dans la relation qu’il entretient avec le paysage. Ce principe provient des lettrés de la Chine ancienne selon lesquels l’architecture, en tant que création artificielle, n’a de sens que si elle est une transposition de ce qui a été observé par l’homme dans la nature. «L’architecture n’est pas seulement un objet que vous placez dans l’environnement. L’architecture, au final, doit faire partie de l’environnement. Parfois, vous ne pouvez pas distinguer quand l’architecture commence et quand la nature se termine. Si l’on s’intéresse à la manière dont les chinois implantent leurs bâtiments dans la nature on remarque que l’architecture ne commence pas lorsque l’on se tient devant le bâtiment. L’expérience de l’architecture débute longtemps avant le bâtiment. Car pour les chinois l’architecture n’est pas seulement la maison, mais inclue aussi un vaste espace tout autour.»¹ Si l’architecte a décidé d’implanter la maison d’hôtes sur cette parcelle enclavée, c’est avant tout pour que son bâtiment établisse un dialogue avec la rivière et la montagne, deux éléments sacrés dans la tradition chinoise, et dans le genre le plus noble de la peinture du paysage : le shanshui, littéralement montagne – eau.

15


Façade Sud, Iwan Baan

CHAMBRES D’HÔTES RESTAURANT SALLES DE CONFERENCE SALON DE THE

16


«A mon sens l’architecture ou ce qu’elle devrait parvenir à être renvoie à la tradition du shan shui où sont toujours représentés une montagne et de l’eau mais dans d’infinies combinaisons de rapports d’échelles. Dans ces représentations, l’œil franchit différents niveaux dans la composition. Ces différents niveaux représentent les différents degrés de compréhension de l’œuvre. En parcourant la composition, on passe de la vie à la philosophie. J’ai donc pensé que si l’on pouvait vivre ce genre d’expériences dans une peinture, on devrait pouvoir le faire également en architecture.» ² Wang Shu

... UN PAYSAGE MORCELÉ... Après six années de réflexion, Wang Shu trouve enfin le concept qui lui permet de traduire le principe du shanshui dans son architecture. Il décide d’aligner, entre la rivière et la montagne, près de trente murs rigoureusement parallèles. Puis d’en désaxer certains. Elevés sur presque 15 mètres de haut ces murs en terre crue fractionnent le dessin des façades. Pleins et continus, ils traversent la construction sur toute sa largeur. Aucun n’est fermé par un retour, ni à l’arrière du bâtiment, ni à l’avant. En organisant ainsi l’espace, l’architecte supprime toute barrières avec l’environnement naturel. Le bâtiment ne fait plus obstacle entre la rivière et la montagne, il en devient même l’élément de connexion. Entre ces murs qui délimitent des vides, viennent se glisser les volumes pleins qui abritent les principales fonctions de la Wa Shan : un salon de thé ; des salles de réunion pour 160, 50 et 30 personnes ; une salle à manger pour les professeurs et un restaurant pour les visiteurs ainsi qu’une maison d’hôtes de 28 chambres. Laissant visibles les murs qui les encadrent, les volumes semblent s’effacer, s’enfoncer dans la profondeur du bâtiment et dessinent des façades faites de creux et de décrochés irréguliers. Un toit unique recouvre l’édifice et lie ensemble tous les volumes que l’architecte décrit comme « un paysage de montagnes couvert par un manteau de tuiles »². Cette confusion entre intérieur et extérieur, toit unique mais façades fractionnées rend indéchiffrable du dehors la répartition des fonctions. De plus l’implantation tout en longueur du bâtiment fait qu’il est impossible d’embrasser d’un seul regard l’ensemble de l’édifice. « Mon bâtiment doit se lire comme un paysage morcelé en de nombreux éléments différents, ou comme les images d’un film que l’on coupe puis que l’on colle avec d’autres images pour constituer une histoire, où chaque séquence raconte avec ses propres outils un moment différent de celle qui précède ou de celle qui suit. Ici, vous expérimentez de très nombreux petits espaces qui ont chacun leurs propres atmosphères. Et c’est seulement quand vous avez exploré tous ces différents lieux que vous pouvez reconstituer l’expérience dans son ensemble. L’expérience de la Wa Shan se fait par succession d’images qui sont autant d’expériences spatiales différentes.» ² Wang Shu

17


PROMENADE ESCALIERS

18


... S'OFFRE À LA DÉAMBULATION Ainsi, en se déplaçant dans la Wa Shan, le visiteur a le sentiment d’évoluer dans un paysage artificiel, un décor de cinéma ou de théâtre dont les séquences se succèdent et changent au rythme des espaces traversés, des ambiances, des lumières, des cadres et des vues. Pour accéder à ces espaces, sept passages traversent le bâtiment dans toute sa largeur, reliant les berges de la rivière et la montagne. Afin de pouvoir également parcourir le bâtiment dans sa longueur, chaque mur en terre est percé d’une petite ouverture qui permet un trajet direct. A ce maillage fonctionnel du rez-de-chaussée se superpose tout un réseau de ponts, de plateformes, d’escaliers et de passerelles qui permet de circuler au cœur du bâtiment, d’un lieu ou d’un niveau à l’autre. Une organisation des circulations d’une grande complexité : il n’existe aucun trajet direct d’une fonction à une autre. Tout incite à la désorientation. C’est au visiteur de fabriquer son chemin, d’accepter de se perdre, de revenir sur ses pas. Dans cette maison d’hôtes, le client doit oublier le confort et l’organisation particulière des hôtels où les chambres sont distribuées de part et d’autre d’un grand couloir. Ici il n’y a ni couloir, ni ascenseur. Les visiteurs déambulent entre de vastes espaces ouverts, des passerelles étroites et des escaliers exiguës. Tout est fait pour inciter à l’exploration des lieux et provoquer la rencontre. L’ensemble du bâtiment se caractérise par sa grande perméabilité, aussi bien pour les espaces collectifs que dans les chambres d’hôtel. Bien que poreuse de part en part, la construction a quand même une entrée principale qu’il n’est pas évident de trouver. L’architecte l’a rejetée à une des extrémités du bâtiment, à l’Est. Bâtie sous un grand pan de la toiture, elle parait insignifiante pour un édifice de cette échelle. Et une fois franchie, la succession d’ouvertures qui la dessinent mènent à un mur. Comme dans tout le reste de la maison d’hôtes, le parcours est ponctué de petits obstacles, là pour forcer l’attention du visiteur au lieu. «Ce bâtiment ne concerne pas l’apparence ou la forme : mais la découverte. D’une couche à l’autre il offre des surprises.» ³ Wang Shu A l’opposé de la modeste entrée de l’Est, l’Ouest est particulièrement imposant. Le grand pavillon de l’hôtel, qui accueille sa réception, son restaurant et ses suites est un événement en totale discordance avec l’écriture générale de la façade. Constitué d’une succession de trames percées d’ouvertures spectaculaires, cet espace se dévoile dans la profondeur. Une série de cadres de béton juxtaposés, comme les différents plans d’une photographie ou d’un tableau, fabriquent de la profondeur de champ et renvoient aux ouvertures, aux formes abstraites pratiquées dans les jardins chinois. Ces découpes redessinent entièrement l’espace de ce jardin intérieur dont la conception illustre ici un principe fondamental des jardins de lettrés selon lequel, en Chine, on ne plante pas un jardin, on le construit.

