LE MAGAZINE DIGITAL DU TRANSPORT ROUTIER
N°15
Novembre 2023
SPÉCIAL
SOLUTRANS 2023
L’impact de l’électrique sur la carrosserie Une journée dédiée à l’emploi
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Les batteries en question
LES CAMIONS STARS DU SALON
LE GUIDE SOLUTRANS 2023
Comment acquérir un véhicule zéro émission
La grand-messe
A Hervé Rébillon, fondateur eMAG TRANSPORT/ TRM24
près le guide Solutrans en septembre dernier, nous vous proposons ce numéro exhaustif mettant en lumière les principales innovations qui seront dévoilées lors du salon, qui débute le mardi 21 novembre à Lyon Eurexpo. Pendant cinq jours, l’ensemble de la filière se réunira sur un site unique, sur une terre de transport et de production du véhicule industriel. Depuis les derniers camions pensés et produits par le lyonnais Paul Berliet, la technologie a fait des pas de géant, sans compter aujourd’hui l’arrivée des nouvelles énergies qui semblent jouer les trouble-fêtes. En plus des premières mondiales dévoilées lors du salon, telles que les premiers poids lourds électriques, ce numéro vous informera sur les grands thèmes abordés lors de l’édition 2023. Contrairement à 2021, les visiteurs ne viendront pas seulement pour découvrir les nouveaux utilitaires et poids lourds, mais également pour procéder à l’acquisition de ces modèles. En effet, le renouvellement du parc de camions est devenu une obligation en raison de la transition énergétique, qui impose des objectifs drastiques tant aux constructeurs et équipementiers qu’aux détenteurs de parcs, principalement les transporteurs. Enfin, pour être complet, la rédaction consacrera un numéro bilan de l’édition 2023 dès le lundi 27 novembre, soit quelques heures seule-
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ÉDITO
N°15 • Novembre 2023
ment après la fermeture du salon.
Sommaire 4 Constructeur • Solutrans : quelques nouveautés en avant-première 12 Dossier • Carrossiers : à découvrir sur Solutrans 2023 • Équipementiers : première monte au premier plan • I nterview de Stéphane Gonnand, responsable du développement chez Allison Transmission
18 Financement • Acquérir un véhicule zéro émission •3 questions à Christophe Tharrault, dirigeant de Consultruck 22 Focus • Impact de l’électrique sur la carrosserie 28 Énergies • Les gigafactories, entre rêves et réalités 34 Focus • Recyclage des batteries, entre rêves et réalités 36 Équipement • Chronotachygraphe : Le SMT2 peine à débarquer • Interview de Lorin Valton, directeur commercial et technique
chez Inodis, distributeur exclusif des produits Stoneridge en France
40 Solutions connectées • La télématique en effervescence
• Interview de Daniel Hourc, responsable ventes et administration France et Luxembourg chez Astrata Europe
44 Constructeur • Autobus et autocars : hydrogène et électricité à tous les étages
Ont collaboré à ce numéro Directeur de publication Hervé Rébillon • rebillon@trm24.fr Journaliste Jean-Philippe Pastre • pastre@trm24.fr Publicité La Station Productions Conception et maquette • Luna Aguilar Webmaster TRM24 • Éric Martin Photos • Tous droits réservés e-MAG TRANSPORT est proposé par la rédaction de TRM24 et édité par La Station Productions.
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Constructeur
SOLUTRANS
Quelques nouveautés en avant-première Plus que jamais, Solutrans 2023 constitue un rendez-vous clé pour les constructeurs et les équipementiers actifs en France. Voici les nouveautés que l’eMAG a pu glaner à la veille du salon. Jean-Philippe Pastre • pastre@trm24.fr
Fin du suspense pour Daimler Truck France : c’est bien l’eActros 600 qui aura la vedette ! Ce qui fait que l’ensemble du stand vivra dans une ambiance électrique. Le constructeur commercialise l’eEconic électrique, révélé mi-octobre lors du salon Pollutec 2023 avec une benne du carrossier Semat. Dans la gamme Daimler Truck dédiée aux applications urbaines, outre l’eEconic, il faut ajouter les châssis cabine eFuso Canter. Un modèle clé pour accéder aux ZFE-m les plus restrictives (le centre de la métropole de Lyon en fait partie). Cependant, l’attraction se situera à l’opposé du catalogue avec l’eActros 600 ouvert aux commandes N°15 • 11/2023
dès cette fin d’année 2023 (pour livraisons début 2025). Il existera en versions tracteurs 4x2 et porteurs 4x2 et 6x2, animés par une seule et même chaîne de traction. À savoir 4,5 t de batteries lithium-ion LFR (fer phosphate) fournies par le chinois CATL, qui alimentent 2 moteurs réunis dans le pont (appelé eAxle) développant au total 400 kW en continu (et 600 kW au démarrage). Le tout est associé à une transmission robotisée intégrée à 4 démultiplications. L’énergie stockée à bord représente 600 kWh utiles (621 kWh théoriques). Pas d’options à ce stade. Seules les prises de charge donnent lieu à personnalisations : en série, la prise
Constructeur CCS Combo 2 est en côté gauche. Mais on peut sur demande obtenir le même équipement côté droit. Daimler Truck annonce la compatibilité du nouvel eActros 600 avec la recharge très haute intensité MC. Les emplacements sont prévus sur le véhicule, il reste « juste » à constituer le réseau public de charge répondant à ce standard… Y’a qu’à… Les trois hauteurs de vaillons du Mercedes-Benz Actros sont proposées sur l’eActros 600 qui revendique 500 km d’autonomie à 40 t de PTRA. Attention, du fait de la limitation à 9 t de l’essieu avant, et malgré la présence d’un pont arrière autorisant 13 t techniques, la répartition de charge aux essieux pour la configuration ensemble routier peut devenir un problème (en particulier hors de France). Une semi-remorque à rideaux coulissants peut ainsi se trouver limitée à 22 t de charge utile.
Problème évidemment résolu en porteur remorquant. Le Mercedes-Benz eActros 600 est même homologué en 44 t de PTRA. Pour cette raison, il dispose en série des résistances hautes performances permettant de dissiper l’énergie excédentaire lors des phases de retenue batteries pleines. La cabine évolue peu, mais les visiteurs auront tout le loisir d’observer l’extérieur. L’empattement rallongé (minimum 4 000 mm pour loger les packs de batteries) et le capot avant bombé, couplé aux optiques de phare dans le pare-chocs (intégrant chacune une un radar), change la physionomie du modèle. Si Daimler Truck refuse de communiquer un tarif précis, le groupe annonce un prix oscillant entre 2 et 2,5 fois le prix d’un Mercedes-Benz Actros diesel de puissance et silhouette équivalente.
Pour Daf Trucks France l’attraction sera le XB, une mise à jour technique de son prédécesseur, le Daf LF dont il reprend la cabine et les motorisations. Le Daf XD devrait être également présent avec la motorisation 6 cylindres Daf PX7 plus compacte et légère afin de compléter la gamme Daf XD vers le bas, en particulier pour les applications liées à la distribution légère ou les missions typiquement urbaines. L’intégralité de la gamme exposée sera dotée des nouvelles fonctions d’aides technologiques à la conduite (ADAS, Advanced Driver Assistance Systems) qui seront livrables à compter du mois de janvier 2024. Elles concernent les Daf XB, XD, XF, XG et XG+. Ce ne sont pas moins de 11 fonctions qui viennent s’ajouter, certaines étant en lien avec le règlement européen GSR2 entrant en vigueur en juillet 2024. Le freinage d’urgence AEBS a recours à la fusion de données entre caméra et radar. Un radar supplémentaire prend en charge la détection de piétons et autres usagers dits vulnérables à proximité du camion lorsque celui-ci évolue à basse vitesse. L’Event Data Recorder enregistre images et données lorsque le système AEBS s’active. À cela s’ajoute, pour prévenir les autres usagers, un signal de freinage d’urgence activant les feux de détresse.
La détection de présence dans les angles morts fait partie des équipements de série, tout comme la lecture automatique des limitations de vitesse. L’assistant de détection de sortie de voie est également intégré en série sur toute la gamme routière. En option, une nouvelle caméra arrière est prévue, ainsi que le système d’inverseur automatique feux de croisement/feux de route. Faisant partie du paquet GSR2 : le détecteur de baisse de vigilance pour le conducteur. Une prédisposition pour éthylotest antidémarrage est incluse.
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Constructeur
Ford Trucks France pourrait créer la surprise
en dévoilant un nouveau véhicule à pile à combustible. La filiale autonome de distribution et d’aprèsvente des camions lourds, issue de la co-entreprise entre Ford et Otosan (Turquie), viendra avec toute sa gamme au salon Solutrans 2023. Cela inclut, outre les récents tracteurs F-Max (honorés du prix du Camion européen de l’année 2019), la plus conservative gamme de porteurs à silhouettes 4x2, 6x4 et 8x4 à moteurs Ford Ecotorq de 9 et 12,7 l. Cette entrée de gamme est l’ultime développement
Irizar Group a dérivé de ses
gammes d’autobus urbains Irizar eMobility un camion dédié aux
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du mythique Ford Cargo des années 1980. Désormais, Ford Trucks dispose d’une gamme complète en France incluant des châssis dédiés aux chantiers ou à l’approche chantier. Notez que le groupe Ford Otosan développe une version électrique à batteries dérivée de ses gammes de porteurs. Il se murmure que le Ford F-Max pourrait connaître quelques évolutions techniques au niveau de la transmission, avec l’apparition d’une boîte robotisée maison en alternative à la transmission ZF TraXon 12 rapports.
missions de collecte des ordures ménagères ou à la distribution en centre-ville. Il en hérite toute
la chaîne de traction. L’Irizar ie Truck est disponible en silhouettes 4x2 ou 6x2/4. On retrouve nombre de spécificités de l’autobus urbain : la porte avant droite louvoyante, le poste de conduite surbaissé, le plancher bas et plat. Un rival sérieux pour Volta Trucks ou le Mercedes-Benz eEconic. Peutêtre en saura-t-on davantage à Solutrans sur les canaux de commercialisation et l’après-vente de ce modèle en France. Autre singularité : Irizar eMobility développe également l’Irizar ie Truck avec prolongateur d’autonomie avec pile à combustible hydrogène.
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Constructeur Les nouveautés d’Iveco seront révélées la semaine précédant le salon Solutrans. Les changements concerneront, en gamme haute, l’aménagement intérieur avec l’apparition (enfin !) d’une colonne de direction réglable sur deux axes. L’ensemble de la gamme se met en conformité avec le règlement européen GSR2, ce qui signifie l’apparition de nouveaux afficheurs entièrement numériques et de nouveaux équipements d’infodivertissement, sans oublier les systèmes de détection dans les angles morts ou l’apparition (en série ou en option ?) des rétros caméra. Pour autant, la caisse en blanc de la cabine ne devrait pas changer significativement. Iveco sera également sous le signe de l’électrification de sa gamme, puisque désormais, il n’y a plus officiellement de recharge très haute intensité MCS au mégawatt en Europe ! L’offre en camions à batteries fait à présent partie intégrante du catalogue Iveco. Pour découvrir le nom du modèle et sa physionomie définitive, on devra patienter jusqu’à Solutrans 2023. Le constructeur aura donc du tout électrique à proposer aux deux extrémités de la gamme. La question est de savoir si les autres modèles à énergies non conventionnelles (GNV sous forme gazeuse ou cryogénique) seront exposés sur le salon.
MAN Truck & Bus France devrait exposer le MAN eTruck en avant-première ; une façon de faire patienter avant sa production en série. Le constructeur annonce dès à présent ouvrir les carnets de
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commandes pour ce modèle. Il présentera ses modèles TGX compatibles avec le règlement européen GSR2 de 2024. Ces modèles intègrent les dispositifs de détection d’angle mort et de présence de piétons et cyclistes, ainsi qu’une toute nouvelle architecture électronique. À la suite de l’IAA 2022, on retrouvera les évolutions de la chaîne cinématique destinées à abaisser les consommations, notamment celles concernant le moteur MAN D26. MAN France mettra en avant, évidemment, les offres B100 exclusif permettant de bénéficier de la vignette Crit’Air 1. En l’absence de Volkswagen France, il est probable que les petits utilitaires MAN TGE et eTGE aient une place d’honneur sur le stand.
