Fr n° 301

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Dice Kayek à la conquête de la mode

Découvrir la culture ouïghoure

CULTURE12

WWW.ZAMANFRANCE.FR

Les intentions de vote pour l’AKP baissent à 36 %

SOCIETE05

Officiel : Koray Günter à Galatasaray SPORT15

07 - 13 FEVRIER 2014 N° 301 Prix : 2,5 €

Quel est le vrai bilan de Manuel Valls ?

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Il fait régulièrement l’actualité politique. Présenté comme le ministre le plus populaire du gouvernement Ayrault, Manuel Valls semble avoir toujours le vent en poupe. Mais qu’en est-il de son bilan 2013 ? A-t-il fait baisser la délinquance en France ? Et quid de sa politique des cultes ? Zaman France revient sur une année plutôt en dents de scie pour le patron de la place Beauvau.

La course pour la mairie d’Istanbul sera rude...

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A deux mois des élections municipales, un sondage montre que la popularité de l’AKP a fortement diminué sur fond de l’affaire de corruption qui a secoué le gouvernement et mené à la démission de quatre ministres. RTURQUIE 06

rTURQUIE 06

Quelle Turquie en 2014 ? rOPINION 14

Quand la fatwa du plus célèbre théologien turc fait jaser la Nation

L’homme fort du gouvernement. Et, si l’on en croit les sondages, le ministre le plus populaire du gouvernement socialiste. Manuel Valls semble toujours consolidé par son image d’homme politique indéboulonnable. Pourtant, la publication des chiffres de 2013 sur la délinquance, la sécurité publique et la lutte contre la criminalité, par l’Observatoire national de la délinquance

et des réponses pénales, nuance fortement cette impression. On y apprend ainsi concernant les cambriolages, que ceux-ci ont connu une hausse de 6,4 % en zones urbaines et de 4,7 % en zones rurales. Malgré le lancement d’un plan destiné à enrayer ce phénomène en provenance, d’après la police, des pays de l’Est, le ministre n’a pas pu inverser la tendance. RFOUAD BAHRI FRANCE 03

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Il ne manquait plus que le scandale de corruption qui touche le gouvernement éclabousse un des théologiens les plus connus de Turquie. C’est désormais chose faite. Hayrettin Karaman, 80 ans, autorité du droit musulman (fiqh), a dû intervenir plusieurs fois pour clarifier un avis religieux qui a été mal interprété. RTURQUIE 07

CIRCONCISION EN EUROPE :

CE QUE DISENT LES LÉGISLATIONS -

En se positionnant pour un encadrement de la pratique de la circoncision non médicalement justifiée, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a suscité les inquiétudes des communautés juives et musulmanes concernées. Comment expliquer cette recommandation européenne? Qu’en est-il aujourd’hui de la circoncision en Europe ? Zaman France fait le point.RSOCIETE 04

Les écoles turques en Afghanistan : «un véritable modèle d’éducation»

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Au cours de sa visite à Istanbul, le ministre afghan de l’Education a salué l’action des 17 écoles turques dans son pays. Interrogé par Zaman, Ghulam Farouq Wardak a invité les entrepreneurs turcs à ouvrir plus d’écoles. RCELIL SAGIR INTERNATIONAL 11

EDITO

Ce que révèle l’inquiétude sur la circoncision FOUAD BAHRI r02

Musulmans de Bosnie : quand l’aristocratie se convertit

L’âge moyen des Turcs passe à 30 ans et 4 mois

Joseph Dreher vient de publier aux éditions IFPO La Lumière de Muhammad ou la transmission de l’essence prophétique. Il s’agit d’une édition critique du traité du grand savant bosniaque ‘Abd Allah al-Busnawi (1584-1644), cheikh de la confrérie bayramiyye et écrivain de l’école spirituelle de Ibn al-‘Arabî. RCULTURE 13

L’âge moyen de la population turque est passé à 30 ans et 4 mois, selon un recensement mené à la fin de l’année 2013, cité dans un rapport publié par l’Institut statistique turc (TurkStat) mercredi 29 janvier. Au niveau national, l’âge moyen des hommes est de 29 ans et 9 mois alors qu’il est de 31 ans pour les femmes. RTURQUIE 07

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Zaman Okur Hattý: 01 42 00 19 36

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Loi sur la famille : le gouvernement recule

EDITO FOUAD BAHRI

Ce que révèle l’inquiétude sur la circoncision Le 28 janvier, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) a réouvert une discussion sur une résolution non-contraignante recommandant d’encadrer la circoncision qu’elle avait produite le 1er octobre 2013. Autant dire que la tension était palpable dans les communautés juives et musulmanes qui pratiquent le rite de la circoncision, en signe d’alliance à Israël pour les unes et de commémoration du geste d’Abraham pour les autres. La position de l’APCE qui n’a pas été modifiée depuis 2013, repose sur un compromis : la volonté de ne pas interdire une pratique millénaire et très répandue (certaines communautés chrétiennes la pratiquent également, comme les coptes orthodoxes), tout en garantissant aux enfants le respect de leur intégrité physique et/ou médicale. L’avis encourageait les pays européens «à adopter des dispositions juridiques spécifiques pour que certaines interventions et pratiques ne soient pas réalisées avant qu’un enfant soit en âge d’être consulté». En Allemagne, la circoncision est autorisée à des fins religieuses, alors qu’en France elle n’est qu’«admise», c’est à dire tolérée, mais sans fondement légal. Pourtant, l’inquiétude demeure sur ce sujet comme souvent lorsqu’il est question de rites religieux. Ainsi de l’abattage rituel qui là-encore suscite des remous et des positions complexes de la part des autorités européennes, sanitaires, et des institutions religieuses qui voient leur champ de liberté rétrécir à vu d’oeil. C’est probablement l’un des cœurs du problème. Les pratiques religieuses et les traditions qui leur sont attachées semblent désemparer l’Europe. Cette terre qui fut jadis celle de la modernité avant qu’elle ne connaisse les doutes du nihilisme et de la post-modernité ne sait plus comment gérer ces fragments du passé, lointaines réminiscences d’une période où Dieu régnait aussi bien dans les consciences que dans les Constitutions européennes. Ce choc des références, cette réactivation d’un univers où les mondes temporels et spirituels étaient reliés par des pratiques et des rites codifiés, et qui le sont toujours pour des communautés religieuses, apparaît comme une source d’angoisse. En particulier pour notre époque marquée par une succession de crises (économique, écologique, philosophique...). Du désenchantement du monde au retour de Dieu, c’est certainement l’une des clés qui déterminera l’avenir des civilisations. L’Europe par sa centralité géographique et cosmopolite en sera assurément l’un des terrains d’expérimentation et de sa résolution pacifique, sage et intelligente dépendra, à l’évidence, notre devenir commun. f.bahri@zamanfrance.fr

07 - 13 fevrier 2014 ZAMAN FRANCE

Au lendemain des mobilisations réussies de la Manif pour tous, à Paris et Lyon, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a décidé finalement de reculer sur son projet de loi sur la famille. A quelques semaines des élections municipales, la crainte d’une partie de l’opinion publique sur la légalisation de la gestation pour autrui et d’une extension de la procréation médicalement assistée aux couples homosexuels, a donc été déterminante pour l’exécutif français. Entre 100 000 et 500 000 manifestants ont fait le déplacement dimanche 2 février à la Manif pour tous, opposée aux projet de loi sur la famille et aux dispositions concernant la GPA et la PMA.

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Le gouvernement a renoncé à présenter en 2014 un projet de loi controversé sur la famille, au lendemain de manifestations des opposants au mariage homosexuel et sur fond de désaccord entre exécutif et majorité parlementaire sur la gestion de ce dossier. La droite et le collectif «La manif pour tous», organisateur des défilés qui ont réuni des milliers de personnes dimanche à Paris et Lyon, agitent le spectre d’une légalisation de la gestation pour autrui (GMA) et d’une extension aux homosexuelles de la procréation médicalement assistée (PMA). Le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, puis les services du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, ont réaffirmé lundi que le gouvernement s’opposerait à tout amendement parlementaire sur la PMA et la GMA dans le projet de loi sur la famille. Mais les chefs de file des députés PS et Verts ont fait savoir qu’ils n’entendaient pas se laisser dicter leur conduite. «Le droit d’amendement est un droit constitutionnel et si on voulait en user, on en userait», a ainsi déclaré le porte-parole du groupe PS à l’Assemblée, Thierry Mandon.

EVITER UN BRAS DE FER AVEC L’OPINION Le député écologiste Denis Baupin a pour sa part confirmé la volonté du groupe Europe EcologieLes Verts (EELV) de déposer un amendement sur la PMA. Le texte censé adapter les droits des parents et des enfants à l’évolution de la conception

de la cellule familiale devait en principe être soumis au Parlement au printemps prochain. Mais «le gouvernement ne présentera pas de projet de loifamille avant la fin de l’année», a finalement annoncé Matignon. L’entourage du Premier ministre invoque le fait que l’écriture du texte est «loin d’être achevée», que les travaux préparatoires doivent se poursuivre et que le calendrier «très dense» du Parlement ne permet pas d’inscrire ce projet en 2014. A quoi l’Elysée ajoute : «La nécessité de concentrer l’action de l’exécutif sur la lutte contre le chômage et sur le pacte de res-

ponsabilité» proposé par François Hollande aux entreprises pour relancer l’économie et l’emploi. L’exécutif veut de toute évidence éviter de rééditer la situation suscitée en 2013 par la loisur le mariage homosexuel, qui a mobilisé jusqu’à deux millions de manifestants. «C’est une décision à la fois sage et bienvenue parce que les conditions d’un débat apaisé n’étaient pas réunies», a dit le député PS Christophe Caresche. «Les Français ont besoin de se rassembler et le gouvernement et la majorité de se concentrer sur les questions économiques et sociales.»

PHOTO DE LA SEMAINE

En Syrie, un homme porte un enfant blessé qui vient d’être extrait des débris à AlSukkari, Alep, 2 février 2014.

...ET UNE MAUVAISE

UNE BONNE...

A l’occasion de la visite d’Abdullah Gül en Italie, le président italien Giorgio Napolitano a déclaré qu’il soutenait avec ferveur la candidature turque à l’Union européenne. L’Italie souhaite que les pourparlers concernant l’adhésion de la Turquie se poursuivent de façon régulière. Pour la première fois en quatre ans, l’Italie, qui soutient vivement l’adhésion de la Turquie à l’UE, a accueilli

le président turc Abdullah Gül, mercredi 29 janvier. «La décision de commencer les négociations avec la Turquie a été prise à l’unanimité. Puis certains pays européens ont affecté négativement le processus de négociation en bloquant des chapitres et en ralentissant la date de leur ouverture», a affirmé Napolitano, en se référant aux 10 chapitres bloqués par la France et Chypre-sud.

Les sans-abri ont augmenté de 50 % en France depuis 2001 Le nombre de personnes vivant dans la rue a augmenté de 50% entre 2001 et 2013, a déclaré vendredi Christophe Robert, délégué général adjoint de la Fondation Abbé Pierre, qui publie son rapport sur le mallogement en France. Selon cette étude annuelle de la Fondation Abbé Pierre, dont l’appel à lutter contre le phénomène des sans

domicile fixe (SDF) a été lancé il y a 60 ans, 3,5 millions sont mal logés en France en 2014, un chiffre en légère baisse par rapport à 2013. Cette situation résulte de la précarisation des emplois et de l’augmentation du chômage conjugués au manque et au prix des logements, a-t-il souligné.

NOUVELLE

UE : Rome soutient la candidature turque


03 FRANCE

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07 - 13 fevrier 2014 ZAMAN FRANCE

«La voiture sans conducteur est la solution pour la femme saoudienne» C’est ce qu’a affirmé Amira Al-Taweel, l’épouse du prince Walid ben Talal, qui oeuvre pour l’égalité des droits en Arabie saoudite, pays où il est interdit aux femmes de prendre le volant.