19


La structure paraît éclatée : chaque élément est différencié (mur, charpente...) Marc Auzet, Juliette Goudy

Structure béton armé, remplissage des murs en pisé , Marc Auzet, Juliette Goudy

Coffrage de la dalle béton du premier étage, Marc Auzet, Juliette Goudy 20


CONSTRUIRE, C’EST PRENDRE POSITION Mais le travail de composition de Wang Shu va bien au-delà de l’aspect formel. Il porte aussi une attention particulière à la matérialité de chaque espace de l’ensemble. Le bâtiment est constitué de béton armé pour la structure poteaux-dalle, de bois et d’acier pour la charpente, de pisé de terre crue pour le remplissage des murs transversaux, de briques cuites pour les cloisons des pièces humides, de tuiles de récupération pour la toiture et certains murs ainsi que de bambou pour la façade du pavillon. Pierre, terre, bambou, bois et béton, une palette dont la diversité de couleurs, de reliefs et de textures renouvelle constamment la perception que l’on a de l’espace. Mais au-delà de l’aspect esthétique, cette mise en scène de la dualité entre modernité et tradition constructive est une charge critique face à l’évolution du pays qui a livré à la destruction 9/10e de son patrimoine architectural en une génération. Une mémoire collective plurimillénaire réduite à l’état de ruines. «Ces maisons sont notre vie, notre culture, nos racines. Et pourtant elles sont détruites n’importe comment. Face à cela, il me parait impossible de rester indifférent ou passif. Je ne cesse d’explorer des manières d’exprimer mes sentiments et mon attitude face à cette situation. Je considère qu’en tant qu’architecte c’est mon devoir de le faire. C’est une obligation pour les intellectuels. Je ne suis pas seulement un architecte, je suis d’abord un intellectuel. Et un intellectuel doit prendre position par rapport aux évolutions de la société dans laquelle il vit.» ² Wang Shu Dans la culture chinoise, le wapan, que l’on peut traduire par « raccommodage » est une technique ancestrale qui permettait de reconstruire les maisons au plus vite avec les fragments détruits par le passage d’un typhon. Par un geste éminemment politique, l’architecte a décidé de mettre à profit cette technique pour garder une trace des maisons de paysans démolies pour laisser place au campus. Il est allé récupérer au milieu des champs de ruines des quartiers environnants, en camion avec ces étudiants, des milliers de briques et les a réemployées dans le mur-manifeste du pavillon de l’hôtel. La terre des murs provient, elle, directement du site. Utilisé depuis des millénaires le pisé est répandu dans le monde entier. Mais plus du tout dans cette partie de la Chine urbaine pour laquelle le béton est devenu le principal outil de développement. C’est pourquoi élever ces murs dont les milliers de mètres cubes de terre ont été pilés et damés à la main est pour Wang Shu une manière d’afficher une position combative face à l’industrie du ciment. Cependant pour des raisons sismiques et législatives, il a dû se résoudre à couler un peu de béton pour élever des piliers. Ces murs auraient pu tenir directement la charpente, mais ils sont prolongés par une structure métallique qui surélève la toiture, libérant un nouvel espace de circulation et de vie. Dans le système traditionnel romain, les poutres reposent directement sur les murs et forment des triangles solidaires les uns des autres. Aucun ne peut plier, la structure est indéformable. Dans le système oriental, la charpente repose sur un empilement de grosses poutres dont la longueur décroit pour équilibrer les poids. Wang Shu a imaginé une structure surélevée qui ressemble plutôt à un grand jeu de meccano. Des milliers de chevrons, tous de mêmes dimensions, sont assemblés de manière à ce que la structure se porte elle-même. Un système d’assemblage assez complexe, mais entièrement autoportant, qui permet à l’architecte de lancer sa charpente sur de très larges portées sans un seul pilier. 21


Cette charpente a été réalisée avec un bois ordinaire et assemblée à la main avec des vis standard. Des matériaux pauvres qui ne résisteront pas plus d’une génération. Wang Shu sait qu’il faudra les remplacer petit à petit mais ça ne le dérange pas, au contraire la réversibilité des matériaux est pour lui gage de durabilité.

Charpente et structure métallique

Promenade sur les toits, Iwan Baan

Musée d'histoire de Ningbo 22

«Plutôt que de considérer nos bâtiments selon des idées de tradition ou de modernité, il m’intéresse plus, à vrai dire, d’observer le processus de changement dont ils sont l’objet au fil du temps. Certains matériaux comme le bois ne sont pas très résistants, au bout d’un siècle ils se détériorent. Nous conservons des bâtiments datés des dynasties Tang (618-907), Song (960-1279) ou Yuan (12061368), alors que théoriquement c’est impossible, qu’ils auraient dû disparaitre depuis longtemps. […] C’est une des caractéristiques de l’architecture chinoise, les bâtiments se renouvellent en permanence, on peut les réparer, y ajouter des éléments en changeant tel ou tel matériau. Mes projets sont faits dans cet esprit, on peut me dire que les matériaux ne sont pas solides, mais ils ne coûtent pas cher et peuvent être remplacés. Ce n’est pas de l’architecture faite pour être éternelle. Les bâtiments peuvent changer au fil du temps, y compris leur couleur, le temps et le climat y participent. Pour juger d’un projet il faut le voir dix ans après, c’est là qu’il commence vraiment à montrer ses qualités.» ⁴ Wang Shu

