Le succès d’un cuisinier turc à Londres
Zaman France fête son 300e numéro
Retrouvailles au club de Bursaspor
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31 JANVIER - 6 FEVRIER 2014 N° 300 Prix : 2,5 €
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Risque de crise économique pour Ankara
L’ÉNERGIE AU CŒUR DES ÉCHANGES ÉCONOMIQUES La visite officielle de François Hollande a été marquée par la volonté de renforcer les échanges bilatéraux entre Paris et Ankara. Les deux dirigeants Gül et Hollande se sont mis d’accord pour renforcer le volume des échanges commerciaux. - TURQUIE 07
Hollande plaide pour l’Etat de droit en Turquie La visite d’Etat du président Hollande en Turquie a permis de tourner une page symbolique de 22 ans d’interruption entre Paris et Ankara. Au cours de ses entretiens avec le président Gül, François Hollande a réitéré ses appels à renforcer l’Etat de droit en Turquie et a évoqué une possible ouverture de nouveaux chapitres pour l’adhésion à l’UE. EDITO EMRE DEMIR
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A l’occasion de sa visite en Turquie, François Hollande s’est efforcé de refermer la blessure ouverte dans la relation entre Paris et Ankara par le refus de Nicolas Sarkozy de considérer la Turquie comme un pays susceptible d’adhérer à l’Union européenne. Négociation ne veut pas dire adhésion. La
OÙ EN EST-ON DE LA QUESTION ARMÉNIENNE ?
question de l’adhésion sera décidée par référendum. Mais cela ne doit pas nous empêcher de poursuivre les pourparlers chapitre par chapitre», a déclaré François Hollande. Sous Nicolas Sarkozy, la France avait bloqué les pourparlers d’adhésion sur cinq chapitres de négociations. hTURQUIE 06
C’est le boulet qui plombe les relations bilatérales. La «qualification juridique» des événements de 1915. La France fait office de «grand frère» de l’Arménie alors que la Turquie passe pour un «Etat négationniste». Le président Hollande a marché sur des œufs pour ne pas accabler et surtout crisper les Turcs sur cette question. Il a appelé au respect du droit et à un «travail de mémoire», prélude à la réconciliation. Sami Kiliç TURQUIE 06
Une visite réussie grâce au duo Gül-Hollande -02
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Alors que la valeur de la livre turque continue de chuter depuis le début de l’affaire de corruption le 17 décembre 2013, certains prévoient l’arrivée d’une crise économique à grande échelle en Turquie. RTURQUIE 07
EUROPE
VISAS : RETOUR SUR L’ACCORD TURQUIE-UE La Turquie et l’UE ont signé un texte autorisant les gouvernements des Vingt-Huit à renvoyer les immigrés clandestins entrant sur le territoire européen via la Turquie. Cet accord dit de «réadmission» prévoit que les deux parties pourront renvoyer des ressortissants de l’autre partie ou de pays tiers en situation illégale. Il a été l’occasion aussi d’officialiser l’ouverture d’un dialogue visant à l’abandon des visas requis pour les Turcs qui se rendent en Europe. Mais pour l’avocat Selcuk Demir, ce texte n’est pas nécessairement une bonne nouvelle pour la Turquie. -09 INTERNATIONAL
Ce que n’est pas le mouvement Gülen...
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Accusé d’être à l’origine des procédures judiciaires pour nuire au Premier ministre, le mouvement Gülen, alias «Hizmet», suscite les interrogations de la presse occidentale. Ni secte, ni confrérie, comment définir ce groupe et ses activités ? hTURQUIE 08
Zaman Okur Hattý: 01 42 00 19 36
La bioéthique redevient une affaire laïque -
Les discussions sur l’avortement et la rencontre entre le président de la République et le pape ont remis les questions de bioéthique sous les feux de l’actualite. Parmi les sujets de préoccupation, la nouvelle composition du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) qui, depuis le mois de septembre 2013, ne compte plus aucun ministre du culte. Le président de la République a choisi de les remplacer par des laïcs ce qui a suscité des interrogations sur la représentativité de cet organe dont les avis portent sur les sujets de société les plus brûlants. RSOCIETE 05
CENTRAFRIQUE : S’AGIT-IL D’UN CONFLIT RELIGIEUX ? Les affrontements entre la Séléka et anti-Balaka ont mené à une quasi guerre civile dans le pays, entrainant une résolution des Nations unies et l’intervention de forces militaires francaises et africaines. Philippe Hugon, spécialiste de l’Afrique, fait le point pour Zaman France sur la situation actuelle de la Centrafrique. -10
02 FRANCE EDITO EMRE DEMIR
Une visite réussie grâce au duo Gül-Hollande Après 22 ans d’absence, la visite historique de François Hollande en Turquie a été une occasion pour le président français de marquer une rupture avec son prédécesseur sur le dossier turc. François Hollande, qui s’était engagé à assumer une présidence «normale» contrairement au bouillonnant Nicolas Sarkozy, a fait un pas vers la «normalisation» des relations francoturques. Désireux d’effacer les répercussions de l’ère Sarkozy, Hollande a assuré la Turquie de son soutien dans le processus d’adhésion. Contrairement à son prédécesseur, pour Hollande, «la Turquie est en Europe, elle n’est pas encore dans l’Europe». En revanche, il ne s’est pas gardé d’exprimer des inquiétudes sur la crise politique actuelle en Turquie en soulignant l’importance de l’indépendance de la justice et de la séparation des pouvoirs. Il a évoqué la possibilité d’ouvrir les chapitres relatifs à ces questions. Par contre, le président Hollande a fait mention pour la première fois de l’option du référendum. Mais cette sortie est destinée à apaiser les Français - dont 83 % sont opposés à l’adhésion turque - en vue des élections au parlement européen de mai 2014. En effet, il est techniquement impossible pour la Turquie de faire aboutir les négociations sous la présidence de Hollande. Auparavant, la date de la visite avait été considérée comme problématique, du fait des débats politiques en cours dans les deux pays. La crise politique du 17 décembre (accusations de corruption) avait entraîné des discussions sur le report de la visite à Paris. L’Elysée et le quai d’Orsay auraient craint que cette visite ne soit appréhendée comme un soutien au Premier ministre Erdogan et ne soit instrumentalisée dans le débat actuel. Une rencontre avec le leader de l’opposition de gauche, Kemal Kiliçdaroglu, aurait donc été ajoutée à l’agenda. Hollande se serait d’ailleurs efforcé de figurer davantage aux côtés de Gül que d’Erdogan. Au final, un nouveau langage diplomatique plus apaisé a changé la nature même des relations bilatérales. Le président turc Abdullah Gül et François Hollande ont su créer une occasion politique pour relancer les relations entre les deux pays, en dépit de leurs désaccords. e.demir@zamanfrance.fr
31 JANVIER - 6 FEVRIER 2014 ZAMAN FRANCE
numéro de Zaman France ! C’est le 300e numéro de Zaman France, le premier journal francoturc. En 5 ans, des sujets importants ont traversé l’actualité, en Turquie mais en France aussi. Parmi nos objectifs : mieux faire connaître la Turquie et rendre visible la communauté franco-turque.
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31 JANVIER - 6 FEVRIER 2014 ZAMAN FRANCE
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«Je fais savoir que j’ai mis fin à la vie commune que je partageais avec Valérie Trierweiler» Dans un message envoyé à l’Agence France presse, le président de la République François Hollande a mis officiellement un terme à sa relation avec la première dame de France.
THÉORIE DU GENRE :
Une «rumeur» infondée pour l’Education nationale Le lancement des Journées de retrait de l’école dans plusieurs régions de France pour protester contre une possible introduction de la «théorie du genre» dans l’enseignement scolaire a soulevé l’inquiétude de certaines académies nationales et de fédérations de parents d’élèves. Pour le gouvernement, qui s’est exprimé plusieurs fois sur le sujet, «il n’est pas question d’introduire» cette théorie à l’école.
Deux études alertent contre une inégalité produite par les professeurs et le système d’enseignement, inégalité alimentée par des représentations sexuées des filles et des garçons.
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Dans le Val d’Oise et à l’Académie de Strasbourg, l’inquiétude était palpable ces derniers jours. Le lancement officiel des Journées de retrait de l’école, une initiative portée par les organisations qui militent pour l’interdiction de toute forme d’introduction de la théorie du genre à l’école en demandant aux parents de retirer leurs enfants des classes une journée par mois en signe de protestation, a été sévèrement critiqué. Pour l’académie de Strasbourg, qui s’est exprimée via un communiqué, «ce mouvement d’inquiétude n’est pas fondé et s’appuie sur une rumeur. L’Education nationale fait quotidiennement un travail d’éducation, d’information et de lutte contre toutes les formes de discrimination».
PEUR ET DÉSINFORMATION, POUR LA FCPE «Les directeurs des écoles et les chefs d’établissement s’emploient à rassurer les familles et les invitent à ne pas donner suite à cet appel» a poursuivi l’académie, d’après une information publiée par nos confrères des Dernières nouvelles d’Alsace. Dans le Val d’Oise, c’est la grande Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) qui a mis en garde
dans un communiqué officiel contre une campagne de «désinformation» et «d’entretien de la peur», tout en reconnaissant que la théorie du genre «pourrait être abordée dans le cadre de l’éducation sexuelle aux collèges et lycées » mais pas dans le primaire, où seront seulement «prévues des informations sur l’égalité des sexes». Pour la FCPE, l’enseignement de cette théorie serait justifiée par «la lutte contre l’homophobie et pour l’égalité filles/garçon », considérée comme une «priorité».
AYRAULT : «PAS QUESTION D’INTRODUIRE» CETTE THÉORIE De son côté, le gouvernement a rappelé à plusieurs reprises que cette crainte relevait du fantasme. Dès septembre dernier, le Premier ministre Ayrault avait confié au quotidien La Croix qu’«il n’est pas question d’introduire je ne sais quelle idéologie sur la théorie du genre, pas plus dans les programmes scolaires que dans la formation des enseignants.» La ministre du Droit des femmes qui avait utilisé l’expression de «théorie du genre» en 2011, l’écarte à présent préférant celle d’études de genre destinées à évaluer la part des représentations sociales dans le
phénomène des inégalités sexuelles. Deux études, l’une fournie en juillet au ministère de l’Education nationale et l’autre ce mois-ci à celui du Droit des femmes alertaient contre une inégalité produite par les professeurs et le système d’enseignement, inégalité alimentée par des représentations sexuées des filles et des garçons.
TALONS POUR HOMMES ET SMOKING POUR FEMMES Un programme d’expérimentation intitulé ABCD a donc été lancé le 14 janvier dans dix académies nationales (Bordeaux, ClermontFerrand, Créteil, la Corse, la Guadeloupe, Lyon, Montpellier, Nancy-Metz, Rouen,
Toulouse), soit un total de 600 classes, sur la base d’une dizaine d’heures de cours par semaine, pour déconstruire les stéréotypes de genre. D’après le Figaro, ces programmes prévoient des cours pédagogiques «autour des représentations esthétiques de l’enfant, de la femme et de l’homme au fil des siècles», citant comme exemples le «portrait par Rigaud de Louis XIV portant des talons hauts, (le) smoking pour femme d’Yves Saint Laurent en 1966 ; ou (la) réflexion sur «la figure de la belle» dans les contes». L’objectif étant de démontrer aux enfants que «les notions de féminin et masculin évoluent suivant les sociétés et les époques».
