E MAG TRANSPORT #8

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LE MAGAZINE DIGITAL DU TRANSPORT ROUTIER

N°8

Mars 2022

PRISE EN MAIN Renault Trucks T High 480 Evo 2021

FOCUS Les Rencontres de la filière 2022

Scania lance un nouveau moteur L’impact de la transition énergétique sur la carrosserie VI Solutions embarquées : où vont mes données ? Guide juridique du mix énergétique : que dit le législatif ?

OBJECTIFS CO2 L’impossible scénario de Bruxelles ?



La transition énergétique en panne sèche

T Hervé Rébillon, fondateur eMAG TRANSPORT/ TRM24.

out n’avait pas été calculé pour les nouvelles énergies. On n’avait pas pensé à leur vulnérabilité. On n’avait pas envisagé que leurs prix pourraient s’envoler à en bloquer des centaines de camions, avec le risque de paralyser l’économie du pays. Dans ce nouveau numéro, il nous a semblé intéressant de faire un point sur la transition énergétique, son impact sur la filière du véhicule industriel et ses répercussions sur la carrosserie. Elle entraîne sans aucun doute une évolution de l’industrie de l’utilitaire et du poids lourd. Les acteurs de la filière en témoignent dans cette édition. Nous tenterons de savoir si les objectifs CO2 fixés par la Commission européenne pourront être tenus par les constructeurs, et à quel prix. Les nouvelles énergies nécessitent en effet des recherches onéreuses et peuvent revenir cher à la pompe ou à la recharge. Aucun acteur du transport routier ne peut échapper à la transition énergétique, elle s’impose désormais et les zones à faibles émissions (ZFE) en sont la toute première application. Ce n’est plus un choix mais une obligation pour les professionnels de la route.

Sommaire 5 Dossier • Objectifs CO2 : le scénario impossible de Bruxelles ? 8 Interview • Marcus Hörberg, président de Volvo Trucks France 11 Dossier • Nouvelles énergies, Les carrossiers dans la boucle 20 Interview • Gaëtan Monnier, directeur du centre de résultats transports à l’IFP Énergies nouvelles

22 Actualité • Les Rencontres de la filière 2022 • Interview de Patrick Cholton, Président de la FFC et de Solutrans

26 Focus • Transition énergétique. Le guide juridique 30 Constructeur • Événement. Un nouveau moteur chez Scania

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ÉDITO

N°8 • Mars 2022

Ont collaboré à ce numéro Directeur de publication Hervé Rébillon • rebillon@trm24.fr Journalistes Antoine Carmet • carmet@trm24.fr Laure Manginot • manginot@trm24.fr Jean-Philippe Pastre • pastre@trm24.fr Publicité La Station Productions Conception et maquette • Luna Aguilar Webmaster TRM24 • Éric Martin Photos • Tous droits réservés

34 Constructeur • MAN commercialise le B100 36 Prise en main • Renault T High 480 Evo 2021. Le Renault T optimisé 43 Dossier • Solutions connectées : où sont mes données ? 48 Brèves • Solutions connectées 50 Focus • La C2A, plus qu’une carte carburant

e-MAG TRANSPORT est proposé par la rédaction de TRM24 et édité par La Station Productions.



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OBJECTIFS CO2

Le scénario impossible de Bruxelles ? Les échéances en matière d’émissions CO2 pour les poids lourds imposées par Bruxelles sont proches. Reste à savoir si les constructeurs pourront relever ce véritable défi et à quel prix. Car les nouvelles énergies, électrique et gaz, ont un coût, tant dans la recherche que désormais à la pompe et à la recharge. La flambée du prix des carburants est venue jouer les troublefêtes dans la transition énergétique.

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es objectifs CO2 sont-ils réalistes ? Pour l’échéance de 2025, les constructeurs semblent plutôt optimistes, notamment chez Daf, Renault Trucks, Scania et Volvo Trucks. Ils sont déjà engagés dans la baisse des consommations et cela passe par tous les moyens : aérodynamiques (à ce titre la nouvelle cabine Daf XG + est révélatrice) ou au niveau des motorisations (génération de moteurs 6 cylindres Scania Super). Les constructeurs face aux échéances La stratégie de Scania est intéressante : tous les moyens sont utilisés, nouveaux moteurs, hybrida-

tion améliorée, électrification. Quant aux Scania Super, ils révèlent un potentiel significatif pour le moteur thermique, puisqu’ils franchissent la barre des 50 % de rendement thermodynamique sans recours aux turbocompounds, cycle de Rankine ou cycle Miller. Christophe Martin, directeur général de Renault Trucks, estime que « la marque tiendra les engagements, notamment via la commercialisation fin 2022 des moteurs DE13TC turbocompound ». Les livraisons des modèles à batteries, déjà effectives chez Renault Trucks et Volvo Trucks, contribueront à atteindre de cette première étape. Clément Chandon, responsable produits Iveco, n’a pas chiffré ••• N°8 • 03/2022


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Dossier Rappel des objectifs CO2 poids lourds fixés par Bruxelles Le règlement européen (n° 2019/1242) sur les émissions de CO2 des poids lourds a été publié le 25 juillet 2019 au Journal officiel de l’Union européenne. Il précise que les constructeurs sont contraints de réduire en moyenne les émissions de dioxyde de carbone des nouveaux poids lourds de 15 % à partir de 2025 et de 30 % à partir de 2030. Pour 2025, le calcul se fera sur la base des émissions de CO2 moyennes des véhicules utilitaires lourds nouvellement immatriculés pendant la période allant du 1er juillet 2019 au 30 juin 2020. Pour 2030, l’objectif de réduction s’appliquera dans le cadre d’un réexamen en 2022 après présentation d’un rapport au Parlement européen et au Conseil sur l’efficacité des mesures de baisse des émissions. Les constructeurs qui ne respectent

l’état des lieux d’Iveco par rapport aux objectifs 2025. Il estime cependant que « 5 % d’électriques dans le mix Iveco permettraient d’atteindre les objectifs de l’échéance 2025 ». En revanche, l’échéance 2030 sera assurément plus délicate. D’une part en raison des risques de surenchère politique qui peuvent émaner aussi bien de la Commission européenne que du Parlement européen, d’autre part en raison des marges de progrès qui vont se réduire pour les ingénieurs. Des constructeurs devront renouveler les motorisations ou recourir à une surenchère technologique sur les moteurs à combustion interne. En auront-ils les moyens ? En outre, les biocarburants ne comptent

MAN a dévoilé dernièrement le prototype de son camion électrique qui sera lancé plus tôt que prévu, début 2024.

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pas ces objectifs devront « s’acquitter d’une pénalité financière prenant la forme d’une prime sur les émissions excédentaires », précise le texte.

pas dans les calculs des émissions CO2, ni d’ailleurs dans les réglementations ZFE (zones à faibles émissions). Sans oublier qu’en raison de ces objectifs et du simulateur d’émissions Vecto, certains pourraient être tentés de retirer du catalogue des modèles ou des applications trop pénalisants pour les moyennes CO2 constructeur. Parc de véhicules zéro émission insuffisant Vu les tarifs et les contraintes d’exploitation pour certaines énergies, les clients pourraient ne pas suivre faute de capacité d’investissement. Nous aurions alors un objectif atteint en façade, mais sur un marché considérablement réduit en termes d’immatriculations faute de clients, ce qui retarderait d’autant l’effectivité de la transition énergétique. Selon une étude de l’Association des constructeurs européens d’automobiles (Acea), le constat est plus alarmant : il faudrait multiplier par 100 la flotte de poids lourds zéro émission pour atteindre les objectifs CO2 fixés par Bruxelles. Le calcul est rapide : 6,2 millions d’utilitaires et poids lourds roulent actuellement sur les routes en Europe. La majorité fonctionne au diesel, seulement 2 300 d’entre eux à l’électrique ou au gaz. Ce n’est pas assez. La Commission européenne a fixé l’objectif de disposer de quelque 80 000 camions zéro émission sur la route d’ici 2030. L’Acea estime que le secteur doit être aidé : « une action urgente est nécessaire au niveau européen et des États membres. Cela comprend l’établissement de redevances routières basées sur le CO2, une taxation de l’énergie basée sur la teneur en carbone et en énergie des carburants, un système de tarification des émissions de CO2, et surtout, un réseau dense d’infrastructures de recharge et de ravitaillement adaptées aux camions ». Car l’autre grand problème est l’infrastructure. Les stations de re-


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charges électriques et d’avitaillement en gaz sont encore peu nombreuses en Europe. Revoir le calcul biaisé du CO2 La donne pourrait changer. Un autre scénario se profile. Bruxelles pourrait revoir le mode de calcul et prendre en compte non plus du réservoir à la roue mais bien du puits à la roue. Selon l’Union internationale des transports routiers (IRU, International Road Transport Union), la comptabilisation actuelle erronée des émissions de CO2 compromet la décarbonation du transport routier. « C’est un travail énorme et coûteux. Le bon mélange d’incitations et d’investissements pour accélérer les alternatives à faible émission de carbone, et finalement à zéro émission nette pour atteindre les objectifs de 2030 et 2050, ne peut être réalisé que si le CO₂ est correctement pris en compte », a déclaré le secrétaire général de l’IRU, Umberto de Pretto. « La norme biaisée du réservoir à la roue, qui mesure les émissions au tuyau d’échappement au lieu de faire une évaluation approfondie du puits à la roue, continue de fausser les mesures politiques visant à réduire le CO₂ dans le transport routier. Les opérateurs du secteur ont besoin de certitude, alors qu’ils continuent à travailler sur l’énorme défi de décarboner efficacement leurs flottes, et non d’options imaginaires irréalisables », a-t-il ajouté. Alors, le scénario de Bruxelles est-il possible ? Gaëtan Monnier, directeur du centre de résultats transports à l’IFP Énergies nouvelles, prévient : « on va

La prise en compte du puits à la roue changerait le calcul environnemental de l’utilisation des camions électriques.

imposer finalement une certaine partie des solutions avant même qu’elles soient rentables. Je pense que l’on va arriver dans un schéma de contraintes où l’on force les choses et où l’on force la transition » (lire l’interview pages 20 et 21). La mise en place des ZFE est la première contrainte de la transition énergétique pour les transporteurs. Par ailleurs, la commission européenne devrait annoncer en juillet de nouveaux objectifs pour les poids lourds, probablement plus drastiques, ce qui devrait compliquer les choses. Il faudra aussi compter sur la fluctuation incontrôlable du prix des énergies. Pour l’heure, la transition énergétique dans l’industrie du véhicule industrielle est mise entre parenthèses. Hervé Rébillon rebillon@trm24.fr

Les stations de recharge électrique et d’avitaillement en gaz restent encore peu nombreuses en Europe.

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Interview

Marcus Hörberg Président de Volvo Trucks France

Marcus Hörberg a été nommé président de Volvo Trucks France et a pris ses fonctions le 1er février dernier. D’origine suédoise, il a passé la majorité de sa carrière à l’international. Il a rejoint le groupe Volvo en 1997, dans un premier temps à Volvo Financial Services, et à partir de 2007 chez Volvo Trucks où il a occupé plusieurs postes de direction. Avant de diriger Volvo Trucks en Afrique du Sud, Marcus Hörberg était directeur général de Volvo Trucks en Serbie et au Maroc, puis responsable du groupe Volvo au Pérou.

eMAG TRANSPORT : Comment se porte le marché du poids lourd en France en ce début d’année, au premier trimestre ? Marcus Hörberg : Les premiers chiffres officiels concernant le marché 2022 semblent montrer une tendance légèrement à la hausse, et nous restons sur une bonne dynamique d’entrées de commandes et de volume de cotations, signes d’un bon niveau d’activité chez nos clients. eMT : Les délais de livraison se sont raccourcis, en raison notamment de la pénurie de semiconducteurs, la situation a-t-elle tendance à s’améliorer ? M. H. : La situation mondiale sur ce marché n’a pas évolué et nous subissons début 2022 les mêmes perturbations que fin 2021. Notre visibilité sur une amélioration de la situation reste faible. eMT : Les répercussions sont-elles importantes sur les ventes et les commandes ? M. H. : Nous avons, depuis le début de cette crise, adopté une position de transparence et d’accompagnement avec nos clients. Nous travaillons avec chacun d’entre eux pour tenter de minimiser l’impact des perturbations de nos approvisionnements sur leur exploitation. Chaque cas est unique. Il n’existe pas de solution universelle. La communication avec nos clients sur nos contraintes et leurs attentes est clé dans de tels moments. C’est ensemble que nous pouvons N°8 • 03/2022

construire des solutions adaptées et efficaces. C’est ce que font nos équipes au quotidien. eMT : Vous avez livré il y a quelques jours le premier Volvo électrique gamme lourde en France, les transporteurs français sont-ils séduits par les camions électriques ? M. H. : Nous commençons à sentir une vraie prise de conscience de la part de nos clients des capacités et opportunités offertes par nos modèles électriques. Sur de nombreuses activités, ce sont des véhicules qui permettent d’avoir une productivité équivalente à un véhicule conventionnel. Alors que nous avons déjà plusieurs véhicules électriques de moyen tonnage en circulation sur les routes françaises, nous voyons progresser l’intérêt de nos clients et les ventes de nos solutions 100 % électriques, avec déjà une dizaine d’autres commandes gamme lourde depuis Solutrans en novembre dernier. eMT : L’aide à l’acquisition d’un camion électrique jusqu’à 150 000 € annoncée par l’État français arrive-t-il au bon moment ? M. H. : Nous avions déjà en France un dispositif d’aide avec un bonus gouvernemental de 50 000 € à l’achat d’un poids lourd électrique, et les récentes annonces du gouvernement de couvrir jusqu’à 65 % de l’écart de coût d’acquisition entre le véhicule électrique et son équivalent diesel, avec un plafond de 100 000 € pour les véhicules ayant un poids inférieur à 26 t ou de 150 000 € pour les véhicules ayant un poids maximal supérieur ou égal à 26 t sont les bienvenues. Ces aides, cumulables avec le dispositif de suramortissement de 40 % à 60 % vont faciliter l’accès aux véhicules électriques pour nos clients, avec un coût total de détention proche de celui d’un véhicule conventionnel diesel. Nous lançons la production de nos modèles lourds FH, FM et FMX en septembre cette année, et cette annonce tombe donc au bon moment.