Maison de céramique, Ningbo

Pavillon Tengtou-Ningbo


AMATEUR ARCHITECTURE STUDIO

CONSTRUIRE UN MONDE DIFFERENT CONFORME AUX PRINCIPES DE LA NATURE

La Wa Shan n’est pas la première œuvre de l’architecte, elle fut réalisée un an après que Wang Shu ait obtenu le Pritzker. Mais elle illustre parfaitement la démarche d’Amateur Architecture Studio. Que ce soit dans sa charge poétique (faire partie du paysage et s’associer à la montagne et la rivière) ou politique (prouver que l’on peut construire des projets ambitieux avec des matériaux vernaculaires en s’affranchissant du «tout-béton»), ce projet est un manifeste de la détermination des architectes à combattre un modèle de construction qu’ils réprouvent en proposant des solutions alternatives viables et reconnues de par le monde. «Wang Shu a étudié l’architecture à l’université du Sud-Est à Nankin, avant un doctorat en architecture à l’Université Tongji de Shanghai en 2000. Il a créé son agence, Amateur Architecture Studio, avec sa femme Lu Wenyu en 1997 à Hangzhou, où il est également directeur du département d’architecture de l’Ecole supérieure des Beaux-Arts de Chine depuis 2003. Leurs projets ont été diffusés à travers le monde dans de nombreuses revues et expositions telles que « Alors la Chine ? » au Centre Pompidou en 2003, « Positions » en 2008, « Architecture as Resistance » au Bozar de Bruxelles en 2009. Ils lui ont valu plusieurs distinctions dés 2003 en Chine, mais aussi à l’étranger parmi lesquels le Global Award for Sustainable Architecture en 2007, la Grande médaille d’or de l’Académie d’architecture en 2011 et le Pritzker en 2012. Après avoir passé les années 1990 sur les chantiers à apprendre les techniques traditionnelles auprès des artisans, il a réalisé plusieurs projets, surtout des équipements culturels, dans lesquels il fait preuve d’une approche sensible et poétique du savoir faire constructif tout en utilisant un vocabulaire architectural très contemporain (Musée d’art contemporain de Ningbo en 2005, Five scattered houses à Ningbo en 2006, Jardin de tuiles à la 11e biennale de Venise la même année. Ses projets illustrent un souci permanent de relations entre l’édifice, le paysage et la nature. Mais au-delà des techniques constructives, ce sont aussi les formes et les usages traditionnels qu’il souhaite réinterpréter dans ses projets, afin de recréer une continuité, souvent perdue en Chine, avec la tradition (Rénovation de la rue Zhongshan en 2009, Pavillon TengtouNingbo à l’exposition universelle de Shanghai en 2010) »⁴ C'est pourquoi le parcours singulier de Wang Shu est indissociable de l'histoire urbaine de la Chine.

23


Nanchan-si Dadian 782 (Dynastie Tang), Wutai, Shanxi

Fengguo-si Daxiong-dian 1020 (Dynastie Song), Yixian, Liaoning

Guangsheng-xia-si Dadian 1309 (Dynastie Yuan), Hongdong, Shanxi

Gugong Taihe-dian 1695 (Dynastie Qing), Beijing

Echelles comparatives, Chouna (https://chounamoul.exblog.jp/9941191/)

Plan et Coupe sur le temple et l'école du village de Furong, Marc AUZET, Juliette GOUDY, Mémoire de DSA « Faciliter l’emploi du pisé dans l’architecture contemporaine en Chine », Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble, 2010

24


2

UNE HISTOIRE DE REVOLUTIONS

206 AV. JC – 1912 : DE LA DYNASTIE HAN A LA DYNASTIE QING UNE ARCHITECTURE STANDARDISEE ET REGLEMENTEE

La Chine a été marquée par de nombreux bouleversements, aussi bien dans sa géographie que dans son histoire. En effet, de part sa situation, le pays fut régulièrement touché par les séismes particulièrement fréquents le long de l’Himalaya, ainsi que par les crues de ses nombreux fleuves qui changèrent de cours plusieurs dizaines de fois sur près de trente siècles. Le contexte politique du pays a lui aussi connu plusieurs troubles. Près de 17 dynasties se sont succédées au pouvoir en vingt siècle, engendrant des changements dans les limites du territoire et dans la localisation de la capitale. Certaines, en gardent encore la trace dans leur nom comme Pékin (bei-jing, nord-capitale) ou Nankin (nan-jing, sud-capitale) ⁵. Afin de pouvoir s’adapter à ce contexte instable, la société chinoise s’est établie sur un ensemble de règles et de conventions. L’ensemble des relations humaines est régi par le code confucéen, élevé au rang d’idéologie officielle d’état sous la dynastie Han au 1er siècle avant J.C et jusqu’à la dynastie Qing (16441912). La philosophie confucéenne attache une grande importance à l’éthique et à la hiérarchie sociale. Son influence sur l’architecture chinoise est visible notamment dans la détermination du plan sur l’axe central et dans tout élément révélateur de sa place dans la société : surélévation, dimensions, décor, ornementation... Un autre concept utilisé dans la conception de l’espace est le Feng-shui (vent-eau). Il édicte un certain nombre de marches à suivre pour inscrire une ville ou un édifice dans son environnement afin de favoriser la santé, le bien-être et la prospérité des habitants. « Le Feng-shui fait référence aux élément naturels : la forme des collines et des vallées, la direction des ruisseaux et des rivières, sont les éléments les plus importants ; mais on tient compte également de la hauteur et de l’aspect des constructions, de la direction des routes et des ponts.»6. C’est pour cette raison que la Wa Shan borde une rivière et se tourne vers le sud, adossée à une montagne pour la protéger du vent du Nord. «La plupart des bâtiments, des palais aux habitations plus précaires, se composent de trois parties : une terrasse en terre damée protégée par un parement de pierre plates et recouverte d’une dalle, une structure porteuse composée de colonnes et de linteaux en bois, et d’une charpente qui porte un toit constitué de plusieurs couches de tuiles. […] L’ensemble est dépourvu de fondations et les colonnes ne sont pas encastrées dans le sol de la terrasse mais simplement posées sur des socles de pierre. […] Les assemblages par embrèvements ne sont pas cloués et conservent une certaine souplesse qui permet à l’ensemble de supporter les efforts que la structure peut avoir à subir comme les fortes tempêtes ou les séismes. La construction chinoise est une construction standardisée et normalisée. Dès l’Antiquité apparaît la tendance à rechercher des rapports constants dans les dimensions, entre largeur et profondeur, entre profondeur et hauteur. […] La charpente est constituée d’un nombre important d’éléments identiques préparés en atelier avant d’être assemblés et montés sur le chantier […]. Cette standardisation va se faire par l’utilisation d’un module issu d’une des pièces de la charpente dont la section servira au calcul de l’ensemble des dimensions du bâtiment.» ⁶

25


Concession française à Shanghai

Hippodrome de Shanghai, concession internationale

Médiathèque Grand Troyes, « Shanghai, symbole du dépeçage de la Chine par le Occidentaux »,