Entre controverse et réalité La théorie du genre ou gender studies s’est invitée bon gré mal gré en France à l’occasion du texte de loi sur le mariage homosexuel. L’occasion pour Zaman France de faire le point sur cette notion controversée et toujours sujette à débat. FOUAD BAHRI PARIS Depuis l’adoption d’un texte de loi autorisant le mariage pour tous, qualifié de «mariage homosexuel», un terme a fait son apparition dans le débat public français : celui de théorie du genre. Pour les opposants à ce mariage et surtout aux possibles conséquences de l’adoption légale d’enfants par les couples homosexuels, cette mesure est la marque de l’influence de cette théorie sur les élites françaises et l’actuel gouvernement. Mais que préconise-t-elle ? Cette théorie défendrait l’idée selon laquelle la différence sexuelle et l’identité sexuée reposeraient moins sur un fondement biologique que sur une construction sociale véhiculée par les sociétés et essentiellement par les hommes, de par leur position. Une définition qui dissocie la
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notion de sexe de celle de genre. En fait, l’expression elle-même ne fait pas consensus. Pour plusieurs chercheurs, l’expression correcte est «études de genre» et non théorie du genre.
L’IMPASSE BIOLOGIQUE C’est l’avis exprimé par plusieurs chercheurs dont les sociologues Laure Bereni et Anne Revillard, l’universitaire Sébastien Chauvin et Alexandre Jaunait, politiste et maître de conférences à l’université de Poitiers, dans une tribune publiée au mois de juin dans les colonnes de Libération. Ces chercheurs y réaffirment dans un premier temps que «les études sur le genre ne cherchent pas à montrer qu’il n’existe pas de différences physiologiques entre les personnes». Ils rappellent ensuite la raison
d’être des gender studies qui est de montrer comment la perception des femmes et des caractéristiques sociales ou morales qui leur sont attribuées relèvent moins de conséquences propres à la biologie que de représentations sociales et masculines qui doivent, à ce titre, être déconstruites. Des intellectuelles féministes comme Judith Butler aux Etats-Unis ou Christine Delphy en France sont les figures intellectuelles les plus connues de ce courant d’idée. Ces chercheurs mettent donc en avant la pertinence du concept de genre pour expliquer les inégalités entre hommes et femmes et les stéréotypes masculins-féminins.
UNE HAINE DE LA DIFFÉRENCE Mais pour d’autres, ces considérations relèvent au mieux d’idées et de conceptions propres aux sciences humaines, au pire de notions idéologiques greffées au champs biologique. C’est ainsi qu’a été perçue par exemple l’introduction d’un chapitre intitulé «Devenir homme, devenir femme», en 2011 dans des livres de SVT par le précédent ministre de l’Education Luc Chatel. C’est l’avis du psychiatre Boris Cyrulnik qui considère dans un entretien donné au magazine Le Point, «que le «genre» est une idéologie. Cette haine de la différence est celle des pervers, qui ne la supportent pas». Même son de cloche pour la philosophe Chantal Delsol, qui écrivait en juillet dernier dans Le Figaro que «la théorie du gender ne suppose pas seulement le refus de l’individu d’être inscrit dans une appartenance sexuelle. Mais aussi le désir de l’individu de choisir, sinon son sexe biologique, au moins son appartenance de «genre». On va expliquer à l’enfant qu’il ne naît ni garçon ni fille, qu’il choisira plus tard. Ce qui veut dire que rien n’est nature, que tout est culture». Le débat est donc loin d’être tranché.
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JOURNÉE DE RETRAIT DE L’ÉCOLE :
Farida Belghoul : «La théorie du genre avance à visage masqué derrière l’égalité» Enseignante, cinéaste et écrivain, Farida Belghoul est une femme engagée pour l’interdiction de la théorie du genre à l’école. Dans le cadre de la Journée de retrait de l’école(JRE), une action destinée à informer les parents sur les enjeux de cette théorie, elle considère, dans un entretien exclusif à Zaman France, que la lutte contre l’homophobie et pour l’égalité a été utilisée par le gouvernement pour inculquer aux enfants la négation des différences sexuelles. FOUAD BAHRI PARIS Lorsque vous parlez d’introduction de la théorie du genre à l’école, à quoi faites-vous référence concrètement ? Au programme ABCD de l’égalité 1. La théorie du genre avance au nom de l’égalité. C’est d’ailleurs plus une idéologie qu’une théorie. Cette idéologie s’immisce dans les programmes scolaires de manière extrêmement pernicieuse et à visage masqué derrière l’égalité. Vous avez le programme pour les primaires de l’ABCD de l’égalité qui consiste à lutter contre les stéréotypes de genre et à diffuser la théorie du genre dans l’esprit des enfants. Les ministres Vincent Peillon et Najat Vallaud-Belkacem disent que cette théorie n’existe pas. Ils prétendent avoir mis en place un dispositif de lutte contre les discriminations homophobes, contre les stéréotypes de genre et pour l’égalité garçons-filles.
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Qui défend aujourd’hui cette théorie ? Les féministes radicales comme Judith Butler 2 et tous les membres d’un lobby influent qui est le lobby LGBT (Lesbiennes, gays, bisexuels et transgenre, ndlr), assez influent pour que cela devienne une priorité nationale de l’éducation nationale dans les programmes scolaires. Ceci alors que nous avons des taux d’illétrisme de plus en plus important dans les écoles et pas seulement dans les quartiers populaires, dans les couches moyennes aussi. Au moment où les élèves ne maîtrisent pas le calcul le plus élémentaire, le gouvernement considère que la priorité est de lutter contre l’homophobie et contre les stéréotypes de genre. Ses projets sont clairs : généraliser à tous les niveaux de l’école française, de la crèche à la terminale, l’idéologie du genre. A quoi attribuez cette position du gouvernement ? L’Organisation mondiale de la santé préconise ellemême qu’on enseigne la masturbation à la crèche sous prétexte de l’exploration des corps ! Il s’agit d’un mouvement qui est mondial aujourd’hui et qui tient au fait que l’humanité connaît en ce moment une décadence dont elle doit se relever impérativement. C’est au-delà du politique. Qu’espérez-vous de cette action nationale lancée par la JRE qui débute le 24 janvier ? J’espère alerter des parents qui ne sont pas informés des plans du gouvernement en jetant la lumière sur ce projet, afin que ces parents puissent défendre leurs enfants. Seuls les parents peuvent le faire et en le faisant sauver notre société car les enfants sont l’avenir de cette société. Une fois informés, les parents pourront se mobiliser pour l’interdiction de l’introduction de la théorie du genre sous toutes ses formes. Si cette théorie est intégrée dans le prochain programme scolaire, comment cette mobilisation que vous appelez pourrait demander son interdiction ? Nous n’en sommes pas encore là. Pour l’instant, les choses en sont au stade expérimental avec le programme de l’ABCD de l’égalité. Il est donc indispensable que les parents de toute conviction qu’ils soient musulmans, catholiques, athées, etc, se mobilisent maintenant. Cette mobilisation prend la forme d’une journée de retrait d’école, mensuelle, qui s’organise
Pour Farida Belghoul, la Journée de retrait de l’école a pour objectif d’informer les parents sur les enjeux de la théorie du genre.
par des comités locaux dans toute la France, avec des dates différentes par région, pour interdire la théorie du genre. Nous ne sommes pas en opposition avec le gouvernement, c’est lui qu’il l’est avec notre position qui représente la norme. Ce sujet relance donc le débat sur l’école, lieu d’éducation ou d’instruction ? En effet. Ces JRE sont aussi l’occasion d’appeler à la restauration d’un ministère de l’Instruction publique car l’éducation appartient aux parents et non à l’Etat. L’Etat n’a pas à éduquer nos enfants donc le ministère ne doit pas s’appeler Education nationale mais revenir à l’ancienne appelation d’Instruction publique. En maintenant cette appellation, on retire aux parents leurs rôle d’éducateurs pour le confier à l’Etat. C’est ce qu’on appelle le totalitarisme. Avez-vous tenté de rallier les associations de parents d’élèves à ce mouvement ? Le problème est que la plupart des associations de parents d’élèves, telle que la FCPE, ont choisi le camp du
gouvernement quand elles ne lui sont pas directement rattachées. Il ne s’agit pas d’accabler seulement le gouvernement socialiste car Luc Chatel avait lui aussi introduit en 2011, dans les livres de SVT des classes de première, un chapitre qui s’intitulait «devenir homme ou femme». Devenir cela implique qu’on ne naît pas homme ou femme, mais qu’on le devient ! C’est l’idéologie du genre. J’ai écrit un livre pour les enfants de 6 à 10 ans, qui sortira bientôt et qui s’intitulera «Papa porte un pantalon et maman porte une robe» illustré par le dessinateur Hugo, en réponse au livre «Papa porte une robe». 1- Programme d’expérimentation lancé en décembre 2013 par le gouvernement dans 10 académies et plus de six cent classes, les «ABCD de l’égalité» visent «à transmettre dès le plus jeune âge une culture de l’égalité et du respect entre les filles et les garçons en agissant sur les pratiques des acteurs de l’éducation et sur les préjugés des élèves». 2-Judith Butler est une philosophe américaine, féministe, qui a théorisé une conception du genre comme construction sociale idéologique, sur la base d’une distinction entre sexe extérieur renvoyant à la biologie, et genre intérieur, à la culture.
Le retrait des enfants est une mobilisation générale qui a trouvé un écho au sein de la communauté franco-turque, par le biais de sms et d’emails collectifs les prévenant de la JRE. Mis au courant de cette réalité, nous avons voulu éclairer le débat en présentant les thèses des deux parties. Le retrait des enfants par leurs parents n’est pas, à notre sens, une démarche appropriée car il ouvre la porte à l’instrumentalisation politique de nos enfants. Quel que soit le débat, il doit se tenir en dehors de l’école. Au vu des inquiétudes des parents, il est important que le Ministère de l’Education soit extrêmement pédagogue et concret à propos de son projet. La rédaction
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31 JANVIER - 6 FEVRIER 2014 ZAMAN FRANCE
Pourquoi les religieux ont été écartés du Comité consultatif national d’éthique
Le CCNE est chargé d’émettre des avis et de formuler des recommandations sur les enjeux éthiques.