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Constructeur
Au sein du groupe Volvo AB, seul Renault Trucks fera le déplacement à Solutrans 2023, comme une inversion des rôles puisque c’est Volvo Trucks qui eut l’honneur de participer au salon IAA 2022. La marque au losange (renouvelé conformément à la charte graphique des automobiles Renault), viendra avec ses nouvelles gammes lourdes électrifiées E-Tech T et E-Tech C
Non seulement cette marque parle du panel énergétique, mais elle le démontre de façon concrète. Ainsi, Scania France a confirmé la présence de plusieurs énergies sur son stand ou son centre d’essais. Il y a, bien sûr, deux représentants de l’électrique à batteries : un porteur R25 en silhouette 6x2*4 carrossée bras hydraulique, ainsi qu’un tracteur routier 40R électrique. Ce dernier constitue évidemment l’une des attractions, puisqu’il s’agit d’une application routière à vocation régionale voir grand régional. Aux côtés des modèles « pur batteries », l’hybridation, dans sa définition rechargeable avec roulage zéro émission éligible Crit’Air 1, sera présente via un porteur Scania R360, également carrossé en bras hydraulique. Les motorisations diesel, qu’elles soient gazole, HVO ou B100 (voire B100 exclusif, une nouveauté de 2023 pour Scania France que l’on doit à son centre d’adaptation CAPS d’Angers) seront représentées par le Scania 500S à moteur DC13 Super. Enfin, et ce n’est pas la moindre des nouveautés, signalons la présence anN°15 • 11/2023
à batteries, le E-Tech T ayant eu droit à une avant-première lors des 24 Heures du Mans Camions fin septembre 2023. Renault Trucks présentera toute sa gamme compatible avec le règlement européen GSR2, ce qui inclut nombre de changements dans l’architecture et les interfaces électroniques. Détection et caméras anti-angles morts sont donc de la partie. La gamme haute (C, K et T) modèles 2024 dispose d’un tout nouvel afficheur de bord entièrement numérique avec un écran secondaire compatible Android Auto. Pour les motorisations diesel, l’accent sera très probablement mis sur les offres B100 exclusif donnant droit à la vignette Crit’Air 1. À propos de cette vignette, vu la conversion de la marque à la religion de l’électrique à batteries, on se doute que l’offre D-Wide au GNV ne sera pas exposée sur le stand. En gamme basse, Solutrans 2023 sera l’occasion de voir la nouvelle face avant des Renault D et D-Wide dont l’air de famille avec les clones Volvo FL et FE est manifeste, ce qui est normal : c’est la même cabine, fabriquée à Blainville-sur-Orne (Calvados). Ils hériteraient, selon Renault Trucks, de nouveaux rétroviseurs.
noncée sur le stand du Scania R460 fonctionnant au GNV (compatible biométhane), doté de la nouvelle génération de moteurs GNV OC13 de Scania. Ce sera aussi la première présentation officielle pour la nouvelle interface conducteur compatible avec les exigences réglementaires GSR2. Ce changement marque la fin des afficheurs analogiques traditionnels. Clairement, Scania remporte la palme de l’éclectisme côté énergies sur cette édition du salon Solutrans. En ces temps incertains, que ce soit sur les plans réglementaire, énergétiques et fiscaux, c’est peut-être la voie de la sagesse.
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Dossier
CARROSSIERS
À découvrir sur Solutrans 2023 Voici un aperçu des nouveautés que les constructeurs ont bien voulu révéler en avant-première.
L’
édition 2023 verra le retour de SchmitzCargobull à Solutrans. Le groupe viendra avec deux nouveautés. Le constructeur et carrossier présentera une semi-remorque à rideaux coulissants appelée S.CS X-Tough, spécialement conçue pour les PTRA à 44 t. Elle bénéficie d’un châssis renforcé, toujours à structure galvanisée et boulonnée. Le porte-à-faux arrière a fait l’objet d’une étude spécifique pour supporter les passages intensifs de chariots élévateurs. Ce châssis peut être habillé de différentes carrosseries Schmitz-Cargobull : du rideau coulissant sans lattes de rehausse ou bien sans poteaux. Pour la distribution en fret sec et la messagerie, le constructeur exposera, également en avant-première française, le fourgon S.BO Pace (conforme à la norme DIN EN 12642 code XL) qui peut être personnalisé via plusieurs options : rails d’arrimage, bâche de maintien pour petits colis, sangles d’arrimage, toit translucide ou tôlé, hayon élévateur rétractable, différents choix de porte arrière en aluminium (à vantaux ou relevante manuelle). Le constructeur revendique un gain de poids de
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700 kg via l’usage d’une structure en nid d’abeille pour les panneaux latéraux. Le plancher est conçu en série pour des charges au sol de 5,4 t mais peut, pour plus de polyvalence d’usage, être renforcé en option (7,1 t ou 8 t). Sécurité et gain de temps Son compatriote Kögel viendra avec des produits spécifiques pour le marché français, tels que la semi-remorque Kögel Cargo avec plancher renforcé. L’attention portera également sur les semi-remorques dédiées au transport multimodal comme la fourgon S.BO Pace avec extension arrière pour conteneurs ISO et High Cube de 20 à 45 pieds, dotée de l’option de verrouillage de conteneur Multi Container Stop. Cet équipement permettrait de ne plus avoir recours aux systèmes twist-lock habituels à l’avant de la semi. L’arrimage du chargement se ferait exclusivement par « complémentarité de forme » et répondrait à la norme DIN EN 12642. Les conteneurs High Cube viendraient donc buter directement contre la barre transversale avant lors de leur mise en place. L’ar-
Dossier
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rimage latéral est assuré par le tunnel dans le conteneur. Pour les conteneurs ISO sans tunnel, la fixation se ferait via un tourillon situé sur le dessus du MCS. À l’arrière, Kögel conserve les dispositifs traditionnels. Le constructeur annonce ainsi un gain de temps de 50 % pour sécuriser les boîtes sur le châssis. Cette option est également disponible pour les semi-remorques Kögel Combi ou plateaux. La nouvelle génération de porte-conteneurs offrirait un gain de 750 kg en tare. Seront aussi mis en avant les services et les outils de télématique. L’entreprise Espagnole Granalu Le groupe Benalu sera bien présent à Solutrans avec l’ensemble de ses présentera les évolutions de sa marques. Il participe également au prix de l’innovation, avec le système gamme de benne vrac G-Aero, inid’ouverture Slidoor réduisant l’espace requis pour ouvrir les vantaux. tialement introduite sur le marché en janvier 2022. La gamme sans fin et glissières. Il peut être actionné depuis qui sera présente à Solutrans existe de 9 m à 10,5 m la cabine et offrirait un espace de balayage limité. de longueur utile, avec des volumes de 35 m3 à La cinématique consiste à ouvrir les vantaux, puis 61 m3. Les évolutions portent sur l’aérodynamique à les faire coulisser le long des faces latérales à et la charge utile (sans plus de détails chiffrés). l’aide d’actionneurs. Le gain de place permet d’ouvrir les portes lorsque les bennes sont parquées Nouveautés françaises côte à côte. Selon le groupe Benalu, ce système Côté français, les marques du groupe Benalu font Slidoor est également compatible avec les espaces stand commun. Les visiteurs devraient voir sur le 3 limités en hauteur. stand une benne grand volume de 52 m Bulkliner Chéreau pourrait présenter la version série intégrant tout alu (châssis et caisse) de Benalu. Pour Maisonen une semi-remorque différents développements neuve, l’attention se portera sur la citerne Biotanvus lors des éditions précédentes de Solutrans, ker à pression atmosphérique en acier inoxydable associant les panneaux VIP, des carénages, la cloide 32 000 l pour le transport des déchets bios. son intérieure EasyFlex et les outils télématiques Legras présentera un fond mouvant (spécialité de SmartTrailer (incluant les données de TPMS bientôt la marque) en version renforcée de 92 m3. L’attracobligatoires pour les véhicules neufs). tion sera constituée par le Slidoor, un système auRival historique de Chéreau, Lamberet poursuit ses tomatique d’ouverture de porte de benne par vis travaux autour de l’ergonomie et de la sécurité. Avec le Safestair, le travail a porté sur la profondeur et la forme de l’emmarchement. Le marchepied demeure escamotable et comprend, suivant les carrosseries et châssis, de 3 à 4 marches, complétées par une tablette avec rampe latérale donnant un troisième appui de sécurité. Le carrossier-constructeur annonce qu’il n’y a aucune zone de pincement ou de cisaillement avec son dispositif qui se verrouille de lui-même. Il serait proposé en première monte comme en seconde monte. Jean-Philippe Pastre
pastre@trm24.fr N°15 • 11/2023
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Dossier
ÉQUIPEMENTIERS
Première monte au premier plan Les équipementiers seront également bien représentés à Solutrans. Les pneumatiques auront leur espace dédié sur le salon. Autres fidèles, ayant déjà annoncé leurs principales attractions, les spécialistes de la température dirigée.
A
pollo Tyres est en pleine offensive en Europe. L’équipementier indien, qui a racheté le néerlandais Vredestein, a révélé plusieurs nouveautés cette année en France, avec l’enveloppe EnduRace RT2 en dimension 385/55 R 22.5 (indice 164K). Elle est labellisée et homologuée 3PMSF, et peut donc être considérée tout temps. Elle répond aux exigences de la loi montagne française. La marque annonce des « niveaux de durabilité 1,7 fois supérieurs aux exigences réglementaires européennes ». Ce pneumatique est déjà référencé en première monte chez le carrossier constructeur Schwartzmüller. Pour les marchés de la rechange, l’Apollo EnduRace RT2 est disponible depuis le mois de juillet 2023. L’EnduRace RT2 385/55R22.5 est classé B en résistance au roulement, B en adhérence sur sol mouillé et A en génération de bruit (69 dB).
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Résistance au roulement Apollo Tyres a décroché la lune en obtenant une labellisation A en résistance au roulement pour son pneu EnduMile LHT pour véhicules remorqués. Il est commercialisé en taille unique : 385/65 R 22.5 (indice 164K). Cette performance peut avoir son intérêt dans la perspective de référencements en première monte chez les carrossiers constructeurs bientôt sous le coup des calculs Vecto. Ce classement A en résistance au roulement serait, selon le communiqué, une première pour Apollo Tyres. Il serait également très bien classé pour les émissions sonores (sans plus de détail en dB). Les nappes sommet et la bande de roulement offriraient un large appui au sol afin d’homogénéiser la répartition de la pression. De nouveaux mélanges de gommes, associant des polymères et des renforts en charges minérales minimiseraient la ré-
Dossier sistance au roulement tout en préservant l’adhérence sur sols mouillés (sans plus de détail, en matière de classement). Le fabricant, qui a développé ce pneumatique en Europe chez Vredestein, annonce également une carcasse robuste apte à être rechapée. Il est produit en Hongrie à l’usine Apollo Tyres de Gyöngyöshalász.
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bility) et de flottes (Michelin Connected Fleet). Très engagé dans la filière hydrogène via Symbio, l’équipementier présentera l’offre dihydrogène clé en main pour véhicules utilitaires à travers sa filiale Watèa. Symbio, qui n’a pas de stand autonome à Solutrans, devrait donc s’inviter sur le stand Michelin, puisque le groupe est l’un des actionnaires majeurs de ce fabricant de piles à combustible.
