8 raisons de faire la sieste au travail
Le Khanat de Crimée, aux portes de la Russie
Emenike attise la fureur des supporters
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14 - 20 MARS 2014 N° 306 Prix : 2,5 €
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Les élections municipales dans la tourmente nationale UN ÉLU MARSEILLAIS DÉNONCE L’«AMBIGUÏTÉ» DE MENNUCCI
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A Marseille, les règlements de compte ne concernent pas seulement les milieux mafieux. La campagne des municipales a été dure et particulièrement violente.
Fabienne Keller
Roland Ries
François Loos
Nassurdine Haidari, un élu sortant proche de Mennucci (PS), dénonce aujourd’hui des pratiques clientélistes et des positions ambigües du candidat socialiste. RFRANCE 03
BERKIN, 15 ANS, ATTAQUÉ LORS DES MANIFESTATIONS DE GEZI, EST MORT
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Berkin Elvan, 15 ans, qui avait reçu des gaz lacrymogènes pendant les manifestations de Gezi l’année dernière, est mort après avoir lutté pendant neuf mois. Berkin allait acheter le pain le soir du 16 juin
quand il a reçu de près des gaz lacrymogènes tirés par les CRS dans le quartier Okmeydani d’Istanbul. Berkin était en unité de soins intensifs à l’hôpital Okmeydani d’Istanbul depuis plus de 269 jours. RTURQUIE 08
LES ACCUSÉS DE L’AFFAIRE ERGENEKON SORTENT DE PRISON UN PAR UN Après la sortie de l’ancien chef d’étatmajor, Ilker Basbug, plusieurs chambres du tribunal d’Istanbul ont rendu des décisions de libération en cascade en faveur des autres accusés des affaires Ergenekon et Balyoz. -TURQUIE 08 Olivier Klein
Cumhur Guneslik
Fatih Yanar
Le 23 mars, le premier tour des élections municipales va mobiliser les électeurs français. En plein moment où une succession d’affaires politico-financières relance la guerre des partis entre UMP et PS. Mais loin des agitations nationales, les candidats mènent campagne et annoncent la couleur. A Strasbourg comme à Clichy-sousBois, Zaman France les a questionnés sur leurs projets. RDOSSIER SPECIAL 04-05-06-07
EN TURQUIE, L’OBSESSION DES ORIGINES...
Fabienne Keller : «Je m’engage à ne pas augmenter les impôts» r04 Roland Ries : Priorité à l’économie et à la culture r04 A Clichy-sous-Bois, l’Etat amorce timidement son retour r05
ERASMUS POURRAIT ÊTRE SUSPENDU EN TURQUIE
EDITO
Au-delà des polémiques, renouer avec la politique r02
Zaman Okur Hattý: 01 42 00 19 36
La diffusion sur Internet d’une conversation entre le Premier ministre turc et son ancien ministre de la Justice en a stupéfié plus d’un. Ce dernier justifie une décision de justice par la confession du juge qui l’a rendue. -TURQUIE 10
Le quotidien Taraf a déclaré lundi 3 mars que la Commission européenne avait lancé une enquête à la suite d’accusations pour détournements de fonds et recrutement illégal au sein du Centre des programmes de jeunesse et d’éducation de l’Union européenne à Ankara. -INTERNATIONAL 13
02 FRANCE Ecoutes de Sarkozy : l’UMP réclame la démission de Taubira 14 - 20 MARS 2014 ZAMAN FRANCE
EDITO LA RÉDACTION
Au-delà des polémiques, renouer avec la politique
Pour la droite française, ces dernières semaines ont été très agitées. Affaire Buisson, écoutes de l’ancien président Sarkozy par le parquet, affaire Copé sur le financement de la campagne de Nicolas Sarkozy, et la liste ne semble pas vouloir se finir. A l’approche du premier tour des municipales, ce 23 mars, quelles seront les conséquences de cette ambiance politique pour le moins détestable sur les électeurs ? Difficile à dire. De nombreux commentateurs se sont voulus rassurants, mettant en exergue le fait que les échéances municipales sont des élections à enjeux locaux, éloignées des éclats et des odeurs de poudre de la politique nationale. Soit. On élit un maire et non un parti, diront-ils, ce qui n’est pas faux. Pour autant, le risque d’une conséquence brutale dans les urnes de ces affaires n’est pas à exclure. Et d’ailleurs, sur ce plan, deux options semblent émerger. Une hausse significative du vote FN, en tant que vote contestataire. Ou bien une flambée de l’abstentionnisme, ce qui est tout aussi dangereux pour la France car cette pente mène finalement à l’implosion démocratique. Pour y échapper, les électeurs se devront donc de renouer avec les fondamentaux de la politique. Un programme, des mesures, un parcours : telle est la grille de lecture classique qui doit conduire le choix des citoyens. Plus qu’une méthode, c’est une ligne de conduite que les citoyens ont les moyens de s’offrir. Trop souvent infantilisés, régulièrement manipulés par des discours anxiogènes, ou flattés dans le sens du poil communautaire, ceux-ci ont la possibilité de faire taire les faux-prophètes de l’opinion publique qui se vantent de distribuer du haut de leur chaire médiatique, du pain et de la bonne parole nationale. Entre temps, la révolution internet est passée par là. Les électeurs ne font plus leurs courses au grand marché de l’audimat télévisuel, mais savent se servir eux-mêmes et distinguer le bon grain de l’ivraie. Les candidats ont donc tout intérêt à renoncer aux fausses promesses et aux mensonges faciles qui caractérisent beaucoup trop la vie politique. De la sincérité, de la sobriété et du respect : c’est aussi ce qu’attendent aujourd’hui les électeurs. Avant que le maëlstrom de l’indifférence n’emporte la démocratie. info@zamanfrance.fr
Le président de l’UMP, Jean-François Copé, a réclamé mercredi la démission de la ministre de la Justice après que Jean-Marc Ayrault a reconnu mardi qu’elle avait eu connaissance de la réalité des écoutes dès le 26 février, lors de l’ouverture d’une information judiciaire mais pas de leur contenu.
Jean-François Copé, président de l’UMP.
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Le président de l’UMP, Jean-François Copé, a réclamé mercredi la démission de la ministre de la Justice, Christiane Taubira, qui a selon lui «menti» en affirmant n’avoir été informée que vendredi dernier du placement sur écoutes de Nicolas Sarkozy. Mis à mal par la succession d’affaires visant l’UMP et l’ancien chef de l’Etat, les ténors de l’opposition ont lancé une contre-attaque en règle en accusant l’exécutif de s’être livré à un «espionnage politique» à de fins partisanes, ce que le Parti socialiste a démenti par la voix de son dirigeant.Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a reconnu mardi sur France 2 que Christiane Taubira et lui-même avaient été informés dès le 26 février, sans connaître le contenu des écoutes, contredisant ainsi sa ministre de la justice. La garde des Sceaux avait affirmé lundi qu’elle n’en avait pris connaissance qu’à la lecture d’un article du Monde paru vendredi dernier. «C’est donc que la garde des Sceaux a menti, dans ce contexte il n’est pas possible qu’elle reste en fonction», a déclaré Jean-François Copé à des journalistes. «Sa démission face à ce mensonge est inéluctable.» Le président de l’UMP «demande que le Premier ministre réunisse l’Assemblée nationale pour s’expliquer devant elle, sans attendre». Quant à
François Hollande, «le président de la République ne va pas s’en sortir avec simplement l’annonce ingénue d’une nouvelle commission censée faire toute la lumière et améliorer les procédures en cours», a ajouté Jean-François Copé.
«HOLLANDE DOIT S’EXPLIQUER» «C’est donc aussi le président de la République qui devra s’expliquer devant les Français», a-t-il ajouté, estimant que l’atteinte à la séparation des pouvoirs ne venait pas aujourd’hui de l’opposition, mais «de ce gouvernement et du président de la République». Il a également laissé entendre
que le ministre de l’Intérieur Manuel Valls, qui a assuré mercredi matin avoir appris l’existence des écoutes par la presse, donc vendredi dernier également, était lui-même dans le déni. Manuel Valls a déclaré mercredi qu’il n’avait eu connaissance de la mise sur écoute de Nicolas Sarkozy qu’à travers les informations de presse. Le quotidien Le Monde a dévoilé ces informations le 7 mars. Selon Jean-François Copé, Manuel Valls «prend une énorme responsabilité en disant qu’il n’était au courant de rien car s’il devait apparaître qu’il était effectivement au courant c’est donc un nouveau mensonge d’Etat». PHOTO DE LA SEMAINE
Des manifestants se sont réunis à Istanbul et Ankara après le décès d’un adolescent de 15 ans blessé à la tête par la police lors du vaste mouvement de contestation antigouvernemental de l’été 2013. Berkin Elvan, alors âgé de 14 ans, avait été touché à la tête par une cartouche de gaz lacrymogène lors des batailles de rue alors qu’il était sorti acheter du pain pour sa famille. Il était alors tombé dans le coma.
...ET UNE MAUVAISE
UNE BONNE...
842 millions d’humains touchés par la malnutrition
La baisse des prix dans le secteur des télécoms est un acquis irréversible, a déclaré mardi le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg au sujet d’un éventuel rachat de SFR, filiale de Vivendi par Bouygues ou Numericable. La mise en vente de SFR devrait chambouler le secteur français des télécoms, en particulier si Vivendi
La production alimentaire mondiale devra être accrue de 60% d’ici 2050 pour éviter des pénuries susceptibles de provoquer des troubles sociaux voire des guerres civiles, a prévenu lundi l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Ces calculs se basent sur les projections de croissance démographique (la population mondiale dépasserait les 9 milliards d’humains en 2050,
décidait de retenir l’offre de Bouygues qui aurait pour conséquence de faire passer de quatre à trois le nombre d’opérateurs mobiles. Ce retour à la situation de marché qui préexistait avant l’arrivée de Free mobile, la filiale télécoms d’Iliad, en janvier 2012, fait craindre à des associations de consommateurs une possible hausse des tarifs.
selon l’Onu) et sur l’évolution des régimes alimentaires, de plus en plus consommateurs de calories. La sous-nutrition concerne aujourd’hui 842 millions d’humains, selon la FAO, dont près des deux tiers vivent en Asie-Pacifique. Un enfant de moins de cinq ans sur quatre souffre de malnutrition. Pour la FAO, l’alternative est la suivante: soit augmenter la superficie des terres arables, soit accroître la productivité.
NOUVELLE
Montebourg déclare que la baisse des prix des télécoms est irréversible
03 FRANCE
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14 - 20 MARS 2014 ZAMAN FRANCE
«Une troisième fois, ce serait comme faire un troisième Very bad trip. Ca n’a pas tellement marché, si ?» C’est ce que répond Barack Obama à Zach Galifianakis (lui-même l’un des acteurs de cette comédie) qui l’interroge sur un 3e mandat, au cours d’une interview où l’acteur va jusqu’à lui demander ce que cela «fait d’être le dernier président noir des Etats-Unis»
Un élu marseillais dénonce l’«ambiguïté» de Mennucci A Marseille, les règlements de compte ne concernent pas seulement les milieux mafieux. La campagne des municipales a été dure et particulièrement violente. Nassurdine Haidari, un élu sortant proche de Mennucci (PS), dénonce aujourd’hui des pratiques clientélistes et des positions ambigües du candidat socialiste. FOUAD BAHRI PARIS Nassurdine Haidari est un homme blessé. Adjoint à la jeunesse et aux sports de Patrick Mennucci à la mairie des 1er et 7e arrondissements, il vient d’adresser une lettre ouverte au président Hollande, dont l’hebdomadaire Le Point a publié de larges extraits. Un cri du cœur dans lequel il dénonce des pratiques politiques et rappelle les violences physiques qu’il a subies au nom de son engagement. «Monsieur le Président de la République, j’ai failli perdre la vie pour vous, le 3 février 2012, au coeur de Félix-Pyat, en pleine campagne des primaires, dans le troisième arrondissement de Marseille. J’ai été le seul élu marseillais à avoir eu le courage d’affronter frontalement «le système» et j’ai été violemment puni en conséquence», écrit-il. Dans un entretien à Zaman France, Nassurdine Haidari revient sur ces faits douloureux et explique le sens de sa démarche.
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CLANISME ET COPINAGE MARSEILLAIS «Lors des primaires socialistes pour les présidentielles, nous allions tracter pour Hollande. J’ai été menacé par une bande de voyous qui m’ont encerclé et m’ont interdit de tracter. Il y avait en toile de fond une querelle entre Guérini et Mancini et des tensions fortes existaient à Marseille. J’ai été agressé par des individus cagoulés au nom de «Ici c’est Guérini» et ils m’ont brisé le genou en me frappant durement». Un prix fort payé pour le Parti socialiste mais qui n’a pas été récompensé. Malgré un engagement constant de six années au service des Marseillais, Nassurdine ne figure sur aucune liste municipale. Pire : les pratiques dénoncées du système Guérini au temps des précédentes campagnes électorales semblent oubliées, et des proches de Guérini figurent, eux, bel et bien en position éligible. «Ce que l’on reprochait dans le système Guérini, c’était le clanisme qui reposait sur le copinage et le clientélisme, sur la promotion des collaborateurs, des assistants parlementaires. Avec Patrick Mennucci, je pensais que nous pourrions changer la donne en profondeur. Après tous les sacrifices et les efforts que j’ai fournis, je n’ai eu en retour que mépris», confie Nassurdine. MENUCCI «M’A RÉDUIT À UNE COULEUR DE PEAU» Contacté par notre rédaction, M. Mennucci n’a pas donné suite. Dans l’immédiat, Nassurdine
assure n’avoir aucune rancune et reconnaît à Mennucci des «qualités». Il réaffirme également son engagement en tant que socialiste. Mais il met en garde. «Il ne faut pas compter sur moi pour être le représentant d’une diversité cosmétique. Je ne suis pas le nègre du Parti socialiste. Je suis toujours resté libre». D’autant que, dans sa lettre, il relate une forme de mépris et des propos tenus sur les Noirs. «Des Noirs, il y en aura sur les listes, mais toi, je ne sais pas si tu seras conseiller municipal», lui aurait-dit Mennucci avant les primaires socialistes. «Au départ, je pensais que ces mots avaient dépassé sa pensée. C’est une phrase qui porte à ambiguïté. Il m’a réduit à une couleur de peau même si je pense que Patrick n’est pas un homme raciste», finit-il par concéder.
