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LES ORIGINES DU FESTIVAL DE CANNES

dres de la guerre de la volonté de voir rayonner la Croisette et en même temps une certaine idée du cinéma.

La toute première édition se passera de marches, mais dès 1947, le tout premier Palais des festivals contribuait à pérenniser le plus grand rendez-vous du cinéma en France.

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Détruit plus tard, dans les années 1980, sans susciter l’émotion généralisée qu’il aurait pourtant mérité, cet édifice charriait en fait toute une histoire du cinéma en France.

Or cette histoire devra tant au mouvement ouvrier que l’historien Tangui Perron parlera même du Festival de Cannes comme de “l’enfant tardif du Front populaire”.

N’était-ce pas “La Bataille du rail”, le film de René Clément à la gloire de la résistance des cheminots contre Vichy et l’occupant, qui avait inauguré le palmarès en raflant la toute première Palme d’or, en 1946 ? Si le festival, et son palais, avaient pu voir le jour si peu de temps après la fin de la guerre, c’est qu’en réalité le projet de Festival était dans les cartons de l’union de la gauche depuis les années Trente.

Construire un palais moins de deux ans après la Libération avait tout d’une gageure.

Les matériaux, alors, se faisaient rares et dans cette économie(suit page4) (suit de la page 3) de la pénurie, aller jusqu’en Corse récupérer du bois pour transporter quatre poutres de 80 tonnes et de taille inédite, propres à supporter l’édifice, n’allait pas de soi. Seule l’obstination de fédérations comme celle du bâtiment, et la mobilisation, locale et nationale, des réseaux de la CGT, avait permis de contourner l’écueil.

Plutôt que faire le deuil d’un rendez-vous manqué, une kyrielle d’acteurs aujourd’hui tombés dans l’oubli avaient au contraire mis les bouchées doubles et réactivé ce projet de festival né du vœu de damer le pion au fascisme.

C’est en effet dans les années Trente, alors que la gauche française entendait répliquer à Mussolini et à la Mostra de Venise, acquise au fascisme, que le projet du Festival de Cannes avait mûri.

Le mouvement ouvrier, d’abord réticent devant la promesse des réjouissances populaires du cinématographe, avait fini par épouser le cinéma sur le tard : inventé la même année précisément que la CGT, en 1895, le cinéma n’avait plus cette réputation débilitante que syndicat et Parti socialiste avaient pu lui trouver à ses débuts, tandis que les grandes organisations redoutaient encore que le grand écran ne détourne leurs ouailles de la cause. Au point même que des salles de projection dédiées aux ouvriers ava- ient vu le jour, chez les verriers d’abord, à la date si précoce de 1905, sous la houlette de la CGT dans le Nord-Pas-de-Calais, puis ailleurs en France, entre les deux guerres.

Le septième art faisait même si bien le plein dans le monde ouvrier qu’en 1911, c’est à Limoges qu’il fallait aller pour découvrir la deuxième plus grande salle de cinéma du pays, juste après le Grand Rex à Paris: ouverte dans ce qui s’appelle aujourd’hui la rue des Coopérateurs, autrefois rue de la Fonderie, c’était le Ciné-Union, justement né dans le giron de la grande société coopérative de la porcelaine, l’“Union de Limoges”.

L’Union avait rêvé de cinéma en même temps que d’une salle des fêtes et d’un lieu où tenir ses assemblées générales.

Une histoire anti-fasciste

En 1932, la Mostra de Venise avait vu le jour en Italie, où Mussolini était au pouvoir depuis déjà une décennie.

Six ans plus tard, deux membres du jury en claquaient la porte pour protester contre l’emprise du cinéma de propagande.

De l’autre côté des Alpes, en France, l’idée d’un festival concurrent et résolument anti-fasciste se frayait un chemin de plus belle, sous les auspices du Front populaire et en particulier du ministre Jean Zay, alors aux Beaux-Arts.

En 1939, le Festival avait failli voir le jour à Cannes, bien que Daladier, par exemple, ait eu un faible pour Alger et le charme de son administration coloniale.

Mais juste avant que la guerre n’éclate, le projet s’était enraciné à Cannes à mesure qu’ailleurs le fascisme avait gagné du terrain : la municipalité s’était montrée particulièrement motivée, et prête à mettre de l’argent pour accueillir la manifestation.

En 1945, Cannes et les Cannois l’étaient toujours, même si, trois ans plus tôt, tout le matériel de projection initialement accumulé avait fini par être bradé, en 1942.

Au même moment précisément, le casino rouvrait tandis qu’à deux pas, on donnait des cours de langue allemande.