Les discussions sur l’avortement et la rencontre entre le président de la République et le pape ont remis les questions de bioéthique sous les feux de l’actualité. Parmi les sujets de préoccupation, la nouvelle composition du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) qui, depuis le mois de septembre 2013, ne compte plus aucun ministre du culte. Le président de la République a choisi de les remplacer par des laïcs... SAMI KILIÇ PARIS C’est un véritable coup de canif porté à la tradition républicaine. Le chef de l’Etat a préféré écarter les hommes de religion lors des nouvelles nominations au CCNE. Ce comité, créé en 1983, est chargé d’émettre des avis et de formuler des recommandations sur les enjeux éthiques qui sont soulevés par la recherche dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé. En effet, les avancées scientifiques charrient souvent des tas d’interrogations sur leurs aspects moraux. Et quand la morale est là, la religion n’est jamais très loin. Théoriquement. Bref, cette autorité brasse les questions de vie et de mort les plus sensibles. Il eût été donc a priori légitime d’interroger les représentants des religions. Le décret de 1983 portant création de cet organe transdisciplinaire prévoyait 40 membres dont 5 «personnalités appartenant aux principales familles philosophiques et spirituelles». Jusqu’en septembre 2013, deux clercs y siégeaient : le pasteur Louis Schweitzer et le rabbin Michaël Azoulay. En septembre 2013, ils ont été remerciés. L’islam n’était pas représenté par un imam mais un philosophe de confession musulmane, Ali Benmakhlouf tout comme le catholicisme représenté non par un ecclésiastique mais un professeur de théologie, Xavier Lacroix. Ces derniers ont été reconduits alors que les deux premiers ont été remplacés par des laïcs qui ont une sensibilité religieuse prononcée, l’historienne Marianne Carbonnier-Burkard pour le protestantisme et le neurologue Lionel Naccache pour le judaïsme.
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L’APPEL À DES LAÏCS POUR REPRÉSENTER LES COURANTS RELIGIEUX Le CCNE est certes consultatif mais il n’en demeure pas moins influent. Ses avis interpellent d’une manière ou d’une autre le législateur et la société. Par exemple, c’est sous l’impulsion du Co-
mité que le délai de l’IVG est passé de 10 à 12 semaines en 2000. Le Comité s’est opposé à la procréation médicalement assistée en 2005, à la pratique des mères porteuses en 2010, ou à l’euthanasie et au suicide assisté en juillet 2013. Il est appelé à se prononcer à nouveau sur ces deux sujets début 2014. D’où l’importance de sa composition. Pourquoi une telle attitude du président Hollande ? La lettre du décret est en réalité respectée mais la tradition a été bousculée. «Nous souhaitons revenir aux principes de création du Conseil de 1983 et faire appel à des laïcs pour représenter les courants religieux», s’était justifié l’Elysée auprès du Figaro. Jean-Claude Ameisen, président du CCNE nommé il y a un an par François Hollande, récusait, quant à lui, toute intention politique et affirmait que «l’histoire du CCNE n’a pas toujours compté de religieux en son sein» et que «la diversité des sensibilités l’a toujours composé». Didier Sicard, président du CCNE de 1999 à 2008, estimait pour sa part que «prendre des personnalités civiles et non des personnes inscrites dans la hiérarchie religieuse est une bonne chose, car ces dernières finissent toujours par engager leur religion dans le débat».
LE MALAISE DES AUTORITÉS RELIGIEUSES Il n’en demeure pas moins que les autorités religieuses ont exprimé leur malaise. Amer, Louis Schweitzer avait déclaré : «On met sur la touche le catholicisme, le protestantisme, le judaïsme et l’islam pour des questions de société et d’éthique pour lesquelles les religions ont leur mot à dire». L’ancien président du CFCM, Mohammed Moussaoui, joint au téléphone, explique ce changement d’attitude par la vision de la laïcité du nouveau président. Il rappelle que le président, lors de ses voeux aux représentants des cultes, s’est toutefois engagé à consulter les cultes sur les questions de bioéthique. Le Consis-
toire central de France déplore quant à lui non seulement l’éviction du rabbin Azoulay mais également l’absence des autorités religieuses. En revanche, Jean Baubérot, spécialiste de la laïcité et du protestantisme a écrit dans son blog que «les protestants seraient d’autant plus
mal venus de réclamer un "religieux" que la Réforme protestante a réduit la distinction entre clercs et laïcs et qu’elle en est fière». Pas de panique donc : il n’a jamais été question de «représentation» mais d’ «appartenance» au sein du CCNE.
Qu’est-ce que la bioéthique ? SAMI KILIÇ PARIS ue.fr, la bioéthique «vient de "bio", Selon le site www.etatsgenerauxdelabioethiq signifie "ce qui est bon et utile pour qui veut dire "vivant" et d’ "éthique", qui utiactivités médicales et de recherche qui l’homme". La bioéthique s’intéresse aux que s varié i auss s aine Elle englobe des dom lisent des éléments du corps humain». : polémiques. Quelques exemples l’avortement. La loi de 1975 dite loi Veil L’interruption volontaire de grossesse ou grossesse en cas de «situation de dépermet aux femmes de mettre fin à leur e e. iquer qu’avant la 10 semaine de grossess tresse». A l’origine, l’IVG ne pouvait se prat été a esse s. Aujourd’hui, la condition de détr En 2000, la durée a été portée à 12 semaine tà ortement n’est plus une exception au droi supprimée par l’Assemblée nationale. L’av libre la de entière pour les femmes, au nom la vie du foetus mais devient un droit à part disposition de leur corps. même sexe. Les couples mariés et les L’adoption des enfants par des couples de sous certaines conditions. En revanche, célibataires peuvent adopter des enfants Des d’un couple ouvertement homosexuel. une réticence se fait jour lorsqu’il s’agit t. avan en s mise ent souv sont e des enfants considérations d’équilibre psychologiqu des ant l’enf à t droi au pose et une mère s’op Ainsi, le droit des enfants à avoir un père couples homosexuels. r les couples lesbiens. La PMA permet, La procréation médicalement assistée pou r un enfant par un don ou non de en cas de stérilité, à un couple de concevoi cette les lesbiens demandent à bénéficier de gamètes (sperme ou ovocyte). Les coup re cont r lutte de même de la PMA qui est technique ce qui bouleverse la philosophie es. erné conc mes une fois invoqué par les fem l’infertilité. Le «droit à l’enfant» est encore çaise permet le «laisser mourir» c’estLa question de l’euthanasie. La loi fran s’acharner à maintenir en vie une perà-dire que les médecins ne doivent pas état végétatif. L’euthanasie est un acte qui sonne qui est condamnée à vivre dans un té d’une maladie incurable. Le suicide assis met fin à la vie d’une personne atteinte erir (suicide) mais qui n’est pas physiqu permet d’aider un malade qui souhaite mou ses d handicap, par exemple) de mettre fin à ment capable de le faire (du fait d’un lour r pou is une loi sur «l’assistance médicalisée jours. Le président Hollande avait prom terminer sa vie dans la dignité».
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31 JANVIER - 6 FEVRIER 2014 ZAMAN FRANCE
VISITE DE FRANÇOIS HOLLANDE EN TURQUIE
Hollande appelle à poursuivre les pourparlers avec l’UE Lors de la première visite officielle d’un président français depuis 22 ans, François Hollande a déclaré lundi 27 janvier que Paris soutenait la poursuite du processus d’adhésion de la Turquie à l’UE via l’ouverture de nouveaux chapitres de négociations. François Hollande a appelé à l’ouverture des chapitres relatifs à la séparation des pouvoirs, aux libertés fondamentales, à l’état de droit et à l’indépendance de la justice.
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A l’occasion de sa visite en Turquie, François Hollande s’est efforcé de refermer la blessure ouverte dans la relation entre Paris et Ankara par le refus de Nicolas Sarkozy de considérer la Turquie comme un pays susceptible d’adhérer à l’Union européenne. Négociation ne veut pas dire adhésion. La question de l’adhésion sera décidée par référendum. Mais cela ne doit pas nous empêcher de poursuivre les pourparlers chapitre par chapitre», a déclaré François Hollande.
UNE CONSULTATION POPULAIRE Sous Nicolas Sarkozy, la France avait bloqué les pourparlers d’adhésion sur cinq chapitres de négociations. Tandis que le chapitre 22 s’est ouvert en novembre 2013, la France maintient encore son veto sur le chapitre 11 (agriculture et développement rural), le chapitre 17 (politique économique et monétaire), le chapitre 33 (dispositions financières et budgétaires) et le chapitre 34 (institutions). «Nous ne sommes pas pressés», a souligné pour sa part Gül, pour qui la crise
politique que traverse actuellement son pays ne saurait influer sur le processus européen «essentiellement technique». Selon l’article 88-5 introduit en 2005 dans la Constitution française, parallèlement à l’ouverture des négociations avec la Turquie, toute nouvelle adhésion doit être soumise à une consultation populaire, à l’issue plus qu’incertaine. En effet, selon une enquête publiée la semaine dernière dans Valeurs actuelles, 83 % des Français sondés sont opposés à l’entrée de la Turquie dans l’Union. François Hollande a rappelé le préalable référendaire, insistant sur «l’hypothèse» constituée par la perspective d’adhésion. Nicolas Sarkozy, qui considérait que la Turquie ne faisait géographiquement pas partie de l’Europe, plaidait pour «un partenariat privilégié» entre Ankara et l’UE. François Hollande a appelé à l’ouverture des chapitres relatifs à la séparation des pouvoirs, aux libertés fondamentales, à l’état de droit et à l’indépendance de la justice, les plus délicats pour Ankara. Zaman avec Reuters
Le référendum n’a rien d’une nouveauté
Où en est-on de la question arménienne ?
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SAMI KILIÇ PARIS Dans les pas de Jacques Chirac. C’est en définitive ce à quoi rime la position du chef de l’Etat, François Hollande, sur l’adhésion turque à l’UE. Le 1er mars 2005, la France de Jacques Chirac déclarait à l’Europe entière en le gravant dans le marbre de sa Constitution, qu’il ne suffirait plus que quelques mains se lèvent au Parlement français pour faire «passer» les adhésions ; dorénavant, le peuple allait avoir son mot à dire. Le président Chirac avait beau être personnellement favorable à la Turquie, les impératifs de la vie politique avaient repris le dessus. Il avait décidé de soumettre à référendum le Traité établissant une Constitution pour l’Europe.