(http://www.cndp.fr/crdp-reims/fileadmin/documents/preac/patrimoine_mediatheque_

troyes/16-_Shanghai.pdf)

HABITATIONS LIEU DE TRAVAIL ADMINISTRATION EQUIPEMENTS COLLECTIFS

Analyse de danwei

Yuwei Wang, « Persistence of the collective urban model in Beijing », Projective Cities, Architectural Association Graduate School, août 2012, (http://projectivecities.aaschool.

ac.uk/portfolio/yuwei-wang-beijing-collective/#_ftn1)

26


1842-1947 : LE TEMPS DES CONCESSIONS PREMIERES INFLUENCES OCCIDENTALES

C’est dans ce contexte marqué par une architecture standardisée qu’à partir du traité de Nankin en 1842, les nations étrangères installent dans différents ports de Chine des concessions leur permettant de faciliter leurs échanges commerciaux avec le Pacifique. Les concessions étrangères en Chine sont des zones situées à l’intérieur de villes chinoises qui sont placées sous administration étrangère mais, à la différence des colonies, elles demeurent sous souveraineté chinoise. L’installation des occidentaux sur des concessions a donné lieu à une architecture nouvelle marquée par les styles des pays occupants. « Immeubles d’habitation, villas, hôpitaux, écoles et collèges, musée, casernes, banques, consulats, hôtels municipaux, églises, grands magasins, marchés couverts, parcs, hippodrome, ainsi que de nombreux équipements militaires sortent de terre, déclinant toutes les tendances du néo-classicisme « Beaux-arts », de l’art déco ou de la villa moderniste. La quinzaine d’hectares que se partagent la Grande-Bretagne, la France, les États-Unis, l’Allemagne, le Japon, l’Italie, l’Autriche-Hongrie, la Russie et la Belgique se caractérise à la fois par un défilé d’édifices au caractère national affirmé et par un art urbain remarquablement homogène. Largeur des voies, règles d’alignement, murets bordant nombre de parcelles, fréquence des pans coupés, rues arborées donnent en effet une forte unité au secteur occidental. De plus, la coopération entre puissances, même si elle n’est pas dépourvue d’incidents, dote Tianjin d’infrastructures modernes. »⁷ Ces bâtiments se caractérisent par leurs techniques de construction en maçonnerie, le plus souvent en pierre ou en brique, sur un nombre de niveaux de plus en plus élevé au fur et à mesure du confortement de la concession et de son succès commercial. La plupart des bâtiments encore debout sont aujourd’hui protégés. Les concessions les plus célèbres se trouvent à Shanghai le long du Bund, un boulevard longeant les rives de la rivière Huangpu. Il est bordé par 52 édifices aux styles très divers (roman, gothique, néo-classique, Beaux-Arts…) et abritant des hôtels, des banques, des sièges sociaux, des consulats…

APRES 1949 : LES NOUVEAUX VILLAGES OUVRIERS

L’INSPIRATION COMMUNISTE ET LE DEBUT DE LA GRANDE ECHELLE

Entre 1945 et 1949 se terminent les concessions étrangères. En effet durant cette période la Chine connaît une nouvelle guerre civile entre les nationalistes et les communistes. Ces derniers, dirigés par Mao Zedong l’emportent : le 1er octobre 1949, Mao proclame à Pékin la République populaire de Chine. Dès lors, le nouveau chef de l’État s’efforce de faire de son pays une puissance, c’est-à-dire de développer son influence en dehors de ses frontières ; ses successeurs poursuivront dans cette voie. « Après 1949, et à l’incitation des conseillers soviétiques, la Chine a entrepris la construction de nouveaux programmes d’habitat ouvrier, souvent liés à une entreprise industrielle dans le cadre du concept de danwei, associant à l’unité de production l’habitat et tous les services associés. Ces «nouveaux villages ouvriers» comportaient des rangées d’immeubles parallèles tournés vers le sud, le tout clos par un mur. D’une hauteur de trois à cinq niveaux au départ, ce 27


type de programme a vu sa hauteur augmenter par la suite jusqu’à une dizaine de niveaux. Ils constituent encore une part importante du tissu urbain des villes chinoises, notamment celles qui ont connu au XXème siècle un important essor industriel accompagné d’un développement de la population urbaine. »⁵ Réalisé dans la plupart des cas en béton, le danwei est un quartier marqué par la préfabrication et la répétition d’un modèle. Dans sa disposition, le danwei instaure une hiérarchie : un axe central sépare le lieu de travail des bâtiments d’habitations, organisés autour d’espaces collectifs. Les installations publiques et les commerces de proximité étaient situés le long de cette voie centrale qui reliait les quartiers entre eux. On retrouve aussi de nombreux espaces partagés comme une salle de réception, un salon de thé, des salles de classes privées, des salles à manger etc… Bien qu’appartenant à des rangs sociaux différents, tous les habitants étaient autorisés à utiliser ces pièces et installations. Dans un danwei, la vie sociale et les relations s’organisaient à différentes échelles : 3 à 5 familles partageaient des toilettes et une cuisine. Les parcs, les garages à vélos, les buanderies étaient affectés à 2 ou 3 bâtiments. Enfin à l’échelle du quartier, les habitants bénéficiaient d’équipements de sport, de soins, d’école… On retrouve dans cette dimension collective dans l’architecture de Wang Shu, matérialisée par le grand nombre d’espaces de rencontre, de terrasses, de jardins qui ponctuent le parcours dans la Wa Shan.

Analyse de méga-blocks

Yuwei Wang, « Persistence of the collective urban model in Beijing », Projective Cities, Architectural Association Graduate School, août 2012, (http://projectivecities.aaschool.ac.uk/portfolio/yuwei-wang-beijing-collective/#_ftn1)

