Luci - Édition 4 - Français

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Luci

Inspiring Travel Stories from Luxembourg ÉDITION 4 — FRANÇAIS

Les visages d’un quartier Le marché aux poissons, un village dans la ville

Esch2022, capitale de la culture Un air de renouveau au pays des Terres Rouges

Au grand air Boucles de rêve, biosphère et escapades à vélo


Photo : © Boshua

Villa Vauban Musée d’Art de la Ville de Luxembourg

HIGHLIGHT 2022

01.07 > 09.10

John Constable’s English Landscapes

2022

Masterpieces from the Tate Collection

villavauban.lu MON - SUN 10 - 18:00 FRI 10 - 21:00 TUE closed


Editorial Moien et bienvenue au Luxembourg ! De quoi aimez-vous vous souvenir lorsque vous revenez de voyage ? De beaux paysages, de bons repas, de visages sympathiques, de rencontres passionnantes ? Lors de la rédaction de ce nouveau magazine Luci, nous avons rencontré de nombreuses personnes dont les histoires, nous l’espérons, vous passionneront autant que nous. Une petite boutique de souvenirs, un restaurant ou une galerie d’art : à l’écart des nombreux attraits du Luxembourg, il y a aussi des endroits qui passent inaperçus au premier abord mais qui sont animés par des gens qui ont beaucoup à raconter. Dans cette édition nous séjournons dans une ferme et profitons de la vie à la campagne, nous rencontrons un cinéaste luxembourgeois afin d’évoquer l’œuvre de sa vie, et nous nous immergeons dans la scène culturelle luxembourgeoise qui, en cette année Esch2022, nous réserve bien des surprises. C’est précisément grâce à de telles rencontres que l’on peut découvrir de nombreuses facettes et particularités attachantes du Luxembourg. Et une chose est sûre : de superbes souvenirs de voyage en font toujours partie ! Bonne lecture et à bientôt au Luxembourg !

Romain Weber Président Luxembourg for Tourism

Dr. Sebastian Reddeker CEO Luxembourg for Tourism

PS : Vous avez manqué les premiers numéros de Luci ? Commandez le magazine gratuitement sur www.luci.travel — pour encore plus de moments inspirants.

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Sommaire

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The Good Life FACES OF FËSCHMAART

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Un quartier sur mesure 20-23

The Good Life LE LUXEMBOURG, PAYS DU CINÉMA

Observateur acéré et doux rebelle 26-39

Daydream LIEUX SECRETS ET COURBES DOUCES

No Ordinary Love 40-45

The Good Life STEINFORT, LA GOURMANDE

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Le terroir dans l’assiette 46-63

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Transforming Experiences ESCH, CAPITALE EUROPÉENNE DE LA CULTURE 2022

Petite sœur sauvage 64-71

Daydream MINETT UNESCO BIOSPHÈRE

L’Homme et la Biosphère 112 4

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74-87

Transforming Experiences SE SOUVENIR EN VOYAGEANT

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Ce qui reste, c’est l’espoir 88-93

The Good Life L’ÉCOLE D’HÔTELLERIE ET DE TOURISME EHTL

L’école de l’hospitalité 94-97

The Good Life DU CHAMP AU VIGNOBLE

Le secret de la vigne d’or 98-107

Outdoors Passion LES BOUCLES DE RÊVE : DES CHEMINS DE QUALITÉ PREMIUM

Place au rêve

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108-111

The Good Life VACANCES Â LA FERME

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Naturellement bien 112-121

Outdoors Passion L’AVENTURE EN GRAVEL BIKE

Les fous du vélo 122 Ours

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The Good Life FACES OF FËSCHMAART

Un quartier sur mesure Le « Fëschmaart », comme on dit en luxembourgeois, c’est le marché aux poissons. Ici, le commerce a toujours joué un rôle important. Autrefois, on y vendait principalement du poisson et des épices, aujourd’hui, c’est le fait-main-sur-mesure qui domine. C’est un village au cœur de la ville, animé par des commerçants et des gastronomes passionnés. Texte LILLY HÜTTER Photos PANCAKE!

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L’artisanat et le fait-main par excellence, c’est ce que trouveront les amateurs de mode classique dans les magasins suivants : « Basics & Bespoke - The Chap » habillant l’homme comme au début du 20e siècle ; et « Chapette », juste à côté, proposant aux dames une garde-robe élégante, faisant fi des tendances éphémères.

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« Chapette », c’est tout un poème, fait de couleurs et de formes ainsi que d’étoffes de qualité. L’atelier n’est pas une simple arrière-boutique, mais un véritable show-room ouvert aux regards. C’est ici que le Lituanien Povilas Zaleskis, couturier mais également graphiste et photographe amateur, étale ses patrons.

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Avec « Kaale Kaffi » Mustafa Solek propose un décor de rêve pour les amateurs de vintage : livres anciens, romans ou essais, sont empilés à côté des tables, et même dessus. Les murs sont recouverts d’images colorées, peintures à l’huile ou dessins que l’on peut aussi acheter.

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Cela fait plus de 40 ans qu’elle est fidèle au poste : Sylvie Thoma, un vétéran du « Fëschmaart ». « Moien ! », dit-elle pour saluer les passants, tandis que devant son magasin de souvenirs, « Butteck Um Fëschmaart », elle remet bien droit un petit porte-clés qui se déplie comme un accordéon et qui montre les plus belles vues du Grand-Duché de Luxembourg. Le design du porte-clés n’a sûrement pas beaucoup changé depuis les années 80, et c’est justement cela qui fait le charme du magasin de Sylvie. Ici, accrochés à touche-touche, on trouve de véritables classiques qui nous rappellent les voyages que l’on faisait avec ses parents et ses grands-parents.

les casemates. Ancien carrefour de deux voies romaines, le marché aux poissons fait partie du centre historique de la vieille ville, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO. Il y a plus de mille ans se sont tenus ici les premiers marchés, sur le parvis du château fort. C’est dans ces ruelles étroites que se jouait la vie économique et sociale de la ville. Aujourd’hui, sur la place du Marché aux poissons se trouve le musée national d’Histoire et d’Art, le siège du Conseil d’État et l’église St Michel, vieille de plus de mille ans.

Un village dans la ville

Jusqu’en 2011, les sœurs franciscaines de l’église St Michel s’occupaient des personnes nécessitant des soins. Elles étaient étroitement liées aux habitants du quartier. Aujourd’hui, Saint Michel, le plus ancien édifice religieux de la ville, est un lieu de recueillement au milieu d’un quartier

« J’ai énormément de clients fidèles, à qui j’envoie régulièrement des souvenirs du Luxembourg », raconte Sylvie. Pour elle, c’est une question d’honneur que de vendre des souvenirs du Grand-Duché. Elle l’a compris très tôt, alors qu’elle n’avait qu’une vingtaine d’années, quand elle a ouvert ici son magasin en 1979. « Le marché aux poissons, ça a toujours été comme un village dans la ville, c’est ce qui en fait la particularité », explique-t-elle. Les gens se connaissent, parlent beaucoup ensemble. Et le Grand-Duc en personne passe même parfois la voir. « C’est un homme charmant, d’ailleurs toute cette famille est formidable ! », s’enthousiasme-t-elle.

L’horloge historique de St Michel

animé. Son architecture, où se mêlent le roman, le gothique et le baroque, témoigne de l’histoire mouvementée de la ville. À l’entrée, une vitrine posée sur un socle en bois attire l’œil du visiteur : elle contient une œuvre impressionnante, une horloge fabriquée en 1902, qui a sonné jusqu’au milieu du 20e siècle dans la tour de l’église. Cet ancien cœur technique de l’église St Michel ne bat certes plus, mais les visiteurs peuvent encore s’émerveiller devant lui.

Le « Fëschmaart », autrefois au croisement de deux voies romaines, est le centre historique de la vieille ville de Luxembourg. La gastronomie fait du marché aux poissons un lieu de plaisirs avec une offre locale et consistante, mais aussi un peu plus raffinée.

Le « Fëschmaart » est un lieu central où se rencontrent personnalités politiques et commerçants, voyageurs et locaux. Il est situé non loin des fortifications taillées dans la roche,

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Au Casino Display, de jeunes artistes présentent leurs œuvres, de la peinture à l’installation vidéo. Une cure de jouvence artistique pour le marché aux poissons, qui prouve une fois de plus que tradition et modernité font bon ménage ici.

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Le Casino Display est bien plus qu’un simple espace d’exposition, c’est une résidence. « Les artistes vivent aussi ici », explique la curatrice associée Nadina Faljic, qui fait visiter l’exposition aux visiteurs ce jour-là. Pendant leur séjour, les jeunes artistes peuvent expérimenter dans les locaux et progresser dans leur travail. 13


« Et c’est formidable car c’est la seule horloge de clocher de cette taille que l’on peut admirer d’aussi près au Luxembourg », raconte Georges Jungblut. Avec sa femme Nadine, ce maître horloger tient une bijouterie dans le quartier du « Fëschmaart ». Et c’est lui qui, en 2019, a passé plus de 400 heures à restaurer cette horloge, à la demande du Comité de la vieille ville.

Joie de vivre et artisanat On peut aussi plonger dans le passé en allant faire un tour chez le galeriste Hans Fellner. Les salles un peu biscornues où il présente et vend des œuvres d’art contemporain mènent aux entrailles de la ville. « En

somme, c’est ici le centre géographique le plus ancien du « Fëschmaart » historique », explique le galeriste et sociologue urbain. Lors de la rénovation des locaux en grès tendre, il a fallu trouver un équilibre entre l’ancien et le moderne. « De manière générale, dans notre petit quartier, nous sommes régulièrement confrontés à notre histoire et nous devons y prêter attention », explique Fellner. Juste à côté, Alex Reding et son épouse Véronique Nosbaum ont aussi leur galerie. Ce plasticien et figure incontournable du marché de l’art apprécie le quartier qui, s’il est historique, n’en reste pas moins vivant. « C’est un lieu où culturellement, il se passe plein de choses. De plus, le quartier est beau et animé, il y a de bons restaurants

Depuis 1982, Sylvie Thoma, de la boutique de souvenirs « Butteck Um Fëschmaart », fabrique des petits sifflets en céramique en forme d’oiseaux, les fameux « Péckvillercher », avec un nouveau motif chaque année. On peut y acheter les sifflets toute l’année, et bien sûr lors du traditionnel marché de poterie « Emaischen », qui a toujours lieu le lundi de Pâques dans la vieille ville.

et des bistrots qui restent ouverts jusqu’au bout de la nuit », raconte ce passionné d’art, également à la tête d’une galerie bruxelloise.

Élégance urbaine L’artisanat et le fait-main par excellence, c’est ce que trouveront les amateurs de mode classique dans le magasin « Chapette ». Dans l’atelier, qui n’est pas une arrière-boutique mais un véritable show-room ouvert aux regards, Povilas Zaleskis étale ses patrons. Né en Lettonie, ce couturier est également graphiste et photographe amateur. Et depuis dix ans, avec sa femme qui travaille pour les institutions européennes, il a choisi le Luxembourg comme pays d’adoption. « J’adore le calme qui règne ici. Au Luxembourg, mes cinq enfants peuvent grandir paisiblement et apprendre de nombreuses langues. C’est idéal », s’enthousiasme-t-il. Il est venu dans cette boutique car le concept lui a plu. Tout est simple, avec un bon esprit de voisinage. Un peu comme dans un village, justement. En face, au magasin de décoration d’intérieur « Création d’ambiances », la devise est « de beaux tissus sur-mesure ». Les deux chefs, Paola von Habsburg-Lothringen et Marisca de Changy s’assurent depuis quinze ans que leurs clients puissent trouver rideaux, lampes ou autres objets exactement assortis à leurs canapés et fauteuils. « Nos clients sont des fidèles qui viennent du Luxembourg comme de l’étranger. Nous faisons aussi beaucoup d’envois », explique Paola von Habsburg-Lothringen. À l’étage est installé un grand atelier où l’on coud, rembourre, remplace

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Dans son salon, Vito d’Attoma célèbre la diversité : chaque pièce a un style complètement différent, de l’art urbain débridé au romantisme floral. « Le quartier est tout simplement particulier », dit-il avec conviction.

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Le propriétaire de l’Hôtel Parc Beaux-Arts, Marcel Goeres, est un « vieux briscard » de l’hôtellerie au Luxembourg, plein de passion et d’humanité, toujours prêt à développer de nouveaux concepts pour partager avec chacun son amour du pays et de la ville. 16

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Au restaurant « D’Gëlle Klack » (la cloche d’or) de l’Hôtel Parc Beaux-Arts, on sert aux clients du petit déjeuner un jambon très finement tranché. La coupe est faite en salle, et cela donne envie d’en reprendre !

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les tissus des fauteuils. « Tout a lieu ici, au centre de la ville », dit Paola, avec une pointe de fierté. « C’est un peu la rue du sur-mesure, ici ! », ajoute-t-elle en souriant.

Comme chez soi Le coiffeur Vito d’Attoma aime aussi cette ambiance particulière, à laquelle il contribue. Cet Italien né au Luxembourg, dont la famille est originaire de Pérouse, a passé toute sa vie professionnelle dans le quartier du « Fëschmaart ». « Le quartier est vraiment particulier, il représente le Luxembourg traditionnel, et les commerçants sont comme les membres d’une famille ! », affirme-t-il avec conviction, en faisant voltiger son peigne. C’est ce que confirme Mustafa Solak, installé de l’autre côté de la rue, au café vintage « Kaale Kaffi ».

Né en Turquie, ce restaurateur d’art qui a étudié à Florence nous sert un succulent gâteau à l’orange. Avec ce café, le marchand d’art a réalisé un rêve. « Mon concept : Vintage and more ! Ici, les gens développent de nouvelles idées, ils travaillent et lisent toute la journée, c’est un peu comme un salon », dit Mustafa. Un coup d’œil dans la pièce le confirme. Et tout le monde a le sourire aux lèvres à la lueur des lampes démodées. Se laisser choyer, se sentir bien, c’est aussi la devise de l’Hôtel Parc Beaux-Arts, un petit établissement cosy, avec tout juste une douzaine de suites. Ici aussi, l’art est partout, et principalement conçu par des artistes luxembourgeois. Trois maisons de ville, vieilles de 300 ans, ont été réunies en une seule pour donner naissance à cet hôtel. « Tout a été entièrement vidé. Un travail

Saint Michel, le plus ancien édifice religieux de la ville, est un point de repos dans un quartier animé. Il allie architectures romane, gothique et baroque et témoigne ainsi de l’histoire mouvementée de la ville.

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énorme! », explique le propriétaire, Marcel Goeres. Ce « vieux briscard » de la scène hôtelière luxembourgeoise, passionné et plein d’humanité, est toujours soucieux de développer de nouveaux concepts afin de partager son amour pour sa ville et son pays. Avec son établissement, ouvert en 2005, il propose un véritable havre de paix au cœur de la vieille ville, dans l’ambiance stimulante et inspirante d’un boutique hôtel dont le personnel est chaleureux et décontracté. La « Wäinzoossiss », Marcel Goeres la déguste ici dans une assiette traditionnelle « Vieux Luxembourg ». La vaisselle bleue et blanche de Villeroy & Boch était fabriquée autrefois au Rollingergrund, à quelques encablures de la capitale. La tradition est un atout, pense Marcel Goeres, en précisant : « nous tenons absolument à la couleur locale ».

Un renouveau artistique Un vent frais et du sang neuf : voilà ce que l’on trouve au Casino Display, installé dans l’ancienne galerie Beim Engel, qui remonte au Moyen Âge. Ici, de jeunes artistes présentent leurs œuvres, de la peinture à l’installation vidéo. Comment réagissent les « anciens Luxembourgeois » face à la nouvelle galerie ? « La plupart sont un peu déroutés, car ils se souviennent du lieu avant la rénovation, complètement différent, avec ses anciens carrelages », explique Nadina Faljic, la curatrice associée. Mais c’est la joie qui l’emporte devant tout ce qui est offert : une cure de jouvence artistique au « Fëschmaart ». Ce qui prouve une fois de plus qu’ici, la tradition et la modernité vont de pair.


Pour les deux galeristes Alex Reding et Hans Fellner, le quartier offre « une combinaison unique de plaisir de vivre, de culture et d’artisanat de qualité ».