Politique sécuritaire, gestion des cultes : le bilan mitigé de Manuel Valls Il fait régulièrement l’actualité politique. Présenté comme le ministre le plus populaire du gouvernement Ayrault, Manuel Valls semble avoir toujours le vent en poupe. Mais qu’en est-il de son bilan 2013 ? A-t-il fait baisser la délinquance en France ? Et quid de sa politique des cultes ? Zaman France revient sur une année plutôt en dents de scie pour le patron de la place Beauvau. FOUAD BAHRI PARIS L’homme fort du gouvernement. Et, si l’on en croit les sondages, le ministre le plus populaire du gouvernement socialiste. Manuel Valls semble toujours consolidé par son image d’homme politique indéboulonnable. Pourtant, la publication des chiffres de 2013 sur la délinquance, la sécurité publique et la lutte contre la criminalité, par l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, nuance fortement cette impression. On y apprend ainsi concernant les cambriolages, que ceux-ci ont connu une hausse de 6,4 % en zones urbaines et de 4,7 % en zones rurales. Malgré le lancement d’un plan destiné à enrayer ce phénomène en provenance, d’après la police, des pays de l’Est, le ministre n’a pas pu inverser la tendance. Même chose au sujet des vols sans violence, en hausse de 4 %,dont plus de 11 à 12 % de vols à la tire en zones urbaines et rurales. Les vols à main armée sont en revanche en diminution depuis quatre ans (- 0,3 % pour la police, - 6 % pour la gendarmerie).

Le patron de la place Beauvau a présenté son bilan pour l’année 2013.

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DURCIR LA LÉGISLATION SUR INTERNET A propos des homicides volontaires, les chiffres diffèrent entre ceux de la police et de la gendarmerie nationale. Ils auraient baissé de 4,2 % pour la police et seraient en hausse de 14,9 % pour la gendarmerie. Le département des Bouches-duRhône est le plus frappé avec 51 règlements de comptes, contre 63 en 2012. Commentant ces chiffres, le ministre de l’Intérieur a écarté d’un revers de la main les critiques. «La délinquance se joue des époques et des frontières. La combattre c’est s’adapter et anticiper », a-t-il déclaré annonçant trois nouvelles priorités : la redéfinition des missions de la police judiciaire, l’intégration des nouvelles technologies au sein de la police et les stratégies contre l’insécurité. Enfin, Manuel Valls a annoncé vouloir un dispositif juridique plus répressif sur inter-

LA MORTALITÉ ROUTIÈRE DIMINUE EN 2013 net et les réseaux sociaux, au nom de la lutte contre la diffusion de messages de haine. «3 Français sur 4 fréquentent désormais l’Internet, cela impose de réviser notre stratégie, de renforcer notre arsenal juridique. Le degré de haine latent, exprimé sur les réseaux sociaux, est d’une intensité incompatible avec notre ambition républicaine», a-t-il précisé.

CULTES : LE PRINCIPE D’INERTIE DE M. VALLS Ministre de l’Intérieur, Manuel Valls est également chargé des Cultes et sur ce dossier, le bilan 2013 reste maigre, en particulier sur la question de l’islam de France. L’année de sa prise de fonction, en 2012, Valls s’était montré ambitieux sur ce sujet. Au point, disait-on dans les coulisses, de souhaiter la création.... d’une autre instance représentative du culte musulman, le CFCM étant jugé trop proche des chancelleries étrangères.

Depuis, rien de nouveau Place Beauvau, le dossier islam étant jugé hasardeux, risqué, en particulier pour celui qui s’est imposé comme un adepte intransigeant de la laïcité. C’est l’analyse de la journaliste Bernadette Sauvaget dans un article publié dans les colonnes de Libération. «Manuel Valls, comme ministre de l’Intérieur, chargé des Cultes, a hérité d’un dossier politiquement polémique et techniquement complexe : l’islam de France». En guise d’exemple, celle-ci rappelle le projet du ministre de créer une Fondation de l’islam de France destinée à récolter des fonds de manière transparente pour la construction de lieux de culte. Valls avait laissé entendre qu’il souhaitait réouvrir ce dossier. Làencore, un projet qui tient davantage du voeu pieux au vu du silence pesant du ministère sur cette question centrale pour les musulmans de France.

La Sécurité routière a enregistré

1 en 2013 une baisse record avec

3250 personnes tuées sur l’année, ce qui représente 11 % de moins qu’en 2012. 400 personnes ont donc été épargnées, a annoncé ce lundi le ministre de l’Intérieur Manuel Valls en présentant le bilan annuel des accidents de la route. En 2012, la baisse avait déjà été de 8 %. L’année de référence reste 1972, avec 18.000 personnes tuées sur les routes françaises. Le nombre d’accidents corporels a diminué de 6,6 %, et la mortalité des 18-24 ans «suit la tendance générale» avec un recul de 10 % en 2013, a précisé le ministre. La baisse de la mortalité impliquant des voitures de tourisme est «la plus importante» (-14 %). Le nombre de piétons tués diminue aussi de 7 %.


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07 - 13 fevrier 2014 ZAMAN FRANCE

Circoncision en Europe : ce que disent les législations En se positionnant pour un certain encadrement de la pratique de la circoncision non médicalement justifiée, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a suscité les inquiétudes des communautés juives et musulmanes concernées. Comment expliquer cette recommandation européenne? Qu’en est-il aujourd’hui de la circoncision en Europe ? Zaman France fait le point. FARIDA BELKACEM PARIS La pratique de la circoncision, comme celle de l’abattage rituel des animaux, est de celle qui préoccupent les communautés juives et musulmanes des pays européens. Acte fondamental de la judéité et pratique importante chez les musulmans, elle fait cependant l’objet de nombreuses critiques, notamment au nom de la protection de l’enfant. Question délicate où viennent se mêler tradition, religion, hygiène, santé, rapport à l’individu et à sa sexualité... Question fâcheuse aussi qui touche au porte-monnaie des pays européens : faut-il ou non accepter de rembourser la circoncision ? C’est pour aider les pays à se positionner que le 1er octobre 2013, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) s’est penchée sur le sujet, via une résolution non-contraignante recommandant d’encadrer la circoncision.

MON AVOCAT CANAN ÖZENICI

La fin du PV à 17 euros d’ici deux ans

La circoncision est une pratique importante chez les musulmans.

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fèrent considérablement d’un pays à l’autre et oscillent entre compromis et fermeté. L’Allemagne par exemple a décidé d’autoriser les parents à effectuer la circoncision de leurs enfants. Cette décision a été le fruit d’une longue polémique. Quelques jours après sa circoncision, un enfant de 4 ans fait une hémorragie. Le Tribunal de grande instance de Cologne statue suite à cet épisode que la circoncision d’un enfant pour des motifs religieux est une blessure corporelle passible d’une condamnation. Le jugement de Cologne a eu des effets en dehors de l’Allemagne : en Autriche et en Suisse, certains hôpitaux ont décidé de ne plus pratiquer ces interventions. Suite à cela, le parlement allemand avait décidé d’autoriser expressément la circoncision pour motif religieux. En France, c’est plutôt la souplesse qui est de mise, puisque comme l’a rappelé le Conseil d’Etat en 2004, «la circoncision est une pratique rituelle dépourvue de tout fondement légal, mais néanmoins admise». En Suède, depuis 2001, la circoncision doit être effectuée par un

UNE QUESTION EUROPÉENNE Les chiffres sont parlants : 30 % de la population mondiale et 14 % de la population française sont circoncis (OMS 2009/ TNS 2008). Et pourtant, aujourd’hui, ni le droit international, ni le droit français n’autorisent la circoncision. Il y a quatre mois, l’APCE, qui réunit des élus de 47 pays-membres a adopté la résolution 1952 à 78 voix pour, 13 contre et 15 abstentions. Dans ce texte, elle se dit «préoccupée par un certain type de violations de l’intégrité physique des enfants, que les tenants de ces pratiques présentent souvent comme un bienfait pour les enfants». Elle englobe dans ces pratiques «les mutilations génitales féminines, la circoncision des jeunes garçons pour mo«En France, la circoncision est une pratique rituelle tifs religieux, les interventions dépourvue de fondement légal, mais admise» médicales à un âge précoce sur les enfants intersexués, et les piercings, les tatouages ou les opérations de professionnel de la santé ou un religieux spéchirurgie plastique qui sont pratiqués auxquels cialement agréé, et ce, avant les deux mois du les enfants sont parfois soumis ou contraints». nourrisson. La diversité de ces législations et Opérant une distinction claire entre excision la crainte d’une interdiction formelle et euroet circoncision, elle n’en appelle pas moins les péenne de la circoncision expliquent certaineÉtats à «définir clairement les conditions médi- ment la réaction des communautés juives et cales, sanitaires et autres à respecter s’agissant musulmanes après l’adoption de la résolution des pratiques aujourd’hui largement répandues 1952 (2013). dans certaines communautés religieuses, telles que la circoncision médicalement non justifiée L’INQUIÉTUDE DES COMMUNAUTÉS des jeunes garçons» et «à adopter des disposi- JUIVES ET MUSULMANES tions juridiques spécifiques pour que certaines Bien que non contraignante et ayant valeur de interventions et pratiques ne soient pas réalisées recommandation, la résolution du Conseil de avant qu’un enfant soit en age d’être consulté». l’Europe a été très mal reçue, notamment par Une condition impossible pour le culte juif où la les délégations étrangères (Israël, Azerbaïdcirconcision, dite Brit Milah, doit être effectuée jan), qui ont défendu des «pratiques millénaires». Les débats se sont d’ailleurs échauffés huit jours après la naissance. au point où les parlementaires rapporteurs du dossier ont eu à se défendre d’un quelconque ENTRE SOUPLESSE ET FERMETÉ En se positionnant ainsi, l’Assemblée parlemen- racisme latent. Face à ce qui leur a semblé être taire a voulu guider les parlements nationaux le premier pas vers une interdiction de la cirqui sont, eux, libres d’interdire ou d’autoriser la concision en Europe, les communautés juives pratique. A l’heure actuelle, les législations dif- et musulmanes d’Europe ont exprimé leurs

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inquiétudes. Une pétition rédigée par le Crif, le Congrès juif mondial et le Congrès juif européen est parue dans le Monde, intitulée «Non à la remise en cause de la circoncision». Du côté musulman, Abdellah Zekri du CFCM, a rappelé la distinction entre excision et circoncision et l’importance du rite religieux. Mais le 28 janvier 2014, après audition d’experts médicaux et religieux, l’Assemblée parlementaire a confirmé son texte, tout en déclarant ne pas prévoir de nouvelle résolution.

Les arguments européens des pour et des contre

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En octobre et en janvier, les débats à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe ont vu s’affronter les tenants de «l’intégrité physique de l’enfant» et ceux de la «liberté religieuse». L’Assemblée parlementaire a voulu savoir si la circoncision était une pratique dangereuse ou bénéfique pour l’enfant...mais elle s’est retrouvée confrontée à l’absence de véritable consensus médical sur le sujet. Des études montrent que la circoncision permet de réduire le risque de maladie sexuellement transmissible... Mais, leur rétorquent leurs adversaires, ces études sont sujettes à caution car financées par des «lobbys religieux américains». L’Assemblée a aussi voulu savoir si cette intervention attentait à l’intégrité physique de l’enfant. Au final, ce sont les données pratiques qui ont guidé la résolution du Conseil de l’Europe, qui a retenu que les partisans de «l’intégrité physique de l’enfant» ne demandent pas que soit interdite la circoncision, mais qu’elle soit effectuée à un moment où l’enfant est en âge de donner (ou non) son consentement. Autre argument pratique qui a prévalu dans l’adoption de la résolution européenne : si l’intervention doit avoir lieu de toute façon, il vaut mieux qu’elle soit encadrée de façon médicale. L’option de l’interdiction, qui conduirait les familles à procéder à ces interventions chirurgicales en dehors de toute surveillance médicale, semblant évidemment la moins appropriée.

