5 minute read
Décryptage : crédit carbone de quoi parle-t-on ?
from Terre-net Le Magazine n°94
by NGPA
REPÈRES Décr yptage
En trente ans, la concentration de carbone dans l’atmosphère a augmenté de 45 %. La production agricole, et notamment la fertilisation minérale azotée, y a contribué.
Par Par NOM SÉBASTIEN DUQUEF mail sduquef@terre-net-media.fr
PIXABAY
CHANGEMENT CLIMATIQUE Crédit carbone : de quoi parle-t-on ?
+ 45 % de gaz à effet de serre dans l’atmosphère en trente ans ! L’agriculture a sa part de responsabilité, alors en changeant ses pratiques, elle pourrait inverser la vapeur et stocker du carbone dans le sol. Les crédits carbone sont revendus aux industriels peinant à réduire leurs émissions, ce qui finance la transition agroécologique.
L’idée du crédit carbone est apparue à la fin des années 1990. La plupart des pays élaboraient alors le protocole de Kyoto, premier traité mondial sur le changement climatique visant à définir les limites d’émissions de gaz à efet de serre (Ges) et à mettre en place un mécanisme pour simpliier les déclarations, les échanges et les contrôles. Des quotas étant émis par les Nations Unies. Depuis, ceux qui réduisent leurs émissions de Ges créditent des tonnes de carbone. Chaque crédit carbone est une sorte de certiicat attestant que le projet évite l’émission de l’équivalent d’une tonne de dioxyde de carbone (tCO2e). Les agriculteurs faisant évoluer leurs pratiques peuvent créditer des certiicats et les vendre.
1Qu’est-ce qu’un crédit carbone ? La compensation carbone cherche à contrebalancer les émissions, soit en éliminant une partie du dioxyde de carbone déjà présent dans l’atmosphère, soit en limitant les futures émissions. Chaque projet s’accompagne d’un crédit carbone, un document certiiant la suppression d’une tonne de CO2. Des entreprises sont prêtes à compenser volontairement leurs émissions. Il n’existe pas d’obligation légale, mais la démarche les intéresse. Elles achètent donc des crédits carbones
aux autres, comme les agriculteurs, et les accompagnent dans leur transition agroécologique.
2Comment est-il calculé ? Mettre un prix sur le carbone est nécessaire, cela envoie un signal de marché intéressant pour orienter les investissements vers des technologies plus propres. La mise en place du marché permet aux entreprises de s’échanger des droits à polluer. Le prix du crédit varie le plus souvent entre 0,5 et 50 € la tonne. En agriculture, le Label bas-carbone a été validé par le ministère de la Transition écologique. Il constitue un point zéro pour que la société reconnaisse enin les eforts – tel l’emploi de techniques de conservation des sols – réalisés par la profession. Le label récompense les actions dépassant les obligations réglementaires et surtout, inance la transition écologique.
3Pourquoi acheter et vendre des crédits carbone ? C’est une véritable monnaie pour lutter contre le réchaufement climatique, convertir du CO2 en euros incitant les entreprises à compenser leurs émissions, en achetant des crédits.
4Comment les acquérir ou les vendre ? Les certiicats peuvent être achetés directement auprès des porteurs de projets ou via l’intermédiaire de structures spécialisées possédant leur portefeuille de crédits carbone. À l’échelle de la France, si les émissions dépassent les quotas autorisés sur la période, celle-ci doit acheter des quotas à d’autres pays ayant émis moins de Ges. À l’inverse, si le projet est créditeur, les certiicats peuvent être revendus à des industriels ayant plus de diicultés à réduire leurs émissions. En 2020, le quota de la nation culminait à plus de 450 millions de tCO2e, soit environ 4/5 des émissions estimées de 1990.
5Quelles pratiques doivent être mises en place sur une ferme ? Deux axes prévalent. L’un vise à diminuer les émissions de CO2 de
CLAUDINE FOUCHEROT CE QU’ILS EN PENSENT Claudine Foucherot, directrice du programme Agriculture et forêt pour I4CE « 30 à 50 € par tonne de CO » 2
« Plusieurs marchés de certification des tonnes de carbone évitées existent. La certification volontaire matérialisée par le Label bascarbone en France repose sur une négociation de gré à gré avec des entreprises. Le prix va de 30 à 50 €/t de CO2 pour les premiers projets existants. Le marché européen d’échange des quotas de carbone, lui, ne concerne que les gros acteurs économiques avec un prix établi à 20 €/t. Quant à la valeur théorique du prix de l’action pour le climat, elle est estimée en 2021 à 100 €/t, mais pourrait atteindre 800 €/t en 2050. »
Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation
MINISTÈRE DE L’AGRICULTURE « La mobilisation des jeunes générations est déterminante »
« Face à l’accélération des effets du changement climatique, la mobilisation des jeunes générations est déterminante. Le “Diagnostic carbone” permet à chaque jeune installé d’activer les différents leviers dont il dispose afin d’améliorer son impact et d’identifier les actions les plus efficaces pour y parvenir. La mesure vient renforcer le rôle des agriculteurs en tant que porteurs de solutions pour capter plus de carbone dans les sols. » Le plan France Relance finance à 90 % la réalisation des diagnostics ; les agriculteurs n’auront à s’acquitter que de 10 % du coût complet, soit environ 200 à 250 €. La contribution sera directement réglée auprès de la structure en charge du diagnostic. Aucun effort de trésorerie n’est donc demandé aux agriculteurs.
l’exploitation en réduisant le travail du sol et la consommation de carburant, ou en substituant des intrants organiques aux engrais minéraux. Le second consiste à augmenter le stockage du carbone dans le sol grâce aux couverts végétaux, aux légumineuses, aux prairies permanentes et à l’agroforesterie (arbres et haies). En fonction des choix de l’agriculteur, le calcul estime la quantité de CO2 stockée pendant cinq ans. Quid des exploitants pratiquant déjà le semis direct ou l’agriculture de conservation des sols ? Dans ce cas, le calcul prend en compte le delta entre les pratiques actuelles et le retour à un système conventionnel (labour, moins de couverts végétaux, etc.). L’agriculteur est rémunéré en conséquence.
6Comment la rémunération est-elle calculée ? La fourchette de prix de la tonne de CO2 évitée s’étend entre 30 et 50 €. Tous les projets n’auront pas le même niveau d’engagement, cependant, le choix est libre sur les modalités de valorisation des crédits carbone. ■
Retrouvez en réalité augmentée les résultats de l’étude sur les projets de compensation carbone dans le secteur agricole.