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The Good Life LE LUXEMBOURG, PAYS DU CINÉMA

Observateur acéré et doux rebelle Andy Bausch fait partie des réalisateurs les plus connus du Luxembourg. Un vétéran qui a du cœur et de l’esprit, enraciné dans son pays. Un homme qui a les pieds sur terre. Texte BIRGIT PFAUS-RAVIDA

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Photos MIKE ZENARI

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Veste en cuir patinée, casquette de baseball usée jusqu’à la trame, barbe argentée et regard qui pétille derrière ses lunettes. Voilà à quoi ressemble Andy Bausch, l’une des grandes figures du paysage culturel luxembourgeois depuis les années 80. Sa mission, tout simplement : faire de bons films au bon moment. Des films dont le Luxembourg a besoin. Andy Bausch est une figure culte. On connaît notamment ses œuvres pour le cinéma : « Troublemaker » et « Le Club des Chômeurs », avec Thierry van Werveke, « A Wopbopaloobop A Lopbamboom », avec Desirée Nosbusch, ou « Rusty Boys » avec André Jung, Marco Lorenzini, Fernand Fox, Pol Greisch et d’autres « seniors révoltés ». Mais on doit aussi à Andy Bausch un nombre incalculable de productions télévisées, de courts métrages ainsi que de documentaires. En somme, il n’arrête pas ! Aujourd’hui, c’est dans l’un de ses cafés préférés, l’Interview, qu’il sirote son Picon bière. Andy, un habitant du quartier de la gare, est venu ici en tram. « La voiture ? Le permis ? Je n’en ai pas besoin. J’ai toujours vécu dans des villes », explique-t-il en souriant. En cela, Andy Bausch est un pionnier, depuis toujours il se déplace de manière durable. Dans la salle, un homme le salue d’une tape vigoureuse sur l’épaule : « Comment ça va, Andy ? Tu n’es plus dans le Sud ? ». Car c’est dans le Sud, à Dudelange, qu’Andy Bausch a grandi. Mais depuis 40 ans, il réside dans la capitale. Pourtant, cela se remarque, il est une part vivante de la mémoire culturelle collective du pays, et les gens en sont fiers : « La bière d’Andy, c’est pour moi », annonce l’homme en se tournant vers le comptoir.

« Durant la pandémie, je suis un peu devenu un ermite, j’ai beaucoup rangé, fait des inventaires et retrouvé de vieux disques, livres, photos... Je suis un écrivain refoulé. Et en fait, mes idées sont toujours nées dans le secret de ma chambre », raconte Andy Bausch. Le monde du cinéma luxembourgeois, c’est son chez-lui. Et de fait : c’est lui-même qui l’a tenu sur les fonts baptismaux. « À l’époque, il ne se passait pas grandchose, culturellement, au Luxembourg. On était bien obligé de se retrousser les manches pour faire bouger les choses », se souvient-il.

Un autodidacte passionné de cinéma Cet autodidacte passionné de cinéma, autrefois grand fan des États-Unis et aujourd’hui encore de musique, a commencé à prendre des photos lorsque des groupes se produisaient. Ses premiers films étaient aussi des films musicaux : il filmait des concerts live, « mais avec des disques en fond sonore car la prise de son était trop mauvaise », raconte Andy, amusé. « Je gagnais parfois mon

argent ailleurs, pour pouvoir me permettre, justement, de continuer à faire des films », poursuit Andy. Ensuite sont arrivés les caméras Super 8 et son premier long métrage : « When the Music´s Over », en 1981. C’est un film qui raconte comment un groupe, à force de fumer des joints, n’arrive plus à sortir de la salle de répétition. Au fil des ans, Andy Bausch s’est souvent tourné vers des personnages à la fois forts et paumés, des personnages qui le fascinent et que, dans ses films, il met sur le devant de la scène. Deux braqueurs de banque un peu loosers dans « Troublemaker » (1988), des sidérurgistes au chômage dans « Le Club des chômeurs » (2003) : c’est exactement le genre de person-

Qu’il opte pour un Picon bière ou un café, Andy Bausch se sent bien dans son QG, Interview, au cœur de la capitale.

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nages qui entrent dans le cœur des spectateurs et qui deviennent des figures culte. Dans ces deux films, c’est à Thierry van Werveke, personnage haut en couleur que revient le rôle principal. « Lui, ce qu’il voulait devenir, c’était câblo-opérateur », raconte Andy Bausch, « Mais moi, je voulais qu’il joue dans mes films ! ». Cela s’est avéré payant. Le film, qui se déroule principalement en prison, et qui a été tourné à l’abbaye de Neumünster alors désaffectée, a touché une corde sensible. Le film suivant, en 1989, « A Wopbopaloobop A Lopbamboom », titre

Matière à réflexion : voilà où l’on se cogne la tête en se levant. « Cela fait 40 ans que ça m’arrive », déclare Andy en riant.

inspiré du hit de Little Richard « Tutti Frutti », avec Désirée Nosbusch, a également rencontré le succès et remporté plusieurs prix. « C’est peut-être mon meilleur film », dit Andy Bausch. Mais les seniors rebelles et désargentés de « Rusty Boys » (2017) lui tiennent aussi à cœur.

L’histoire du cinéma continue Au fil du temps, Andy Bausch a donc créé une large palette de films. Il a longtemps travaillé à et avec la Kulturfabrik de Esch-sur-Alzette. « À l’époque, tout ce qui avait trait à la culture se concentrait là », dit-il – mais après une production réussie avec Mario Adorf, il a fait pendant dix ans des téléfilms en Allemagne avec Richy Müller, Claude-Oliver Rudolph, Otto Sander et d’autres grands acteurs. Aujourd’hui, de retour au Luxembourg, Andy Bausch produit des longs métrages, des documentaires, des téléfilms et des films publicitaires. Son prochain grand projet : le film « Little Duke », qu’il tournera au printemps 2022. Une fois de plus, ce sont des personnages pas si lisses. Cette comédie dramatique raconte l’histoire de deux amis vieillissants et sans argent, se battant pour survivre dans un Luxembourg riche et cher. Avec les acteurs André Jung, Luc Feit, Marco Lorenzini, Valérie Bodson. L’histoire du cinéma de et avec Andy Bausch n’est pas terminée. Il caresse toutefois déjà l’idée d’une biographie dans laquelle il parlerait aussi de sa famille. Car Andy Bausch affirme à propos de lui-même : « Certes, je suis un homme de cinéma, et un peu un ermite. Mais je suis avant tout le père de quatre enfants. Et c’est au moins aussi important. »

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Les nombreuses facettes du Luxembourg Quelques conseils de Paul Lesch, directeur du Centre national de l’audiovisuel (CNA). www.cna.lu  Le Luxemburg pendant la Seconde Guerre mondiale, l’aspect humain : « Schacko Klak » de Paul Kieffer et Frank Hoffmann (1990)  Comment vivait-on au Luxembourg après la guerre ? « Eng nei Zäit » (Demain, après la guerre) de Christophe Wagner (2015)  Comment fonctionnait le Luxembourg dans les années 60 ? « Perl oder Pica » (Petits secrets) de Pol Cruchten (2006)  Bourgeoisie, drogues et nightlife à la fin des années 1980 : « Hochzäitsnuecht » (Nuit de noces) de Pol Cruchten (1992)  Une jeunesse au Luxembourg (adaptation du roman Amok de Tullio Forgiarini) : « Baby(a)lone » de Donato Rotunno (2015)  Les Luxembourgeois adorent le détective à la casquette à carreaux, qui puise ses superpouvoirs dans la traditionnelle cancoillotte. C’est ce que montre l’adaptation qu’a faite Félix Koch de la BD « Superjhemp retörns » (2018).  Le Luxembourg rural, un thriller ponctué d’éléments fantastiques : « Gutland » de Govinda Van Maele (2017)


© PATRICIA PERIBÁÑEZ

© FRAME ART/RATTLESNAKE

Le roi de l’opéra rock dramatique : Andy Bausch en 2016, pendant le tournage du courtmétrage « Freddie », sur le chanteur de Queen, Freddie Mercury.

Les personnages cabossés séduisent Andy Bausch. Le réalisateur pendant le tournage de « Rusty Boys » (2017) : de « vieux garçons » qui prennent un appartement ensemble.

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Avenue Émile Reuter

Blvd. Prince Henri

VILLA VAUBAN MUSÉE D’ART DE LA VILLE DE LUXEMBOURG

DISCOVER THE DIVERSITY OF LUXEMBOURG’S MUSEUMS WITHIN A SHORT DISTANCE W W W. M U S E U M S M I LE . LU

Rue Notre-Dame

CASINO LUXEMBOURG FORUM D’ART CONTEMPORAIN


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MUDAM LUXEMBOURG MUSÉE D’ART MODERNE GRAND-DUC JEAN

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Daydream LIEUX SECRETS ET COURBES DOUCES

No Ordinary Love C’est un rêve qui fait pousser des ailes à tous les passionnés de voitures : la Mercedes 300 SL. L’une d’elles a parcouru 12 000 kilomètres à travers l’Europe, en un seul voyage, en compagnie de ses propriétaires luxembourgeois. Et maintenant, elle sillonne le Grand-Duché. Texte BIRGIT PFAUS-RAVIDA Photos PANCAKE!

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Mersch

Schoenfels Blaschette

Bourglinster

Steinsel Niederanven Walferdange Senningerberg Munsbach

Luxembourg-Ville

Contern

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La Mercedes 300 SL fait halte dans une nature qui invite à la contemplation. Ses propriétaires, Tina et Jean-Marc, considèrent leur voiture comme une fidèle compagne de voyage grâce à laquelle ils ont fait des milliers de kilomètres. Un film protecteur argenté mat protège la peinture noire et brillante d’origine.Le couple compte bientôt parcourir plus de 20 000 kilomètres à travers l’Amérique du Nord.

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Dans la rue, quand passe le coupé aux portes papillon à l’éclat mat et au son intense, les gens lèvent le pouce et sortent leurs portables. Ils font signe, rient, pour certains prennent l’air rêveur. Personne ne reste indifférent à une Mercedes 300 SL. Les portières papillon se déploient. Tina et Jean-Marc, ses fiers propriétaires, descendent de voiture. Cette légende sur roues, tout argentée, fabriquée en 1955, est un rêve qui pour le couple est devenu réalité en 2019. Mais cette voiture est plus qu’une « simple » 300 SL. Elle correspond exactement aux besoins de Tina et Jean-Marc, qui font surtout de longs trajets. Un film protecteur argenté mat protège la peinture noire et brillante d’origine. Le porte-bagages et la caisse en aluminium, à l’arrière, résolvent le problème de la place. « Car il faut toujours avoir suffisamment de pièces de rechange avec soi pour maintenir en vie la machine et sa technologie d’origine », explique Jean-Marc. Les sièges sport, regarnis, avec ceintures de sécurité, qui remplacent les sièges en cuir rouge d’origine, ont été trouvés à la casse. Ils offrent une meilleure protection. Une console centrale crée un espace de rangement, et on y trouve encore bien d‘autres gadgets techniques, apparents ou cachés.

Jusqu’au Cap Nord « Le look sport plaît bien aux fans de voitures anciennes, et il permet aussi de nouer conversation avec les gens », dit Tina en riant. À l’Hôtel Légère de Schuttrange, d’où le couple commencera aujourd’hui son parcours à travers le centre de Luxembourg-Ville, la native de Stuttgart prend une gorgée de cappuccino. « Nous voulions une voiture qui nous ressemble, pas quelque chose à contempler derrière une vitrine. Et

nous avions aussi besoin d’une voiture fiable, car nous faisons surtout de longs trajets », explique-t-elle. Autrement dit : 12 000 kilomètres à travers l’Europe jusqu’au Cap Nord. Le couple a passé six semaines sur la route avec la voiture de ses rêves. Au Luxembourg, Jean-Marc, mécanicien de formation, restaure entre autres des motos de course, qu’il pilote d’ailleurs lui-même lors de compétitions. Tina est une passionnée de voitures. Ensemble, ils passent beaucoup de temps dans la leur. Et justement, le temps, ils le prennent. Comme leur espace, d’ailleurs. Ils comptent bientôt parcourir plus de 20 000 kilomètres à travers l’Amérique du Nord. Mais le Luxembourg aussi est beau, et aujourd’hui, la 300 SL part à

sa conquête. C’est un matin d’automne un peu frais. Aux arbres, les feuilles ont jauni et rougi. Depuis Schuttrange, la roseraie du château de Munsbach n’est pas bien loin. En 2017, elle a été créée par l’association «Lëtzebuerger Rousefrënn», les Amis des roses, en collaboration avec la commune de Schuttrange, sur un terrain ouvert au public et situé au pied du château. Ce jour-là, les dernières roses de l’année sont en fleur. Tina et Jean-Marc vont se promener devant le romantique bâtiment blanc. Qu’y a-t-il de plus beau : les roses ou la voiture ? Au prochain arrêt, le contraste est complet. On roule sur quelques centaines de mètres le long des pistes de l’aéroport de Senningerberg, puis on descend sur le parking d’un stand de

La roseraie du château de Munsbach est le décor idéal pour une promenade romantique et pour une petite pause lors d’une escapade en voiture.

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L’ancien zoo de Senningen est un véritable lieu abandonné en plein milieu du Luxembourg. Aujourd’hui, les animaux ont disparu car le zoo est fermé depuis les années 80. Mais les vieux pigeonniers sont encore là. Et des toilettes esseulées, un portail en fer forgé qui ne conduit plus nulle part... Murs et marches sont recouverts de mousse et de lierre.

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Les deux pilotes sont fascinés par le charme de l’éphémère et du passé. Les feuilles mortes se sont accumulées là où autrefois les oiseaux chantaient dans leurs petites maisons. Mais c’est beau. Justement pour cela. 31


tir. En atterrissant, un avion semble frôler la cime des arbres, l’instant d’après, on entend un bruit strident : les exercices de tir. Mieux vaut faire attention. Au bout de quelques pas, une barrière apparaît, et à côté, une bâtisse blanche assez basse et délabrée. Bienvenue à la billetterie de l’ancien zoo de Senningen ! « Je suis déjà venu ici quand j’étais enfant », se souvient Jean-Marc, « probablement au milieu des années 60 ». Aujourd’hui, les animaux ont disparu. Le zoo a fermé ses portes depuis les années 80. Un vrai lieu abandonné, en plein cœur du Luxembourg. « C’est fascinant ! », s’écrie Tina, enthousiaste. De vieux pigeonniers sont encore là, des toilettes esseulées, un portail en fer forgé qui ne conduit plus nulle part. Des murs et des marches sont recouverts de mousse et de lierre. Un rugissement ? Non, c’est le bruit d’un avion.

Les voies cachées de Charly

sant, Jean-Marc le globe-trotteur. « Il y a partout de jolis coins. Il suffit d’aller les découvrir ! », dit Tina en souriant et en le prenant par le bras. C’est l’heure d’une petite collation au restaurant « Owstellgleis ».

L’âge de pierre n’est pas loin Maintenant l’intrigue se corse : le village néolithique de Blaschette se cache dans la forêt. Jean-Marc préfère garer la 300 SL le long de la route, car le chemin vers la « maison néolithique » est un peu trop cahoteux. Après avoir dépassé la barrière, surgit la longue maison de bois sombre au toit de chaume. Devant, un cercle constitué de menhirs. « Ce sont les Stonehenge du Luxembourg ! », dit Tina. Si la voiture se trouvait là, au milieu du cercle de pierres, des extra-terrestres viendraient certainement la téléporter sur leur planète pour exposer ce chef-

Le passé et le présent seront aussi le thème du prochain arrêt. En suivant des courbes douces sous les ramures automnales des arbres, la Mercedes se rapproche de la Charly’s Gare, à Niederanven. L’ancienne gare du légendaire chemin de fer à voie étroite nommé « Charly » a été joliment réaménagée. Plus un seul train ne circule ici, entre Luxembourg-Ville et Echternach. Les voies ont disparu, leur tracé a été goudronné. Aujourd’hui, on peut y faire du vélo ou se promener, et depuis la petite terrasse, on admire le splendide panorama qui se déploie en direction de la ville. « Je suis né et ai grandi dans la capitale, tout près d’ici. Mais je ne connaissais pas ce coin. Et ça me plaît vraiment, ici ! », affirme, reconnais-

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d’œuvre venu de la Terre. Et si l’on avait plus de temps, on pourrait méditer ici. Ou même faire un barbecue entre les pierres levées. Mais Tina et Jean-Marc veulent reprendre la route, parce qu’à Steinsel, sur les hauteurs du village, des fruits juteux les attendent. La SL grimpe avec élégance la route étroite et pentue. Dans les vergers de Steinsel, les arbres aux feuilles jaunies sont lourds de pommes juteuses. La Mercedes se gare devant la clôture des plantations fruitières. Ici, on peut venir cueillir soi-même les pommes à l’automne, puis les payer au stand en bois prévu à cet effet. Les brouettes rustiques, utilisées pour la récolte, font un amusant contraste avec la deux-portes papillon argentée. Mais ce verger a lui aussi une longue tradition : « Cela fait 40 ans qu’il existe », explique Diederik Collas, un employé de la plantation. Beaucoup de Luxembourgeois et même des voyageurs viennent se

Le village néolithique de Blaschette ou, comme dit Tina, « les Stonehenge du Luxembourg ! », est dissimulé au milieu de la forêt. Devant la longue maison de bois sombre au toit de chaume se dresse un cercle de menhirs.