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LE «VERROU RÉFÉRENDAIRE» Prévue en mai 2005, la consultation populaire avait été précédée d’une campagne qui tournait autour de la «question turque». Face aux inquiétudes, Chirac s’était donc résolu à réviser la Constitution en mars 2005 pour instituer un «verrou référendaire». L’article 88-5 disposait, en effet, que «tout projet de loi autorisant la ratification d’un traité relatif à l’adhésion d’un État à l’Union européenne est soumis au référendum par le Président de la République». Mais pour éviter un blocage concernant les pays comme la Roumanie, la Bulgarie et la Croatie, l’article poursuivait : «l’article 88-5, dans sa rédaction en vigueur jusqu’à l’entrée en vigueur du traité établissant une Constitution pour l’Europe, n’est pas applicable aux adhésions faisant suite à une conférence intergouvernementale dont la convocation a été décidée par le Conseil européen avant le 1er juillet 2004». Autrement dit, la Croatie dont le processus de négociations avait été acté par le Conseil européen en juin 2004 passait à travers les mailles du filet alors que la Turquie, non. Le Conseil européen s’était en effet prononcé en décembre 2004 soit 5 mois après la date fatidique prévue par la Constitution... DES PARLEMENTAIRES HOSTILES En 2008, le président Sarkozy a tenté de supprimer cet article mais s’est heurté à l’opposition des parlementaires hostiles à une Turquie européenne. Un terrain d’entente a été trouvé en ajoutant un 2e alinéa à l’article 88-5 ainsi rédigé : «Toutefois, par le vote d’une motion adoptée en termes identiques par chaque
SAMI KILIÇ PARIS C’est le boulet qui plombe les relations bilatérales. La «qualification juridique» des événements de 1915. La France fait office de «grand frère» de l’Arménie alors que la Turquie passe pour un «Etat négationniste». Le président Hollande a marché sur des œufs pour ne pas accabler et surtout crisper les Turcs sur cette question. Il a appelé au respect du droit et à un «travail de mémoire», prélude à la réconciliation. La position officielle de l’Arménie est on ne peut plus claire : l’empire ottoman a commis un génocide en 1915. La décision officielle, une déportation de tous les Arméniens dans les régions méridionales de l’empire, est assimilée à un génocide du fait de ses conséquences. Des centaines de milliers de personnes sont mortes lors des déplacements ou ont été massacrées par des brigands. La Turquie a vu sa position évoluer. Apathique un temps, elle a pris conscience de l’activisme des groupes arméniens dans les années 1980. Elle a préféré minorer le nombre des déportés jusqu’à ce que Murat Bardakçi, journaliste de renom spécialiste de l’histoire, publiât le livret de Talat Pacha, ministre de l’Intérieur. Celuici avait recensé 924 158 Arméniens déportés. «Déportés» ne signifiant pas forcément «tués». La Turquie rejette catégoriquement l’intention génocidaire mais appelle parallèlement à la création d’une commission internationale d’experts (historiens, juristes) pour trancher la question. La France a voté en 2001 une loi en vertu de laquelle, elle «reconnaît publiquement le génocide de 1915». En 2012, le parlement avait également voté une loi pénalisant la contestation des génocides, loi qui avait été censurée par le Conseil constitutionnel. Récemment, l’arrêt Perinçek contre Suisse a permis à la Cour européenne des droits de l’Homme de consacrer la liberté d’expression des individus qui nient le caractère génocidaire des tueries.
assemblée à la majorité des trois cinquièmes, le Parlement peut autoriser l’adoption du projet de loi selon la procédure prévue au troisième alinéa de l’article 89». Autrement dit, le Parlement pourra se prononcer à la place du peuple mais à une majorité qualifiée des 3/5e. Dans le régime d’avant 2005, la majorité simple suffisait. Le président Hollande avait donc le choix, soit le référendum soit le Congrès (la réunion des deux chambres). Il vient d’opter pour le premier en se référant directement au peuple. Sauf à se raviser plus tard et à invoquer l’article 2 de la même Constitution qui dispose que «la souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum». La Constitution le dit, le peuple exerce la souveraineté par le biais de ses représentants, aussi. Peut-être qu’un jour...
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La banque centrale turque a massivement relevé son taux directeur à 12 %, à l’issue d’une réunion extraordinaire pour tenter d’endiguer l’inflation et soutenir la livre.
L’énergie au coeur des échanges économiques franco-turcs -
La visite officielle de François Hollande en Turquie en ce début de semaine a été marquée par la volonté de renforcer les échanges bilatéraux entre Paris et Ankara. Les deux dirigeants Gül et Hollande se sont mis d’accord pour renforcer le volume des échanges commerciaux. L’objectif est qu’ils atteignent les 20 milliards d’euros par an. Les deux pays ont ainsi signé un accord majeur pour la mise en place d’un Conseil stratégique de coopération de haut niveau. Les ministres des Affaires étrangères français et turc tiendront des consultations annuelles, ont affirmé les présidents. Jusqu’ici, la Turquie a signé ce type d’accord
avec 15 autres pays dans l’objectif de renforcer les liens politiques et économiques. Hollande était accompagné d’une importante délégation composée de sept ministres et d’environ 40 entrepreneurs, qui ont signé plus de 10 accords en tout, notamment dans les domaines de l’énergie nucléaire, du transport et de la défense.
GDF PARTICIPERA À LA CONSTRUCTION DE LA 2E CENTRALE NUCLÉAIRE Un consortium – où figurent GDF Suez, Areva et les entreprises japonaises Mitsubishi Heavy Industries Ltd et Itochu Corporation – construira la deuxième centrale nucléaire de la
Chute de la livre turque : va-t-on vers une crise économique ? IBRAHIM TÜRKMEN ISTANBUL Alors que la valeur de la livre turque continue de chuter depuis le début de l’affaire de corruption le 17 décembre 2013, certains prévoient l’arrivée d’une crise économique à grande échelle en Turquie. Un scénario peu réjouissant que délivre Süleyman Onatça, président de la Confédération turque des entreprises et des affaires (TÜRKONFED) le jeudi 23 janvier. La dépréciation de la livre turque a en effet des conséquences sur les petites et moyennes entreprises, sans compter les plaintes qui s’intensifient de semaine en semaine. L’augmentation de la valeur de l’euro et du dollar a dépassé les 30 % ces huit derniers mois en Turquie depuis le début des manifestations de Gezi. Selon Onatça, les plaintes portent sur le nombre accru de garanties demandées par les banques pour accorder des prêts aux petites et moyennes entreprises, la hausse du prix des matières premières et l’augmentation du prix de l’énergie.
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DES ENTREPRISES BIENTÔT CONTRAINTES DE LICENCIER ? Süleyman Onatça a déclaré que l’augmentation de la valeur du dollar pourrait être un bon présage pour les exportateurs mais que cela ne durerait pas et que cela toucherait également les coûts
de production. L’économiste Ugur Gürses s’attend à ce que la situation empire, mais il ne pense pas qu’une crise similaire à celle de 2001 aura lieu. Mais Gürses met encore en garde les politiciens sur l’avenir des entreprises qui ont des dettes importantes à l’international et donc en monnaie étrangère. Leurs actifs sont en train de fondre face à la montée du dollar et de l’euro rapporte-il, notant qu’elles finiront par être obligées de diminuer leurs investissements et de licencier leurs employés.
DES CHARGES QUI AUGMENTENT DEPUIS LE 17 DÉCEMBRE La Turquie n’a pas assez d’économies et a besoin de capitaux étrangers pour alimenter son économie. Dans ce sens, la dépréciation de la livre turque n’annonce rien de bon pour les entreprises et le Trésor public, puisqu’elle provoque l’augmentation de leurs charges. Par exemple, les dettes nettes du secteur privé en monnaie étrangère sont de 165 milliards de dollars et l’augmentation de 10 % de la valeur du dollar depuis le 17 décembre signifie que cette dette a grimpé de 16,5 milliards de dollars. De plus, la Turquie a connu un déficit du compte courant de plus de 7 % sur les quatre dernières années, qui a, selon Gürses, empiré avec les récentes tribulations économiques.
Turquie dans la province de Sinop (région de la Mer Noire) pour un coût estimé à 17 milliards d’euros. GDF Suez a également signé un protocole d’accord avec le gouvernement turc afin de construire une centrale au charbon de 1.320 mégawatts (MW) à Adana dans le sud du pays. Le coût de ce projet est estimé à 2 milliards d’euros environ, a précisé le PDG du groupe français, Gérard Mestrallet. A noter que GDF Suez est déjà présent dans deux centrales à gaz en Turquie (d’une capacité totale de 1.243 MW). Le groupe détient également la société Izgaz, troisième société de distribution de gaz de Turquie.
Le secteur énergétique est l’un des piliers des accords économiques franco-turcs.
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Ce que n’est pas le mouvement Gülen... Accusé d’être à l’origine des procédures judiciaires pour nuire au Premier ministre turc, le mouvement Gülen, alias «Hizmet», suscite les interrogations de la presse occidentale. Ni secte, ni confrérie, comment définir ce groupe et ses activités ?
LE HIZMET N’EST PAS UNE SECTE Sur le plan juridique, une secte se caractérise, selon la très officielle Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires), «par la mise en œuvre (…) de pressions ou de techniques ayant pour but de créer, de maintenir ou d’exploiter chez une personne un état de sujétion psychologique ou physique, la privant d’une partie de son libre arbitre, avec des conséquences dommageables pour cette personne, son entourage ou pour la société». Autrement dit, une secte implique un gourou, une victime et une supercherie. Bref, très souvent des disputes qui finissent devant le juge. Or le Hizmet attire des millions de sympathisants qui n’éprouvent qu’un respect et non une adoration pour Gülen. Nul bulletin d’adhésion n’est requis. Et nul cas de rupture familiale, d’exploitation matérielle voire de lavage de cerveau n’a jamais été signalé. Sur le plan sociologique, une secte est un courant minoritaire au sein d’une religion donnée. Il s’agit moins d’une question de doctrine que d’une question d’extériorisation de la pratique. L’excentricité ou la nouveauté sont souvent revendiquées. Or Fethullah Gülen s’inscrit très clairement dans le sunnisme, il ne demande ni vêtement distinctif ni pratique sectaire. Tous ses discours sont enregistrés et accessibles sur le site www. herkul.org.
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SAMI KILIÇ PARIS Nébuleuse islamiste, organisation louche, communauté crypto-sioniste, Opus Dei turc et dernièrement secte des Assassins... Voici les quelques expressions qui fleurissent ici et là pour définir ce qu’il est convenu d’appeler le mouvement Gülen alias «Hizmet», littéralement «service» en turc. L’affaire de corruption en Turquie a attiré la lumière sur ce groupe, accusé d’avoir infiltré la fonction publique et d’être à l’origine des procédures judiciaires pour nuire au Premier ministre. Comme dirait Talleyrand, «si cela va sans dire, cela ira encore mieux en le disant». Une chose est au moins certaine, Fethullah Gülen est un musulman sunnite. Originaire d’Erzurum, né en 1941 mais ayant prêché à Izmir de longues années, ce dernier vit actuellement en Pennsylvanie depuis 1999. Penseur musulman influent, il avait lancé un mouvement de bienfaisance dans les années 1970. Mouvement qui a connu un déploiement sans pareil dans les quatre coins du monde. Depuis, il ne cesse d’intriguer. La presse française qui essaie de couvrir l’affaire de corruption y perd souvent son latin lorsqu’il faut donner un nom à ce mouvement. Topo sur les nuances qui s’imposent.
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LE HIZMET N’EST PAS UNE CONFRÉRIE Dans un article de 2001 sur les confréries (tarikats) en Turquie, Nicolas Trépanier, écrit : «Tarikat est un mot turc, d’origine arabe, qui désigne les confréries soufies. Une tarikat a deux caractéristiques essentielles : elle vise à établir une certaine pratique mystique basée sur l’islam, pratique partagée par tous ses membres ; elle se propose par ailleurs de structurer de façon très précise et hiérarchique les relations entre ceux-ci». Dans une confrérie donc, un «cheikh» regroupe autour de lui des disciples pour un exercice particulier : la purification du cœur, l’éducation de l’âme (nefs). Cela
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passe par la méditation (tefekkür), les litanies répétitives (zikir) et les prières incantatoires (tesbih). Les confréries les plus répandues en Turquie sont le bektachisme, la nakshibendiyya, le mevlévisme et la kadiriyya. Fethullah Gülen ne s’est jamais considéré comme un cheikh, il n’a pas de disciples. Bien au contraire, il s’inspire des savants musulmans comme Said-i Nursi, théologien kurde, qui pensent que l’ère des confréries est révolue.