Nassurdine Haydari est l’adjoint sortant à la jeunesse et aux sports de Patrick Mennucci, à la mairie des 1er et 7e de Marseille.
04 DOSSIER SPECIAL
14 - 20 MARS 2014 ZAMAN FRANCE
MUNICIPALES À STRASBOURG Alors qu’approche à grands pas le premier tour des élections municipales, Fabienne Keller (UMP), Roland Ries (PS) et François Loos (UDI) se présentent tous trois à la mairie de Strasbourg. Zaman France s’est intéressé aux programmes, aux idées et aux engagements de ces trois candidats.
FABIENNE KELLER :
«Je m’engage à ne pas augmenter les impôts» Fabienne Keller, est la candidate UMP de la municipalité de Strasbourg. Sur l’emploi, le logement, la fiscalité et l’interculturel, elle explique ses projets pour la ville à Zaman France.
ROLAND RIES :
Priorité à l’économie et à la culture
Quels sont les grands axes de votre candidature pour la ville de Strasbourg ?
Fabienne Keller, candidate UMP à la mairie de Depuis un an, j’ai consulté de nomStrasbourg. breuses personnes, en commençant avec l’ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin. Ensuite, mon équipe et moi avons organisé une opération de terrain «Dites moi tout» pour aller à la rencontre des Strasbourgeois dans les quartiers. Qu’est-il ressorti de cette consultation populaire ? La priorité forte qui est apparue est vraiment l’emploi. Ne pas avoir d’emploi, c’est ne pas avoir de revenus mais aussi de statut social. Le taux de chômage à Strasbourg est de 12 %, 3 fois plus élevé que de l’autre côté du Rhin. Il a augmenté de 40 % sur le dernier mandat. L’Alsace avait plutôt bien résisté sur le plan économique grâce à la partie industrielle mais il y a eu ensuite une série de fermetures d’usines et de restructurations. Je suis résolumment aux côtés des entrepreneurs pour défendre la stabilité fiscale pour les entreprises et les particuliers. Je propose également la construction d’un grand quartier d’affaires à l’arrière de la gare, avec une liaison avec les TER et une correspondance directe avec l’aéroport. Quel est le plan de relance que vous proposez pour Strasbourg ? Sur l’emploi, je propose de redonner du rayonnement à Strasbourg car c’est à cette condition que les entreprises viendront. Je me battrai pour le TGV Rhin-Rhône aujourd’hui à l’arrêt et reporté à 2050
MEHMET DINÇ STRASBOURG Né en 1945 à Niederlauterbach en Alsace, Roland Ries (PS), le maire sortant de Strasbourg, fut conseiller de Catherine Trautmann entre 1989 et 1997. Maire de Strasbourg entre 1997 et 2000, il a été conseiller municipal et communautaire entre 2001 et 2008 avant d’être réélu maire.
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par le nouveau gouvernement. Nous avons eu droit à un mandat de résignation sur ce projet comme sur l’Europe. Je propose de réformer les procédures d’autorisation pour les créations d’ateliers ou l’attribution de places de parking en réduisant les délais d’obtention des permis et en simplifiant les procédures administratives. Quelle politique fiscale comptez-vous défendre devant les Strasbourgeois ? Les habitants nous ont beaucoup parlé de fiscalité locale. C’est la double peine puisque les impôts ont augmenté tant au niveau national que local. Je m’engage à ne pas augmenter les impôts durant mon mandat. Je m’engage aussi à une gestion éthique et responsable de l’argent public en proposant des appels d’offres à tous les terrains qui seront vendus comme je m’engage à proposer une clause d’emploi local dans ces appels d’offres. Il faut concevoir un aménagement des terrains et faire de l’urbanisme. Le maire a vendu beaucoup de terrains rapidement, entraînant une bétonisation de la ville. Strasbourg a une âme qu’il faut mettre en valeur.
Strasbourg est une ville multiculturelle avec une forte composante turque. Quelle est votre vision de la cohésion locale à Strasbourg ? Strasbourg est une ville qui rassemble. Nous avons la chance d’avoir plusieurs religions qui sont très présentes à Strasbourg avec des juifs, des catholiques, des protestants, des musulmans, des bouddhistes et des orthodoxes. Nous proposons d’ouvrir une Maison des cultures et des religions pour permettre la connaissance réciproque. Nous proposons également une journée du patrimoine religieux pour ouvrir les lieux de culte. Que vous disent les associations francoturques qui viennent à votre rencontre ? Quelles sont leurs problématiques ? Ce sont des entrepreneurs qui sont soucieux de prospérer dans leur activité et qui partagent leurs aspirations. Sur la Turquie, j’ai eu moi-même des positions très fortes sur le débat concernant la condamnation de la négation du génocide arménien. J’ai refusé de voter ce texte. C’est aux historiens de dire la vérité sur ce qu’il s’est passé il y a un siècle dans un pays ami, pas aux parlementaires.
DEPUIS 1983 Candidat du parti socialiste, Ries se dit à l’écoute du public depuis 1983. «J’ai toujours fait de la politique avec les idéaux de Michel Rocard. Je n’ai jamais changé de ligne, j’ai gardé les mêmes idées», a-t-il dit. Sur le plan économique, il estime que «l’économie libérale poussée à son extrême est dangereuse, je suis favorable à une économie de marché sous contrôle de l’Etat. Le marché permet à l’économie de vivre, motive les gens, les pousse à s’investir et à gagner de l’argent. Mais pour corriger certains travers de l’économie de marché, il faut un contrôle étatique. C’est ce qui me distingue de mes adversaires». AVANT TOUT, UNE AFFAIRE DE PERSONNALITÉ Ries estime que «les élections municipales ne sont pas à proprement parler une élection politique au même niveau que les élections législatives. Ces dernières mettent en avant les idées politiques alors que la personnalité du candidat passe au second plan; c’est le contraire dans les élections municipales». UNE VILLE COSMOPOLITE Maire sortant, Roland Ries veut mettre l’accent sur les projets culturels. «Strasbourg est une ville cosmopolite et je veux qu’on profite de cette richesse», affirme-t-il. Parmi les projets de Roland Ries : faciliter l’accès des jeunes à l’emploi, favoriser l’essor des entreprises locales par le biais des marchés publics (Ries s’engage à simplifier les procédures pour les PME et à installer des points d’information) et enfin, développer le tourisme, en faisant notamment de Strasbourg, la 2e ville de France pour les congrès. Prochainement, 1800 personnes seront embauchées pour les travaux.
François Loos : faire de Strasbourg une ville où il fait bon vivre MEHMET DINÇ STRASBOURG Le candidat du centre droit (UDI), François Loos est né à Strasbourg en 1953. Ingénieur de formation, il a travaillé au parlement européen avant d’être élu conseiller général en 1992 et député un an plus tard. Il a fait partie des gouvernements de Villepin et de Raffarin en tant que ministre du commerce extérieur.
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LA PRIORITÉ DE FRANÇOIS LOOS, L’EMPLOI Les questions économiques occupent la première place dans les préoccupations des candidats aux élections municipales. François Loos a axé sa campagne dans ce domaine. Critiquant le bilan écono-
mique du maire sortant Roland Ries, il a promis de s’attaquer aux blocages.
RELANCER LA VIE CULTURELLE Loos, qui estime que la vie culturelle manque de vitalité, s’est engagé à créer une biennale des cultures citadines et un festival d’été. FAIRE DE STRASBOURG UNE VILLE AGRÉABLE À VIVRE Loos a indiqué qu’il fallait «se mobiliser dès maintenant pour construire la ville de demain». «Nous devons travailler pour faire de Strasbourg, une ville verte et une référence dans le domaine du développement durable. Nous devons ouvrir la ville à la nature comme le fait New York», a-t-il dit.
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14 - 20 MARS 2014 ZAMAN FRANCE
CLICHY-SOUS-BOIS :
L’Etat amorce timidement son retour Olivier Klein est le maire socialiste de Clichy-sous-Bois depuis octobre 2011 et ex-1er adjoint de l’ancien maire Claude Dilain depuis 1995. Dans le cadre de la campagne qu’il mène pour un second mandat, Zaman France l’a interrogé sur la voie politique qu’il proposera aux Clichois ce 23 mars. Zoom sur l’une des villes à la plus forte composante franco-turque nationale. EMRE DEMIR, FOUAD BAHRI PARIS Quels sont les challenges que la ville doit relever ? Le transport. L’arrivée du tramway va changer la ville et la vie des habitants, parce qu’il est très compliqué pour eux d’aller travailler et étudier, d’avoir accès aux loisirs à cause de l’enclavement de la ville. La construction du centre-ville autour de ce tramway va permettre à la ville de rayonner. Les habitants vivront différemment. Le tramway sera opérationnel en 2018, c’est encore loin, mais c’est au milieu du mandat. Son trajet partira de Livry Gargan pour rejoindre Bondy et relier le RER E. Le tramway permettra l’accélération du projet de rénovation des grandes copropriétés à plus de 800 logements du quartier du Chêne pointu.
Olivier Klein, maire sortant de Clichy-sous-Bois.
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Que prévoyez-vous pour améliorer l’offre en termes de logements ? L’une des crises majeures à Clichy-sous-Bois est celle du logement. Nous avons plus de 3000 demandeurs d’inscrits et nous n’attribuons que 45 à 50 logements chaque année. A ce rythme, il nous faudrait 70 ans pour loger tout le monde. Il y a deux manières de régler cela : sur les 3000 demandeurs, la moitié vit en copropriété. Si nous réhabilitons leurs logements et améliorons leur qualité de vie, ils auront probablement envie de rester. Il faut diversifier l’offre avec du logement social, de l’accession à la propriété. Mais si nous décidons de construire de nouveaux logements, il faut que toutes les conditions et les infrastructures soient réunies, avec davantage de places dans les crèches, les écoles, un collège pour les enfants. La question du logement ne peut pas se régler à l’échelle d’une ville. Il faut une vraie politique d’aménagement du territoire avec des entreprises. Il faut penser à l’échelle intercommunale. Pôle emploi a inauguré ses premiers bureaux à Clichysous-Bois. Peut-on parler de retour de l’Etat dans votre commune ? Oui. Cela a commencé avec le commissariat. Cela faisait trente ans qu’on se battait pour en avoir un. Même chose pour Pôle emploi. Nous avons fait le choix d’installer Pôle emploi, le service emploi de la communauté d’agglomération et la mission locale au même endroit, pour que ces services travaillent en collaboration et accompagnent mieux les chercheurs d’emploi. Nous travaillons aussi avec la Caisse d’allocations familiales pour construire une Maison de la famille afin d’assurer des permanences. Les services publics, c’est aussi avant tout l’école. Les enfants clichois ont besoin, plus qu’ailleurs, de la meilleure école. C’est pour cela que l’enjeu des transports est important. J’ai un fils qui se rend chaque jour à la faculté. Il met deux heures. Un jour, il nous faudra également un pôle universitaire ou une
annexe. Nous travaillons par ailleurs sur un projet culturel intitulé la Villa Médicis avec le ministère de la Culture que nous construirons dans une ancienne tour qui était devenu le symbole de l’échec de ce quartier. Un projet de résidence d’artiste y sera mené. En 2023, nous aurons enfin le métro du Grand Paris qui passera à Montfermeil avec la ligne 16. Comment expliquez-vous qu’il ait fallu tant de temps pour que l’Etat décide d’ouvrir une agence de Pôle emploi dans l’une des communes d’Ile-de-France les plus ravagées par le chômage ? Je ne me l’explique pas. Il n’y a aucune raison objective qui ait fait qu’on ait attendu aussi longtemps. Il s’agit vraisemblablement de raisons administratives. Il doit y avoir aussi des inquiétudes non fondées sur la capacité à convaincre des conseillers de Pôle emploi à venir travailler à Clichy-sous-Bois. Il y avait aussi la question des transports. Autant de prétextes que nous avons réussi à lever. Quelle politique allez-vous mener pour endiguer le chômage ? Il faut réussir à faire venir les entreprises. Nous avons commencé à le faire avec la zone franche urbaine. Mais avant de faire venir de nouvelles entreprises, il faut réussir à conserver celles qui y sont. On a relancé depuis presque deux ans le club des entrepreneurs de Clichy-sous-Bois et Montfermeil pour mutualiser les entreprises locales et favoriser la collaboration locale. Des sessions de formation avec la Chambre de commerce sont proposées. Maintenant, pour faire venir des entreprises, il faut de la superficie foncière disponible. Or, beaucoup de nos terrains ont été préemptés pour la construction de logements. Un moment donné, il a fallu faire un choix. Nous avions 1500 logements à démolir avec un terrain initialement prévu pour les entreprises. Le développement économique a été ralenti par cela. Ensuite la question du transport se pose. Une entreprise n’aura jamais 100 % de ses employés à Clichy-sousBois. On sait par ailleurs que l’ensemble de la question du chômage ne se règlera pas intra-
Au milieu, Olivier Klein, entouré de deux élus franco-turcs Cumhur Guneslik et Ramazan Aslan.
muros. Aujourd’hui, un Clichois va être discriminé parce qu’un chef d’entreprise connait ces problèmes de transport. Pourtant, nous ne sommes qu’à 12 km de Paris. Nous avons tout de même un certains nombre d’organismes présents comme l’Adie pour accompagner les chercheurs d’emploi. Nous réfléchissons à un projet de locaux d’activités à bas coût, une sorte de pépinière d’entreprises. Plus de huit ans après les émeutes de Clichy-sous-Bois, qu’est-ce qui a changé ? Quid des nombreux plans banlieues ? Clichy-sous-Bois a beaucoup changé depuis 2005. Quand le plan de rénovation urbaine a été voté en 2004, on a tout de suite mis en avant le fait qu’il fallait aussi ne pas oublier le bas Clichy-Montfermeil et le quartier du Chêne pointu. Malheureusement, on n’a pas été entendu. L’histoire nous a donné raison. Un an après, l’essentiel des révoltes est parti du Chêne pointu. La situation urbaine et sociale s’est améliorée dans le haut Clichy grâce à un bon accompagnement des familles qui sont passées de la copropriété au loge-
ment neuf. Dans le bas Clichy, la situation a continué à se dégrader. La réussite de ce plan urbain passera par le tramway. Clichy-sous-Bois fait partie des villes avec une forte composante turque. Quel jugement portez-vous sur cette communauté ? Est-elle socialement active ? Bien évidemment une municipalité n’a pas d’action spécifique envers une communauté. Ceci dit, nos concitoyens d’origine turque sont des partenaires importants car ils ont une présence ancienne. Nous avons d’excellents rapports avec eux à travers le mouvement associatif sur la politique de la ville, le contrat urbain de cohésion sociale, les prêts de locaux ou de salles pour le soutien scolaire, le maintien de la culture turque, sur des projets sportifs également. La communauté turque est un acteur économique important à travers l’activité du textile notamment. Il y a également des élus franco-turcs qui s’impliquent dans la vie citoyenne. C’est pour cela que je leur ai demandé d’être sur ma liste parce qu’ils ont un regard et des compétences économiques et dans l’insertion socio-économique.