Rechapage et services Le « régional de l’étape », Michelin, viendra très officiellement à Solutrans avec Conformité avec le un stand où seront à la fois règlement GSR II ZF met l’accent sur le nouvel ensemble moteur et boîte intégré ZF CeTrax 2 présentés les pneumatiques et ZF, qui se désengage de ses permettant une migration facile vers les services associés. Pas de réusines françaises (Saint-Étienne, la traction électrique pour volution (comme l’enveloppe sans fermée, et Andrézieux-Bouthéon, les constructeurs de camions. air qui a tenu la vedette à Equip’Auvendue), sera toutefois très préto 2023 dans les mêmes halls il y a sent à Solutrans à travers l’ensemble quelques semaines), mais une gamme complète de ses activités, même si l’accent est évidemment de pneus poids lourds régionaux (Michelin X Multi mis sur les solutions d’électrification, en particulier T2, Michelin X Multi HD Z, Michelin X Multi Energy) avec la motorisation ZF CeTrax 2. Il s’agit de la noucomme pour utilitaires, ici en version toutes saivelle génération de moteur électrique à implantasons (Michelin Agilis CrossClimate). tion centrale, pouvant se substituer à la chaîne ciL’attention sera portée sur les aspects environnenématique d’origine de véhicules industriels. mentaux, via la réalité du rechapage (la firme aime Le ZF CeTrax 2 comprend dans un seul bloc 2 morappeler, à juste titre, que 100 % des pneus poids teurs électriques à induction délivrant 380 kW lourds Michelin sont rechapables) et les dévelopde puissance continue et un couple en crête de pements autour des pneumatiques « sans pétrole » 24 700 Nm en sortie de boîte. Il intègre 2 onduqui devraient apparaître en série d’ici 2026. leurs (à carbure de silicium) fonctionnant sous Côté services, le fabricant exposera ses outils de 800 V, ce qui vise à réduire l’encombrement et les gestion de pneumatiques (Michelin Connected Mosections de câbles. Dans le même but, l’unité électronique est incluse. La boîte de vitesses, intégrée, comprend 3 rapports. Elle a recours à 2 actionneurs électriques. Les véhicules remorqués font, depuis la fusion de ZF avec Wabco, partie du portefeuille du groupe, et le stand sera l’occasion de découvrir l’iEBS, une évolution du système bien connu comprenant une nouvelle valve de déverrouillage et une mise en conformité électronique avec le nouveau règlement GSR II. Cela concerne autant la sûreté des aides à la conduite que l’intégration dans le dispositif iEBS du système de surveillance de la pression des pneumatiques (ici ZF/ Wabco OptiTire). Pour la télématique, le stand fera une large place à Scalar. ••• N°15 • 11/2023
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Dossier
L’électrification des groupes froids (ici un groupe Carrier Vector) eCool et des semi-remorques est en cours avec des essieux intégrant des générateurs électriques (BPW, SAF, Valx).
thermique auxiliaire. Elle peut fonctionner sur Standardisation et maintenance batteries comme avec l’AxlePower, une génératrice Son compatriote BPW sera présent, lui aussi avec intégrée à un essieu. des offres télématiques et du matériel. Outre l’élecLa gamme E pour utilitaires légers comprend le trification via la génératrice eAxle BPW, qui devrait E500-e en mono ou multitempérature. Pour les être en vedette chez certains carrossiers construcporteurs de distribution, Thermo King met en avant teurs de semi-remorques, l’actualité annoncée le groupe FK2 électrique avec génératrice embarporte sur la standardisation des paliers quée EnviroDrive issue du spécialiste Frigoblock. des essieux de 10 t et 12 t de capaPour les véhicules dotés de moteurs cité aux roulements de génération thermiques, la société maintient ECO Plus 3. Ils étaient déjà préson offre de groupes pousents sur les essieux à 9 t de lie-moteur : le V-1000 (pour capacité unitaire. porteurs lourds) , le VX-500 Le spécialiste des essieux et à destination des utilitaires trains de roulements insiste lourds (de 3,5 t à 7,5 t de sur les bénéfices en stanPTAC), avec montage en padardisation et en coûts de villon ou en face avant et maintenance. Le moyeu une puissance accrue. Le stand est accessible en agissera complété par l’Advancer sant simplement depuis A-500, unité multitempéral’écrou central sans recouture pour semi-remorques. rir à des extracteurs. Le Carrier Transicold ajoute remontage de l’écrou cende son côté le B100 parmi tral ne recourt pas nécessailes substituts au pétrole. Le rement à la clé dynamoméBPW réduit le nombre de références en Vector HE 19 mono ou multrique grâce à un limiteur de pièces de rechange tout en simplifiant titempérature est désormais couple intégré. L’accès aux l’entretien des roulements et freins en compatible avec le carburant étriers de freins à disques généralisant l’ECO Plus 3 sur l’ensemble de substitution B100. Le spéciaainsi qu’aux garnitures de de ses essieux. liste met en avant une réduction du freins à tambours est, selon BPW, bilan carbone de 60 % grâce à l’utilisation de ce particulièrement simplifié. En prime, cette gécombustible issu d’esters méthyliques d’acides gras nération permet de bénéficier de l’extension de gaet autres matières organiques recyclées, sans perte rantie 5+3 ECO Plus courant sur 8 années. de performance pour la génération de froid et sans remettre en cause la possibilité de répondre aux Température dirigée et décarbonation exigences sonores du standard Piek. Ce développeCe n’est plus une nouveauté, les spécialistes de la ment a duré tout au long de l’année 2023 pour être température dirigée sont engagés depuis plusieurs présenté à Solutrans. La production de ce groupe années dans la décarbonation de leurs métiers. compatible B100 est annoncée pour début 2024, Thermo King mettra en avant ses groupes froid avec la France en premier marché. électrifiés pour véhicules utilitaires et industriels. Jean-Philippe Pastre Cela comprend l’Advancer-e, unité pour semi-repastre@trm24.fr morques entièrement électrique, sans moteur N°15 • 11/2023
Dossier
[Publirédactionnel]
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nterview
Stéphane Gonnand
Responsable du développement chez Allison Transmission
« Allison Transmission poursuit son engagement sur la voie des économies de consommation et de l’électrification à Solutrans »
Cette année, Solutrans est placé sous le signe de la transition énergétique. Quelles sont vos nouveautés sur ce sujet ? Stéphane Gonnand : À Solutrans, nous exposerons notre essieu électrique eGen Power 100S. Cette gamme a été récompensée par un I-nnovation Award lors de l’édition 2021, pour l’efficacité de sa propulsion pour véhicules électriques. Elle a également été reconnue pour sa réduction des gaz à effet de serre et des émissions sonores. Concrètement, comment fonctionne cet essieu électrique ? S. G. : L’eGen Power 100S est l’un des essieux électriques entièrement intégrés les plus puissants et les plus efficaces au monde. Il est conçu pour remplacer les transmissions traditionnelles. Il est doté d’un moteur électrique, capable de générer 225 kW de puissance continue, avec une puissance en pointe de 325 kW. Il intègre également une boîte de vitesses à deux rapports dans le carter central, optimisant l’essieu électrique pour permettre une haute aptitude au démarrage en pente et déplacer de lourdes charges, tout en offrant une vitesse de pointe optimisée et une efficacité supérieure. Avec sa conception différenciante, l’eGen Power 100S est une solution hautement technique et entièrement intégrée. Ses avantages en matière de performances et d’efficacité se traduisent par des intervalles de service étendus, une autonomie accrue ou une réduction de la
taille du bloc batterie du véhicule électrique, optimisant ainsi la valeur économique fournie à l’utilisateur final. Et pour les véhicules à moteur thermique, avez-vous de nouveaux développements ? S. G. : À Solutrans, nous présenterons également notre transmission entièrement automatique xFE qui permet d’aller plus loin dans les économies de consommation. Cette transmission s’appuie sur le logiciel FuelSense® 2.0 et sa programmation innovante des changements de rapports DynActive® Shifting. Cette dernière utilise un algorithme pour choisir le point de changement de rapports optimal, en fonction du véhicule, des spécifications et des différents paramètres, offrant en permanence l’équilibre idéal entre économie de carburant et performances. Ainsi, avec leur productivité, leur fiabilité et leur facilité d’utilisation, nos transmissions contribuent à atteindre un coût total de possession optimal.
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Allison Transmission à Solutrans 2023
Hall 5 stand B066 N°15 • 11/2023
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Financement
Acquérir un véhicule zéro émission Le financement des véhicules vertueux sera au cœur des débats lors de l’édition 2023 de Solutrans. Outre les offres et conseils constructeurs, des conférences dédiées seront proposées. Les solutions pour acquérir des camions zéro émission existent, elles sont nombreuses et souvent méconnues.
L’
idée d’un loyer mensuel fixe pour payer non seulement le véhicule mais aussi les équipements de batteries et de recharge fait son chemin. Car, contrairement au camion traditionnel diesel, le véhicule électrique coûte cher et nécessite un équipement de recharge mobile ou en entreprise. Les bornes de recharge se comptent sur les doigts d’une main sur les routes françaises. Offres multiservices Première piste pour le financement : tous les constructeurs proposent aujourd’hui les offres de crédits classiques qu’ils appliquent aux véhicules zéro émission (électrique, gaz, etc.), certains proposent aussi la location. « Nous nous adaptons aux besoins du client. On ne s’arrête pas qu’au financement du véhicule, nous proposons une offre pour les chargeurs mobiles. Il ne s’agit pas de financer de gros investissements », nous a confié Laurence Éluère, directrice commerciale et développement à Scania Finance France. Le construc-
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teur innove. Il vient d’annoncer la création d’une entreprise avec Sennder, baptisée Juna, pour proposer des camions électriques payants à l’utilisation. « La coentreprise, récemment lancée en Allemagne, vise à faire progresser l’adoption des camions électriques afin de conduire la transition vers une industrie logistique durable, conformément à la déclaration commune de l’Acea/PIC selon laquelle d’ici 2040, tous les nouveaux véhicules utilitaires vendus doivent être sans énergie fossile », souligne le constructeur. L’offre proposera ainsi des véhicules électriques haut de gamme, des services de réparation, de maintenance, d’assurance, numériques et d’analyse. En plus des frais basés sur l’utilisation et du recours à la garantie, grâce à l’analyse des données, Juna optimise les stratégies d’électrification et simule les itinéraires pour l’adéquation des camions électriques. Volta Trucks, qui a cessé ses activités, devait proposer une mensualité fixe. Plusieurs contrats étaient prévus dont un obligatoire pour la maintenance. La
Financement
société proposait une offre à la location longue durée (sur 8 ans contre 10 ans pour le diesel) ou le crédit-bail. En clair, avec ce type de solution, « plus besoin d’être propriétaire de son camion mais on le loue avec un ensemble », nous avait expliqué le directeur financement de Volta Trucks. La location semble être une solution faite sur mesure pour financer son utilitaire ou son camion électrique (ou au gaz). « Nous souhaitons orienter nos clients vers la location. La demande est de plus en plus forte. C’est aussi une solution pour changer plus souvent ses véhicules quand un transporteur envisage de renouveler son parc », précise Philippe Quilliet, directeur général de la nouvelle entité financière de Daimler Truck (Daimler Truck Financial services France). Rôle des organisations professionnelles Les fédérations du transport routier accompagnent les entreprises dans cette démarche pour acquérir un véhicule vertueux. « Dans le cadre de la feuille de route de décarbonation, nous avons travaillé sur ce
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point avec le gouvernement. Nous avons demandé une enveloppe de 300 M€ de subventions directes sous la forme de bonus », nous a dévoilé Olga Alexandrova, directrice déléguée en charge du transport routier de marchandises de TLF. L’organisation a trouvé plusieurs pistes de financement : « Nous ne pensons pas assez aux loueurs, des professionnels qui restent le plus souvent dans l’ombre pour le législateur. L’accès au suramortissement serait une solution. Nous discutons aussi avec des organismes comme BPI France dans le cadre de la reconversion des flottes, ou encore avec la Banque des territoires (Caisse des dépôts) pour des co-investissements ou des investissements directs pour de l’acquisition ou de la location longue durée du véhicule et du matériel de recharge ». De son côté, l’OTRE vient de renouveler son partenariat avec le Crédit Coopératif afin d’apporter aux transporteurs un financement ouvert au rétrofit toutes énergies. Le groupe bancaire élargit ainsi son prêt Choisir la mobilité verte aux véhicules lourds rétrofités, dans la continuité des financements déjà proposés aux entreprises de transport routier liés à l’acquisition ou à la transformation de leurs flottes en véhicules plus propres (électriques, hybrides, GPL, biocarburants, rétrofit ou GNV). « Nous travaillons avec l’OTRE dans un esprit de collaboration et d’innovation pour nous adapter aux besoins concrets des transporteurs. Nous avons ainsi décidé d’élargir le champ de financement de notre prêt Choisir la mobilité verte pour répondre aux enjeux de la diminution de carbone dans le secteur du transport », a expliqué Sylvain Leclerc, directeur du marché des entreprises du Crédit Coopératif. Bref, les solutions de financement existent, il faut être curieux et bien chercher les offres souvent méconnues. Aujourd’hui, un véhicule électrique utilitaire sur deux vendus est autofinancé, soit par les constructeurs soit par l’une des offres présentées, avec une part de plus en plus importante pour la location. Hervé Rébillon rebillon@trm24.fr
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Le financement des véhicules vertueux à Solutrans L’adoption d’utilitaires et de camions zéro émission est devenue une priorité pour de nombreuses entreprises cherchant à réduire leur empreinte carbone et à se conformer aux nouvelles réglementations environnementales. Cependant, l’acquisition de ces véhicules peut représenter un investissement financier important. Avec les constructeurs, les loueurs ou encore les établissements bancaires, nous discuterons des différentes options de financement disponibles pour aider les entreprises à acquérir ces véhicules verts. Trois conférences réparties sur 3 jours permettront d’analyser la plus large gamme d’offres proposées aujourd’hui.