La fin du PV à 17 euros est arrivée ? Oui ! La nouvelle réforme concernant la dépénalisation des contraventions a été votée. Désormais, il a été donné à chaque ville la possibilité de gérer son stationnement qui doit devenir un outil d’organisation dans sa politique de transport et de circulation. Selon ses quartiers, ses priorités, la municipalité, c’est-à-dire le maire pourra faire moduler le prix de stationnement. «Peu dissuasive à Paris, elle est excessive dans nombre de petites communes» dit le Sénateur à l’origine du texte, le maire pourra fixer un montant de la sanction suffisamment élevé pour contraindre l’automobiliste à payer sa place de stationnement. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Les amendes actuelles de 17 euros sont jugées pas assez dissuasives : seuls 10 % des automobilistes paient leur place à Paris. Le taux s’élèverait à 30 % environ en province. A réfléchir, il faut tout de même constater que le montant du stationnement est excessif ! À Paris par exemple, une personne qui souhaite se garer tous les jours doit payer plus de 500 euros par mois ! Qui peut se permettre de verser un tel prix ? Alors nombreux sont ceux qui risquent de se prendre une prune !Une fois la réforme appliquée, on ne parlera plus d’amende. Les sénateurs ont retenu le terme suivant : «forfait de post-stationnement pour occupation du domaine public». En cas de contestation, une juridiction spécialisée, un organisme administratif chargé de la gestion des recours serait créé, ce qui provoque bien sûr la colère des groupements d’avocats spécialisés dans le droit automobile. Tout ceci parce que le PV dépénalisé n’est plus une amende, c’est-à-dire une sanction pénale mais une redevance, une recette fiscale. Avec ce changement de nature juridique, les automobilistes perdent les sérieuses garanties offertes par le droit pénal. S’agissant d’une lourde réforme, le délai prévu, une fois le texte promulgué, serait de deux ans pour sa mise en œuvre. De nombreuses questions d’ordre technique restent à trancher : le recours ou non à l’ANTAI, l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions, qui a développé le procès-verbal électronique. Il faut s’entourer de moyens techniques permettant de livrer des données fiables comme l’heure de passage de l’agent assermenté, le lieu précis du stationnement du véhicule… Un système efficace évitera tout abus de contestation. Pour vos questions : ceruguz@yahoo.fr


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07 - 13 fevrier 2014 ZAMAN FRANCE

Découvrir la culture ouïghoure avec Regard sur les Ouïghour-e-s Jean-Jack et Elisabeth Queyranne.

«Il y a de véritables possibilités de coopération avec la Turquie» Les Ouïghours forment l’une des cinq plus grandes minorités ethniques de l’Empire du milieu.

Beaucoup de Turcs connaissent ou ont déjà entendu parler des Ouïghours, peuple turcophone et musulman d’Asie centrale. Mais que sait-on réellement de ce peuple que l’on considère comme très proche du nôtre ? De sa culture, de son histoire ? SUHEDA ASIK PARIS Oghouz, l’association des étudiants ouïghours de France, a commencé la publication d’une revue scientifique et culturelle, écrite par des universitaires, de manière bénévole. Regard sur les Ouïghour-e-s, est donc le premier trimestriel à faire des publications sur l’étude ouïghoure. Le 3e numéro, qui sera une édition spéciale disponible début mars, aura pour sujet la femme ouïghoure. Déjà présente dans plusieurs bibliothèques universitaires françaises et distribuée dans 17 pays, dont la Chine, cette revue bilingue franco-ouïghoure propose d’aborder diverses facettes de ce peuple, telles que la culture, la littérature, la géo-politique, ou l’histoire. Avec un comité de lecture composé notamment d’un turcologue (Stéphane de Tapia) et de sinologues (Francoise Aubin, Rémi Castets), la revue souhaite rendre accessible au plus grand nombre les problématiques et les recherches scientifiques concernant la culture ouïghoure et l’Asie centrale.

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UNE REVUE OÙ DEUX CULTURES SE REJOIGNENT La revue, qui est donc rédigée en français et en ouighour a un format pour le moins particulier : la langue ouïghoure s’écrivant avec des lettres arabes, elle s’écrit et se lit de de droite à gauche. L’association Oghouz explique : « Nous avons construit cette revue en deux parties : l’une en français et l’autre en ouïghour. Les deux parties, comme les deux cultures, se rejoignent au milieu de la revue sur une œuvre graphique réalisée par un artiste ouïghour. ». La revue est composée de 40 pages. «NOTRE PLUS GRANDE DIFFICULTÉ EST FINANCIÈRE» Dans notre entretien avec Dilnur Reyhan, directrice de publication et fondatrice de Regard sur les Ouïghour-e-s, nous avons abordé les problèmes rencontrés pour la publication de la revue. « La continuité de notre revue dépend complètement du nombre d’abonnements», nous explique Dilnur Reyhan. Ainsi, avec pour seule source de revenu les abonnements, la plus grande difficulté à laquelle est confrontée l’équipe est d’ordre financier. Pour l’instant, les abonnés actuels sont les Ouïghours de France et de la diaspora, et les Français. «Nous essayons d’élargir la publicité de notre revue car les Ouïghours sont très peu médiatisés, voire pas du tout. Il nous faut absolument un média qui représente les Ouïghours, et leur culture. » «NOUS ATTENDONS LE SOUTIEN DES TURCS DE FRANCE» «Nous attendons beaucoup du soutien des Turcs francophones. On est toujours présenté à travers notre identité turque et musulmane. Seulement, l’aide ne vient pas, voire pas du tout de ce côté là. Quand on parle de nous en Occident, on est toujours réduit à cette identité là, mais on n’a pratiquement reçu aucun soutien du côté turc. Ce qui est paradoxal» déplore Dilnur Reyhan. « Nous sommes sur un chemin difficile, on n’est soutenu par aucune organisation. On aimerait être soutenu par les gens qui sympathisent avec les Ouïghours.» Vous pourrez vous procurer la revue dans les points de vente suivants : Librairie Chemins en Pages (Paris 11e) Librairie de la Maison d’Europe et d’Orient (Paris 12e)

Vous pouvez retrouvez plus d’information sur oghouz.org et sur la page Facebook : Uyghurlar’gha Nezer- Regard sur les Ouïghours

QUI SONT LES OUÏGHOURS ? Peuple résidant au Nord-Ouest de la Chine, dans une région

1 officiellement nommée Région autonome ouïghoure du Xin-

jiang (Turkestan oriental), les Ouïghours forment l’une des cinq plus grandes minorités ethniques de l’Empire du milieu et se distinguent en de nombreux points des Hans (peuple chinois). On dénombre actuellement 10 millions de Ouïghours au Turkestan oriental et 2 millions à travers le monde notamment grâce à une récente diaspora internationale (notamment au Kazakhstan, en Turquie, en Allemagne...). Musulmans, parlant une langue turque et utilisant un alphabet arabe, les Ouïghours habitent les oasis entourant le désert du Taklamakan, étapes incontournables de ce qui fut la Route de la Soie.

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Invités mardi 28 janvier par Radio Made In Turkey de Lyon, le président du conseil régional de Rhône-Alpes Jean-Jack Queyranne, et son épouse Elisabeth, candidate aux élections municipales de Bron, ont évoqué à plusieurs reprises la Turquie. JeanJack Queyranne a notamment évoqué la visite du président Hollande et les enjeux économiques pour sa région. «C’est pour la Turquie un moment important sur la scène internationale, il faut maintenir un dialogue avec la Turquie et insister sur les conditions d’entrée».

L’ENTREPREUNARIAT TURC, «UNE VRAIE DÉMARCHE D’INTÉGRATION» Concernant les projets en cours de signature entre la France et la Turquie et évalués à 15 milliards d’euros, le président rhônalpin a insisté en particulier sur l’importance des secteurs du transport ferroviaire, du nucléaire civil, de l’aéronautique, de la biotechnologie et de la pharmacie. «Il y a de véritables possibilités de coopération avec la Turquie» conclut-il. «Pour la région Rhône-Alpes, en plus des bourses attribuées aux élèves voulant étudier en Turquie, le domaine qui intéresse particulièrement notre région serait l’agroalimentaire où des échanges intéressants pourraient être réalisés», a ajouté Jean-Jack Queyranne. Le président du conseil régional de Rhône-Alpes en a profité pour souligner la hausse permanente du nombre d’entrepreneurs franco-turcs dans la région, «une vraie démarche d’intégration» a-t-il commenté. UN ATOUT FRANCO-TURC POUR LES MUNICIPALES Pour Elisabeth Queyranne, la Turquie, pays dans lequel elle s’est rendue est «un pays différent, très chaleureux... je me suis sentie en Europe». La candidate à la mairie de Bron compte d’ailleurs s’appuyer sur le dynamisme de l’un de ses collaborateurs Fatih Demiray, président de la FEDIF Rhône-Alpes (Fédération des entrepreneurs et des dirigeants Francoturcs), pour remporter l’élection. «C’est en allant à la rencontre des jeunes chefs d’entreprise, du monde économique, que j’ai rencontré Fatih Demiray», ditelle en ajoutant : «Je vais gagner avec Fatih, qui est pour moi un exemple et un modèle de réussite». Fatih Demiray raconte pour sa part sa rencontre avec la candidate : «J’ai vu qu’Elisabeth Queyranne avait une équipe importante qui utilise pleinement les compétences de chacun pour avancer. J’y ai adhéré».


06 TURQUIE

07 - 13 fevrier 2014 ZAMAN FRANCE

Les intentions de vote pour l’AKP baissent à 36 % A deux mois des élections municipales turques, une étude révèle que la popularité de l’AKP a fortement diminué sur fond de l’affaire de corruption qui a secoué le gouvernement et mené à la démission de quatre ministres.

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3038 personnes dans 42 provinces turques ont été interrogées par l’enquête de l’institut Veritas.

Une enquête menée par l’institut de collecte de données et de recherche, Veritas, auprès de 3038 personnes dans 42 provinces de Turquie montre que le soutien pour l’AKP est tombé à 36,4 % alors qu’il était de quasiment 50 % lors des élections nationales de 2011. Ce taux est également inférieur à celui des élections municipales de 2009, 38 %. Selon ce sondage, le CHP récolterait 28,8 % des votes aux municipales alors que le MHP recueillerait 20,5 % et le BDP 7,4 %. Autre fait marquant, deux partis du centre-droit, le Parti de la Grande unité (BBP) et le Parti de la Félicité (SP) gagnent également en popularité. Alors que le BBP recueille 2,8 % des votes, le SP, lui, obtient 1,9 % des votes. Quant aux électeurs indécis, ils représentent une part importante, soit 21,5 %. La plupart d’entre d’eux ont déclaré qu’ils voteraient en fonction des candidats plutôt qu’en fonction d’un parti. Veritas a également demandé aux personnes interrogées pour quel parti elles voteraient si des élections législatives se tenaient dans les prochains jours. Selon les résultats, 37,9 % voteraient pour l’AKP, alors qu’ils sont 27,4 % à dire qu’ils voteraient pour le CHP et 18,8 % pour le MHP. Résultat, l’AKP a perdu plus de 10 % d’intentions de vote par rapport aux élections de 2011.

DES TURCS SCEPTIQUES ET MOINS OPTIMISTES Le sondage montre que la plupart des Turcs soutiennent les différentes enquêtes anti-corruption qui ont impliqué plusieurs proches du gouvernement. Selon l’étude, 59,3 % des interrogés ont déclaré que les procureurs avaient bien fait de procéder aux enquêtes anti-corruption malgré les tentatives du gouvernement de qualifier l’enquête de complot de l’étranger. 28,6 % des interrogés disent considérer ces enquêtes comme un complot international visant le gouverne-

ment. Plus de 60 % des interrogés affirment ne pas approuver la décision du gouvernement de réaffecter les policiers et les membres de l’appareil judiciaire. Environ 63 % se disent opposés à l’intervention du gouvernement dans la justice via le projet de loi du HSYK. Concernant les solutions de sortie de crise de la Turquie, les Turcs sont 60,2 % à soutenir la réintégration des fonctionnaires dans la police et la justice, 71,6 % veulent que l’Etat mette fin à ses interventions dans le système judiciaire et 71,3 % soutiennent l’intervention du président Gül pour dissiper les tensions. Selon l’étude, les problèmes majeurs en Turquie sont les problèmes économiques (35,8 %), la corruption (19,1 %), l’éducation (9,6 %) et le terrorisme (5,5 %). L’appréhension des Turcs sur l’avenir de leur pays est de plus en plus forte : 32,7 % sont optimistes quant à l’avenir de la Turquie contre 50,5 % en juillet 2013.

Pour qui voteriez-vous s’il y avait des élections municipales ? (en %)

LE PRÉSIDENT GÜL PLÉBISCITÉ Le sondage montre également que les Turcs sont opposés au projet de fermeture des instituts de soutien scolaire privés. La majorité des personnes interrogées (65,7 %) sont contre cette mesure. Tandis que les soutiens de l’AKP sont 59,8 % à être contre l’interdiction des dershane, ils sont 72,8 % du côté du CHP. Plus de 72 % des soutiens du MHP et environ 73 % des soutiens du BDP sont opposés à la fermeture forcée des dershane en Turquie. Enfin, presque la moitié des Turcs disent préférer voir Abdullah Gül à la présidence du pays à l’issue des élections de cet été. Gül recueille ainsi 47 % des votes, en supposant qu’il se présentera pour un autre mandat, alors que le Premier ministre Erdogan récolte seulement 17,5 % de votes favorables. Dans une enquête datant de février 2012, Erdogan avait recueilli 37,6 % d’intentions de vote et Gül 30,6 %.