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14 - 20 MARS 2014 ZAMAN FRANCE
D’Istanbul à Clichy-sous-Bois, le fabuleux destin de Cumhur Guneslik A Clichy-sous-Bois, l’engagement politique franco-turc a plusieurs visages. Cumhur Guneslik est l’un d’eux. Vice-président de la communauté d’agglomération Clichy-Montfermeil dans l’assainissement et conseiller municipal, il soutient la candidature du maire sortant Olivier Klein. FOUAD BAHRI PARIS C’est l’histoire de Cumhur, un de ces nombreux Turcs qui, il y a près de 40 ans, rencontra la France. Fraîchement débarqué de Turquie à l’âge de 10 ans, Cumhur Guneslik, conseiller municipal auprès d’Olivier Klein, maire sortant de Clichy-sous-Bois, s’en souvient encore. «Je suis venu ici à 10 ans avant de retourner en Turquie pour faire mes études dans un lycée privé français. A mon retour en France, je croyais que je rentrerais plus tard en Turquie. Le changement a eu lieu quand j’ai vu mes enfants grandir. J’ai compris alors que je ne retournerais plus là-bas». En 1995, déterminé à construire son avenir en France, Cumhur décide de se lancer dans l’associatif et crée Bosphore, une association franco-turque. «L’idée était d’aider nos compatriotes d’origines turques à s’intégrer dans la société française. Refuser l’assimilation et jouer la carte de l’intégration».
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UNE ASSOCIATION AU SERVICE DES FRANCO-TURCS Bosphore était structurée autour de trois idées. D’abord l’éducation. A l’époque, les Turcs s’orientaient beaucoup sur la confection, secteur aujourd’hui en déclin. Pour leur offrir un avenir meilleur, «travailler avec un col blanc», Cumhur décide d’investir l’éducation avec le soutien scolaire. «Nos parents ne parlaient pas le français, il y avait donc chez nous une crainte d’aller à l’école», confie-t-il. Deuxième axe, le volet social. Les primo-arrivants turcs étaient venus pour des
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«Aujourd’hui, chaque action politique a un coût. On ne peut pas réaliser tout ce qu’on souhaite»
raisons économiques : il fallut donc les accompagner dans leurs démarches auprès de la sécurité sociale, de la CAF ou de la mairie. Une permanence sociale pour les aider fut ainsi mis en place dans les locaux de Bosphore. Dernier volet, la culture. Pour Cumhur, un enjeu fondamental pour l’identité des Franco-turcs. «Nous sommes tous fiers d’avoir une histoire aussi riche que la France. Transmettre à nos enfants des valeurs et faire en sorte qu’ils puissent avoir une double culture franco-turque est essentiel pour nous».
S’ENGAGER POUR CLICHY-SOUS-BOIS Puis vint le temps de l’autre engagement, politique cette fois. Une voie qu’il n’a pas
Cumhur Guneslik soutient la candidature du maire sortant Olivier Klein (PS).
choisi au départ. C’est en 2001 au moment même où il demanda sa naturalisation française, que Cumhur prit le risque de cette nouvelle aventure. Un premier mandat de conseiller municipal lui fut proposé, pour mettre le pied à l’étrier. Très vite, il se passionne et s’investit. «C’est lors de mon deuxième mandat que mon activité a pris de l’envergure. J’ai été vice-président de la communauté d’agglomération Clichysous-Bois/Montfermeil. L’assainissement est le 2e plus gros budget de l’agglomération. 2 millions d’euros. Mon objectif est d’être actif pour changer les choses à mon niveau». Aujourd’hui, Cumhur a 45 ans, est père de deux filles et est directeur d’une association d’assertion dans l’activité économique qui salarie dix personnes. Mais la politique reste son dada, même s’il n’evisage pas de devenir maire.
souhaite. Sur 6 personnes que je croise dans la rue, 4 d’entre elles me sollicitent pour des demandes de logement. Je me suis fait des ennemis», ajoute-t-il. Pour autant, Cumhur n’est pas de ceux qui baissent les bras. Une idée fixe l’obsède : la rénovation du quartier du Chêne pointu. «C’est ce qui va déterminer notre réussite ou non. On a réussi sur le transport grâce au tramway et le métro. On doit réussir sur le Bas-Clichy. Il y a aussi la question de l’emploi. Ce n’est pas normal que le plus grand employeur de la ville soit la mairie». Motivé et déterminé, Cumhur Guneslik puise l’énergie de son action dans le lien particulier qu’il entretient avec Clichy-sous-Bois. Un lien fait d’amour et de bien-être. «J’adore ma ville. Nous sommes à 10 minutes de la province et à 15 km de Paris. Nous avons des atouts».
ENTRE CUMHUR ET CLICHY, UNE HISTOIRE D’AMOUR Et l’expérience acquise toutes ces années lui a aussi fait voir l’envers de la politique. A commencer par la frustration. «On se dit qu’on va pouvoir faire changer les choses mais on se fait rattraper par la réalité. Aujourd’hui, chaque action politique a un coût. On ne peut pas réaliser tout ce qu’on
«LA TURQUIE EST MA PATRIE, LA FRANCE, MON PAYS» Sans oublier que Clichy-sous-Bois comporte une forte communauté turque estimée à 10 % de la population. «J’aime bien voir les ainés discuter dans la rue, ce côté oriental. C’est pourquoi j’ai fait le choix de rester dans cette ville», confirme Cumhur.
Dans l’entourage de l’élu, l’engagement politique est doublement perçu . «Mes filles sont à la fois lassées et fières de mon engagement. Lassées car être élu c’est avoir une vie familiale très réduite». Mais le vice-président de la communauté d’agglomération Clichy-sous-Bois /Montfermeil est rassuré car la relève est déjà là. «En 2001, on
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«Mes enfants me disent qu’ils se considèrent moitié Turcs-moitié Français. Ça, c’est l’intégration»
était 4 personnes d’origines turques à être élues en France. 45 en 2008. Je pense qu’on a ouvert des portes», se plaît-il à préciser. Quant à la Turquie, elle continue à briller dans son coeur comme un astre lointain qu’il n’a jamais oublié. «Je suis fier d’être turc mais j’ai choisi de travailler et de vivre ici. La Turquie est ma patrie, la France, mon pays. Il ne faut jamais oublier ses origines. Mes enfants eux-mêmes me disent qu’ils se considèrent moitié Turcs-moitié Français. Ça, c’est l’intégration».
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ROUBAIX :
Fatih Yanar : «Pour changer les choses, il faut être dans le système» Fatih Yanar a 25 ans et enseigne l’économie et le marketing depuis deux ans dans un lycée à Compiègne. Il se présente à Roubaix dans une liste dissidente du parti socialiste, menée par le conseiller municipal André Renard. Qu’est-ce qui vous a poussé à faire de la politique ? Je suis pas forcement très politisé, pas
vraiment de droite, pas nécessairement de gauche. Pendant des années, on est à la place du spectateur, on se dit : « il devrait faire ceci, il devrait faire cela ». Mais un jour, je me suis dit qu’il fallait être acteur et pas simplement spectateur. Il y a une certaine frustration qui monte ces dernières années, certains vont l’exprimer par la violence, d’autres par la fuite, d’autres encore vont former des associations. Pour changer les choses, il faut être dans le système. La politique est un acte citoyen même si certains en ont fait un métier. Comment vous positionnez-vous ? La politique c’est un peu compliqué, parce qu’on essaie rapidement de vous mettre dans des cases. Le public a besoin de repères, cela dit, il faut avoir un certain pragmatisme. Selon la conjoncture à un moment donné, on va avoir besoin d’une vision plutôt sociale et à d’autres d’une politique plutôt libérale. A l’heure actuelle, ces clivages ne font plus avancer les choses, des décisions importantes doivent être prises, qu’elles soient de gauche ou de droite. C’est avant tout le citoyen et la vision d’ensemble qu’il faut avoir. Pouvez-nous parler de «Nous c’est Roubaix»? C’est un collectif de citoyens de droite et de gauche. Le mouvement a été lancé par des socialistes qui étaient très déçus par la politique de la ville. De fait, en 30 ans, la capitale mondiale du textile, berceau de la distribution, est devenue la ville la plus pauvre de France. Le constat est là et depuis plusieurs années, c’est la gauche qui gouverne. Au moment des municipales, les divisions se sont faites de plus en plus visibles. Il y a eu des démissions et des personnes qui n’ont pas été reprises dans la liste du maire actuel. Certaines d’entre elles ont rejoint notre liste. Quelles sont selon vous les priorités de votre ville? L’emploi, l’emploi et puis encore l’emploi. Roubaix n’a pas réussi à se mettre en phase avec l’économie réelle, il y a eu une augmentation rapide et massive du chômage. Il y a aussi les questions de sécurité, c’est une réalité, Roubaix, on l’aime, mais on ne peut pas nier qu’il y a de gros problèmes en termes de sécurité. Ca n’est pas non plus le «Bronx» des années 1970, ça reste une ville où il fait bon vivre ! La question de la propreté est importante aussi, nous avons trop de dépôts sauvages d’ordures. Enfin, je pense que Roubaix peut être un des précurseurs en termes de démocratie active. Beaucoup de politiques en parlent, mais très peu l’appliquent donc justement vu que nous on est pas des politiciens, on propose de faire ce que les politiciens n’ont pas fait. Un exemple de proposition concrète portée par votre liste ? Mettre en place, par exemple, une banque municipale d’investissement. Le concept étant que les personnes qui ont des idées à Roubaix mais qui manquent de capital puissent bénéficier de subventions, c’est-à-dire de prêt à taux zéro. Actuellement, il y a de très nombreuses subventions publiques ou privées, mais les démarches administratives sont tellement nombreuses que c’est une usine à gaz. Ce
que nous proposons c’est une organisation unique, une banque municipale d’investissement où tout irait dans une seule caisse et de mettre en place un partenariat public privé. Via cette banque on investirait dans les projets créateurs d’emploi.
Votre message aux Roubaisiens ? Si vous en avez marre des partis traditionnels, qui ne travaillent plus pour les Roubaisiens, vous avez juste à voter pour notre liste de citoyens désintéressés qui feront les choses qu’ils promettent. C’est mon enga-
gement personnel avec la population, si les élus dont je pourrais faire partie n’atteignent pas leurs objectifs, je ne me représenterai plus à aucun mandant. Fatih Yanar.
08 TURQUIE
14 - 20 MARS 2014 ZAMAN FRANCE
Berkin, 15 ans, attaqué lors des manifestations de Gezi, est mort La nouvelle du décès de Berkin a soulevé l’indignation de l’ensemble de la nation turque. Le journaliste Tuncay Özkan a été libéré cette semaine.
Les accusés de l’affaire Ergenekon sortent de prison un par un Après la sortie de l’ancien chef d’état-major, Ilker Basbug, plusieurs chambres du tribunal d’Istanbul ont rendu des décisions de libération en cascade en fa-
veur des autres accusés des affaires Ergenekon et Balyoz. La promulgation de la loi sur la réduction à 5 ans de la durée maximale de la détention provisoire en est le fondement légal. L’avocat Kemal Kerinçsiz, le journaliste Tuncay Özkan, le colonel Levent Göktas, le parrain Sedat Peker et surtout Alpaslan Arslan ont été les premiers à bénéficier d’une libération. La décision concernant ce dernier a particulièrement ému. Avocat, il avait investi le Conseil d’Etat en 2007 et tué l’un des juges de la chambre qui avait rendu une décision défavorable dans une affaire de voile. Le président de la République, Ahmet Necdet Sezer, s’était déplacé aux funérailles du juge assassiné. Peu après, les procureurs avaient renversé la donne et mis à jour les réelles motivations d’Aslan. Son crime fut rattaché à l’organisation Ergenekon. Adepte de la stratégie de la tension, cette organisation visait à renverser le gouvernement de l’AKP en créant une ambiance inquiétante, propice à l’intervention de l’armée. Dans la soirée, le ministère de la Justice a fait savoir qu’Arslan ne sortirait pas de prison malgré la décision de justice. Il a été, en effet, condamné dans une autre affaire et cette condamnation est définitive. Peu de temps après, ont été libérés les généraux Hasan Igsiz, Hursit Tolon, Sener Eruygur, Veli Küçük, Tuncer Kilinç, l’amiral Alaattin Sevim, le professeur Yalçin Küçük, l’ancien recteur de l’Université d’Istanbul, Kemal Alemdaroglu, le leader du parti des travailleurs, Dogu Perinçek et l’ancienne porte-parole de l’Eglise turque orthodoxe (concurrente du patriarcat oecuménique de Constantinople), Sevgi Erenerol. Le colonel Dursun Ciçek, dont la signature sur un document avait tenu en haleine tout le pays pendant des semaines, ne pourra pas quitter la prison malgré une décision favorable, puisqu’il a été également condamné dans l’affaire Balyoz. Ces accusés continueront à attendre la décision définitive de la Cour de cassation en liberté.