28


A PARTIR DES ANNES 80 : LE MEGA-BLOCK

LE DEVELOPPEMENT D’UNE PUISSANCE QUI SE REVE MONDIALE

L’arrivée au pouvoir de Deng Xiaoping en décembre 1978 marque le début de la politique d’ouverture de la Chine et son insertion dans le système économique libéral mondial. L’ambition de cette réforme économique est l’ouverture progressive du marché chinois, pour parvenir à la constitution d’une classe moyenne urbaine et à l’amélioration du niveau de vie. « La croissance rapide de la population a conduit la Chine à organiser l’urbanisation à grande échelle. Un quadrillage de nouvelles voies orthogonales découpe dans les périphéries des îlots de l’ordre de trois cents à quatre cents mètres de côté, soit une dizaine à une quinzaine d’hectares, parfois plus. Les quelques deux mille à cinq mille habitants concernés résident dans un ensemble unique et clos, avec un nombre d’accès limité entre une et trois portes. Dans ces ensembles résidentiels, dont les types bâtis peuvent aller de la maison individuelle à la tour, le type dominant reste la barre de façade principale plein sud, le nord étant occupé par des pièces jugées secondaires (cuisine, chambre supplémentaire). Comme dans les nouveaux villages ouvriers, le programme de ces quartiers d’habitations (xiaoqu) peut comporter équipements scolaires, services, commerces et espaces verts à l’échelle de la population résidente. Cependant l’emploi est rarement associé à ces programmes résidentiels, obligeant les actifs à gagner le centre-ville ou les zones d’activité au prix de long et fatigants trajets en transports en commun ou en automobile. » ⁵ Les pouvoirs locaux tirent une très grande partie de leurs ressources fiscales de la valorisation des terrains urbains. Ils ont donc développé plusieurs stratégies pour dégager des revenus, dont une tendance à multiplier les infrastructures et les constructions pour valoriser le foncier plutôt qu’à promouvoir un développement durable. Les villes chinoises se composent ainsi de zones d’activités pour attirer les investisseurs étrangers, de quartiers résidentiels massifs, souvent fermés sur eux-mêmes et mal connectés au centre urbain, et d’imposantes infrastructures de transports qui possèdent une grande emprise au sol (autoroutes, voies ferrées, gares, aéroports…) « Dans un contexte de plus grande décentralisation, les acteurs publics locaux ont été enjoints à développer des stratégies de valorisation des formes locales de capital, à la fois foncier et industriel, pour dégager des revenus. […] D’autre part, l’urbanisme reste inféodé à une politique d’urbanisation dirigée ; de nombreux auteurs, évoquant pour certains d’entre eux la notion d’urbanisation administrative (administrative urbanization) (Wang et Liu 2014), ont bien souligné combien les modalités de production de la ville se conforment aux stratégies locales de maximisation des ressources, en particulier foncières, soumises au pouvoir discrétionnaire des hommes politiques locaux. »⁸ Depuis le début des années 2000, ce modèle est largement remis en cause. Les principales critiques concernent les conséquences négatives du développement fondé sur des logiques économiques, les écarts entre les villes et les campagnes, l’exclusion sociale, les problèmes environnementaux, la monotonie urbaine et architecturale ou encore le découpage en méga-blocs inadapté à l’échelle du piéton…

29


William Morris

John Ruskin Cragside, William R. Lethaby, Brockhampton, UK, 1902

Red House,Morris & Webb, Bexleyheath, UK, 1859

Gandle House, Greene & Greene, Pasadena, USA, 1908 30


En 2008, suite à ces reproches, est promulguée une nouvelle loi sur le développement urbain et rural. Elle rompt avec les méthodes de planification utilisée jusque-là. Dans les principes, « il s’agit d’affirmer l’importance des questions sociales et environnementales face aux questions économiques. L’action sur la ville est envisagée non plus dans une dynamique quantitative d’extension mais dans une logique plus qualitative de renouvellement. »⁸ En intégrant la participation des habitants dans la révision des schémas directeurs, une meilleure intégration des transports dans la conception du projet urbain ou encore l’utilisation des nouvelles technologies comme une ressource supplémentaire dans la gestion du territoire, cette réforme oriente le modèle chinois sur les traces de la ville durable, c’est-à-dire d’une ville qui prend en compte simultanément les enjeux sociaux, économiques, environnementaux et culturels de l’urbanisme pour et avec les habitants.

3 L'IDENTITÉ EN ARCHITECTURE : ENTRE TRADITION ET MODERNITÉ Wang Shu et les architectes d’Amateur Architecture Studio ne sont pas les premiers à se poser des questions sur l’identité dans l’architecture. L’opposition apparente entre l’utilisation des moyens apportés par les progrès de la technologie et la conservation d’un héritage d’édifices et de savoir-faire donna lieu à de nombreux débats et vit l’apparition de mouvements, de styles ou de démarches aux modes d’expression très divers. Trois d’entre eux sont présentés ci-dessous, choisis pour leurs réponses singulières et leur influence sur les générations qui les ont succédées.

WILLIAM MORRIS ET LE MOUVEMENT ARTS & CRAFTS

TRADITIONS LOCALES ET PRODUCTION ARTISANALE

Le contexte d’industrialisation du XIXe siècle a entrainé une dégradation des conditions de vie des travailleurs et la multiplication de produits de mauvaise qualité. En Angleterre dans les années 1830, une série d’initiatives gouvernementales tentèrent de réformer les arts décoratifs (ou arts industriels) sans grands succès. Suite à cet échec, plusieurs réformateurs, principalement dans le milieu artistique, proposèrent des alternatives à l’industrialisation. Les deux meneurs de ce mouvement furent le poète et écrivain britannique John Ruskin (18191900) et le créateur William Morris (1834-1896). Ils considéraient l’art et l’artisanat du Moyen Âge comme une source d’inspiration susceptible d’améliorer la qualité des logements et le confort quotidien des citoyens ordinaires. Morris mit en pratique ses croyances en établissant son propre atelier communautaire, basé sur la guilde médiévale, association très unie d’artisans. La production industrielle avait créé un fossé entre le concepteur qui décidait de l’allure des bâtiments et l’entrepreneur qui choisissait le lieu et le moment des travaux. Ce modèle était censé révolutionner les conditions de travail des ouvriers, leur permettre de rejeter les machines et de travailler comme le faisaient les artisans du Moyen Âge. En 1861, Morris donna l’exemple en ouvrant un atelier de fabrication de tissus, meubles, papiers peints et vitraux. Les objets de Morris et de ses adeptes, bien conçus et remarquablement fabriqués, reflétaient la philosophie selon laquelle les beaux-arts (tels que la peinture et la sculpture) et la fabrication artisanale (des meubles et des tissus) ne devaient faire qu’un. 31


Les cinq points de l'architecture moderne, Le Corbusier, 1927

Secteurs de Chandigarh, Le Corbusier (Ă la suite de Mayer et Nowicki), 1951

La ville radieuse, Le Corbusier, 1930 32


Le mouvement Arts & Crafts se caractérise par un grand nombre de traits vernaculaires. Les architectes et les créateurs choisissaient consciemment de favoriser les traditions locales dans leurs réalisations (toitures basses et inclinées, grandes cheminées, fenêtres et portes sans régularité, mélange de différents types de matériaux comme le bois, la pierre, la brique, la tuile, le plomb, le fer, le chaume… dans le but de créer un environnement complètement harmonieux, reposant sur la seule valeur esthétique.

