09 TURQUIE La polémique continue autour des allégations d’espionnage de l’Allemagne
22 - 28 AOÛT 2014 ZAMAN FRANCE
Alors que plusieurs médias allemands rapportent des allégations d’espionnage de la Turquie par l’Allemagne, le ministère turc des Affaires étrangères a convoqué l’ambassadeur allemand et demandé au gouvernement de fournir des explications.
La base d’observation des services des renseignement allemands à Bad Aibling près de Munich.
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Dans un communiqué publié lundi, le ministère turc des Affaires étrangères a qualifié d’«inquiétantes» les allégations selon lesquelles les services de renseignement fédéraux allemands (BND) auraient espionné la Turquie. Même si ces allégations ne devaient être que partiellement vraies, l’Allemagne se doit de justifier cette situation «grave». Le magazine allemand Der Spiegel a en effet rapporté ce samedi que le BND espionnait et espionne toujours la Turquie, citant un document confidentiel de l’organe datant de 2009.
UNE SITUATION QUI DOIT ÊTRE JUSTIFIÉE «AU PLUS VITE» Interrogé sur les allégations, le ministre turc des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu a déclaré que la Turquie suivait de près les allégations et a demandé des «explications» à l’ambassadeur allemand. «Il y a des principes clés que chacun doit prendre en compte dans les relations internationales, en particulier entre deux pays alliés. Si ces allégations sont vraies, elles sont inacceptables (…) Nous sommes face à une situation qui doit être justifiée au plus vite. Il en va de notre droit d’obtenir des réponses le plus tôt possible. Si ces allégations sont fausses, certaines mesures doivent être prises», a-t-il dit. Un représentant du ministère des Affaires étrangères a déclaré à Zaman que l’affaire était très «sensible» et que la Turquie n’agissait pas sur le compte de «rapports de médias». «Cependant, convoquer l’am-
bassadeur allemand auprès du ministère des Affaires étrangères le même jour montre la gravité de la situation», a-t-il dit. La chancelière allemande, interrogée sur les allégations d’espionnage durant une visite en Lettonie ce lundi, a déclaré ne pas pouvoir commenter ces activités du BND.
LA TURQUIE SUR LA LISTE DES PAYS À SURVEILLER Dans un article publié ce samedi, Der Spiegel indiquait que l’allié OTAN de l’Allemagne avait été choisi en 2009 pour faire l’objet d’une surveillance dans le cadre de la procédure du gouvernement allemand consistant à sélectionner tous les quatre ans des cibles devant être profilées. Un autre quotidien allemand, le Frankfürter Allgemeine, a confirmé les propos du Spiegel dimanche, en citant des sources anonymes du gouvernement allemand. Selon le journal, la Turquie était listée sur l’ordre de profilage élaboré en 2009 par le gouvernement allemand. Le BND aurait également écouté des appels téléphoniques du secrétaire d’Etat américain John Kerry, de sa prédécesseur Hillary Clinton et de l’ancien secrétaire-général de l’ONU Kofi Annan en même temps que la Turquie, évoque Der Spiegel. Une porte-parole du BND a indiqué dimanche qu’«en principe», l’Allemagne ne surveillait aucun Etat allié tel que les Etats-Unis. «Tout enregistrement accidentel est immédiatement effacé», a-t-elle ajouté. Mais les médias allemands citaient des repré-
sentants qui disaient que ce principe ne s’appliquait pas forcément à tous les membres de l’OTAN, y compris la Turquie.
LE DOUTE ALLEMAND, CAUSE DES ÉCOUTES ? Le journal allemand Bild a rapporté lundi que l’une des raisons qui expliquerait les mises sur écoute serait le doute de l’Allemagne quant à la position de la Turquie vis-à-vis de l’Occident. Selon le journal, les Etats-Unis avaient déjà averti l’Allemagne que la Turquie jouait un double jeu dans les conflits en Irak et en Syrie et que les services de renseignement turcs (MIT) soutenaient les islamistes radicaux en leur fournissant des armes. D’après le journal, une autre raison serait la pression exercée par la Turquie sur l’Allemagne pour obtenir des renseignements sur les activités des membres du PKK basés en Allemagne. D’après Bild, la Turquie essaie d’obtenir des renseignements sur ces membres en empêchant en échange les islamistes allemands d’aller en Syrie. Le pouvoir de plus en plus fort du nouveau président turc Erdogan est source d’inquiétude pour l’Occident, rapporte Bild qui rappelle que des troupes allemandes sont présentes en Turquie. «Nous serions fous de ne pas surveiller la Turquie», aurait dit un ancien officier des renseignements allemands cité par Bild. [A l’heure où est rédigé cet article, les autorités allemandes n’ont toujours pas démenti les allégations d’espionnage à l’encontre de la Turquie, ndlr]