Salle de conférences Norbert Detoux (entrée libre) Mercredi 22 novembre 2023 16 heures – 17 heures Jeudi 23 novembre 2023 16 heures – 17 heures Vendredi 24 novembre 2023 16 heures – 17 heures
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Financement
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questions à
Christophe Tharrault Dirigeant de Consultruck
« Un projet de solution de transport décarboné doit se décider à trois : Le chargeur, le transporteur et le banquier »
eMAG transport : La décarbonation fait désormais partie des plans d’investissement des entreprises de transport ? Christophe Tharrault : La mise en place de scope 3, la demande des chargeurs et la volonté des transporteurs à décarboner amènent chaque entreprise à reconsidérer ses investissements vers des solutions plus « green ». Toute la chaîne de valeur a intégré cette nouvelle donne, que beaucoup veulent maintenant transformer en opportunité. Tous les acteurs ont conscience que les solutions de transport décarboné exigent des investissements beaucoup plus importants, qui doivent donc être intégrés dans les plans d’investissement. Les banques consacrent une partie importante de leurs prêts vers des investissements verts. Certaines ont déjà annoncé dans leur stratégie la fin du financement de camions émetteurs de CO2 dès 2030 ! eMT : Quelles sont les étapes pour un projet de financement ? C. T. : Un projet de solution de transport décarboné doit se décider à trois : Le chargeur, le transporteur et le banquier. Lorsque les deux premiers sont d’accord sur les flux et les contraintes d’exploitation à lever (chaque solution de décarbonation impacte de facto l’exploitation) ainsi que le prix, l’étape suivante consiste alors à convaincre le banquier. Pourquoi celui-ci accepterait-il un capex plus élevé, intégrant forcément plus de risques que le traditionnel diesel ? Parce que chaque euro investi N°15 • 11/2023
en supplément sera comparé à la tonne de CO2 évitée versus un camion classique. Et c’est entre autres ce repère sur lequel les financiers vont s’appuyer pour justifier eux-mêmes de leurs choix. eMT : La location est aussi une solution pour le financement des véhicules zéro émission ? C. T. : La location est aujourd’hui une solution plébiscitée. Elle permet au transporteur de limiter son besoin de capex, de supprimer le risque lié à la valeur de revente à terme et de s’affranchir de tout risque économique lié à la technologie (batteries et bientôt piles à combustibles). Elle permet aussi aux constructeurs de faire fonctionner leurs financières en captant la totalité du revenu et de la relation client. Elle permet aux loueurs d’élargir leur offre et de fidéliser leurs clients. De nouvelles solutions vont être mises en avant, telles que le paiement à l’usage (au kilomètre, au kWh consommé, etc.). Nous sommes au début d’une nouvelle ère, donc de nouvelles offres !
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Impact de l’électrique sur la carrosserie L’électrification a un impact non négligeable sur les véhicules industriels, tant pour la partie motrice que pour la carrosserie. Utilitaires et poids lourds exposés à Solutrans voient leur conception évoluer. L’occasion d’en mesurer de visu les contraintes sur l’encombrement ou les masses. Mais l’électrification impacte aussi l’entretien et la réparation.
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u fait de la faible densité volumique de l’énergie stockée dans les batteries, fussent-elles lithium-ion, elles sont encombrantes. Pour la densité massique, on oscille entre 90 et 160 Wh/kg en lithium-ion LFP (fer phosphate) et de 150 à 220 Wh/kg en lithium-ion NMC (nickel manganèse cobalt). À titre indicatif, le gazole offre 12 055,52 Wh/kg*. Les performances des cellules sont une chose, mais pour faire un pack batterie, il faut ajouter système de refroidissement, pilotage électronique (chaque module étant relié au BMS**) et coffrages de protection. Tout ceci représente un volume, et une masse, supplémentaire qui vient grever les densités mesurées à la cellule.
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Poids, dimensions et charge à l’essieu Résultat, pour son dernier camion grand routier eActros 600, Mercedes-Benz doit mettre 4,5 t d’accumulateurs électriques (soit 621 kWh de capacité) afin de garantir 500 km à 40 t de PTRA ! Cela impacte certaines cotes : l’empattement minimum de ce tracteur routier est de 4 000 mm. Sur les porteurs, la longueur disponible dans l’empattement atténue cette difficulté, mais pour stocker le maximum d’énergie, il y aura forcément des limites. En témoigne le Fuso * Wh obtenus par conversion du mégajoule partant du pouvoir calorifique inférieur, à pression atmosphérique, à +25 °C de température ambiante. ** BMS : Battery Management System ou unité de gestion de la batterie.
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eCanter qui exige un empattement de 3 400 mm stabilisateurs, lesquels deviennent rotatifs pour pour accepter deux packs de 82,6 kWh. Les empatteque les béquilles ne soient pas contrariées par les ments les plus courts n’étant proposés qu’avec un coffres à batteries de traction. N’oublions pas cerseul pack batterie de 41,3 kWh. Quant aux 3 packs taines incompatibilités réglementaires : à l’heure actuelle, aucun véhicule électrique n’est compa(soit 123,9 kWh), il faut minimum 4 500 mm entre essieux. Certains empattements sur les électriques tible avec l’ADR relatif aux matières dangereuses. Renault Trucks ou Volvo Trucks passent à 3 900 mm Les coffrages des batteries pourraient aussi jouer de bien vilains tours pour la conception de véhi(contre 3 200 mm en thermique). cules de chantier, car cela limite considérablement Les reports de charge aux essieux sont égalela garde au sol et l’angle ventral en franchissement. ment stratégiques, rappelons qu’un pack pèse en Ceci explique, entre autres, l’absence de Volvo FM moyenne, avec son coffrage et ses câblages, 500 kg. et FMX électriques off-road au catalogue. Avis aux clients finaux : pour ne pas être limité en charge utile, les essieux avant 9 t ou 10 t de capacité ne sont pas à négliger ! La répartition des charges va redevenir un sujet majeur dans la définition du véhicule. En l’état actuel, certains tracteurs à batteries vont imposer de sérieuses limites sur la sellette de la semi-remorque. Un handicap évident pour la charge utile qui ne sera pas compensé par le « bonus charge utile » qui ne s’applique que sur les PTAC. Cela pourrait favoriser les véhicules porteurs remorquants dans la perspective d’une exploitation maximale des PTRA autorisés. Encore faut-il que le véhicule de base soit homologué avec un PTRA. Or, ce n’est pas toujours le cas. Vigilance donc. Les véhicules électriques à pile à combustible devraient pâtir des mêmes contraintes en ce qui concerne les cotes de carrossage et les charges aux essieux. Mais ici, une tendance émerge chez les constructeurs d’autocars et d’autobus : l’adoption de petites piles à combustible Attention sur les tracteurs à batteries ! Les reports de charge afin de compenser la surcharge pondérale des sur la sellette peuvent poser des problèmes avec les limites configurations maximisant les accumulateurs maximales aux essieux. lithium-ion. Ainsi, Iveco Bus a-t-il présenté début octobre 2023 un autobus Heuliez GX337 Un autre changement pour les carrossiers concerne à pile à combustible Hyundai, permettant, à autola gestion de l’énergie à bord. Forcément limitée nomie équivalente avec le modèle tout batteries avec les véhicules électriques à batteries, cette (450 km en cycle urbain), d’économiser 1 500 kg de ressource doit être préservée autant que possible. charge utile. À moins d’une rupture technique ma« Tout un travail en amont doit se faire avec les carjeure sur les accumulateurs électriques (lithiumion tout solide, lithium-soufre, voire lithium-air), ou rossiers sur le développement de la bonne pompe hysur les infrastructures routières (alimentation par draulique, le pilotage des fonctions via le bus CAN le sol ou par pantographe), il n’y aura que des prode bord ou l’interface homme-machine avec des grès marginaux à espérer. commandes proportionnelles », souligne Stéphane Boyajean, responsable développement produit des Quand l’électrification camions électriques Volvo Trucks France. Toute appelle la sophistication l’astuce consiste à faire en sorte que la pompe hyLe défi va être grand lorsqu’il s’agira d’électrifier draulique d’une grue ne soit sollicitée qu’en cas de des véhicules à empattements courts, des modèles besoin. Le rendement de ces équipements entre 4 essieux, ou bien de faire des hydrocureuses, des désormais en ligne de compte, ce qui explique balayeuses, des véhicules de secours. Du fait de l’hol’évolution probable vers des pompes hydrauliques mologation des packs batteries, il est absolument à 11 plutôt que 9 pistons. La pression d’huile géimpossible de modifier les coffrages. D’où quelques nérée doit correspondre au besoin de l’outil ou de trésors d’ingéniosité de la part des carrossiers et la fonction pour préserver l’énergie. L’échange via des équipementiers pour, par exemple, installer des bus CAN entre équipement et châssis ouvre ••• N°15 • 11/2023
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Focus Quelques astuces sont également mises en œuvre par les constructeurs pour aider les ateliers. Ainsi, chez Volvo Trucks, lorsqu’il y a trois câbles à haute tension (HT) jumeaux bagués de la même couleur, cela signifie qu’il y a du courant triphasé. Deux câbles HT orange avec deux bagues de même couleur signifient que l’on a du courant continu. Sur Pour les véhicules électriques (batteries ou H2), les Volvo FM, FMX et FH élecil faudra peut-être envisager des tracteurs 6x2 «à l’américaine». Outre le poids, se pose la question de l’espace. triques à batteries, ces câblages haute tension en 3 grappes signifient que l’ o n a 3 moteurs, sur 2 grappes, que l’on de nouvelles perspectives en termes d’information a un ensemble à 2 moteurs. Certains constructeurs à bord ou de fonctionnalités. Le choix des prises de espagnols d’autocars comme Beulas utilisaient ces force sera dicté par l’application (une prise élecastuces mnémotechniques (le faisceau électrique trique en courant continu est un bon choix pour côté droit était dédié à la carrosserie, les faisceaux des groupes froid, car il offre un gain de poids et de côté gauche étant ceux de la partie châssis). rendement énergétique). La pompe électrohydrauLe mur d’investissements de l’électrification va auslique pour les équipements de carrosserie pourra si heurter les ateliers et les carrossiers réparateurs. se voir remplacée par une classique prise de mouLes réseaux de constructeurs investissent en ce vement sur boîte, lorsqu’il y en a une, afin d’optimimoment en carrosserie-réparation pour anticiper ser l’espace le long des longerons. la moindre activité future des baies mécaniques (cf. Scania Bourgogne à Beaurepaire-en-Bresse en Impact majeur pour les ateliers Saône-et-Loire). Mais il y a surtout l’adaptation des et la réparation équipes et des ateliers à ces nouvelles énergies. « Non, toutes les interventions sur les camions élecPour compenser la prise de masse due aux battetriques n’exigent pas de consignation ! », explique ries, les constructeurs ont davantage recours à l’aluStéphane Boyajean. Comme en réponse à la minium, aux aciers HLE, voire THLE, et peut-être deconférence sur les réparations en carrosserie, main aux composites comme le carbone. Certains tenue lors du saconstructeurs d’aulon Equip’Auto Lyon tobus franchissent le 2023, il se veut raspas (l’autobus Ebussurant. « Je ne comco 3.0, la nouvelle prends pas qu’un presgamme VDL CItea). tataire pneumaticien En camion, Volta demande une consiTrucks aurait dû être gnation pour un chanle premier à le faire. gement de roue en Ces matériaux exidépannage. » Pour lui, gent des savoir-faire il faut savoir raison et des outillages garder : « une même spécifiques. On verintervention, en foncra peut-être venir en Les packs batteries ne peuvent être modifiés ou déplacés tion des outils ou de la Europe la conceppar les carrossiers. Retour probable à la table à dessin localisation de l’intertion rivetée-collée pour certains aménagements. vention sur le véhicule sur cabines alumipeut, ou pas, exiger nium ou compocette consignation. Il faut juste faire une analyse de sites, déjà pratiquée par les constructeurs de poids risque ». Une démarche de réflexion préalable loin lourds en Amérique du Nord. d’être anecdotique, puisqu’une consignation peut Bons coups et mauvais coûts prendre jusqu’à 1 heure. Un temps identique à la Second changement évoqué : les températures de sédéconsignation. Il faudra bien le payer au mécanicien, même s’il est difficile de le faire passer sur la chage en cabines de peinture. « C’est au maximum facture du client. +65 °C ou +71 °C », précise Max Alunni du groupe •••
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Certaines configurations (ici un 4 essieux empattement court avec beaucoup de puissance hydraulique requise) vont devenir très complexes à carrosser avec l’électrification.