En 1947, le Palais cannois était finalement inauguré, tandis qu’une ancienne résistante FTP, la veuve d’un résistant communiste mort au combat, retouchait la robe d’une actrice et qu’un ébéniste œuvrait jour et nuit à la décoration d’un char.

Le palais lui-même avait été bâti en quatre mois à peine et c’est dire la motivation populaire qui accompagnait la naissance du festival.

Cette mémoire collective et locale est à présent largement émoussée, tandis qu’entre-temps, dans les années 1970 et 1980, le cinéma a largement mué, et que le festival désormais oscille entre glamour sponsorisé et budgets gros calibres.

À l’exception de quelques travaux d’historiens comme ceux de Tangui Perron, seules des interviews dans la presse régionale ou le journal L’Humanité, souvent à l’occasion d’anniversaires à chiffres ronds du festival, sont longtemps venus disséminer cette histoire bis du cinéma, à la manière de petits cailloux dérisoires dans la chaussure des grosses productions.

Dans les années 1920, pourtant, les grands studios de cinéma avaient pris le bouillon et Pathé et Gaumont, par exemple, avaient fait faillite. On a souvent oublié qu’à l’époque, la CGT avait sauvé des films, ou en avait financé d’autres, notamment sous l’élan impulsé par un certain Robert Jarville, militant cégétiste qui justement avait fondé le Syndicat général des travailleurs de l’industrie de film - et entretemps, supprimé sa particule alors qu’il était né, Robert de Jarville, dans une famille aristocrate à des années-lumière du cinéma soviétique dont il se fera l’un des grands passeurs en France.

Dès 1913, la CGT s’était ainsi lancée dans la production cinématographique.

Il en allait évidemment du souci de porter la bonne parole grâce à ce divertissement de masse, mais pas seulement : retrouver la centrale syndicale derrière deux films de Jean Renoir aussi célèbres que “La Vie est à nous” (en 1936) ou “La Marseillaise” (en 1939), c’est aussi prendre la mesure d’une histoire industrielle derrière les chefs-d’œuvreou les cotillons.

La Marseillaise, justement, qui racontait la gloire de 1789 dans le Midi, avait été en partie financée par une souscription (suit page 6)

(suit de la page 5) lancée par la CGT auprès de ses adhérents. Sur le tournage, tous les ouvriers et les techniciens étaient affiliés à la CGT. La souscription, en réalité, s’était soldée par un semi-échec et le projet de Jarville de nationaliser le cinéma français fera long feu, mais l’initiative rappelle combien le syndicat s’investissait déjà dans le septième art, dix ans avant de co-fonder le Festival de Cannes.

Les ouvriers du secteur n’avaient pourtant pas adhéré en force aux premières heures, et il avait fallu convaincre pour recruter, tandis qu’à la même époque, dans le monde du spectacle, les musiciens ou même le monde du théâtre s’étaient mobilisés plus rapidement, et plus massivement.

Mais trois autres films, outre ceux de Renoir entre-deux-guerres, témoignent bien d’une alliance tardive et obstinée: c’est à cette époque que des fédérations comme celle de la métallurgie, des cheminots ou du bâtiment produisent des films comme, en 1938, “Les Métallos”, de Jacques Lemare, ou, la même année, “Les Bâtisseurs”, de Jean Epstein, un réalisateur polonais - qui sont autant de commandes de l’époque du Front populaire que vous pouvez désormais visionner ici.

Sitôt le Festival de Cannes fondé, l’empreinte de la gauche et de ses orga- nisations dans le monde du cinéma demeurera palpable durant plusieurs décennies.

Par exemple lorsqu’en 1948, un taxe de 10,7% sur les places de cinéma était négociée, ou encore cinq ans plus tard, en 1953, alors que le dispositif de l’avance sur recettes sera gravé dans le marbre.

À chaque fois, le combat est aussi syndical à une époque où la Fédération du spectacle compte près de 40 000 adhérents.

Le statut des intermittents, signé en 1969, ou la préférence des cinéastes de la Nouvelle vague pour les extérieurs qui déportent les tournages hors des studios et coupent alors l’herbe sous le pied de plus d’un technicien de plateau, grignoteront toutefois peu à peu la marge de manœuvre de l’organisation syndicale sur le secteur du cinéma, qui mute en profondeur à la même époque.

Un “Bureau du cinéma” émergera certes dans le giron cégétiste dans l’après-mai 68, d’où écloront plusieurs films qui resteront au palmarès du cinéma militant. Mais ni Jean-Paul Belmondo, ni Michel Piccoli, qui présideront l’un après l’autre le Syndicat des acteurs français, sous tutelle de la CGT, n’étaient par exemple adhérents du Parti communiste français.

C’est même à ce moment-là justement que Piccoli a creusé sa distance avec le giron communiste.