La Mercedes s’arrête devant la Charly’s Gare. L’ancienne gare du légendaire chemin de fer à voie étroite nommé « Charly » a été joliment rénovée. Plus un seul train ne circule entre Luxembourg-Ville et Echternach, les voies ont disparu, leur tracé a été goudronné. Aujourd’hui, on peut y faire du vélo, se promener ou goûter à des spécialités luxembourgeoises au restaurant « Owstellgleis ».

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Sur la place Saint Michel, à Mersch, se dresse la statue d’un dragon surmonté de sept pointes — pour chacun des châteaux de la vallée. Avant de reprendre la route, on pourra trouver des informations touristiques au bureau qui se trouve juste à côté de l’imposante tour.

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Le dragon est d’une part le symbole de la Vallée des sept châteaux, d’autre part une sorte de gardien de la tour, qu’il surveille du regard. Les onze blasons du canton sont inscrits sur le dragon. Cette sculpture de bronze a été conçue par l’artiste Paul Eyschen. 35


Un regard par la vitre, et c’est le château de Schoenfels, qui ne se compose plus que d’un massif donjon de grès, érigé au 13e siècle. C’est l’un des sept châteaux de la vallée éponyme, qui est traversée par de très jolies routes.

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À seulement 15 km de la capitale, la Vallée des sept châteaux est située dans un magnifique paysage où il est possible de visiter un grand nombre de bâtiments remarquables, dont certains ont été entièrement rénovés. Les sept châteaux se trouvent sur les communes de Koerich, Septfontaines, Ansembourg, Hollenfels, Schoenfels (photo) et Mersch. 37


D‘autres arrêts sur le chemin :  Qui voudrait encore se régaler d’autres sites archéologiques pourra voir, à Mersch, une villa romaine restaurée, mais aussi un menhir. www.mersch.lu  À la distillerie Muller-Lemmer, on peut découvrir comment sont produites les eaux de vie régionales, à partir de fruits locaux. Et bien sûr, on peut aussi les goûter. Juste une ou deux petites gorgées stimulantes. Les fruits et légumes de saison viennent directement de la ferme Muller-Lemmer, entreprise familiale depuis six générations. www.mullerlemmer.lu  Envie d’un autre arrêt tentateur ? À Mersch, le Chocolate House de Nathalie Bonn regorge de gâteaux, tartes, chocolat − froid ou chaud −, mais aussi de spécialités plus consistantes, pour continuer sa route. www.chocolate-house-bonn.lu

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promener ici à l’automne pour cueillir eux-mêmes les meilleurs fruits. À côté des pommes, les poires et les prunes. « C’est parfait ! Car en chemin, pendant la journée, nous ne mangeons généralement que des bricoles quand nous sommes en voyage. Nous ne prenons un repas chaud qu’à la fin de la journée », raconte Tina en croquant dans une Golden Delicious.

Sept châteaux, sept pointes Le temps vire au pluvieux. L’imposante tour de grès du château de Schoenfels, qui ne se compose que de ce donjon, paraît un peu triste sous le ciel gris. Et pourtant, sa forme

Les arbres des « Vergers de Steinsel » regorgent de pommes juteuses. Beaucoup de Luxembourgeois mais aussi de touristes viennent s’y promener à l’automne pour cueillir quelques délicieux fruits. En plus des pommes, on trouve aussi des poires et des prunes.

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cuboïde est fascinante. On peut se promener tout autour et prendre un peu l’air frais dans la verdure. Le château de Schoenfels, construit au 13e siècle, est l’un des sept châteaux de la vallée éponyme, à travers laquelle on trouve bien d’autres jolies routes à parcourir en voiture. Mersch aussi fait partie de la Vallée des sept châteaux. Le château de Mersch abrite aujourd‘hui l‘administration communale. Il est agréable de s’y promener tout autour : les roses sont en fleur, et sur la place Saint Michel, on peut admirer une tour imposante avec un clocher à bulbe. À l’intérieur, on trouve des informations touristiques. Dehors, un dragon surmonté de sept pointes orne la place. Sept pointes pour chacun des châteaux de la « Vallée des sept châteaux ». L’avant-dernier arrêt de la 300 SL et son équipe sera pour les « Chocolats du cœur », à Walferdange. Ici, on vend des chocolats, mais aussi d’autres spécialités, le tout fabriqué par des personnes handicapées dans des ateliers protégés. De ces « Ateliers du Tricentenaire » sortent entre autres des pralines. « J’adore les pralines ! », s’enthousiasme Jean-Marc, qui, avec Tina, en emporte une petite sélection. Une fois ces gourmandises dans leur besace, ils rejoignent l’Hostellerie Stafelter, au coin de la rue. C’est là qu’ils termineront tranquillement leur journée. Sur la carte accrochée au-dessus des fauteuils du lounge de l’hôtel, on distingue clairement Beaune. C’est la ville en Bourgogne où ils ont terminé leur tour d’Europe, cet été. Quelle belle coïncidence ! D’autant que leur tour du Luxembourg s’achève ce soir. Depuis le restaurant, Tina et JeanMarc ont vue sur leur 300 SL, leur rêve à portes papillon. Et dans le restaurant résonne la douce voix de Sade : « This is no ordinary love! ». Pas un amour ordinaire.


À l’Hostellerie Stafelter de Walferdange, dans la vallée de l’Alzette, le couple profite tranquillement des dernières heures de la journée. En plus d’un restaurant gastronomique, l’hôtel offre huit chambres contemporaines dans une atmosphère familiale et chaleureuse.

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The Good Life STEINFORT, LA GOURMANDE

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Dans le paysage gastronomique de la commune de Steinfort, les notions de terroir et de respect des saisons sont cruciales. Deux chefs, à peine trentenaires qui ont envie d’en découdre avec les codes établis. Ils font bouger les lignes… et ça marche ! Texte FRANCK DALL Photos HADRIEN FRIOB

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Mathieu Van Wetteren se tourne « vers plus de naturel, plus de simplicité, pour aller à l’essentiel ».

En 2017, Mathieu a ouvert « Apdikt » qui, comme son nom l’indique, s’est installé dans l’ancienne boutique d’un apothicaire.

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Représentant une même génération, Thomas Murer et Mathieu Van Wetteren ont ouvert leur restaurant à une année d’intervalle. L’« Apdikt » de Mathieu d’abord, en 2017, dans une ancienne pharmacie. Il y joue parfaitement avec les codes d’apothicaires : anciens flacons, armoires à tiroirs, carrelage vert, auxquels il ajoute des luminaires chinés, des tables réalisées avec d’anciennes portes de wagons et une vaisselle réalisée à la main. Fin 2018 suivait « An der Villa » de Thomas Murer, investissant, comme son nom l’indique la Villa Collart. Les deux se connaissent et s’apprécient. Ils n’hésitent pas à s’envoyer des clients quand leur établissement affiche complet, et à partager leurs bonnes adresses pour trouver les bons produits. C’est d’ailleurs là qu’on les retrouve : ils disent « au jardin ». En ce matin d’octobre, la brume tarde à se lever au-dessus des champs. Le « Krautgaart » a été fondé en 2016 par Claude Petit, Max Epstein et Jean-Marc Parries, formés dans les domaines de la botanique, de l‘agronomie, de l’écologie du paysage et de l’environnement. Les derniers légumes d’été ont été récoltés, place à l’automne et à ses saveurs terreuses : rutabagas, topinambours, choux-raves, navets et courges. Pour les deux chefs, c’est un passage obligé pour rester proche des produits et de la saisonnalité : « Nous devons écouter la nature et c’est ce que pratiquent ces maraîchers avec une vraie philosophie dans leur démarche »,

entame Thomas Murer, chargeant des cageots de légumes qu’il proposera cette semaine à sa carte.

Le respect du légume Celui qui a commencé son apprentissage à 14 ans dans son Alsace natale est passé par quelques grandes tables qui l’ont formé : « Jean-Luc Brendel de La Table du Gourmet, une étoile Michelin, m’a transmis l’amour des plantes et m’a fait découvrir le vinaigre et leurs déclinaisons. Chez Haeberlin de l’Auberge de l’Ill, trois étoiles Michelin à l’époque, j’ai pu travailler le beau produit, de manière classique et très respectueuse. Chez Patrick Jeffroy, alors deux étoiles Michelin, à la retraite depuis 2019, j’ai découvert en Bretagne le respect des légumes », raconte-t-il. Thomas développe sa passion pour la cuisine gastronomique, mais,

volant de ses propres ailes, préfère s’éloigner de la pression des étoiles pour proposer une carte plus simple, lorgnant ce qu’on appelle la bistronomie : « Travailler comme dans un bistro, mais avec une qualité gastronomique, rester accessibles pour un grand nombre de gens sans faire de concessions sur la qualité. » Pour cela, il faut faire preuve d’inventivité et d’audace : « Oser les parties moins nobles de l’animal en les rendant intéressantes par la cuisson, la marinade, les accompagnements. Mais aussi travailler les produits entiers en jetant le moins possible. Il faut se challenger sans cesse. » Un chou fermenté au caramel de cumin figure ainsi à la carte du moment : un clin d’œil à sa région d’origine qui joue sur des saveurs nouvelles. « Le sourcing des produits, c’est la moitié du travail », confirme Mathieu Van Wetteren qui ne veut « pas céder sur la qualité que

Au « Krautgaart », non loin des restaurants de Thomas Murer et Mathieu Van Wetteren, est cultivée une grande variété de légumes sans travail du sol et sans engrais ni pesticides chimiques de synthèse.

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ce soit pour une carotte ou pour une langoustine. Plus le produit est simple, meilleur il doit être ». Lui aussi a choisi de s’approvisionner le plus localement possible et remet par exemple à l’honneur les poissons de rivière comme la truite ou le sandre, trop peu travaillés dans la gastronomie. « Je passe beaucoup de temps chez des producteurs de la région pour trouver un maximum de ressources locales. Je cherche des produits qui ont du goût, qui peuvent être servis pour eux-mêmes, car ma cuisine est assez minimaliste. » Ainsi, son menu du moment utilise la quetsche fermentée ou revisite l’écrasé de pommes de terre au lait battu de son enfance. « Les techniques de fumage, de fermentation, de maturation, les pickles, les vinaigres… ce ne sont pas des gadgets, ce sont des moyens d’apporter de l’émotion, de plonger dans les souvenirs. », relate-t-il.

Partir pour se perfectionner Mathieu Van Watteren a aussi commencé jeune : « À 14 ans, pour m’offrir une Playstation, j’ai travaillé en cuisine et j’ai découvert cet univers. J’ai accroché et je ne l’ai plus quitté », se souvient-il. Il a accumulé les expériences : « Chez Wohlfahrt, trois étoiles Michelin, en Forêt-Noire, j’ai appris la rigueur, chez Yves Mattagne, la cuisson des viandes et poissons ». Sans doute le chef qui l’a le plus marqué est Sergio Herman au « Jane » à Anvers, connu pour ses dressages au cordeau, ses accords intrépides.

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Jamais lassé d’apprendre et de se frotter à d’autres cultures, le Luxembourgeois Mathieu voyage régulièrement au Japon, d’où il a rapporté un couteau réalisé sur mesure, et dans les pays scandinaves. « J’ai envie de continuer à me permettre de partir plusieurs fois par an, pour découvrir toujours plus et me perfectionner ».

Cuisine de terroir et de saison

Pour Thomas Murer, il s’agit de « se recentrer sur le juste produit au juste prix ». Il est ainsi passé d’une carte à une ardoise avec des plats élaborés selon les arrivages du marché.

 « An der Villa » www.andervilla.lu

Éveiller les émotions Ils se rejoignent encore quand il s’agit de parler de l’importance de leur équipe. « Je veux faire en sorte que mes collaborateurs soient heureux. Travailler en harmonie avec mon staff, profiter de ma famille, rester en bonne santé… », insiste le chef de « An der Villa ». « Ma grande chance est d’avoir une petite équipe, sur laquelle je peux compter ». « Leur bienêtre, leur rythme de travail, le respect de la voix de chacun sont aussi importants que ce qu’on met dans l’assiette », complète l’autre. Le repas, ce n’est pas seulement ce qu’on mange au moment où on le mange, c’est le souvenir qu’on en garde et l’empreinte qu’il laisse. À Steinfort, ces chefs font en sorte de procurer des émotions qui donneront envie de revenir.

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De nouveaux concepts, des idées fraîches : une gastronomie qui a de la suite dans les idées au Luxembourg  « Apdikt » www.restaurantapdikt.lu

 Au restaurant « La Table de Frank », le chef Frank Steffen sert de la viande d’une grande fraîcheur, « de chez le boucher directement à l’assiette ». www.latabledefrank.lu  « De Gudde Maufel » : le chef Frank Manes réinterprète la tradition luxembourgeoise de manière passionnante. www.guddemaufel.lu  « Aal Schoul » : dans le restaurant du célèbre boucher Guy Kirsch, la viande de bœuf de qualité fait école ! www.aal-schoul.lu  La terre luxembourgeoise rencontre la mer française : « Le Jardin de la Gaichel » est le restaurant du Breton Erwan Guillou www.lagaichel.lu  « De Bräiläffel » a été fondé par Aloyse Jacoby, ancien chef de l’équipe nationale de cuisine. Aujourd’hui, le restaurant s’enorgueillit d’un sommelier de la bière. www.hoteljacoby.lu


Le restaurant de Thomas Murer « An der Villa » est l’ancienne résidence d’une famille de maîtres de forges de l’usine qui a fait la renommée de Steinfort au début du siècle dernier.

La cuisine de terroir et de saison implique un concept différent : « connaître les plantes, s’ouvrir à des saveurs oubliées, trouver de nouvelles solutions, écouter notre instinct... »

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Transforming Experiences ESCH, CAPITALE EUROPÉENNE DE LA CULTURE 2022

Petite sœur sauvage Si les hauts-fourneaux sont bien éteints, les feux continuent à brûler à Esch-sur-Alzette ! Concerts rock, street art, théâtre et revalorisations industrielles font de la ville une vraie alternative culturelle, encore un peu confidentielle. Texte THOMAS JUTZLER

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Photos PANCAKE!


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© ANDRÉ SCHÖSSER

Chrissi, qui est notre guide à Esch et coordinatrice du bénévolat pour Esch2022, n‘a heureusement pas le vertige. Elle traverse la passerelle de 110 mètres de long conçue par le bureau d‘architectes Metaform, dont les projets à l‘esthétique futuriste font également fureur à l‘exposition universelle de Dubaï. La passerelle surplombe les voies de chemin de fer et relie par ascenseur le coeur de la ville au parc Gaalgebierg situé plus haut.