Berkin Elvan, 15 ans, qui avait reçu des gaz lacrymogènes pendant les manifestations de Gezi l’année dernière, est mort après avoir lutté pendant neuf mois.
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Berkin allait acheter le pain le soir du 16 juin quand il a reçu de près des gaz lacrymogènes tirés par les CRS dans le quartier Okmeydani d’Istanbul. Berkin était en unité de soins intensifs à l’hôpital Okmeydani d’Istanbul depuis plus de 269 jours. Dans un communiqué de presse, l’avocat de la famille d’Elvan avait déclaré que Berkin pesait 16 kilos et que son système immunitaire ainsi que ses fonctions cérébrales étaient significativement compromis.
AFFRONTEMENTS DEVANT L’HÔPITAL La famille de Berkin a annoncé sa mort mardi 11 mars à 7h sur Twitter. «Nous
avons perdu notre Berkin à 7h ce matin. Qu’il repose en paix», disait le message. La mort du jeune homme élève le nombre de personnes tuées dans les manifestations de l’été dernier à au moins huit, dont un policier. Les manifestations à l’été 2013 avaient été déclenchées par une répression policière sur les manifestants qui protestaient contre la destruction du parc Gezi. Ces manifestations se sont rapidement propagées à l’échelle nationale, les manifestants demandant plus de libertés démocratiques. La police a dit qu’environ 3 millions de personnes avaient participé aux manifestations de mai à sep-
Erdogan annonce des purges dans l’administration Le Premier ministre turc a indiqué qu’il attendait les élections municipales du 30 mars 2014 pour lancer des procédures de révocation contre les fonctionnaires qui ont mouillé selon lui dans le «coup d’Etat» du 17 décembre 2013. SAMI KILIÇ PARIS L’annonce d’une purge à venir n’est pas courante dans une démocratie. On a connu Tayyip Erdogan, le Premier ministre turc, plus impulsif lorsqu’il s’agissait d’écarter les policiers et les magistrats après les procédures judiciaires du «17 décembre». Un «17 décembre» qui est en passe devenir un cauchemar pour la démocratie turque. Erdogan vient d’annoncer, lors d’une émission de télévision, un bouleversement futur au sein de l’administration. Un peu comme s’il voulait, après avoir étouffé l’incendie dans un premier temps en débarquant les enquêteurs, nettoyer dans un second temps les cendres en révoquant les hauts fonctionnaires.
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«UNE MENACE À LA SÉCURITÉ NATIONALE» Erdogan a déjà pris langue avec le président Obama au sujet de Fethullah Gülen, un penseur musulman installé en Pennsylvanie et accusé d’être le cerveau d’un complot de grande ampleur contre le Premier ministre. «C’est une menace à la sécurité nationale», a-t-il essayé de le convaincre. Obama aurait été positif, «le message est entendu», aurait-il lâché. Dès le lendemain, la Maison blanche a démenti. «La réponse attribuée au président n’est pas exacte», a-t-elle précisé. Erdogan a même évoqué la possibilité de délivrer un mandat d’arrêt international. Le Premier ministre se veut ferme dans sa «guerre d’Indépendance». «Ils se sont infiltrés dans tous les corps de l’Etat ; dans un premier temps, nous allons nettoyer les centres de décision, ensuite, il y aura une répercussion sur la base», a-t-il assuré. Le vice-Premier ministre, Bülent Arinç, avait récemment affirmé qu’un «cerveau supérieur» était à la manœuvre, sans vouloir lui donner un nom. Tayyip Erdogan préfère parler, lui, de «l’imam de l’univers». Il vient de dévoiler le schéma de la hiérarchie de cette «organisation parallèle» qu’il dénonce depuis des semaines. A la question de savoir s’il n’a pas tardé à s’en rendre compte, il a argué de ses bonnes intentions. «Mais il n’y aura pas d’échappatoire, nous allons tout balayer»
a-t-il assuré avant de rappeler qu’il ne faisait pas confiance à la justice du pays qu’il dirige, «la justice n’est pas en mesure d’être impartiale». Mustafa Kamalak, président du parti Saadet (droite religieuse), a pointé la confusion qui règne au sein du gouvernement en relevant que certains ministres, et non des moindres, disent ne pas croire à l’existence d’une organisation parallèle. «Le Premier ministre parle d’une guerre d’Indépendance, contre qui allons-nous combattre ? Va-t-on attiser une lutte entre les fils de la patrie ?», s’est-il insurgé.
LES «ASSASSINS» ET LES «FRÈRES» Les propos contre Gülen et ses sympathisants prenant une tonalité de plus en plus inquiétante, Erdogan a pris la peine de faire un distinguo entre les cadres de cette communauté civile d’inspiration religieuse dite Hizmet, qu’il avait déjà assimilés aux Assassins de Hassan Ibn as-Sabbâh, et les simples sympathisants, qu’il continue d’appeler «mes frères». Hüseyin Gülerce, un proche du mouvement, avait rejeté la distinction entre le sommet et la base, «une épine qui touche l’un, entraîne une douleur pour tous», avait-il écrit dans sa chronique. La semaine dernière, le Conseil de sécurité nationale avait déjà annoncé que des menaces pesaient sur la sécurité du pays et que des mesures drastiques étaient envisagées. Un retour à l’ambiance du 28 février 1997 avait été dénoncé par les milieux libéraux, époque où le même Conseil, dominé par les militaires, avait décidé de pourchasser les groupes religieux dont le Hizmet. Tayyip Erdogan a coupé les ponts avec Fethullah Gülen, un «sage» qu’il respectait jadis, un «traître» qu’il dénonce aujourd’hui. Lors de ses meetings électoraux, il n’hésite pas à stigmatiser les abi et les abla, les «frères» et les «soeurs» dans le jargon du mouvement, qui feraient campagne contre son parti. Dorénavant, la Turquie s’attend à des vagues d’épuration dans la haute administration.
tembre. Mardi matin, quand la nouvelle de la mort d’Elvin a été annoncée, des manifestants se sont réunis devant l’hôpital où Elvin est mort. Dans le même temps, des véhicules de police sont arrivés devant l’hôpital, faisant réagir la foule. Des manifestants ont construit des barricades devant les véhicules de police. Les manifestants ont ensuite commencé à jeter des pierres et ont attaqué les véhicules avec des bâtons. La police a tiré des gaz lacrymogènes pour disperser la foule. Le président Gül a déclaré lors d’une conférence de presse avoir exprimé ses condoléances à la famille du jeune homme.
09 TURQUIE
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JEAN MARCOU :
Erdogan confirme avoir interféré dans la justice -
«L’AKP n’est plus ce parti auquel tout réussissait» Jean Marcou, spécialiste de la Turquie, professeur à l’Institut d’Etudes Politiques de Grenoble et ancien directeur de l’Institut Français d’Etudes Anatoliennes à Istanbul. Il contribue régulièrement à l’Observatoire de la Vie Politique Turque (OVIPOT). Dernier ouvrage paru : Vingt ans de changements en Turquie (1992-2012). SAMI KILIÇ PARIS Quels sont les enjeux des élections municipales en Turquie ? Les scrutins locaux sont toujours perturbés par des questions nationales. Ceci étant, les prochaines élections locales turques seront affectées par des enjeux nationaux très différents des précédentes. En 2009, le principal enjeu qui avait traversé les élections était l’objectif de l’AKP de conquérir un certain nombre de bastions kurdes dans le Sud-Est. Il avait d’ailleurs largement échoué dans cette entreprise. Aujourd’hui, on n’est pas dans ce registre-là. Les deux problèmes d’ampleur nationale qui sont en train d’affecter le prochain scrutin local sont d’une part, les suites du « 17 décembre », c’est-à-dire les épurations, les différentes législations, en particulier la loi sur le HSYK et sa mise en application et d’autre part, l’agenda politique particulier de cette année 2014 où un autre scrutin est prévu, celui des présidentielles. Cette élection est la première du genre, une élection présidentielle au suffrage universel, qui, potentiellement, peut transformer le système parlementaire turc, le présidentialiser.
Pour Jean Marcou, les dernières affaires ont créé le doute sur la capacité du parti à continuer.
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Les électeurs vont donc déterminer l’avenir politique du Premier ministre Tayyip Erdogan... Oui, il y a une accentuation du caractère de test électoral général grandeur nature. En même temps, c’est toujours un scrutin qui a une forte dimension locale. D’ailleurs, quand on regarde les deux dernières élections locales en Turquie, on s’aperçoit que les résultats n’étaient pas au niveau de ceux des élections législatives. Cette dimension locale ne va probablement pas être totalement effacée mais, cette fois-ci, le poids des enjeux nationaux risque de donner à ce scrutin une dimension de plébiscite. N’est-il pas risqué justement de transformer cette élection en plébiscite dans un contexte d’opposition tous azimuts contre Erdogan ? L’AKP a lancé une contre-offensive après le «17 décembre», qui vise un peu à se victimiser, à expliquer que toutes les réformes qu’il faisait, toutes les épurations, la reprise en main étaient justifiées par un complot, par une nécessité de défendre le gouvernement issu du suffrage universel. L’AKP joue cette carte de la politisation à l’extrême et de la personnalisation autour du leader national pour contrer les personnalisations locales en disant finalement qu’il y a un enjeu majeur, et que les enjeux locaux doivent s’effacer devant lui.
Le Premier ministre turc Erdogan a confirmé l’authenticité de l’enregistrement où il demande à l’ancien ministre de la Justice, Sadullah Ergin, de «surveiller de près» la procédure judiciaire concernant l’affaire Dogan, patron de médias. Dogan, critiqué par le Premier ministre à de nombreuses reprises durant ces dernières années, est à la tête d’un certain nombre de chaînes de télévision et de journaux critiques envers le gouvernement.
La tension entre l’AKP et le Hizmet ou mouvement Gülen, aura nécessairement un impact au niveau des résultats… Je pense qu’au-delà du problème des «gülénistes», il y a malgré tout, l’effet du scandale et des évolutions récentes. L’AKP n’est plus ce parti auquel tout réussissait, il a été contesté, il est sur une phase qui n’est plus en permanence ascendante, il subit des blocages, des contestations. On a vu cela depuis 2011 avec le grippage des affaires de complot contre l’armée, avec l’affaire d’Uludere, il y a une sorte de décrochage. Pour la première fois, le gouvernement a défendu l’armée. L’AKP est un parti qui n’est plus dans cette phase permanente de conquête qu’il a eue pendant une dizaine d’années. Tout cela ne se retrouvera peut-être pas dans les urnes mais ça crée une érosion, un certain doute sur la capacité du parti à continuer, et c’est ce qui explique cette stratégie de victimisation. Pensez-vous que cette stratégie de la victimisation est fondée, que l’AKP fait face à un complot ? A mon avis, il y a deux choses. D’une part, le fait qu’il y a des pratiques curieuses dans le système turc depuis un certain nombre d’années déjà, notamment au niveau de la justice. Les excès d’écoutes téléphoniques, les divulgations à répétition de documents audios et vidéos compromettants, ou les recours systématiques à des procédures d’exception ont conduit l’Etat de droit à des dérives. D’autre part, le fait de savoir jusqu’où ces dérives sont orchestrées par une organisation comme le dit le gouvernement, c’est une affaire plus compliquée à déterminer. Il faut voir aussi jusqu’à quel point cette histoire de complot, qui découle en tout état de cause des faiblesses de l’Etat de droit en Turquie, sert à un raidissement, à justifier de nouvelles atteintes à l’Etat de droit, et on a bien vu que l’invocation d’un complot servait à justifier des atteintes à ces principes fondamentaux. Malgré tout, l’AKP reste le parti le plus représenté au niveau territorial alors que les trois autres, le CHP, le MHP et le BDP, sont incapables de tenir des meetings en dehors de leurs bastions… Aujourd’hui, même les sondages les plus défavorables ne montrent pas en effet une chute ou un effondrement de l’AKP. On a l’impression que, pour l’instant, les effets
du scandale sont limités sur les intentions de vote. C’est étonnant. Ça tient à plusieurs explications. La première, c’est cette stratégie de victimisation qui essaie de renouer avec une ligne de conduite qui a été celle de l’AKP et qui consiste à dire «nous avons été le parti qui a changé la vie politique, le système turc au cours des dernières années, donc nous sommes une fois de plus victimes d’un complot, d’une tentative illégitime». La deuxième explication tient à la difficulté des partis d’opposition à se positionner. Le CHP kémaliste et le MHP nationaliste sont de vieux partis. Le problème de ces partis, en particulier celui du CHP, c’est de se positionner comme un acteur nouveau, de faire comprendre aux électeurs que s’il arrive au pouvoir, il ne va pas renouer avec ce qu’il a été par le passé, il va proposer un programme politique pour la Turquie d’aujourd’hui. La troisième raison tient au degré de sensibilité des électeurs par rapport à la corruption, à l’Etat de droit et à la préservation de la démocratie. Quel serait l’impact du résultat sur la situation personnelle d’Erdogan ? Si les élections municipales sont un succès pour l’AKP, on peut effectivement penser que la voie sera ouverte à une candidature d’Erdogan à la présidentielle et à une présidentialisation du système parlementaire turc, s’il est élu. Mais si les municipales sont un échec ou qu’en tout cas le leader de l’AKP estime que le résultat de ces élections ne lui garantit pas une marche assurée vers la présidence, alors il décidera peut-être de se «mettre en veille» et de maintenir le statu quo. Il a encore un mandat de Premier ministre qui court jusqu’en 2015, il en reste donc là pour l’instant. Gül se représente alors à l’élection présidentielle mais le statut de la présidence et du système n’en est pas changé pour autant, comme si Erdogan avait été candidat. On reste dans un régime parlementaire classique où le Premier ministre demeure le leader du parti majoritaire. Les élections présidentielles deviennent un scrutin un peu subsidiaire qui permet la réélection d’un arbitre et non d’une personnalité qui va dominer l’exécutif. Reste à savoir ensuite, dans ce cas, comment Erdogan négocie son maintien au pouvoir après 2015…
«NORMAL» Erdogan a rejeté les critiques mercredi 5 mars et a dit qu’il était normal d’avoir procédé ainsi. Il a ainsi déclaré que le SPK, qui réglemente les marchés, les secteurs et les entreprises afin d’assurer une concurrence équitable, lui avait fourni des «informations très dangereuses» sur Dogan. Celui-ci aurait été impliqué dans «des structures parallèles et des relations douteuses», a déclaré Erdogan pour justifier ses actes. «J’ai dû dire à Ergin de surveiller de près l’affaire», a ajouté Erdogan en disant que c’était ce qu’il souhaitait pour son «pays et sa nation». Dans la conversation enregistrée, le chef de l’AKP demande au ministre de la Justice de s’assurer que l’homme d’affaires, qui avait déjà payé une amende de 600 millions de dollars aux autorités fiscales en 2009 pour une autre affaire, ne s’en tire pas à bon compte. Après avoir entendu qu’une décision de justice (due à un juge alévi précise Ergin à Erdogan) acquittait Dogan dans une affaire de non respect du marché de capitaux, Erdogan est rassuré par son ministre qui lui dit de ne pas s’inquiéter, l’affaire devant être l’objet d’une décision finale par l’Assemblée de la chambre criminelle de la Cour de cassation.