Interview eMT : Les résultats de l’essai récent d’un Volvo FH électrique ont montré qu’il est possible de parcourir jusqu’à 500 km sur une seule journée, avec une brève pause pour recharger, c’est une manière de démontrer que l’électrique n’est pas réservé qu’à l’urbain ? M. H.: Comme dit précédemment, sur de nombreuses activités, les véhicules électriques à batteries sont des véhicules qui permettent d’avoir une productivité équivalente à un véhicule conventionnel. L’essai réalisé par un journaliste indépendant allemand, Jan Burgdorf du magazine Trucker, démontre qu’il est désormais possible de faire du transport régional avec nos véhicules 100 % lourds jusqu’à 44 t. eMT : Il reste à résoudre le problème des infrastructures, des stations de recharge. Parlez-nous du rapprochement avec Daimler et Traton dans ce domaine. M. H. : Cela met également en évidence le besoin d’avoir une infrastructure de recharge haute puissance, destinée au transport de marchandises lourd, pour que les conducteurs puissent recharger les batteries du véhicule pendant leur pause de conduite obligatoire. Au travers de notre jointventure avec le groupe Daimler et le groupe Traton, nous ambitionnons d’installer un réseau de 1 700 points de recharge pour les PL électriques en Europe à l’horizon 2025. Cela couvrira environ 10 % du besoin d’infrastructure de recharge, il est donc indispensable que les acteurs privés et publics contribuent à la mise en place de ce réseau. eMT : La transition énergétique doit-elle être placée avant tout dans une économie circulaire ? M. H. : L’objectif que nous visons est de contribuer à façonner le monde dans lequel nous voulons vivre et que nous voulons laisser aux générations futures, un monde plus propre. Cela passe par la limitation de nos émissions de polluants et la décarbonation de notre industrie, mais également par la circularité de notre économie pour utiliser au mieux l’énergie et les ressources dont nous disposons.

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eMT : Vous venez de prendre vos fonctions de nouveau président de Volvo Trucks France, après avoir occupé plusieurs postes à travers le monde au sein de Volvo Trucks. La France est-elle un marché particulier ? M. H. : Tous les marchés sur lesquels j’ai travaillé présentent des différences, selon les industries principales, les marchandises transportées, les conditions géographiques, le climat, etc., mais nos clients sont confrontés à des défis similaires dans le monde entier et ont le même objectif : parvenir à une activité efficace, productive et durable. Sur tous les marchés, notre mission consiste à être un moteur de prospérité, par le biais de nos solutions de transport et d’infrastructure, en contribuant à la réussite de nos clients et partenaires et en apportant notre contribution aux sociétés dans lesquelles nous travaillons. eMT : L’approche environnementale est-elle différente selon les pays et les continents M. H. : Nous nous sommes engagés à respecter les accords de Paris. Par conséquent, même si le point de départ n’est pas le même, nous conduisons notre activité en ce sens sur tous les marchés. Nous aurons par exemple des produits ne consommant aucun carburant fossile sur tous les marchés en 2050. eMT : Vous avez relevé de nombreux défis avec vos différents postes à l’international, quel défi vous lancez-vous pour la France ? M. H. : Comme tous mes collègues, j’ai à cœur de laisser le monde en meilleur état pour les générations futures. Ces prochaines années, nous assisterons à un grand changement sur ce point, grâce au travail massif de développement durable que nous réalisons. Notre principal défi sera de mener cette transition tout en améliorant l’activité de nos clients et partenaires. Cela ne sera pas facile, mais je pense que nous tenons tous à le faire. Propos recueillis par Hervé Rébillon

rebillon@trm24.fr

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NOUVELLES ÉNERGIES

Les carrossiers dans la boucle Intégration de plus en plus complexe des carrosseries sur les nouveaux châssis à nouvelles énergies, obligations liées à la WLPT et à Vecto, les carrossiers sont aussi sous pression face aux échéances de la transition énergétique.

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a transition énergétique est un sujet de préoccupation pour les constructeurs et les carrossiers, et ce, depuis 2020 avec les premières livraisons de châssis entièrement électriques par Renault Trucks et Volvo trucks. Une nouvelle étape a été franchie. « Nous avons également de nombreuses demandes des clients sous l’effet de la pression de l’offre des constructeurs », précise la FFC Constructeurs (organisation adhérente à la Fédération française de carrosserie), même si avec 43 véhicules lourds à batteries carrossés en 2021, on reste encore dans un marché de niche. Un scénario qui rappelle celui des véhicules GNV il y a quinze ans. « Plusieurs pressions liées à Vecto s’exercent directement sur les constructeurs », sans oublier que dans la compatibilité européenne, « les véhicules électriques comptent double dans les contrats d’objectifs ». Clément Chandon, directeur produit d’Iveco France, le confirme : « pour les constructeurs, le véhicule électrique, c’est toujours bon » dans les calculs des objectifs CO2 du réservoir à la roue assignés par l’Europe. « Les constructeurs sont

dans une situation assez bizarre, sinon assez injuste : les textes actuels imposent de fait un minimum d’immatriculations en électrique. » Il rappelle une donnée qui impacte indirectement la FFC Constructeurs : 70 % des émissions de CO2 sont le fait des tracteurs routiers, en raison de leur usage bien plus intensif. Et puis, il y a les ZFE-m contraignant directement les utilisateurs finaux. « Un des problèmes demeure le TCO des véhicules électriques […] La concrétisation en termes d’achat n’est pas facile », résume-t-il. Les solutions pour le carrossage « Si on n’a plus le droit d’utiliser des véhicules thermiques, il faudra bien trouver une solution. Pour le carrossage, on en trouvera toujours une », indique la FFC Constructeurs. Clément Chandon le reconnaît : « il y a des cas compliqués, mais en carrosserie, on essaie de lever les obstacles les uns après les autres ». Le problème est quasiment résolu pour les toupies à béton, au moins les 8x2. Pour les 8x4, tout dépend de l’empattement. Pour les missions grosses consommatrices de force ••• N°8 • 03/2022


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Dossier Sur cette réalisation de la carrosserie Vincent avec des équipements Palfinger, il a été impossible de modifier les packs de batteries. Le carrossier a donc monté des stabilisateurs rotatifs positionnés en chandelle une fois rétractés.

motrice, comme les hydrocureuses « les premières réalisations sont en cours en GNV ». Restent les aspiratrices de terre, pour le moment toujours fidèles aux moteurs diesels « forts en couple ». Des FPT (fourgon-pompe tonne) GNV ont été étudiés entre Iveco et sa filiale Magirus Camiva. Quant aux laveuses-balayeuses, exigeantes en dégagement de longerons sur les deux flancs, elles promettent d’être très difficiles à électrifier en raison de « l’intangibilité » des packs batteries. Pour le moment, en énergie alternative, c’est le GNV qui reste l’option la plus mature sur ce type de carrosseries : l’Iveco Eurocargo en 16 t de PTAC reçoit les réservoirs de GNC en dos cabine, même si à l’heure actuelle quelques restrictions existent pour les véhicules sous règlement ADR (accord européen relatif au transport international des marchandises dangereuses par route). Ainsi, il n’est pas possible de transporter des matières explosives (classe 1) avec des moteurs à allumage commandé (donc les GNV). En cause : le risque d’étincelles. L’ADR n’est pas non plus compatible, pour le moment, avec les véhicules électriques à batteries. Cela laisse le champ libre aux énergies non fossiles reposant sur le moteur diesel, comme le B100 exclusif. Encore faut-il que cette option soit reconnue dans le cadre des vignettes Crit’Air. Des catégories pionnières Si certaines contraintes techniques existent, la réponse peut à son tour être technologique. Ainsi, N°8 • 03/2022

pour un porteur avec bras pour caisse amovible réalisé par Carrosserie Vincent sur base Volvo FE 4x2, ne pouvant placer les stabilisateurs de façon habituelle en raison de la présence du pack de batteries, le carrossier a utilisé des stabilisateurs rotatifs

L’électrification des groupes froid peut générer quelques conflits d’espace avec les nouvelles architectures véhicules (GNV ou électriques).


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se relevant vers le haut. Évidemment, cela a induit L’autonomie en question un surcoût, mais il est marginal par rapport à celui La FFC Constructeurs s’inquiète moins de cette du véhicule. D’autres métiers sont, de longue date, question de compatibilité technique que de celle objets de carrossages sur des châssis non convende l’autonomie : quid de celle-ci avec les équipetionnels. La FFC Constructeurs rappelle ainsi « qu’il ments de travail montés à bord ? Et de citer la quesy a des usages qui sont historiquement à base de vétion des grues, toupies à béton, etc. « Tout le monde hicules électriques, comme les bennes à ordures més’inquiète pour l’autonomie et la recharge […] Et puis nagères ». Elles ont aussi été parmi il faut distinguer les usages entre les pionnières de la motorisation au les villes et les espaces ruraux. » Un GNV. Mais la Fédération le rappelle, point confirmé par Clément Chan« ce sont des contrats publics, aux don d’Iveco : « l’autonomie, c’est la modèles économiques différents », clé dans la transition énergétique », pour lesquels la pression du légisy compris en GNV. Il en convient, lateur se fait plus forte en matière certains empattements courts, en d’engagement vers les motorisasilhouettes 8x4 pour toupies à bétions non conventionnelles. ton, peuvent poser de sérieuses difChristophe Martin, directeur géficultés en fonction de la taille des néral de Renault Trucks France, réservoirs GNC. Cela expliquerait, analyse que les marchés qui vont entre autres causes, l’engouement passer le plus facilement à l’élecpour les 4 essieux à tridem arrière trique sont les bennes à ordures qui laissent davantage de place ménagères, la distribution uraprès la cabine. La polyvalence va Christophe Martin, baine de colis et la température devenir une denrée rare. Ces sujets directeur général de Renault dirigée. Pour cette dernière, tous sont abordés dans le cadre de la Trucks France. les équipementiers proposent des task force associant constructeurs, solutions série parfaitement compatibles avec fédérations professionnelles (la FFC mais ausles véhicules GNV ou électriques à batteries, qui si Union TLF), des associations de filières comme avec du repiquage de gaz dans les réservoirs du l’Avere-France ou France Hydrogène et le comporteur, qui avec de la cryogénie (Thermo King missariat général au développement durable du ou Cryofridge), qui avec des groupes froid 100 % ministère de la transition écologique. Des discussions auraient lieu également au niveau européen électriques (comme Frigoblock désormais intégré via le comité de liaison de la construction de ••• à Thermo King, ou Carrier).

Économiser du kWh électrique sur les véhicules à batteries peut impliquer de profondes évolutions pour les métiers de la température dirigée. Une solution peut être la cryogénie proposée par le carrossier-constructeur Frappa avec ses groupes cryogéniques sous azote indirect Cryofridge.