Pour qui voteriez-vous s’il y avait des élections présidentielles ? (en %)

La course pour la mairie d’Istanbul sera rude REUTERS AVEC TODAYSZAMAN.COM ISTANBUL Une bataille qui s’annonce rude. Deux mois avant les élections municipales qui pourraient transformer le paysage politique de la Turquie, le principal candidat de l’opposition pour le poste de maire d’Istanbul, Mustafa Sarigül, s’attaque à l’un des bastions de l’AKP. Le parti de Sarigül, le CHP, espère en particulier remporter une majorité de votes dans le quartier conservateur de Fatih, centre historique d’Istanbul. «Cela fait 20 ans que nous perdons les élections dans ce quartier», a déclaré Oguz Kaan Salici, président du CHP à Istanbul.

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Le député AKP Muhammed Çetin démissionne

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Le député AKP Muhammed Çetin a démissionné le vendredi 31 janvier pour protester contre l’affaire de corruption dans laquelle les fils de trois ministres, des hommes d’affaires proches du gouvernement ainsi que le directeur de la Halkbank ont été impliqués. Muhammed Çetin est passé devant le comité de discipline du parti le 16 janvier dernier pour être expulsé après avoir fait une blague sur une boîte à chaussures, en référence à la boîte à chaussures dans laquelle le directeur de la Halkbank avait dissimulé 4,5 millions de dollars. Le passage du député devant le comité de discipline du parti montre que l’AKP craint l’infidélité de ses députés, alors que des amendements légaux visant à réorganiser les organes judiciaires doivent bientôt être votés au Parlement. Le 31 décembre 2013, le député AKP, Hasan Hami Yildirim, avait démissionné pour protester contre les réactions du gouvernement face à l’enquête anti-corruption. Avant cela, trois députés, Erdal Kalkan, Ertugrul Günay et Haluk Özdalga, avaient également quitté le parti. Le nombre total de députés AKP qui ont démissionné s’élève désormais à sept.

UN TEST DE POPULARITÉ Les élections municipales du 30 mars constitueront le tout premier test de popularité d’Erdogan depuis les manifestations de l’été 2013 et l’affaire de corruption du mois dernier. La chute de la livre turque diminue aussi la crédibilité du Premier ministre en termes de gestion financière. De bons résultats à Istanbul, Ankara et Izmir (l’un des bastions du CHP) pourraient encourager Erdogan à présenter sa candidature pour les élections présidentielles à la mi-2014. Mais de moins bons résultats pourraient aussi le pousser à se présenter au poste de Premier ministre pour la quatrième fois. La querelle entre Erdogan et l’intellectuel musulman Fethullah Gülen, accusé par le Premier ministre d’être derrière l’enquête anti-corruption, a sapé la réputation des deux parties. Mais, selon un sondage publié le jeudi 30 janvier, l’AKP gagnerait quand même les élections si elles devaient se tenir ces prochains jours. «Istanbul n’est pas uniquement

Le principal candidat de l’opposition pour le poste de maire d’Istanbul, Mustafa Sarigül, s’attaque à l’un des bastions de l’AKP.

une ville. C’est la perle du monde, la mère de toutes les villes», a déclaré Erdogan. «Ceux qui ne comprennent pas le sens de la conquête et du conquérant ne peuvent pas prendre la tête d’Istanbul», a-t-il dit devant une foule euphorique.

SABRI ERBAKAN, CANDIDAT CHP POUR LE QUARTIER FATIH «J’ai toujours été respectueux de toutes les religions et ai toujours défendu la laïcité qui respecte chacun», a affirmé Sarigül à Reuters, souhaitant montrer que le CHP peut casser son image de parti fermé à l’élite laïque. «Le CHP embrasse tous les segments de la société», a déclaré Sarigül, en visite dans le quartier de Fatih. Le choix du candidat CHP pour ce quartier, Sabri Erbakan, neveu de l’ex-Premier

ministre Necmettin Erbakan, vise à attirer plus d’électeurs conservateurs. En 2009, le CHP avait remporté 30 % des votes dans le quartier Fatih, contre 43 % pour l’AKP.

UN DÉBAT ENVENIMÉ Devant ses soutiens, Erdogan a rappelé les accusations de corruption contre l’homme qui pourrait changer sa destinée politique. Il a montré la copie d’un rapport du CHP sur les activités illégales de Sarigül. Celui-ci a rejeté les accusations qu’il a qualifiées de «sale propagande». Autant dire que les rumeurs selon lesquelles les sympathisants de Gülen pourraient soutenir la candidature de Sarigül n’ont pas calmé les nerfs d’Erdogan. Pour toute réponse, Sarigül a dit qu’il avait de «bonnes relations avec toutes les communautés».


07 TURQUIE

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Quand la fatwa du plus célèbre théologien turc fait jaser la Nation Il ne manquait plus que le scandale de corruption qui touche le gouvernement éclabousse un des théologiens les plus connus de Turquie. C’est désormais chose faite. Hayrettin Karaman, 80 ans, autorité du droit musulman (fiqh), a dû intervenir plusieurs fois pour clarifier un avis religieux qui a été mal interprété. SAMI KILIÇ PARIS Le théologien de service. Voilà ce qu’est devenu le respectable Hayrettin Karaman en moins de deux. Le célèbre «canoniste» essaie d’éteindre l’incendie qui le fait passer pour la caution religieuse d’Erdogan, Premier ministre turc englué dans un scandale de corruption. Celui qui délivre la fatwa bénissant le vice pour des raisons politiques. Un malentendu qui a flanqué des contorsions jusqu’aux plus farouches de ses adversaires.

L’âge moyen des Turcs passe à 30 ans et 4 mois

UN DES AUTEURS LES PLUS ÉCOUTÉS DU PAYS Hayrettin Karaman, c’est avant tout celui qui a refusé le poste de président du Diyânet (grand mufti) après le coup d’Etat de 1980. Le professeur de droit musulman qui a claqué la porte de l’université en 2001 pour protester contre l’interdiction du voile. Et c’est surtout un des auteurs les plus prolixes et les plus écoutés du pays. Calme de nature et peu porté à la controverse, il a toujours eu un capital de sympathie auprès du grand public. Il est notamment connu pour avoir délivré une fatwa qui permet aux musulmans d’acheter leur résidence principale grâce à un crédit bancaire avec intérêts à la condition d’avoir exploré auparavant toutes les autres voies possibles comme le prêt familial ou amical. Mais à l’heure où tout le monde croche tout le monde depuis la révélation des affaires, il a été happé par le tourbillon. Rapidement, une rumeur a couru. Il aurait délivré une fatwa de complaisance qui autorise les décideurs proches de l’AKP, parti du Premier ministre à forte sensibilité religieuse, à prélever des commissions sur chaque marché public attribué. Le célèbre «humus» ou «droit de quint» (impôt d’un cinquième qui revenait au Prophète lors du partage du butin et qui reste encore prélevé aujourd’hui dans le monde chiite), appliqué au 21e siècle Cette somme permettrait de financer des écoles, des mosquées et des fondations dont celle du fils du Premier ministre, la TURGEV, la Fondation pour la jeunesse et l’éducation en Turquie qui distribue bourses et aides au logement aux étudiants pauvres. LA CLÉ DE VOÛTE DE LA COMBINE ? Dans sa chronique du journal Yeni Safak, le professeur Karaman a reconnu avoir été approché pour répondre à la question de savoir s’il était religieusement licite d’inciter les hommes d’affaires qui ont obtenu des marchés à faire des dons à des associations humanitaires. La formulation alambiquée de la réponse a enflammé les réseaux sociaux : «Si les entrepreneurs qui sont incités à faire ces dons ne l’auraient pas fait sans cette incitation, ou s’ils les ont faits dans le seul dessein d’obtenir dans l’avenir d’autres contrats, leurs dons restent licites mais ils ne peuvent être considérés comme de bonnes œuvres. Licites car l’association qui les reçoit en bonne et due forme ne connaît pas les circonstances du don. En revanche, si la passation du marché est directement liée à la condi-

Karaman et Erdogan lors de la réunion du Comité des Sages sur la question kurde.

tion d’un don, ce don est illicite». La complexité des nuances étant vite passée à la trappe, Karaman est apparu comme la clé de voûte de la combine…

DANS UN CLIMAT DE SUSPICION... Il faut dire que le climat de suspicion ne lui a pas facilité la tâche. Le procureur qui avait voulu convoquer le fils du Premier ministre pour lui poser des questions sur le financement de cette fondation s’était heurté à la résistance des policiers qui avaient tout bonnement refusé

de lui obéir. Il avait ensuite été muté. Accablé, Karaman a dû remettre les points sur les i : même si l’intention du donateur est intéressée, son don est licite pour la fondation qui ne peut, par la force des choses, sonder la pureté des cœurs. Quelques jours plus tard, Tayyip Erdogan, déclarera ne pas comprendre le sens des attaques contre le théologien. «Oui, j’incite tous les entrepreneurs à aider les écoles, les mosquées, les établissements culturels et sportifs. Il ne saurait y avoir de corruption puisqu’il n’y a pas d’enrichissement person-

nel et surtout parce que la législation prévoit des réductions d’impôt pour ce type de dons», avait précisé le Premier ministre. Mümtaz’er Türköne, politologue de renom et chroniqueur à Zaman, a quant à lui critiqué cette pratique qui entraînerait qu’on le veuille ou non un système de rente. Il a dénoncé cette facilité qu’ont les islamistes à jouer sur les nuances du droit pour ne pas rejeter clairement la corruption et le trafic d’influence. L’appel qu’il a lancé au Diyânet pour trancher la question n’a pas pour l’heure été entendu.

EMRAH GENÇ ISTANBUL L’âge moyen de la population turque est passé à 30 ans et 4 mois, selon un recensement mené à la fin de l’année 2013, cité dans un rapport publié par l’Institut statistique turc (TurkStat) mercredi 29 janvier. Au niveau national, l’âge moyen des hommes est de 29 ans et 9 mois alors qu’il est de 31 ans pour les femmes. Sinop est la ville ayant la moyenne d’âge la plus élevée : 38 ans et 2 mois. Suivent les villes de Balikesir (37 ans et 7 mois) et d’Edirne (37 ans et 6 mois). La moyenne d’âge la plus faible a été recensée à Sirnak (18 ans et 7 mois), suivie de Sanliurfa (19 ans) et d’Agri (19 ans et 7 mois). En 2012, l’âge moyen du pays était de 30 ans et 1 mois. La Turquie est l’un des pays les plus peuplés d’Europe. La population, qui était de 75.627.384 millions en 2012, a connu une augmentation de 1.040.480 millions de personnes en 2013. Selon les statistiques, la population actuelle d’Ankara est de 4.064.074 millions alors qu’Istanbul reste la ville la plus peuplée du pays avec un nombre total d’habitants s’élevant à 14.160.467. En tout, 18,5 % de la population turque vit à Istanbul.

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08 TURQUIE

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L’opération séduction d’Öcalan en direction des Arméniens De sa prison où il purge une peine d’emprisonnement à perpétuité, le leader du PKK, parti des travailleurs du Kurdistan, Abdullah Öcalan, a tendu la perche aux Arméniens. Ces derniers avaient en effet haussé le ton après avoir été assimilés à l’«Etat parallèle» par Bese Hozat, autre figure importante du mouvement kurde. SAMI KILIÇ PARIS C’est en patriarche et figure tutélaire de la cause kurde qu’Abdullah Öcalan a pris la plume pour s’adresser directement aux Arméniens d’après une information de nos confrères de Hürriyet Daily News. Il voulait dissiper un malentendu. Dans un contexte d’incertitude sur l’avenir du processus lancé par le gouvernement turc pour régler la «question kurde», Abdullah Öcalan n’avait pas le luxe de lutter sur plusieurs fronts. Il s’est donc résolu à envoyer une lettre au journal turco-arménien, Agos. Une sorte d’«adresse» qui contient pêle-mêle considérations historiques et objurgations amicales.

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Öcalan a écrit à la communauté arménienne dans une lettre publiée par le journal turcoarménien Agos.

DISSIPER UN MALENTENDU Récemment, Bese Hozat, la co-présidente du KCK (Union des communautés du Kurdistan), extension civile du PKK, avait dénoncé la collusion des lobbys güleniste, arménien, juif et grec. Elle les avait assimilés à des «Etats parallèles» qui tentent d’entraver la résolution de la question kurde. Immédiatement, le HDP (parti démocratique des peuples), nouveau parti pro-kurde à côté du BDP (parti de la paix et de la démocratie), s’était désolidarisé en qualifiant de «préoccupante» cette assertion. En effet, les communautés arménienne, juive et grecque qui ne comptaient plus respectivement que 60 000, 20 000 et 2 000 membres, avaient été elles-mêmes victimes de persécutions ourdies par l’«Etat profond» ! L’an dernier, Öcalan avait lui-même évoqué l’action néfaste de trois lobbys, juif,

arménien et grec. Ses partisans avaient été contraints de justifier ses propos en affirmant qu’il avait entendu parler des lobbys qui oeuvrent aux Etats-Unis et non en Turquie.