LE CORBUSIER, LES CIAM ET LE MOUVEMENT MODERNE

FAIRE TABLE RASE DU PASSE

Au siècle suivant, un mouvement dont les idées étaient totalement antagonistes aux thèses des Arts & Crafts fit son apparition. Il prônait l’utilisation du progrès et la rationalisation scientifique avec pour idéal l’instauration de principes fonctionnels et transposables partout dans le monde. Son principal chef de fil fut Le Corbusier (Charles-Edouard Jeanneret) qui laissa derrière lui une œuvre prolifique d’écrits (Vers une architecture, 1923), de projets de grande échelle (Plan Voisin en 1925, jamais réalisé) et d’édifices (villa Savoye, 1931). Cette dernière incarne justement les cinq points de l’architecture moderne (pilotis, toiture terrasse, plan libre, fenêtres en bandeau et façade libre) qu’il proposa quelques années auparavant. Il développa également le système de Modulor, guide adapté des proportions de la silhouette d’un homme et du nombre d’or servant de module pour la construction qu’il appliqua à ses « machines à habiter », les Unités d’Habitations (Marseille, Rezé, Berlin, Briey et Firminy) entre 1945 et 1965. « L’avènement de l’ère machiniste a provoqué d’immenses perturbations dans le comportement des hommes, dans leur répartition sur la terre, dans leurs entreprises ; mouvement réfréné de concentration dans les villes à la faveur des vitesses mécaniques, évolution brutale et universelle sans précédent dans l’histoire. Le chaos est entré dans les villes. »⁹ Le Corbusier Après son échec au concours pour le palais de la Société des Nations à Genève, en 1927, Le Corbusier décide d’organiser une rencontre entre les architectes modernes internationaux afin de poser les bases théoriques du mouvement. La première réunion aura lieu en juin 1928 à La Sarraz, près du lac Léman et rassemblera 28 architectes et urbanistes dont Pierre Jeanneret, Josef Frank, Ernst May ou Pierre Chareau. Ce premier congrès international de l’architecture moderne (CIAM) fut suivi de 10 autres jusqu’en 1959, et chaque réunion était l’occasion de réfléchir aux problématiques contemporaines (standardisation, salubrité, mobilité…) Le IVe et le plus marquant des CIAM eut lieu en 1933 sur un bateau entre Marseille et Athènes. Il avait pour thème «la ville fonctionnelle» et déboucha sur la rédaction de la Charte d’Athènes qui ne fut publiée par Le Corbusier que huit ans plus tard, adaptée et amplifiée par ses soins. Elle se compose d’une énumération de prescriptions à adopter pour corriger la ville chaotique. Un système de classification divise la ville en quatre fonctions indépendantes : habitat, travail, récréation et circulation. Les habitations sont hautes, collectives et densément peuplées, mais disposées dans des espaces verts et éloignées les unes des autres. Ces espaces verts doivent 33


Kenneth Frampton à l'Université de Navarra, 2012 Chapelle Sainte Benedicte, Peter Zumthor, Sumvitg, Suisse, 1988

34

Eglise Bagsværd, Jørn Utzon, Copenhague, 1976


avoir des buts nettement définis : contenir les jardins d’enfants, les écoles, les centres de jeunesse ou tout bâtiment d’usage communautaire, rattaché intimement à l’habitation. Les lieux de travail, en revanche, sont éloignés des lieux de logements mais restent facilement accessibles en voiture. L’alignement des habitations au long des voies de communication est interdit et toutes les rues sont différenciées selon leurs destinations : rues d’habitation, rues de promenade, rues de transit, voies majeures.

KENNETH FRAMPTON ET LE REGIONALISME CRITIQUE

ASSOCIER PROGRES ET SITUATION LOCALE

La démarche purement fonctionnaliste des modernes fut largement critiquée à partir des années 1960. Plusieurs nouvelles théories furent développées alors en réponse, dont le régionalisme critique. Le régionalisme critique n’est ni un mouvement, ni un style architectural, mais une approche qui tente d’associer les bénéfices du progrès, comme les avancées technologiques sur les matériaux et les pratiques, et les spécificités de la situation locale comme le climat, les savoir-faire ou les coutumes. L’expression « régionalisme critique » a été utilisée pour la première fois par les architectes et chercheurs Alexander Tzonis et Liane Lefaivre en 1981 puis démocratisé, avec un sens légèrement différent, par l’architecte et historien Kenneth Frampton. « [Le régionalisme critique participe à] la singularité, l’autonomie et l’identité propre des régions, soulignant les différences entre elles, nourrissant leur diversité et contribuant par là même à un monde de « pics et vallées. […] Le régionalisme s’oppose en permanence à la centralisation et l’universalisation pour encourager la décentralisation et l’autonomie »¹⁰ Alexander Tzonis et Liane Lefaivre Pour les deux auteurs, le régionalisme critique est surtout un processus, une démarche d’opposition « à une norme autoritaire et à une approche universelle […] en recherchant des moyens différents de construire, de façonner des paysages et des villes, qui réaffirment la particularité d’une région, son environnement et ses composantes uniques, le caractère spécifique de sa culture, et enfin le mode de vie de ses habitants ».¹⁰ Dans leur suite, Kenneth Frampton développe un régionalisme critique basé non plus sur une opposition mais sur une approche critique dans laquelle des éléments naturels ou culturels locaux viendraient enrichir l’architecture : « La stratégie fondamentale du régionalisme critique est de tempérer l’impact de la civilisation universelle avec des éléments provenant des singularités d’un lieu particulier. Il est clair d’après ce qui précède que le régionalisme critique demande de grandes capacités d’esprit critique »¹¹ Le régionalisme de Frampton encourage un modernisme davantage en harmonie avec les particularités d’un contexte, le fameux genius loci, esprit du lieu. Il est pour cette raison un grand détracteur du mouvement moderne et du principe de tabula rasa qu’il ressent comme une volonté de dénaturer le site pour tendre vers l’utopie d’un environnement universel.