Erdogan Demirören, propriétaire du Milliyet, et le Premier ministre Erdogan.
Erdogan fait pleurer un patron de presse -
Dans la conversation enregistrée, dévoilée par l’utilisateur Twitter Basçalan et postée sur YouTube jeudi 6 mars, Erdogan réprimande le propriétaire du quotidien turc Milliyet, Erdogan Demirören, à la suite de la publication du compte-rendu d’une réunion entre des députés du BDP et le leader du PKK emprisonné, Abdullah Öcalan, en mars 2013. L’article publié par le Milliyet, qui dévoilait l’opinion d’Öcalan sur les pourparlers entre le gouvernement et le PKK a fait des vagues dans toute la Turquie. L’article dévoilait également ce que pensait Öcalan de certains hommes politiques et leaders d’opinion. Le Premier ministre avait critiqué le quotidien, l’accusant de tenter de saboter le processus de paix, qui en était encore à ses débuts à l’époque.
DES EXCUSES ET DES LARMES Immédiatement après la publication de l’article, Erdogan demande au propriétaire du Milliyet de licencier son rédacteur en chef ainsi que Namik Durukan, le journaliste qui a écrit l’article après avoir obtenu le compte-rendu d’une autre personne. Erdogan rappelle à son interlocuteur que le processus de paix est une question très délicate et que les médias doivent faire attention à ne pas soulever de [sentiments nationalistes] à l’encontre de l’initiative du gouvernement. Erdogan Demirören présente ensuite ses excuses pour la publication de l’article, qui, pour Erdogan, nuit aux pourparlers avec le PKK dans le cadre du processus de paix. Il assure au Premier ministre qu’il fera le nécessaire pour licencier le rédacteur en chef et le journaliste. Vers la fin de la conversation, on entend le propriétaire du Milliyet pleurer et regretter d’être entré dans le monde des médias. «Pourquoi me suis-je engagé là-dedans ?», sanglote Demirören, 76 ans.
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14 - 20 MARS 2014 ZAMAN FRANCE
En Turquie, l’obsession des origines... La diffusion sur Internet d’une conversation entre le Premier ministre turc et son ancien ministre de la Justice en a stupéfié plus d’un. Ce dernier justifie une décision de justice par la confession du juge qui l’a rendue. Les origines deviennent souvent des sujets de discussion. Une banalisation qui ne manque pas d’inquiéter. SAMI KILIÇ PARIS C’est dire l’ampleur de la contamination. Même le père fondateur de la Turquie moderne, Mustafa Kemal Atatürk, fait fréquemment l’objet de «soupçons» dans certains milieux ultras : sa blondeur et sa naissance à Salonique suffisent à lui donner une ascendance douteuse. Et des historiens sérieux tombent souvent dans le panneau ; ils redoublent de zèle pour démontrer ses origines anatoliennes. Ce qui accroît encore plus la défiance. C’est que le chuchotement sur les origines ethniques et religieuses des uns et des autres n’est certes pas un sport national, fort heureusement, mais un travers qui est assez répandu en Turquie.
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L’«ENNEMI DE L’INTÉRIEUR» Pour un peuple qui a de la branche mais qui a connu l’effondrement d’au moins 15 Etats dans sa très longue existence, la notion d’«ennemi de l’intérieur» n’est pas anodine. De là à coller à tout venant une étiquette ethnique ou religieuse qui expliquerait son attitude, il y a une marge importante. Yalçin Küçük, un professeur d’économie qui a passé sa vie à écrire davantage sur les généalogies que sur la science économique, est considéré comme un pape dans ce domaine. Celui qui a été condamné
dans l’affaire Ergenekon pour tentative de putsch contre le gouvernement de l’AKP, est très bavard lorsqu’il s’agit de dénicher des extractions. Abdullah Gül, le président de la République ? Un Arménien. Tayyip Erdogan, le Premier ministre ? Un juif. Ahmet Davutoglu, le ministre des Affaires étrangères ? Un autre juif. Sans oublier la longue liste des «dönme», ces faux musulmans, ces crypto-juifs, les partisans de Sabataï Sevi qui font semblant d’être musulmans tout en pratiquant le judaïsme. Quelques années auparavant, Canan Aritman, une députée du très kémaliste CHP (parti de gauche nationaliste), avait reproché au président Gül d’agir en fonction de «ses origines» prétendument arméniennes. On attendait plutôt le silence de la part du chef de l’Etat, meilleure arme contre la bêtise, quand celui-ci lui flanqua un procès pour... insulte ! Etre arménien, une insulte !
CHACUN SON SECTEUR ? L’idée d’une parcellisation du pouvoir est très ancrée dans l’esprit du Turc lambda. Les alévis seraient puissants au sein de la justice, les gülenistes dans la police, les Tcherkesses dans les renseignements, les «dönme» aux affaires étrangères. Lors de la réforme du HSYK en 2010, le Conseil supérieur des juges et des procureurs, les islamistes avaient abondamment utilisé l’argument de la caste alévie ; le hasard avait fait que quatre des cinq membres du HSYK appartenaient à cette confession. C’était parlant, n’est-ce pas... Et Tayyip Erdogan n’avait pas hésité à jeter en pâture l’obédience alévie du leader du CHP, Kemal Kiliçdaroglu, lors d’un meeting en 2012 : «vous savez qu’il est alévi», avait-il déclaré à une foule qui avait aussitôt sifflé. Les politiciens issus de l’islam politique ne sont pas forcément à l’aise avec cette branche de l’islam.
Il faut dire que les alévis se targuent d’être des fidèles inoxydables de Mustafa Kemal et constituent un contingent non négligeable du CHP. Pourquoi donc cette obsession ? Un héritage du nationalisme kémaliste ? Vaste question. Chacun pourra apporter une bribe de réponse. Mais aucune ne pourra expliquer. En tout cas, la distorsion qui existe entre le cadre juridique et l’univers mental du citoyen est évidente. Une loi récemment votée punit le fait de s’ingérer dans le mode de vie des autres. Et le Premier ministre ne vient-il pas de déclarer qu’il «aimait les 77 millions de ce pays» ? Certes mais il y a loin du texte à la pratique. «Yahudi» (juif), «ermeni» (Arménien), «rum» (Grec orthodoxe) sont devenus des insultes. Ultime paradoxe pour un pays qui se targue d’être l’héritier d’un empire ottoman qui fait référence dans le domaine de la coexistence pacifique entre les communautés.
L’inquiétude des chrétiens de Turquie après la libération de 5 détenus SAMI KILIÇ PARIS Le président Gül vient de signer la loi permettant d’abréger la durée maximale de détention à 5 ans. La justice turque brillant par sa lenteur, de nombreux accusés croupissaient en prison pendant de longues années sans être définitivement condamnés. La détention provisoire est en effet une exception à la présomption d’innocence puisqu’elle permet d’emprisonner, le temps de son procès, une personne accusée d’avoir commis une grave infraction. Un procès qui peut s’éterniser comme dans le cas d’espèce. En avril 2007, trois chrétiens connus pour leurs activités missionnaires, Tilman Geske, Necati Aydin et Ugur
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La famille des chrétiens égorgés en 2007 en Turquie a réagi avec consternation.
Yüksel avaient été égorgés dans la maison d’édition Zirve à Malatya. Cinq personnes avaient été placées en détention provisoire et attendaient depuis sept ans la fin de leur procès.
LA CRAINTE ET LA TRISTESSE Susanne Geske, la veuve de Tilmann Geske qui vit toujours à Malatya avec ses enfants, a dénoncé une injustice alors que l’Association des Eglises protestantes de Turquie exprimait son inquiétude. «Les libérations ont profondément attristé les chrétiens de Turquie et les conduisent à perdre leur confiance en la justice», a-telle précisé dans un communiqué. «En tant que citoyens chrétiens, nos vies et celles de nos
proches sont en grand danger, nous suivons les événements avec consternation», a-t-elle poursuivi. L’avocat des familles des victimes, Orhan Kemal Cengiz, a attiré l’attention sur le risque réel de voir de nouveaux meurtres. «Je crains que les crimes, qui avaient disparu dans le sillage des procès Ergenekon et Balyoz, ne reprennent», a-t-il alerté. Rappelant que les commanditaires n’avaient jamais pu être identifiés, Cengiz a estimé que cette libération portait un sérieux coup à la lutte contre «l’Etat profond». Dans l’après-midi, le ministère de la Justice a publié un communiqué dans lequel il a rappelé que les suspects libérés allaient porter un bracelet électronique.
11 TURQUIE
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C’est, d’après un rapport publié par l’Union des Chambres et des Bourses de Turquie (TOBB) le 4 mars, le nombre de professeurs qui se retrouveraient sans emploi après la fermeture des instituts de soutien scolaire privés en Turquie.
Elections locales turques : encore trop peu de femmes Alors que les élections approchent à grands pas, différentes associations de femmes mettent l’accent sur la présence des femmes dans les listes électorales des différents partis politiques. Le BDP, qui présentera 44,5 % de femmes parmi ses candidats aux élections locales, fait figure de bon élève de la classe. SEVGI AKARÇESME ISTANBUL D’après les chiffres publiés sur le site de l’organisme «Women’s coalition» à la mi-janvier, le pourcentage de candidates femmes pour les élections du 30 mars prochain est de 44,5 % au sein du BDP. Un chiffre plus encourageant que celui des autres principaux partis politiques turcs, puisque l’AKP présentera 1,23 % de candidates femmes, le CHP 4 % et le MHP 1,12 %. Dénonçant l’insuffisance de candidates femmes pour ces élections, Canan Güllü, présidente de la Fédération des associations des femmes turques (TKDF), reste néanmoins critique sur le chiffre du BDP. Elle pense que si ce pourcentage se place bien au-dessus de celui des autres partis, il ne s’agit que d’une position idéologique. «A-t-on déjà vu le BDP se préoccuper de questions de femmes comme le
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mariage précoce (...) et les crimes d’honneur ?», s’est-elle interrogée. Mais «Women’s Coalition» rappelle sur son site que, pour lutter contre les inégalités, le BDP a décidé de ne pas accepter les candidatures d’hommes qui sont mariés à plusieurs femmes. Enfin, au BDP, les femmes sont exemptes de frais de nomination, habituellement une barrière considérable pour les femmes souhaitant se présenter à des élections. Il faut cependant noter que le MHP laisse ses branches locales décider du montant des frais et que l’AKP autorise les femmes à ne payer que la moitié de ce que déboursent les hommes pour se présenter au poste de maire.
DES PROMESSES NON TENUES «Cette année, le nombre de candidatures a augmenté, mais peu de femmes ont été
Gülten Kisanak, candidate BDP à Diyarbakir.
nommées», regrette Canan Güllü. En effet, seules deux femmes présenteront leur candidature pour un poste de maire dans deux grandes villes : l’ancienne ministre AKP de la Famille et des Politiques sociales, Fatma Sahin, pour Gaziantep et Gülten Kisanak du BDP pour Diyarbakir. Par ailleurs, les partis font l’objet de critiques virulentes car
Gülen appelle de ses vœux une nouvelle Constitution -
Dans un éditorial publié dans le Financial Times le 10 mars, l’intellectuel musulman Fethullah Gülen déclare qu’il existe, en Turquie, une confiance en un gouvernement démocratique et responsable qui respecte l’Etat de droit. Jusqu’à récemment, la Turquie était vue comme l’exemple d’un pays qui a prospéré tout en ayant un gouvernement démocratique dirigé par des leaders musulmans perspicaces. Gülen salue la tentative de l’AKP de mettre fin à l’ingérence militaire dans la politique turque, ajoutant que les réformes démocratiques tendant à cette fin ont été saluées par l’UE et soutenues par la majorité des Turcs. «Mais la domination politique, qui était d’abord assurée par l’armée, semble maintenant avoir été remplacée par une hégémonie de l’exécutif. Un voile a été jeté sur les réussites des dix dernières années, résultat d’un profilage insidieux de certains groupes pour leurs opinions, de réaffectations de fonctionnaires et d’une soumission sans précédent des médias, de la justice et de la société civile», ajoute Gülen.