Albax Carrosserie Lecocq. En effet, il faut impérativement éviter tout risque d’emballement thermique pour les batteries qui seraient exposées à de trop fortes chaleurs dans le tunnel de séchage. Max Alunni mentionne différents coûts : le balisage et l’équipement des compagnons en EPI (équipements de protection individuels), ainsi que l’outillage de base reviennent entre 2 500 € et 3 000 € hors taxes. Un équipementier précise que ces EPI sont identiques à ceux des « lignards » d’Enedis, puisqu’il s’agit de courants forts. Pour les véhicules méthane ou dihydrogène, l’outillage (dit « bleu ») doit répondre aux normes Atex (atmosphères explosibles).
De nouveaux équipements vont faire leur apparition, comme ces pompes électrohydrauliques pour carrosseries.
À ces investissements s’ajoutent les renouvellements des habilitations pour les carrossiers et mécaniciens (tous les 3 ans), qui coûtent environ 1 000 € par personne. Chaque constructeur pouvant imposer ses spécifications techniques, un atelier multimarques pourrait devoir multiplier les outillages. Or, une riveteuse coûte 15 000 € HT. N°15 • 11/2023
Idem pour les pistolets à colle. Certaines marques automobiles abusent clairement de leur position, ainsi Tesla : jusqu’à 200 000 € d’investissement en matériel et formation, à refaire tous les 3 ans, pour être labellisé. Pour la manutention des packs de batteries, il faut prévoir de 5 000 à 10 000 € d’investissement pour une table élévatrice. Sébastien Castanié, responsable de l’offre de formations au GNFA (groupement national formation automobile) relativise : certaines formations de base sur l’habilitation courants forts peuvent être prises en charge par l’OPCO Mobilités via le dispositif compétence emploi. Il rappelle aussi que les EPI de protection électrique sont très inconfortables et qu’il est plus agréable d’y ajouter des gants en coton pour limiter la sudation. Tant le GNFA que le groupe Albax insistent sur l’importance de la surveillance des gants, car toute performation, même minime, peut induire une perte d’isolation et générer un risque mortel d’électrocution. Les professionnels de la réparation s’inquiètent aussi de l’attitude des assureurs. Pour mémoire, les batteries peuvent représenter près de 50 % de la valeur d’un véhicule industriel. Pour Jean-Marc Donatien, représentant de l’activité carrossiers de Mobilians, « en matière de réparabilité, le seuil du véhicule économiquement irréparable arrive très vite ». Mobilians et le groupe Albax s’inquiètent surtout du précédent Tesla : « les constructeurs referment énormément leurs méthodologies de réparation ». Deux mauvaises nouvelles potentielles pour les clients finaux transporteurs : cela signifie que la réparation collision pourrait être de plus en plus verrouillée par les réseaux de constructeurs et que les primes d’assurance pourraient encore s’envoler. Jean-Philippe Pastre
pastre@trm24.fr
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Énergies
Les gigafactories, entre rêves et réalités La Commission européenne et les équipementiers n’ont que le mot « gigafactories » à la bouche pour évoquer la souveraineté de l’Europe en matière d’accumulateurs lithium-ion. Un rapport de la Cour des comptes européenne dresse un bilan sans complaisance. L’eMAG Transport a enquêté.
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e rapport est passé presque inaperçu dans les grands médias lors de sa publication le 19 juin 2023. Pourtant, il est explosif : l’Europe pourrait bien perdre la course aux batteries*. Il s’affiche comme une critique cinglante des programmes tels que European Battery Alliance (lancé en 2017) et Fit for 55 (14 juillet 2021), tous deux présentés et portés par la Commission européenne.
Surmonter les handicaps Les échéances de décarbonation posées par l’UE ont fait des batteries de traction un impératif stratégique. « Mais l’industrie européenne des batteries est à la traîne au niveau mondial. La Chine en particulier a une grande longueur d’avance avec 76 % de la N°15 • 11/2023
capacité de production mondiale », rappelle le communiqué associé à la présentation du rapport. Annemie Turtelboom, membre de la Cour et responsable de l’audit, rappelle crûment que l’Europe « n’a pas toutes les cartes en main : l’accès aux matières premières, l’attrait pour les investisseurs et les coûts à supporter pourraient lui faire perdre son pari ». Dans le meilleur des cas, le programme Alliance européenne de la batterie ne couvrira que 25 % des besoins de batteries pour le marché européen, constate Emmanuel Hache**, économiste à * Rapport spécial de la Cour des comptes européenne n° 15, La politique industrielle de l’UE en matière de batteries – Un nouvel élan stratégique est nécessaire, juin 2023. ** Enregistrement du 26 septembre 2023, émission Chaleur Humaine sur le fil Youtube du journal Le Monde.
Énergies l’IFP Énergies nouvelles et enseignant chercheur à l’Iris (Institut de relations internationales et stratégiques). La Cour des comptes européenne rappelle que l’UE importe 87 % du lithium brut d’Australie, 80 % du manganèse d’Afrique du Sud et du Gabon, 68 % du cobalt brut de la République démocratique du Congo et 40 % du graphite naturel brut de Chine. Voilà pourquoi le français Blue Solutions (filiale du groupe Bolloré) s’est rapproché de Eramet en vue de conclure un accord de long terme avec le Chili pour l’extraction de lithium, avec un procédé de recyclage de l’eau et du raffinage sur place. La volatilité des cours de ce métal en 2022 a lourdement impacté l’entreprise, puisque sa batterie LMP en contient de grandes quantités. Stéphane Bourg, directeur de l’Ofremi (Observatoire français des ressources minérales pour les filières industrielles), un organisme rattaché au BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières) déclarait en novembre 2022 : « Un monde bas carbone est un monde hautes matières ». Emmanuel Hache, comme Guillaume Pitron, journaliste et chercheur associé à l’Iris, sont d’accord pour convenir qu’un véhicule électrique contient quatre fois plus de cuivre qu’un véhicule thermique équivalent. Or, le cuivre est un métal critique puisque les capacités actuelles d’extraction peinent à suivre la demande. Ce qui explique, là encore, la volatilité des cours de ce métal. Bref, pour alimenter les gigafactories, la bataille sera aussi géopolitique qu’industrielle. Acteurs européens, comptez-vous ! Blue Solutions est l’un des très rares acteurs authentiquement français dans le domaine de la batterie de traction. Mais sa batterie LMP (lithiummétal-polymère) sans électrolyte liquide demeure marginale sur le marché et n’a pas encore de clients en camions, les applications en véhicules industriels se concentrant sur les engins de manutention (Gaussin) ou les autobus (Bluebus, du même groupe Bolloré, et en option sur les Mercedes-Benz eCitaro). Autre acteur européen, le groupe Northvolt, basé en Suède. Il compte parmi ses actionnaires Volkswagen (à hauteur de 20 %) et Scania (pour 1 %). On peut parier que c’est le fournisseur du groupe Volkswagen en cellules, le terme « groupe » étant le vocable derrière lequel se cachent les représentants de MAN lorsqu’on les questionne sur l’origine de leurs cellules de batteries, lesquelles sont montées sur le site de Nuremberg (Bavière). Par ailleurs, en 2021, Volkswagen a racheté à Northvolt les 50 % de capital que le suédois détenait dans l’usine d’assemblage de batteries de Salzgitter (Basse-Saxe). Le développeur et fabricant fournit officiellement
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la toute nouvelle usine d’assemblage de batteries Scania de Södertälje en cellules, depuis son usine Northvolt située au nord de la Suède, première gigafactory du groupe dédiée à cette production. Il affirme produire en interne ses cathodes, un composant clé généralement « verrouillé » par la Chine qui détient le quasi-monopole de production du graphite pour anodes et cathodes.
Les constructeurs européens de batteries de traction (ici Bolloré Blue Solutions) sont minoritaires en capacités installées, face aux géants que sont BYD ou CATL.
Forsee Power est une entreprise multinationale dont l’équipe de direction est française. Elle compte une part significative de ses activités en France, tant pour la R&D que pour la fabrication. Le groupe est référencé par Hyliko pour les camions en rétrofit. En raison de la pression réglementaire et politique sur les autocars et autobus, l’industriel est bien plus présent chez ces constructeurs : Heuliez Bus (sur les GX137), Bluebus (à compter de 2024, en alternative aux batteries LMP Blue Solutions), Wrightbus, CaetanoBus, plus le constructeur égyptien MCV et le chinois CRRC (pour tous ses véhicules vendus hors de Chine). Le site de Chasseneuil-du-Poitou (Vienne) compte parmi les trois usines d’assemblage de batteries Forsee Power dans le monde dédiées à la mobilité lourde (véhicules industriels, ferroviaire, engins de manutention et véhicules miniers). À ce jour, ce sont 2 GWh de capacité de production qui sont installés, la production pourrait encore augmenter en passant en 3 équipes. Pour le moment, Forsee Power dépend d’approvisionnements en cellules d’origine Chinoise. ••• N°15 • 11/2023
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Énergies (contre 62 GWh annoncés), sur la seule base d’hypothèses et de variables corrélées. La Cour des comptes européenne note au point 33 : « le principal problème concerne la faiblesse du suivi par la Commission de la production de cellules de batteries dans l’UE. Actuellement, Eurostat rend compte des quantités (unités) de batteries produites, mais pas de leur capacité énergétique en Wh, le principal indicateur de marche ». En outre, les politiques de la Chine ou des USA (via l’InflaLa transition vers le tout électrique change le contenu des véhicules tion Reduction Act voté en en métaux. Les câbles haute tension comptent une forte teneur en cuivre 2022) peuvent capter les investandis que les moteurs ont recours aux terres rares. tissements. Un sujet ouvertement évoqué par Anders Thor, D’autres acteurs européens ayant des sites de provice-président des communications et des affaires duction sur le continent, comme l’allemand Akasol publiques de Northvolt, au mois de septembre der(fournisseur de Volvo Trucks, Volvo Buses, Daimler nier. L’implantation de la prochaine usine de batteBuses) sont passés en 2022 sous contrôle amériries du groupe en Allemagne dépendra du montant cain suite au rachat par BorgWarner. Akasol dispose des aides qu’il recevra pour son installation. Un d’une capacité de production de 2,5 GWh Le groupe sujet très sensible à l’heure où, contrairement à ce Microvast, basé au Texas (USA), fournit le site d’asqui est répété par les équipementiers et certaines semblage de batteries FPT Industrial de Turin (Ita« ONG » invoquant la baisse des coûts de produclie) en cellules depuis son usine sise en Allemagne tion grâce aux économies d’échelle, la « hausse d’une capacité de 1,5 GWh. des prix des matières Ces packs sont montés à premières et de l’énergie bord des véhicules utilipourrait compromettre la taires et industriels Iveco compétitivité de la producet Iveco Bus. Son potention de batteries de l’UE. tiel pourrait être porté, Fin 2020, le coût d’un bloc selon Microvast, à 6 GWh, batterie (200 €/kWh) était ce qui en ferait l’une des plus de deux fois supérieur plus grosses unités de au niveau visé », précise le production en Europe. communiqué de la Cour Mais en raison de doutes des comptes européenne. Le lithium réagit fortement à la présence sur l’indépendance de Un écart de compétitivité d’humidité. Les usines le traitant ou le transformant exigent des équipements de l’entreprise vis-à-vis de la qui s’explique à la fois par conditionnement d’air très performants. Chine, le Departement of le coût de l’énergie et par Energy (DOE) a suspendu ses règles environnemenen mai 2023 des aides d’un montant de 200 M$ du tales et sociales plus protectrices mais se répercuplan IRA (Inflation Reduction Act), ce que ses diritant sur les coûts d’extraction et de production. Ce geants contestent. dernier point ayant pour origine le Critical Raw Material Act (CRMA), voté par l’UE en mars 2023. Du Un avenir radieux mais nuancé d’incertitudes fait de l’application de normes environnementales En 2020, les producteurs annonçaient pour l’Eueuropéennes s’appliquant aux entreprises de l’UE, rope une production potentielle de 44 GWh qui se crée une distorsion de concurrence en faveur de pourraient atteindre les 1 200 GWh d’ici à 2030. la Chine, des pays africains, de l’Australie ou des USA, lorsque les industriels de l’Union européenne, Des chiffres qui poussent paradoxalement les industriels à la prudence : la peur de la surcapacité assujettis au CRMA, opéreront à l’étranger, là où se situent les ressources. les hante. Le Centre commun de recherches de la C’est un autre paradoxe de ces véhicules vendus comme Commission n’a pu qu’estimer la production de cellules de batteries lithium-ion à 16 GWh en 2021 zéro émission relevé par Raphaël Danino-Perraud, •••
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Énergies chercheur à l’Ifri (Institut français des relations internationales) : « Les unités de raffinage de métaux sont très gourmandes en énergie », ce qui met en relief une contradiction des politiques européennes : le programme European Battery Alliance pourrait se trouver entravé par la taxe carbone prévue à l’importation de matières premières et de produits semi-finis. Raphaël Danino-Perraud l’a dit clairement*: « Si vous avez à l’entrée de l’UE une taxe carbone qui potentiellement peut faire grimper le prix du minerai ou de la matière raffinée, ou du produit fini […], vous voyez que va se poser la question du périmètre 2 [sur les émissions de CO2, N.D.L.R.]. Gardons ça en tête, car ce n’est pas sûr que les consommateurs européens ou les autorités soient en mesure d’accepter un tel paradoxe ».