35


Exposition du travail d'Amateur Architecture Studio au musĂŠe Louisiana de Copenhague, (https://www.inexhibit.com/case-studies/wang-shu-amateur-architecture-studio-exhibition-at-the-louisiana-museum)

36


« Le régionalisme critique implique nécessairement un dialogue plus proche de la nature que ce que propose le mouvement moderne. Il est évident que la tendance à la tabula rasa des modernes favorise le recours au terrassement dans la mesure où un niveau totalement plat est considéré comme la situation la plus favorable et économique pour concevoir une construction rationnelle. […] L’aplanissement d’une topographie irrégulière en un terrain uniforme est clairement un geste technocratique qui envisage la constitution d’un état purement quelconque.»¹¹

WANG SHU ET L’ARTISAN-ARCHITECTE

UN NOUVEAU LANGUAGE HYBRIDE

Du 9 février au 30 avril 2017, fut organisé une série d’expositions au Musée d’art moderne Louisiana de Copenhague sur plusieurs architectes internationaux dont le travail illustre une pratique durable et socialement responsable. L’agence Amateur Architecture Studio en fit partie et le théoricien du régionalisme critique Kenneth Frampton fut invité à rédiger un commentaire sur l’œuvre de Wang Shu et de ses associés, paru dans le catalogue de cette exposition. C’est un extrait de ce texte que j’ai choisi pour conclure cette troisième partie, car il illustre à mon sens la complexité de cette question de l’identité, qui ne peut être réduite à une opposition entre moderne et traditionnel. « Wang Shu utilise une «poétique du recyclage» comme un moyen d’engendrer une nouvelle langue à la fois traditionnelle et moderne, issue de la renaissance consciente des techniques de construction traditionnelles grâce à sa collaboration avec des artisans capables de transmettre aux architectes d’innombrables techniques de construction perdues, qu’il est luimême capable de transformer en une forme expressive sans précédent, comme dans le jardin de tuiles (tiled garden) que lui et Lu Wenyu ont construit pour la 11e Biennale d’architecture de Venise en 2006, une œuvre composée de quelque 60 000 tuiles et de 5 000 bandes de bambou. Wang Shu nous informe qu’il ne savait pas, avant le début de la construction, comment résoudre les bords du toit de tuiles couvrant ce travail et que, en l’occurrence, le raccord fut travaillé sur place avec l’aide d’un maître artisan. L’évènement qui a projeté Amateur Architecture Studio dans une échelle et une classe totalement différentes fut la commission d’état pour concevoir, pratiquement du jour au lendemain, les vingt-cinq bâtiments qui composent maintenant l’académie de Xiangshan construite entre 2002 et 2007 sur un site rural, situé à une trentaine de minutes en voiture du centre de Hangzhou. Rétrospectivement, il est possible de voir cette assemblée hautement topographique comme une sorte de monde piranésien en miettes, c’est-à-dire comme un requiem cacophonique pour le vernaculaire chinois délibérément détruit qui n’a certainement jamais existé sous cette forme. […] La signification polémique plus profonde de cette reconstruction échelonnée découle de l’utilisation par l’architecte de matériaux locaux traditionnels tels que la pierre, le bambou et la terre battue, qui étaient tous proscrits par le gouvernement. Dans le même temps, afin de répondre aux réglementations sismiques actuelles, ces matériaux ont dû être intégrés et soutenus grâce à l’utilisation d’une ossature en béton armé coulée sur place. […] Ce qui est vraiment remarquable et rafraîchissant dans toute cette entreprise, c’est la façon dont un nouveau langage hybride a été créé, comme je l’ai déjà dit, ni moderne ni traditionnel. […] 37


On peut se demander ce que cette entreprise signifie exactement, surtout quand sa pratique est établie sous la rubrique de l’amateur, terme qui signifie traditionnellement la poursuite d’une activité par pur amour, et sans demander aucune rémunération en revenir. Cette idée altruiste renvoie probablement à l’engagement du studio dans une pratique architecturale qu’ils veulent d’intérêt public, et sa signification critique réside certainement dans le fait qu’il s’agit d’une répudiation catégorique de la manière dont les architectes chinois et étrangers ont participé à la destruction en masse des bâtiments traditionnels chinois pour les récompenses immédiates de l’argent et de la renommée. Par nécessité, Amateur Architecture Studio doit également travailler à la commission pour survivre, mais comme son titre l’indique, ce n’est pas son objectif principal.»¹² Kenneth Frampton, catalogue de l’exposition «The Architect’s Studio», Louisiana MoMA, Danemark, avril 2017

Wang Shu et Lu Wenyu au musée Louisiana de Copenhague, Paul Buchard (https://www.world-architects.com/es/architecture-news/headlines/wang-shu-joins-pritzker-jury)

38


CONCLUSION Depuis ma première année en école d’architecture on m’a encouragé à utiliser le dessin et la maquette pour comprendre un site, analyser un édifice ou présenter un projet. Choisir les éléments à exprimer, ceux à mettre de côté, épurer la composition pour transmettre rapidement une idée. Représenter implique forcément de faire abstraction de certaines informations : le dessin néglige une dimension, ce que montre une maquette dépend de son échelle… Ce travail de synthèse nous permet d’expliquer une idée complexe simplement, en quelques mots ou quelques traits. Mais cet état d’esprit nous fait aussi perdre de vue la véritable complexité des choses. Seule la rédaction est en mesure de rendre compte de cette richesse, car elle se complait dans le développement et la profusion des détails. Mais son exercice est très différent de celui de l’image, de la représentation, qui sont des médias chauds. « Tout le monde me dit dans la rue que je suis clair à l’oral et que je suis difficile à l’écrit. Et ils ont raison. La langue orale, c’est la langue simple, seulement elle ne dit pas vraiment les choses. C’est un média à la fois immédiat et chaud, et la chaleur permet de comprendre. Tandis que l’écriture est un art très différent, un art qui demande du temps. Il y a deux langues, comme les deux parties d’un iceberg. Une partie émergée, que tout le monde voit (les fleurs, les fruits…) et une partie profonde, là où il y a les mots propres, c’est- à-dire des corpus très spécialisés, qui parlent exactement (la variété de rose, de poire…) » Michel Serres Le rapport d’études m’a permis d’en faire l’expérience. Durant ces trois ans de licence, j’avais perdu l’habitude d’écrire. Développer une idée en plus d’une dizaine de lignes était devenu un travail de Romain. Cette année m’a permis de me replonger dans ce travail de rédaction, avec ses mots propres et précis. Comme je l’ai énoncé dans l’introduction, la question de l’identité, entrelacs d’histoires et de langages avec un territoire me tient à cœur depuis des années. C’est en visitant le festival des jardins de Chaumont-sur-Loire que je suis tombé sur une réalisation de Wang Shu, dont je ne connaissais que le nom. J’ai alors découvert son travail, et du même coup mon thème de rapport d’études. Approfondir cette notion d’identité en architecture au travers de l’œuvre d’Amateur Architecture Studio et de l’histoire urbaine de la Chine m’a rapidement orienté vers la relation entre modernité et tradition, ou plutôt entre standardisation et artisanat compte tenu de l’intérêt que porte Wang Shu au travail manuel in situ. Cette problématique est éminemment contemporaine, car l’architecture n’est pas que l’affaire de l’architecte, mais aussi de l’ingénieur, du client, du maçon, de l’électricien, du charpentier, du futur habitant… Et quand les mots d'ordre de l'époque sont de « construire plus vite, mieux et moins cher », on en viendrait presque à se demander si les compétences de chacun d'entre-nous ne se limitent plus aujourd'hui qu'à la production et à la pratique d'espaces standardisés ? « Dans un certain sens, je crois toujours que la construction de bâtiments est une opération artisanale. Malgré le fait que vous pouvez le rationaliser. […] cela vous donne un certain respect pour la réalisation de n’importe quoi avec vos mains, par opposition à une intervention distanciée via une machine. J’enseigne le respect, le respect pour ce que les gens ont fait et pourquoi ils l’ont fait d’une certaine manière.» Kenneth Frampton