LES «LOBBYS DU CAPITAL» ET «LES STRUCTURES DU TYPE COMMUNAUTÉS» Aujourd’hui, Öcalan semble donc vouloir rectifier le tir en essayant de se ménager le soutien et la sympathie de la communauté arménienne. Invoquant les effets de la «modernité capitaliste» et de l’idée d’Etat-nation, il a souligné la proximité entre les peuples kurde et arménien en les présentant comme des compagnons d’infortune. Il a exhorté les Arméniens à ne pas succomber aux discours des «Arméniens nationalistes» et à épauler les Kurdes dans la revendication de leurs droits. Il a également lancé un appel à l’Etat turc pour qu’il reconnaisse le «génocide» arménien. Selon lui, le combat des Kurdes ne concerne pas seulement le «peuple kurde» mais englobe également la défense des libertés «de tous les peuples et de toutes les croyances présents sur cette géographie». Côté obstacles, il a changé son fusil d’épaule en pointant dorénavant les «lobbys du capital» et «les structures du type communautés». «Le grand ami des peuples et l’honorable fils du peuple arménien, Hrant Dink, a été assassiné par les agents de cette sale mentalité», a-t-il avancé. Enfin, il a dénoncé les «structures profondes, parallèles, les lobbys et les communautés» qui essaient de saboter les efforts de réconciliation.

UNE LETTRE «IMPORTANTE ET PRÉCIEUSE» Robert Koptas, rédacteur en chef d’Agos, par ailleurs successeur et gendre de Hrant Dink, a estimé que la lettre était «importante et précieuse». En revanche, il a noté qu’Öcalan faisait l’impasse sur «le rôle joué par les Kurdes en 1915». Ahmet Türk, un autre poids lourd de la mouvance kurde, avait demandé pardon aux Arméniens et aux Syriaques

pour «les violences commises par nos grands-pères». Selon Koptas, la référence aux lobbys, structures et communautés demeure néanmoins trop vague. Yetvart Danzikyan, chroniqueur à Agos, a critiqué pour sa part la focalisation sur les «Arméniens nationalistes» qui voudraient saper la concorde nationale. La clarification n’en a pas moins été saluée au nom de la «fraternité des peuples».

La version turque de l’Encyclopédie de l’islam voit enfin le jour SAMI KILIÇ PARIS La Fondation du Diyânet a publié, après plus de 30 ans de labeur, l’unique encyclopédie du monde islamique concoctée par des savants musulmans. Elle condense toutes les connaissances acquises dans tous les domaines liés à la civilisation islamique. En 1892, le Congrès international des Orientalistes avait décidé de rédiger une encyclopédie de référence sur l’aire islamique dans tous ses aspects. En 1938, la version complète en 5 volumes de l’Encyclopédie de Leiden (du nom de la maison d’édition hollandaise) avait vu le jour et s’était rapidement imposée dans l’islamologie. En 1954, une seconde édition avait permis de la réactualiser. Ce n’est qu’en 1987 que les Turcs l’avaient traduite. Mais en 1983, le Diyânet, la présidence aux affaires religieuses, avait décidé de créer une fondation spécialement dédiée à la confection d’une encyclopédie dépouillée des références trop orientalisantes. Résultat après trois décennies : 1 928 spécialistes mobilisés, 44 volumes et 16 855 en-

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trées pour «résumer» 14 siècles ! La Fondation a voulu rassembler le plus d’informations possibles : les données relatives à la religion, à la science, à la politique, à la culture, à la littérature, aux œuvres, aux courants islamiques, à la géographie et à l’histoire des régions et des personnages liés à l’islam.

«L’HISTOIRE D’UNE RENAISSANCE» Lors de la cérémonie de présentation organisée par le Diyânet, le Premier ministre, Tayyip Erdogan, a salué la réussite du projet et l’ampleur du message qu’il véhicule : «Dieu avait ordonné à un prophète analphabète de lire au nom de Dieu et voilà le résultat, une grande et riche civilisation». Le Premier ministre a profité de l’occasion pour envoyer une pique à peine voilée : «c’est une civilisation qui a envoyé dans les poubelles de l’histoire toutes sortes de faux prophètes, de faux cheikhs, de faux savants, l’esprit vide, le coeur vide»… Emu, le président du Diyânet, Mehmet Görmez, a évoqué la genèse du projet et le chemin parcouru. «C’est

l’histoire d’une renaissance. En 1949, lorsque la faculté de théologie d’Ankara a été créée, il n’y avait pas un seul universitaire capable de diriger le département des sciences islamiques. Le Bosniaque Muhammed Tayyib Okiç a été invité pour former nos savants. Et dans les années 1980, nous avons accumulé un tel degré de savoir que nous avons pu lancer cet énorme chantier». L’Encyclopédie, qui est disponible gratuitement sur Internet à l’adresse www.tdvia.org/, sera traduite à terme en arabe et en anglais. Une version abrégée de 5 volumes devrait prochainement sortir en russe et en chinois. Les Iraniens poursuivent de leur côté un travail semblable. Le Diyânet a également décidé de publier 7 volumes de hadiths (propos et actes du Prophète) ainsi que 40 volumes des décisions des cadis (juges et édiles) d’Istanbul du 16e et 17e siècles. Véritables miroirs de la vie sociale des Ottomans, ces registres sont également disponibles sur Internet : www.kadisicilleri.info/madde.php


09 TURQUIE Les PME inquiètes de la hausse du taux directeur

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Taux de change en Turquie au 29 janvier 2014.

Gaziantep rachète les métros de Rouen SUHEDA ASIK FRANCE Suite à un accord signé le 15 janvier dernier, les anciennes rames du métro de Rouen ont été revendues à la ville de Gaziantep, en Turquie. A Rouen, l’ancien parc de rames du réseau et de ses alentours a été remplacé par des rames plus spacieuses en 2012. La transaction de ces rames de métro a rapporté 5 millions d’euros à la Communauté d’agglomération de Rouen-ElbeufAustreberthe (CREA), soit 10 % de leur valeur initiale. Une première en France! Celles-ci, datant de 1994 ne seraient pas désuètes, mais sous-dimensionnées pour la population de l’agglomération rouennaise, affirme la CREA.

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Pour les PME turques, la décision de la Banque centrale de relever le taux directeur présente certains inconvénients, puisque l’emprunt d’argent sera de plus en plus difficile, entraînant fatalement le ralentissement de leurs affaires. NOAH BLASER TODAY’S ZAMAN La Banque centrale turque a décidé le mercredi 29 janvier à minuit de relever son taux directeur de 7,75 % à 12 % pour contrer la dépréciation de la livre turque face au dollar américain. Mais cette mesure inquiète fortement les Petites et moyennes entreprises (PME) turques, submergées de dettes envers l’étranger. Si la Banque centrale avait promis d’alléger leurs dettes devenues impossibles à rembourser à cause de la chute de la monnaie turque, les PME affirment que la hausse du taux d’intérêt a aussi ses inconvénients. «De plusieurs points de vue, on est dans une situation perdant-perdant. Si la livre continue de chuter, il sera impossible de rembourser les dettes étrangères. Avec un taux d’intérêt élevé, emprunter de l’argent va être beaucoup plus difficile et les affaires vont ralentir», a déclaré Umit Izmen, membre du conseil de la Confédération turque des entreprises et des affaires (TÜRKONFED), un groupe représentant environ 40.000 entreprises à travers la Turquie.

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UNE AUGMENTATION DE 7,4 % DES PRIX EN 2013 «Les petites entreprises vont être les premières touchées», a déclaré Izmen. Pour celui-ci, un taux plus important aura pour conséquence de ralentir la demande au niveau national et de creuser encore le déficit commercial. «Si vous imaginez qu’il y a quelques jours, on se demandait comment on allait faire pour rembourser nos dettes, on est dans une bonne situation», a déclaré l’un des représentants. «Mais nous sommes maintenant face à une autre perspective : celle d’un sérieux ralentissement des affaires commerciales». Cette perspective pourrait néanmoins être moins pire qu’une autre, selon Gökçe Çelik, analyste à la Finansbank. «L’économie reste fragile. Il n’y avait pas beaucoup de possibilités à part l’augmentation du taux. Il n’y avait d’autre choix que d’espérer que les taux resteraient élevés et que l’éco-

nomie reprenne», a-t-elle déclaré en référence à l’explosion du taux d’inflation. La Turquie a enregistré une hausse générale de 7,4 % des prix en 2013, soit un taux bien supérieur à celui que s’était fixé la banque centrale. Pour les petites entreprises, les craintes d’une future

instabilité se mêlent à une certaine anxiété concernant la politique parfois obscure de la banque centrale. «Si la banque centrale avait mis en place une politique simple depuis le début, cela aurait été bien plus facile de prévoir le destin de la livre», a déclaré Izmen.

DIRECTION GAZIANTEP POUR UN RELOOKING Transportées en convoi exceptionnel, puis acheminées par voie maritime, ces 28 rames de métro sont envoyées à Gaziantep, une ville de 1,5 million d’habitants en pleine croissance située à la frontière turco-syrienne. Gagnant 60 000 habitants chaque année, la ville veut étendre son réseau pour répondre à un besoin croissant. C’est pourquoi, après celui de Francfort-sur-le-Main en Allemagne, elle a racheté l’ancien parc du métrobus rouennais. Une fois arrivées à destination, les rames seront relookées et équipées de la climatisation avant d’être mises en service.


10 INTERNATIONAL

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En Russie, un homme sur quatre meurt avant d’atteindre 55 ans. La passion pour l’alcool, tout particulièrement pour la vodka, est largement responsable de cette mortalité précoce, montre une étude publiée vendredi.

Erdogan et Rohani unis contre Al-Qaïda La visite du Premier ministre turc en Iran a permis de signer des conventions dans le domaine économique. La question syrienne n’était pas au cœur des discussions mais elle a été évoquée en filigrane. Les autorités des deux pays se sont accordées pour condamner le «terrorisme».

SAMI KILIÇ PARIS L’accueil aurait pu être un brin plus affable. Erdogan s’apprêtait à effectuer une visite de deux jours en Iran et voilà que le représentant du Guide suprême auprès des gardiens de la Révolution, Abdallah Hadji Sadiki, déclarait : «Erdogan était, jusqu’à récemment, une marionnette du régime sioniste, au service des thèses complotistes en Syrie, mais il s’est réveillé». Bonne nouvelle pour les uns, mauvais ton pour les autres. Cela n’a pas empêché le Premier ministre turc de se sentir chez lui, «dans son second foyer», a-t-il déclaré.

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COOPÉRATION ÉCONOMIQUE RENFORCÉE La visite visait surtout à signer des conventions sur le renforcement de la coopération économique entre les deux pays. Les sanctions contre l’Iran se sont allégées et la Turquie a besoin de son gaz et de son pétrole puisqu’elle est «en plein essor dans le domaine de la haute tech-

Erdogan était en visite officielle en Iran le 28 janvier.

nologie et de l’industrie» dixit Tayyip Erdogan. Invité et accueilli par le vice-président, Eshaq Jahangiri, le Premier ministre turc a eu l’occasion de s’entretenir avec le président Hassan Rohani avant d’être reçu en audience par le Guide suprême, Ali Khamenei.

DEUX POSITIONS OPPOSÉES SUR LA SYRIE Au-delà de ses aspects commerciaux, le voyage était l’occasion de confronter les positions sur la situation en Syrie. Deux puissances régionales, voisines qui plus est et deux positions radicalement opposées. L’embellie au niveau bilatéral ne va pas de pair avec une convergence de vues sur les dossiers régionaux. Les Iraniens soutiennent le régime d’Assad au nom de considérations politico-religieuses alors que les Turcs ont été les premiers à le

renier au nom des «valeurs». A la suite de son entretien avec Erdogan, le président Rohani a envoyé plusieurs messages sur Twitter affirmant que «la situation en Syrie est dévastatrice. Tout doit être fait pour arrêter les combats et les tueries qui continuent (…). L’Iran et la Turquie partagent les mêmes vues sur les questions régionales, y compris sur le combat contre le terrorisme et l’extrémisme».