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Équiper les porteurs 4 essieux de réservoirs GNV ou de packs de batteries est possible, moyennant quelques ruses comme le choix fait ici d’un montage tridem arrière et d’un essieu directionnel simple à l’avant et le choix d’une silhouette 8x2/6.

gies alternatives, selon Christophe Martin, « c’est carrosseries et de semi-remorques (CLCCR) basé à Bruxelles. Pour la Fédération, ces échanges sont un investissement non négligeable pour le réseau », fondamentaux : « la concrétisation en termes d’achat labellisé E-Tech en France. Aucun doute : l’avenir n’est pas facile, on constate une forme d’attentisme, chez les constructeurs est au support aux clients mais c’est aussi aggravé par un facteur externe : le fait finaux et aux carrossiers en matière d’énergies que l’on ait peu de retours d’expérience. Ceux-ci sont nouvelles. Selon la Fédération, un dernier sujet est très peu partagés ». l’investissement en équipement de recharge, le temps s’écoulant entre Pour les carrossiers constructeurs la sortie d’usine du châssis et la se pose également la question de livraison finale au client pouvant la formation et de l’habilitation être très long et amener à un épuiaux courants forts. Selon la FFC sement de l’énergie stockée à bord. Constructeurs, « ce n’est pas un problème ». Les réunions de sections et les échanges avec les constructeurs Obligations WLTP et Vecto permettent d’anticiper les besoins Les cycles d’homologation WLTP éventuels de formations. Encore (procédure d’essai mondiale harfaut-il que les commerciaux chez monisée pour les véhicules légers les motoristes soient bien au fait – en anglais Worldwide harmodes spécificités et des contraintes nized Light vehicles Test Procede carrossage pour ces véhicules dures, ou WLTP) sur véhicules non-diesels. « C’est complexe », reutilitaires et l’outil de simulation Clément Chandon, connaît Clément Chandon, qui réVecto pour les poids lourds ont un directeur produit d’Iveco France. sume la situation : « avant, il fallait impact sur les carrossiers. Les liconnaître son véhicule. Maintenant, il mites entre l’homologation Euro 6, faut connaître son offre, les réseaux de distribution et qu’il s’agisse d’Euro 6d-Temp ou Euro 6 Full pour les prix des énergies, les aides nationales et locales, véhicules légers et Euro VI-e pour les véhicules inles conditions d’exploitation. Pour un vendeur génédustriels, sont fixées à une masse de référence à raliste proposant à terme plusieurs énergies, c’est vide après carrossage de 2 610 kg. En fait, il existe quasiment impossible ». Plusieurs constructeurs une zone grise où les véhicules Euro 6 peuvent alont des fonctions support au sein de leurs filiales ler jusqu’à 2 840 kg (dans ce cas, ils sont classés commerciales France. Les 35 investisseurs du réEuro 6 extended heavy duty) et les Euro VI comseau Renault Trucks ont déjà leurs référents énermencer à seulement 2 380 kg. ••• N°8 • 03/2022


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Les packs de batteries sont intangibles et ne peuvent donc pas être modifiés pour faciliter le carrossage. Une contrainte à prendre en compte dans la définition du châssis. La concertation avec constructeur et carrossier est plus que jamais indispensable.

Les véhicules à la norme Euro 6 doivent répondre au nouveau calcul WLTP. Voulu comme plus réaliste, il partage avec Vecto la prise en compte de la carrosserie dans le calcul de la consommation et des émissions de CO2. Des outils de simulation ont été développés par les constructeurs de véhicules d’homologation N1 (utilitaires légers). Pour les classes N2 et N3, ce sont des modèles types qui ont été définis pour l’outil Vecto. Éric Poncet, d’Iveco France, expliquait lors d’une conférence à Solutrans en novembre dernier : « Le monitoring par Vecto a commencé dès 2019 pour certains véhicules routiers. Les véhicules d’homologations N2 et N3 sont subdivisés en 17 classes qui prennent en compte le nombre d’essieux, la masse maximale de transport autorisée, la configuration du châssis. Sont concernés les classes N2 supérieurs à 7,5 t de PTAC et les véhicules N3. La déclaration des émissions de CO2 est effective pour chaque nouveau véhicule. Pour chaque typologie d’usage international, national, urbain, intra-urbain ou chantier, une valeur de CO2 est calculée. Sont exclus les véhicules sous multi-étapes [de transformation], les hors route, les véhicules à usage spécial. Seul le véhicule de base y est soumis à ce jour ». Cela prend vite des allures de casse-tête. Ainsi, Stéphane Bouquiaux, de la DVU de Renault, évoquait dans la même conférence les 350 variantes de Renault Master. « Nous avons été contraints de basculer certaines versions Euro 6 en Euro VI, mais dans la douleur, car par exemple, nous n’avons pas de boîte robotisée pour les versions Euro VI. » Fort pertinemment, Renault a créé des codes N°8 • 03/2022

« détrompeurs » dans les appellations des motorisations, ce qui facilite potentiellement la tâche des commerciaux. Conséquences pour les carrossiers Dans l’immédiat, les carrossiers doivent saisir les données de leurs carrosseries dans les outils de simulation des constructeurs : « le carrossier doit documenter la surface frontale, la masse du véhicule transformé, et éventuellement les caractéristiques des pneus si changement », a expliqué Stéphane Bouquiaux. Les calculettes des constructeurs servent, en situation d’avant-vente, à faire des simulations. En carrossage, elles permettent de faire les déclarations et les enregistrements associés au numéro de châssis afin d’obtenir le certificat d’immatriculation. In fine, ce sont les constructeurs qui sont responsables des déclarations faites par les carrossiers. Ce bilan sert aux normes CAFE (Corporate Average Fuel Economy) d’émissions de CO2 déclarés par les constructeurs auprès de l’Union européenne. Toujours pour passer, les normes CO2 des constructeurs (comme Mercedes-Benz) n’autorisent plus la désactivation stop&start. Cela peut avoir des conséquences pour les groupes froid à poulie-moteur, ou impose le passage à des groupes froid 100 % électriques. « Nous serons contraints d’optimiser la performance énergétique de nos véhicules avec un impact aérodynamique qui ne sera pas sans conséquences pour les carrossiers », a souligné Stéphane Bouquiaux. De son côté, Stéphane Marie, di-



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Les véhicules FCEV associant batteries et réservoirs à hydrogène en plus de la pile à combustible vont poser de grands défis. Gare aux reports de masses et aux longueurs carrossables !

recteur général adjoint du carrossier-constructeur Lecapitaine, confirmait le changement pour les carrossiers : « il faut appréhender les outils constructeurs et choisir les bonnes versions » éligibles aux transformations. Les erreurs ou approximations peuvent être lourdes de conséquences : si, après carrossage, un véhicule Euro 6 dit « light duty » dépasse les 2 840 kg, le véhicule ne peut plus avoir de certificat d’homologation. Certaines carrosseries, typiquement en température dirigée pour le transport de viande pendue, peuvent vite devenir

limite. Cela a pour effet pervers de faire passer sur des bases roulantes plus grosses. Ainsi, chez Lamberet, chaque commande se fait après une étude préalable pour éviter toute difficulté ultérieure. Autre répercution : les carrossiers ne peuvent plus carrosser un châssis sur stock. En outre, certaines versions, à configurations équivalentes, se trouvaient à des prix différents, étant donné que les constructeurs faisaient payer au client final le gramme de CO2 supplémentaire à déclarer à l’UE. Cela a impacté négativement les relations entre carrossiers et constructeurs. Car chaque constructeur a sa calculette : chez Stellantis, elle ne donne qu’une validation (ou pas) des données saisies par le carrossier, sans préciser la variable sur laquelle ce dernier peut agir (dimensions, surface frontale ou masse). Jean-Philippe Pastre pastre@trm24.fr

Les utilitaires légers à batteries sont une réponse des constructeurs motoristes aux contraintes posées par le WLTP et la limitation des émissions de CO2 imposées par les normes européennes CAFE. N°8 • 03/2022


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Interview

Gaëtan Monnier Directeur du centre de résultats transports à l’IFP Énergies nouvelles «  Dans le transport de marchandises, c’est l’usage qui prévaut » eMAG TRANSPORT : Constatez-vous dans le transport un tournant avec le développement des nouvelles énergies ? Gaëtan Monnier : Pour l’électrique, c’est un peu à marche forcée, puisqu’aujourd’hui, c’est plutôt tiré par la législation que poussé par la demande des clients. Maintenant, c’est une massification et non plus un questionnement sur les sorties des énergies fossiles. L’électrique en direct ou en indirect va s’imposer en termes de solution. Pas par la demande mais par la norme. eMT : Alors que le TCO est élevé pour l’électrique ? G. M.  : Le transport est piloté par l’économie, alors que dans l’automobile, le coût total de possession n’est pas toujours le sujet dominant. La sévérisation à marche forcée des normes européennes, avec les objectifs CO2, est toujours une notion de mix. Il y a des incitations fortes pour passer à l’électrique là où c’est possible, le plus rapidement en termes de ventes, pour pouvoir faire un calcul en émissions de CO2 en terme global. L’automobile a fait exactement la même chose avec des incitations, allant même jusqu’à compter deux fois un véhicule électrique sur les premières années de la réglementation. Nous sommes un peu dans le même état d’esprit en matière de normes européennes pour le poids lourd. eMT : Comment analysez-vous l’approche de Bruxelles du réservoir à la roue plutôt que du berceau au tombeau ? G. M.  : Nous avons plusieurs niveaux d’analyse pour le véhicule, si par exemple on le prend de l’extraction du minerai jusqu’au recyclage final. Mais il y a également depuis la source d’énergie primaire jusqu’à l’utilisation dans le véhicule. La Commission européenne va ouvrir cette approche plus globale liée au cycle de vie. La mise en œuvre exacte, je ne la connais pas, mais d’ici à 2025, N°8 • 03/2022

il y aura des outils où tout le monde se sera mis d’accord sur la façon d’établir les normes. Intégrer cette partie-là, c’est déjà en route. Si on fait les analyses, et on en fait régulièrement, le problème est que l’on peut faire dire tout et n’importe quoi, il suffit de faire varier les hypothèses. Macroscopiquement, sur le véhicule électrique, le problème va être la batterie qui consomme beaucoup d’énergie, et donc émet beaucoup de CO2 lors de sa construction. Tout va dépendre ensuite d’où elle est faite, à partir de quelle électricité, etc. Il y a quand même beaucoup, beaucoup de paramètres. Mais globalement, et c’est un point extrêmement important, c’est le taux d’utilisation qui prévaut. Si on fait un véhicule électrique, s’il est très utilisé, la part de roulage devient prépondérante par rapport à sa construction. Tout de suite, l’électrique devient très intéressant, même sur le plan global. Il faut vraiment avoir ça en tête : ce qui est important, c’est l’usage. eMT : Et qu’est-ce qui va primer entre le GNV et l’électrique ? G. M.  : Aujourd’hui, le gaz est une très bonne solution pour utiliser tous les systèmes déjà en place, c’est d’ailleurs une solution connue sur les moteurs thermiques, ce n’est pas une révolution. Concernant son impact CO2, une fois que le rendement du moteur est bien fait, c’est-à-dire optimisé pour fonctionner au méthane, nous obtenons des rendements qui s’approchent des moteurs diesels dépollués actuels (on se met toujours à iso-niveau de dépollution pour effectuer les comparaisons). Nous avons l’effet CO2 direct du moteur gaz : c’est en gros 23 % d’économies directes sur le CO2 à même quantité d’énergie consommée. Pour l’électrique, c’est profiter des réseaux. Évidemment, tout dépend de l’usage, parce que dans le transport de marchandises, c’est l’usage qui prévaut, contrairement à l’automobile où tout