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« Mon grand-père nous a toujours parlé de son travail avec les dragons cracheurs de feu et les monstres d’acier ! De la chaleur inimaginable qui régnait à l’usine. Et des reflets rouges que l’on voyait sans cesse dans le ciel, de jour comme de nuit, comme un coucher de soleil qui n’aurait jamais voulu finir. Magnifique et en même temps témoin du dur labeur dont les hommes de la région Minett devaient s’acquitter ». Chrissi est née à Esch. Alors que nous l’écoutons, nous sommes en face des hauts-fourneaux dont lui parlait son grand-père, de manière si vivante. Nous rencontrons la jeune femme au bureau de Esch2022 à Belval, où elle travaille comme coordinatrice du bénévolat pour la capitale européenne de la culture. Nous la retrouvons sur le toit-terrasse des bureaux provisoires, qui nous offre une vue majestueuse sur tout le site. On voit que tout est en transformation. Des bâtiments industriels deviennent des bibliothèques, des hauts-fourneaux des sculptures. Le dur labeur physique ne revient plus désormais qu’aux membres des groupes de rock qui se produisent ici. Lorsque la musique enflamme les haut-parleurs entre les feux éteints des hauts-fourneaux de Belval, la chaleur monte. Mais ce n’est plus à cause de l’acier en fusion. Quelle coulisse extraordinaire pour la plus grande salle de spectacle du Luxembourg, la « Rockhal » !

des industriels à un autre quartier où se succèdent de petites maisons ouvrières. Les richesses du passé transparaissent derrière des vitres cassées et du lierre grimpant sans retenue, et ce déclin a du charme et une beauté certaine. Constructions ultramodernes, vestiges d’anciennes maisons de maîtres, corons joliment rénovés : en plein centre-ville, on trouve encore cet étonnant mélange d’ancien et de nouveau, de délabré et de rénové.

portraits de Chrissi. En toile de fond, des briques apparentes recouvertes d’un lierre au tronc épais comme un bras. Au-dessus de nous, des tourterelles qui ont pris possession du dernier étage de la ruine entrent et sortent en volant par des fenêtres sans vitres. En face, un immeuble d’habitation ultramoderne avec balcons de verre et parking souterrain. Au coin de la rue, une auberge de jeunesse flambant neuve, à la façade multicolore.

Esch, c’est cool Mais si l’on veut saisir la beauté en pleine évolution de cette ville chargée d’histoire, il faut se dépêcher ! À chaque coin de rue, on rénove, on construit. L’effervescence qui règne juste avant le début de l’année de la capitale européenne de la culture est passionnante. Les « lost places », ou lieux perdus, existent pourtant encore. Devant l’un de ces endroits abandonnés, nous faisons quelques

Un point de vue moins connu sur les hauts-fourneaux. Cela vaut la peine de faire un peu plus de chemin. Qu‘est-ce qui est en chantier, qu‘est-ce qui reste ? Pas toujours facile à saisir immédiatement. Et c‘est justement pour cela que c’est si passionnant.

Changement de scène : nous quittons Belval pour nous rendre au centre de la deuxième plus grande ville du Luxembourg. Esch-surAlzette est une ville typique des anciennes régions minières. Ici, on passe facilement d’un quartier de grosses villas ayant appartenu à

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Au milieu de cette architecture un peu folle s’affaire une population, qui, en raison de la présence des travailleurs étrangers venus ici autrefois, est encore plus diverse que dans le reste du Luxembourg. Notre guide nous conduit dans un dédale de palissades recouvertes de graffiti mais aussi de tables de bistrot qui, en raison de la pandémie, s’étalent largement sur la zone piétonne et les trottoirs, comme des taches de lichen. Un brouhaha de langues – français, allemand, italien, portugais, anglais – constitue la bande-son de notre prome-

nade. Sur la place de l’Hôtel de Ville, des enfants jouent dans l’eau de la fontaine.

Art, culture et bric-à-brac Sans hésiter, nous écrivons à l’un de ces street artists via Instagram. Nous sommes à la recherche d’une œuvre bien spéciale, un collage que nous avons découvert sur les réseaux sociaux à la page ICICESTESCH. Rapidement, l’artiste nous répond : « Vous cherchez

À Esch-Belval, la ville se modifie littéralement de la tête aux pieds. Entre les anciens bâtiments dédiés à l’industrie lourde, les constructions modernes de la nouvelle université surgissent ici et là. Le travail physique des temps passés a cédé la place au savoir et au travail intellectuel.

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l’exposition ‘Bâtiment 4’ ! » C’est parti ! Chrissi connaît le chemin. « Bâtiment 4 », c’est une exposition collective, la sixième de ce genre qui se tient tous les ans à Esch, dans des lieux prêts à être démolis ou rénovés. En arrivant, nous trouvons portes closes. Mais l’excursion valait tout de même la peine : tout autour de cette ancienne villa, des œuvres d’art. Deux petites voitures ont été soudées ensemble, de telle sorte qu’on pourrait croire un couple d’amoureux rouillés reposant l’un sur l’autre. Des peintures recouvrent tous les murs et des sculptures en tous genres se tiennent debout, un peu incertaines, dans le jardin. En arrière-plan, il y a un ancien centre de formation de la sidérurgie. On se croirait sur le tournage du film « Blade Runner ». Le bâtiment, on le sent bien, était, à son époque, il y a une soixantaine d’années, à la pointe de la modernité architecturale. Aujourd‘hui, c‘est juste un bâtiment de plus qui est prêt à être démoli. Nous nous promettons de revenir dans quelques années pour voir ce que les urbanistes auront imaginé pour cet immense terrain. À deux pas de là, certaines transformations sont déjà accomplies. Bienvenue à la Kulturfabrik. Sur le site de l’ancien abattoir, on peut voir la scène culturelle de Esch en pleine action. Ce centre culturel soutient les artistes locaux et régionaux, encourage les talents et la création artistique, et organise des projets pédagogiques. Par ailleurs, la Kulturfabrik s’engage aussi dans des projets transfrontaliers et se veut un moteur de développement durable. Dans ces bâtiments ornés comme il se doit de graffiti,


Autour de la Kulturfabrik, en abrégé Kufa, naissent depuis des décennies des œuvres créatives made in Luxembourg. Dans les bâtiments des anciens abattoirs municipaux, on trouve sur 4.500 mètres carrés deux salles de spectacle, une galerie, un cinéma, une brasserie, un bistrot et des salles de répétition. On y rencontre des esprits créatifs comme le réalisateur du film « An Zéro – Comment le Luxembourg a disparu ». Julien Becker est né à Esch, a fait ses études à Paris et apprécie aujourd‘hui de créer dans son pays d‘origine en tant que cinéaste. 51


© BENNY SCHILTZ

« Tatta Tom » (tante Tom), alias Tom Hecker, lit des contes devant la bibliothèque d‘Esch. Ce personnage artistique est une figure incontournable de la scène culturelle luxembourgeoise. Et il a une mission : revisiter des contes connus pour les enfants et les jeunes et aborder ainsi des thèmes actuels comme la tolérance et l‘acceptation.

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Esch est une ville où les gens se rencontrent. Et Esch est un bastion de l’ouverture d’esprit et de la diversité. Une fois par an, la « Luxembourg Pride Week » s‘y déroule et permet à la communauté LGBTIQ+ nationale et internationale de se retrouver. 53


La ville semble être la toile de fond préférée des graffeurs luxembourgeois. Nulle part ailleurs nous n’avons vu autant de graffitis qu’à Esch — et en plus ils sont bons ! Des inscriptions classiques, des œuvres d’art en noir et blanc, des peintures qui décorent des pans entiers de maisons.

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Ici, deux « vieux briscards » de la scène de sprayeurs ont laissé leur empreinte. « Stick » et « Spike » travaillent littéralement main dans la main. Leurs idées et leurs motifs se complètent et s’enrichissent mutuellement pour devenir, comme ici, une œuvre d’art globale. La structure du mur a été sciemment intégrée dans ce processus. 55


Un vent de fraîcheur souffle également sur le monde de la pâtisserie : colorées, scintillantes et inhabituelles, les élégantes créations en chocolat de la nouvelle venue Lola Valerius. Dans son atelier vitré au centre d‘Esch, elle offre aux visiteurs un lumineux aperçu de son art de la pâtisserie. Cette native d’Esch a découvert cette passion pendant ses études d‘architecture à Vienne, alors qu‘elle confectionnait des gâteaux pour ses amis.

on trouve des ateliers, des espaces dédiés aux événements, une galerie d’art, un cinéma, des salles de répétitions ainsi qu’un restaurant. Il s‘agit d‘une œuvre d‘art totale, colorée et animée, qui mérite une visite même si l‘on n‘a pas d‘occasion concrète – comme une représentation ou un vernissage. Et l’on peut tout simplement bavarder avec un habitant de la ville à propos de la beauté du monde, ou de la beauté offerte par le renouvellement. Ou plus exactement de l’upcycling, pour

reprendre un terme à la mode. Et en même temps, devant cet ancien abattoir, on déguste avec gourmandise un bon burger vegan. Le mot du moment : upcycling ! Nous arpentons la ville en tous sens et entrons dans le royaume de BenuCouture, un atelier qui fabrique des vêtements à la mode en transformant de vieilles frusques. L’atelier s’est installé dans un bâtiment entièrement constitué de containers de fret maritime. L’isolation aussi est écologique, puisqu’elle est faite à partir de matériaux naturels comme la paille, la laine et l’argile. La façade a été conçue par des artistes régionaux. Là aussi, seuls des matériaux déjà utilisés ou d’origine naturelle ont été utilisés. De l’autre côté de la rue, le Benu-Village est actuellement en construction.

© MIKE ZENARI

Au coin de la rue

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Nous n’en croyons pas nos yeux : dans une arrière-cour, des containers sont entassés. Comme des cubes empilés au hasard, les uns sur les autres. Le plâtre est fabriqué à partir de roseaux. Si l‘on a besoin de poutres, on se sert de bois de construction recyclé, issu de la démolition de vieux bâtiments et provenant des chantiers voisins. C’est ça l’économie circulaire, à la lettre ! Une immense villa hétéroclite est en fabrication : c’est un bâtiment neuf, mais second hand pourtant. Portes, fenêtres, balustrades : tout est dépareillé, formes et couleurs diffèrent, tout est d’occasion. Seuls les matériaux de récup ou naturels sont autorisés ! Pour couronner le tout, le restaurant qui ouvrira ses portes à l’intérieur de ce bâtiment servira des plats préparés uniquement à base d’ingrédients « sauvés »,


La « Konschthal » à Esch est un espace public pour l‘avant-garde internationale de l‘art contemporain. Des expositions et des événements y sont organisés. La commune a acheté l‘ancien magasin de meubles ; cela montre l‘importance de la culture à Esch-sur-Alzette. L‘artiste Charles Wennig y guide les visiteurs à travers une exposition actuelle. 57


Dans l‘atelier de Benu-Couture, de vieilles frusques deviennent des vêtements à la mode. Plutôt que de vendre du second hand, on crée ici de toutes nouvelles collections. Des vêtements « avec une histoire » servent de base, soit parce qu‘ils proviennent de collectes de vieux vêtements, soit parce qu‘ils ont été apportés par un client pour être transformés.

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Le nom Benu est inspiré de l’anglais « Be New ». Mais il y a aussi, dans la mythologie égyptienne, l’oiseau Benu, ou Bénou qui constitue d’ailleurs le logo de tous les produits du village. Contrairement à son cousin grec le phénix, il ne se consume pas en vol mais il fait une fois le tour de l’univers. Le cycle écologique parfait et le Bénou ont donc bien des choses en commun. 59


L‘intérieur du « Escher Theater » offre le cadre idéal pour un grand jeu d’acteur. Il est intimiste, mais pas exigu, avec une aura presque mystique. Grâce à ses couleurs sombres, l‘espace laisse la part belle à l‘action et aux protagonistes. La programmation qui reprend aussi bien des créations locales que des productions internationales, se caractérise par une grande variété de langues, car les spectateurs viennent aussi de l‘autre côté des frontières.

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« Nous voulons voir le théâtre différemment et misons sur une approche pluridisciplinaire. Notre définition du théâtre est large », explique la directrice Carole Lorang, ici en conversation avec le directeur technique Patrick Moses. Son équipe est jeune et dynamique, et les contacts internationaux enrichissent le discours et la programmation. 61


Dans le bar culte « Pitcher », les vieux murs lambrissés débordent d‘objets rappelant les USA. Le rappeur Corbi apprécie l‘atmosphère. Il fait du « Old School Hip Hop » ; l‘école new-yorkaise mais en luxembourgeois.

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 L‘art absolu : un espace public dédié à l‘art contemporain, c‘est la « Konschthal ». Dans les locaux de l‘ancien magasin de meubles, les expositions s‘étendent sur plusieurs étages. Elles présentent l‘art contemporain d‘ici et d‘ailleurs. www.konschthal.lu  La « Kulturfabrik », ou Kufa, se veut être un lieu de rencontre engagé et ouvert au public, aux artistes et aux associations. Son programme est varié : concerts, festivals, théâtre, cinéma, projets pédagogiques, littérature, résidence d‘artistes et bien plus encore. www.kulturfabrik.lu  Une résidence d‘artistes : dans le « Bridderhaus », l‘ancien hôpital de la métropole du Minett, jusqu‘à 17 artistes vivront et travailleront pendant un an maximum. Il y aura sept appartements, des ateliers d‘art, une cuisine ainsi que des locaux administratifs et communautaires ainsi que des salles de réunion. Une véritable résidence créative au cœur de la capitale culturelle 2022. www.esch2022.lu  Passer la nuit dans une atmosphère jeune et cool, c‘est ce que propose l‘auberge de jeunesse d‘Esch, juste à côté de la gare. De plus elle est un bijou architectural. Avec ses différentes nuances de rouge, sa façade rappelle les Terres Rouges. www.youthhostels.lu

(ici, dans le Sud, personne ne s’en préoccupe), et après une boisson alcoolisée, on discute des potins de la ville en s’animant de plus en plus. L’ambiance est chaude. Par rapport à la capitale, parfaite et bien organisée, Esch-sur-Alzette est la petite sœur pas sage : un peu plus jeune, plus sauvage, plus frondeuse, désordonnée. Mais en tout cas, même si le hauts-fourneaux se sont éteints, elle reste clairement hot !

Même si tout, à Esch, n’est pas encore passé au Zero Waste, on fait très attention aux déchets et l’on pourrait dire que la région mène une sorte de projet d’upcycling à grande échelle. Les hauts-fourneaux embellis de Belval, les bâtiments joliment rénovés de l’usine, les mines à ciel ouverts des environs, transformés en espaces de loisirs renaturés : l’ancien n’est pas occulté mais constamment réhabilité, revalorisé. On est fier de l’histoire et des histoires de la génération de nos grands-parents.

Deux véritables pelotes forment l‘œuvre d‘art qui se trouve en face du « Bâtiment 4 ». Deux petites voitures ont été soudées ensemble, de telle sorte qu’on pourrait croire un couple d’amoureux rouillés reposant l’un sur l’autre.

Boire un petit coup Finalement, nous rencontrons Corbi. Né à Niederkorn, il a grandi dans le Sud avec les sons de Cypress Hill et de Wu Tang Clan. Mais ce fan de l’école new-yorkaise rappe ses textes en luxembourgeois. « Ça ne sonnerait tout simplement pas bien autrement », dit-il sèchement en souriant. Le rappeur nous emmène boire un verre dans le bar culte « Pitcher ». Assis sous d’anciens panneaux publicitaires pour Harley-Davidson et sous des plaques émaillées représentant des sauces tabasco, nous sirotons tranquillement nos bières. L’avant d’une Chevrolet Impala est accroché au mur sous une capsule de Pepsi géante et éveille la curiosité. Dans ce troquet, on se fiche des catégories sociales

© ANDRÉ SCHÖSSER

En balade à Esch

mis au rebus par les grandes enseignes en raison de leurs défauts esthétiques. Ici, au Benu-Village, où tout est tordu et de travers, on accueille et accommode avec plaisir les concombres siamois ou les aubergines à la peau trop pâle.

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Daydream MINETT UNESCO BIOSPHÈRE

L’Homme et la Biosphère 64

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En 2020, la région Minett a été reconnue par l’UNESCO comme une réserve de biosphère. Les paysages fabriqués par l’homme et désormais renaturés sont tout à fait hors du commun. Aller à leur découverte est une expérience féérique. Texte THOMAS JUTZLER

Photos ANDRÉ SCHÖSSER, THOMAS JUTZLER

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La fermeture des anciens sites miniers du sud du Luxembourg a favorisé le développement de la flore et la venue d’une faune particulière. Grâce au microclimat des mines à ciel ouvert renaturées, des plantes rares ont poussé. Minuscules animaux et insectes sont de retour.