«LE COMBAT CONTRE LE TERRORISME ET L’EXTRÉMISME» Le passage de quelques heures du directeur des Renseignements turc (MIT), qui a accompagné Erdogan dans cette visite, aurait permis d’apporter des précisions sur la situation en Syrie. Terrorisme et extrémisme ne signifiant pas exactement la même chose pour les deux parties. Les Iraniens qualifient de terroristes

tous les opposants à Assad alors que les Turcs n’utilisent le terme que pour les militants d’AlQaïda. Depuis quelque temps, la Turquie passait pour le soutien des groupes djihadistes. Récemment, le général Aviv Kochavi, chef des renseignements de l’armée israélienne, avait affirmé que trois bases d’Al-Qaïda étaient installées sur le territoire turc ; information démentie par le ministère des Affaires étrangères qui a rappelé que le groupe terroriste est «également une menace pour la Turquie». L’armée turque venait d’ailleurs de bombarder les positions de l’Etat islamique en Irak et au Levant, affilié à Al-Qaïda. Le président Hollande, en visite en Turquie, avait également remercié la Turquie pour son implication dans l’arrestation de deux jeunes français qui s’apprêtaient à rejoindre les djihadistes.

Le génocide des Tutsi devant la justice française -

Vingt ans après le génocide des Tutsi au Rwanda, le premier procès français d’un complice présumé de ces massacres s’est ouvert mardi devant la Cour d’assises de Paris. Pascal Simbikangwa, ancien militaire de 54 ans, est jugé pour complicité de génocide et complicité de crimes contre l’humanité. En 1994 et en à peine 100 jours, ce génocide avait fait environ 800 000 morts, Tutsi pour la plupart mais aussi Hutu modérés.

LA LENTEUR DE LA JUSTICE FRANÇAISE La France, longtemps perçue comme une terre d’asile pour les bourreaux, a la compétence de juger des Rwandais depuis 1996. Le Tribunal pénal international pour le Rwanda, qui achève ses travaux après avoir jugé 75 personnes, avait pour vocation de ne poursuivre que les principaux responsables du génocide. Mais alors que la première plainte déposée par des associations remonte à 1995 et qu’une vingtaine sont à ce jour instruites, il aura fallu près de 20 ans pour amener le premier suspect devant une cour française. Une inertie qui a valu à Paris une condamnation en juin 2004 par la Cour européenne des droits de l’homme. Derrière la lenteur de la justice française, les associations voient des réticences politiques liées au rôle trouble joué par la France avant et pendant le génocide. De 1990 à 1993, dans les années qui précédent les massacres, alors même que les tensions ethniques s’accroissent au Rwanda, Paris renforce sa coopération militaire avec le régime de Kigali.

Puis, pendant le génocide, l’opération militaro-humanitaire Turquoise soulève des interrogations, certains Rwandais y voyant une opération politique masquée permettant à des membres des forces gouvernementales de fuir vers le Zaïre voisin. Surnommé «le tortionnaire» avant 1994, selon plusieurs témoins, l’accusé est souvent décrit comme un membre de «l’akazu», terme qui désigne le cercle restreint de la famille et belle-famille du président Juvénal Habyarimana, au coeur duquel s’est constituée la ligne dure du régime rwandais.

PRISON À VIE ? Mais Pascal Simbikangwa, incarcéré à la prison de Fresnes suite à son arrestation à Mayotte en 2008 dans une affaire de faux papiers, nie les faits qui lui sont reprochés. «Pour nous, c’est important que la Cour juge les faits et la personnalité de Pascal Simbikangwa», explique l’un de ses avocats, Fabrice Epstein. Selon lui, le caractère historique de ce procès, avec notamment des débats filmés sur demande de l’une des parties civiles, «contribue à faire de lui un bouc émissaire». Durant plus d’un mois, plus de cinquante témoins, experts et chercheurs se succéderont a la barre pour tenter de faire toute la lumière sur ces événements et les responsabilités de cet homme. Une durée que l’accusé, paraplégique depuis un accident de la route en 1986, appréhende, selon ses avocats. Il encourt la réclusion à perpétuité assortie d’une peine de sûreté qui pourrait être portée jusqu’à 22 ans.


11 INTERNATIONAL

07 - 13 fevrier 2014 ZAMAN FRANCE

Les écoles turques en Afghanistan : «un véritable modèle d’éducation»

Au cours de sa visite à Istanbul, le ministre afghan de l’Education a salué l’action des 17 écoles turques dans son pays. Interrogé par Zaman, Ghulam Farouq Wardak a invité les entrepreneurs turcs à ouvrir plus d’écoles. CELIL SAGIR ISTANBUL Les écoles turques, un véritable modèle d’éducation en Afghanistan. C’est l’idée que soutient Ghulam Farouq Wardak, le ministre afghan de l’Education. Lors d’une récente visite à Istanbul, Wardak a déclaré qu’il souhaitait que la Turquie augmente le nombre de ses écoles sur le sol afghan et qu’il y en ait au moins une dans chacune des 34 provinces du pays. Interrogé par Zaman, le ministre a évoqué avec fierté les 17 écoles turques fondées par les symphatisants du mouvement Hizmet (Gülen) qui existent déjà en Afghanistan et a invité les entrepreneurs turcs à ouvrir plus d’écoles. Le ministre a déclaré que les 17 000 écoles publiques et privées d’Afghanistan «recevront l’exemple de la discipline et de l’éducation» des écoles turques. Le ministre a rappelé la contribution réalisée par les écoles turques au niveau de la paix et de la cohésion sociale en Afghanistan. Il a dit que les établissements étaient d’un «grand bénéfice pour l’unité, la fraternité et la tolérance», étant donné qu’ils rassemblent des élèves de différents horizons ethniques engagés dans un même but commun : l’éducation. Wardak a félicité les professeurs turcs qui travaillent dans ces écoles, «très respectées», qui «quittent leurs familles et leurs villes natales pour rendre service à la nation afghane et aux élèves afghans». Soulignant l’importance

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de l’éducation en Afghanistan, Wardak a déclaré qu’éduquer les enfants les empêchait d’être exploités par des groupes terroristes, notant qu’il est très facile pour ces derniers d’avoir le contrôle sur des jeunes non éduqués.

L’ÉDUCATION DES FILLES Le niveau d’éducation des femmes étant plutôt faible en Afghanistan, le ministre a insisté sur les progrès réalisés dans la dernière décennie. Il y a dix ans, l’Afghanistan avait un système éducatif mal en point, dans lequel un million de garçons recevaient une éducation de faible qualité et dont les filles étaient systématiquement exclues. Wardak a cité quelques chiffres révélateurs. Le pays compte aujourd’hui 10,5 millions d’étudiants dont 42 % de filles. De plus, sur les 200 000 professeurs, 34 % sont des femmes. Environ la moitié des 16 600 établissements scolaires qui existent sur le territoire sont en bon état. Sur un total de 17 écoles turco-afghanes, sept sont des écoles pour filles. Pour le ministre, l’éducation des filles est un facteur déterminant pour lutter contre les mariages précoces. UNE ÉDUCATION DE QUALITÉ AVANT TOUT Mais les objectifs atteints par les écoles turques en Afghanistan ne se limitent pas à l’éducation des filles. Le ministre a déclaré que 390 élèves de ces écoles avaient reçu des médailles aux Olympiades de

Scarlett Johansson critiquée pour avoir signé avec l’entreprise israélienne SodaStream

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L’actrice américaine Scarlett Johansson a décidé de mettre fin à son rôle d’ambassadrice pour l’ONG humanitaire britannique Oxfam après avoir été critiquée pour avoir signé avec l’entreprise israélienne SodaStream. Une déclaration publiée mercredi 29 janvier par le porte-parole de l’actrice évoque la «différence d’opinion» entre Scarlett Johansson et Oxfam International, le groupe humanitaire étant opposé à tout échange commercial avec des colonies israéliennes au motif qu’elles sont illégales et nient les droits des Palestiniens. «Scarlett Johansson a décidé de mettre fin à son rôle d’ambassadrice avec Oxfam qui était le sien depuis huit ans. Son opinon diffère de celle de l’ONG Oxfam concernant le mouvement de boycott, de désinvestissement et de sanctions envers Israël. Elle est très fière de ce qu’elle a accompli et des fonds qu’elle a recueillis en tant qu’ambassadrice pour Oxfam».

AMBASSADRICE POUR OXFAM DEPUIS 2007 Plus tôt ce mois-ci, l’actrice de 29 ans a signé en tant qu’égérie pour la marque de machines à sodas SodaStream. Elle apparaît dans la publicité de la marque israélienne. SodaStream est sous

le feu de la critique des militants pro-palestiniens car elle possède une grande usine dans une colonie israélienne de Cisjordanie, territoire occupé par Israël depuis 1967 et réclamé par les Palestiniens. En réponse aux critiques, l’actrice a déclaré la semaine dernière qu’elle «soutenait la coopération économique et l’interaction sociale entre un Israël et une Palestine démocratiques». Scarlett Johansson était ambassadrice pour Oxfam depuis 2007. Elle s’était notamment rendue en Inde, au Sri Lanka et au Kenya pour remplir ce rôle.

Selon le ministre afghan, 390 élèves de ces écoles ont reçu des médailles aux Olympiades de sciences.

sciences, «ce qui prouve la qualité des écoles», a-t-il dit. Il a ajouté que «l’élite afghane, des parlementaires, des ministres et des gouverneurs» insistaient pour que leurs enfants soient inscrits dans ces écoles.» Wardak a également évoqué l’impact dévastateur des Talibans sur le sysProjet1_260 06/12/12 10:54 Page1

tème éducatif afghan qui a eu des conséquences terribles sur les écoles jusqu’en 2008. Mais, étant donné que de bonnes chaînes de communication ont été établies avec les locaux, le gouvernement a pu mettre en place des Conseils chargés de protéger les écoles. «Quand les Afghans

ont le contrôle du système éducatif entre leurs mains, peu importe ce qui arrive au plus haut niveau politique, que ce soit un changement de régime, un changement de président ou de ministre, les écoles ne sont pas touchées car elles sont protégées par la population locale», a-t-il conclu.


12 CULTURE

07 - 13 fevrier 2014 ZAMAN FRANCE

Dice Kayek à la conquête des défilés de mode La marque de couture Dice Kayek a été créée à Paris en 1992 par Ece et Ayse Ege, deux sœurs d’origine turque. De renommée internationale, elle tire son inspiration de la couture parisienne comme de la culture ottomane, entre tradition et métissage, luxe et sobriété. Rencontre avec la créatrice Ece Ege.

Ece et Ayse Ege.

DALILA BOUAZIZ PARIS Quel est votre parcours ? Je suis arrivée à Paris pour étudier dans une école de mode et juste après, j’ai fondé la marque Dice Kayek en 1992. Depuis, je vis entre Paris et Istanbul : les vêtements sont fabriqués en Turquie et la création, la vente et tout ce qui accompagne la marque se font à Paris.