Interview le monde veut acheter des voitures qui font 500 kilomètres ou 600 kilomètres d’autonomie alors qu’ils ne vont en profiter qu’une ou deux fois par an. En véhicule industriel, si nous avons un usage où l’électrique peut répondre, c’est l’électrique qui va s’imposer. eMT : On va être confronté à un souci entre le nombre de cycles de batteries, les contraintes d’exploitation et de recharge. Où est le point d’équilibre et comment le trouver ? G. M.  : Ce sont les bonnes questions. Les technologies évoluent très rapidement. D’ici un an ou deux, il y a des étapes par lesquelles on va devoir passer qui ne sont pas simples à mettre en œuvre. Vous parliez des temps de recharge, cela fait partie des travaux qui sont bien évidemment réalisés sur les batteries, avec des charges ultra-rapides. On parle de stations de recharge de 350 kW, mais il y en a qui parlent de 500 kW, voire du mégawatt. Après, ce sont des problèmes de réseaux, est-ce que l’on est en mesure de faire de la recharge rapide en mégawatt ? Ou alors, c’est de la recharge en continu. Là, on parle d’autoroutes électrifiées. eMT : Les biocarburants ne pourraient-ils pas être une solution actuelle ? G. M.  : Ici aussi le monde bouge très vite, les ressources en biomasse sont quelque part limitées. Il va falloir savoir à quoi on va les affecter. Aujourd’hui, il y a des concurrences d’usage. L’aérien va avoir du mal à se passer des carburants liquides dans la transition qui s’annonce. Il essaie donc de capter la ressource en carburant vert pour son usage. Au-delà des biocarburants, il y a aussi les e-carburants, mais cela passe par de l’hydrogène qui serait vert. Après, que fait-on de l’électricité verte, à quoi la destine-t-on ? Est-ce qu’on la transforme en hydrogène vert ? Qui lui-même serait retransformé en carburants liquides plus vertueux ? Là se pose la question de la cascade de rendements des filières énergétiques. Il va falloir trouver une solution qui ait du sens en termes d’énergie. eMT : En France, on s’enthousiasme autour de l’hydrogène. Mais aujourd’hui, avec la hausse du méthane, il coûte extrêmement cher comme carburant pour les piles à combustible. Quid de la concurrence sur les ressources biométhane ou électricité renouvelable dans la production d’hydrogène vert ? G. M.  : On a un vrai problème macro-économique. L’énergie est au centre de ce problème-là. Si on prend l’hydrogène comme solution de transition ou d’alternative à l’électrique, il n’a de sens que si c’est

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un hydrogène vert à partir d’électricité qui serait de ressources non carbonées. Concernant l’hydrogène gris, qui vient du méthane, il faudrait faire de la capture et de la séquestration du CO2 pour en faire de l’hydrogène bleu. Dans le transport, l’hydrogène n’a de sens que s’il est décarboné. Sinon, quel intérêt s’il cumule émissions de CO2 et toute la chaîne énergétique de transformation, il y a un moment où on peut facilement faire n’importe quoi. Déjà, pour de l’hydrogène venant de l’électricité, il y a le rendement de l’électrolyseur ; après, il faut le transporter, le distribuer, le stocker dans un réservoir ; et enfin l’utiliser dans une pile à combustible avec un rendement moyen inférieur à 50 %, pour refaire l’électricité qui sera finalement utilisée par le moteur électrique. Attention à la cascade de rendements que l’on a. eMT : Quelle est la meilleure option pour utiliser l’hydrogène ? Dans une pile à combustible ou dans un moteur à combustion interne ? G. M.  : C’est toutes les questions de base que l’on a sur le sujet. L’hydrogène est produit et stocké de la même façon. Après, ce n’est plus que l’usage qui fait la différence. La pile à combustible a un meilleur rendement à faible charge ou à charge partielle, autour de 20 % de sa puissance nominale. Et elle se dégrade plus on monte en charge. À pleine puissance, une pile a un plus mauvais rendement. Sur un moteur thermique, c’est plutôt le contraire. Le meilleur rendement est davantage sur les charges élevées. En revanche, en faible charge, le rendement n’est pas bon du fait des pertes mécaniques qui sont toujours les mêmes. Suivant l’usage, vous n’avez donc pas du tout le même résultat. eMT : Les objectifs CO2 imposés par l’UE en 2025 et 2030 sont-elles tenables ? G. M.  : Oui et non. Il va y avoir une offre avec des aides qui vont faire en sorte que finalement, on va avoir une possibilité d’utilisation de ces solutionslà. On va imposer une certaine partie des solutions avant même qu’elles soient rentables. Je pense que l’on va arriver dans un schéma de contraintes où l’on force les choses et où l’on force la transition. Forcément, le transport va coûter plus cher et va imposer des choix différents par rapport à un transport qui était peu cher. On a développé une certaine façon de faire les choses. Il y a derrière une remise en cause d’évolutions de société qui va être complexe. Y croire ou ne pas y croire, je pense que de toute façon, on va contraindre le système. Globalement, les solutions sont là. Propos recueillis par Hervé Rébillon et Jean-Philippe Pastre N°8 • 03/2022


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Actualité

Les Rencontres de la filière 2022 Tous les deux ans, en alternance avec le salon Solutrans, la Fédération française de carrosserie organise les Rencontres de la filière du véhicule industriel et urbain à Lyon. La prochaine édition aura lieu le 17 novembre. Dans un contexte encore fragilisé, elles réuniront les principaux acteurs du secteur du transport routier et de l’industrie de l’utilitaire et du poids lourd.

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es Rencontres de la filière 2022 présenteront un plateau exceptionnel de véhicules zéro émission, de l’utilitaire aux poids lourds. Les constructeurs de véhicules industriels y dévoileront leurs dernières gammes, quelques semaines seulement après le rendez-vous de l’IAA à Hanovre (fin septembre). Les thèmes abordés seront nombreux. Il sera question principalement de transition énergétique à travers plusieurs tables rondes et conférences. L’idée est de débattre autour de plusieurs problématiques, dont les objectifs CO2 fixés par Bruxelles pour 2025 et 2030. La filière arrivera-t-elle à les atteindre en ce laps de temps ? Les Rencontres tenteront d’y répondre grâce à l’intervention de plusieurs entreprises et groupes de la filière, du constructeur qui produit au transporteur qui utilise ces véhicules soumis désormais à des règles antipollution plus strictes. Économistes et analystes apporteront leurs éclairages durant ces débats.

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Les ZFE et les conséquences de leur mise en place sur les entreprises du secteur seront largement abordées lors de la plénière en fin d’après-midi. Plusieurs politiques de Régions (responsables de métropoles, maires) où est déployée une ZFE seront présents. La FNTR, qui s’associe à l’événement, témoignera avec l’intervention de plusieurs transporteurs de la région Rhône-Alpes. La FFC dévoilera enfin les grandes lignes de Solutrans 2023 lors d’un grand dîner. C’est à cette occasion que sera remis le prix de l’Homme de l’année. L’an dernier, les trois organisations professionnelles, FNTR, OTRE et Union TLF, représentées par leur président(e) avaient été récompensées. Les prix avaient été remis lors de Solutrans en novembre dernier. Les Rencontres de la filière 2022 seront l’occasion de retrouver l’ensemble des acteurs du secteur dans une période encore fragilisée par les différentes crises (Covid, Ukraine), avant le grand rendez-vous de Solutrans en novembre 2023. •••



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Actualité

nterview

Patrick Cholton Président de la FFC et de Solutrans

«  La FFC, qui est porte-parole de la filière à travers Solutrans, va mettre tout en œuvre pour que ce soit une parfaite réussite » eMAG TRANSPORT : Revenons un instant à l’édition 2021 de Solutrans. Le succès a été complet ? Patrick Cholton : Solutrans 2021 a été un millésime exceptionnel de par la période que nous vivons. Et nous avions fait le pari de préparer le salon comme dans des conditions quasi-normales. Nous avons aussi fait le pari d’augmenter sa surface, ou encore de proposer une version digitale, avec le Solutrans Digital Show, pour tous ceux qui ne pouvaient pas venir à Solutrans. Globalement, c’est un pari gagné. Tous les témoignages des exposants et des visiteurs le prouvent. eMT : Comment se présente la prochaine édition en novembre 2023 ? P. C. : Je pense que ce sera aussi une édition exceptionnelle, nous allons partir de l’édition 2021 où nous avions beaucoup de nouveautés. Nous avons regardé si ces nouveautés avaient ou non fonctionné. Après une enquête de satisfaction, nous nous sommes rendu compte que pour le Hall 1, qui accueillait pour la première fois Solutrans 4.0 dédié à l’innovation et aux nouveaux acteurs de la

Retrouvez l’intégralité de l’interview en vidéo sur :

filière, le taux de satisfaction était de 89 %. C’est rare qu’une première fonctionne tout de suite. Nous allons surfer sur cet évènement pour que 2023 monte en puissance. Nous montrerons dans ce Hall 1, entre autres, tout ce qui tourne autour des ZFE. eMT : les Rencontres de la filière, qui alternent avec chaque édition de Solutrans, se tiendront le 17 novembre prochain à Lyon. Comment s’organisent-elles ? P. C. : L’événement aura lieu sur une demi-journée avec la présentation d’une vingtaine de véhicules, des VUL et des tracteurs [roulant aux] nouvelles énergies. Chaque constructeur disposera d’un emplacement pour présenter un ou deux véhicules. C’est important. Et pendant ce laps de temps, de 13 heures à 18 heures, ils pourront inviter leurs clients de la région Rhône-Alpes, par exemple tous les transporteurs locaux. La FNTR va s’associer à l’événement pour faire en sorte de faire venir le maximum de transporteurs. eMT : Quels sont les thèmes que vous aborderez lors des conférences programmées ? P. C. : Ce seront principalement des thèmes d’actualité. La Commission européenne lance des défis à la profession [comme les objectifs CO2 pour les poids lourds, N.D.L.R.]. Reste à savoir si le secteur saura les relever. Nous en débattrons lors de la plénière. Un grand témoin interviendra sur ce thème, nous dévoilerons son nom dans quelques mois. Nous reviendrons aussi sur notre étude Vision’Air, réalisée avec le BIPE [Bureau d’informations et de prévisions économiques, N.D.L.R.]. C’est un peu aujourd’hui le poil à gratter de la filière. Nous sommes complètement indépendants et nous n’avons aucun intérêt à dire que ce sera telle ou telle énergie qui arrivera en priorité. On va s’apercevoir que ce n’est pas si facile que cela de fixer des objectifs et de faire de la prospective d’ici 2040 sur ce type d’énergies.

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eMT : Le point d’orgue de ces Rencontres est le dîner, vous reprenez la formule ? P. C. : Avant le dîner, les convives pourront se retrouver autour d’un apéritif. Ils pourront échanger et parler business. Ce que chacun apprécie aujourd’hui. Ensuite, le dîner se déroulera en deux parties. Durant la première, nous annoncerons l’Homme de la filière 2022, dans la seconde partie, nous présenterons le programme de Solutrans 2023. […] Ce sera donc une journée complète et attractive. La FFC, qui est porte-parole de la filière à travers Solutrans, va mettre tout en œuvre pour que ce soit une parfaite réussite. Propos recueillis par Hervé Rébillon

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Focus

TRANSITION ÉNERGÉTIQUE

Le guide juridique Que vous le vouliez ou non, qu’elle soit anticipée ou subie, la transition énergétique est une réalité juridique en France. Voici un petit corpus sur les textes qui impactent l’exploitation du transport routier de marchandises.

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a transition énergétique passe de plus en plus par la coercition. Nombre de textes nationaux y sont consacrés. Au niveau international, c’est une histoire qui remonte au protocole de Kyoto, signé par 37 pays en décembre 1997. Dès cette date, ces pays membres de l’organisation des Nations unies (ONU) avaient pris acte de l’importance de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le protocole s’est ensuite traduit par des objectifs internationaux, que ce soit sous l’égide de l’ONU (via les fameuses Conferences of Parties, alias COP) ou de l’Union européenne.

tue les plans de protection de l’atmosphère (PPA), obligatoires dans les agglomérations de plus de 250 000 habitants, ainsi que dans les zones où les valeurs limites de polluants réglementés sont régulièrement dépassées (ou risquent de l’être). Ces

La France des plans Au niveau national, la première pierre de l’édifice remonte à 1996. Il s’agit de la loi n° 96-1236 sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie (dite loi LAURE), publiée en décembre 1996. Elle insti-

Interdiction pour tous les véhicules Crit’Air 4 : au plus tard 2024

Dates butoirs en France pour les vignettes Crit’Air (loi du 24 août 2021) Interdiction pour tous les véhicules Crit’Air 5 : au plus tard 2023