gy (SET) Plan de 2017, porté par la Commission, a échoué sur tous ses objectifs initiaux : la densité énergétique massique visée devait être de 350 Wh/ kg, les projets n’ont atteint que les 250 Wh/kg. Idem pour la densité énergétique volumique : le SET de 2017 visait 750 Wh/l ; la densité de référence a été abaissée à 500 Wh/l (quasiment identique à la valeur de… 2015 !). Plus surréaliste encore, le coût en €/kWh visé par le programme SET de 2017 ambitionnait 90 € pour 2022. On en est très, très loin avec 200 €/kWh selon la Cour des comptes. Cet échec amène-t-il la Commission à plus de réalisme ? Que nenni : son programme stratégique de recherche lancé en 2020 vise des objectifs plus ambitieux que ceux du SET de 2017 à horizon 2030 (sauf pour le prix en euros du kWh stocké) ! Un choix qui coûte cher La Cour des comptes euroLes constructeurs ne péenne a recensé 1,7 Md€ de cessent de le marteler lors subventions et de garanties de congrès, salons et préen prêts entre 2017 et 2020 sentations presse : avec des pour les fabricants de batmachines coûtant entre 2 et teries. Les aides d’États au3 fois le prix de leurs équitorisées représentent 6 Md€ valents diesel, le marché du véhicule électrique ne tient entre 2019 et 2021. Mais la que s’il y a aides et incitaCour relève que la CommisLes cellules sont disposées de différentes tions financières. Pour baission européenne n’a « pas manières afin d’obtenir la forme de module qui ira dans la batterie du véhicule. ser les prix, les équipemende vue d’ensemble du monLes constructeurs motoristes font de plus tiers pourraient être tentés tant total des aides accordées en plus leurs propres assemblages. de réduire le recours à des à l’industrie, ce qui empêche métaux coûteux comme le une coordination et un ciblage cobalt. Mais comme le rappellent Guillaume Piadéquat ». Certains programmes ne sont pas tron et Raphaël Danino-Perraud, réduire la teneur comptabilisés : le Critical Raw Material Act, porté en cobalt des batteries NMC peut rendre ces derpar l’Union européenne en mars 2023, ne dispose nières plus sensibles à l’emballement thermique. d’aucun budget. Raphaël Danino-Perraud déclare : Cette économie peut aussi se faire par l’usage « on peut regretter que cet acte législatif n’ait pas d’une autre technique reposant sur les batteries d’outil financier ». lithium-ion-fer-phosphate (LFP). La Chine s’en est À l’inverse, la Cour des comptes a « constaté que fait une spécialité avec les géants que sont CATL trois des parties prenantes sélectionnées dont l’actiet BYD. Forsee Power développe également une vité principale est liée à la fabrication de batteries gamme d’accumulateurs LFP. Le souci est que ces bénéficiaient simultanément d’une aide nationale batteries intéressent peu les recycleurs du fait de […] et d’une ou de plusieurs formes de soutien finanla moindre teneur en métaux nobles. Leur (faible) cier de l’UE. Nous avons également observé que trois valeur en fin de vie pourrait poser des problèmes projets de l’échantillon financés par le Feder [Fonds aux vendeurs, qui devraient payer pour le recyeuropéen de développement régional, N.D.L.R.] au clage du fait des obligations réglementaires nées cours de la période 2014-2020 portent sur le dévede la directive batteries. loppement de technologies qui bénéficient également d’un soutien d’Horizon Europe au cours de la période Jean-Philippe Pastre 2021-2027 ». Bref, certains projets passent plupastre@trm24.fr sieurs fois au guichet ! Pour quels résultats ? La Cour des comptes est ici * Émission Cultures Monde, France Culture, aussi assez critique : le Strategic Energy Technolomercredi 6 septembre 2023.
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Focus
Recyclage des batteries, entre rêves et réalités Production de cellules avec 50 % de matière recyclée, utilisation des métaux en boucle fermée, fabricants et recycleurs travaillent leurs procédés. Cependant, de nombreuses questions demeurent.
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ui, on sait recycler des batteries lithiumion ! L’association Record*, ainsi que Serge Pélissier**, chercheur au laboratoire ingénierie circulation transports à l’université Gustave Eiffel/ENTPE (École nationale des travaux publics de l’État), sont formels. Recycleurs et fabricants Serge Pélissier explique : « Il existe principalement deux procédés de recyclage des batteries, utilisés séparément ou en combinaison. Le premier est la pyrométallurgie, qui détruit les constituants organiques et plastiques en les portant à haute température et ne conserve que les composés métalliques qui sont ensuite séparés par voie chimique. Le second est l’hydrométallurgie qui ne comprend pas d’étape à haute température, mais qui sépare les constituants uniquement par différents bains de compositions adaptées chimiquement aux matériaux que l’on souhaite récupérer ».
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Plusieurs groupes procèdent, en Europe et dans le monde, au recyclage de batteries lithium-ion. Selon l’association Record, il y aurait en activité : OnTo Technology, Umicore, Accurec Recycling, Inmetco, Glencore, Sumitomo Metal Mining, Retriev Technologies, AkkuSer Oy, SNAM, Euro Dieuze et Duesenfeld. Ce dernier ambitionne un recyclage en pureté dite « grade batterie » afin d’utiliser les métaux en boucle fermée. Un objectif d’importance vu le caractère géostratégique de certains métaux, en particulier pour les cathodes en NMC (nickel manganèse cobalt). Aux recycleurs, il convient d’ajouter les producteurs d’accumulateurs. Le suédois Northvolt entend maîtriser toute la chaîne : de la production des matériaux de cathodes au recyclage. Northvolt Revolt, sise à Skellefteå et Västerås (Suède), ambitionne 50 % de matières recyclées dans sa production de cellules en 2030. En 2022, il en était à 6 %. Le groupe évoque une grande unité spécifiquement dédiée au recyclage, Northvolt Ett, afin « d’assurer
Focus une alimentation directe des lignes de production de cellules ». Sans rien dire de ses procédés, le fabricant annonce 95 % de récupération du NMC et 75 % du lithium des intrants en produits de grade batterie. Le chinois BYD développe également une approche verticale pour sa technique LFP (lithium fer phosphate de fer), tout comme le français Blue Solutions, avec ses batteries LMP (lithium métal polymère) à électrolyte solide (sans donner de date d’industrialisation). Comme pour le rechapage des pneumatiques, le recyclage aurait un impact décisif sur l’empreinte carbone. Selon Northvolt, l’usage de métaux de cathodes 100 % d’origine recyclable réduirait l’empreinte carbone de 70 % par rapport à une cathode neuve. Mais il faut garder à l’esprit que le traitement hydrométallurgique se fait avec de l’acide sulfurique. La décomposition des sels de lithium produit de son côté du fluorure d’hydrogène. De plus, certains réactifs, comme le Cyanex 272 produit par le chimiste Solvay, sont toxiques pour les ressources aquatiques. Bref, si le bilan CO2 doit y trouver son compte, la préservation de l’environnement demeure un sujet sensible. Questions d’échelles et de temps Selon le cabinet Strategy& et l’université d’Aixla-Chapelle (RWTH Aachen University), ce sont 10 000 tonnes de batteries lithium-ion qu’il faudrait déjà recycler dès 2023 en Europe. Un volume qui devrait passer à 460 000 tonnes en 2030 puis 2 650 000 tonnes en 2035. L’Union européenne a fait évoluer la directive batteries en août 2023. Les derniers objectifs ambitionnent de collecter, d’ici 2035, 80 % des batteries lithium-ion en fin de vie ainsi que 95 % des composés à base de nickel, cobalt et cuivre. Le rendement du recyclage devra être de 70 % de la masse initiale. À la même date, les cellules neuves devront incorporer 6 % de lithium et nickel recyclé, 16 % pour le cobalt.
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En 2020, le film documentaire À contresens*** évoquait 80 % de taux de recyclage (programme Phenix de la SNAM). Or, cette filiale largement promue dans le film a été purement et simplement arrêtée en 2023 par la SNAM. À propos de « la recyclabilité à 80 % et même plus, il ne faut pas confondre valeur théorique et pratique », rappelle Serge Pélissier. Lors du salon Equip’Auto 2023, les acteurs du VHU (véhicules hors d’usage), démanteleurs indépendants ou regroupés dans des consortiums comme Indra, ont prévenu : « aujourd’hui, faute de débouchés et de valorisation, le démantèlement et le stockage des batteries demeurent un coût ». Chacun se renvoie la balle malgré l’obligation faite aux metteurs sur le marché d’assumer ce poste. Les déboires financiers des nouveaux constructeurs ne rassurent pas. Les démanteleurs s’interrogent : jusqu’où faut-il aller : se contente-t-on de stocker la batterie complète ? En modules ? Aller jusqu’à la cellule ? Pour éviter les propagations d’incendie, certains centres VHU prévoient 10 m d’espace entre deux véhicules électriques, ce qui pose la question de l’espace foncier. L’université d’Aix-la-Chapelle alarme : « avec l’arrivée en fin de vie de la première vague de batteries, les matériaux à recycler dépasseront les capacités annoncées, ce qui entraînera un déficit dans le recyclage d’ici 2030 ». L’ensemble de la filière (démantèlement et recyclage) exigerait 9,6 Md€ pour tenir les engagements de 2035. Aujourd’hui, même en payant pour la fin de vie des batteries, les metteurs sur le marché, contraints par la directive batterie, ne parviennent pas à équilibrer les coûts des recycleurs. La diversité d’électrochimies qui pourrait se faire jour d’ici 2030 (batteries à électrolyte solide, développement massif des lithium-Ion fer phosphate) ne facilitera pas leur tâche. Jean-Philippe Pastre
pastre@trm24.fr
* Association loi de 1901 créée par le ministère de l’Environnement en 1989, qui regroupe l’Ademe et les industriels du recyclage sur des thématiques environnementales. État de l’art sur le recyclage et le réemploi des batteries, étude n° 07 0915/01A, juillet 2019. ** https://reflexscience.univ-gustaveeiffel.fr/lire/articles/peut-on-recyclerles-batteries-des-vehiculeselectriques Publication du 19 septembre 2021. *** Documentaire de Jérôme Piguet, Marc Muller, Jonas Shneiter et Zelda Chauvet, novembre 2020. Producteur et diffuseur : Nous Prod. N°15 • 11/2023
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CHRONOTACHYGRAPHE
Le SMT2 peine à débarquer Depuis le 21 août 2023, les véhicules faisant l’objet d’une première immatriculation doivent être équipés de la nouvelle génération de chronotachygraphes, répondant au paquet mobilité et aux exigences de l’annexe 1Cv2 du règlement UE relatif au tachygraphe dans les transports routiers. Entre ce qui était prévu par la Commission européenne et ce qui est effectif, il y a un écart significatif.
