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Actualité • Succès pour les Rencontres de la Filière 2022 • L’arrivée de l’Euro VII change la donne
Succès pour les Rencontres de la Filière 2022
Plus de 400 personnes ont assisté le 17 novembre dernier aux Rencontres de la Filière 2022 à Lyon. Organisé par la FFC, ce rendez-vous d’échanges entre les acteurs du secteur du transport a lieu en alternance avec Solutrans. L’édition 2023 du salon a été présentée lors du dîner devant de nombreuses personnalités européennes.
La transition énergétique a été largement évoquée. L’euro VII annoncé par Bruxelles n’a pas suscité un grand enthousiasme de la part des constructeurs présents, tout en convenant que l’avenir sera multi-énergie. Ils étaient tous convergents sur leur rôle dans la mobilité électrique « que celle-ci soit choisie ou contrainte ». Les Rencontres de la Filière présentaient aussi une exposition de camions zéro émission. Le Hyundai Xcient était dévoilé pour la première fois en France au grand public. Autre curiosité: Iveco a présenté une première hydrocureuse gaz (Kaiser Moro), un S-Way NP 400. Le prix de l’Homme de la Filière a été remis à Luc Chatel, président de la PFA, lors du dîner.
Des tables rondes riches
Les Rencontres de la Filière, au travers de plusieurs tables rondes, ont permis de faire l’inventaire des sujets d’actualité. On remarque, en premier lieu, une forme d’unanimité des constructeurs présents (représentants d’Iveco, Scania, Volvo Trucks et la Chambre syndicale internationale de l’automobile et du motocycle – CSIAM) pour déplorer les objectifs d’Euro VII venant en plus de ceux liés à la mobilité électrique. En clair : leurs ressources humaines et financières ne pourraient pas poursuivre tous les objectifs dans le calendrier demandé. S’ils s’accordent tous pour dire que l’électrique à batteries sera à terme prépondérante, il restera une place pour le moteur thermique sur certaines missions où l’électromobilité serait inadaptée. Giandomenico Fioretti, directeur des propulsions alternatives du groupe Iveco, a été très optimiste pour les objectifs de réduction des émissions de CO2 transport en France. Outre le rôle du parc électronucléaire pour la production électrique, il a très fortement insisté sur le potentiel de décarbonation dont la France dispose via la biométhanisation. Cette approche est assez similaire à celle de Stéphane Raux, l’intervenant de l’IFP Énergies Nouvelles, qui a plaidé pour une approche par rendement de filières et analyse de cycle de vie des différentes solutions technologiques. Il a conclu
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son intervention par cette phrase choc: « Il n’y a pas de solution unique ! ».
Plaidoyer pour davantage de visibilité
Il a aussi été question des ZFE. Des intervenants comme Olivier Poncelet, délégué général de l’Union TLF, et de Jean-Yves Gautier, vice-président de la commission logistique de la FNTR, ont fait part d’un manque de visibilité, d’harmonisation et de cohérence. Unanimité entre représentants des transporteurs et des constructeurs, par l’intermédiaire de la CSIAM, représentée par son président de la branche véhicules industriels Henri Paccalin, également directeur général de Mercedes-Benz Trucks France, et de Christophe Martin, directeur général de Renault Trucks. Si le principe des ZFE est européen, comme l’a rappelé Matthieu Viera, élu EELV de la métropole de Lyon et du Sytral, se pose le problème de leur harmonisation transnationale, la France mettant une joyeuse pagaille avec sa hiérarchie de vignettes Crit’Air décorrélées des normes Euro.
L’arrivée de l’Euro VII change la donne
La Commission européenne a publié courant novembre sa proposition relative aux normes antipollution Euro 7, les véhicules industriels devant y être assujettis au 1er juillet 2027. Bruxelles affirme en même temps son souhait de poursuivre avec le thermique pour les camions. Une annonce surprise qui oblige les constructeurs à revoir leur feuille de route de décarbonation, qui excluait pour certains le diesel.