Interdiction pour tous les véhicules Crit’Air 3 : au plus tard 2025


Focus

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PPA sont pilotés par les préfets et s’imposent aux collectivités territoriales via les plans de mobilités et le plan climat-air-énergie territorial (PCAET). Les contraintes de la loi LAURE n’ont pas d’impact direct sur le transport de marchandises, mais en exigeant des mesures de la part des collectivités locales (par exemple en matière d’urbanisme, d’urbanisme commercial ou de marchés publics), elles en ont un indirectement, et d’autant plus que parmi l’éventail des mesures envisageables, se trouvent les zones à circulation restreintes (ZFE-m, zones à faibles émissions mobilité, depuis la loi LOM de décembre 2019). Les contraintes peuvent également se traduire par des arrêtés municipaux réglementant le stationnement et les livraisons urbaines en véhicules utilitaires ou industriels. Incohérences des vignettes Crit’Air La pierre angulaire, et clairement plus coercitive, de ce corpus juridique est la loi n° 2015-992, dite loi pour la transition énergétique et la croissance verte (LTECV), du 18 août 2015. C’est elle qui va créer les fameuses vignettes Crit’Air. À ce texte, est venue s’ajouter la loi n° 2019-1428, dite loi d’orientation des mobilités (LOM) du 24 décembre 2019. Elle va instaurer l’obligation, d’ici à 2025, de créer des ZFE-m au nouveau seuil de 150 000 habitants*. Elle va aussi autoriser le recours au système de contrôle sanction automatisé (les fameux radars automatiques) pour vérifier les vignettes Crit’Air. Dernière étape, avec la publication le 24 août 2021 de la loi n° 2021-1104 dite climat et résilience, qui a donné les dates butoirs pour les applications des vignettes Crit’Air, dans l’espoir de mettre un terme à la cacophonie qui régnait jusqu’alors (chaque collectivité fixe ses propres règles, tant au niveau des seuils que des catégories de véhicules ou des périodes d’activation de la zone de circulation restreinte). Dans les faits, il n’existe toujours pas d’harmonisation d’une métropole à une autre, mais des échéances calendaires sont fixées à l’échelle du pays. La loi climat et résilience autorise l’établissement par les collectivités locales de voies réservées à certaines catégories de véhicules (par exemple des couloirs réservés aux véhicules dits à très faibles émissions). Pour la France, le cœur du sujet est la fameuse vignette Crit’Air, sésame indispensable pour l’accès aux centres-villes. Elle prend comme seul et unique critère la date de première mise en circulation, sans prendre en considération s’il s’agit d’un transport pour compte propre ou compte d’autrui. Le point le plus litigieux autour de ces vignettes Crit’Air est la ségrégation qui est faite entre les motorisations diesels et celles à allumage commandé, les premiers étant systématiquement déclassés à norme Euro équivalente. Cela aboutit à une situation caricaturale dans le cas de

la norme Euro 6, puisqu’un Euro 6 diesel ne peut prétendre au mieux qu’à la vignette Crit’Air 2, alors qu’un véhicule, également à la norme Euro 6 mais à allumage commandé ou à carburant gazeux type GNV peut bénéficier d’une vignette Crit’Air 1. •••

* Sont actives les ZFE-m suivantes : Grenoble-Alpes Métropole, la métropole Grand Lyon, Paris, la métropole du Grand Paris, la métropole d’Aix-Marseille-Provence, la métropole Nice Côte d’Azur, la métropole Toulon Provence Méditerranée, Toulouse Métropole, Montpellier Méditerranée Métropole, Eurométropole de Strasbourg, Métropole Rouen Normandie. D’autres sont en cours d’élaboration : Annecy, Valence, Cluses, Chamonix, Lille, La Rochelle, Faucigny, Clermont-Ferrand, Arras, Reims, Nancy, Saint-Étienne. Avec la loi du 24 août 2021, ce ne sont pas moins de 33 agglomérations qui devront, obligatoirement, mettre en place une ZFE-m, s’ajoutant aux métropoles précédentes : Dijon, Annemasse, Chambéry, Avignon, Nîmes, Perpignan, Pau, Bayonne, Bordeaux, Limoges, Orléans, Tous, Angers, Saint-Nazaire, Le Mans, Brest, Rennes, Caen-la-Mer, Le Havre, Amiens, Béthune, Dunkerque, Douai-Lens, Valenciennes, Metz, Mulhouse. N°8 • 03/2022


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Focus

Les points de distribution de gaz au sein des entreprises sont considérés comme des installations classées pour l’environnement (ICPE).

Réglementation sécuritaire dans les entreprises Pour les installations de charge des véhicules industriels électriques à batteries (homologations N2 et N3 pour les véhicules terrestres à moteur), il n’existe pas d’exigences spécifiques comme pour les véhicules des classes M2 et M3 dédiés au transport de passagers. Les dernières règles, très contraignantes, sont posées par un arrêté du 3 août 2018

Les stations de recharge électrique sont aussi réglementées, sous la responsabilité des départements Hygiène, sécurité et environnement (HSE).

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relatif aux prescriptions générales applicables aux ateliers de charge contenant au moins 10 véhicules de transport en commun de catégorie M2 ou M3, fonctionnant grâce à l’énergie électrique et soumis à déclaration sous la rubrique n °2925 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement. En l’absence de prescriptions, c’est le droit du travail qui s’applique. Les responsables d’entreprise ou des départements Hygiène, sécurité et environnement (HSE) pourront consulter l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS). Pour les installations de compression et de distribution de GNV, comme pour l’hydrogène, il s’agit d’installations classées pour l’environnement (ICPE). La réglementation pour les stations de GNV est l’ICPE 1413, celle pour la compression et la distribution d’hydrogène est l’ICPE 1416. Pour le GNV, la station, qu’elle soit privée ou publique, n’est soumise qu’à déclaration préalable entre 80 m3 de débit sous 200 bars (soit 80 Nm3/h) et 1 999 Nm3/h. À partir de 2 000 Nm3/h, ou 10 t de stockage, l’installation de compression et de distribution de GNV est soumise à autorisation préalable, ce qui est une procédure beaucoup plus lourde. Ces règlements prévoient les distances minimales entre les bâtiments et les points de ravitaillement, les équipements de sécurité, l’accessibilité et les sens de circulation, etc. Les ateliers de maintenance et les sites d’avitaillement doivent également répondre aux normes ATEX relatives aux atmosphères explosives. Cela implique la pose d’outils de détection de gaz explosifs, des dispositifs de ventilation et d’évacuation en toiture, un éclairage adapté et des équipements d’urgence.



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Constructeur

ÉVÉNEMENT

Un nouveau moteur chez Scania La naissance d’une nouvelle génération de moteurs est toujours un événement. Plus encore dans le contexte actuel où le moteur diesel incarne le diable et alors que la Commission européenne a annoncé l’interdiction du moteur thermique à l’horizon 2035. Pourtant, Scania y croit et s’offre le luxe de repousser certaines limites.

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ne nouvelle génération de moteurs naît tous les 15 à 25 ans en moyenne. C’est dire l’importance que cela revêt pour l’industriel qui présente ses derniers développements. En outre, oser présenter un moteur diesel dans l’environnement politique actuel frise l’insolence. C’est oublier que Scania est aussi un motoriste, et que ces nouveaux moteurs DC13 ne se limiteront pas aux seuls camions et tracteurs routiers. De plus, les représentants de la marque insistent sur le fait que les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre ne seront atteints que par le biais d’un bouquet énergétique.

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Les exploits du DC13 On apprend, incidemment, lors du lancement du DC13 que le légendaire moteur V8 sera reconduit et adapté aux réglementations au moins jusqu’en 2027. Ce nouveau bloc DC13 réussit surtout à franchir la barre mythique parmi les motoristes des 50 % de rendement thermodynamique (rapport entre l’énergie chimique fournie et l’énergie mécanique restituée en sortie). Performance d’autant plus méritoire que ce résultat est atteint sans l’aide de récupération d’énergie par turbine à l’échappement (RETE ou turbocompound) ni de cycle de Rankine (récupération de la chaleur résiduelle


Constructeur pour entraîner des périphériques et aider le moteur thermique). Ce bloc 6 cylindres en ligne, d’une cylindrée de 12,74 litres, dispose de deux arbres à cames en tête et d’une culasse unique. Sa suralimentation est faite par un unique turbocompresseur à soupape de décharge spécifiquement développé pour Scania. Le rapport volumétrique, de 23:1, la hausse des pressions de combustion (250 bars à l’inflammation dans les chambres) et la perméabilité des échanges (tubulures d’admission et d’échappement, dessin des chambres) visent à améliorer la combustion et les consommations de gazole. Cela a comme conséquence une hausse des émissions d’oxydes d’azote. D’où une nouvelle génération de catalyse SCR à double étage dite Twin SCR chez Scania : une étape en zone chaude, immédiatement après le turbocompresseur, puis une seconde phase d’injection en entrée de catalyseur SCR. Plus surprenant, les pressions d’injection dans le circuit haute pression n’évoluent pas et le nouveau bloc, malgré sa construction en fonte, revendique une tare réduite de 10 kg par rapport à l’ancienne génération. Toujours pour le rendement global, segmentation, lubrification et entraînement des accessoires (compresseur d’air, pompes à gazole, alternateurs) sont optimisés. Un frein moteur, dit CRB, peut être intégré à la culasse en option. Ce frein moteur primaire développe 343 kW ou 354 kW à 2 400 tr/ mn suivant les variantes de puissance. Il peut être couplé, toujours sur demande, au nouveau ralentis-

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seur secondaire hydrodynamique Scania R4700D. La prise de mouvement, en arrière moteur, peut délivrer jusqu’à 1 000 Nm. Un Super qui roule au gazole, mais pas que La nouvelle gamme Super animée par le moteur Scania DC13 est déclinée en 4 puissances : 420 ch pour 2 300 Nm de couple de 900 à 1 280 tr/mn ; 460 ch pour 2 500 Nm de couple de 900 à 1 290 tr/ mn ; 500 ch pour 2 650 Nm de 900 à 1 320 tr/mn et enfin 560 ch pour 2 800 Nm de couple entre 900 et 1 400 tr/mn. On note au passage la valeur de couple atteinte dès 900 tr/mn sur l’ensemble des puissances. Le gain en consommation spécifique est de 5.2 % sur le seul moteur. Toutes ces mécaniques Euro 6e sont compatibles avec le gazole et le HVO (et bioHVO). Les versions 460 ch et 500 ch offrent même une compatibilité avec le B100 (biogazole). Le circuit d’alimentation en carburant est également profondément revu. Accolé aux réservoirs (aluminium ou acier suivant les applications), un boîtier appelé Fuel Optimization Unit par Scania regroupe différentes fonctionnalités. Selon le constructeur, il permet d’une part d’utiliser 97 % de la capacité utile des réservoirs (au lieu de 87 % en moyenne) sans risque de désamorçage de l’alimentation. Une astuce qui tient dans le réservoir intermédiaire de 26 litres placé dans la boîte extérieure, qui reçoit aussi les pompes basse pression. Le préfiltre et le filtre décanteur à carburant •••

La nouvelle génération de moteurs Scania Super 6 cylindres en ligne parvient à franchir le seuil mythique des 50 % de rendement thermodynamique, sans l’aide de turbocompound ou de cycle de Rankine.

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Constructeur

Sur l’ensemble des gains avancés par Scania, il faut prendre en compte l’intégralité de la chaîne cinématique : le moteur, certes, mais aussi la boîte de vitesses, le pont, ainsi que des périphériques comme le circuit d’alimentation en gazole. L’enjeu est à la fois un gain de poids et une réduction des pertes par frottement ou barbotage.

restent à côté du réservoir. Ce nouveau dessin de l’alimentation en carburant sera étrenné par les moteurs DC13, mais arrivera à terme sur l’ensemble des autres moteurs diesel routiers Scania. Pour certaines carrosseries (véhicules de secours), la Fuel Optimized Unit sera installée sur les longerons du châssis. Toujours pour les carrossiers, ces réservoirs simples ou doubles, de différentes tailles et capacités (de 165 à 700 litres), pourront être placés de différentes façons sur les châssis. Ces moteurs seront reconnaissables sur les porteurs et tracteurs routiers Scania à l’appellation commerciale Super. Les châssis Scania les recevront ultérieurement, probablement en fin d’année 2022-début d’année 2023. Les moteurs actuels GNV 6 cylindres en ligne seront conservés jusqu’à nouvel ordre. Une chaîne cinématique optimisée au maximum Scania a également retravaillé boîte et pont pour gagner 8 % sur les consommations par rapport aux générations Euro 6d à moteur DC12 6 cylindres. Les nouvelles boîtes robotisées Scania Opticruise dénommées G25CM et G33CM (référence aux couples maximum amissibles en entrée) offrent entre 60

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et 75 kg de gain de poids. Cela tient à leur carter en aluminium, à la réduction des volumes d’huile (-3 litres) et à l’allègement par la suppression des synchronisateurs (il n’en reste plus que deux pour les relais). L’ouverture de boîte est augmentée et les boîtes de vitesses comprennent jusqu’à 14 marches avant et 8 démultiplications arrière. Scania recommande, pour les usages routiers, la prise directe améliorant le rendement mécanique. Le pont arrière R756 est proposé avec 9 rapports de démultiplication de 1.95 à 4.11 :1. La tare est également en baisse avec 27 kg de gain. Le filtre à huile est dans le nez de pont. Le cumul des gains en rendement mécanique atteint les -8 %, ce qui correspond, pour Scania, à plus de la moitié des objectifs à atteindre d’ici 2025 dans le cadre des objectifs de la Commission européenne. Si la baisse de consommation de gazole est une chose, le constructeur ne cache pas que le Twin SCR entraîne une hausse des besoins en AdBlue. Ceux-ci représenteraient entre 11 et 12 % des volumes de carburant. D’où l’accroissement de la taille des réservoirs d’AdBlue. Jean-Philippe Pastre

pastre@trm24.fr



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Constructeur

Gilles Simon, P.-D.G. des transports Simon ; Jean-Yves Kerbrat, directeur général de MAN Truck & Bus France ; Claire Duhamel, directrice de l’activité Oleo100 et Pascal Urano, président de Truck Location.

