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Réforme judiciaire NETANYAHOU À QUI PERD GAGNE ?

Au mois de mars dernier, le Premier Ministre Netanyahou décide de suspendre le train de réforme de l’appareil judiciaire de l’Etat d’Israël initiée par son ministre de la Justice, Yariv Levin. Depuis représentants de la coalition et de l’opposition discutent à la résidence du Président de l’Etat en vue d’un compromis. Chacune des parties campent sur ses positions et aucun accord ne semblent aujourd’hui poindre à l’horizon. Pire, le choix de la Knesset de nommer la députée du Yech Atid Karine Elharrar au sein du comité de sélection des juges a mis aux négociations en cours.

Mercredi 14 juin. Il est aux alentours de 9h du matin lorsque Benyamin Netanyahou arrive à la Knesset. La journée s’annonce tendue pour le Premier Ministre. Le Parlement doit choisir ses représentants au sein du comité de sélection des Juges de la Cour Suprême. Mais le chef du gouvernement a un autre plan. Celui de faire repousser ce vote après l’élection des représentants du bureau des Magistrats en Israël mais aussi de se laisser du temps de convaincre son parti et la coalition de soutenir la présence d’un membre de l’opposition au sein du comité qui siégerait au côté d’un représentant de la coalition. Mais son ministre de la Justice Yariv Levin a lui un autre plan. Il projette de réformer le rapport de force au sein de cette commission de sélection et d’imposer la candidature de deux membres de la coalition.

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Benyamin Netanyahou et Yariv Levin se retrouvent dans le bureau du Premier Ministre à la Knesset en présence du chef du Shaas Aryé Dery, du ministre des Finances, Betsalel Smotrich et du président de la commission des Lois, Simha Rothman. Après plusieurs heures de discussions, le chef du gouvernement comprend qu’une majorité de sa coalition soutient la position défendue par son ministre de la Justice. Pour éviter de mettre en difficulté le Premier Ministre au sein de sa propre coalition, Simha Rothman propose de retirer l’ensemble des candidatures des députés de la coalition ce qui reporterait le vote au mois prochain. L’idée plait à Benyamin Netanyahou. Les responsables des partis de la majorité convainquent l’ensemble des candidats de la coalition de retirer leur participation à cette élection. Sauf une. Tali Gotlieb. L’avocate de profession et députée Likoud refuse de renoncer à sa candidature. Elle y voit une manœuvre du premier Ministre pour repousser aux calendres grecques la réforme de l’appareil judiciaire. Malgré les pressions de Benyamin Netanyahou, les menaces de sanctions et ses chances infimes de s’imposer dans cette élection, Tali Gotlieb décide de maintenir jusqu’au bout sa candidature.

18h12, c’est le tremblement de Terre à la Knesset. Les députés de la Knesset approuvent par 58 voix contre 56 la nomination de Karine Elharrar du parti Yech Atid au comité de sélection des juges de la Cour Suprême. Une victoire pour la parlementaire de l’opposition obtenue grâce aux voix de quatre députés de la coalition. Le score est perçu comme une défaite pour Benyamin Netanyahou incapable de convaincre la députée Likoud Tali Gotlieb de retirer sa candidature et impuissant face au refus de l’ensemble de sa majorité de respecter sa consigne de ne pas voter pour l’une des deux candidates.

LES MÉDIAS ISRAÉLIENS qualifient alors la coalition de « ridicule ». Plusieurs députés de la majorité parlent de « honte » et « d’une journée triste pour la majorité de droite ». Le responsable du parti Union Nationale Benny Gantz affirme lui que « le Likoud de Begin a vaincu le Likoud de Netanyahou ». Le chef de l’opposition Yaïr Lapid se déclare « satisfait de sa victoire » préparée en coulisse à travers la mise en place d’un groupe Whatsapp réunissant les soutiens à sa candidate Karine Elharrar et d’une discipline de vote imposée à chaque membre du groupe. Pourtant, malgré ce succès parlementaire de poids, le duo Lapid-Gantz décident dans la foulée du vote de suspendre les discussions de compromis avec les représentants de la coalition. Une décision motivée selon les responsables de l’opposition par la volonté farouche du ministre de la Justice Yariv Levin de réformer le rapport de force au sein du comité de sélection des Juges de la Haute Cour et la volonté du Premier Ministre Netanyahou de repousser d’un mois le vote. Le choix de l’opposition de suspendre les discussions à la résidence du Président de l’Etat d’Israël convainc le Premier Ministre Netanyahou de relancer le train de réformes de l’appareil judiciaire. « Je pense que le dernier vote à la Knesset du représentant au comité de sélection des juges a fait tomber les masques de Gantz et de Lapid » affirme Benyamin

Netanyahou en ouverture du conseil des ministres du Dimanche 18 juin. « Ils mènent de fausses négociations depuis trois mois. Nous avons laissé le temps. Un mois. Deux mois. Puis trois mois et nous ne parvenons pas à nous entendre sur les mesures les plus basiques. Leur intention était de gagner du temps. C’est pourquoi, nous nous réunirons dès cette semaine pour avancer sur les réformes et apporter les corrections nécessaires au système judiciaire conformément aux promesses énoncées lors de la dernière campagne électorale ».

Nous nous réunirons dès pour avancer sur les réformes et apporter les corrections nécessaires au système judiciaire

UN CHANGEMENT DE TON du Premier ministre motivé aussi par le dernier sondage publié le 15 juin 2023 par l’institut Direct Polls qui place le Likoud et le parti d’Union Nationale de Benny Gantz à égalité avec 28 sièges. Le parti de droite au pouvoir voit ainsi sa côte de popularité baisser de 3 mandats par rapport à la dernière enquête du 8 Juin 2023. 47% des personnes interrogées perçoivent Benny Gantz comme un meilleur Premier Ministre que Benyamin Netanyahou crédité seulement de 38% d’opinions favorables. 70% des électeurs du Likoud souhaitent voir légiférer dans les plus brefs délais la réforme de l’appareil judiciaire.

Malgré ces chiffres, il reste désormais à savoir quel est le degré de motivation du Premier Ministre à mener les réformes de l’appareil judiciaire dans un contexte sécuritaire chancelant avec des menaces terroristes sur les fronts Nord et Sud ainsi qu’en Judée Samarie et à Jérusalem. La conjoncture économique incertaine avec un dollar prêt à bondir face au shekel. Et un contexte social bouillant avec des opposants à la réforme toujours aussi déterminés à multiplier les rassemblements à travers le pays et à semer la discorde au sein de l’opinion publique israélienne.

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