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L’UNSA, déjà 30 ans !

À quoi sert l’Histoire ? Pour beaucoup, cela est avant tout synonyme d’heures passionnantes ou ennuyeuses passées sur les bancs de l’école. Pourtant, dans les séries et le cinéma, sur les nombreuses chaînes YouTube, dans la littérature contemporaine en passant par son omniprésence dans les débats politiques, l’Histoire semble partout. Sert-elle pour autant dans l’action syndicale ? Oui, elle aide à comprendre le présent et à envisager l’avenir. L’Histoire n’oblige pas à un perpétuel recommencement, elle ne dispense pas non plus d’une inventivité dans le répertoire d’actions collectives. Mais elle permet de garder la mémoire des combats passés et de se projeter vers l’horizon des possibles. Alors de la journée du 8 mars, à la naissance de l’UNSA, en passant par l’histoire sociale autour du Maitron et de la presse ancienne, voici un passage en revue de quelques exemples des usages de l’Histoire.

Il y a 30 ans naissait l’UNSA

C’est le 12 février 1993 qu’est née officiellement l’Union Nationale des Syndicats Autonomes.

Issue de la volonté de rassemblement de 5 organisations syndicales, cette nouvelle union interprofessionnelle apparaît dans un paysage syndical déjà complexe. Grâce à l’impulsion de la Fédération de l’Éducation Nationale (FEN), les syndicats FGAF (Fédération générale autonome des fonctionnaires), FMC (Fédération de la maîtrise des Cadres de la SNCF), FAT (Fédération autonome des transports) et FGSOA (Fédération générale des syndicats de salariés des organisations professionnelles de l'agriculture et de l'industrie agroalimentaire) se rassemblent autour d’un projet commun : créer un syndicalisme réformiste rassemblé, tout en étant fermement attaché à la laïcité, à la République, à la justice sociale, mais aussi à l’indépendance syndicale, aux libertés et à la lutte contre toutes les discriminations. Un autre point est essentiel : le choix de l’autonomie, c’est-àdire le souci de respecter l’identité et la liberté de chaque organisation membre.

Il faut également rappeler le contexte de l’époque : la chute du Mur de Berlin en 1989 a éloigné définitivement la possibilité de l’instauration du communisme, le modèle capitaliste semblant promis à une victoire par KO. Pourtant, les inégalités sociales se développent dans tous les pays, la gauche de gouvernement en France s’interroge sur ses perspectives et l’approche de l’an 2 000 engendre espoirs et inquiétudes. Il est donc logique que le monde syndical soit aussi en proie à des remises en cause : certains s’engagent dans une logique de contestation et de protestataire. D’autres veulent bâtir une organisation davantage en phase avec son époque.

Cette démarche doit beaucoup à la FEN, qui connaît depuis quelques années de forts remous qui aboutissent à une scission : d’un côté, les réformistes qui vont œuvrer pour créer l’UNSA, de l’autre, les syndicats toujours marqués par l’influence du communisme qui se regroupent dans la Fédération syndicale unitaire (FSU). Il s’agit donc pour la

FEN, en créant une nouvelle organisation interprofessionnelle forte de plus de 400 000 membres, de dépasser les anciennes querelles de tendances et lancer une nouvelle aventure syndicale. Cette union est-elle pour autant « une coquille vide » comme le dit à l’époque le quotidien Le Monde ? Il n’en est rien car l’UNSA se structure dès sa naissance, sous une forme originale : on trouve à sa tête un président (Jacques Mallet, cheminot ; le poste de président disparaît rapidement ensuite) et une secrétaire générale, Martine Le Gal, enseignante de la FEN. Cette dernière organisation est hégémonique dans la nouvelle UNSA mais d’autres forces syndicales, attirées par ce projet syndical réformiste, rallient la nouvelle union dans les années suivantes. L’ouverture vers le privé se concrétise, une structuration se met en place.

