La Sentinelle Juillet - Août 2021 - n° 04
Avant-Propos Périodique bimestriel de la Centrale Générale du Personnel Militaire. Éditeur responsable : Yves Huwart - Bureau de dépôt : Bruxelles X - P109013
Généraux, dites la vérité ! le syndicat militaire
Avant-propos
Généraux, dites la vérité ! AVANT-PROPOS PAR YVES HUWART | PRÉSIDENT
À la suite de l’incendie de Brecht et des récentes inondations en Wallonie, nous avons entendu et lu bien des déclarations sur les possibilités limitées d’engagement de la Défense lors de ce type de catastrophe. En guise d’explication, il a été référé aux années d’économie au sein du Département. Mais la ‘politique’ est-elle la seule responsable de l’érosion de l’armée ? On se le demande... La récente reconnaissance de l’état précaire de notre armée nous semble assez singulière. Car cela fait un certain temps déjà que la Défense ne peut plus correctement s’acquitter de ses tâches. Depuis plus d’une décennie, elle est un appareil délabré aux effectifs constitués de femmes et d’hommes parfois ‘trop loyaux’. Pendant des années, on a entretenu l’apparence d’une armée encore en état de faire ce qu’elle devrait être capable de faire. Pendant des années, on a jeté de la poudre aux yeux autour d’une capacité opérationnelle se détériorant toujours un peu plus : on comble les trous dans les unités en creusant des trous plus grands dans d’autres unités ; il n’y a pas suffisamment de pièces de rechange et de munitions; depuis plus d’une décennie, il n’est plus possible de s’entraîner grandeur nature, de sorte que l’état de préparation des troupes affiche de sérieuses lacunes ; et depuis longtemps l’armée n’est plus en mesure de mener de déploiements de longue durée, en raison du manque de personnel. Les plus hauts gradés ne se sont rarement, voire jamais, exprimés de manière convaincante à ce sujet. Au contraire, comme il sied aux bons
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militaires, ils ont commodément réussi à dissimuler l’érosion de l’appareil de Défense autant que possible pour le monde extérieur. La Défense, cependant, ne peut pas compter sur de nombreux supporters ‘naturels’ qui haussent le ton quand y porte atteinte. Ce qui a fait d’elle un poste facile pour y faire des économies : on peut encore et toujours y puiser. Mais, précisément, comme la Défense n’a pas beaucoup de supporters, le sommet de l’armée n’aurait-il pas dû dénoncer plus tôt de quoi il retournait ? C’est précisément là que le bât blesse : les plus hautes autorités militaires ont capitulé pendant des années par loyauté face à la dynamique politique belge. Elles ont contribué à façonner les choix structurels et capacitaires. Elles ont rendu les missions à l’étranger possibles encore et encore, au prix d’acrobaties et de figures de style. À chaque fois, il y a eu des solutions ad hoc aux crises, appliquées comme un pansement d’urgence (« Can Do ! ») permettant de facto aux vrais problèmes de s’envenimer. La situation déplorable de l’armée n’a pas été suffisamment expliquée aux politiciens et à l’opinion publique. Il est donc trop facile et trop ‘bon
marché’ de faire porter le chapeau exclusivement au niveau politique. Les hauts gradés savaient depuis longtemps que la version officielle était bancale. Que l’armée avait depuis longtemps cessé d’être équipée pour ses tâches, y compris l’aide à la Nation en cas de catastrophe majeure. Pourquoi n’ont-ils rien fait à ce sujet ? Pourquoi n’ont-ils pas sonné l’alarme à temps et de toutes leurs forces ? Pourquoi ne se sont-ils pas opposés fermement lorsque la réduction des moyens pour les urgences a été décidée ? Et pourquoi n’ont-ils pas signalé à leurs maîtres politiques les conséquences potentiellement désastreuses de leurs choix ? L’intérêt national n’exige-t-il pas peu à peu plus que de la loyauté ? Bien sûr, nous ne plaidons pas pour un coup d’état, mais peut-être que ce pays complexe peut être réveillé si quelques généraux éloquents disent la vérité et rien d’autre que la vérité. Et sont prêts à démissionner si nécessaire. Il est honorable que les gouvernants assument leurs responsabilités politiques mais c’est seulement bénéfique si les dirigeants militaires se regardent vraiment dans la glace et se justifient auprès du Gouvernement et du Parlement.
La Sentinelle Juillet - Août 2021 - n° 04
Photo : Vincent Bordignon
Colophon
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Généraux, dites la vérité !
La Sentinelle est le bimestriel de la Centrale Générale du Personnel Militaire. La Sentinelle est envoyée à tous les membres. Tirage : 8.800 exemplaires
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Salaires : où en est le dossier ?