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« Des barbes ! », voilà ce qui me vient à l’esprit. Les arbres ont des barbes vertes ! Ils commencent à me parler. Je suis en Terre du Milieu, c’est évident. D’ailleurs, les nains qui travaillaient dans les mines n’ont-ils pas joué un rôle majeur dans « Le Hobbit » ? Je ne serais pas étonné que l’un d’eux sorte d’une des cavités sombres qui se trouvent un peu partout ici, creusées dans la roche. Ce sont des entrées de mines magnifiquement maçonnées et parfaitement serties, mais abandonnées depuis des années. Un vert de mousse a envahi les lieux. Lorsque l’on se tient devant ces entrées, on ressent un air froid et mouvant qui souffle sur la peau. Ça donne la chair de poule. Avant même de s‘approcher du fond de la mine, on remarque un changement de température qui fait froid dans le dos. Des vents très légers, humides et frais, annoncent les galeries souterraines qui parcourent tout sous terre ici dans le Minett. Cette humidité fraîche qui accompagne ces cavités creusées par l’homme sont probablement à l’origine des barbes qui poussent aux arbres. De véritables tignasses mousseuses et foisonnantes pendent des branches et donnent aux troncs graciles un aspect bizarre, presque mystique. La Terre du Milieu, donc. J.R.R. Tolkien se serait senti inspiré, ici.

En transition Le paysage du sud du Luxembourg est troué, poinçonné. Il ressemble aux reliefs d’un festin de géants. Mais les géants de l’acier qui ont festoyé ici autrefois et tout dévoré

alentour ont presque tous disparu. Il ne reste plus que ces lieux qui racontent une exploitation industrielle excessive et qui montrent également que l’influence de l’homme sur la nature peut être, au-delà du profit, positive. Du moins si l’industrie finit par fermer. La fermeture des sites miniers a permis le développement de toute une flore et l’émergence d’une certaine faune. Dans le microclimat de ces mines à ciel ouvert renaturées, certaines plantes rares ont trouvé leur terreau. Insectes et petits animaux sont de retour. Orchidées, papillons, chauves-souris, amphibiens, lézards, reptiles, pour ne citer qu’eux, sont à découvrir lors d’une randonnée dans cette réserve de biosphère de l’UNESCO. Tandis que nous sortons de la forêt humide et noueuse en suivant les an-

ciennes voies d’approvisionnement et les rails désaffectés, nous rencontrons encore quelques lézards en pleine sieste au soleil. Dérangés par nos pas, ils disparaissent rapidement dans les sous-bois. De l’eau s’accumule dans des dépressions du sol mais le profane ne peut déterminer s’il s’agit là d’un biotope d’origine humaine ou naturelle. Quand, par exemple, une cavité s’est effondrée dans une fosse abandonnée et qu’un bassin s’est formé à l’intérieur d’une dépression. Ce qui est étonnant, c’est la variété des insectes et des amphibiens que l’on peut observer à proximité de ces bassins. Des libellules viennent se poser ici et là sur une jolie fleur d’orchidée luisante. On entend croasser dans les buissons, et dans les rayons du soleil, au-dessus de l’eau scintillante, ce sont d’innombrables insectes que l’on voit danser.

La réserve de biosphère du Minett, comme les Luxembourgeois appellent les Terres Rouges au sud du pays, avec sa forte densité de population, est très particulière au niveau mondial. Onze communes sur une surface de 200 km2, de nombreuses mines et plusieurs anciennes mines à ciel ouvert constituent l’ensemble de la réserve.

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Quelques centaines de mètres plus loin, c’est une tout autre vision : quand, dans cette ancienne mine à ciel ouvert, le soleil réchauffe la roche rouge foncé, une nature qui évoque le désert se révèle. Peupliers, bouleaux et pins se côtoient et offrent avec grâce leur ombre aux visiteurs qui circulent émerveillés à travers ce paysage.

Un phénix sorti du mâchefer

quis pour intégrer le réseau mondial des réserves de biosphère de l’UNESCO et le programme intitulé « L’Homme et la Biosphère ». Ce n’est pas le retrait total de l’homme qu’il est question d’explorer mais plutôt son influence. L’interaction entre l’homme et la nature.

La différence entre les endroits où les yeux sombres et vides des entrées de puits apparaissent soudainement aux visiteurs dans d’étroits goulots envahis par les ronces et les zones minières à ciel ouvert ne pourrait pas être plus grande. C’est le règne du sec contre celui de l’humide, des terres à découvert contre celui des épais sous-bois, de la chaleur contre celui de la fraîcheur. Ce parcours à travers les zones climatiques peut se faire en une journée si l’on choisit le bon itinéraire de randonnée ou de VTT.

Transformation passionnante L‘objectif est de passer d‘une économie industrielle à une économie de la connaissance en harmonie avec la nature. La réserve de biosphère du sud du Luxembourg se distingue au niveau mondial en raison de sa forte densité de population. Onze communes sur un territoire de 200 km2, de nombreuses mines et plusieurs anciennes zones minières à ciel ouvert font partie de cette réserve. Après la disparition de l’industrie lourde, la région devra prendre un nouveau visage, tout en préservant son héritage culturel et industriel.

C’est précisément une renaturation réussie des zones industrielles et la reconquête de l’espace naturel par la faune et la flore qui étaient les prére-

Everglades, Red Rocks et « crocodiles ». Bienvenue aux États-Unis du... Luxembourg. Dans la région Minett, une faune et une flore inattendues vous attendent.

Aujourd’hui, dans cette région du sud fortement peuplée, on constate que la biodiversité se renouvelle, notamment grâce au soutien de nombreux projets. En même temps, c’est une région marquée par une histoire culturelle qui mérite d’être sauvegardée, et qui connaît actuellement une belle transformation urbaine.

© CLAUDE ASSEL

La nature a reconquis cette ancienne zone minière. Les amateurs de VTT l’ont conquise eux aussi. Au Lallenger Bierg, entre Esch et Kayl, je m’étonne de rencontrer un troupeau de moutons qui, comme un groupe de touristes, trébuche parmi les cailloux de couleur rouille. A l’inverse, les moutons, s’étonnent eux aussi de voir passer sur deux roues des gens bien étrangement vêtus, trébuchant également sur le terrain accidenté. Ici, le Bikepark est assez exigeant. Et à plusieurs titres : c’est un tourisme doux et bien géré, où une agriculture

respectueuse participe, parmi des zones de protection de la nature, au soutien de la réserve de biosphère.

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L’homme est un facteur déterminant dans la biosphère en mutation. Aujourd’hui, il a tout à fait pris conscience de son influence et sait même que si le chemin sera long : dans le sud du Grand-Duché, nous avons déjà une petite idée de la direction que prendra ce voyage.


D’anciennes zones minières à ciel ouvert qui rappellent des canyons de renommée mondiale : les Terres Rouges, là où autrefois, des pelleteuses géantes ravageaient le paysage, la nature reconquiert les zones minières. Et les vététistes la conquièrent aussi.

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 Sur le Minett Trail : on peut aussi faire l’expérience de la nouvelle vie et de la biodiversité de la région sur le Minett Trail. Ce chemin de randonnée long de 90 kilomètres traverse la région. En dix étapes, il permet de voir des villages, des villes, de la nature, et il montre comment l’industrie sidérurgique a imprégné l’espace urbain. www.minetttrail.lu  Le Minett Tour et Minett Park : Pour ceux qui voudraient tout savoir sur l’histoire industrielle des Terres Rouges, un tour du Minett s’impose. C’est un parcours d’environ 35 kilomètres qui relie cinq lieux aux théma-

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Sur le Minett Tour, on verra un peu partout des machines et des appareils en rapport avec l’ancienne exploitation du minerai de fer au Luxembourg.

© RENATA LUSSO

 De la mine à la réserve naturelle : il n’y a encore que quelques décennies, l’actuelle réserve naturelle de « Ellergronn » était encore utilisée pour l’extraction du minerai de fer. La zone minière du Kazebierg, située dans cette réserve, au sud de Esch-sur-Alzette, s’est transformée en un vaste habitat pour de nombreuses espèces d’animaux, au milieu des étangs et des herbes sèches si typiques de la région, à la lisière d’une forêt d’aulnes et de frênes, le long de petits ruisseaux. « Ellergronn » appartient au réseau européen des réserves naturelles Natura 2000. C’est un petit joyau que l’on peut facilement découvrir depuis Esch-sur-Alzette, pour une grande randonnée comme pour une simple promenade. www.visitminett.lu

tiques différentes mais toutes en rapport avec le passé de la région, lié à l’extraction du minerai de fer et à la production d’acier. Parmi eux, le Minett Park Fond-de-Gras, où un train à vapeur et un train minier circulent pendant la saison d’été. Le musée Cockerill de Eschsur- Alzette et le musée national de la Mine à Rumelange sont aussi des lieux intéressants à visiter sur ce thème. www.minetttour.lu

© RENATA LUSSO

Autres détours intéressants :


Humidité ici, sècheresse là. Sous-bois contre clairières. Fraîcheur contre chaleur. Si l’on choisit bien son parcours pédestre ou cyclable, on pourra faire l’expérience de cette zone climatique en l’espace d’une seule journée.

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VISITE DE LA BRASSERIE NATIONALE :

PLONGEZ AU CŒUR D’UN VÉRITABLE SPECTACLE INTERACTIF ET DÉCOUVREZ LE TERROIR LUXEMBOURGEOIS !

Nourrie par un héritage de plus de 250 ans, la Brasserie Nationale est devenue, au fil des siècles, la première brasserie du Grand-Duché de Luxembourg. Le secret de ce succès vous sera dévoilé lors de la visite de la Brasserie Nationale… Un arrêt incontournable au Grand-Duché de Luxembourg, un lieu chargé d’histoire, tourné vers l’avenir. Découvrir un brassage liant tradition et modernité

SENTIR, TOUCHER ET MÊME GOÛTER LES MATIÈRES PREMIÈRES… Les bières Bofferding, Battin et Funck-Bricher sont brassées à partir des meilleures matières premières ; elles sont pur malt et pur houblon, 100 % naturelles, sans additifs et sans conservateurs. Grâce à la connaissance de nos guides, vous pourrez sentir et toucher les matières premières, le tout avec des explications détaillées, voire même quelques anecdotes. Chaque ingrédient est choisi avec soin ; jusqu’à l’eau utilisée. « Il faut savoir que l’eau change le goût de la bière. La nôtre est d’une qualité irréprochable », souligne Monsieur Georges Lentz, administrateur de la Brasserie Nationale. À noter que l’eau est puisée à la brasserie, dans un lac à 317 mètres sous terre. Une pureté extraordinaire que vous serez évidemment invités à goûter directement à la source.

Au cours de la visite vous pourrez le constater par vous-même en admirant d’un côté notre musée d’objets historiques et de l’autre les grandes installations très modernes. Grâce aux investissements effectués chaque année nous arrivons à une brasserie toujours plus innovante, plus économique et plus écologique. Des engagements qui font de ses bières de véritables références.

DÉGUSTER NOTRE SAVOIR-FAIRE Le clou du spectacle ! La dégustation – en plus de celles offertes durant le parcours – comprend 5 bières de la gamme de la Brasserie Nationale. A commencer par une traditionnelle Bofferding Pils, pour suivre avec une brassée de fraîcheur de Bofferding Bio, puis la suite avec une excellente Battin Gambrinus, après une exclusive Funck-Bricher et finir l’expérience par une bière de saison. Une explosion de saveurs accompagnée par des explications techniques qui vous permettra de mieux apprécier chaque bière. Vous retrouverez le « savoir-bière » avec une belle représentation par nos guides ; une bière au fût parfaitement tirée, bien fraîche et servie avec grand professionnalisme. Une belle dégustation forte en générosité qui vient clore le parcours, le tout nourri de bonne humeur, de convivialité et ce dans un esprit familial. De nouvelles activités vous attendent en 2022, pour le plus grand bonheur des amateurs de houblon : DE BRAUATELIER s’intègre désormais à la visite de la Brasserie avec la nouvelle salle de dégustation.

DÉCOUVRIR DE FAÇON LUDIQUE NOTRE TRADITION… La visite guidée de la Brasserie Nationale vous fera découvrir notre méthode traditionnelle de façon ludique. Vous débuterez dans notre salle de brassage - cœur de la production – puis irez à la découverte des nouvelles cuves de fermentation, passerez par l’impressionnante cave de garde surnommée « la cathédrale », et finirez par l’embouteillage et la mise en fût. Tout le long du parcours vous bénéficierez d’une explication complète des différentes étapes du processus de fabrication de la bière. Durant cette initiation vous aurez par ailleurs l’occasion unique de découvrir la bière distillée ainsi que la bière jeune (non filtrée), disponibles nulle part ailleurs !

VOYAGER À TRAVERS PLUS DE DEUX SIÈCLES D’HISTOIRE ADAPTÉE À L’ÈRE MODERNE… Nourrie par un patrimoine de plus de deux siècles, cette entreprise familiale est résolument moderne.

L a br asser ie s’est aussi équipée d’une inst allation de t ype « Microbrasserie », dans le but de développer et expérimenter de nouvelles recettes et proposer des cours de brassage, pour des groupes de 10-15 personnes. Vous pouvez trouver toutes les nouvelles activités sur www.visitebrasserienationale.com N’oubliez pas de réserver avant de venir vous aventurer ! Bonne visite, bonne dégustation et à bientôt !

BRASSERIE NATIONALE 2 Boulevard J-F Kennedy | L-4930 Bascharage | Tél. : +352 23 63 64 - 217 visite@bofferding.lu | www.visitebrasserienationale.com


BRASSERIE NATIONALE VISITE ET DÉGUSTATION

UNE EXPÉRIENCE BRASSICOLE UNIQUE : Accueil par un guide professionnel Visite commentée de la brasserie Dégustations de bières 100% naturelles Souvenirs Durée : 2h (dégustation comprise)

Langues : LU / FR / DE / EN / CN

INFORMATIONS PRATIQUES ET RÉSERVATION : • Visites sur réservation du lundi au samedi (sans réservation les samedis à 15h) • Réservation par téléphone : + 352 23 63 64 - 217 ou via notre site internet www.visitebrasserienationale.com • Accès par : Transport personnalisé possible • Restauration possible chez notre partenaire « D’Braustuff »


Observer, comprendre, nourrir l’espoir : cela peut être une expérience intense. À l’exemple d’une Allemande qui se décide à aller visiter, en une seule journée, plusieurs lieux de mémoire de la Seconde Guerre mondiale. Qu’est-ce que ces visites remuent en nous ? Il est précieux de regarder le passé en face et d’aller à la rencontre de ces lieux au Luxembourg. Ne serait-ce que pour se faire sa propre image de la guerre. Texte BIRGIT PFAUS-RAVIDA Photos ALFONSO SALGUEIRO

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Transforming Experiences SE SOUVENIR EN VOYAGEANT

Ce qui reste, c’est l’espoir

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Le cimetière des soldats allemands tombés au front a une atmosphère très particulière. C’est à travers une porte étroite, construite dans un haut mur, que l’on parvient à la nécropole. Des rangées de croix grises, légèrement décalées parmi de hauts arbres, rendent hommage aux morts.

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C’est un matin de novembre. Derrière un voile de nuages, le soleil pointe à l’horizon, plongeant tout dans une lumière laiteuse, rose clair, paisible, magique. Je me tiens devant l’entrée du cimetière militaire américain de Hamm. Aujourd’hui, je vais visiter des lieux de mémoire. Des lieux qui nous rappellent comment, durant les deux dernières années de la guerre, des soldats allemands se sont battus contre des soldats luxembourgeois, américains, français et britanniques lors de la bataille des Ardennes. Des milliers d’hommes sont morts. Les Ardennes furent en effet la scène de grands carnages, en particulier durant l’hiver 1944-1945.

par-dessus les rangées de croix. Certaines sépultures sont marquées d’une étoile de David et non d’une croix chrétienne. Selon la perspective, les tombes donnent l’impression d’être les unes derrière les autres ou au contraire décalées. Entre les allées qui délimitent les sépultures, clapotent deux fontaines aux bassins descendants qui sont ornés de dauphins et de tortues en bronze symbolisant la renaissance et la vie éternelle. Les figures, les allées, les pierres tombales, tout est d’une symétrie impressionnante.

Devant le musée national d’Histoire militaire de Diekirch, deux chars indiquent le chemin de l’entrée. La richesse des objets exposés est impressionnante. L’exposition mêle photos historiques, objets d’époque, dont certaines armes désamorcées, mais aussi scènes de combats et scènes du quotidien reconstituées.

Plus de 5 000 soldats américains reposent dans le cimetière militaire américain situé dans le quartier de Hamm, dans la capitale. Le portail d’entrée noir est immense, il est orné d’aigles dorés et de couronnes de laurier, symboles de bravoure durant l’Antiquité. La pelouse parfaitement entretenue est recouverte d’une petite couche de givre. De très rares feuilles d’automne gisent entre les croix sous le soleil du matin. L’ordre et la propreté sont maîtres ici.