L ’ACEA, l’Association des constructeurs européens d’automobiles, est la première à apporter des critiques sur l’arrivée de l’Euro VII. Elle déplore le calendrier, jugé « irréaliste » en raison des délais nécessaires au développement et à l’homologation des véhicules. La Commission pourrait également s’attirer les foudres des lobbies pro-électriques à batteries, car elle reconnaît dans son texte : « […] la transition, significativement plus lente des véhicules industriels vers les technologies zéro émission. Camions et autocars avec moteurs à combustion interne devraient rester plus longtemps sur le marché de l’UE ». Un point confirmé indirectement par la note 18 page 19 de la proposition : « au cas où la Commission ferait une proposition d’inclure après 2035 de nouveaux utilitaires roulant exclusivement avec des carburants neutres en CO2, en dehors des objectifs sur les standards d’émissions de CO2 des flottes, et en conformité avec les lois de l’UE et les objectifs de neutralité climat, cette réglementation sera amendée pour inclure une homologation par type de ces véhicules ». L’Union internationale des transports routiers (IRU) craint de son côté que « la rigueur des normes de la proposition Euro 7 puisse, dans certains cas, nécessiter une refonte complète des véhicules, avec de graves implications financières totalement disproportionnées par rapport aux avantages réels ». L’organisation est également prudente quant à l’inclusion des pneus et des freins dans le champ d’application des règles Euro VII. « Un opérateur de transport pourrait-il acheter un véhicule Euro VII et un an plus
tard, le véhicule n’est plus considéré comme un véhicule Euro 7 parce que des pneus usés ont été remplacés par des pneus d’une qualité différente ? Cela signifierait-il qu’un véhicule ne peut plus entrer dans une zone urbaine à faibles émissions en raison de l’usure de certaines pièces ? », s’interroge l’IRU.
Extension de la mesure des particules
Les tenants du tout électrique à batteries doivent également s’agacer d’une disposition assez révolutionnaire : la mesure des particules non issues des gaz d’échappement, telles que celles en provenance des freins ou de l’abrasion des pneus. Un sacré défi en perspective pour les équipementiers ! Et un gros souci pour les véhicules à batteries, nettement plus lourds que leurs pendants thermiques. En prime, les véhicules Euro VII électriques devront être en mesure de donner un état de santé de leurs packs de batteries de traction via l’OBD. Une mesure destinée à rassurer le marché de l’occasion. Une des préoccupations relevées par l’UE avec Euro VII est l’existence de systèmes annihilant les équipements de post-traitement et l’inviolabilité des compteurs kilométriques. La Commission considère la résolution de ces problèmes comme de la plus haute importance. Autre nouveauté, la masse des émissions de polluants lors des phases de régénération des équipements de post-traitement (typiquement les filtres à particules) sera désormais prise en compte (en partant de la fréquence et de la durée des régénérations). Dans cette même logique, les seuils d’émissions de gaz tels que le protoxyde d’azote sont sévérisés (ils étaient déjà pris en compte depuis Euro VI-D, tout comme les émissions de CH4 issus des catalyseurs).
Nouvelles méthodes de mesure
Pour clarifier les mesures, Bruxelles crée, fort pertinemment, un « budget » d’émissions pour les cycles équivalents à moins de 3 cycles WHTC, ainsi qu’un seuil pour les NOx en cas d’usage stationnaire. En lien avec Vecto, les impacts CO2 des semi-remorques et remorques seront également calculés. Il est aussi prévu l’introduction d’un OBFCM (on board fuel and energy consumption monitoring device), enregistrant les données réelles d’utilisation pertinentes pour la détermination de l’énergie consommée (applicable aussi bien pour les véhicules électriques que thermiques). Ces données devront être transmises via la prise OBD ou bien via radio à courte portée pour les contrôles routiers. Un dispositif venant en plus des calculs théoriques Vecto. Il est acté que les utilitaires lourds de catégorie d’homologation N2, d’un PTAC compris entre 3,5 t et 4 t auront un classement dit véhicule Euro 7ext (comme extended en anglais), dérivé de la norme automobile Euro 7 (qui elle-même se scindera en plusieurs sous-classements en fonction des objectifs et des fonctionnalités des véhicules). En annonçant le maintien du thermique dans le véhicule industriel, la Commission européenne va donner la possibilité aux constructeurs de poursuivre leurs productions de poids lourds diesels. Ils devront surtout revoir leur feuille de route, certains ayant exclu le thermique de leur catalogue. Les cartes sont redistribuées et la transition énergétique reste dans une phase transitoire.