LE HIZMET N’EST PAS UNE NÉO-CONFRÉRIE Une néo-confrérie est une redéfinition moderne de la confrérie classique. Les rites et les invocations ne seraient plus de rigueur, l’essentiel étant de s’ouvrir au monde extérieur. La question n’est plus d’approfondir la foi (ihsan) mais de la répandre. Or, les citoyens turcs qui s’inspirent des idées de Fethullah Gülen sont dans une tout autre dimension. Leur focalisation ne porte pas sur la foi mais sur l’éducation et la compréhension mutuelle. La foi sert seulement de socle pour défendre les droits universels de tous, sans distinction d’origine, de religion ou de sexe. Ils aspirent ainsi à un monde tolérant, à une sociabilité harmonieuse, à un dialogue des adeptes des différentes religions. Tout un réseau s’est formé autour de cet idéal, des organes de presse (Samanyolu TV, Zaman, Aksiyon, Cihan) aux associations humanitaires (Kimse Yok Mu?) en passant par les écoles et une organisation patronale (TUSKON).
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LE HIZMET N’EST PAS UNE CONGRÉGATION Le Conseil d’État français avait énuméré, dans son rapport public de 2004, les indices qui définissent la congrégation : les membres doivent être inspirés par une foi religieuse, prononcer des vœux, mener une vie communautaire sous une même règle et le supérieur doit être investi de pouvoirs particuliers relevant de la hiérarchie propre à sa religion. Or, l’islam sunnite rejette le clergé et le monarchisme. D’ailleurs, le but du Hizmet n’est pas de cloîtrer les personnes, à l’inverse, il les pousse à traverser les frontières pour
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se mettre au service de tous les êtres humains.
ALORS COMMENT DÉFINIR LE HIZMET ? Un «objet social non identifié» ? Thierry Zarcone, dans son livre La Turquie moderne et l’islam, évoque une «décomposition du modèle confrérique» qui implique une discipline, le charisme d’un chef religieux et un modèle de société civile. Justement, les sympathisants de Gülen se disent au «service» (hizmet) des autres. L’affiliation politique/idéologique ou le degré de piété ne sont pas en soi pertinents. Comme l’écrit Erkan Toguslu dans le livre Société civile, démocratie et islam : perspectives du mouvement Gülen, il s’agit d’ «un mouvement civil transnational d’inspiration religieuse». L’auteur note que «la clé de voûte de la réussite du mouvement se décrit à la fois comme pieuse et entrepreneuriale, patriote et transnationale, caractérisant ainsi le renouveau des valeurs musulmanes à l’ère de la globalisation». En définitive, le «Hizmet» ne s’inscrit pas dans les catégories préexistantes. Il les transcende car protéiforme. C’est un mouvement sui generis. Il prône une éthique humaniste fondée sur les valeurs universelles et s’affiche contre l’intégrisme et l’obscurantisme. La foi musulmane originelle ne nuit ni ne profite.
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09 EUROPE Turquie-UE : l’accord sur les visas est-il utile ?
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La Turquie et l’UE ont signé un texte autorisant les gouvernements des Vingt-Huit à renvoyer les immigrés clandestins entrant sur le territoire européen via la Turquie. Cet accord a été l’occasion aussi d’officialiser l’ouverture d’un dialogue visant à l’abandon des visas requis pour les Turcs qui se rendent en Europe. Mais pour l’avocat Selçuk Demir, ce texte n’est pas nécessairement une bonne nouvelle pour la Turquie. SELÇUK DEMIR PARIS Le 16 décembre 2013, la Turquie et l’UE ont signé un accord (dit «Accord de réadmission entre la Turquie et l’UE» ou encore «Geri kabul anlasmasi» en turc) qui prévoit, notamment, l’assouplissement gradué et progressif des règles en matière de visa d’entrée pour les ressortissants turcs sur le territoire des pays membres de l’UE. En échange de l’acceptation par la Turquie du retour des migrants expulsés des pays membres de l’Union européenne qui ont transité par le territoire turc, l’UE a accepté d’envisager (!) dans un délai de trois ans et demi la libre entrée des ressortissants turcs dans ses Etats membres.
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UN TEXTE PRÉSENTÉ COMME UNE AVANCÉE... Cette signature était attendue avec impatience à Bruxelles. La Turquie est en effet l’un des principaux couloirs empruntés par les migrants clandestins originaires d’Afrique, du Moyen-Orient et d’Asie qui souhaitent se rendre en Europe. Elle accueille en outre plus de 600.000 réfugiés syriens qui ont fui la guerre civile dans leur pays, en cours depuis le printemps 2011. Signé par le ministre turc de l’Intérieur Muammer Güler et la commissaire européenne aux Affaires intérieures Cecilia Malmström, cet accord doit encore être validé par les parlements turc et européen, ainsi que par les Etats membres de l’Union. Mais si ce texte est présenté, notamment par ses signataires, comme une avancée concernant le sort des milliers de ressortissants turcs sollicitant chaque année un visa d’entrée auprès des pays membres de l’Union européenne, il nous parait, au contraire, inquiétant à plusieurs titres. … QUI FAIT DE LA TURQUIE UN «ETAT TAMPON» En premier lieu, cet accord fait de la Turquie un «Etat tampon» chargé, en l’état, d’accueillir des milliers de migrants ayant transité sur son territoire et pour lesquels elle devra, périodiquement, rendre des comptes à l’Union européenne. Aucune étude sérieuse ne révèle
Les Français sont les plus opposés à l’entrée des Turcs dans l’UE
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Les Français sont les plus opposés des Européens à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne, selon un sondage de l’Ifop publié jeudi par Valeurs Actuelles, quelques jours avant la visite présidentielle française en Turquie. Sur 804 Français interrogés du 7 au 14 janvier, seulement 17% se disent favorables à une adhésion turque, contre 83 % d’un avis contraire. Selon cette enquête effectuée dans cinq autres pays de l’UE, 28 % des Allemands seraient pour une entrée de la Turquie (72 % contre), 32 % des Belges (68 %), 34 % des Britanniques (66 %), 50 % des Italiens et 56 % des Espagnols (44 %).
Les commissaires européens Cecilia Malmstrom et Stefan Fuele, et le ministre des Affaires étrangères turc Ahmet Davutoglu.
le coût économique et social d’une situation qui amènerait la Turquie à devenir le gardien des frontières de l’UE sans en être membre … Cette situation correspond en tous points à la stratégie d’externalisation du contrôle des frontières de l’UE (puisque nos frontières sont poreuses, chargeons nos voisins de nous donner des gages de contrôle aux leurs), déjà utilisée en associant, également par un accord de réadmission, le Maroc ou la Lybie.
ALORS QUE LE DROIT AU VISA EST DÉJÀ RECONNU Mais surtout, cet accord entre la Turquie et l’UE pourrait mettre à mal le droit au visa des ressortissants turcs tel que consacré par les accords dits «d’Ankara» qui proposaient déjà, depuis 1963, une suppression graduelle des entorses faites à la liberté de circulation des ressortissants turcs et qui a été reconnu
comme ayant un effet direct dans les pays membres de l’UE par la Cour de justice des communautés européennes (CJCE). Ainsi, et en application de l’article 13 de la décision n°1/80 du Conseil d’association, mis en place par l’accord créant une association entre la Communauté économique européenne et la Turquie, relative au développement de l’association, du 19 septembre 1980, et l’article 41du protocole additionnel conclu, approuvé et confirmé au nom de la Communauté par le règlement (CEE) n° 2760/72 du Conseil, du 19 décembre 1972, la CJCE reconnaît déjà le droit au visa pour les ressortissants turcs, notamment quand il s’agit de visites à caractère professionnel. Par ailleurs, à considérer que l’UE restreigne les conditions d’accès au visa d’entrée, cet accord ne propose aucune avancée pour les ressortissants turcs en matière
de droit au séjour ou aux prestations sociales, ou de mesure concrètes concernant la liberté d’établissement dans un pays membre de l’UE. Entrez donc, Messieurs, Dames, mais vous devrez rapidement sortir !
VERS LA RÉGRESSION DES DROITS DU RESSORTISSANT TURC ? Dans ces conditions, l’accord de coopération signé le 16 décembre dernier marquerait une régression notable des droits du ressortissant turc désirant entrer dans un pays membre de l’Union européenne… L’objectif annoncé est donc loin d’être réalisé. Et les lendemains n’incitent pas à l’optimisme quant aux perspectives d’entrée dans l’UE d’une Turquie que l’on voit d’abord et avant tout comme un partenaire potentiel efficace contre l’immigration irrégulière...
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«Des musulmans attaqués sont allés se réfugier dans les églises» En mars dernier, les milices Séléka renversaient le président centrafricain Bozizé. En réaction, des milices d’auto-défense, dites anti-Balaka, se forment dans le pays. Les affrontements entre la Séléka et les anti-Balaka ont mené à une quasi guerre civile dans le pays, entraînant une résolution des Nations unies et l’intervention de forces militaires francaises et africaines. Philippe Hugon, spécialiste de l’Afrique, fait le point pour Zaman France sur la situation actuelle de la Centrafrique. FARIDA BELKACEM PARIS Peux-t-on parler d’un conflit religieux entre musulmans et chrétiens ? Globalement, le conflit n’est pas religieux. Il n’a pas des sources religieuses, mais il a pris des formes religieuses, car c’est la cristallisation de l’opposition entre la Séléka qui est musulmane et les anti-Balaka qui sont chrétiens. C’est parce qu on est en conflit qu’on entre dans des systèmes binaires d’opposition. Mais la preuve que le conflit n’est pas religieux, c’est la très bonne entente des imams et des responsables du clergé qu’ils soient catholiques ou protestants. D’ailleurs, des musulmans attaqués par les antiBalaka – qu’on désigne comme chrétiens – sont allés se réfugier le plus souvent dans les églises, sous la protection des églises.
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Philippe Hugon est directeur de recherche à l’IRIS, en charge de l’Afrique.
Des affrontements ont éclaté entre des partisans du président déchu Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans, et les forces de sécurité.
L’Egypte commémore sa révolution dans le sang
Navi Pillay, la Haute commissaire de l’Onu aux droits de l’homme, a récemment dénoncé des persécutions anti-musulmans en Centrafrique. Dès lors que certains membres de la Séléka ont rendu leurs armes, il y a eu des exactions très violentes contre eux. C’est un fait. Il y a eu des violences très fortes des deux côtés, de la part des anti-Balaka à la machette contre les musulmans, et aussi des exactions très fortes d’ex-Séléka. Au départ, les anti-Balaka étaient des groupes d’auto-défense. Effectivement, avec le temps, les anciens de la garde présidentielle de Bozizé se sont
ralliés à eux ainsi que les désœuvrées. Donc on est aussi dans des milices et pas simplement des milices d’auto-défense. Mais les anti-Balaka sont moins armés en termes d’armes lourdes que les membres de la Séléka, qui ont eux obtenu les armes du côté des pays voisins grâce à leur pillage de richesses et au contrôle des ressources minières. Si le problème n’est pas religieux, quel est-il ? On est plutôt dans une absence d’État où il n’y a pas de police, pas de gendarmerie. Il n’y a plus d’économie, la rapine, le brigandage et les trafics dominent.