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Vous êtes franco-turque. Vos origines turques influencent-elles vos créations ? Oui bien sûr, c’est toujours un avantage d’avoir des origines un peu «exotiques» car il y a plus de choses à raconter. J’utilise mes racines turques dans mes créations parce que cette civilisation a toujours été multi-ethnique avec l’architecture, la culture, les traditions... J’utilise par exemple toujours la broderie. Qu’est-ce qui vous inspire ? J’adore l’architecture: sur une fondation solide vous mettez des fenêtres, des murs, un toit, etc. J’utilise le même procédé quand «j’habille» une robe : j’ai toujours une construction qu’on ne voit pas au premier regard et par-dessus il y a des drapages, des plis, des superpositions de tissus, des formes géométriques... J’aime les choses qui ont un aspect graphique car il y a de la tenue. Qu’avez-vous souhaité apporter au prêt-à-porter? Quand j’ai débuté, je voulais faire quelque chose qui n’existe pas dans la mode. J’ai commencé avec des chemises blanches en popeline déclinées en robe de mariée, en tunique… Ce concept avec un tissu et une couleur était une première. D’autres marques ont ensuite exploité cette idée. J’ai alors créé mes premières collections en rajoutant d’autres matières comme l’organza de soie, le taffetas… Puis les clientes nous ont demandé des jupes, des pantalons pour accompagner ces chemises. C’est ainsi qu’est née la marque. Je pense que j’apporte quelque chose d’intemporel dans mes créations destinées à des femmes de tous âges. Il faut garder son identité pour que les gens reconnaissent votre style. Travailler avec votre sœur, c’était pour vous fondamental ? Avec ma sœur il y a une solidarité indiscutable. Si elle n’avait pas été là, je n’aurais pas pu faire tout ça. Il faut vraiment être soudées pour lutter contre les difficultés de ce métier qui est impitoyable avec les femmes. Que venait récompenser le prestigieux prix Jameel Prize qui vous a été remis (dédié à l’art contemporain et au design inspirés par la tradition musulmane, ndlr)? On a créé en 2009 une collection très particulière « Istanbul contrast » pour la Semaine de la mode dédiée alors à l’histoire artistique et architecturale de la ville. C’était une collection très technique avec des fondations dans

Cette pièce est un hommage aux vêtements d’apparat des sultans ottomans. La robe est directement inspirée du caftan en soie de Soliman le Magnifique que l’on peut voir au Palais de Topkapi.

la construction des vêtements, des drapés, de la dentelle… On a fait le choix d’une exposition plutôt que d’un défilé parce que les gens n’auraient pas compris. Chaque robe représentait un lieu emblématique de l’architecture ottomane, une tradition, un savoir-faire : la «Dolma Bahce» est une robe en dentelle de Calais qui évoque le palais stambouliote et son jardin d’hiver. «Topkapi» représente la richesse démesurée des sultans ottomans avec des pierres brodées. Une série de robes représentait «l’Istanbul moderne» mais aussi les mosquées ou les traditions culinaires… Cette collection a eu énormément de succès

« Dôme » en référence aux dômes de la célèbre Mosquée bleue. La robe très architecturée a un effet 3D impressionnant tout en étant très légère.

et elle a par la suite pas mal voyagé. Mais on ne pensait pas gagner le Jameel Prize car il n’avait jamais été donné à une maison de mode. Quand ils ont annoncé qu’on avait gagné, on était très heureuses. Ça a été le meilleur moment de ma vie professionnelle. Que pensez-vous des créateurs turcs actuels ? Depuis six ans environ, il y a une semaine de la mode en Turquie avec des défilés de créateurs turcs… Ils sont au début de leur carrière. Ce n’est pas encore mûr. La Turquie est au début de l’aventure, en France cela existe depuis près de 100 ans ! L’Etat soutient les

«Hagia Sofia», en hommage à la basilique Sainte-Sophie, est un imposant manteau de satin entièrement brodé de milliers de perles de verre soufflé anciennes. «Un clin d’œil à la figure de l’ange Gabriel».

créateurs: il y a des subventions, des écoles de mode. A mon époque, on était obligés de partir à l’étranger pour étudier. Combien de temps prend la création d’une collection ? Six mois. C’est malheureusement trop rapide: dès qu’une collection sort, vous êtes sur la suivante. Et maintenant chacun fait des précollections pour vendre plus et avant tout le monde. C’est une course épuisante. Chaque six mois, on ne peut pas être innovant, il faut plutôt essayer de faire de beaux vêtements avec des matières de qualité pour rendre les femmes plus belles, plus sûres d’elles.

Ce sont les 3 robes qui ont permis à la marque turque Dice Kayek de remporter le Prix Jameel, prix international d’art contemporain et de design inspiré par les cultures et les arts de l’Islam. Elles sont exposées au Victoria & Albert Museum, à Londres, jusqu’en avril prochain.


13 CULTURE

07 - 13 fevrier 2014 ZAMAN FRANCE

AGENDA CULTUREL

CONCERT

Musulmans de Bosnie : quand l’aristocratie se convertit

BO de films arabes

Islam des mondes

L’ensemble Attarab est une formation arabe qui intègre actuellement des membres issus de cultures turque, française, américaine et vietnamienne. Il interprétera quelques-uns des standards issus de BO de films cultes arabes.

La mosquée d’Ahmet Dukatar, la plus grande mosquée de Livno, est appelée Glavica.

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«A l’époque de Soliman le Magnifique déjà, l’ensemble de l’aristocratie locale était devenue musulmane» rédigés en arabe, langue du savoir en islam, concernent essentiellement les sciences religieuses (al-Busnawi), mais aussi le droit (Hasan Kafi) ou encore l’historiographie (Ibrahim Pecewi). Si la langue turque n’est pas absente, elle concerne essentiellement la poésie (Derwish Pasha).

LA RELIGION DES SEIGNEURS Sunnite de rite hanéfite, l’islam bosniaque ne se distingue guère de celui de la métropole. De même, l’urbanisme (avec l’opposition quartiers résidentiels /

classe, l’élite politico-militaire sera d’une loyauté sans faille.

LA DOULOUREUSE DISLOCATION DE L’EMPIRE OTTOMAN Né Stjepan Hercegovic, Hersekzade Ahmed Pasha est ainsi le fils de Stjepan Vukcic Kosaca, Grand duc d’Herzegovine. Le noble bosniaque s’élevera ainsi à la plus haute charge de l’Empire, puisqu’il sera à cinq reprises nommé Grand vizir (Premier ministre) sous les règnes de Bayazid II et Selim I. Les cas similaires sont nombreux. Mehmed Pasha Sokollu (Sokolovic), homme d’Etat ottoman par excellence, – il a notamment été Grand vizir de 1564 à 1579 –, appartenait à une grande famille de l’aristocratie serbe qui a donné plusieurs patriarches à l’église de Serbie. Souvent en effet, les liens de parenté ont contribué à la prospérité des membres de la famille restés chrétiens. Néanmoins, au fil du temps, c’est l’appartenance religieuse qui se révèlera déterminante. La dislocation de l’Empire ottoman n’en sera que plus douloureusement vécue par ces musulmans autochtones que leurs compatriotes orthodoxes et catholiques considéraient comme des Turcs, des colons, des étrangers, et au mieux, des renégats. Sommés de se définir en ce XIXe siècle nationaliste, ils feront de l’islam leur identité nationale, ne se revendiquant plus Serbes ou Croates, mais simplement Musulmans.

& à voir...

Mourir de soif auprès de la fontaine Cinq migrants dans l’enclave espagnole de Ceuta, au nord du Maroc. Ils ont tout quitté pour tenter leur chance en Europe. Ils se retrouvent enfermés dans une prison à ciel ouvert, aux portes du vieux continent. Ils vivent partagés entre l’espoir d’obtenir un «laissez-passer» et la crainte d’être expulsés vers leur pays. Eux, c’est Iqbal, Marius, Simon, Guy et Nür. Blo-

qués dans ce bout d’Espagne en Afrique, ils fantasment sur une Europe qu’ils n’ont jamais vue. Les réalisateurs, Jonathan Millet et Loïc Rechi, ont opté pour un récit à la forme très sobre : un documentaire en immersion totale, sans temps mort, sans recul, sans voix-off. Un documentaire brut fait de semaines à suivre au plus près les personnages, à décrire de l’intérieur

leur quotidien, à écouter leurs doutes et leurs espérances, à voir l’Europe à travers leurs yeux, à se cogner à l’impalpable frontière Nord-Sud. Comme le souligne l’un des co-auteurs du documentaire, Loïc H. Rechi, «Ceuta s’est imposée comme le point de départ idéal pour témoigner de la fermeture progressive de l’Europe autour de la Méditerranée».

Ceuta, douce prison, réalisé par Jonathan Millet et Loïc H. Rechi (documentaire, France, 2013, 1h30). Sortie en salles le 29 janvier.

La force créative du cinéma iranien s’est déployée dans un système de production extrêmement contraignant, la censure n’étant qu’un des multiples obstacles et limitations auxquels doivent faire face cinéastes et producteurs. Par Agnès Devictor, enseignante-chercheuse à l’Université Paris I.

La vie dans l’oasis de Siwa, architecture de terre et jardins

Par Vincent Battesti, enseignant-chercheur au Laboratoire d’Eco-anthropologie et d’Ethnobiologie du Muséum national d’Histoire naturelle. Le 11 février à 19h00 iReMMO 5-7, rue Basse des Carmes 75005 Paris

Les relations entre la France et la Turquie

Avec Christophe Bouillon, député, président du Groupe d’amitié France-Turquie à l’Assemblée nationale, Bertrand Badie, professeur de Géostratégie à l’Institut d’études politiques de Paris et Cengiz Aktar, professeur d’Université (Istanbul). Interventions suivies d’un débat modéré par François Dopffer, ancien ambassadeur de France à Ankara. Le 10 février à 18h00 Palais du Luxembourg 26, rue de Vaugirard 75006 Paris

THÉÂTRE

A lire

centres commerciaux), l’architecture des mosquées (type Sinan), les institutions éducatives (mektebs et medreses) ou encore les équipements publics (hammâm) sont-ils assez classiquement ottomans. L’originalité de l’Islam bosniaque se situe ailleurs, au plan socio-politique, avec une conversion essentiellement «par le haut», un phénomène rare dans l’histoire des religions. En 1910 encore, soit après quatre siècles de domination ottomane (1463-1878), 91,1 % des propriétaires terriens qui ont à leur service des paysans sans terre sont musulmans, 6,1 % sont orthodoxes et 2,5 %, catholiques. Ces paysans sans terre sont à 73,9 % orthodoxes, à 21,5 % catholiques et seulement à 4,6 % musulmans. Enfin, les paysans libres sont musulmans à 56,6 %, contre 25,9 % pour les orthodoxes et 16,7 % pour les catholiques. Le phénomène remonte aux premiers temps de la conquête ottomane. A l’époque de Soliman le Magnifique déjà (15201566), l’ensemble de l’aristocratie locale était devenue musulmane. En passant en masse, quoique de manière progressive, à l’islam, les nobles bosniaques ont pu en effet conserver leur statut social de guerriers et de propriétaires terriens. Le nouveau pouvoir veillera en outre à doter de terres des chefs roturiers locaux, néo-convertis qu’il enverra notamment coloniser les riches terres de Hongrie. Liée au pouvoir colonial par un intérêt de

Cinéma sous contraintes. Zoom sur le cas iranien

Le 11 février à 18h00 EHESS 105, boulevard Raspail 75006 Paris

TABLE RONDE

SEYFEDDINE BEN MANSOUR LILLE Joseph Dreher vient de publier aux éditions IFPO La Lumière de Muhammad ou la transmission de l’essence prophétique. Il s’agit d’une édition critique du traité du grand savant bosniaque ‘Abd Allah al-Busnawi (15841644), cheikh de la confrérie bayramiyye et écrivain de l’école spirituelle de Ibn al-‘Arabî. Territoire relativement exigu, la Bosnie-Herzégovine a proportionnellement produit un grand nombre de savants. Leurs ouvrages,

CONFÉRENCE

Le 7 février à 20h30 Institut du monde arabe Place Mohammed V 75005 Paris

Macbeth: Leïla and Ben – A bloody history

Et si Macbeth et sa Lady avaient rencontré Bourguiba puis fréquenté la Tunisie sous le règne finissant de Ben Ali… Un spectacle complet mêlant, théâtre, musique, cinéma et vidéo. Un Macbeth profondément ancré dans les convulsions contemporaines du monde arabe. Le 7 février à 20h00 Au TARMAC 159, avenue Gambetta 75020 Paris


OPINION14

07 - 13 fevrier 2014 ZAMAN FRANCE

Quelle Turquie en 2014 ? En 2014, deux – voire trois – élections se tiendront en Turquie. Quels que soient les résultats, ils pourraient être déterminants pour l’avenir de la politique turque. Sahin Alpay propose deux scénarios possibles.

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L’année 2014 sera sans doute l’une des plus extraordinaires de l’histoire de la Turquie. Deux, voire trois élections sont prévues et il se peut qu’un référendum constitutionnel soit organisé avant la fin de l’année. Chose certaine, les élections municipales auront lieu à la fin du mois de mars et les élections SAHIN ALPAY présidentielles au mois de juin. Les résultats de ces élections pourrait provoquer la tenue d’élections législatives anticipées, normalement prévues pour l’été 2015. Cette anticipation pourrait aussi ouvrir la voie à un référendum constitutionnel. La plus grave affaire de corruption qu’ait connue la Turquie n’entraînera pas la démission du gouvernement de l’AKP qui semble prêt à tout pour la couvrir, jusqu’à soumettre l’appareil judiciaire au contrôle de l’exécutif. Erdogan semble parier sur sa survie politique et les bons résultats de son parti aux élections municipales du 30 mars prochain et espère recueillir autant de votes que lors des dernières élections, soit environ 39 %. Quels que soient les résultats, ils pourraient être déterminants pour l’avenir de la politique turque. Deux scénarios s’offrent ainsi à nous.

