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L’actu

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La Table—Le Produit Quand on a dit « prune », finalement, on n’a rien dit… Le nom « prune » « fruit à noyau, à chair comestible sucrée et juteuse » est en fait l’arbre qui cache une forêt de variétés, dont la reine-claude, le pruneau d’Agen et bien sûr notre chère quetsche. D’Alsace, s’il vous plaît.

Par Cécile Becker / Réalisation Myriam Commot-Delon / Photo Alexis Delon / Preview

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La quetsche

Charnue et juteuse, la quetsche s’ouvre sur un noyau bien dessiné et une couleur dorée. Elle active les papilles à bout portant par cet équilibre subtil acide-sucre et suscite toutes sortes d’imaginaires. Croquer à pleine bouche dans une quetsche tout juste cueillie de l’arbre est en soi charnel : saveurs et textures réveillent les sens et jouent sur la corde sensible des souvenirs. Ces après-midis chapardeuses où adolescents et galvanisés par le soleil, l’on coupait à travers champs pour atteindre ces précieuses, le coin des lèvres luisant de ce jus parfumé. La quetsche est évocatrice par sa forme et par ses goûts : tout en elle fait jouer la gourmandise. Est-ce un hasard si « quetsche » fait référence, pour certains – ma grand-mère, je le confesse – à la vulve ? Sans nous aventurer sur le terrain de l’érotisation étouffante du corps féminin, nous nous sommes interrogés sur la signification et les débordements de ce mot à consonance alsacienne qui peut aussi suggérer l’idiotie : « Je suis quetsche, j’ai complètement oublié mon texte sur la quetsche », par exemple, est de circonstance. Notre spécialiste du dialecte et traducteur Guillaume Groshaeny nous explique : « En alsacien, quetsche se dit « zwatchka », et c’est juste une quetsche ou une prune. C’est en français que ce mot a pris un autre sens. »

Justement : l’Alsace

Vraisemblablement, la quetsche a été obtenue à partir de la prune de Damas, plus petite et importée par les Croisés. En 1148, durant la Seconde Croisade, les Croisés attaquent Damas par les vergers pour s’assurer des vivres mais sont rapidement (4 jours) mis en échec. La déconfiture est totale. Ils reviendront uniquement chargés de pieds de pruniers. On dira donc qu’ils sont allés en Syrie… pour des prunes. Les prunes, justement, Willy Hufschmitt de la ferme fruitière familiale du même nom à Westhoffen n’en a cure. Pour lui, ce qui compte, ce sont les quetsches. Il a d’ailleurs passé 15 ans (!) à tenter de défendre la création de l’appellation « Quetsche d’Alsace ». Peine perdue : impossible de faire reconnaître un nom de région dans une appellation, ce serait trop restrictif. Mais l’écouter est l’occasion de remettre les pendules à l’heure : « En 1961, la quetsche était déjà répertoriée dans le catalogue officiel comme une variété de prunes. La quetsche d’Alsace a le goût de son terroir. J’ai plusieurs fois mené des tests à l’aveugle, entre sept variétés de quetsches, aucune n’a le goût de la quetsche d’Alsace. Visuellement, on ne voit presque pas la différence mais au goût, c’est le jour et la nuit : elle est acidulée, sucrée et plus parfumée. La quetsche est super bonne en Alsace, voilà c’est tout ! »

C’est pas (que) de la tarte

Récoltée en général dès la mi-août, cette année, la quetsche a pris son temps, un peu chahutée par la pluie même si Willy Hufschmitt nous assure que ce fruit se développe mieux par temps humide que par temps sec. Elle marque donc la fin de l’été et incarne la dernière occasion de faire des tartes avec autre chose que de la pomme. On la trouve aussi en version salée, renouant ainsi avec ses origines orientales pour accompagner gibiers et autres viandes goûteuses et pourquoi pas, aussi en pickles. Au domaine viticole Achillée à Scherwiller, Jean Dietrich, grand fan de prune (il la conseille à même l’arbre) raconte que ses 1 200 quetschiers avaient originellement été implantés pour faire de l’eaude-vie. Ils ont innové en la transformant en effervescent, comme un cidre : « Le Quetsche Alors — comme wesh alors — : on fait macérer, on vinifie et on ajoute du jus de raisins. Ce qui est intéressant, c’est que c’est un fruit qui renvoie beaucoup à la cannelle avec un côté clou de girofle et muscade. Son acidité donne des équilibres intéressants, pareil à la distillation. » Pas faux. C’est l’une des rares eaux-de-vie (de l’avis de notre palais) aussi subtile que goûteuse. On n’oublie pas, bien sûr, la confiture, dont celle à se damner de Christine Ferber : la quetsche-cannelle. Ne reste plus qu’à se ruer aux marchés pour profiter de ces dernières saveurs estivales…

Domaine Achillée achillée.com (avec l’accent)

Ferme Fruitière Hufschmitt ferme-fruitiere-hufschmitt.fr

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