Or si Belmondo ne passait pas pour une figure engagée loin s’en faut, le second, qui disait explicitement la haine qu’il vouait au capitalisme et sera de bien des combats à gauche, se tiendra à bonne distance des grandes figures communistes du monde du spectacle. Des “arrivistes”, pouvait-il parfois lui arriver de décocher, assassin - ou kamikaze.

En lisant les souvenirs d’Alain Krivine, parus chez Flammarion en 2006, on apprenait qu’avec Juliette Greco, qu’il avait épousée, Michel Piccoli avait hébergé à domicile, rue de Verneuil, des dirigeants trotskistes dont Krivine, lorsque ceux-ci furent recherchés par la police, dans les années 1970.

Et c’est lui encore qui s’était porté garant pour que la Ligue communiste révolutionnaire obtienne un prêt, quand il avait fallu convaincre les banquiers et acheter une rotative pour faire du journal Rouge un quotidien. A l’époque, Michel Piccoli avait mis dans la balance et en caution bancaire un petit studio qu’il possédait, rue-Monsieur-Le-Prince, dans le chic VIe arrondissement sur les flancs de l’Odéon.

A la mort du grand acteur, en 2020, des militants du NPA s’en étaient souvenus, reconnaissants. Mais c’est bien à un réalisateur communiste, Louis Daquin (dont on pouvait écouter une archive de 1957 dans Concordance des temps sur France Culture en 2013), que Michel Piccoli devra son premier grand rôle au cinéma. C’était dans le film “Le Point du jour”, en 1949, ou l’histoire d’une mine dans le Nord, au tournant du XXe siècle.

Chloé Leprince https://www.radiofrance.fr/franceculture/a-l-ombre-de-la-croisette-l-histoire-communiste-meconnue-du-festival-de-cannes u’est-ce qui a poussé Arthur Rimbaud, fort jeune, à embrasser la poésie ? Comment expliquer que, à l’âge de quatorze ans à peine, il s’est déjà montré si original et si inventif ?

A quoi tient son génie poétique ?

Au fait qu’au collège, à Charleville, il a été un écolier surdoué, capable d’écrire des dizaines de vers en latin, presque sans le moindre effort, et de réciter par cœur Virgile ou Ovide, exactement comme d’aucuns récitent les fables de La Fontaine?

Peut-être.

Au fait que, bien qu’il fût cet écolier surdoué, il s’est toujours senti malheureux au collège et qu’il n’a jamais aimé Charleville, cette jolie cité où il a vu le jour, le 20 octobre 1854 ?

Peut-être.

Au fait qu’il n’avait pas encore cinq ans quand son père, Frédéric Rimbaud, militaire de carrière, a soudain pris la poudre d’escampette pour aller se terrer Dieu sait où et qu’il a laissé à sa pauvre femme tout le poids de l’éducation de leurs quatre marmots, lui, Arthur, son grand frère et ses deux petites sœurs?

Peut-être.

Au fait qu’il a seulement été élevé par sa mère, Vitalie Cuif, condidérée par tous comme acariâtre, intraitable, dictatoriale, dominatrice et terriblement bigote, et qu’elle n’était jamais que l’héritière d’une lignée de paysans ignares et pétris d’avarice ?

Peut-être.

La suite du questionnement sur le génie d’Arthur Rimbaut lors d’une prochaine publication...

Peut-être

“ Cent Poèmes d’Arthur Rimbaud”

Jean-Baptiste Baronian a plus belle chose est ce qu’on aime”

: poème d’amour de Sappho

Sapho de Lesbos, une figure enveloppée de mystère qui s’estompe maintenant dans la légende.

La poétesse grecque, chanteuse absolue de l’amour, est devenue presque une créature mythologique comme Homère: une entité insaisissable, dispersée et insaisissable à l’image de ses vers, capable de traverser l’espace et le temps en nous parlant avec une langue immortelle.

La légende raconte qu’elle s’est jetée d’une falaise par amour, d’après ce que nous raconte le poète latin Ovide dans les Héroïdes. Une fin mystérieuse, peut-être pas vraie, mais certainement digne de celle qui fut la maîtresse de l’amour. L’éloge de la passion amoureuse est le thème récurrent de divers poèmes de la poétesse, comme dans le fameux seizième fragment dédié à la jeune Anattoria, plus connu sous le titre La plus belle chose. Découvrons-en plus sur le poème de Sappho et la signification du seizième fragment.

Qui était Sapho ? Nous n’avons aucune information certaine sur sa vie.

On sait qu’elle est née à Ereso, sur l’île grecque de Lesbos, vers 650 av.

Elle perdit son père alors qu’elle n’était encore qu’une enfant et, encore très jeune, fut donnée

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