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Vers une suppression des frais de gestion cachés des fonds d’investissement?

La Commission européenne envisage de supprimer définitivement les frais de distribution cachés des fonds d’investissement. L’impact sur les clients des banques privées devrait cependant rester limité.

d’une stratégie qui fonctionne pour tout le monde, qui ne laisse pas les petits investisseurs sur le bord du chemin et qui ne complique pas l’accès au conseil des groupes vulnérables», explique Carolina De Giorgi, conseillère en règlementation à l’Efama. Selon la fédération, 17 États membres ainsi que les parties prenantes des banques et des assureurs ont fait part de réserves identiques à la Commission. Il faudra a endre le mois de mai, lorsque la Commission européenne dévoilera son projet.

Banques privées

On peut se demander si l’interdiction des rétrocessions aurait un impact important sur les clients des banques privées. La réponse à ce e question diffère d’une banque à l’autre. Depuis 2018, les institutions financières sont obligées de mentionner séparément les rétrocessions sur le relevé de frais qu’elles envoient chaque année à leurs clients. Les rétrocessions ne sont donc plus entièrement cachées. En outre, les banques doivent, selon les règles de conduite MiFID, se montrer beaucoup plus strictes sur ce plan. Si le client a signé un contrat de gestion discrétionnaire – en d’autres termes, s’il délègue totalement la gestion de son portefeuille à la banque – celle-ci ne peut facturer des rétrocessions. Si le gestionnaire investit malgré tout dans des fonds avec rétrocession, celle-ci doit être reversée au client. Dans de nombreux cas, les banques optent dès lors pour les variantes «clean share» en gestion discrétionnaire. Par conséquent, la suppression des rétrocessions n’aurait aucun impact sur les clients ayant signé un contrat de gestion discrétionnaire.

Malgré la popularité des fonds indiciels cotés, les fonds d’investissement classiques restent un instrument important dans la gestion des portefeuilles des clients des banques privées. Et même si les règles européennes exigent plus de transparence, les frais liés à la gestion des fonds restent une affaire complexe pour de nombreux investisseurs.

Tous les fonds facturent des frais de gestion annuels. Ces frais, qui varient en général entre 1 et 2% sur base annuelle, sont déduits quotidiennement (et proportionnellement) de la valeur d’inventaire des fonds, ce qui les rend pratiquement invisibles. Parmi ces frais, on trouve notamment la rémunération du gestionnaire du fonds, celle du distributeur ainsi que les frais administratifs et de marketing.

Rétrocessions

La rémunération du distributeur, aussi appelée «rétrocession», est considérée comme une compensation pour les conseils et le suivi fournis par les banques lors de la vente du fonds. Ce e «rétrocession» peut représenter la moitié des frais annuels. Ces rétrocessions font l’objet de discussions depuis un certain temps. Le Royaume-Uni et les Pays-Bas les ont interdites, respectivement en 2012 et 2014, ce qui signifie que seules les variantes «clean share» des fonds – qui ne prévoient aucune rémunération pour les distributeurs des fonds – peuvent être commercialisées. Si les banques souhaitent facturer leurs conseils, elles doivent le faire séparément afin que ces frais soient visibles pour leurs clients.

Cette mesure pousserait les petits investisseurs dans les bras de courtiers bon marché qui ne fournissent aucun conseil.

«Une interdiction pure et simple ne tiendrait pas compte des di érences entre les pays en matière de distribution des fonds.»

La Commission européenne élabore actuellement un plan visant à interdire les rétrocessions partout en Europe, arguant que ces compensations cachées peuvent influencer les conseils des banques. Selon la Commission, ces dernières pourraient être tentées de vendre les fonds les plus rémunérateurs. Si les honoraires de conseil sont facturés séparément, on pourra s’a endre à davantage d’objectivité de la part des banques, estime-t-on à la Commission européenne. Mais ce plaidoyer se heurte à une forte opposition. Certains se réfèrent à l’expérience du Royaume-Uni et des Pays-Bas, où les distributeurs de fonds facturent séparément des honoraires de conseil à leurs grands clients, certes, mais où ce modèle est difficilement applicable aux petits investisseurs. Ce e mesure les pousserait dans les bras des courtiers bon marché qui ne fournissent aucun conseil. Résultat: ils seraient totalement abandonnés à leur sort.

La Fédération européenne des gestionnaires de fonds, l’Efama, a également fait part de son opposition à ce projet, estimant qu’il n’apportait pas de preuves suffisamment convaincantes de changements positifs sur le marché. «Une interdiction pure et simple ne tiendrait pas compte des différences entre les pays en matière de distribution des fonds. Nous avons besoin

Chez Delen Private Bank, on ne parle même pas de rétrocessions dans les mandats discrétionnaires. «Chez nous, les mandats de gestion discrétionnaire ne travaillent qu’avec des fonds à profils. Nous ne faisons jamais appel à des fonds de tiers. En d’autres termes, tous nos fonds sont des fonds maison, sans rétrocession», explique Ma hieu Corne e, membre du Comité de direction de Delen Private Bank. Certains clients optent pour la gestion-conseil, c’est-à-dire qu’ils prennent eux-mêmes leurs décisions en matière d’investissements avec l’aide des conseils de la banque. Dans ce type de mandat, d’autres règles s’appliquent en matière de rétrocession. Si la banque fournit des conseils indépendants, elle ne peut pas percevoir de rétrocession ou doit les reverser. Dans le cas contraire, elle peut percevoir des rétrocessions de ses partenaires. En Belgique, la majorité des banques a opté pour ce type de conseil. Chez KBC Private Banking, les clients se voient donc facturer des rétrocessions. «Selon les règles européennes MiFID, les rétrocessions ne sont pas remboursées en cas de conseils non indépendants et les clients n’ont pas accès aux variantes ‘clean share’», explique-t-on à la banque. Certaines banques s’écartent cependant de ce e règle. ABN Amro Private Banking, par exemple, a décidé de rembourser les rétrocessions à ses clients. «Qu’il s’agisse de mandats de conseil ou de gestion discrétionnaire, nous privilégions toujours les variantes ‘clean share’. Lorsque ce n’est pas possible – la plupart de ces variantes ne sont en effet pas enregistrées en Belgique et ne peuvent donc pas être proposées aux clients – nous remboursons systématiquement les rétrocessions», explique Lander T’Sjoen d’ABN Amro Private Banking.

Tout ceci démontre qu’une suppression pure et simple des rétrocessions n’aurait qu’un impact limité sur les clients des banques privées. On s’a end à ce que la Commission européenne apporte des éclaircissements sur ses intentions début mai.

1 à 2%

Dans la plupart des fonds, les frais de gestion annuels se chi rent entre 1 et 2% par an.

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