Tous les désœuvrés se sont agglomérés aux deux adversaires et participent du contrôle du diamant, du pillage, le tout avec une population avec 500.000 déplacés ou réfugiés. Le trafic du diamant, dont les mines artisanales se trouvent sur le territoire, est le nerf de la guerre. Autre problème, les frontières qui sont extrêmement poreuses ! La Centrafrique est entourée de paysen situation de conflit, notamment le long de leurs frontières. La Centrafrique aujourd’hui, c’est aussi les effets du Darfour avec les Djandjawids qui pillent les diamants, les effets du Soudan du Sud et de la crise de la RDC.
Retrouvez l’intégralité de cet entretien sur le site : www.zamanfrance.fr
Des dizaines de milliers d’Egyptiens se sont rassemblés dans l’après-midi sur Tahrir pour exprimer leur soutien au général Sissi, omniprésent sur des banderoles tendues sur la place et sur des tee-shirts en vente à des étals de fortune. Le chef d’état-major, qui a fait passer par référendum la nouvelle Constitution égyptienne, n’a pas encore précisé ses intentions, mais des voix se sont élevées au sein du pouvoir intérimaire pour le presser de se porter candidat à l’élection présidentielle attendue dans les six mois. Trois ans après la révolution égyptienne, et après les errements ayant accompagné la présidence Morsi, une partie de la population égyptienne estime que seul un homme fort issu du sérail militaire est à même de sortir le pays de la crise économique et de mettre fin aux troubles politiques. A l’inverse, d’autres, à commencer par les Frères musulmans, aujourd’hui considérés comme une organisation terroriste et dont des centaines de membres ainsi que les principaux cadres ont été emprisonnés, dénoncent un coup d’Etat militaire contre un président légitime, le premier à avoir été élu librement en Egypte. Reprenant le slogan entendu tout au long des dix-huit journées révolutionnaires de l’hiver 2011, des manifestants anti-Sissi ont scandé «Le peuple veut la chute du régime!» avant d’être dispersés à coups de gaz lacrymogènes. A Alexandrie, plusieurs dizaines de protestataires ont été arrêtés.
LA RÉPRESSION Des groupes islamistes ont multiplié les attaques contre la police et l’armée depuis le renversement de Mohamed Morsi, le 3 juillet dernier, et surtout la dispersion sanglante - plus d’un millier de morts - des sit-ins de ses partisans en août au Caire. Une répression implacable s’est parallèlement abattue sur les Frères musulmans, qui disent prôner une résistance «pacifique» mais ont été qualifiés en décembre d’organisation «terroriste» par le nouveau pouvoir après un précédent attentat revendiqué par Ansar Baït al Makdis. La répression s’est récemment étendue aux autres voix discordantes, dont plusieurs figures de proue de la «révolution du Nil» de 2011, jetées en prison pour avoir contesté une nouvelle loi restreignant le droit de manifester, ce qui a suscité la critique des pays occidentaux et des défenseurs des droits de l’homme. Ces derniers dénoncent un climat de «revanche» de l’appareil sécuritaire et des partisans d’Hosni Moubarak.
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Maroc : les violeurs ne pourront plus épouser leurs victimes L’article 475 du code pénal marocain permettait, jusqu’à présent, aux agresseurs sexuels d’épouser leurs victimes afin d’échapper à la prison. Mais une loi proposée par le PAM (Parti authenticité et modernité) met un terme à cette alternative. FOUÂD HARIT Au Maroc, les violeurs n’auront plus la possibilité d’épouser leurs victimes. La commission de justice à la Chambre des représentants a adopté mercredi un amendement de l’article 475 du code pénal. Le groupe parlementaire du PAM avait déposé en ce sens un projet de loi pour la suppression de l’alinéa 2. Il permet aux agresseurs sexuels d’épouser leurs victimes comme solution alternative à la prison. «Lorsqu’une mineure nubile ainsi enlevée ou détournée a épousé son ravisseur, celui-ci ne peut être poursuivi que sur la plainte des personnes ayant qualité pour demander l’annulation du mariage et ne peut être condamné qu’après que cette annulation du mariage a été prononcée». C’est donc ce texte de l’article 475 qui sera supprimé après l’adoption de l’amendement en plénière. La mort d’Amina Al Filali, cette jeune fille de 15 ans violée qui avait reçu l’obligation d’épouser son bourreau avant de se suicider le 10 mars 2012 pour échapper à cette double peine, avait relancé le débat. C’est donc une première victoire pour les défenseurs des droits humains et de la femme au Maroc, même si le combat est encore loin d’être gagnée. En revanche, l’amendement du durcissement des peines d’emprisonnement contre les violeurs des filles mineures
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Nouvelle constitution en Tunisie
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Le président tunisien Moncef Marzouki, le président de l’Assemblée nationale et le chef du gouvernement sortant ont signé lundi sous les acclamations du parlement la nouvelle Constitution du pays, adoptée la veille au soir par les députés. L’adoption de cette Constitution doit maintenant être suivie de nouvelles élections pour refermer trois années de transition chaotique et parfois violente vers la démocratie en Tunisie après le renversement de Zine Ben Ali, première révolution du «printemps arabe» en janvier 2011. Le franchissement de cette étape cruciale accentue d’autant plus le contraste avec d’autres pays arabes toujours en proie aux troubles depuis leur propre révolution, comme l’Egypte ou la Libye. Le premier article de la loi fondamentale dispose que la Tunisie est «un pays libre, indépendant et souverain» ayant l’islam pour religion, l’arabe pour langue et la république pour régime. Cette Constitution garantit aussi la liberté de croyance et promeut l’égalité entre les sexes. Dans la rue, les Tunisiens ont fêté cette nouvelle Constitution saluée par le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, comme une «étape majeure». «C’est la première fois qu’on est unis depuis la révolution», a dit Asma Hbaib, une jeune employée de banque. «C’est comme une autre révolution.»
d’«un à cinq ans» à «dix ans», tel qu’il figurait dans le texte initial présenté par le groupe des députés du PAM le 26 juin 2012, a été rejeté, rapporte Yabiladi. La peine d’emprisonnement restera donc d’un à cinq ans maximum. Les ONG demandent au Premier ministre, Abde-
lilah Benkirane, d’accélérer la procédure législative car l’urgence est désormais d’empêcher que ne se réalise le même scénario de l’affaire Amina Al Filali avant le passage de la loi pour la suppression de l’alinéa 2. La mort d’Amina Al Filali avait suscité un profond émoi au Maroc. En partenariat avec Afrik.com
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Hüseyin Özer ou le succès d’un cuisinier turc à Londres Le chef turc Hüseyin Özer a de quoi inspirer les jeunes générations. A la tête de plusieurs restaurants à Londres, il est recommandé par le guide Michelin. Celui qui avait commencé dans un kebab donne des cours et a publié un ouvrage : Livre de recettes Sofra : la cuisine moderne turque et orientale.
KLAUS JURGENS ANKARA L’histoire du cuisinier turc Hüseyin Özer, propriétaire d’un restaurant à Londres recommandé par le guide Michelin, vaut le détour. Parti de Turquie et installé en Angleterre étant jeune pour y développer sa marque et son talent culinaire, son nom et ses restaurants jouissent aujourd’hui d’une grande renommée dans la capitale anglaise. Bref, ce chef turc est l’illustration parfaite de l’adage londonien «Si vous y arrivez ici, vous y arriverez partout».
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Chez Özer, cuisiner des plats même «simples» devient une forme d’art.
NAISSANCE À RESADIYE, EN TURQUIE Hüseyin Özer sait comment briser la glace. Un sourire radieux éclaire son visage au moment où le client passe la porte de son restaurant. Pour la petite histoire, Hüseyin est né dans le village de Resadiye, près de Tokat au nord de la Turquie. Adolescent, Hüseyin part à Ankara avec 20 livres turques en poche, une véritable fortune à l’époque. Il réussit rapidement à s’en sortir en travaillant dans un bar de la capitale turque. Hüseyin a ensuite pour objectif d’apprendre l’anglais. Il se rend à Istanbul grâce à ses économies puis fait son service militaire en 1975. Mais le futur chef ne s’arrête pas là et embarque dans un bus, non pas en direction d’une autre métropole turque, mais d’un autre pays : l’Angleterre. LE PREMIER RESTAURANT SOFRA Londres était considérée comme une ville dynamique dans les années 1970 et 1980 Il a commencé par être employé dans un restaurant de döner kebab et dormait au sous-sol la nuit. A force
Hüseyin Özer.
d’économiser, Hüseyin a fini par avoir un fonds assez important pour acheter un petit local. Il a même pu obtenir un autre prêt d’environ 7.000 euros pour se lancer. Hüseyin est ensuite parvenu à transformer son local en véritable restaurant avec l’aide d’un nutritionniste. Ce restaurant, qui a failli mettre la clé sous la porte plusieurs fois, est devenu un endroit de choix pour les Londoniens. Sept ans après l’arrivée de Hüseyin à la gare routière de Victoria, le premier restaurant, Sofra, était né. Et puis un deuxième, puis un troisième. Un quatrième a ouvert également, sous le nom d’«Özer». L’expansion de son commerce a fait de Hüseyin un cuisinier renommé. Mais le succès n’a pas été instantané. Pour Hüseyin, tout a été attentivement planifié. Le marché londonien était celui qu’il connaissait le mieux et les Londoniens (et les touristes !) sont devenus sa clientèle. Il sait
comment les satisfaire. Prochain objectif pour Hüseyin, seul restaurant turc recommandé par le guide Michelin, une petite étoile rouge.
APPRENDRE À INNOVER AVEC ÖZER De passage à Londres, la deuxième chose à faire pour profiter pleinement de la cuisine de Hüseyin Özer est lire son ouvrage nommé «Livre de recettes Sofra : la cuisine moderne turque et orientale» et de réaliser quelques spécialités à la maison. Les plats d’Özer sont modernes et innovants, mais conservent la tradition de la cuisine ottomane. Prendre un repas dans l’un des restaurants d’Özer, c’est adopter un point de vue totalement différent sur la nourriture turque. Car Özer sait révolutionner les spécialités turques sans jamais en perdre la spécificité. Ainsi, cuisiner des plats même «simples» devient une forme d’art. C’est par exemple le cas pour un grand classique revisité comme l’Ali Nazik, avec des morceaux d’agneau épicé ou du poulet avec de
la purée d’aubergines fumées accompagnées de yaourt et d’une touche d’ail ? Ou encore les bricks fourrés aux épinards et au fromage ? Pour les végétariens, Özer propose un ragoût de gombos. Entre un menu spécial de type restaurant et un simple sandwich, le client a le choix. Avec les années, Hüseyin Özer a ouvert d’autres commerces et enseigne même, en plus de ses activités culinaires. Il enseigne par exemple à de futurs restaurateurs comment devenir de bons entrepreneurs et/ ou de bons chefs. L’université de Westminster lui a d’ailleurs accordé un doctorat honorifique de lettres. Özer donne également des cours professionnels à domicile, en coopération avec l’université du Middlesex. Des stages de cuisine spéciale Özer sont organisés en coopération avec le Hackney Community College. Ses étudiants apprennent à ses côtés comment diriger une petite ou une moyenne entreprise et comment innover. Qui pourrait enseigner ces choses mieux que Hüseyin?