«LES SYMPATHISANTS DU HIZMET NE SONT PAS DES JOUEURS POLITIQUES» L’intellectuel note que la seule façon pour l’AKP de restaurer la confiance en Turquie et de regagner le respect à l’international est de renouveler son engagement en faveur de l’Etat de droit et d’une gouvernance respon-
sable. Cet engagement, dit-il, doit comprendre la mise sur pied d’une nouvelle Constitution démocratique par les civils. Il déclare que la démocratie n’est pas en conflit avec les principes islamiques de la gouvernance et que les objectifs éthiques de l’islam, comme la protection de la vie et de la liberté religieuse, sont plus facilement atteints au sein d’une démocratie participative. Gülen ajoute que les individus doivent adopter certaines valeurs favorables à une nation prospère, comme le respect de la diversité sous ses formes religieuses, culturelles, sociales et politiques. «Cela ne signifie pas qu’il faille faire un compromis quant à nos croyances. Au contraire, accepter tout individu comme créature digne de Dieu, montre le respect de la volonté que Dieu a donné à tous les êtres humains», dit Gülen.L’intellectuel déclare que la liberté de pensée et d’expression sont indispensables dans une démocratie et que la position de la Turquie dans les classements en termes de transparence et de liberté des médias est décevante. «Mais nous devrions critiquer les idées et les actes malencontreux, plutôt que les individus, pour éviter de créer des tensions inutiles», dit-il. Gülen affirme que la recherche du pouvoir au nom d’une religion contredit l’esprit de l’islam, et que, quand la religions et la politique se mêlent, les deux souffrent, surtout la religion. «Les sympathisants du
Hizmet ne sont pas des joueurs politiques et n’ont pas d’intérêt à gagner le privilège du pouvoir», note Gülen. Outre encourager les citoyens à voter, Gülen dit qu’il n’a jamais soutenu ni ne s’est opposé à un parti politique ou à un candidat et ne compte pas le faire à l’avenir.
ils nomment des femmes dans des quartiers où elles ne sont pas susceptibles d’être élues. Mais, si finalement les candidatures de femmes à des postes importants restent faibles, Güllü a noté que l’augmentation du nombre de femmes qui seront élues aux postes de «muhtar» (chef de quartier) était un point positif.
L’intellectuel musulman Fethullah Gülen.
12 INTERNATIONAL
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Le cauchemar russe des Tatars de Crimée Minorité ethnique musulmane ayant des racines ancestrales en Crimée, les Tatars se considèrent comme l’un des peuples autochtones de la péninsule et craignent le retour du pouvoir russe dans leur région. NOAH SNEIDER, SLATE KAMENKA UKRAINE Les mains d’Ufeyn Fakhreev portent encore les cicatrices de l’exil, à l’époque de l’Union soviétique. Ses mains aiment caresser la table de la maison qu’il a construite à son retour en Crimée, où il est né. Mais elles tremblent lorsque la conversation s’oriente vers la crise ukrainienne. «Je ne pensais jamais que cela pouvait arriver», dit Ufeyn. «Je ne m’attendais pas à cela. J’en ai trop vu. J’ai vécu sous 14 chefs d’Etat. Je suis né en 1921. Je suis entré dans l’armée en 1939. Je me suis battu pendant toute la guerre. J’ai été blessé cinq fois». Cette semaine, les soldats russes ont encerclé les bases militaires ukrainiennes en Crimée, demandant capitulation immédiate, faisant trembler la péninsule de la Mer Noire.
Les Tatars forment 12 % de la population actuelle de Crimée.
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UNE POPULATION INFORTUNÉE Personne, peut-être, n’a plus à craindre de ce potentiel conflit que les Tatars de Crimée, comme Ufeyn. Leur histoire est ponctuée d’épisodes d’assujettissement et d’exil. Minorité ethnique musulmane ayant des racines ancestrales en Crimée, les Tatars se considèrent comme l’un des peuples autochtones de la péninsule, descendants de Grecs, Juifs, Francs, Arméniens, Italiens, Turcs et Mongols. Au milieu du XIVe siècle, ils ont formé un Khanat indépendant à partir des cendres de la Horde d’or. Ils ont vécu plutôt pacifiquement jusqu’à l’annexion de la Crimée dans les années 1780 par Catherine II de Russie. Quand les communistes sont arrivés au pouvoir, les Tatars ont souffert. La moitié de leur population a été déplacée ou tuée avant le début de la Seconde Guerre mondiale. Pendant le conflit, quelques Tatars auraient collaboré avec les Nazis, poussant ainsi Staline à expulser l’ensemble de la communauté tatare au Goulag et en Asie centrale en 1944. Seules la perestroïka et l’éventuelle chute de l’Union soviétique pouvaient faire espérer aux Tatars de revoir
leur terre natale. «Quand on est rentrés, le gouvernement n’était pas organisé, ils ne pouvaient pas délivrer de permis de séjour. Ceux qui l’ont pu ont commencé à chercher des terrains et à tout reconstruire. On appelait ça le "samo-vozvrat" (retour chez soi)». Aujourd’hui, les Tatars représentent 12 % de la population de Crimée et la plupart vivent dans de petits villages construits par des migrants qui se sont réinstallés.
«LA RUSSIE A PEUR» Dans les rues de la capitale criméenne de Simféropol et depuis le début de la crise, ce sont les Russes qui dominent par leur présence. Ils campent sous des drapeaux russes et scandent «Russie, Russie, Russie !». Si la plupart des protestataires prorusses soulignent le caractère pacifique des relations inter-ethniques en Crimée, ils ignorent à quel point les Tatars détestent le gouvernement russe. La semaine dernière, de violents affrontements ont eu lieu entre Tatars et Russes devant le Parlement criméen. «L’Europe craint la Russie et la Russie craint l’Europe. C’est ça le problème», note Ufeyn. «Après la chute de l’Union soviétique, 15 républiques se sont for-
mées. En même temps, 18 gouvernements ont rejoint l’UE. Et maintenant, l’Ukraine, le voisin le plus proche de la Russie, veut aussi partir. La Russie a peur». Le long de l’autoroute P-23 qui part du village de Kamenka, nombre de femmes et d’enfants se sont réunis cette semaine pour manifester contre la guerre. Ils se sont élevés en faveur de Maïdan, du gouvernement de l’opposition et d’une Crimée ukrainienne. Ils ont qualifié Poutine de «dictateur», de «fou» et de «tyran».
LA CRIMÉE EST TOUT JUSTE EN TRAIN DE REDEVENIR LE FOYER DES TATARS «On va se coucher sans savoir ce qui se passera le lendemain. On n’a pas de repos», déclare Elmira Mololiova, 35 ans, les larmes aux yeux. «Poutine dit qu’il défend les Russes, mais de qui les défend-il ? Je vois mes voisins russes tous les jours, on boit du café ensemble, on est amis», ajoutet-elle. Les manifestants agitent des ballons bleus et jaunes aux couleurs de l’Ukraine et brandissent des panneaux où il est écrit : «Pas de guerre !», «Poutine ! Ne touche pas à l’Ukraine». Parmi eux, j’ai rencontré les filles d’Ufeyn, Eminye et Taire Fakhreeva.
Elles semblaient décontenancées d’être là à devoir manifester pour la paix. Elles n’ont jamais imaginé devoir de nouveau repousser la Russie. «Ils ont chassé nos parents de nuit, les ont expulsés. Et maintenant ils sont de retour. Nous n’avons nulle part où aller et personne pour nous protéger», dit Taire, 60 ans. Pour la famille Fakhreeva, comme pour de nombreux Tatars, la Crimée était tout juste en train de redevenir leur vrai foyer. «Nous n’avons pris racine que dans les dernières années», dit Eminye, 62 ans. «Il n’y avait que des champs quand nous sommes arrivés en 1990. On a d’abord vécu dans des abris et des tentes. Puis on a reconstruit nos maisons avec nos propres mains». La maison d’Ufeyn est spacieuse et abrite actuellement neuf membres de la famille sur trois générations. «Ce matin, je leur ai dit d’aménager le sous-sol», a déclaré Ufeyn. «Bientôt, nous devrons tous y vivre». «Ces dernières années, je leur avais dit que nous étions au paradis. Nous avons une maison, des retraites, nous pouvons acheter ce qu’on veut au supermarché», déclare Ufeyn. Puis il se frotte les mains lentement, comme pour s’assurer qu’après toutes ces années, elles sont encore là.
Ukraine : Ianoukovitch se veut encore Président et Chef de l’armée -
Viktor Ianoukovitch a affirmé mardi qu’il restait président et chef des forces armées de l’Ukraine, et a jugé illégitime l’élection présidentielle annoncée pour le 25 mai par les nouvelles autorités de Kiev. Dans une déclaration faite à Rostov-sur-le-Don en Russie, Viktor Ianoukovitch, qui a été destitué par le parlement ukrainien, a réaffirmé que des «extrémistes» s’étaient emparés du pouvoir à Kiev. Pour Ianoukovitch, la péninsule de Cri-
mée, où les forces russes contrôlent les points stratégiques depuis la semaine dernière, est en train de se séparer de l’Ukraine, et il impute cette situation à ceux qui l’ont contraint à quitter le pouvoir à Kiev. Un référendum doit avoir lieu dimanche en Crimée sur la question d’un rattachement de la péninsule à la Russie, rattachement en faveur duquel le parlement criméen s’est prononcé la semaine dernière. A Kiev, le Premier ministre ukrainien, Arseni
Iatseniouk, a accusé mardi la Russie de chercher à saper les bases de la sécurité internationale par ses incursions militaires en Crimée, en ajoutant que Kiev demeurait ouvert à des négociations «transparentes» avec Moscou afin d’échafauder des relations nouvelles, par lesquelles la Russie reconnaîtrait l’indépendance et l’intégrité territoriales de l’Ukraine. Arseni Iatseniouk est attendu jeudi aux Etats-Unis où il sera reçu par le président Barack Obama.
13 INTERNATIONAL
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En Malaisie, le mystère du Boeing 777 reste entier L’armée malaisienne pense que le Boeing 777 disparu samedi avec 239 personnes à bord a volé pendant plus d’une heure après avoir disparu des écrans radar, ce qui écarterait la thèse d’une désintégration. L’hypothèse d’un acte terroriste semble peu étayée, ont déclaré les enquêteurs.
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L’avion de la compagnie Malaysia Airlines avait décollé de la capitale malaisienne à destination de Pékin lorsqu’il a disparu samedi vers 01h30 locale (vendredi 17h30 GMT).
TOUTES LES HYPOTHÈSES SONT ENVISAGÉES Aucun signal de détresse n’a été envoyé, ni contact radio signalant un problème et en l’absence d’un quelconque débris ou donnée de vol, la police malaisienne passe au peigne fin la liste des passagers en échafaudant toutes les hypothèses : sabotage, détournement, panne mécanique. «Peut-être que quelqu’un sur le vol a contracté une très forte assurance pour en faire profiter sa famille, ou alors quelqu’un qui devait beaucoup d’argent. Nous étudions toutes les possibilités», a
Enquête de l’UE : Erasmus pourrait être suspendu en Turquie
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Le quotidien Taraf a déclaré lundi 3 mars que la Commission européenne avait lancé une enquête à la suite d’accusations pour détournements de fonds et recrutement illégal au sein du Centre des programmes de jeunesse et d’éducation de l’Union européenne à Ankara. A l’époque, l’ex-ministre des Affaires européennes, Egemen Bagis était encore en fonction. Dans un communiqué écrit à l’agence de presse Cihan, le porte-parole des affaires européennes en matière d’Education, de Culture, de Multilinguisme et de la Jeunesse, Dennis Abbott, a déclaré qu’une enquête était en cours au Centre d’Ankara qui se charge notamment de gérer le programme Erasmus et les anciens programmes d’apprentissage tout au long de la vie et de la jeunesse en action dans le pays.
ERASMUS MENACÉ POUR 2014 «Si ces accusations sont avérées, des sanctions financières seront appliquées et la Commission pourra récupérer une partie des subventions de fonctionnement fournies à l’organisme quand étaient encore en vigueur les programmes d’apprentissage tout au long de la vie et de la jeunesse en action en 2012 et 2013», a averti Abbott, avant d’ajouter qu’«une suspension des versements pour le programme Erasmus en Turquie, au moins pour 2014, pourrait aussi être envisagée». Les accusations de corruption au sein du centre d’Ankara ont été révélées grâce à un e-mail daté du 9 mars 2013 envoyé par Musa Ceylan, président de l’agence à l’époque, qui mentionnait des ordres illégaux donnés par Bagis. En réponse aux ordres de Bagis, Ceylan a écrit qu’en tant que président de l’agence, il tenait à répéter ouvertement que l’agence ne pouvait respecter les ordres du ministre car ils étaient contre les règles de l’organe. L’email, révélé il y a quelques temps, aurait exhorté la commission à enquêter sur ces accusations.
déclaré le chef de la police Khalid Abu Bakar lors d’une conférence de presse. Le fait que deux passagers aient voyagé sous une fausse identité a un moment fait songer à une action malveillante mais les vérifications effectuées par les enquêteurs fragilisent fortement la piste terroriste. Selon Interpol, les deux hommes ont utilisé des passeports iraniens pour un vol entre Doha et Kuala Lumpur ont ensuite utilisé des passe-
ports volés à des ressortissants italien et autrichien en 2012 et 2013 pour le vol Kuala Lumpur-Pékin. Ils étaient âgés respectivement de 18 et 29 ans. «Plus nous recevons d’informations, plus nous sommes enclins à conclure que ce n’est pas un incident terroriste», a dit lors d’une conférence de presse le secrétaire général de l’organisation policière basée à Lyon, Ronald K. Noble.