Impressionnante symétrie Au milieu de ce décor fait d’innombrables pierres tombales en marbre blanc qui scintillent, s’élève une haute chapelle surmontée d’un ange de granit rouge immense. Au plafond, à l’intérieur de la chapelle, une splendide mosaïque dorée représente le Saint-Esprit sous la forme d’une colombe. C’est la colombe de la paix. Les marches du monument sont très plates, on peut regarder au loin en marchant sans trébucher. Je regarde

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Le « Schumann’s Eck », entouré de forêts, était déjà un carrefour commercial important à la fin du Moyen Âge, sur les routes bien entretenues qui reliaient le Luxembourg à la Belgique. Pendant la Deuxième Guerre mondiale, c’est justement en raison de sa signification stratégique que ce lieu est devenu l’un des plus horribles champs de bataille du Luxembourg.

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Au milieu de la forêt, des personnages en photo, grandeur nature, constituent plus qu’une simple toile de fond. Des figures apparaissent soudainement dans la forêt. Elles ont l’air bien vivantes, même si elles sont en noir et blanc et bidimensionnelles. Le soleil de l’après-midi surgit comme un projecteur dans la forêt. La scène est surréelle.

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Les noms gravés sur les tombes sont très discrets, à peine visibles sur le marbre blanc immaculé. Certains ont des consonances européennes, voire allemandes. Tel ou tel soldat américain avait-il des ancêtres allemands ? Cette question s’immisce dans mes pensées, et elle devrait trouver sa réponse, tout comme d’autres questions d’ailleurs, au musée national d’Histoire militaire.

Ici, les arbres s’élèvent jusqu’au ciel. Ces deux cimetières nous plongent donc dans une atmosphère toute différente. Côté américain, ce sont les couronnes de la victoire. Côté allemand, les couleurs douces et la verdure qui semblent vouloir atténuer le souvenir. Visiter ces deux lieux du dernier repos est important pour une expérience complémentaire et donc complète.

Le cimetière caché

Entre les arbres, des hommes en uniforme de camouflage enlèvent les feuilles mortes. Ce sont des soldats allemands qui en ce mois de novembre passent une semaine au Luxembourg pour entretenir le cimetière allemand et les abords du cimetière américain. « Il s’agit d’un service bénévole de la Bundeswehr, et je le fais avec plaisir. Nous préparons les lieux pour une cérémonie lors de laquelle une gerbe sera déposée », explique le soldat Carsten Westphal.

Non loin de là se trouve le cimetière militaire allemand. Dans l’ombre, caché. Après quelques pas, on arrive devant une porte étroite qui, une fois franchie, nous mène devant une croix en fer toute simple. Derrière cette croix, le regard embrasse l’ensemble du cimetière. Et d’autres croix, en pierre grise cette fois, font fortement contraste avec les sépultures américaines d’un blanc neigeux.

Un soldat allemand retire les feuilles mortes qui jonchent le sol du cimetière. Carsten Westphal fait un service volontaire pour entretenir les sépultures de guerre. Après son travail, il se réjouit de découvrir le Luxembourg et sa culture.

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Avec ses camarades, il est venu tout spécialement depuis l’Allemagne du Nord. Ces soldats feront aussi une excursion pour aller voir le musée national d’Histoire militaire de Diekirch, d’ailleurs ma prochaine destination. Devant le musée, deux chars indiquent le chemin de l’entrée. À l’intérieur, le parcours conduit à travers les salles un peu biscornues d’une ancienne brasserie, avec de nombreuses portes et voûtes. La richesse des objets exposés est impressionnante. L’exposition mêle photos historiques, objets d’époque − notamment des armes désamorcées −, mais aussi scènes de combats et du quotidien reconstituées, dans lesquelles sont placés des mannequins grandeur nature, représentant des soldats, pour l’éternité. Certains objets donnent l’impression d’être neufs, d’autres se sont enrichis d’une belle patine, car ils se trouvaient dans des tranchées ou dans des abris. Le musée montre ce qu’était vivre et mourir à la guerre. Que mangeait-on pendant les batailles ou dans les abris ? À quels jeux jouait-on ? Sur quoi dormait-on dans les caves ? Avec quoi travaillaient les opérateurs radio ? Une Enigma d’époque, machine servant au décodage, attire mon attention. La technologie de guerre peut être fascinante. Juste après, je remarque une boîte en bois dans laquelle on mettait les animaux domestique en sécurité durant les bombardements. Et puis… encore des armes, rouillées, parmi les feuilles d’automne. Les chaînes boueuses d’un char. Une trousse de secours DIY pour les opérations d’urgence au front, avec l’ensemble des ustensiles chirurgicaux. Un des mannequins est « opéré », le sang artificiel luit à la


À Wiltz, un monument en forme de phare commémore les victimes du nazisme. Après l’introduction du service militaire obligatoire en août 1942, les ouvriers de Wiltz ont déposé leurs outils. Rapidement, le mouvement de grève s’est imposé dans tout le pays. Les occupants s’y sont opposés en employant la violence. Vingt-et-un Luxembourgeois ont été exécutés. 81


Plus de 5 000 soldats américains reposent au cimetière militaire américain de Hamm, un quartier de la capitale. De ce cimetière émane une aura de fierté. La pelouse parfaitement entretenue est recouverte d’une petite couche de givre. De très rares feuilles mortes gisent entre les croix sous le soleil du matin.

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Certaines sépultures sont marquées d’une étoile de David et non d’une croix chrétienne. Selon la perspective, les tombes donnent l’impression d’être les unes derrière les autres ou au contraire décalées. Les noms gravés sur les tombes sont très discrets, à peine visibles sur le marbre blanc immaculé.

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lumière d’une lampe. En rentrant chez moi, je continuerai à penser à ces scènes, dans la soirée, et même la nuit. Le Lancaster Memorial de Weiswampach commémore les équipages de deux bombardiers Lancaster tombés pendant la Seconde Guerre mondiale. En tout, treize jeunes hommes ont perdu la vie. La chapelle attenante invite au recueillement.

Images vivantes de soldats Dernière étape de mon « Memorial Day » : le sentier du souvenir au carrefour « Schumann’s Eck ». Au milieu de la forêt, aux alentours de Wiltz. Ici, des personnages en

photo, grandeur nature, constituent plus qu’une simple toile de fond. Des figures apparaissent soudainement dans la forêt. Elles ont l’air bien vivantes, même si elles sont en noir et blanc et bidimensionnelles. Deux soldats contrôlent les passants. D’autres se préparent une soupe entre deux combats. Deux autres se pressent l’un contre l’autre, le regard apeuré, l’un fume une cigarette. Ils n’ont pas l’air d’avoir plus de dix-huit ans. Cette promenade en forêt n’a rien de normal. « Attention aux mines », prévient un panneau. « Il est interdit d’utiliser des détecteurs de métaux », prévient un autre. Le soleil de l’après-midi surgit comme un projecteur dans la forêt. La scène est surréelle. Et ici, entre les hauts arbres des Ardennes, il fait très froid, malgré les derniers rayons du soleil. C’est ici que les soldats se cachaient en janvier 1945, se réchauffaient et se réconfortaient dans des tranchées et des renardières. Et peut-être écrivaient-ils quelques lettres à leurs familles. Difficile de s’imaginer la solitude des soldats. Dans la forêt, à terre, l’un d’eux est recroquevillé, son casque à ses côtés. Même si l’homme qu’il représente est mort depuis longtemps, toute cette mise en scène m’aide à comprendre bien plus que n’importe quelle image dans un musée : c’est un moment pris sur le vif, l’image d’un homme qui a vraiment existé. Ni plus ni moins. Enfin, un groupe de personnes m’apparaît, effrayant de réalisme. Ce sont de jeunes soldats qui courent vers moi et qui me regardent droit dans les yeux. Juste à côté, un énorme cratère, une bombe américaine de 500 livres vient d’être larguée. Presque exactement au milieu de ce cratère pousse un hêtre. Même ici la nature reprend ses droits. Ce qui reste, c’est l’espoir.

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La visite du musée national d’Histoire militaire de Diekirch conduit à travers les salles un peu biscornues d’une ancienne brasserie, aux nombreuses portes et voûtes. En plus de la reconstitution, grâce à un diorama à l’échelle 1:1 de la bataille des Ardennes aux alentours de Diekirch, le musée présente entre autres l’histoire des résistants luxembourgeois, entre 1940 et 1945. 85


Étapes sur le chemin de la mémoire  Le General Patton Memorial Museum à Ettelbruck met à l’honneur le commandant de la 3e armée américaine, dont les troupes libérèrent la ville d’Ettelbruck le 25 décembre 1944. Des documents et des objets illustrent l’invasion, la répression et la persécution exercées par l’Allemagne nazie, ainsi que la libération du Luxembourg. Si l’on veut continuer à marcher sur les traces du général Patton, il est possible d’aller voir sa tombe, entourée de drapeaux, au cimetière militaire américain de Hamm. À quelques encablures de là, le cimetière militaire allemand de Hamm constitue une bonne visite complémentaire. www.patton.lu  L’abbaye de Cinqfontaines est devenue, dès 1941, un camp d’internement des Juifs pendant la Deuxième Guerre mondiale. Les religieux en ont été chassés par l’occupant, et le couvent a servi de lieu de rassemblement pour les Juifs dont ce fut la dernière étape avant la déportation vers les camps de concentration de l’Est. En 1944, l’armée américaine transforma ce couvent en hôpital de campagne. Et en 1969, un monument commémoratif y a été inauguré. En 1973, le couvent est devenu un lieu de retraite et de réflexion. www.visit-eislek.lu

bataille des Ardennes au château de Clervaux et de Wiltz, ainsi que le musée national d’Histoire militaire de Diekirch. On y découvre aussi, dans ce dernier, l‘histoire des résistants luxembourgeois de 1940 à 1945 ainsi que l‘histoire de l‘armée luxembourgeoise. www.visit-clervaux.lu www.wiltz.lu www.mnhm.lu  On peut suivre les traces des contrebandiers et des résistants sur le chemin du souvenir de Ulflingen. En cours de route, avec l’application Éislek, on peut obtenir des informations passionnantes, ainsi que des enregistrements audio et vidéo. Le grand tour (route du nord) fait douze kilomètres, le petit en fait neuf. Le Bunker Trail de Schlindermanderscheid conduit vers un imposant bunker où, pendant la guerre, de nombreux jeunes objecteurs de conscience et déserteurs luxembourgeois opposés au régime nazi trouvèrent refuge. Ici et là, on peut admirer plusieurs splendides points de vue sur les paysages de l’Éislek. www.visit-eislek.lu

 La bataille des Ardennes, durant l’hiver 1944-1945, fut l’une des batailles les plus importantes et les plus déroutantes de la Seconde Guerre mondiale. C’est grâce à elle que le Luxembourg fut enfin libéré de l’occupation allemande. C’est à cette bataille et à cette libération que sont consacrés les musées de la

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 Le Lancaster Memorial de Weiswampach commémore les équipages de deux bombardiers Lancaster tombés pendant la Seconde Guerre mondiale. En tout, treize jeunes hommes ont perdu la vie. La chapelle attenante invite au recueillement. www.visit-eislek.lu  Si l’on souhaite faire un tour organisé des lieux de mémoire au Luxembourg, Gaul’s Legacy Tours est la parfaite option. Au Luxembourg, Roland Gaul est un expert international reconnu de la bataille des Ardennes et le fondateur du musée national d’Histoire militaire de Diekirch. Pour ceux que cela intéresse, il organise avec sa femme des visites individuelles de ces lieux du souvenir. www.gauls-legacy-tours.lu

Dans un avenir proche, le couvent de Cinqfontaines devrait ouvrir un centre pédagogique pour les jeunes ainsi qu’un espace du souvenir dédié au passé mouvementé du lieu.


Au General Patton Memorial Museum d’Ettelbruck sont présentés la biographie du général, les armes et équipements militaires provenant des champs de bataille des Ardennes et de la bataille aérienne.

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Hospitalité, art culinaire… En bref : c’est une véritable culture de l’accueil que l’on enseigne à l’École d’Hôtellerie et de Tourisme EHTL de Diekirch. D’ici sont sortis de nombreux cuisiniers réputés. Texte FREDERIKE HÖHN Photos ANDREAS WEISE

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The Good Life L’ÉCOLE D’HÔTELLERIE ET DE TOURISME EHTL

L’école de l’hospitalité

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Le rire est important pendant la formation à l’École d’Hôtellerie et de Tourisme EHTL du Luxembourg, ce que laisse présager la devise : « striving for excellence ».

Dans le restaurant d’application, les élèves apprennent à dresser une table, à servir les plats et les boissons. La leçon du jour : « servir de la soupe ».

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Le professeur de cuisine Patrick Scholzen se tient comme un chef devant son orchestre. Main levée, il prononce quelques mots et ses élèves commencent à manipuler casseroles et couteaux. La pièce se met à résonner. Victor, au dernier rang, remue avec une louche le bouillon de viande dans une grande marmite argentée – ding ding ! À côté de lui, Fabio abat son couteau sur la planche à découper, dans un rythme staccato – tac, tac, tac ! Depuis le premier rang s’élève un craquement qui se mêle à l’ensemble : Serena et Kai cassent les pinces des homards orangés. Et par-dessus résonne le doux bruissement des feuilles de nori que Sofia coupe en deux. Ce tapis sonore s’accompagne du ronflement incessant du four et du murmure des huit cuisiniers qui se réunissent aujourd’hui avec un objectif commun : créer un menu aux saveurs harmonieuses pour les festivités du lendemain soir. Car à l’École d’Hôtellerie et de Tourisme de Diekirch, c’est la tradition. Quand après trois ans de formation, les élèves quittent l’école, leurs camarades plus jeunes, qui n’ont pas encore fini leurs études, cuisinent pour eux le jour de la remise des diplômes. Patrick Scholzen est au milieu de tout cela. Il dirige les opérations, donne des conseils, montre les gestes, et avec sa manière détendue de parler, malgré le tumulte, réussit à faire rire les visages concentrés.

En quête d’excellence « Dans nos cuisines, les élèves découvrent le stress de la vie professionnelle. Parfois, on cuisine sous la pression du temps, pression qui est omniprésente dans la vie. Et dans le quotidien professionnel, malgré

le stress, on attend de vous performance et résultats », explique Michel Lanners, le directeur de cette prestigieuse école. Il se tient dans le hall d‘entrée. L‘endroit où près de 300 élèves entrent et sortent quotidiennement chaque année scolaire. Près de sa tête s’affiche le blason de l’école fondée en 1949 : un lion à côté des lettres majuscules EHTL, pour École d’Hôtellerie et de Tourisme du Luxembourg.

Apprendre pour la vie Pourtant, selon Michel Lanners, cette école est bien plus qu’un endroit où l’on apprend les métiers classiques, comme l’hôtellerie ou la cuisine. « L’esprit de cette école réside dans le fait que nous enseignons l’hospitalité. Nos élèves apprennent à être attentifs, aimables, discrets et très réactifs. Ce sont des compétences que nous apprécions tous au contact d’autres personnes. Et qui permettent à nos élèves de choisir des branches très variées dans ce domaine ».

La porte du hall d’entrée s’ouvre soudainement, et les élèves entrent. Leur regard vers l’horloge laisse supposer que la prochaine heure de cours est sur le point de commencer. Les jeunes traversent le hall et s’engagent à pas rapides vers un long couloir. Ils rejoignent leurs camarades qui attendent la sonnerie mélodieuse de la cloche de l’école. Les élèves portent des costumes noirs et des cravates, d’élégantes tenues, des toques de cuisinier, des tabliers de service. Car à l’EHTL, ils doivent faire leur apprentissage dans des conditions réalistes, qui correspondent à leur futur quotidien professionnel dans l’industrie hôtelière et touristique. Et cela ne concerne pas seulement le code vestimentaire. Entre eux, ils se comportent avec courtoisie. Peu importe qu’ils soient pressés. Élèves et professeurs se saluent toujours dans les couloirs avec un sourire amical et un joyeux « Gudde Moien » ou « Bonjour ». La cloche sonne. Dans une grande salle, un groupe de jeunes gens se tient prêt devant huit tables dressées : nappes blanches, serviettes en tissu,

La réputation de l’École d’Hôtellerie et de Tourisme du Luxembourg est excellente. Son fondateur, l’hôtelier luxembourgeois Alexis Heck, était déjà considéré au milieu du 19e siècle comme un pionnier en matière de tourisme au Luxembourg.