MAN commercialise le B100 Après Renault Trucks et Volvo Trucks, le B100 exclusif fait des émules. C’est désormais au tour de MAN de commercialiser en France cette option d’homologation.

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e mardi 8 février 2022 est à marquer d’une pierre blanche chez MAN Trucks & Bus France. C’est en effet à cette date que le constructeur a obtenu un certificat d’immatriculation avec la mention B1 à la case Énergie. Le groupe a officialisé l’événement lors d’une conférence de presse tenue à Reims, en présence de clients ayant d’ores et déjà passé commande de camions MAN B100 exclusif : Pascal Urano, du groupe Truck Location, très actif dans le monde du terrassement et des travaux publics, et Gilles Simon, des transports Simon, également adhérent au groupement Astre. Pour Truck Location, après 44 camions MAN compatibles B100, décision a été prise de franchir le pas pour le B100 exclusif, avec l’objectif de 121 camions MAN. Pour les transports Simon, ce sont 60 tracteurs routiers MAN B100 exclusif attendus d’ici le mois de mai. Si ce choix de carburant non fossile exclusif, ici de marque Oleo100 du groupe Saipol, impose des contraintes d’exploitation supplémentaires face aux camions compatibles B100 classiques, il offre en contrepartie quelques avantages. Pascal Urano confie que pour ses activités, cela a réduit les phénomènes de volatilité du gazole, et déclare avoir même ajouté sur les réservoirs de ses camions et engins de chantier des étiquettes précisant : « Attention, ce carburant peut endommager votre moteur ». Pour Gilles Simon, même s’il confirme « qu’à court terme, cela nous coûte de l’argent », c’est une évolution indispensable : « On

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nous demande une offre de transport en g/t-km de CO2 dans les appels d’offres de chargeurs. Le coût des émissions de carbone coûtera tellement cher dans pas longtemps, que pour ceux qui n’ont pas fait le choix du non fossile, cela deviendra un problème ». Saipol revendique une baisse des émissions de CO2 de 60 % par rapport au gazole fossile. Le bilan en analyse de cycle de vie de l’Oleo100 pourrait encore s’améliorer à terme, avec le programme en cours de déploiement chez Saipol intitulé OleoZE visant à favoriser une agriculture peu émettrice de CO2 (réduction de l’usage des intrants chimiques azotés, abandon des labours profonds). Contre les fraudeurs, la B100 MAN Greenbox MAN a choisi une autre option technologique que Renault Trucks et Volvo Trucks pour authentifier le contenu des réservoirs. Le constructeur utilise un boîtier à mesure par spectrométrie, appelé B100 MAN Greenbox, pour identifier la signature chimique du B100. On doit cet outil plus fin que la simple mesure de densité en vigueur jusqu’alors à un équipementier français, la société SP3H. Rappelons que dans le cas du B100 exclusif, il est indispensable de ne ravitailler qu’en B100, sans aucun mélange avec du gazole. Dans le cas contraire, le camion se met en mode dégradé, comme il le ferait en l’absence d’AdBlue. Pour consacrer définitivement cette énergie, il ne manque plus « que » l’obtention de la vignette Crit’Air 1.



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Prise en main

RENAULT T HIGH 480 EVO 2021

Le Renault T optimisé La gamme Renault Trucks T a eu droit en 2021 à quelques refontes cosmétiques. Pour le reste, il faut être un expert pour distinguer les deux générations. Mais sur la route, on se rend compte que les changements sont plus nombreux que cela. Pour cette prise en main, nous avons testé le Renault T High Sleeper Cab 480 Evo 2021, un modèle de milieu de gamme dans la série T High qui sera bientôt épaulé par les versions turbocompound révélées à Solutrans 2021 et qui seront livrées en cours d’année 2022.

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our assurer le lourd héritage du mythique Magnum, seul le T High dispose du plancher plat intégral. Comme il est dérivé d’une cabine classique, cet aménagement intérieur est obtenu, comme chez les concurrents, par l’ajout d’un faux plancher et d’une marche supplémentaire. Elles sont ici au nombre de 4, contre 3 pour un T Sleeper Cab. Le passage à la norme Euro 6e au 1er janvier 2022 a également entraîné nombre de révisions techniques sur le moteur, qui porte désormais le matricule DE13. Et il y a ce que Renault Trucks ne dit pas, mais qui se ressent à la conduite, notamment la maximisation de l’usage de la fonction roue libre. On relève aussi l’apparition de la fonction Pulse

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and Glide, pratiquée également par la concurrence, qui se résume à une prise d’élan dynamique. Notre T High 480 Evo culmine à 3,934 m de haut tout équipé, en hauteur de roulage. Pour anticiper les exigences de la Commission européenne et du programme VECTO relatif aux calculs théoriques des émissions de CO2 au roulage, on note parmi les changements le montage en série de pneumatiques à faible résistance au roulement (classement A en résistance au roulement). Dédié aux usages purement routiers, ce tracteur 4x2 est associé au pont à simple réduction P13170-E d’une capacité de 13 t. Le PTRA maximal est de 44 t. Comme les modèles inférieurs dotés du pack Optifuel, il était ici configuré avec l’inhibition du


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kick-down (rétrocontact) à l’accélérateur ou la coupure automatique du moteur après 5 minutes de fonctionnement au ralenti. Pour cette prise en main, l’ensemble était attelé à une semi-remorque Frappa carrossée en fourgon, dotée d’un ensemble de carénages aérodynamiques et d’une face avant réduisant l’espace vide entre tracteur et semi, afin de réduire les turbulences parasites. L’ensemble est spectaculaire, et ne devrait pas se voir tous les jours sur les routes. Aucune originalité n’est à signaler : ponts et essieux sont rigides. La suspension pneumatique à régulation électronique s’applique ici à tous les essieux. Nous avons circulé à 40 t de PTRA. Les conditions météorologiques furent bonnes avec un sol sec, mais fraîches, et surtout ventées ! Des changements dans la subtilité Présenté comme un simple remodelage, le nouveau Renault Trucks YT High 480 Evo change sur bien des points. Le choix et l’étendue des réglages pour le poste de conduite seront immédiatement perceptibles à toutes et tous. La planche de bord est subtilement améliorée, à un gadget près, le bouton stop-start dont seul un pianiste maîtrisera du premier coup les nuances. C’est la conduite qui révèle l’ampleur réelle du travail accompli. Certains points sont très positifs, comme la rapidité encore accrue du pilotage de l’embrayage ou la subtilité des systèmes d’optimisation de consommation. Ainsi, la mise en roue libre Optiroll est extrêmement audacieuse… et pertinente, tout comme la fonction d’élan dynamique Pulse and Glide qui sait se faire oublier. On retrouve aussi un univers familier avec des trouvailles comme la télécommande via un petit satellite sur la colonne de direction de l’ensemble audio (une exclusivité Renault depuis le milieu des années 1990). Cependant, on ne peut nier une relative déception quant au ressenti sur la route : où sont les 2 400 Nm de couple et les 480 ch promis ? Aurions-nous des

Le radar du programmateur de vitesse adaptatif doit rester dégagé de tout élément susceptible de l’opacifier ou l’obstruer.

Le modèle de la prise en main disposait de l’option usine jantes en alliage Alcoa Dura-Bright. Notez l’emmarchement, bien large et rectiligne, ce qui est appréciable au quotidien.

chevaux Popol* ? Ils sont pourtant bien là, mais anesthésiés par le mode Eco de la boîte de vitesses. Un vrai Lexomil numérique ce programme ! Au point de devenir parfois une limitation dangereuse au moment de déboucher sur les grands axes. Et le conducteur ne pourra rien y faire, à moins de passer en mode manuel puisqu’ici, le véhicule avait vu son rétrocontact à l’accélérateur inhibé en départ usine**. En se passant du mode Eco (une touche dédiée permet, heureusement, de le faire très facilement), on retrouve un peu de vivacité. La différence entre les deux modes est assez sensible, puisque hors mode Eco, le calculateur autorise des montées en régime jusqu’à 1 600/1 700 tr/mn sur les rapports inférieurs. À partir de l’enclenchement du 10e rapport, la différence devient imperceptible entre les deux programmes. Mais les directions marketing doivent faire attention à ce sujet : la chasse au gaspi ne doit pas porter préjudice à la sécurité d’usage sur la route ! •••

* L’expression « chevaux Popol » rappellera des souvenirs aux anciens collaborateurs de Berliet. La tradition s’est maintenue jusqu’au Renault Premium 420dCi, qui revendiquait (nettement) plus de chevaux sur le papier que dans la réalité. ** L’appellation Pulse and Glide est une étrange entorse aux Opti-quelque chose de Renault Trucks. Pourtant, Optispring exprimerait bien le concept. N°8 • 03/2022


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Les contrôles depuis la calandre relevable se limitent aux seuls liquides de refroidissement et lave-glace. Pour la jauge à huile moteur, il faudra basculer la cabine ou faire confiance à la jauge électrique au tableau de bord.

L’accessibilité à bord et la facilité de conduite constituent les points forts de ce Renault T Evo 2021. Côté freinage et ralentissement, le modèle de la prise en main était doté du ralentisseur secondaire Voith optionnel, et c’est une sage précaution sur notre parcours de test. Aucun souci à présent pour contrôler la vitesse lors des descentes autoroutières : le programmateur (désormais paramétrable au km/h près, autre évolution très appréciable) s’entend très bien avec le ralentisseur et le frein moteur Optibrake+. Une option pertinente dans la perspective de la revente en occasion. La facilité de circulation et les aménagements en cabine rappelleront de bons souvenirs aux nostalgiques du Magnum. Une motorisation aux normes Euro 6e Le passage à la norme Euro 6e a été l’occasion d’une revue de détails sur les moteurs D11 et D13. Leur identification évolue, et nous avions donc ici le DE13. Quelles sont ces évolutions ? Les pistons sont inédits, dits « à vague ». La turbulence créée dans le bol vise à concentrer le front de flamme et maximiser la combustion. Les injecteurs sont également spécifiques aux modèles Euro 6e. Selon Renault Trucks, l’attelage mobile (bielles, pistons, vilebrequin) a été revu pour réduire les pertes par frottement. Le recyclage des gaz de carter a vu sa gestion modifiée. Un nouveau turbocompresseur, destiné N°8 • 03/2022

à réduire le temps d’amorçage, fait également son apparition. La pompe à huile est à débit variable. Pour répondre aux exigences de la norme Euro 6e, le calculateur moteur est modifié, tant au niveau logiciel que de puissance de calcul. Le constructeur évoque également une optimisation du système de post-traitement, sans donner de détails. La génération de moteurs DE11 et DE13 ne doit pas être confondue avec les moteurs turbocompound, identifiés par les lettres TC. Cette évolution, introduite il y a 3 ans chez Volvo, a été annoncée par Renault Trucks lors du salon Solutrans 2021. Elle sera disponible en option sur le moteur DE13 dès cette année 2022. Les moteurs DE13 sont compatibles sans modifications avec les carburants de substitution HVO, bioHVO et B100. L’absurdité du classement en vignette Crit’Air 2 n’en est que plus flagrante avec ce moteur diesel Euro 6 pouvant fonctionner avec autre chose que des carburants fossiles ! Paradoxalement, malgré tous ces changements, les valeurs de couple et de puissance sont inchangées : on dispose sur le véhicule de notre prise en main de 480 ch entre 1 400 et 1 800 tr/mn pour 2 400 Nm de couple entre 950 et 1 400 tr/mn. Boîte de vitesses améliorée « Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage » semble avoir été le fil rouge des équipes Renault Trucks pour le T Evo 2021. La boîte Volvo I-Shift


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La chaîne cinématique évolue à l’occasion du passage à Euro 6e, le moteur et ses logiciels de pilotage monopolisant la majorité des changements. Ce modèle à moteur D13 était encore dépourvu du turbocompound, qui sera livrable dès l’automne 2022.

FICHE TECHNIQUE Renault T High 480 Evo 2 021 Moteur ★★★ Le passage à la norme Euro 6e a été l’occasion d’une revue de détails, subtile mais en profondeur, sur les moteurs D11 et D13. Un nouveau turbocompresseur, destiné à réduire le temps d’amorçage, fait son apparition. Malgré tous ces changements, les valeurs de couple et de puissance sont inchangées : on dispose sur le véhicule de notre prise en main de 480 ch entre 1 400 et 1 800 tr/mn pour 2 400 Nm de couple entre 950 et 1 400 tr/mn.