14 FAMILLE&SANTE
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8 bonnes raisons de faire la sieste au travail
Certaines entreprises comme Nike ou Google proposent des espaces de repos à leurs employés. Mais pour la plupart des travailleurs américains, dormir au bureau est mal vu. Ce qui est bien dommage étant donné tous les bénéfices que procure une bonne petite sieste !
1
DORMIR REND PLUS PRODUCTIF Des études ont montré que les siestes requinquent nos corps, nous rendent plus attentifs et améliorent notre humeur. Et il en va de l’intérêt des employés comme de l’employeur. Il faut savoir que la fatigue contribue à une perte de productivité équivalente à 18 milliards de dollars par an. De plus, quand les employés, fatigués après une journée de travail, rentrent chez eux, le risque d’accident est plus important.
«Quand on voit des employés dormir pendant la pause déjeuner, on pense qu’ils se préparent à se donner à 100 % l’après-midi».
2
VOUS POURRIEZ VIVRE PLUS LONGTEMPS Une étude datant de 2007 démontre que les individus qui font une sieste à midi ont 30 % de chances en moins de mourir d’une maladie cardiaque. Faire une petite sieste fait également baisser la pression artérielle.
3
WINSTON CHURCHILL FAISAIT DES SIESTES PENDANT LA SECONDE GUERRE MONDIALE Le lobby anti-sieste pourrait arguer que nous avons tous trop de travail pour avoir le temps de dormir. Mais voici un exemple qui pourrait les contredire. Le leader de l’un des pays les plus impliqués dans le deuxième conflit mondial du XXe siècle trouvait le temps de piquer un somme. Comme l’exPremier ministre britannique l’a écrit dans ses mémoires : «La nature n’a pas prévu que les êtres humains travaillent de 8h à minuit sans bénéficier du repos procuré par cet état d’oubli qui, même s’il ne dure que 20 minutes, suffit à renouveler toutes les forces vitales».
4
LES GRANDS ESPRITS DE L’HISTOIRE FAISAIENT LA SIESTE Si Churchill n’est pas un exemple assez convaincant pour vous, que dites-vous de Léonard de Vinci, Benjamin Franklin, Thomas Edison, Napoléon ou encore Albert Einstein ? Ils étaient tous connus pour faire la sieste.
5
VOUS SEREZ PLUS CRÉATIFS Des études ont démontré que le sommeil paradoxal (phase du sommeil qui est caractérisée par une forte activité cérébrale et pendant laquelle se déroulent les rêves, ndlr) boostait d’environ 40 % la créativité. Dormir était par exemple une façon pour Salvador Dali de se préparer au travail, comme l’a écrit Dennis Drabelle dans le Washington Post : «Avant de se mettre à ses peintures surréalistes (la montre qui fond, la jambe humaine ornée de tiroirs de commode etc.), l’artiste catalan faisait la sieste après le déjeuner. Il s’asseyait, les bras sur les accoudoirs de sa chaise. Il tenait une clé entre son pouce et son index. En s’endormant, ses doigts se relâchaient, la clé tombait par terre, le bruit le réveillait et il se souvenait des idées étranges qui se forment dans l’esprit dans les premières minutes de sommeil».
6
FAIRE LA SIESTE EST NATUREL La plupart des mammifères dorment à plusieurs moments pendant la journée. Les humains fatiguent naturellement en début d’après-midi, ont du mal à se concentrer et ont plus envie de dormir qu’à d’autres moments de la journée. Mais la société ne nous donne qu’un moment dans la journée pour dormir. «La nature a prévu que les adultes doivent dormir au milieu de la journée, peut-être pour se protéger du soleil de midi», écrit le spécialiste du sommeil, William Dement, dans Sommeil et vigilance : les aspects chronologiques, comportementaux et médicaux de la sieste.
7
DORMIR EST MOINS CHER ET PLUS EFFICACE QUE LE CAFÉ Un travailleur américain moyen dépense 1 092 dollars par an en café. Nous avons besoin de caféine pour rester éveillé. Mais il y a aussi des points négatifs, souligne l’experte du sommeil, le professeur Sara Mednick : «Alors que la caféine semble vous tenir éveillé lorsque vous manquez de sommeil, les processus cognitifs complexes ne tirent pas profit de cette drogue. Une étude a comparé la caféine à la sieste dans les domaines de la mémoire visuelle, motrice et verbale. Avec la caféine, les compétences motrices et verbales faiblissent, alors que la sieste améliore la performance des trois types de mémoire».
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DANS DES PAYS TRÈS PRODUCTIFS, ON FAIT LA SIESTE SANS CONSÉQUENCE NÉGATIVE Regardez le Japon. Alors que la plupart d’entre nous avons peur d’avoir l’air de paresseux et de poser nos têtes sur nos bureaux, les Japonais ont dépassé cette honte. «Quand on voit des employés dormir pendant la pause déjeuner, on pense qu’ils se préparent à se donner à 100 % l’après-midi», affirme Paul Nolasco, porte-parole de Toyota à Tokyo, au Washington Post. «Personne ne voit ça d’un mauvais œil. Et personne n’hésite non plus à piquer un petit somme à l’heure du déjeuner». Matt McFarland, The Washington Post.
15 CULTURE
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AGENDA CULTUREL
SEYFEDDINE BEN MANSOUR LILLE La Crimée, petite péninsule au nord de la mer Noire, est sous les feux de l’actualité. Son importance stratégique actuelle est liée à la présence d’une communauté russophone majoritaire. Par le passé, c’est un peuple musulman turco-mongol, héritier de la Horde d’Or de Gengis Khan, les Tatars, qui peuplait quasiexclusivement la presqu’île, alors un puissant Etat militaire, le khanat de Crimée. Un Etat qui, même soumis par Istanbul à la fin du XVe siècle, se comportera moins en vassal qu’en allié ombrageux. Frontière nord-est de l’Empire ottoman, la Crimée était en effet d’une importance stratégique.
CONCERT
Khanat de Crimée : puissant vassal des Ottomans aux portes de la Russie
LA CRIMÉE VASSALE DE L’EMPIRE En vertu des liens de vassalité entre le khanat et l’Empire, le sultan dispose quant à lui d’un droit autrement plus important, celui d’investiture : nul
CONFÉRENCE
& à voir...
De la diversité à l’unité Jeu de mots et inversion. Le titre est un détournement voulu de l’épisode de la Tour de Babel dans la Bible. Dieu y punissait l’orgueil démesuré des hommes en leur faisant parler des langues différentes, eux qui jusqu’alors n’en parlaient qu’une seule. Ne se comprenant plus, ils durent renoncer à leur projet de construire une tour qui atteigne les cieux. Ici,
au contraire, il s’agit de partir de la diversité pour arriver à l’unité et le projet, loin d’être orgueilleux, est simple et noble : éduquer et apprendre à vivre ensemble. Ils viennent d’arriver en France. Eux, ce sont les enfants. Ils sont Irlandais, Serbes, Brésiliens, Tunisiens, Chinois ou Sénégalais... Pendant un an, Julie Bertuccelli a filmé les échanges, les conflits
Le 18 mars à 18h00 EHESS 105, boulevard Raspail 75006 Paris
Günseli Toker
La nouvelle Constitution tunisienne : vers l’enracinement de la démocratie en terre arabe
et les joies de ce groupe de collégiens âgés de 11 à 15 ans, réunis dans une même classe d’accueil pour apprendre le français. Dans ce petit théâtre du monde s’expriment l’innocence, l’énergie et les contradictions de ces adolescents qui, animés par le même désir de changer de vie, remettent en cause beaucoup d’idées reçues sur la jeunesse et l’intégration.
La Cour de Babel, réalisé par Julie Bertuccelli (documentaire, France, 2013, 1h29). Sortie en salles le 12 mars.
L’artiste turque expose ses dernières batiks (impressions sur étoffe) et miniatures. Jusqu’au 19 mars La Petite Galerie 35-37, rue de Seine 75006 Paris
«Une constitution consensuelle», par Mahmoud El May, député à l’Assemblée constituante tunisienne (16h30-17h00) ; «Un mode d’élaboration spécifique et original», par Houssem Khelifi, juriste, Université de Lille II/ CNRS (17h00-17h15) ; «Des droits et des libertés dans la nouvelle Constitution», par Syrine Ismaili-Bastien, juriste, Université catholique de Lille (17h15-17h30) ; «La fabrique de la démocratie en Tunisie», par Tewfik Allal, militant associatif de l’immigration, FALDI (17h30-17h45). Modérateur : Seyfeddine Ben Mansour, Association des Tunisiens du Nord de la France. Le 15 mars Centre culturel du monde arabe 94, rue Léon Marlot 59100 Roubaix
THÉÂTRE
A lire
INTÉRÊT BIEN COMPRIS Au-delà du rapport de forces, l’alliance des Tatars de Crimée et des Ottomans
relevait, pour les uns comme pour les autres, de l’intérêt bien compris. Pour le petit Etat musulman, qui se veut l’héritier de la Horde d’Or et qui cherche à établir son autorité sur les terres tatares de la Moyenne et de la BasseVolga (et notamment sur les lointaines Kazan et Astrakan), l’empire ottoman, puissance tutélaire, est un allié craint sur trois continents. Mais pour l’empire lui-même, ce vassal est un allié de choix. Il permet en effet de maintenir la liberté de communications le long de la grande voie commerciale et militaire Ouest-Est qui relie les possessions danubiennes au Daghestan et à l’Asie Centrale. Axe stratégique par excellence, elle permettait, d’une part, de contourner par le nord l’Iran séfévide – adversaire militaire et idéologique – et, d’autre part, assurait les échanges avec le Turkestan, le Türk Eli, la patrie des Turcs, réservoir des clans nomades guerriers, forces vives indispensables à l’Empire pour sa politique de conquêtes en Europe.
M’hamed Oualdi (université de Princeton) envisagera notamment les causes et les effets des abolitions de l’esclavage à partir des années 1820, notamment dans les sociétés musulmanes de Méditerranée.
EXPOSITION
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khan ne pouvait accéder au trône s’il n’avait été préalablement confirmé par le calife ottoman. Au nouveau vassal, il était ainsi envoyé un tambour et un étendard orné de cinq queues de cheval, symbole de l’agrément impérial (tasdîq). Dans les faits, jusqu’à l’accession au trône de Sa‘adat Giray en 1523, ce droit demeura purement théorique. De même, le droit de mobilisation militaire, c’est-à-dire celui de sommer les khans tatars de Crimée à rejoindre, à la tête de leurs troupes, la grande armée impériale. Jusqu’au début du XVIe siècle en effet, ces derniers se permettaient de répondre par une fin de non-recevoir aux invitations de la Sublime Porte. En 1521, alors que Soliman le Magnifique en personne l’appelait à rejoindre l’armée ottomane en Hongrie, le khan Muhammad Giray répondra par un refus à peine poli.
Esclaves en sociétés musulmanes, période moderne et contemporaine
TABLE RONDE
Islam des mondes
Miniature représentant la campagne de Szigetvár, Hongrie, 1566. Les Tatars sont en première ligne.
UNE REDOUTABLE ENCLAVE MUSULMANE Jusqu’au XVIIIe siècle, le khanat de Crimée demeurera l’un des Etats les plus puissants d’Europe orientale. De 1479 à 1597 notamment, de l’avènement de Mengli Giray à la mort de Ghazi Giray II, cette enclave musulmane fut une redoutable puissance dont la force guerrière pesait lourdement sur l’échiquier politique et diplomatique régional. C’est pourtant dès le début de cette période faste que les Ottomans prennent pied sur la côte criméenne, prenant tour à tour, dès 1475, les comptoirs commerciaux de Caffa (Kefe) et Mangop (Men-
kup). Progressivement, le territoire du khanat tatar se trouvera solidement encadré par une ceinture de défense de forteresses turques. A Qïl-Burun, Uzu, Kerç, Yeni-Qal’e, Or, Taman, Temriik et Sogudjaq stationnent des détachements militaires placés sous le commandement direct d’un beylerbey (gouverneur colonial), dans une Crimée érigée en 1582 en eyalet (protectorat). L’Etat tatar conserve néanmoins les attributs symboliques de la souveraineté : le khan fait battre monnaie, et la prière du vendredi est faite à son nom.
Virtuose du mouwachah, chant classique arabe d’origine andalouse, le Syrien Hamam Khairy est l’une des grandes voix d’Alep. Les 14 et 15 mars à 20h30 Institut du monde arabe Place Mohammed V 75005 Paris
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«Même soumis par Istanbul, le khanat de Crimée se comportera moins en vassal qu’en allié ombrageux»
Le rossignol d’Alep
A la périphérie, de Sedef Ecer
La dramaturge turque joue dans sa propre pièce. L’histoire de Dilcha et Bilo, un couple de jeunes gens ayant quitté leur campagne pour la ville, le bidonville. Vingt ans plus tard, dans un environnement guère moins menacé, Tamar et Azad rêvent eux aussi d’un ailleurs plein de promesses. Jusqu’au 27 mars Théâtre de Suresnes Jean Vilar 16, place Stalingrad 92150 Suresnes
OPINION16
14 - 20 MARS 2014 ZAMAN FRANCE
Pourquoi je ne blâme pas le Hizmet Sahin Alpay explique les raisons de ses prises de position face au conflit qui oppose le gouvernement au Hizmet. Pour lui, le mouvement Gülen est l’une des plus grandes forces de la société civile turque, et ses institutions pédagogiques, médiatiques, entrepreneuriales et de solidarité sociale, favorisent le développement socio-économique du pays.