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our comprendre la situation présente, il faut revenir à l’adoption du paquet mobilités par la Commission européenne le 2 février 2022 (règlement UE 2020/1057). Afin de mieux contrôler le détachement des salariés et les activités de cabotage, il faut désormais mentionner tous les passages de frontières ainsi que les opérations de chargement et déchargement. Cela a induit une modification du chronotachygraphe Gen2 dit « intelligent » , répondant à l’annexe 1C (règlement d’application EU 2016/799). Ces terminaux intelligents introduits en 2019 ont donc évolué pour intégrer les éléments du fameux paquet mobilités, certains (comme le passage de frontières) devant devenir automatiques via l’usage de la géolocalisation par satellite. Nouvelles fonctionnalités du SMT2 La version 2 des chronotachygraphes intelligents (ou SMT2) intègre en plus du terminal et des cap-
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teurs de mouvement trois dispositifs jusqu’à présent inédits : une antenne satellitaire GNSS (ou GPS pour faire simple), authentifiée par la technologie Open Service Navigation Message Authentication (OSNMA), permettant la géolocalisation en début/ fin de journée, l’enregistrement toutes les 3 heures de la position, ainsi que la position lors des opérations de chargement et déchargement. Tout ceci étant lié aux exigences du paquet mobilité relatif au travail détaché. La géolocalisation périodique ou lors des opérations de chargement via le réseau satellitaire Galileo permet également de vérifier la cohérence des informations relatives aux vitesses et distances parcourues. Autre ajout de composant : l’antenne DSRC courte distance. Elle émet une alarme en cas d’anomalie du chronotachygraphe qui servira aux autorités de contrôle à mieux cibler leurs interventions. À ce stade, l’alerte via DSRC se contente d’envoyer un message d’anomalie, sans détail sur la nature de
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celle-ci. Le contrôle de l’année à l’échelle des forces de l’ordre du continent. demeure indispenSuite à cela, l’Allesable pour vérifier les magne, l’Espagne et données et procéder la Suède ont opté à un éventuel relevé pour un délai de toléd’infraction. rance. Mais cela n’est L’appareil comprend valable que pour le Les fonctionnalités Bluetooth des nouveaux chronotaégalement une intertransport domestique chygraphes permettent de créer des applications que les face ITS communiet pose le problème conducteurs peuvent exploiter sur leurs smartphones. quant via Bluetooth, d’une hétérogénéité ce qui permet d’ajoud’applications dans ter des fonctions supplémentaires pour les utilil’Union européenne, ce que déplore l’IRU. L’associasateurs, notamment la communication vers des tion internationale s’inquiète pour les échéances smartphones. La première génération de chroà venir liées au rééquipement des véhicules en notachygraphes intelligents a induit à partir de circulation avec les chronotachygraphes SMT2. En 2019 l’apparition de nouvelles cartes, dites Gen2, effet, et c’est une grande première, il y aura désorau fur et à mesure de leur renouvellement. Elles mais obligation de remise à niveau pour tout vésont compatibles avec les anciens appareils. Les hicule industriel immatriculé avant 2019 faisant anciennes cartes sont quant à elles compatibles du transport international début 2025 (donc sans avec les nouveaux terminaux, mais ne peuvent pas, chronotachygraphe intelligent Gen2). Une seconde faute de capacité suffisante, mémoriser toutes les date butoir est fixée au 21 août 2025 pour tous les véhicules industriels immatriculés entre 2019 et données induites par les nouvelles réglementale 21 août 2023 faisant du transport international tions. Jusque-là tout va bien… (donc dotés de la première génération de chronotachygraphe intelligent Gen2 mais devant passer Le tachygraphe trahi par Chronos en SMT2). Cela concernerait potentiellement de 1,5 Depuis le 31 août 2023, tous les camions faisant l’objet d’une première immatriculation doivent à 2 millions de véhicules, auxquels il faudra ajouter donc être équipés de tous les utilitaires léchronotachygraphes gers de plus de 2,5 t de 1C intelligents de PTAC faisant du transdeuxième génération port international (au (SMT2). Mais, comme le 1er juillet 2026). révèle Lorin Valton, diPour une fois, la recteur commercial et France avait pris des technique d’Inodis, dismesures intelligentes tributeur exclusif des en autorisant cet été Après le retrait d’Actia, ne restaient comme acteurs maproduits Stoneridge la pré-immatriculation jeurs que Continental VDO et Stoneridge (les deux très en France, il y a eu des de véhicules en cours puissants en première monte). Désormais ZF entre dans surprises au niveau de de carrossage ou enla danse depuis le rachat de Intellic survenu début 2023. l’Union européenne. core non livrés, ce qui L’outil d’authentificapermettait de passer tion via OSNMA n’était pas prêt à l’échéance présous la toise. Cela aurait limité les dégâts (et les vue. Les équipementiers* ont donc dû, au mois de surcoûts pour les réseaux et clients finaux), même juin 2023, modifier tout le codage des appareils si, les immatriculations en témoignent, il y a eu un pour tenir compte de ce changement de dernière effet d’anticipation qui a perturbé le marché du minute. Ce qui a été à l’origine des retards de lineuf, dopant artificiellement les 8 premiers mois vraison chez tous les équipementiers homologués. de 2023. Puissent ces difficultés, nées d’une volonPour ne rien arranger, cela survient en plein été, moté politique déconnectée des réalités, amener la ment de fermeture des usines de production pour Commission et les institutions européennes à plus congés annuels. Dès la date fatidique du 21 août d’humilité, par exemple sur le sujet des objectifs 2023, l’Union internationale des transporteurs rouCO2. On peut toujours rêver. tiers (IRU, International Road and Transport Union) Jean-Philippe Pastre publiait un communiqué s’alarmant des quelque pastre@trm24.fr 20 000 à 40 000 véhicules industriels (camions et autocars confondus) qui pouvaient être en souf* Principalement Continental VDO, Stoneridge et secondairement ZF (anciennement Intellic). france en sortie de chaîne d’assemblage d’ici à la fin N°15 • 11/2023
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nterview Lorin Valton
Directeur commercial et technique chez Inodis, distributeur exclusif des produits Stoneridge en France « Il y avait 6 000 véhicules en attente en France à fin août » eMAG TRANSPORT : Où en est-on de la mise en place des nouveaux chronotachygraphes intelligents ? Lorin Valton : La France n’a pas adopté la position proposée par l’IRU [à savoir la mise en place d’une dérogation jusqu’au 31 décembre 2023 pour l’installation de chronotachygraphes intelligents de première génération, N.D.L.R.]. Ce qui a été évoqué dans les médias* et rapporté par l’IRU ne sont que les minutes d’une réunion au sein de la DG MOVE de la Commission. Les États membres peuvent faire leurs choix. La France a autorisé la pré-immatriculation à titre exceptionnel, ça aide énormément. À fin août 2023, il y aurait 6 000 véhicules en attente, ce qui était estimé. eMT : Comment en est-on arrivé à un tel cafouillage ? L. V. : On peut effectivement se poser la question du choix de la date du 21 août dans le texte. À quoi correspond-elle ? Mystère. Mais ce qui est sûr, c’est que cela pose des problèmes logistiques pour les industriels, que ce soit en amont ou en aval. Le problème initial vient du service GNSS Galileo d’authentification qui devait valider le passage des frontières automatiquement. Nous avons appris en début d’année 2023 qu’il serait indisponible pour le lancement du nouveau tachygraphe. Il a fallu adapter les interfaces au mois de juin 2023. En outre, il y a eu le recours de dix pays européens contre le chronotachygraphe intelligent SMT2. Tout cela a poussé la Commission à forcer la main en plein été. eMT : Concrètement, qu’est-ce qui change sur l’appareil ? L. V. : Il y a le passage aux frontières qui désormais est automatique via le récepteur GNSS de géolocalisation satellitaire et une carte géographique uniformisée. Les nouveaux chronotachygraphes ont une fonction de communication DSRC*, qui permet d’alerter les contrôleurs en cas d’anomalie enregistrée dans le chronotachygraphe ou de dépassements des limites réglementaires. Mais les forces de l’ordre des pays membres ne sont pas encore toutes équipées des moyens de contrôle ; en France, les Dreal ont commencé à tester des outils en vue d’un équipement en 2024. À cela s’ajoute une N°15 • 11/2023
interface ITS via Bluetooth permettant d’envoyer ou de recevoir des informations via une application pour effectuer les saisies conducteur. eMT : Faut-il changer les équipements de téléchargement ou d’étalonnage pour les ateliers agréés ? L. V. : Les outils se mettent à jour de façon logicielle, il n’y a pas de changement à prévoir sur la partie hardware [matérielle, N.D.L.R.], et cela est valable autant pour la partie entreprise que pour la partie atelier. Les cartes conducteur sont en cours de renouvellement pour migrer vers la Gen2 V2. Les cartes Gen1 et Gen2 V1 sont compatibles mais ne stockent pas toutes les données supplémentaires. Pour les équipements de bord, la France a un parc récent, constitué essentiellement par du renouvellement […] On n’a pas d’élément chiffré sur la volumétrie de terminaux à rééquiper. On a de la demande en rééquipement. Inodis approvisionne le réseau après-vente agréé en France. Nous avons 604 centres d’étalonnage agréés Stoneridge actifs. eMT : Puisque vous parlez de votre réseau, en quoi Stoneridge se distingue-t-il de ses concurrents, sachant qu’il s’agit d’un matériel très normé ? L. V. : En effet, sur le sujet chronotachygraphe il y a beaucoup de couches juridiques qui se superposent. Notre leitmotiv est de faire quelque chose de simple et intuitif à utiliser pour le conducteur, par exemple via des écrans plus grands, une ergonomie et une interface facilement intelligibles. Nous mettons à disposition sur le site http://www.se5000.com différentes vidéos et tutoriels. Pour le prochain salon Solutrans, il inclura les démonstrations sur les saisies relatives aux passages de frontières et aux opérations de chargement et déchargement.
Propos recueillis par Jean-Philippe Pastre pastre@trm24.fr
* Dont trm24.fr, voir : https://trm24.fr/tachy-intelligent-la-commission-ue-proposeun-delai-de-grace-jusqua-fin-2023/ https://trm24.fr/tachy-intelligent-la-date-du-21-aout-2023reste-inscrite-dans-le-reglement-ue/ ** DSRC Dedicated Short Range Communication, système radio courte portée pour échange d’informations.
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La télématique en effervescence Les spécialistes de la télématique et des équipements connectés sont de plus en plus présents au salon Solutrans. Les évolutions techniques et réglementaires poussent les acteurs à de nouveaux développements.
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l règne une intense activité ces derniers mois chez les constructeurs, les équipementiers et les prestataires télématique. En effet, au mois de juillet 2024, entre en application le règlement européen GSR II (General Safety Regulation). Il comprend un ensemble de normes, de fonctionnalités et d’équipements supplémentaires à bord des prochains véhicules neufs : adaptation automatique aux limitations de vitesse, détection de changement de file ou de fatigue des conducteurs. Il y a aussi, et surtout, ce qui ne se voit pas ! Les constructeurs et éditeurs de logiciels sont tenus de prévenir les piratages informatiques tout en ayant
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la faculté d’échanger de la donnée à distance. D’où la nouvelle conception des architectures électroniques de bord et la sécurisation accrue des passerelles logicielles (gateway). La sécurité via la vidéo Parmi les prestataires de gestion de flotte, AddSecure communique sur les sujets de responsabilité sociétale et environnementale des entreprises, ce qui inclut les émissions de CO2. Pour ce dernier point, le module d’évaluation de la conduite rationnelle évolue. Il exploite les améliorations apportées à la plateforme de gestion de flotte Co-Driver.
Solutions connectées Ce qui intéressera les exploitants et les conducteurs, c’est l’intégration des énergies alternatives (GNV et électrique à batteries) dans les fonctions de planification des tournées. Pour l’aspect sécurité des personnels, faisant partie de la RSE, AddSecure promeut deux outils vidéo : RoadView Lite, qui repose sur une caméra embarquée orientée route traitant en temps réel les conditions de circulation. Sur l’aspect sécurité, Olivier Datry, vice-président France d’AddSecure Smart Transport, est enthousiaste : « Nous venons de finaliser plus de dix pilotes d’intégration de la solution RoadView auprès des grands noms du transport de matières dangereuses en France, et les résultats sont très positifs ». L’outil d’écoconduite peut être couplé à la vidéo RoadView, ce qui offre l’opportunité d’une analyse des conditions de circulation et de la conduite. Croisées avec la base de données issue de Co-Driver, les alertes et recommandations sont adaptées aux missions et types de transport afin d’apporter des recommandations plus pertinentes aux conducteurs. Une seconde caméra, cette fois tournée vers le conducteur s’appelle RoadView Plus. Il s’agit de détecter les signes de fatigue préalables à l’endormissement et de déclencher une alarme le cas échéant, ce type d’équipement devenant obligatoire en première monte à partir du mois de juillet 2024. Le fournisseur insiste sur le fait que ces services vidéo sont indépendants de la solution télématique FMS Co-Driver. AddSecure s’est parallèlement associé à Winkkee, organisme de formation, afin de donner des conseils téléphoniques sur l’optimisation du véhicule, l’utilisation de ses équipements et sa conduite. Cela peut se faire aussi par modules d’enseignement à distance (e-learning). Tout cela repose sur l’agrégation de données., l’application mobile sert d’interface. Outre les classiques conseils, cela peut aller jusqu’à du soutien personnalisé et des défis (challenges individualisés).