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couverts et verres. La salle fait partie du restaurant d’application. Ici, les élèves apprennent à dresser une table, à servir les plats et les boissons. La leçon du jour : « servir de la soupe ». Quand on voit les élèves prendre de l’eau froide plutôt que de la soupe chaude dans la grande soupière argentée et la verser dans des assiettes creuses, on comprend qu’ici, on vient pour s’exercer. Quelques portes plus loin, une grande cuisinière trône au milieu de la pièce. Une bonne odeur

Serena Villani est déjà mordue d’hôtellerie. La raison principale : « J’aime beaucoup le fait que notre école soit si familiale », raconte-t-elle en souriant. Elle aussi rêve d’aller découvrir le monde, après ses études à l’EHTL. « J’ai envie de voyager et de pouvoir partager mes expériences ».

d’oignons fraîchement saisis s’échappe des casseroles et des poêles. Une vapeur blanche s’élève vers la hotte aspirante. Concentrés, les huit élèves, garçons et filles d’environ 16 ans, écoutent la voix de Lucien Kass. Le professeur de cuisine est en train d’expliquer à quoi faire attention quand on fait revenir des courgettes et des poivrons. « J’ai été moi-même élève ici, il y a des années », raconte-t-il, rayonnant, tandis que ses disciples se mettent à verser les légumes dans les casseroles qui sifflent. « Après mon diplôme, j’ai voyagé partout dans le monde en tant que personnel de service et cuisinier, et finalement, il y a vingt ans, je suis rentré et suis devenu professeur dans mon ancienne école, pour transmettre la joie de cuisiner. »

Grands rêves et pays lointains Serena Villani, une élève de l’école, rêve elle aussi de découvrir le monde après sa formation à l’EHTL. Un rêve dont elle se rapprochera lorsqu’elle sortira diplômée de l’École d’Hôtellerie et de Tourisme. D’autant plus si l’on se fie aux paroles du directeur de l’école, Michel Lanners : « Le succès de nos diplômés est énorme. Nous sommes très fiers de retrouver nos anciens élèves à des postes clés, des postes importants, de décision », raconte-t-il avant d’évoquer Caroline Esch, cette jeune cuisinière qui a ouvert son propre restaurant, Eden Rose, en 2019, à seulement 24 ans. Le restaurant se situe dans un parc, à Kayl, à une heure au sud de Diekirch. Partout, des objets

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décoratifs rappelant la rose, des couverts qui rayonnent d’un éclat mat, posés de manière précise près des assiettes. Au second plan, c’est la cuisine ouverte, dans laquelle l’équipe culinaire prépare les plats sous les yeux des clients. Exclusivement sans gluten, car depuis l’âge de 13 ans, Caroline ne supporte plus cette substance contenue dans la farine. Son souhait de trouver des alternatives au gluten est l’une des raisons qui l’ont poussée dès l’adolescence à choisir le métier de cuisinière.

La recette du succès Aujourd’hui, une dizaine d’années plus tard, son restaurant est le premier au Luxembourg à proposer une carte entièrement sans gluten tout en restant créative et variée. Et grâce à ses créations pleines de fantaisie, la jeune cuisinière a eu tant de succès qu’en 2021, elle a fait de nouveau rénover son restaurant. Et avec son fiancé, le cuisinier Valérien Prade, elle a peaufiné sa carte. Aujourd’hui, les clients de l’Eden Rose, vivent une véritable expérience sensorielle de haut niveau. Une note plus personnelle : une collection de vieilles cafetières et théières qui ponctuent le décor, presque toutes ornées de motifs floraux. Caroline se souvient en souriant du temps où elle était élève à l’École d’Hôtellerie et de Tourisme du Luxembourg, il y a une dizaine d’années : « C’est une très bonne école, qui offre d’innombrables possibilités à ses élèves ». Une diversité qui fait partie des raisons pour lesquelles le Luxembourg peut être fier de sa gastronomie.


Ancienne élève de l’EHTL, Caroline Esch a ouvert son propre restaurant en 2019, Eden Rose, à seulement 24 ans. Elle vient déjà d’être distinguée par le célèbre guide gastronomique Gault&Millau en tant que « découverte de l’année 2022 ».

Le restaurant Eden Rose se situe dans un parc, à Kayl, à une heure au sud de Diekirch. Derrière les baies vitrées de la remarquable façade en acier couleur rouille, une grande salle ayant pour concept la cuisine ouverte.

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The Good Life DU CHAMP AU VIGNOBLE

Le secret de la vigne d’or Depuis des siècles, les paysages de la Moselle sont marqués par la viticulture. Les Romains appréciaient déjà la valeur de ce terroir, situé au sud-est du Luxembourg. En visite au Cep d’Or, une entreprise familiale bien particulière. Texte THOMAS JUTZLER Photos ANDRÉ SCHÖSSER, THOMAS JUTZLER

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« La vie est trop courte pour boire du mauvais vin ! », aurait déclaré Goethe. Ce qui n’est probablement pas vrai. L’attribution à Goethe, du moins. Car le fait que la vie soit trop courte, naturellement, c’est vrai – surtout pour le mauvais vin ! Ce qui est vrai aussi, c’est que la vie est trop courte pour en fabriquer – du mauvais vin ! Et c’est pour cette raison – la fabrication du bon vin – que nous sommes dans la boue, au-dessus de Stadtbredimus. La terre glaise reste collée à nos chaussures. Autour de nous, quelque chose que j’aurais envie de nommer « champ » et pas « vignoble ». Car un vignoble, ça évoque les vignes aux raisins juteux qui s’alignent sous le soleil ! Cela évoque un certain romantisme et le plaisir de se trouver à la campagne. On pense aussi au jus doré dans de beaux verres. Mais en réalité, c’est plutôt cela : un énorme travail qui précède la beauté et la noblesse, un travail que l’on ne voit pas, un travail pénible et pas aussi romantique que se l’imaginerait le profane.

Quand on achète un vignoble, on ne peut pas penser en comptes trimestriels. On doit penser en décennies. Cette « école maternelle » de la vigne, devant laquelle nous nous trouvons, continuera d’être exploitée dans 25 ans. Ce sera Lisa qui en aura l’entière responsabilité, et son père, Jean-Marie, viendra sans doute parfois encore y jeter un coup d’œil et donner ses

Lisa Vesque a étudié l’œnologie à Geisenheim et à Bordeaux avant de rejoindre l’entreprise de son père en 2016. L’activité viticole de sa famille remonte au moins à 1762, mais à l’époque elle vendait les raisins après la récolte.

La patience porte ses fruits Alors, retour au champ boueux et à la fabrication du bon vin. Nous sommes au printemps 2021. Nous nous tenons avec Lisa Vesque et son père Jean-Marie devant une large surface brune et bombée, qui sera bientôt un nouveau vignoble. Nous regardons les bénévoles qui plantent à la main les nouveaux pieds de vigne. Il faudra attendre quelques années avant de pouvoir récolter des raisins dignes de ce nom. Et quand on sait cela, c’est encore plus émouvant. Ici, il est question de temps, de lenteur, d’horizon lointain, de dévouement et de confiance en la nature et ses pouvoirs.

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conseils bienveillants, que Lisa, tout aussi bienveillante, n’écoutera peutêtre pas. Un projet qui se transmet sur des générations. Voilà pourquoi père et fille se sont rendus ensemble en Champagne pour choisir ces nouveaux ceps. Quelques mois plus tard, en octobre : tôt le matin, le brouillard plane doucement au-dessus de la Moselle. Les vignobles prennent des reflets verts. Ici et là, sur les coteaux, s’immiscent des couleurs automnales. Les raisins sont gorgés de sucre et pendent en lourdes grappes entre les feuilles de vignes. La récolte bat son plein. Pas une seule machine. Sur les pentes raides qui enchâssent la Moselle, les raisins sont principalement récoltés à la main, et surtout nettoyés immédiatement. Sans cesse, on croise de petits tracteurs aux remorques débordant de caisses de raisins, essoufflés sur la route qui longe la Moselle. Comme les perles sur un collier, bon nombre des caves à vin du Luxembourg se succèdent sur la route du vin (« Wäistrooss » en luxembourgeois), qui serpente sur 42 km à travers le Grand-Duché. Parmi elles, le domaine du Cep d’Or.

Un cadeau des dieux La porte de la cave est grande ouverte. Nous entrons. Ça bouillonne, ça claque, ça grince, ça couine et ça écrase. Si on ne veut pas se salir les mains quand on travaille ici, c’est qu’on s’est trompé de métier ! Et en même temps, le mot « salir » n’est vraiment pas approprié. Car après tout, ce qui tache, ici, c’est le bon jus de treille ! Rayonnante de joie, un seau entre les bras, Lisa se tient parmi les étincelantes cuves d’acier

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et remue la levure. C’est la période la plus excitante de l’année pour une vigneronne. On récolte, on pressure, on fait macérer, on filtre, on décante, on mélange avec de la levure, on mesure, on refroidit, on goûte… Lisa est dans son élément. C’est clairement une bosseuse. Nous ne l’avons encore jamais vue autrement qu’en bottes en caoutchouc. Mais c’est

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Les nouveaux ceps sont plantés à la main. Il faudra quelques années avant de pouvoir récolter des raisins de qualité. Quand on achète un vignoble, on ne peut pas penser en comptes trimestriels. On pense en décennies.


aussi une artiste ! Car à la fin, ce qui advient des raisins, c’est véritablement de l’art, une science secrète qui transforme un simple fruit en grand vin. Un mystère. Le vin est un cadeau des dieux. En fait, ce n’est peut-être pas une science si secrète. Elle est même enseignée dans les universités. Lisa a étudié l’œnologie à Geisenheim et à Bordeaux avant de rejoindre l’entreprise de son père en 2016. À 29 ans, elle a environ l’âge qu’avait son père lorsqu’il a fondé le domaine. Certes, la famille Vesque était déjà dans la vigne depuis au moins 1762, raconte Jean-Marie, mais autrefois, elle vendait les raisins juste après la récolte. Les travailler, c’était le rêve de jeunesse de Jean-Marie. Que sa fille ait poursuivi ce même rêve le rend forcément ivre de joie.

Plaisir, art, travail, amour C’est à l’âge de 31 ans, en 1995, que Jean-Marie fonde son exploitation viticole. Il connaît un architecte, de dix ans son aîné, qui partage son enthousiasme pour le béton et pour les formes originales. C’est François Valentiny. Ensemble, ils conçoivent un bâtiment qui attire le regard. Cette construction est surmontée d’une tour qui évoque un pressoir à vin surdimensionné.

curiosité et, avec un peu de chance, l’envie d’entrer et de jeter un œil ! » Le plan doit avoir fonctionné. La cave est pleine à craquer. Les fûts en bois s’empilent. Les cuves en inox s’élèvent jusqu’au plafond. Quant au crémant, il vieillit tranquillement. La cuvée 36, comme son nom le laisse entendre, doit reposer pendant au moins 3 ans. Ce qui nous ramène à cette temporalité dans laquelle se situent le père et la fille. Enfin, il finit par se profiler, le romantisme qui nous manquait au printemps. Il est là, entre les fûts de bois tachetés de rouge rubis, les bouteilles aux reflets noirs étincelants et les caisses débordant de belles étiquettes qui attendent le jeune vin. Ses ingrédients : le plaisir, l’art, le travail et surtout… l’amour.

Vin et architecture  Vous aimez le bon vin et l’architecture audacieuse ? La route Via mosel’ vous présente les plus beaux villages viticoles et les plus beaux vignobles de la vallée de la Moselle « sans frontières », entre le Luxembourg, l’Allemagne et la France, connus pour la qualité de leurs infrastructures touristiques, mais aussi pour leur remarquable architecture, tant traditionnelle que contemporaine. Sur Internet, une carte interactive vous montre toutes les possibilités de visites viticoles et architecturales, selon vos goûts et le temps dont vous disposez. www.viamosel.com

C’est en 1995, à l’âge de 31 ans, que Jean-Marie fonde le domaine du Cep d’Or. Avec l’architecte François Valentiny, il conçoit un bâtiment remarquable, couronné d’une tour qui évoque un pressoir à vin surdimensionné.

Le bâtiment attire l’attention : « Quand on fonde un nouveau domaine viticole, mieux vaut se faire remarquer », s’amuse Jean-Marie. « Cette parcelle de terre qui longe la route du vin nous appartient, et ceux qui prennent ce chemin passent inévitablement devant notre cave. Un bâtiment aussi remarquable éveille la

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Outdoors Passion LES BOUCLES DE RÊVE : DES CHEMINS DE QUALITÉ PREMIUM

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Randonner sur les « Boucles de rêve », dans la région Moselle, donne l’impression de vivre un rêve éveillé, tant les trois sentiers labellisés premium sont divers et d’une beauté irréelle. Et chaque petit village de vignerons invite à une halte gourmande. Texte THOMAS JUTZLER

Photos ANDRÉ SCHÖSSER, THOMAS JUTZLER

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Prairies, vergers et surtout une forêt de ravin longeant la petite rivière Syre, c’est ce qui fait de la boucle de rêve « Manternacher Fiels » un vrai sentier de découvertes.

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Les trois boucles de rêve luxembourgeoises ont été estampillées « sentiers de qualité premium » par l’Institut allemand de la randonnée. Il y a donc ici beaucoup à voir, à découvrir et à vivre.

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Les boucles de rêve conduisent souvent sur des chemins étroits, en pleine nature, longeant d’idylliques cours d’eau et d’imposantes formations rocheuses, et elles offrent de fantastiques panoramas.

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« L’élan, c’est forcément la Finlande. Oh ! J’ai trouvé des sabots : c’est la Hollande ! » – les enfants qui courent entre les piliers ornés de sculptures miniatures représentant tous les pays d’Europe sont d’humeur exploratrice. Devant le musée Européen, les drapeaux des États membres flottent au vent. Nous sommes à Schengen, le point de départ de l’une des « Boucles de rêve » luxembourgeoises, ces chemins de randonnée qui longent la Moselle. Les trois circuits ont été certifiés premium par l’Institut allemand de la randonnée. Il y a donc beaucoup à voir, à découvrir et à vivre sur ces boucles de rêve, des chemins souvent étroits, en pleine nature, longeant d’idylliques cours d’eau et d’imposantes formations rocheuses, qui passent aussi par de vieux escaliers au milieu des vignobles et offrent de fantastiques panoramas. Le chemin de Schengen est littéralement un poste frontière. Rapidement, sans même s’en apercevoir, on se retrouve en France tout en regardant vers l’Allemagne, de l’autre côté de la Moselle qui serpente au milieu des vignobles en coteaux. Sur le plateau du « Strombierg », on est plongé dans une nature sauvage où l’on arpente des amas rocheux escarpés. Tout en bas, la Moselle prend la forme d’un large ruban. Et soudain, on se retrouve en France. C’est ainsi que nous aimons l’Europe : sans frontières. Le retour vers le Luxembourg se fait par des chemins étroits et sauvages à travers des collines allongées et des terres agricoles fertiles.

un vrai sentier de découvertes. Au niveau d‘un barrage, nous sautillons de pierre en pierre sur une échelle à poissons. Nous pataugeons pieds nus dans l‘eau peu profonde et observons les oiseaux qui sortent des talus de la rive pour aller boire de l‘eau. De temps en temps, on entend le bruit d’un train qui traverse la vallée et vient rompre le silence.

Dissimulé dans la forêt Le long d’abruptes parois calcaires, à travers une forêt de feuillus, le paysage se dégage brusquement sur des vignobles en espaliers, au milieu de ce bois. Comme si la colline s’était trompée de chemin, les vignes sont encadrées par le vert dense des arbres, sous un mur de roche protecteur. Le vignoble est très soigné et l’on voit bien qu’il est encore exploité, malgré son emplacement pour le moins insolite.

Nous quittons ce lieu invraisemblable et quelque peu irréel et rejoignons l’étroite vallée fluviale du « Schlammbach » en franchissant des marches de pierre, bancales et de guingois, jusqu’au plateau de Lellingen. De là, la vue est dégagée jusqu’à la vallée de la Moselle, et l’on savoure ce moment avant de revenir à Manternach en empruntant un chemin de coteaux bordé de vieux murets délimitant les vignobles, où l’on croisera ici et là quelques moulins en ruine. Si on le laisse pousser, le buis prolifère sans retenue. Dans un climat aussi doux que celui de la Moselle, les petits arbustes de buis sauvage résistent bien

Le sentier de Schengen est littéralement un poste frontière. Rapidement, et sans même s’en apercevoir, on se retrouve en France tout en voyant l’Allemagne, de l’autre côté.