Transmission ★★★ La boîte Volvo I-Shift 12 rapports montée en standard sur la gamme T sous le nom d’Optidriver AT 2612F a encore été revue à l’occasion du passage à la norme Euro 6e. Dans les faits, il semble difficile de faire plus rapide avec un embrayage monodisque à sec conventionnel. La génération 2021 dispose d’une petite amélioration fort précieuse pour éviter les immobilisations idiotes : la boîte se remet automatiquement au point mort à la coupure du contact, afin d’éviter les galères lors de tentatives de redémarrage avec un véhicule en manque d’air.

Liaisons au sol ★★★ Le modèle essayé est doté d’une monte orientée économies d’énergie : Michelin X Line Energy 315/70 R 22,5 à l’arrière et Michelin X Line Energy 385/55 R 22,5 à l’avant. L’essieu avant a une capacité technique de 8 t, le pont arrière de 13 t. La suspension pneumatique est intégrale (option essieu avant à suspension pneumatique).

12 rapports montée en standard sur la gamme T sous le nom d’Optidriver AT 2612F aurait encore été revue à l’occasion du passage à la norme Euro 6e. Le constructeur évoque un nouveau calculateur, de nouveaux logiciels de pilotage et un nouvel actionneur d’embrayage. Le but était, selon Renault Trucks, de réduire encore le temps de passage des rapports, et surtout le temps d’ouverture de l’embrayage. Dans les faits, sur le parcours très varié de notre prise en main en Nord Dauphiné, il semble difficile de faire plus rapide avec un embrayage monodisque à sec conventionnel. Cette boîte est en prise directe sur le 12e rapport. La génération 2021 dispose d’une petite amélioration fort précieuse pour éviter les immobilisations idiotes : la boîte se remet automatiquement au point mort à la coupure du contact, pour éviter les galères lors de tentatives de redémarrage avec un véhicule en manque d’air. En conduite, il faudra toujours bien penser lors des phases d’arrêt à manipuler manuellement le sélecteur au Neutre, afin de désengager les rapports et soulager l’embrayage et son diaphragme. Ces organes vous en sauront gré (et, à plus long terme, votre portefeuille également) ! Fort heureusement, le réenclenchement de la vitesse lors du passage en D au sélecteur est ultrarapide. Il y a aussi ce que Renault Trucks ne dit pas : la boîte robotisée maximise le roulage en mode Optiroll dans ••• N°8 • 03/2022


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Le principal changement de la série Evo 2021 est au niveau de la colonne de direction. L’accessibilité y gagne encore en confort. Notez la sellerie optionnelle mixte, nettement plus tissu que cuir !

des proportions inédites jusqu’alors. Toujours pour économiser chaque goutte de gazole, la fonction kick-down s’est trouvée ici supprimée départ usine. On sent bien le point dur à la pédale, mais… rien ne se passe ! Si cela n’est pas gênant en plaine, sur les parcours de montagne, et plus encore pour déboucher sur les autoroutes et les voies rapides cela posera problème. Une position de conduite automobile S’il y a un chapitre où la génération Evo 2021 peut susciter présentations et commentaires, c’est bien ici, le point d’attraction étant la nouvelle colonne de direction réglable sur deux axes. Par conséquent, le déverrouillage se fait désormais au pied gauche. Le relevage du volant facilite grandement l’accès à bord, et cela magnifie deux atouts de cette famille de cabine : un emmarchement facilement repérable, bien rectiligne et peu entravé par le passage de roues, et surtout, une portière s’ouvrant à 90°. Certes, cela ne sera pas utile si un autre camion vous colle sur un parking (là, la montée en locomotive de l’AE Magnum était carrément géniale), mais cela s’avère bien pratique au quotidien pour monter ou descendre, ou manutentionner ses sacs et autres affaires de travail. Désormais, la position de conduite satisfera aussi bien les tenants de la conduite camion (assis haut, et bien droit) que les jeunes fans N°8 • 03/2022

de BMW et autres Audi (assis bas sous la ceinture de caisse, dossier exagérément incliné). Autre changement : la face avant. Si la gueule de bouledogue (clin d’œil à Mack ?) est conservée, les optiques sont revues pour passer à un éclairage tout LED. De nouveaux déflecteurs et profils font leur apparition pour optimiser l’aérodynamisme. Conséquence du passage aux LED, les lave-projecteurs deviennent optionnels (réglementairement, seules les optiques à ampoules xénon sont obligatoirement couplées à un dispositif lave-phares). Bizarrement, malgré les accostages plus serrés, les lèvres et les jupes aérodynamiques supplémentaires, nous avons subi de façon assez constante la présence de sifflements. Était-ce dû aux coques de rétroviseurs ? Il est vrai que le vent a soufflé particulièrement fort de jour-là. Si c’est l’explication, voilà qui justifierait le passage aux caméras de rétrovision ! Cela fait d’autant plus tache que l’insonorisation était par ailleurs excellente, bien aidée également par l’option vitres latérales feuilletées. Panoplie d’options pour la cabine Par comparaison avec un T normal, le T High profite du plancher plat intégral. La hauteur intérieure est constante et s’élève à 2,136 m. Le gabarit hors-tout extérieur s’élève à 3,934 m (hors-tout avec les carénages, en ordre de marche). La longueur hors-tout


Prise en main de cabine est la même qu’avec un T Sleeper Cab, soit 2,309 m. En fait, le T High se distingue surtout par sa quatrième marche, son plancher plat intégral et ses deux petits coffres latéraux supplémentaires situés de part et d’autre de la cabine. Comme lors de la précédente prise en main d’un Renault Trucks T, on retrouve des rideaux doublés d’un film aluminium, faciles à déployer et offrant une très bonne isolation à la lumière. Nouveauté 2021 : la possibilité de commander en option départ usine le verrouillage mécanique anti-intrusion Sleeper Lock. Le basculement cabine peut être électrohydraulique en option. Le modèle essayé avait une seule couchette, ce qui libère un espace appréciable au-dessus. La cabine était agrémentée de nombreuses options : seuils de porte métalliques, coins, habillage central de parechocs et emmarchements peints couleur caisse, climatisation autonome SPX1200 en dos cabine (remplaçant l’aérateur de pavillon). Pour la partie carrosserie, le tracteur disposait du boîtier BBM (Body Builder Module) optionnel pour le pilotage des fonctions de carrosserie. Le petit moniteur central en planche de bord sert à afficher les images de la caméra d’angle mort accessoire, montée dans l’angle avant droit. Hormis le spectaculaire habillage de la semi-remorque Frappa, rien à signaler. Il s’agit d’un fourgon 34 palettes avec essieu tridem sans relevage ni fonction directionnelle.

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Détail de l’articulation de la colonne de direction des Renault Trucks T et T High Evo 2021. L’étendue de réglages est infiniment plus grande qu’auparavant.

Jean-Philippe Pastre

pastre@trm24.fr

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La prise en main dans son intégralité à découvrir sur :

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Solutions connectées : où sont mes données ? Que l’on soit chef d’entreprise, responsable des ressources humaines, chef de parc ou conducteur, on s’inquiète, à juste titre, de ce que deviennent nos données et nos traces numériques. Un vrai sujet réglementé par le RGPD européen.

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e règlement général sur la protection des données (ou RGPD) est un règlement européen appliqué depuis le 25 mai 2018 qui vise à protéger les données personnelles. Son application est très large, puisqu’il concerne également les entreprises hors Europe commercialisant produits et services à des clients résidents de l’Union européenne. Cette interprétation est à l’origine de conflits avec de grands acteurs (américains) de l’Internet. « La donnée, quoi qu’il arrive (géolocalisation des véhicules du transporteur, données sociales et temps de conduite, caractéristiques de charge), appartient à celui qui la produit. En Europe, d’une manière générale, cela distingue les prestataires télématiques appliquant le RGPD d’un Google par exemple. La conséquence est que l’on restitue la donnée du client… au client ! », explique Ludovic Simonnot, directeur général adjoint de Strada. François Denis, directeur général de Geotab France, a cette formule : « Geotab est un processeur de la donnée, pas le possesseur ». Même son de cloche chez AddSecure.

Donnée technique, donnée personnelle ? Ce n’est pas la seule ambiguïté : « la donnée technique, comme une température moteur, est-elle une donnée personnelle ? Ce n’est pas clairement défini ni explicité dans le RGPD », poursuit Ludovic Simonnot. Ce point de vigilance est confirmé par François Denis. Le conseil que l’on peut donner est qu’il faut en faire un sujet visible et poser la question auprès du constructeur. C’est un enjeu de transparence posé par le RGPD. Mais que l’on ne s’y trompe pas : en cas de panne, pas besoin pour le constructeur de recourir aux données télématiques. En atelier, il suffira d’interroger les mémoires des calculateurs du véhicule. Ils révéleront les éventuelles négligences de l’utilisateur. Autre subtilité relevée par Daniel Hourc, responsable ventes et opérations pour Astrata : « on capte les informations véhicules via le réseau de bord et la prise FMS. C’est d’ailleurs sur ce critère de la prise FMS que les constructeurs revendiquent leurs données, puisqu’ils peuvent exploiter des informations circulant en amont de ce canal. À partir du moment où la donnée est accessible ••• N°8 • 03/2022


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Dossier sur le FMS, elle devient visible et entre dans le cadre baisse de vigilance (comme le dispositif Mobileye). du RGPD. L’évolution des données FMS sur les derL’idée est d’éditer, par anticipation, des alertes aux nières générations de camions des clients permet un exploitants sur des risques sociaux. Plus il traite de enrichissement des contenus, notamment sur les codonnées (temps de circulation, points de ravitailledes défaut affichés au tableau de bord ». ment, chargement, déchargement, modes de travail Face à certaines propositions des constructeurs – véhicules dépostés ou pas –, parc véhicules, etc.) qui remontent des données à leurs réseaux depuis plus l’algorithme devient fin dans ses réponses. leurs boîtiers télématiques montés départ usine, les spécialistes du secteur ont tous des offres qui La donnée, information commerciale ont l’avantage de la clarté juridique : l’équipement et stratégique du véhicule, ou le traitement des données, passe Un sujet pas si anodin que cela : le lieu de stocpar une démarche volontaire, explicite et intentionnelle du client. C’est particulièrement clair lorsqu’il kage de la donnée. Guillaume Perdu, président s’agit de suivre les véhicules remord’Ekolis donne un exemple : « L’héqués (c’est le cas, entre autres pour bergement des données clients se fait AddSecure ou Ekolis), Dans le cas chez un prestataire (…) qui a des data de Geotab, « les données de vitesse centers en Bretagne. Plusieurs motidoivent être utilisées à bon escient, vations à cela. Derrière les données, et jamais contre le client ». Car tous il y a de la consommation électrique, ces systèmes télématiques servent des flux physiques, une infrastructure à alimenter des algorithmes et le et des serveurs. On a des relations de fameux big data. Cela a des conséproximité avec ces serveurs pour des quences juridiques rappelées par la questions d’efficience. Cette proximité CNIL : si le traitement des données a facilite aussi la vérification des règles pour objet, ou pour effet, de croiser de sécurité et de redondances ». Pour des informations à grande échelle, Astrata, Daniel Hourc précise : « nos Guillaume Perdu, d’en automatiser le traitement et/ serveurs sont sécurisés et échangent président d’Ekolis. ou la prise de décision, d’assurer une suivant des protocoles de sécurité aux surveillance télématique des pernormes des systèmes bancaires. Ils sonnes, de créer des usages innovants, on entre sont tous basés en Europe, ce qui nous place, nous et alors dans le cadre renforcé de l’analyse d’impact nos clients, sous le régime du RGPD européen. Pour sur la protection des données. Illustration de cela ses données, le client peut soit les chercher sur nos avec les développements depuis février 2022 chez serveurs, soit les recevoir en mode « pull » sur ses sysStrada de croisements par algorithme prédictif des tèmes informatiques ». Ludovic Simonnot note : « il données sociales chronotachygraphes avec les rapy a des prescripteurs qui n’ont pas fait de choix ni ports d’éthylotests antidémarrage ou les alertes de exprimé de préférence. Leur préoccupation se résume à : est-ce que je peux continuer à exploiter quoi qu’il arrive, même avec des coupures de réseaux ? Il y a des prescripteurs qui veulent définir des limites géographiques ou de comportement de sécurité. Il y a des prescripteurs qui veulent stocker sur leurs serveurs privés. La première exigence est ici la sécurisation d’accès à ma donnée. On veut pouvoir répondre aux trois cas de figure ». Au-delà du risque de hacking, il y a aussi des enjeux de confidentialité. « On est en mesure de protéger de toute revente des données. » Guillaume Perdu prévient : « l’indépendance totale est un point clé dans la qualité et l’interprétation des données ». « Par définition, le monde numérique est instable, l’innovation Le portail MyGeotab offre une visibilité globale étant souvent le domaine de petites des opérations. Il permet de visualiser les données des flottes d’utilitaires et de poids lourds sur un même support. structures », rappelle Philippe Founes,

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Des milliers d’informations remontent du camion : sa consommation, sa vitesse, sa localisation. Autant de données à protéger.