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Certains de mes lecteurs en Turquie et à l’étranger m’ont demandé : «Pourquoi ne critiques-tu pas le mouvement Gülen ?». D’autres m’ont demandé : «Pourquoi n’évites-tu pas de prendre parti dans ce conflit avec le gouvernement d’Erdogan ?». SAHIN ALPAY Même si j’ai déjà répondu à ces questions à l’occasion de précédentes chroniques, il me semble approprié d’exposer de nouveau mon point de vue. Je dois tout d’abord souligner que je ne suis pas religieux mais un libéral qui a du respect pour ceux qui ont des croyances religieuses et ceux qui n’en n’ont pas – contrairement aux pro-kémalistes et aux pro-marxistes qui plaident pour l’exclusion de la religion de la
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«Je ne vois pas comment un mouvement religieux qui a créé autant d’institutions peut être plus transparent» sphère publique. J’ai du respect pour l’intellectuel musulman Fethullah Gülen car il prêche une conception de l’islam compatible avec la modernité dans le sens libéral du terme – c’està-dire la démocratie, les droits de l’homme, l’Etat de droit, la laïcité (la liberté de religion pour tous, y compris les athées et les déistes), le dialogue inter-religieux, le respect mutuel, la paix et une économie de marché ouverte. Je considère le mouvement Gülen comme l’une des plus grandes forces de la société civile turque qui, grâce à des institutions pédagogiques, médiatiques, entrepreneuriales et de solidarité sociale, promeut la démocratisation, le développement socio-économique
et l’intégration avec la communauté internationale.
UNE THÉORIE DU COMPLOT Je n’attache pas la moindre crédibilité aux arguments avancés par ceux qui, en Turquie, ont été accusés de violer la loi de diverses façons. Le gouvernement d’Erdogan, qui a été impliqué dans l’enquête anti-corruption la plus grave de l’histoire du pays, affirme qu’il est victime d’accusations montées de toutes pièces et concoctées par le «gang Gülen» au sein de la police et de l’appareil judiciaire. Ce n’est rien d’autre qu’une théorie de complot par excellence. Au sein de la police et de l’appareil judiciaire en Turquie, il y en a certainement qui ressentent une affinité avec divers partis politiques et points de vue et qui appartiennent à différents groupes religieux et ethniques. Il est donc naturel qu’il y ait également parmi eux des personnes diplômées d’écoles du mouvement et qui respectent le point de vue de Gülen. Il est possible que, parmi eux, il y ait des individus qui ont violé la loi en exécutant les ordres non pas de leurs supérieurs mais d’autorités extérieures. Ces personnes doivent être identifiées, conduites devant la justice et punies comme l’ont demandé à maintes reprises Gülen et son mouvement. Mais la véritable chasse aux sorcières contre le mouvement Gülen doit, néanmoins, être contestée par tous ceux qui sont favorables à la démocratie et à l’Etat de droit. UN MOUVEMENT TRANSPARENT Les kémalistes, les marxistes et même les islamistes affirment que le mouvement Gülen n’est «pas transparent». Dans le type de régime laïque très autoritaire qu’est la Turquie, je ne vois pas comment un mouvement religieux
qui a créé autant d’institutions pédagogiques, médiatiques, entrepreneuriales et de solidarité sociale peut être plus transparent que cela. Si vous exigez que ceux qui appartiennent au mouvement aient des cartes de membres et que les institutions portent des écriteaux : «Ceci est un établissement du mouvement Gülen», il faut aussi être favorable à la mise en place d’un régime laïque, où l’Etat se tient à égale distance de toutes les croyances, où la liberté de religion est garantie pour tous et où tous les groupes religieux peuvent avoir une personnalité juridique et ne sont
pas sujets à de constants profilages, harcèlements ou menaces. Les accusations sans fondement, les insultes et les menaces lancées contre Gülen et son mouvement par les laïques et les fondamentalistes musulmans blessent profondément mon sens de l’équité et de la justice. Comment puis-je éviter de prendre parti dans ce conflit entre le mouvement Gülen et un gouvernement dont la légitimité est devenue suspecte après la révélation de la plus grave affaire de corruption de l’histoire de la république ? s.alpay@todayszaman.com
Etats-Unis / Russie : une nouvelle Guerre froide à l’horizon ? -
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Quand le président américain Obama a accédé au pouvoir en janvier 2009, l’approche de Washington vis-à-vis de la politique russe a changé et s’est ditinguée de l’attitude de confrontation qui caractérisait le président Bush. ÖMER TASPINAR Ce «redémarrage» consistait à se focaliser sur les intérêts communs des deux nations. La question la plus urgente étant peut-être celle du contrôle de l’Iran. Il y avait, de fait, quelques intérêts nationaux communs à cet égard, puisque ni Washington ni Moscou ne voulaient que Téhéran ne dispose de l’arme nucléaire. Dans ce contexte, la Russie et les Etats-Unis ont réussi à agir main dans la main et à faire adopter des sanctions financières renforcées par le Conseil de sécurité de l’ONU en 2010. Le fait que la Russie et la Chine aient voté en faveur des sanctions contre l’Iran alors que la Turquie, membre de l’OTAN, votait contre a déclenché la plus grave crise des relations turco-américaines depuis le début du mandat d’Obama.
LA FIN DE LA LUNE DE MIEL Pourtant, la lune de miel de «redémarrage» entre Washington et Moscou
a lentement pris fin un an plus tard, lorsque Washington a insisté pour mettre en place un système de défense antimissile de l’OTAN en Europe de l’Est et des radars en Turquie. Ces mesures avaient été prises contre l’Iran, mais la Russie a vu cette politique de l’OTAN comme une provocation. La même année, quand le Printemps arabe a commencé en Tunisie, en Egypte et en Libye, les relations entre la Russie et les Etats-Unis ont empiré. Le président russe Vladimir Poutine a senti qu’il avait fait une grave erreur en donnant le feu vert à l’ONU pour une opération militaire contre Kadhafi. Ayant appris de son erreur, Poutine est clairement déterminé à bloquer toute mesure occidentale à l’ONU qui pourrait déclencher une action militaire contre le dictateur syrien Bachar al-Assad.
d’une nouvelle Guerre froide est devenue le cliché pour définir ce qu’il reste du fameux «redémarrage» d’il y a cinq ans. L’administration Obama a décidé de ne pas réagir de façon excessive à la décision de Poutine d’annexer la région criméenne de l’Ukraine aux motifs que le leader russe pourrait bientôt adopter une stratégie pour garder la face et désamorcer les tensions. Washington doit sûrement parier sur le côté pragmatique de Poutine et sur le fait qu’il se rendra bientôt compte du coût économique de ses actes. La décision de répondre aux plaintes de Poutine sur les mauvais traitements envers les Russes et des russophones de Crimée en envoyant des observateurs internationaux fait partie de la stratégie de la Maison Blanche pour préparer le terrain en vue d’une réduction des tensions.
UNE NOUVELLE GUERRE FROIDE ? Aujourd’hui, la crise en Ukraine a mis fin à ce qui restait d’une potentielle coopération entre la Russie et les Etats-Unis sur la question de la Syrie. Il est difficile d’imaginer comment Washington et Moscou peuvent continuer de travailler ensemble sur les réserves d’armes chimiques de la Syrie alors que les deux pays sont sur le point de s’affronter sur la question de la Crimée. L’idée
MANIER LA CAROTTE ET LE BÂTON Pourtant, Poutine ne semble pas vouloir reculer, les troupes russes gardant le contrôle de la Crimée et Moscou semble soutenir le référendum criméen pour se séparer de l’Ukraine et rejoindre la Russie. Ce qui pourrait expliquer pourquoi Obama a décidé de renforcer la pression en annonçant des restrictions en matière de visas et la mise en place d’une structure pour
sanctionner la Russie. Mais de telles mesures ne sont pas susceptibles de dissuader Poutine, qui semble de plus en plus enclin à prendre des risques. Les Etats-Unis tentent également de s’assurer qu’il n’y aura pas davantage d’expansion russe dans la région. Alors que les républicains critiquent une politique étrangère inefficace, Obama a mobilisé ses alliés de l’OTAN. Une série d’exercices militaires joints et des visites américaines de haut niveau auront bientôt lieu dans les républiques baltes et dans l’Est de l’Europe. Bien évidemment, la détermination des Américains à envoyer un message clair se traduirait par la décision de laisser l’Ukraine rejoindre l’OTAN, une étape qui semble encore trop lointaine. Dans les circonstances actuelles, la stratégie d’Obama apparaît comme un mélange de diplomatie et de sanctions. Il espère probablement que ce qui a fonctionné avec l’Iran (manier la carotte et le bâton) puisse fonctionner aussi avec Poutine. Pourtant, les intérêts de Poutine vis-àvis de l’Ukraine sont très importants. La Maison Blanche doit se rappeler que le président russe n’a jamais complètement digéré ni assimilé la perte des républiques baltes et qu’il veut tracer une ligne rouge en Ukraine. o.taspinar@todayszaman.com
17 SPORT Fenerbahçe : buteur à Trabzonspor, Emenike attise la fureur des supporters Le match de championnat turc entre Trabzonspor et Fenerbahçe a été interrompu à la mi-temps après de nombreux incidents émanant des tribunes, avec des projectiles envoyés sur le terrain et sur les joueurs, notamment Emmanuel Emenike, auteur de l’ouverture du score. BENJAMIN POMMEREAU Emmanuel Emenike aura été le seul buteur de la partie entre Trabzonspor et Fenerbahçe lors de la 24e journée de Süper Lig. Mais cette 9e réalisation de la saison dans le championnat turc pour le Nigérian risque de ne pas être comptabilisée. Pourquoi ? Le match ayant été interrompu à la mitemps après les nombreux projectiles envoyés sur la pelouse par les supporters de Trabzonspor, la rencontre risque donc d’être donnée sur tapis vert à Fenerbahçe.
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MULTIPLICATION DES DÉBORDEMENTS DANS LES STADES TURCS Le club de Didier Zokora et Souleymane Bamba risque gros à la suite de ces nouveaux incidents qui font suite à une multiplication des débordements dans les stades turcs. Qui plus est, le match avait déjà été interrompu trois fois auparavant, dont sept minutes quelques instants après le but d’Emmanuel Emenike qui aura attisé la fureur des supporters locaux (23e). Des avertissements qui n’auront pas suffi à calmer la foule. La Fédération turque «prendra une décision sur cette rencontre qui a été reportée» dans les prochains jours. En partenariat avec Afrik.com
Montebourg mécontent du maillot «made in Thailand» des Bleus
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Le ministre du redressement productif Arnaud Montebourg a déploré mardi que les maillots de l’équipe de France de football pour la prochaine Coupe du monde au Brésil ne soient pas fabriqués en France, mais en Thaïlande. Il a estimé que la Fédération française de football avait les moyens de recourir au «Made in France», que lui-même s’efforce de populariser auprès des Français. «Je ne comprends pas comment on peut aller faire fabriquer en Thaïlande ce qu’on fait très bien chez nous (...) Donc, je ne suis pas content», a-t-il déclaré sur RTL. «Ce n’est pas mon rôle de donner des cartons jaunes à ceux qui donnent les cartons jaunes habituellement. Mais l’état d’esprit dans lequel nous retravaillons sur le "Made in France", c’est que toutes les forces de la société, tout le monde s’y met», a-t-il ajouté. L’équipementier de l’équipe de France est le groupe américain Nike, qui a succédé depuis 2011 au groupe allemand Adidas.
14 - 20 MARS 2014 ZAMAN FRANCE
Les sites préférés des Français MAHMUT SARP L’Institut Harris Interactive a dévoilé son classement (NetObserver). Entre 5701 et 18 176 personnes se sont exprimées en automne 2013 dans une étude destinée à déterminer les sites préférés des Français dans 9 domaines différents : les réseaux sociaux, les annonces entre particuliers, l’actualité, les plateformes
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de visionnage de vidéos, le sport, la famille, les jeux-vidéos, l’automoto et la maison. Selon ce classement, Facebook, qui vient d’acheter le service mobile de messagerie WhatsApp pour une somme record de 19 milliards de dollars, reste de loin le réseau social préféré des Français avec 66,9 % des votes. Youtube (10,1 %) et Twitter (4,3 %) complètent le podium des internautes. Le site de petites annonces et de ventes entre particuliers Leboncoin.fr domine largement sa catégorie avec 72,9 % des suffrages exprimés. Loin derrière, on trouve ebay.fr (6,6 %), amazon.fr (3,8 %) et priceminister. com (3,2 %). Pour visionner des vidéos, c’est évidemment Youtube qui prime pour les Français, à noter toutefois le succès immédiat de la plateforme de vidéo du site allocine.fr, lancée il y a moins d’un an, en juin 2013 qui se situe au même niveau que dailymotion.com à 3,3 %. Pour s’informer sur Internet, les internautes sont beaucoup plus partagés. Ainsi, Lemonde.fr domine de peu sa catégorie avec 10,5 % des votes, devant 20 minutes.fr (8,6 %) et Google actualités (7,4 %). Yahoo! Actualités (4,8 %), Lefigaro.f r (4,5 %) et bfmtv.com (4,4 %) complètent ce classement. Enfin dans la catégorie sport, sans surprise, Lequipe.fr est le site préféré des Français avec 27,5 % des votes, devançant eurosport.fr (10,8 %) et Orange sport (3,7 %).
De la cocaïne livrée… en prison MAHMUT SARP PARIS Ce n’est pas une scène d’un prochain film d’Hollywood, ça s’est vraiment passé. Un hélicoptère téléguidé a laissé tomber un paquet contenant 250 g de cocaïne dans une prison.
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LE PAQUET CACHÉ Les faits se sont déroulés ce vendredi au Brésil, au centre de détention provisoire de Sao Jose Dos Campos à 120 km de Sao Paulo. Le paquet a bien évidemment été récupéré et caché par les détenus, mais lors d’une fouille ultérieure du pénitencier, les agents l’ont trouvé. Cité par le quotidien Estado de Sao Paulo, le secrétariat des affaires pénitentiaires a indiqué avoir expédié la drogue au commissariat le plus proche. L’hélicoptère téléguidé a quant à lui disparu.Lequipe.fr est le site préféré des Français avec 27,5 % des votes, devançant eurosport.fr (10,8 %) et orange sport (3,7 %).