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«Scénario n°2 : les parlementaires AKP commencent à chercher un nouveau leader pour le parti»

Directeur de la Publication: HUSEYIN KARAKUS Directeur Général de Zaman France et Directeur des rédactions: EMRE DEMIR Rédacteur en chef adjoint: FOUAD BAHRI Directeur Administratif: FAHRETTIN TEKIN Directeur des ressources humaines: AKIF SAMETOGLU Responsable Commercial: MEHMET SELVI Service Abonnement: CELINE GOKSU Secretaires de Rédaction: FARIDA BELKACEM SELIM BEDER Traduction: CLEMENTINE RAYNAUD Correspondant Presse Alsace: MEHMET DINC Correspondant Presse Ile de France: OSMAN USTA VEDAT BULUT FERHAN KOSEOGLU Infographie: NICOLAS VINCENEUX MUHAMMED SAHIN Redacteurs Web: AYSEGUL ZORLU SUHEDA ASIK Service informatique: HASAN OZCELIK Imprimerie : L IMPRIMERIE 79 Route De Roissy 93290 Tremblay En France Adresse : 2 Boulevard Saint-Martin 75010 PARIS Tel : 01 42 00 19 36 Faks : 01 42 00 19 58 info@zamanfrance.fr www.za­manfrance.fr - www.zamanfransa.com no CPPAP : 1117 I 90032 - ISSN 1869-5795 Tarif abonnement annuel France : 120€

deuxième tour et confie le leadership de l’AKP et la fonction de Premier ministre à quelqu’un qui saura respecter ses ordres. Les élections législatives se tiennent peu après, avec le système de représentation proportionnelle actuel avec un seuil à 10 %, donnant ainsi assez de sièges à l’AKP pour former le gouvernement, encore une fois, à lui tout seul. Après les élections, Erdogan conclut un accord avec le BDP sur le projet d’une Constitution devant être ratifiée par référendum. Cette Constitution répondant aux revendications du BDP, Erdogan obtient le soutien du parti prokurde pour réaliser le rêve d’un système présidentiel de «style turc», dans lequel le pouvoir est entre les seules mains de l’exécutif. La Constitution est ensuite approuvée par les électeurs de l’AKP et du BDP, la plupart des électeurs kurdes obtiennent ce qu’ils veulent, mais le pays prend l’apparence du régime russe. Un scénario cauchemar pour la Turquie. Car un pays où le pouvoir est concentré entre les mains d’un seul, où l’Etat de droit n’est plus appliqué et où la corruption est de facto légitimée ne peut résoudre aucun problème et est voué à être submergé de difficultés.

Professeurs associés à l’université Fatih d’Istanbul.

Turquie et UE, vers la fin du rêve -

Les experts attendaient beaucoup de la visite d’Erdogan à Bruxelles ce mois-ci. Mais l’écart entre les objectifs fixés et la réalité ne fait que s’élargir depuis 2005. L’«âge d’or» des rapports entre la Turquie et l’UE remonte à la période entre 1999, quand la Turquie a été reconnue comme pays candidat pour devenir membre, et 2005, année où les négociations d’adhésion se sont ouvertes.

ANKARA N’EST PLUS AUSSI ENTHOUSIASTE Paradoxalement, après l’ouverture des négociations d’adhésion, le gouvernement a perdu de son enthousiasme et le processus d’européanisation a ralenti, jusqu’à être interrompu dans sa course. La Croatie, pour qui le processus d’adhésion a commencé en même temps que la Turquie, a achevé les négociations en 2011 et rejoint le club des pays membres en 2013. Dans ce même temps, la Turquie, elle, a conclu un seul chapitre sur 35. Nombreux sont ceux qui accusent l’UE de bloquer le processus d’adhésion. De plus, la France et l’Allemagne ont ouvertement exprimé leurs doutes sur une possible adhésion de la Turquie. Enfin, l’UE n’a pas réussi à résoudre ses propres crises institutionnelles et identitaires. Concernant le processus d’adhésion, on pourrait aussi reprocher au gouvernement turc d’avoir été orgueilleux, immobiliste et d’avoir manqué ou plutôt échoué dans sa vision stratégique. Le processus d’adhésion est essentiellement un processus d’harmonisation de normes. Et même si on parle de «négociations», en réalité, un pays candidat n’a pas beaucoup de marge de négociation. Il doit prouver qu’il a fait des progrès suffisants en assimilant les normes et les procédures européennes. Les rapports entre l’UE et le pays candidat sont, dans ce sens, asymétriques : l’UE dicte au pays candidat ce qu’il faut faire pour qu’il soit accepté. De nombreuses preuves montrent que l’AKP n’a jamais vraiment réussi à accepter cette relation inégale. C’est devenu d’autant plus frustrant que le pouvoir du parti s’est consolidé et que la Turquie a connu une croissance économique.

SCÉNARIO N°1 La chute de l’économie turque n’est pas si grave et n’affecte pas le choix des électeurs. Erdogan réussit à convaincre une grande partie de son électorat que l’enquête anti-corruption est un coup monté contre son gouvernement, conçu par les EtatsUnis et Israël et conduit par le mouvement Gülen. L’AKP recueille environ 40 % des votes aux élections municipales. Erdogan en conclut qu’il a remporté sa «guerre d’indépendance» visant à sauver sa carrière et décide de se présenter aux présidentielles. Il gagne les élections à l’issue du

Edité par : Source SARL 2, boulevard Saint Martin 75010 PARIS

AHMET ARABACI AZUOLAS BAGDONAS

SCÉNARIO N°2 Erdogan et ses conseillers n’arrivent pas à convaincre les Turcs que l’affaire de corruption est une fraude et que le gouvernement est confronté à une tentative de coup d’Etat. La crise économique devient plus grave. L’AKP recueille une part de votes beaucoup plus faible que prévu. Face à la perspective d’une perte de pouvoir aux législatives, les parlementaires AKP commencent à se plaindre et cherchent un nouveau leader pour prendre la tête du parti. Erdogan abandonne l’idée de se présenter aux présidentielles, qu’il trouve risquée, et tente de rester Premier ministre en modifiant les règles limitant à deux fois la ré-élection. Plus probablement, il tente un accord avec le président Gül dans lequel celui-ci le persuade de le laisser diriger le parti en échange de son soutien pour les présidentielles. Gül prend ainsi la direction du parti et le gouvernement de l’AKP revient aux réformes concernant l’Union européenne et la consolidation de la démocratie. C’est, pour l’instant, le scénario le plus optimiste que l’on puisse espérer pour la Turquie. s.alpay@todayszaman.com

L’AKP PROFONDÉMENT DÉSORIENTÉ L’engagement de l’AKP dans le processus d’adhésion l’a aidé à gagner en légitimité et à dépasser les résistances intérieures à certaines réformes politiques et légales. Depuis l’échec du Plan Annan en 2004, il n’y a pas eu d’initiative significative pour supprimer l’obstacle-clé : la résolution de la question chypriote. Dans certains domaines, les écarts entre les cadres et les pratiques légales de la Turquie et de l’UE se creusent. Certaines lois qui avaient été harmonisées avec les normes européennes ont depuis été modifiées. Les amendements à la loi de la Cour des comptes n’ont pas satisfait les standards européens et réduisent la transparence du gouvernement au lieu de la faire croître. L’éloignement de la Turquie de l’UE a des conséquences douloureuses à la fois au niveau national et international. La volonté du Premier ministre de se rapprocher de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) montre la profonde désorientation de l’AKP sur les priorités de la politique étrangère turque. La Turquie a peu à gagner d’une telle association, dans laquelle elle fera au mieux office de partenaire mineur. Le processus d’adhésion lui a permis d’accomplir d’énormes progrès en termes de démocratisation. L’UE est toujours le plus grand marché du monde et le plus grand partenaire commercial de la Turquie. Si la Turquie devient un Etat membre, elle pourra avoir un impact sur la politique en Europe. Mais le processus d’adhésion luimême est très bénéfique au pays puisqu’il reçoit environ 1,2 milliards de dollars d’aide par an. En somme, l’UE ne peut être accusée d’être la seule responsable du ralentissement du processus d’adhésion.


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Officiel : Koray Günter à Galatasaray L’international espoir Allemand d’origine turque de 19 ans vient de s’engager pour 4 saisons et demi avec Galatasaray, qui a annoncé officiellement le transfert après la visite médicale réussie du défenseur central. Ce transfert s’inscrit logiquement dans la nouvelle politique de transfert du club Stambouliote visant à rajeunir l’effectif de l’équipe, mais vient également renforcer le secteur défensif qui pose actuellement des soucis à Roberto Mancini, manquant d’alternatives sur le banc. ALLAN KILIC PARIS Koray Günter n’avait jamais pu percer en équipe première de la formation allemande jusqu’à maintenant (seulement 2 minutes de jeu). Pour autant, ce pur produit du centre de formation du Borussia Dortmund, rejoint en 2008, était reconnu comme un des plus grands espoirs européens à ce poste. Ce dernier s’était déjà entre autre distingué lors de l’EURO U17 en 2011 en Serbie (finaliste avec l’Allemagne) et également lors de la Coupe du Monde U17 en 2011 (3e place pour l’Allemagne), durant laquelle il s’était montré excellent.

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LES DÉTAILS DU CONTRAT Pour s’attacher les services de Koray Günter, Galatasaray aura dû débourser la somme estimée de 2.500.000 euros, alors que le contrat actuel du joueur expirait en Juin prochain. Les Turcs devront encore verser une somme de 150 000 euros au club Allemand à chaque 20 matchs joués par Koray Günter (jusqu’à 60 apparitions). L’accord avec le Borussia Dortmund inclut également une clause de rachat de 7millions d’euros à partir de la saison 2015/16. Les deux clubs trouvent donc leur compte dans cette transaction, puisque Galatasaray pourrait ainsi réaliser une très belle plusvalue, tandis que le Borussia garde une main sur Koray, qui n’avait pas sa place en équipe première pour l’instant. Outre la durée de 4 ans et demi, le contrat signé avec Koray Günter inclut un salaire et des primes évolutives chaque saison. En partenariat avec TurcoFoot

07 - 13 fevrier 2014 ZAMAN FRANCE

Koray Günter passe du Borussia Dortmund à Galatasaray.


Une récompense de 100.000 dollars pour un Stradivarius volé -

Un donateur anonyme a offert vendredi de verser une récompense de 100 000 dollars en l’échange de la restitution d’un violon Stradivarius volé à un concertiste du Wisconsin, a annoncé l’Orchestre symphonique de Milwaukee. L’instrument de musique, vieux de presque trois siècles, a été volé à un violoniste neutralisé grâce à une arme à impulsion électrique. Le généreux bienfaiteur, qui tient à rester anonyme, offre la somme de 100 000 dollars à toute personne qui apportera une information qui permettra de restituer le violon à son propriétaire, a déclaré une porte-parole de l’orchestre. Fabriqué en 1715, l’instrument fait partie des quelque 600 violons, altos et violoncelles fabriqués par le maître italien Antonio Stradivari, dit «Stradivarius». Selon la BBC, un violon semblable à celui volé dans le Wisconsin a été adjugé en décembre pour 2,3 millions de dollars (1,7 million d’euros) lors d’une vente aux enchères.

Embaumé puis enterré assis sur sa Harley-Davidson ! MOUSSA KANE Pour satisfaire ses dernières volontés, il a fallu creuser une tombe beaucoup plus large que la normale. Après avoir été embaumé, un Américain de l’Ohio a été enterré, assis bien droit sur sa Harley-Davidson, dans un cercueil géant en plexiglas. «Mon père avait la bougeotte», explique la fille du défunt, qui ajoute que lorsque l’idée lui est venue de se faire enterrer sur sa monture, il était impossible de raisonner Bill Standley. «C’est comme ça que je m’en irai», répétait-il, «alors qu’on avait toujours pensé qu’il plaisantait», continue-t-elle. RTBF relève que le jour de l’enterrement, les réactions du public passaient de l’étonnement à l’admiration. «Il est parti avec style, ça va être difficile de le battre, celui-là», déclarait ainsi un participant à la cérémonie. Une grande boîte en plexiglas a été tractée par un pick-up jusqu’au cimetière, suivie d’un petit cortège de motards. A l’intérieur, le corps de Bill Standley trônait sur sa Harley-Davidson Electra Glide, un modèle de 1977, le corps bien droit, un casque vissé sur la tête et des Ray Ban sur le nez. Pour sa fille, «certaines personnes passent les portes du paradis à pied, d’autres en roulant». En partenariat avec Afrik.com

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