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Les pneumatiques au cœur de nouveaux services Les pneumatiques sont au cœur des évolutions posées par la réglementation GSR II, puisque tous les véhicules neufs, moteurs comme remorqués, devront être équipés de contrôle de pression des pneumatiques (TPMS). Continental présente une nouvelle application permettant de suivre tous les travaux effectués sur le véhicule. L’hybridation entre services obligatoires et gestion de parc se poursuit. Ainsi, le portail VDO Fleet qui dépasse le simple archivage légal pour inclure également la planification des commandes, la détermination des horaires de travail et des affectations de véhicules. Goodyear Dunlop associe depuis longtemps pneumatique et télématique. Outre les puces dont il fut le pionnier, il y a une actualisation des outils de traitement de données accessibles via applications et portails internet, comme Fleet Online Solution ou les outils de mesure CheckPoint. L’offre Goodyear Total Mobility s’ouvre aux utilitaires (Efficargo). Michelin met en avant Michelin Connected Mobility qui inclut en mode tout compris les pneumatiques, les services de gestion, des outils de maintenance prédictive et d’alerte, ainsi que la gestion de flotte Michelin Connected Fleet qui eut les honneurs de Solutrans en 2021. Webfleet (groupe Bridgestone) s’associe à VEV (une société spécialisée dans l’électromobilité, émanation du groupe de trading énergétique helvétique Vitol), pour optimiser la gestion de flotte à destination des exploitants de flottes électrifiées. Cela comprend l’optimisation des itinéraires tenant compte de l’énergie des batteries, leur temps de charge, et leur état de stress. Jean-Philippe Pastre
pastre@trm24.fr •••
Les pneumatiques sont plus que jamais l’objet de services télématiques dédiés chez tous les équipementiers, leurs prestataires ou les agrégateurs. L’introduction, bientôt obligatoire, des dispositifs TPMS de mesure de pression va encore y contribuer.
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nterview Daniel Hourc
Responsable ventes et administration France et Luxembourg chez Astrata Europe « ColdLinc version 2 répond aux besoins de la livraison du dernier kilomètre » eMAG TRANSPORT : Quelle sera la nouveauté mise en avant à l’occasion de Solutrans 2023 chez Astrata ? Daniel Hourc : C’est la solution de suivi de froid, complète car adaptable à la semi, aux porteurs, aux VUL, qui s’appelle ColdLinc. Le système qui a été présenté à l’IAA 2022 a été enrichi d’une configuration avec sondes enregistreuses sans fil, qui communiquent directement avec une application Android et la plateforme d’exploitation FleetVisor afin d’avoir une traçabilité constante sur les températures. La ColdLinc version 2 répond aux besoins de la livraison du dernier kilomètre qui est en mutation. Elle peut désormais sortir de la semi-remorque. Ces informations sont transmises directement sur la plateforme. On est plus sur du boîtier, tout est dans la sonde elle-même qui fait office d’enregistreur, homologué. Cela nous permet aussi, sur les remorques et les porteurs, de suivre la température du contenu, jusqu’à la palette ou au caisson. C’est un avantage non négligeable. Grâce à cela, nous avons un client qui a réussi à se mettre en conformité avec les besoins de l’un de ses chargeurs. Tout cela à des coûts modulables. eMT : La sécurité de la conduite est-elle un sujet d’actualité ? D. H. : Pour les caméras, on est toujours sur VideoLinc qui va évoluer avec la vue cabine vers le conducteur. La vision de la cabine permet la détection de signes de distraction, de fatigue, ou le non-port de la ceinture de sécurité. Tout le Driver Management System fait partie de VideoLinc. C’est une demande de nos clients et de leurs chargeurs, en particulier pétroliers. Le but n’est pas de fliquer le conducteur mais de le prévenir en cas de somnolence par des alertes sonores en cabine. Cela peut aussi être important pour l’exploitation afin de prévenir les risques professionnels. C’est complémentaire aux N°15 • 11/2023
Adas des véhicules. On nous demande également de faire converger l’écoconduite avec des images que l’on a captées sur les événements Adas. Les images sont plus parlantes que des chiffres et permettent d’affiner les analyses. eMT : Avec le RFMS2, les données de géolocalisation des réseaux FMS des véhicules, les demandes des clients, comment gérez-vous tous ces développements ? D. H.: La gestion des données, le métier de télématicien, est en perpétuelle évolution. Traçabilité et remontées d’information sont de plus en plus nombreuses à bord. On ne peut pas répondre à tous les besoins de développements. Il faut agréger les données qui viennent de systèmes tiers afin d’en extraire la valeur ajoutée et de les restituer sur une seule plateforme. Il faut leur donner de la pertinence en sachant les présenter et les associer. On travaille également avec les clients, ce sont eux les utilisateurs. L’exemple type c’est le TPMS où il faut délivrer les informations utiles sans avoir à leur faire ouvrir 2 ou 3 applications différentes. Nous avons aussi les données constructeurs. Certains acteurs ont beaucoup misé là-dessus pour construire des solutions dites agnostiques. Mais la qualité de la donnée est très importante, et elle n’est pas au même niveau chez tous les constructeurs. Même s’il y a une norme, elle n’est pas appliquée partout de la même façon. Le transporteur ne va pas se retourner vers le constructeur mais vers l’agrégateur ou le télématicien. C’est à lui de délivrer des données cohérentes. Beaucoup d’organes d’un ensemble routier communiquent de nos jours : la pression des pneus, les groupes froid, le suivi des remorques. L’écosystème du transporteur devient de plus en plus communicant et nous permet de ne pas lui imposer un système supplémentaire mais d’utiliser l’existant. Propos recueillis par Hervé Rébillon rebillon@trm24.fr
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Constructeur
AUTOBUS ET AUTOCARS
Hydrogène et électricité à tous les étages Le salon Busworld 2 023 a été l’occasion de découvrir les grandes tendances du marché de l’autobus et de l’autocar. Clairement, l’hydrogène et l’électricité ont les faveurs des constructeurs, un peu, beaucoup, forcés par la réglementation européenne et les objectifs de réduction des émissions de CO2, objectifs encore plus draconiens pour les véhicules de transport en commun que pour les camions. Jean-Philippe Pastre • pastre@trm24.fr
C’
est fou ce que le marché de l’autocar et de l’autobus change en 4 ans, intervalle entre les deux éditions de Busworld Europe. Si le panel énergétique était encore assez ouvert en 2019, il semble se resserrer considérablement en 2023 en se restreignant quasiment à la seule mobilité électrique, la seule nuance venant du choix en tout batterie ou batteries et pile à combustible, cette dernière option semblant faire de plus en plus d’adeptes. Le fait marquant est de voir que cette tendance concerne tous les acteurs, Européens comme Ottomans, sans oublier l’omniprésent empire du Milieu qui a réalisé une véritable démonstration de force. Illustration en était donnée dans un hall entier avec BYD, Golden Dragon, Higer, Yutong ou Zhong Tong. On note le désengagement dans le camp européen de Scania et Volvo Buses, les deux fermant
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leurs usines en Pologne fabriquant les véhicules complets pour se reposer sur des carrossiers tiers : MCV (Égypte) et Sunsundegui (Espagne) pour Volvo Buses, Castrosua et Irizar (Espagne) ainsi que Higer (Chine) pour Scania. Pour les équipementiers, l’accent était mis d’une part sur l’allègement (afin de compenser le poids colossal des accumulateurs électriques) et sur la mise en conformité des équipements de bord avec le règlement européen GSR II, qui entre en application pour les véhicules neufs à partir de juillet 2024. Toute l’électronique de bord doit être revue et les véhicules comprendre de nouveaux dispositifs Adas d’aide à la conduite. Du côté des minicars et minibus, les bases mécaniques demeurent les incontournables Iveco Daily et Mercedes-Benz Sprinter. Ils sont parfois mis à toutes les sauces, sinon à toutes les énergies.
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Solaris Bus enrichit l’équipement de bord (nouveaux afficheurs, rétrovision par caméras, radars latéraux) en prévision de l’application de la norme européenne GSR II. Le constructeur de Bolechowo (Pologne) est un spécialiste du multi-énergies et fait figure de meneur dans le domaine des autobus à pile à combustible ainsi que dans celui du trolleybus.
Setra présentait une nouveauté, le MultiClass série 515 LE. Étroitement dérivé du Mercedes-Benz Intouro avec lequel il partage chaîne cinématique et les lignes de fabrication, il s’en distingue par son architecture Low Entry et un style très néo-rétro.
Le constructeur turc, Temsa s’est converti à l’électricité depuis quelque temps pour ses autobus urbains. Il fait désormais de même pour les autocars de ligne ou scolaires, et a annoncé le développement d’un autocar longue distance doté d’une pile à combustible, le Temsa HD FC.
L’Iveco Daily se convertit aussi à l’électrique à batteries. Notez l’intégration des accumulateurs entre les longerons. Il est prévu en châssis nu ou minicar carrossé départ usine, visible au fond à droite. À gauche, une réalisation du carrossier Indcar, toujours sur base Iveco Daily. N°15 • 11/2023
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Pour Van Hool, rien n’est trop gros, que ce soit dans le sens de la hauteur (avec la gamme d’autocars Van Hool TDX à impériale) ou dans le sens de la longueur avec l’impressionnant autobus Exqui.City tri-caisse électrique à batteries, doté de l’alimentation par le sol Alstom SRS.
Mercedes-Benz entend convertir le monde entier aux autobus à batteries avec son châssis électrifié.
Le Mercedes-Benz eCitaro H2 se dote d’une pile à combustible (d’origine Toyota) servant de prolongateur d’autonomie.
Le constructeur turc Otokar Europe a procédé à un remodelage de sa gamme, que ce soit pour les autobus urbains ou les autocars de ligne. Gageons que la position de conduite a été revue sur les Otokar Navigo pour améliorer les conditions de travail des conducteurs.
Iveco Bus a révélé le nouveau graphisme du logotype de la marque, ainsi qu’un intéressant concept d’autobus urbain à pile à combustible permettant de réduire la masse de 1 500 kg par rapport au bus tout batterie d’autonomie équivalente. N°15 • 11/2023
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Exotique vu de France, le MAN Lion’s Intercity LE14 à 3 essieux et 3 portes.
L’électrique, c’est aussi le bifilaire. Le constructeur Hess a tenu à le rappeler sur son stand avec cet impressionnant autobus articulé destiné à la ville de Neuchâtel (Suisse).
Bosch a revu son offre d’équipements électroniques et d’infodivertissement pour se mettre en conformité avec le règlement GSR II.
La firme Ebusco met en avant son autobus à batteries dit « génération 3.0 » à panneaux en fibre de carbone promettant des gains de tare significatifs. Quel sera le prix à payer en termes financiers comme de réparabilité pour cette option ?
Chez Bosch, les systèmes de direction se préparent à l’automatisation intégrale via la présence de plus en plus forte de moteurs et d’actuateurs électriques. En attendant la direction tout électrique (ou steer-by-wire).
Le néerlandais VDL Bus & Coach débute enfin les livraisons de son nouvel autobus Citea à batteries. Originalité : elles sont intégrées au plancher et non plus en toiture. Bien vu pour le comportement dynamique. Quid de la protection des packs d’accumulateurs électriques face aux chocs latéraux ? N°15 • 11/2023
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Constructeur Les fabricants de sièges, ici l’italien Lazzerini avec la gamme Ethos urbaine et interurbaine, doivent faire assaut d’inventivité pour gagner en masse et en encombrement afin de compenser la prise de poids des véhicules à batteries.
ZF a exposé le pont-portique électrique bimoteur ZF AxTrax, qui doit remplacer à terme le pont AVE 130 devenu populaire chez les fabricants d’autobus électriques. Notez le dégagement pour le plancher. Il est conçu pour des véhicules jusqu’à 29 t de PTAC.
L’électrification, comme en camion, apporte son lot de nouveaux noms inconnus jusque-là.
Sur le stand Mekra Lang, les équipements de détection dans l’angle mort étaient largement mis en avant.
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