Située un peu à l’écart de la Moselle, la boucle « Manternacher Fiels » est vraiment différente et offre une encore plus grande variété de paysages : elle permet de traverser des prairies et des vergers mais aussi une forêt de ravin longeant la petite rivière Syre. C’est

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À l’entrée du village de Ahn, on trouve un labyrinthe en forme d’escargot, fait de haies parfaitement taillées. C’est, en quelque sorte, comme une petite boucle de rêve supplémentaire.

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Le labyrinthe de buis : un monde magique plein de secrets qui attend le randonneur. Celui-ci doit bien faire attention à son chemin ! S’il le suit attentivement, il pourra sentir en lui comme une transformation. 105


Où peut-on encore aller ?  Savourez la vue ! Le long de la Moselle, les panoramas époustouflants ne manquent pas ! Entre Stadtbredimus et Greiveldange, sur le « Scheierbierg » à Remich, au sommet du vignoble « Wormer Koeppchen » ou au « Deisermillen » à Machtum. www.visitmoselle.lu  La réserve naturelle «A Wiewesch » est entourée de vergers et ne se situe qu’à quelques centaines de mètres de la plus grande forêt de ravin du Grand-Duché, le « Manternacher Fiels». www.visitmoselle.lu

La promenade de la Moselle à Schengen : en regardant bien, on pourra reconnaître sur les colonnes des nations européennes, des éléments typiques de chaque pays en miniature.

Sous les palmiers

lui-même, l’arbuste pousse en prenant des allures de sapin de Noël. Tout alentour est vert foncé. Les petites feuilles luisent au soleil. En lisière de forêt, on trouve encore d’anciens vignobles à l’abandon où prospèrent les orchidées sauvages, telles que l’orchis mâle ou l’orchis verdâtre. Parfois, on entend siffler les lézards qui se faufilent dans les interstices d’un vieux mur de pierres sèches.

On prétend qu’il s’agirait de la forêt de buis la plus septentrionale au monde et qu’elle pousserait sur les vestiges d’une villa romaine. La villa a disparu. Le buis est resté. Et la vigne aussi. Cultivée tout d’abord par les Romains, elle façonne le paysage de la Moselle.

Là où, aujourd’hui, ces boucles de rêve invitent à la randonnée, on trouvait, il y a 225 millions d’années, des fonds marins de calcaire coquillier. Le temps est relatif. En observant attentivement, il est possible de découvrir des fossiles d‘anciennes créatures marines dans l‘un ou l‘autre morceau de roche.

Bonjour, la boucle de rêve du « Sentier Vin & Nature Palmberg Ahn » ! On poursuit le chemin le long de claires falaises calcaires en grimpant dans les vignobles en coteaux. Là où le buis n’est plus taillé mais livré à

Enfin, on plonge dans la forêt du Donverbach, qui est en partie enfouie dans la roche. Le lit du ruisseau est parsemé de gros amas de pierres qui donnent à ce petit cours d’eau des airs de torrent de montagne. Un cincle plongeur vole juste au-dessus de l’eau. Plouf, il plonge tête la première pour aller pêcher sa nourriture. Un autre se pose sur un caillou de la berge en faisant de petits mouvements ininterrompus de haut en bas, comme s’il voulait encourager son collègue.

et, du côté de Ahn, ils couronnent la colline du « Palmberg ». C’est à eux, d’ailleurs, qu’elle doit probablement son nom. En effet, le dimanche des Rameaux, on utilise traditionnellement le buis pour remplacer les branches de palmiers. D’où le « Palmberg », littéralement « Mont des palmiers ».

On suit le ruisseau et une fois la forêt devenue moins dense, on chemine de nouveau parmi les vignes, au-dessus du village. Avant de décider quelle cave choisir pour un petit verre de Crémant bien mérité, on pourra s’octroyer le plaisir de suivre le panneau qui mène au labyrinthe. C’est, à l’entrée du village, un chemin de haies parfaitement taillées en forme d’escargot, où l’on entre pour se perdre. L’espèce végétale choisie… du buis, bien sûr. Comme une petite boucle de plus.

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Depuis l’époque romaine, le buis prospère sur le « Palmberg », près du village de vignerons de Ahn. Sauvage, il pousse en petits buissons dans une forêt insolite qui couronne un excellent vignoble. À découvrir sur la boucle de rêve intitulée « Sentier Vin & Nature Palmberg Ahn ».

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The Good Life VACANCES A LA FERME

Naturellement bien Faire l’expérience directe du travail et de la vie à la ferme. Sentir la terre. Respirer l’air de la campagne. Aller chercher les œufs du petit déjeuner au poulailler. Les vacances à la campagne sont un excellent moyen de se détendre. Texte ANTONIA STEINES Photos ANDRÉ SCHÖSSER

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Un linge soyeux recouvre le paysage. Un léger voile de brume s’étire sur les collines et enveloppe les troncs d’arbres des vergers. Noueux, les arbres fruitiers se partagent l’étroite bande qui sépare le chemin et le pré d’une vieille clôture biscornue, érodée par le temps. Une vapeur épaisse sort des naseaux de la vache Angus, noire de jais. Elle nous observe avec curiosité, en ce début de matinée à Fromburg, dans le Mullerthal.

Sous le regard un peu blasé des vaches, je tire sur un épais brin d’herbe vert foncé. Et je me retrouve avec un oignon de couleur cuivre dans la main, auquel est encore attachée une petite motte de terre. Quel parfum ! Celui frais et astringent de l’oignon, mélangé à l’arôme de la terre. Banal, en somme. C’est le parfum de l’oignon. Mais tout de même. Si l’on n’est

Les vacances à la ferme sont destinées à ceux qui n’ont pas peur de se salir. Jardiner en plein air, c’est recréer du lien avec la nature. Ici, s’ancrer, c’est littéralement avoir de la terre sous les ongles.

La vie à la campagne Nous nous rendons chez les éleveurs de bovins. Christiane et Jeff Weydert se sont rencontrés pendant leurs études. En 2016, ils ont décidé de reprendre l’exploitation des parents de Jeff. « Nous sommes tous les deux très proches de la nature, et nous sommes donc heureux et reconnaissants de pouvoir vivre au milieu de la nature. Pour nous, c’est un privilège de cultiver ce beau bout de terre, de le préserver et de le porter vers l’avenir ». C’est ce qu’ils ressentent. Afin de pouvoir partager cet état d’esprit avec d’autres, ils gèrent désormais une partie de leur ferme en AMAP, association pour le maintien d’une agriculture paysanne (SOLAWI en allemand pour agriculture solidaire). Plus de 50 espèces végétales différentes sont cultivées ici, à la ferme de Fromburg, à Osweiler : fruits, herbes aromatiques, baies, fleurs, légumes… Les membres de l’AMAP peuvent récolter tout cela directement dans les champs ou les serres. Et tout le monde peut devenir membre. Aucune obligation de travailler dans les champs… mais la permission de le faire. Et même les résidents des locations de vacances sont invités à jardiner.

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pas habitué au cycle de la plantation et de la récolte, c’est exaltant de déterrer le fruit d’un champ. La ferme de Fromburg est un peu en hauteur. Si l’on regarde vers l’est, on aperçoit de douces collines. La Moselle doit se trouver là-bas, dans la vallée, derrière la dernière crête. À l’ouest s’étendent de grandes surfaces boisées. Si l’on avance sur le chemin de terre, derrière les potagers, on se voit avalé par les arbres et recraché plus tard dans les forêts de ravins et les crevasses de grès du Mullerthal.

Abondance et richesse Nous tapons la terre des champs de nos chaussures de marche et avançons sur un chemin ensoleillé en direction de la forêt. Les vaches Angus ne semblent pas se soucier de notre départ. Quelques poules nous courent après. Elles sont habituées à ce que les humains les nourrissent et elles quémandent en caquetant. C’est très drôle de les voir zigzaguer derrière

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nous, l’arrière-train frétillant. Un dernier et bref battement d’ailes et elles finissant par accepter, du moins pour le moment, qu’il n’y a rien à attendre de nous. Et elles nous laissent partir. Dans les herbes hautes, nous découvrons des ruches bourdonnantes. Loin au-dessus de nous, un oiseau de proie fait sa ronde, à la limite des nuages. Maxi, le chien de la ferme, renifle rapidement les jambes de notre pantalon. « Ah, mais je les connais déjà, allez-y », semble dire son regard soudain lassé. Enfin, nous atteignons le Mullerthal Trail. Ce trail parcourt la région de la petite Suisse luxembourgeoise sur trois grands axes circulaires et a reçu le label « Leading Quality Trails – Best of Europe ». Crevasses, forêts, vallées baignées de lumière, petits cours d’eau… il y aurait beaucoup à découvrir. Aujourd’hui, nous ne fai-

Sur le domaine de Christiane et de Jeff Weydert, « Hof Fromburg », on peut passer des vacances en découvrant ce qu’est la vie à la ferme.

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Séjourner à la campagne  Le « Geyershof » est un complexe situé sur un grand domaine agricole, dans un lieu calme, à 5 km d’Echternach, avec un espace de jeu couvert pour les enfants. www.geyershof.lu  Le « Roudenhaff » propose des locations de vacances et un espace bien-être tout confort, dans un paysage magnifique, avec vue sur le lac d’Echternach, autour duquel on peut faire de belles balades. Et le Mullerthal Trail n’est qu’à quelques pas. www.meyer-ernzen.lu  Au nord du pays, le « Robbesscheier », à Munshausen, invite à un séjour bucolique. Le centre consacré à la nature propose également des possibilités d’hébergement, avec différentes catégories d’expériences autour de la vie rurale. www.robbesscheier.lu  Les gîtes de Wellenstein sont d’anciennes maisons de vignerons rénovées, au centre du village. L’histoire du vin à découvrir en direct de la Moselle. Dans le même village, se trouve le gîte « Yolande’s Barn », situé près du musée « A Possen ». On peut aussi envoyer une carte postale depuis la ferme, avec un timbre unique, dédié au tourisme rural, si beau qu’il a même reçu un prix. www.gites.lu


sons qu’un petit bout de chemin, sous les ramures des hêtres, car ce soir, un événement particulier nous attend.

La région des plaisirs Cette journée à la campagne s’achève sur un repas de fête. C‘est probablement en cuisinant avec les gens que l‘on s‘imprègne le plus profondément de la culture et de la mentalité d‘un pays. Mais aussi en mangeant avec eux, naturellement. Jeff a invité des amis. Philippe, qui a suivi une formation de cuisinier, nous lance des instructions dans la joie et la bonne humeur. Nous préparons des burgers Angus et des « Wäinzoossiss mat Moschterzooss », c’est-dire les fameuses saucisses au vin et à la sauce moutarde. Bien entendu, tous les ingrédients proviennent de la ferme. Et nous voulons aussi faire des « Gromperekichelcher », galettes de pommes de terre. Certes, les pommes de terre sont encore sous terre, mais les enfants de notre groupe se chargent d’aller les récolter dans des clameurs joyeuses. On croirait qu’une horde de chercheurs d’or est au travail. Salade, tomates, carottes : les autres ingrédients du burger passent directement du champ à la table. Impossible de trouver plus frais. Nous transformons ce que le sol nous offre au milieu des champs et des prairies. Un vieux baril de pétrole avec un énorme anneau de fer sert de barbecue. Nous le chauffons bien fort. Sur un petit promontoire se dresse un four à pizza en briques. Au cas où quelqu’un aurait encore une petite fringale. Improbable. Et pourtant : il y a toujours de la place pour une pizza. Sacré programme ! Véritable festin ! Le jour décline et le silence est

frappant. Plus un caquètement, plus un bourdonnement, les vaches sont calmes, le chien dort. Aucun signe de civilisation. On n’entend plus que le son des conversations des invités. Et le chant des grillons. On peut dire à juste titre que la graine a germé. L’idée d’intéresser les citadins à la vie rurale. Nous sommes parfaitement rassasiés ! www.fromburg.lu

Un vieux baril de pétrole avec un énorme anneau de fer sert de barbecue pour cuire les « Gromperekichelcher » (galettes de pommes de terre), une spécialité typiquement luxembourgeoise. Les pommes de terre fraîchement ramassées doivent encore être épluchées et râpées par Philippe.

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Outdoors Passion L’AVENTURE EN GRAVEL BIKE

Les fous du vélo Après quatre escapades de plusieurs jours à vélo à travers le Luxembourg, nous avons découvert que ce pays était une merveilleuse destination pour les adeptes du « Gravel » ! Nous avons emprunté aussi bien des chemins de terre que des pistes cyclables et nous avons cartographié d’innombrables chemins jusque-là non balisés, pour établir de nouveaux parcours. Et puis nous avons très bien mangé et apprécié le confort et l’hospitalité des hébergements labellisés « bed+bike » du Luxembourg. Texte LOEK LUIJBREGTS & NOL VAN LOON Photos FATPIGEON.CC

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Comme de nombreux cyclistes, nous aimons découvrir de nouveaux chemins, les emprunter et en parler aux autres. Nous voulions capturer l’esprit du vélo au Luxembourg : une aventure cycliste du nord au sud ! Nous sommes partis du point le plus septentrional pour arriver au point le plus méridional du pays : en tout, 127 kilomètres et 1770 mètres de dénivelé. Notre aventure a donc commencé dans les Ardennes, pour nous conduire vers le Mullerthal, à travers les douces collines du Guttland au centre du pays, dans les vignobles de la Moselle et s’est terminée dans le Minett ou Terres Rouges dans le Sud.

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Le Luxembourg offre tous les ingrédients pour un voyage à vélo riche en émotions et entre amis. Collines, sentiers bien aménagés, chemins de terre en tout genre, châteaux médiévaux et cours d’eau pittoresques en font le charme. Ce qui nous a fascinés, c’est qu’entre les villes et les villages, le pays regorge de forêts denses. Dès que l’on pédale quelques minutes dans la verdure, on se retrouve au milieu d’une nature vierge. Nous avons vu des sangliers et des cerfs traverser les chemins et c’est exactement ce que l’on veut voir dans une forêt. Comment oublier cela ?

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Au Luxembourg, il ne faut pas grand-chose pour passer un bon séjour, qu’il soit orienté sport, nature et faune, histoire et culture. Le seul prérequis : avoir un programme en tête. Lors de notre premier voyage, le nôtre était de conquérir des chemins de terre vallonnés, de maîtriser des descentes un peu abruptes, mais aussi d’explorer des châteaux médiévaux.

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Collines, vignobles, panoramas et bons petits plats locaux accompagnés de breuvages du pays... quoi de plus séduisant ? Ah si ! Partir en août, quand il n’y a presque aucune circulation sur les itinéraires cyclables du « Vëlosummer ». C’est le moment idéal pour découvrir à deux roues certaines régions du Luxembourg. Nous avons opté pour le chemin historique « Mam Jangeli bei d’Kätti », qui suit l’ancien chemin de fer Jangelisbunn, de Remich à Mondorf. Un petit détour par-ci, un petit virage par-là : et c’est ainsi que nous avons atterri sur notre propre chemin, dans les vignobles luxembourgeois. Cela aurait pu être pire…

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© LFT 2022 Tous droits réservés. Toute utilisation ou reproduction, totale ou partielle, est strictement interdite sans autorisation écrite au préalable de l‘éditeur. ISSN 2716-7313

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Rédaction Birgit Pfaus-Ravida Franck Dall Frederike Höhn Lilly Hütter Thomas Jutzler Loek Luijbregts Sarah Pitt Antonia Steines Nol van Loon Photographes Pancake! Photographie (Cover) Fatpigeon.cc Hadrien Friob Thomas Jutzler Renata Lusso Alfonso Salgueiro Benny Schiltz André Schösser Andreas Weise Mike Zenari Autres photos publiées avec l‘accord des partenaires Traductions & Corrections Cécile Balavoine Rachel Ezard John-Paul Gomez Birgit Pfaus-Ravida Sarah Pitt Hélène Rybol Lektornet why vanilla? Zenter fir dʼLëtzebuerger Sprooch

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Vous trouverez dans l’application (gratuite) VisitLuxembourg beaucoup d’autres « Inspiring Travel Stories from Luxembourg » et la bande-son correspondante « Sound of Luci ».


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