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AGENDA CULTUREL
SEYFEDDINE BEN MANSOUR LILLE Les historiens Pascal Buresi et Hicham el Aallaoui ont fait récemment paraître aux éditions Casa de Velazquez Gouverner l’Empire. La nomination des fonctionnaires provinciaux dans l’Empire almohade (Maghreb, 1224-1269). Un important corps de fonctionnaires servait en effet le califat almohade (1147-1269), Etat fortement centralisé autour de sa capitale, Marrakech. Succédant à l’empire almoravide (10401147), l’Etat almohade est un vaste empire euro-africain s’étendant de l’Espagne au nord à l’actuel Sahara occidental au sud et à la Libye cyrénaïque à l’ouest.
CONCERT
L’islam rigoriste des Berbères almohades
en personne, Yusuf I , qui meurt au cours de la bataille de Las Navas de Tolosa, l’un des nombreux épisodes d’une guerre d’Etat de près de deux siècles contre les ambitions hégémoniques des royaumes chrétiens du nord. La seconde est qu’il s’agit d’Etats fondés par des Berbères adeptes d’un mouvement religieux à l’origine duquel on trouve un prédicateur (‘Abd Allâh Ibn Yâsîn dans le cas des Almoravides, Muhammad Ibn Tumart dans les cas des Almohades). er
MAIS DES DIVERGENCES DOCTRINALES ... Aussi, les différences, nombreuses, commencent-elles au niveau doctrinal : alors que ‘Abd Allah Ibn Yasin (m. en 1059) se place d’emblée dans le cadre de l’orthodoxie malé-
A lire
Le souffle de Tétouan
La dynastie almohade se pose en défenseur de l’islam dans un contexte marqué par l’avancée chrétienne.
Le 1er février à 20h30 Institut du monde arabe Place Mohammed V 75005 Paris
CONFÉRENCE kite (aujourd’hui très largement majoritaire au Maghreb), Muhammad Ibn Tumart (1080-1130), rejette quant à lui l’appartenance à une école juridique spécifique. Se faisant le héraut d’un islam rigoriste bâti autour du concept central d’unicité divine (tawhîd, d’où Almohades, francisation de alMuwahhidûn, les «Unitaires»), il proscrit le recours à l’appréciation individuelle (dhann) en matière juridique, et va jusqu’à se proclamer Mahdi en 1120, c’est-à-dire Guide infaillible de la communauté, à la fois chef spirituel et temporel.
… ET DES CONFLITS POLITIQUES C’est là une conception très proche de celle des chiites, sans doute acquise lors de ses années de formation en Orient, où Ibn Tumart a suivi les cours des plus grands maîtres d’Alméria à Bagdad en passant par la Mecque. Le grand alGhazali lui-même en ferait partie, d’après Ibn al-Qattan, qui raconte qu’ayant appris que son ouvrage majeur, Revivification des sciences de la religion, avait été brûlé sur décision d’un juge cordouan, un
certain Ibn Hamdin, le maître avait appelé la malédiction sur le régime almoravide. Ibn Tumart, qui aurait été alors son disciple, se serait exclamé : «Priez Dieu, Maître, qu’il périsse par ma main». Al-Ghazali aurait répondu favorablement à la requête, et la prière aurait été exaucée. L’histoire est apocryphe – Ibn Tumart n’a jamais été le disciple d’al-Ghazali – mais révélatrice de l’opposition idéologique aux Almoravides, qui prendra très vite une forme politique, celle de la rébellion suivie de la prise de pouvoir, d’abord au Maroc, puis, après la mort d’Ibn Tumart en Espagne et dans le reste du Maghreb. Le christianisme maghrébin, l’un des plus anciens au monde, ne survivra pas à près d’un siècle et demi de rigorisme almohade. L’islam populaire, par contre, saura reprendre ses droits, avec une conception de l’unicité qui, comme disait l’historien Alfred Bel, n’exclue pas une divinité «plus sentimentale, plus accessible à l’intercession, plus généreuse dans l’attribution de ses grâces et de ses bienfaits, pour tout dire, plus familière».
& à voir...
Un prêtre, des immigrés et l’humanité retrouvée «Quand faire la charité devient dangereux, c’est que le moment de la charité est venu», marmonne le vieux prêtre incarné par Michael Lonsdale. Avec ce nouveau film, le réalisateur italien Ermanno Olmi brasse ces mêmes valeurs humanistes à l’origine de L’Arbre aux sabots, Palme d’Or à Cannes en 1978. Délibérément non réaliste, le film
Depuis la chute de Grenade, Tétouan est le bastion le plus occidental de l’art arabo-andalou. L’Orchestre Temsamani, sous la direction du maestro Mohamed Amine El Akrami.
est une sorte de fable biblique moderne, humaine et engagée. La vie d’un prêtre âgé est bouleversée quand on lui annonce que son église va être désacralisée. L’abbé a beau se battre, les autorités ont pris leur décision. Le bâtiment est désormais complètement vide, au grand désespoir du prêtre. C’est alors qu’un groupe d’immigrés clandestins demande
asile. D’abord réticent, le vieil homme ouvre les portes de l’église à ces hommes et à ces femmes, à ces familles entières auxquelles il offre ainsi un toit. La police a vent de l’affaire et veut les déloger. Le prêtre et les immigrés se lancent alors dans une résistance au long cours, un engagement qui est aussi pour l’abbé une occasion de questionner sa foi...
Le village de carton, réalisé par Ermanno Olmi (drame, Italie, 2013, 1h27). Avec Michael Lonsdale, Rutger Hauer, Massimo de Francovich. Sortie en salles le 29 janvier.
La liberté de pensée et la science
Qu’en est-il aujourd’hui du rapport des musulmans avec la science ? Deux attitudes s’affrontent, celle prônant la liberté de pensée, le questionnement critique, sans limite et sans tabou, et celle affirmant la prédominance du dogme sur la science. Par Faouzia Farida Charfi, professeure de physique à l’Université de Tunis, actuelle secrétaire d’État à l’Enseignement supérieur de la République tunisienne. Le 4 février à 18:00 EHESS 105, boulevard Raspail 75006 Paris
La Nahda ou comment en sortir ?
Une conférence de Jocelyne Dakhlia, directrice d’étude à l’EHESS, et Moulay Mustapha Tesrif, doctorant au GREMMO, proposée dans le cadre du cycle «Renaissances arabes et musulmanes». Le 6 février à 18:00 Maison de l’Orient et de la Méditerranée 7, rue Raulin 69007 Lyon
TABLE RONDE
Islam des mondes
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«Almohades est la francisation de al-Muwahhidûn, les "Unitaires"»
De sa voix grave, profonde et rare, Moneim Adwan chante sa terre martyrisée, la Palestine. Le 31 janvier à 20h30 Institut du monde arabe Place Mohammed V 75005 Paris
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DES POINTS COMMUNS AVEC LES ALMORAVIDES Avec les Almoravides qu’ils ont détrônés, la dynastie almohade partage deux caractéristiques. La première est de se poser en défenseur de l’islam dans un contexte marqué par l’avancée chrétienne : en 1085, la prise de la cité musulmane de Tolède (située à 70 km au sud de Madrid) par Alphonse VI de Castille-Léon provoque l’intervention des Almoravides ; en 1212, c’est le calife almohade
Le chant dévoilé
Femmes tunisiennes, vecteur de modernité ?
Deux Tunisiennes, l’une médecin et écrivain, Azza Filali, auteure des Vallées de lumière (éditions Cérès), l’autre éditrice, Elisabeth Daldoul, fondatrice des éditions Elyzad, interrogeront la notion de modernité en acte, et son rapport avec l’engagement féminin tunisien, et plus largement arabe, depuis le XIXe siècle. Le 31 janvier à 13:00 Institut du monde arabe Place Mohammed V 75005 Paris
OPINION14
31 JANVIER - 6 FEVRIER 2014 ZAMAN FRANCE
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La démocratie turque est-elle en danger ? Ces derniers mois, l’AKP a montré sa facilité à sacrifier la démocratie quand ses propres intérêts l’exigent. Longtemps défenseur de l’Etat de droit, le gouvernement se distingue aujourd’hui par une politique belliqueuse, identitaire et sécuritaire. Pour le chroniqueur Ihsan Dagi, la Turquie pourrait prendre la voie irréversible de l’autoritarisme.
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La Turquie n’a pas toujours été une démocratie libérale au fonctionnement irréprochable. Dans notre pays, la démocratie peut être qualifiée de limitée, d’électorale et d’imIHSAN DAGI parfaite. Et même ces attributs sont à risque aujourd’hui. L’AKP n’est plus un atout pour la démocratisation du pays comme il l’a été par le passé mais un frein. Les différentes réactions du parti aux défis sociaux, légaux et éthiques depuis les manifestations de Gezi montre son aptitude à sacrifier la démocratie et l’Etat de droit. Un choix purement pragmatique, le problème, c’est que l’AKP a réussi à séduire les électeurs non-islamistes grâce à sa position centriste et démocratique et, dans une très large mesure, a bâti sa légitimité en s’engageant pour la démocratie.
DES MESURES ANTI-DÉMOCRATIQUES Il est évident que pendant ses onze ans au pouvoir, l’AKP a créé son réseau de soutiens. Mais difficile de croire qu’un parti de plus en plus autoritaire ayant recours à une politique identitaire et dont les porte-paroles publics sont des islamistes continuera à d’hostilité envers les puisrallier les électeurs centristes, sances étrangères et envers en particulier dans une pé- la société turque. riode agitée par l’affaire de corruption. Conscient de DES OPPOSANTS QUALIFIÉS cela, l’AKP a recours, d’un D’ENNEMIS ET DE TRAÎTRES côté, à une politique iden- Dans ce contexte, on comtitaire et de l’autre, à une prend pourquoi le Premier politique sécuritaire. Avec ministre use en permanence la première, il tente de créer d’un langage belliqueux dans un sens de solises déclarations. La darité et d’idenlutte politique est détification auprès crite comme la «deudes masses xième guerre d’indémusulmanes et conservatrices. Quant à sa poli«Le parti au pouvoir en est arrivé tique sécuritaire, à envisager la démocratie comme adoptée depuis un pouvoir illimité de la majorité» les manifestations de Gezi, elle a voulu créer un climat anxiogène qui jus- pendance», en référence à tifie la mise en place de me- la Guerre d’indépendance sures anti-démocratiques et turque de 1920 à 1922. Les illégales. L’AKP évoque des opposants sont qualifiés d’enthéories de complot, adopte nemis, de traîtres ou de collaune mentalité d’assiégé, borateurs avec les puissances une attitude de méfiance et étrangères. Toute opposition
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GÖKHAN BAÇIK
Le silence des acteurs économiques turcs
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Heureusement pour nous, de nombreux étrangers ne parlent pas le turc. Sinon, ils seraient choqués par l’irrationalité qui domine dans le langage politique. Le vocabulaire de la politique turque abonde aujourd’hui de termes comme «traître», «terroriste» ou «assassin». Il est rare d’entendre un gouvernement employer ce type de jargon marginal et dangereux en politique intérieure. Dans une démocratie, il est légal et normal de critiquer un gouvernement, mais en Turquie, la critique est considérée comme une trahison, une collaboration avec l’ennemi et un complot contre le gouvernement.