39


BIBLIOGRAPHIE LIVRES Joan BUSQUETS, « Hangzhou: Grids from Canal to Maxi-Blocks », Harvard Graduate School of Design, Applied Research & Design, juin 2017 Alan COLQUHOUN, « L’architecture moderne », Infolio, collection Archigraphy Histoire et Théorie, 2006 ⁹ : Le Corbusier, « La Charte d’Athènes. Suivi de : Entretien avec les étudiants », Points, Essais, janvier 2016 ⁵ : Clément-Noël DOUADY, « Lire la ville chinoise », L’Harmattan, Danemark, 2011 ⁶ : Collectif, sous la direction de Frederic EDELMANN, « Dans la ville chinoise : Regards sur les mutations d’un empire », Actar, juin 2008 ¹¹ : Kenneth FRAMPTON, « Towards a Critical Regionalism: Six Points for an Architecture of Resistance» (http://www.modernindenver.com/wp-content/uploads/2015/08/Frampton.pdf) ¹⁰ : Liane LEFAIVRE, Alexander TZONIS, « Architecture of Regionalism in the Age of Globalization: Peaks and Valleys in the Flat World », Routledge, 2012 Hervé LOILIER, « Histoire des arts, de la Renaissance à nos jours », Ellipses, 2012 ⁴ : WANG Shu, « Construire un monde différent conforme aux principes de la nature », Leçon inaugurale de l’Ecole de Chaillot prononcée par Wang Shu le 31 janvier 2012, Texte établi et traduit par Françoise GED et Emmanuelle PECHENARD, Editions des Cendres, février 2013

MÉMOIRES ET THÈSES Marc AUZET, Juliette GOUDY, Mémoire de DSA « Faciliter l’emploi du pisé dans l’architecture contemporaine en Chine », Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble, 2010 Cyria EMELIANOFF, « Comment définir une ville durable », Thèse de troisième cycle de géographie, Université d’Orléans, 1999 (http://base.d-p-h.info/fr/fiches/dph/fiche-dph-8294.html) ⁷ : YUWEI Wang, « Persistence of the collective urban model in Beijing », Projective Cities, Architectural Association Graduate School, août 2012, (http://projectivecities.aaschool.ac.uk/portfolio/yuwei-

wang-beijing-collective/#_ftn1)

40


REVUES ET ARTICLES ¹³ : Edward DENISON, GUANG YU Ren, « Guesthouse de l’Académie d’Art de Chine, Campus de Xiangshan, Hangzhou», Traduction de Ronald CORLETTE THEUIL, Archicréé, n°363, octobrenovembre 2013, pp 76-89 ⁸ : Jean-François DOULET, « L’urbanisme chinois et l’émergence du modèle «intégrationniste» », Métropolitiques, 27 avril 2015 (http://www.metropolitiques.eu/L-urbanisme-chinois-et-l-emergence.html) ¹² : Kenneth FRAMPTON, « Kenneth Frampton On the Work of Wang Shu and Lu Wenyu », Archdaily, 23 mars 2017, (https://www.archdaily.com/867419/kenneth-frampton-on-the-work-of-wang-shu-and-luwenyu)

³ : Clare JACOBSON, « Master Class | Wang Shu », worldarchitecture.org, 22 décembre 2013, (https://worldarchitecture.org/architecture-news/pvgmn/master-class-wang-shu.html)

Médiathèque Grand Troyes, « Shanghai, symbole du dépeçage de la Chine par le Occidentaux », (http://www.cndp.fr/crdp-reims/fileadmin/documents/preac/patrimoine_mediatheque_troyes/16-_Shanghai.pdf)

VIDÉOS ² : Richard COPANS, Stan NEUMANN, « Architectures : Wa Shan, la Maison d’hôtes », réal. Juliette GARCIAS, prod. ARTE France, Les Films d’Ici, La Cité de l’Architecture et du Patrimoine, 2015, (https://www.youtube.com/watch?v=fsx6sP3W3So) ¹ : Marc-Christoph WAGNER, « Wang Shu: Architecture is a Job for God», Louisiana Museum of Modern Art, Danemark, mars 2017, (http://channel.louisiana.dk/video/wang-shu-architecture-job-god)

41


ANNEXES

Plan de masse

42

0

10 m


Plan R+2

Plan R+1

Plan RDC

0

10 m

43


Elevation Sud

Elevation Nord

Elevation Ouest

Elevation Ouest

Coupe longitudinale

Coupes transversales

44

0

10 m


45


Résumé Ce rapport d’étude questionne la notion d’identité en architecture à partir d’un édifice de référence : la maison d’hôtes du campus de l’Académie des Beaux-Arts de Chine, réalisée par Amateur Architecture Studio.

Il se compose d'une reflexion en trois étapes:

- L'analyse du bâtiment à travers sa situation, sa morphologie, son fonctionnement, ses matériaux et la démarche de ses architectes. - un examen de l'histoire du pays, synthétisée pour une question de temps en quatre périodes, afin d’entrevoir le contexte dans lequel s’insèrent les travaux d’Amateur Architecture Studio. - un rapprochement avec trois mouvements architecturaux occidentaux ayant apporté des réponses singulières et novatrices à la question de l'identité. Le travail de recherche de ce rapport a pour ambition d'exposer des tendances, des idées qui tracent des pistes pour l’architecture dans le monde qui vient, celui de la civilisation urbaine globale.

Légende (page de couverture) : Campus de Xiangshan, 1:10 000e Légende (photo ci-contre) : Pavillon Ouest de la Wa Shan ¹³


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.