Genève. Le protocole additionnel à la convention responsable du développement Viaservice. « Dans relative au contrat de transport international de la multitude de prestataires, y a-t-il certains fournismarchandises par route (le CMR) concernant la seurs potentiels présentant plus de critères de séculettre de voiture électronique, adopté en 2008, rité et de stabilité que d’autres ? Quel est l’actionnaest entré en application le 5 juin 2011. Il régit les riat de l’opérateur ou du prestataire informatique ? », s’interroge-t-il. C’est un point essenconditions pour qu’une lettre de voitiel vu le côté sensible des renseiture électronique soit considérée gnements figurant sur une lettre de comme équivalente à la lettre de voiture par exemple. voiture visée à la Convention, et de ce fait qu’elle ait la même force proLes échanges peuvent vite devenir bante et produise les mêmes effets stratégiques si l’on donne accès à que cette dernière. Il exige le resdes informations comme les coorpect de quelques règles pour garandonnées des clients chargeurs, les tir la fiabilité du procédé de signavolumes et produits transportés, etc. ture électronique. Elle doit être liée Michel Fournier, responsable produit uniquement au signataire, elle doit de AddSecure, détaille : « certains permettre d’identifier le signataire, agrégateurs de données (comme Shipelle doit être créée par des moyens peo par exemple) peuvent demander Daniel Hourc, responsable ventes et que le signataire peut garder sous des accès aux informations. Dans ce opérations chez Astrata son contrôle exclusif, elle doit être cas, il nous faut impérativement et exliée aux données auxquelles elle se pressément l’accord du client abonné rapporte de telle sorte que toute modification ultépour donner accès aux données à ces tiers, suivant les rieure des données soit détectable. indications de nos clients ». Daniel Hourc d’Astrata est clair : « cet accès à tiers est autorisé et peut être Un destinataire peut être considéré comme un tiers ouvert s’il y a accord exprès du client abonné ». passif. Il est tributaire de ce que le transporteur va lui donner comme solution de lettre de voiture. D’où Le cas de l’eCMR le conseil suivant : se mettre d’accord dès le début Communiquer aux tiers de la chaîne logistique de la démarche commerciale sur le type de support certaines informations peut induire des risques. qui sera utilisé lors de la réalisation du transport. Juridiquement et financièrement, c’est l’expéditeur La dématérialisation des lettres de voiture, comme qui prend le plus de risques. C’est aussi celui qui l’eCMR, doit être sécurisée. C’est le rôle de TransFola le plus intérêt à passer à l’eCMR. « L’écosystème low, créée en 2013 en partenariat avec les associations nationales néerlandaises TLN et Evofenedex, technique est parfois compliqué à mettre en place ensuite reprise par la société Viaservice basée à et il faut que les parties prenantes travaillent ••• N°8 • 03/2022


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Lors d’un passage en atelier, les données du véhicule sont relevées afin d’établir sa maintenance et les réparations éventuelles.

ensemble sur le passage à l’eCMR », souligne PhiLa réglementation sociale européenne est parfois lippe Founes. Guillaume Salembier, responsable plus simple que le RGPD : la coupure de conduite pour la France de TransFollow, ajoute : « la numériest par essence même un moment appartenant à sation n’est pas une dématérialisation. Numériser est la vie privée du conducteur. Pour Strada, un cheun acte d’archivage, non opposable aux tiers. Ce sera minement est proposé à l’entreprise pour demanla lettre de voiture papier qui sera valable. La démader le consentement de l’utilisateur, par exemple térialisation permet d’exercer sans l’usage du papier au démarrage de l’application Strada World. Pour et elle a la même force juridique ». Ces le respect des notions de vie privée/ échanges via TransFollow sont crypvie professionnelle, l’utilisateur a la tés (suivant les normes industrielles possibilité de les activer. Il y a des TLS avec double clé d’identification) enjeux sociaux et juridiques qui imet stockées sur des serveurs réponposent la facilité et la transparence dant aux standards ISO 27001 relatifs dans ces fonctionnalités. à la sécurité de l’information. Elles Cela ne se limite pas aux personnels sont transférées sur les serveurs ou de conduite, c’est encore plus imporadresses des destinataires. Les eCMR tant pour les télétravailleurs. La CNIL doivent être stockées 7 ans (durée de le signale : les sous-traitants et prestavie exigée pour ce document). La platetaires ont une obligation d’alerte et de forme est à disposition des tiers ayant conseil en matière de protection des un rôle dans l’eCMR (par exemple le données, comme le rappelle François François Denis, chargeur ou le destinataire). Denis de Geotab France : « on informe directeur général de les entreprises sur leurs obligations (…) Geotab France. Au sujet de la RGPD et de la RSE ou du Les enjeux du droit du travail social, la maturité juridique des entreprises est encore Le droit du travail exige le consentement et/ou l’inperfectible, alors qu’elles sont utilisatrices de longue formation du salarié pour tout suivi ou traitement date de tels systèmes où le transport de marchandises informatique de ses activités. Il faut, pour être en s’est très vite approprié de tels services ». Quant à conformité avec la CNIL, recueillir les consentel’obligation d’écrasement des données posé par le ments des utilisateurs. Ces consentements peuvent RGPD, il appartient à chaque client de voir avec son être recueillis par tout moyen explicite. Il faut le prestataire et faire l’inventaire des dates d’effacefaire à chaque étape : par exemple si l’on vient à ment correspondant aux informations, sachant que croiser des données sociales avec la géolocalisacertaines ont des prescriptions posées par la régletion ou un suivi par smartphone. Certains acteurs mentation, comme celles sur les temps de conduite proposent d’y ajouter un enregistrement vidéo. et de repos. L’enjeu est de faire reconnaître la validité de tels Jean-Philippe Pastre enregistrements vidéo, horodatés, géolocalisés, par pastre@trm24.fr les assureurs. N°8 • 03/2022


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Solutions connectées

SOLUTIONS CONNECTÉES Dashdoc lance son TMS connecté, en ligne et intuitif

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ashdoc lancera à la SITL 2022 sa nouvelle solution de gestion transport complète. Elle permet aux transporteurs de piloter l’ensemble de leurs transports avec une grande maîtrise au niveau des coûts, et de s’équiper pour répondre aux enjeux de traçabilité, de partage de l’information, de digitalisation et de RSE. Le logiciel permet de gérer en quelques clics la planification des transports en temps réel et la facturation. La dématérialisation

des documents eCMR et l’application conducteur font maintenant entièrement partie de l’offre. Le TMS de Dashdoc permet de se connecter aux outils dont les transporteurs ont besoin : logiciels de télématique parmi lesquels Trimble, Astrata, Eliot, Webfleet (TomTom), Transics, Truckonline, mais aussi logiciels de facturation comme QuickBooks, Sage et Pennylane, ainsi que la plateforme Trackdéchets pour les aspects réglementation.

Les lauréats du challenge Addsecure 2021

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es sociétés Ollier et Bruneel Transports sont les grands vainqueurs de l’édition 2021 du challenge éco-conduite de Addsecure, auquel ont participé près de 11 000 conducteurs. Le concours a remporté un grand succès avec 75 entreprises participantes, réparties sur 135 équipes et 7 400 véhicules. Les transports Ollier ont obtenu la meilleure amélioration de leur index éco-conduite et effectué la plus grande réduction d’émissions de CO2, tandis que les transports Bruneel ont obtenu le meilleur score éco-conduite en France.

Geotab rejoint Data for Road Safety via SRTI

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eotab rejoint l’écosystème d’informations liées à la sécurité routière, SRTI, du groupe Data for Road Safety. Avec plus de 40 milliards de données collectées par jour et analysées en temps réel, Geotab fournit au SRTI des informations précieuses, afin de renforcer son action pour la sécurité routière et permettre un avenir zéro décès. Data for Road Safety est un groupe européen créé pour améliorer la sécurité sur les routes et avertir les conducteurs des conditions de conduite dangereuses. Partagées sur une plateforme ouverte et transparente, les informations sont à la disposition des membres du groupe.

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Solutions connectées

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EN BREF La CAM 1000 pour une meilleure sécurité

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a caméra d’assistance angle mort CAM 1000 proposée par Dometic distingue de manière fiable les objets en mouvement, tels que les piétons, des objets statiques, comme les réverbères. En clair, le conducteur n’est averti qu’en cas de danger réel. La caméra est dotée de LED infrarouges intégrées pour garantir une qualité d’image optimale de jour comme de nuit. Autre atout : elle se branche directement et facilement sur l’alimentation, il n’y a pas besoin de détecteurs ou de boîtiers de commande supplémentaires.

B2PWeb se développe sur la péninsule ibérique en 2022

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2PWeb a nommé une équipe qui se consacrera entièrement aux marchés espagnol et portugais. Elle participera notamment à des évènements et des salons du secteur. « Beaucoup de nos clients sont implantés en Espagne et au Portugal, mais il nous manquait une équipe dédiée au développement des ventes pour y déployer notre bourse de fret, et surtout proposer ainsi une alternative aux offres existantes sur la péninsule ibérique », a déclaré Thomas Rohart, directeur des ventes. Jordi Miracle Garcia, ancien responsable grands comptes chez Wtransnet, est nommé responsable du développement Espagne et Portugal. B2PWeb sera présent au salon international de la logistique et de la manutention de Barcelone, du 31 mai au 2 juin.

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Focus

La C2A, plus qu’une carte carburant En plus de son offre de réservation hôtelière, C2A lance un service de réservation en ligne pour les traversées en ferry et via le tunnel sous la Manche. La carte C2A permet de réaliser des économies sur les frais engagés par les salariés tout en facilitant la gestion comptable et administrative des notes de frais.

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e service est accessible directement depuis la plateforme MyC2A. La réservation prend en compte le choix de la date et de l’horaire, ainsi que les caractéristiques du poids lourd : présence d’une remorque seule ou tractée et longueur du véhicule. À partir de ces informations, MyC2A apporte une

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questions à Gilles D’Huiteau Président de C2A

eMAG TRANSPORT : Comment fonctionne votre nouveau service de réservation de ferries ? Gilles D’Huiteau : Avec le site internet en ligne, nous proposons aux transporteurs de connaître les tarifs, de réserver et de payer, en un seul clic, des trajets auprès de quelque 100 compagnies de ferry et vers 1 200 destinations en Europe. L’idée est d’avoir une offre globale. Nous voulons faciliter la vie des transporteurs. eMT : Vous conservez la carte alors que d’autres sont passés au numérique. G. D’H. : La carte matérialisée en plastique reste, car tous les routiers ne sont pas équipés de mobile d’entreprises. Peut-être que dans 10 ans

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vue d’ensemble de l’offre disponible en fonction des besoins, indique les prix en temps réel pour chacun des trajets et permet de finaliser la réservation en quelques clics. De plus, pour les conducteurs en quête de flexibilité, certaines compagnies proposent un ticket valable 24 heures, évitant ainsi le stress que pourrait imposer un horaire fixe. La réservation des traversées et d’Eurotunnel en amont via la plateforme MyC2A garantit le meilleur prix (tarifs négociés avec remises jusqu’à 15 %) et simplifie la gestion des déplacements des conducteurs. Les montants dépensés en frais de déplacement sont anticipés, les sommes allouées à chaque conducteur sont rationalisées et la comptabilité est facilitée grâce à une facture mensuelle détaillée hors taxe regroupant l’ensemble des transactions Ferry et Eurotunnel réalisées dans le mois.

il existera un autre moyen de paiement, mais l’avenir de la carte est prometteur. Rappelons que nous proposons avant tout une carte de paiement multiservice au-delà de la carte carburant. eMT : Envisagez-vous de lancer d’autres services ? G. D’H. : Avant que les poids lourds n’embarquent sur un ferry, ils stationnent souvent sur un parking sécurisé. Nous proposerons prochainement une possibilité de réserver et de payer en ligne ces places de parking, en France et notamment près de Calais et Dunkerque. Et puis, nous nous adaptons aux nouvelles énergies. Nous allons nous tourner vers les stations électriques et gaz. D’ici deux ans, nos cartes permettront de payer directement de l’électricité sur des colonnes de recharge.



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