POURQUOI CE SILENCE ? Un grand entrepreneur a récemment dit que les sociétés étrangères pourraient arrêter d’investir en Turquie si la crise se poursuivait. Il a été immédiatement qualifié de traître. Ce qui suscite l’étonnement, c’est le silence des représentants, conseillers et ministres liés au secteur économique. Selon certains médias, des entreprises dont des banques, sont systématiquement ciblées par des instruments étatiques. En somme, un mécanisme au sein de l’Etat tente de les couler pour punir certains groupes sociaux comme le mouvement Hizmet. Or, conformément à la Constitution, le ministre de l’Economie et ses adjoints doivent protéger les intérêts des investisseurs. Jusqu’à maintenant, ils sont restés silencieux. Le recours à des instruments officiels pour tenter de couler une entreprise nationale montre qu’il y a bien une irrationalité en politique. C’est aussi clair que cela : si un Etat tente de couler une banque nationale, c’est la preuve concrète que des personnes qui n’ont aucune idée des réalités internationales et économiques ont leur importance dans la prise de décisions majeures.
à l’AKP n’est pas vue comme une opposition politique légitime mais comme une menace existentielle envers l’AKP, vu comme l’incarnation de l’Etat et de la nation. Le parti au pouvoir en est arrivé à envisager la démocratie comme un pouvoir illimité de la majorité, a arrêté de croire au principe constitutionnel de séparation des pouvoirs et a commencé à violer les droits fondamentaux. Il n’est donc pas surprenant que l’organisation de la Freedom House, dans son rapport 2013, ait écrit : «Les libertés civiles risquent de disparaître en Turquie». La Turquie peut-elle surmonter ce risque ? Peut-être. Les élections pourraient être la dernière issue possible avant que le pays ne prenne la voie irréversible de l’autoritarisme. Le bon sens avéré des électeurs peut ramener les acteurs politiques à la raison. i.dagi@todayszaman.com
LE JEU RATIONNEL DE L’ÉCONOMIE Comment se fait-il que le ministère de l’Economie ne défende pas un grand homme d’affaires qui a été qualifié de traître ? L’économie est un jeu rationnel. Un gouvernement peut évaluer un entrepreneur sur la base des lois sur l’imposition et d’autres critères légaux. Mais ce n’est pas au gouvernement de savoir si un homme d’affaires est un patriote ou un traître. Ce qui est plus dramatique, c’est le silence de ces «ministres constitutionnellement responsables» qui sont censés défendre les acteurs du marché. En réalité, le ministre de l’Economie et ses adjoints sont des gens intelligents, mais ils ne peuvent pas agir directement. S’ils le faisaient, ils seraient limogés. Pire, des personnes non qualifiées pourraient les remplacer. En temps de crise, la politique turque se transforme en une véritable usine avec du personnel non qualifié mais fidèle. Peut-être que le ministre de l’Economie tente d’agir, en coulisses. C’est pourquoi ses adjoints et lui sont obligés de se taire sur de nombreux sujets. Leur silence n’est pas nécessairement synonyme d’inaction. Et si tel est le cas, nous n’avons pas d’autre alternative que de les féliciter. g.bacik@todayszaman.com
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Retrouvailles au club de Bursaspor Malgré de nouvelles ambitions affichées après son sacre surprise lors de la saison 2009/10, Bursaspor n’a jamais réussi à jouer de nouveau les premiers rôles du championnat. Après un début de saison calamiteux, marqué par une élimination prématurée de la Ligue Europa, la direction du club a décidé de s’appuyer sur son passé glorieux pour rebondir, en faisant signer Volkan Sen. Sercan Yildirim est aussi très proche de faire son retour chez les Crocodiles. ALLAN KILIC PARIS Il avait quitté Bursaspor en très mauvais termes, après avoir été écarté en équipe réserve par Ertugrul Saglam. Preuve est que Volkan Sen n’est pas rancunier, puisqu’il vient de signer son retour chez son club formateur. Volkan n’avait plus joué en Süper Lig depuis Septembre dernier, après que son entraîneur Mustafa Akçay a décidé de l’écarter pour raisons disciplinaires sans jamais lui redonner une chance. L’ailier turc de 26 ans s’était aussi fait remarquer en début de saison pour avoir quitté le terrain après qu’un de ses supporteurs ait insulté sa mère décédée depuis peu. Volkan Sen a donc débarqué aujourd’hui au centre d’entraînement de Bursaspor où il a réalisé une conférence de presse avec le Président du club. Un contrat de 4 ans et demi doit être signé demain. Le montant du transfert est estimé à 1.250.000€, soit presque 3 fois moins que l’indemnité payée par Trabzonspor en 2011.
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RÉUNIR LE FAMEUX DUO OFFENSIF Bursaspor a donc fait la moitié du chemin, puisque la direction rêve de réunir de nouveau le fameux duo offensif qui avait porté le club sur le toit de la Turquie en 2010. Ainsi Sercan Yildirim devrait être la prochaine recrue des Crocodiles. Le président Erkan Körüstan a déjà affirmé qu’un accord avait été trouvé avec Galatasaray, qui détient les droits sur le contrat du joueur, actuellement en prêt chez Sanliurfaspor en 2e division (3 buts en 13 matchs). Si ces transferts font beaucoup jaser pour leur symbolique, certaines interrogations s’élèvent sur la pertinence de ces recrues. Si elles présentent l’avantage de bien connaître la maison et d’être encore assez jeunes pour rebondir, leur état de forme laisse à désirer, en particulier pour Sercan Yildirim, dont les performances ont été très décevantes depuis son départ des Crocodiles en 2011. En partenariat avec TurcoFoot
Nouveau sacre européen pour les Bleus -
La génération de Nikola Karabatic a ajouté une page de plus au livre de ses exploits en remportant dimanche le championnat d’Europe de handball au détriment du Danemark, tenant du titre et hôte du tournoi (41-32). Les Bleus, en état de grâce, ont profité de l’étonnante méforme de leurs adversaires, en particulier en défense, pour prendre le large très tôt dans la rencontre et compter jusqu’à dix buts d’avance en première période. Les «Experts» ont joué à leur meilleur niveau, à l’image de Valentin Porte, qui a confirmé son statut de révélation française de la compétition en inscrivant neuf buts, et du vétéran Michaël Guigou, dix buts au compteur. Les Danois n’ont pas pu résister à cette déferlante, pas même le gardien Niklas Landin ni l’arrière gauche du Paris Saint-Germain Mikkel Hansen, malgré ses neuf réalisations.
UN TOURNOI RÉUSSI DE BOUT EN BOUT Cette ultime victoire couronne pour les Bleus un tournoi réussi de bout en bout, à l’exception d’un accident sans gravité face à la Suède. «On a montré une grosse intensité en défense», s’est félicité le gar-
dien Thierry Omeyer sur France 2. «On a fait un grand match, tout le monde a été monstrueux (...). Tout le monde a réussi un grand tournoi.» Nikola Karabatic, élu meilleur joueur de cet Euro, et ses plus vieux compagnons de route en sont désormais à trois titres européens (2006, 2010 et 2014), deux titres mondiaux (2009, 2011) et deux titres olympiques (2008, 2012). En triomphant ainsi sur le sol de leurs adversaires, ils ont par ailleurs effacé la campagne européenne de 2012, qu’ils avaient achevée à une piètre onzième place. Cet énième sacre donne l’impression que l’équipe de France dispose d’un vivier quasi inépuisable, comme l’a prouvé l’émergence de joueurs – Valentin Porte, Luka Karabatic ou le gardien Cyril Dumoulin – jusque-là dans l’ombre des glorieux anciens. «On a créé un état d’esprit autour de l’équipe de France, cet état d’esprit se transmet de génération en génération», a souligné le sélectionneur, Claude Onesta. L’Espagne, championne du monde en titre, a pris la troisième place de la compétition après sa victoire 29-28 sur la Croatie dans la «petite finale».
Sercan Yildirim et Volkan Sen, bientôt le retour du duo offensif ?
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Un trafic international de tracteurs volés a été démantelé -
Neuf personnes de nationalité roumaine impliquées dans un trafic international de tracteurs volés ont été interpelées lors d’une opération menée conjointement en France, en Espagne et en Roumanie, a annoncé la gendarmerie française. Au total, 42 tracteurs agricoles neufs ont été dérobés entre avril 2012 et novembre 2013 pour un préjudice éva-
lué à plus de 3,2 millions d’euros, dit-elle dans un communiqué. Certains véhicules ont été retrouvés dans différents pays européens (Allemagne, Hongrie, Roumanie) après avoir été maquillés en vue de leur revente à mi-prix. «C’est une affaire peu commune. A ma connaissance, il y a eu un seul précédent avec des interpellations opérées en juillet
2012 dans le cadre d’un dossier instruit à Versailles (Yvelines)», a indiqué Philippe Jaegle, vice-procureur de la Juridiction inter-régionale spécialisée (JIRS) à Bordeaux.
LES TRACTEURS DÉROBÉS ÉTAIENT CHARGÉS DANS DES SEMI-REMORQUES Quatre des délinquants présumés ont été arrêtés en Roumanie, quatre en Espagne et un en France lors d’une opération «globale» menée le 21 janvier en présence d’enquêteurs français de la section de recherches de Limoges. Selon la gendarmerie, des ressortissants roumains domiciliés en Espagne venaient en France pour commettre les vols, principalement dans les concessions de l’américain John Deere. Les tracteurs dérobés étaient chargés dans des semiremorques placés aux abords des lieux de vols. L’équipe retournait en Espagne après chaque vol tandis que les camions chargés faisaient route vers l’Est, en particulier vers la Hongrie, où une autre partie de l’organisation se chargeait de les maquiller et de les revendre. «Il s’agissait de transformer les identifiants apparents des véhicules pour qu’ils ne soient pas reconnus comme volés comme c’est le cas dans les vols de voitures», a précisé le vice-procureur.
Un hologramme d’Erdogan à Izmir
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En Turquie, les avatars holographiques font leur apparition. Au cours d’un meeting à Izmir, qui semble lancer la campagne des élections municipales, le Premier ministre turc Erdogan a exhorté le 26 janvier, ses fidèles «à ne pas perdre leur temps» par le biais d’un hologramme. Le procédé est novateur et il a été déjà utilisé par d’autres responsables politiques comme l’Indien Nerendra Modi qui fut le premier homme politique à l’employer. Le meeting s’est tenu dans l’un des fiefs de l’opposition menée par le CHP et dans un contexte de fortes tensions politiques et de déclarations choc du Premier ministre contre le Hizmet.
Un lapin placé dans l’oreille de Mandela irrite Pretoria
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Le gouvernement sud-africain entend retirer un petit lapin en bronze placé malicieusement par des sculpteurs dans l’oreille d’une statue géante de Nelson Mandela inaugurée en décembre. Le gouvernement indique vouloir «restaurer l’intégrité» de cette statue en bronze haute de 9 mètres, la plus grande représentation au monde du héros de la lutte anti-apartheid, mort le 5 décembre dernier à l’âge de 95 ans. Les sculpteurs Ruhan van Vuuren et Andre Prinsloo ont expliqué avoir placé le petit lapin en guise de marque de fabrique, les autorités leur ayant interdit de signer leur oeuvre. L’animal représente également le peu de temps dont les deux artistes disposaient pour réaliser leur oeuvre, le mot «haas» signifiant en afrikaans lapin mais aussi la «hâte».