Les organisations syndicales membres changent aussi progressivement de nom : la FEN prend ainsi en 2 000 le nom d’« UNSA Éducation ». Comme a pu l’écrire Albert Camus, il y a deux types d’efficacité : d’un côté, l’efficacité du typhon, qui détruit tout sur son passage avant de laisser place à une éventuelle reconstruction. De l’autre, l’efficacité de la sève, qui permet de construire progressivement et durablement.

C’est cette dernière voie que l’UNSA a choisi : celle du syndicalisme réformiste rassemblé qui a aujourd’hui trente ans.

Benoit Kermoal @enklask1 benoit.kermoal @unsa-education.org

8 MARS : Journée internationale des droits des femmes

Le 8 mars est la journée internationale des droits des femmes et celle-ci est célébrée depuis plusieurs dizaines d’années. Cependant, beaucoup ignorent son origine exacte et continuent, au mieux, à ne pas comprendre l’utilité d’une journée qui met à l’honneur les femmes, au pire, à leur souhaiter cyniquement « leur fête » . Un constat amer qui rejoint celui du dernier rapport du Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes (HCE fh) qui s’inquiète de l’essor du sexisme, surtout chez les plus jeunes. Pourtant, le 8 mars s’inscrit dans une histoire longue de lutte des femmes pour faire reconnaitre leurs droits et sur laquelle l’UNSA Éducation revient.

Cest en 1910 à Copenhague que naît l’idée, lors de la deuxième Conférence internationale des femmes socialistes, d’une journée pour la mobilisation féminine au sein des organisations ouvrières : il s’agit de défendre le droit de vote des femmes et plus largement de manifester pour l’égalité des sexes.

Clara Zetkin, militante allemande, et Alexandra Kollontaï, militante russe, peinent à convaincre l’ensemble du mouvement international socialiste de se mobiliser pour ce type d’action. Mais à partir de 1911, à une date qui varie encore selon les années, les femmes socialistes partout dans le monde se mobilisent pour la défense de leurs droits. En 1914, pour la première fois en France, on assiste ainsi à des réunions féministes comme le relève le journal l’Humanité du 9 mars 1914. Plus tard, c’est l’URSS qui établira la journée du 8 mars comme journée des femmes en souvenir de manifestations qui eurent lieu ce jour en 1917. Celle-ci est ensuite instituée en 1977 par l’ONU et devient officielle en France en 1982 grâce à Yvette Roudy

La méconnaissance de l’origine du 8 mars est la parfaite illustration d’une histoire et d’une mémoire du féminisme encore trop absentes de notre éducation et de notre culture générale empreintes de stéréotypes genrés. Ainsi les progrès réalisés le sont trop souvent davantage dans la loi que dans les pratiques. La manifestation la plus concrète de ce décalage se retrouve dans la persistance de discriminations envers les femmes en progression chez les plus jeunes et dont le HCEfh s’inquiète dans son dernier rapport. En effet, le sexisme, banalisé et aggravé, est à la source d’un continuum de violences qu’on retrouve dans les réseaux sociaux et la multiplication de courants de pensée masculiniste en France, mais également avec des restrictions des droits des femmes à disposer de leur corps dans différents pays du monde. Toutes ces manifestations ne sont que quelques exemples d’un « backlash » , terme que l’on peut traduire par « retour de bâton » , c’est-à-dire d’un mouvement en réaction au militantisme des femmes en faveur de l'égalité. C’est pourquoi, pour lutter contre ces phénomènes, une journée nationale de lutte contre le sexisme vient d’être instaurée le 25 janvier.

Ainsi, loin d’être anodine, la journée du 8 mars est bien le fruit d’une histoire, celle qui nous façonne et qu’on ne doit pas ignorer, d’autant plus quand elle est dans notre ADN. C’est pourquoi l’UNSA Éducation a voté l’adoption d’une charte de 9 engagements annexée à son règlement intérieur pour lutter contre toutes les formes de violences faites aux femmes. Cette charte s'inscrit dans la volonté de l'UNSA Éducation de renouveler le syndicalisme et de favoriser et promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes.

Carine Aoun-Boudot @carineaoun1 carine.aoun-boudot

@unsa-education.org

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