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Résistance à deux ou trois étoiles
Toutes les données sont traitées dans le respect de la Loi sur la vie privée (Loi du 8/12/1992 & GDPR).
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Juillet 2021 : été meurtrier
Éditeur responsable : Yves Huwart Coordination : Concetto Bandinelli et Laurent Schmitz
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Un délégué CGPM témoigne
Informations générales – CGPM : Romboutsstraat 1 – Bus 021 1932 Zaventem srt@acmp-cgpm.be www.acmp-cgpm.be Tél. : 02 245 72 14 Fax : 02 245 73 01
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Tirer tous azimuts
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Le vaccin ou la porte ?
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MESA 2021
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Photo couverture : DGStratCom
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Pour le mérite !
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Statut
Salaires : où en est le dossier ? Le dossier d’alignement des salaires, entre-temps baptisé ‘Augmentation salariale’, poursuit son parcours administratif et budgétaire. Alors qu’il y avait un accord unanime en Comité de négociation de la Ministre de la Défense et des syndicats représentatifs, l’Inspecteur des Finances (IF) de la Défense a émis un avis défavorable, ce qui ne facilite pas les choses. Yves Huwart, Président de l’ACMP-CGPM, répond à nos questions. Où en est le dossier de l’augmentation des salaires ?
prochain conclave budgétaire, après la rentrée. »
« Certains laissent déjà entendre que l’accord conclu avec la MOD sur l’augmentation salariale est en perdition, mais c’est prématuré ; il est important de remettre le sujet dans son contexte. L’augmentation des salaires est actuellement un dossier clôturé au niveau de la Défense et la Ministre de la Défense, Ludivine Dedonder, l’a donc soumis au gouvernement. Dans notre pays, le processus décisionnel pour un dossier de ce type au niveau politique est loin d’être un simple parcours de santé puisque le gouvernement compte sept partis différents aux sensibilités très aussi différentes. Notre MOD doit recueillir de ses partenaires du gouvernement une adhésion politique pour que le dosser aboutisse à terme à la publication d’un Arrêté royal (AR). »
Quelle partie du dossier pose des problèmes ?
Quels sont les contretemps ? « Dans le volet technique, le dossier, à savoir un projet d’AR, doit passer diverses étapes de contrôle et de validation [ndlr : voir le cadre en page5]. IF a émis des réserves car il n’avait pas eu des certitudes quant à la couverture budgétaire dans les années futures. Il a rendu un avis défavorable. La ministre a donc pris la décision d’introduire un recours auprès du ministre des Finances. » « Dans le volet politique, il est apparu que les cabinets de plusieurs ministres ont posé des questions concernant le dossier ; notamment la raison pour laquelle l’étude sous-tendant le projet qui vise l’alignement des salaires sur ceux de la Police et pas sur ceux des fonctionnaires fédéraux, des pompiers ou de la protection civile. Comme nous sommes confrontés aujourd’hui aux vacances parlementaires, le gouvernement a décidé d’intégrer toutes les discussions lors du
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« Sur le plan budgétaire, IF n’a pas donné d’avis favorable donc la balle est maintenant dans le camp des politiques. » « Sur le plan politique, nous constatons que plusieurs points sont en discussion. Il faut savoir que le dossier s’appuyait sur un alignement des salaires des militaires sur ceux des policiers. C’est normal puisque les policiers œuvrent comme les militaires dans le secteur de la sécurité et ils exercent également une profession ‘armée’. La comparaison avec la Police s’impose, en tenant compte de la spécificité de chaque profession. Il est essentiel que l’Etat veille à éviter une concurrence en son sein entre la Défense et la Police sur le marché de l’emploi. Cet élément est indispensable pour que la Défense arrive à engager assez de personnel, mais surtout à garder ses militaires. En effet, on voit souvent des militaires intégrer la Police, mais jamais de policiers qui passent à l’armée. »
Photo : Vincent Bordignon
« Or, aujourd’hui les policiers revendiquent eux-mêmes aussi une augmentation, ce qui provoque une réticence de certains partis au sein du gouvernement envers le dossier des militaires. L’impact de l’augmentation salariale des militaires en service actif sur les pensions (via la péréquation) est aussi évoqué. » Que va-t-il se passer maintenant ? « La ministre a soumis l’augmentation salariale des militaires au gouvernement avant l’été, comme elle s’était engagée à le faire. À la suite de cela, des remarques ont été formulées et les discussions ont débuté. Nous en saurons plus lors du conclave budgétaire, à l’automne. » Quel est votre pronostic ? « Quelques écueils et contretemps étaient prévisibles vu l’importance du dossier. Chaque parti a son propre agenda, ce qui complique les choses. Il est encore trop tôt pour dire qu’il y a un échec, tout comme il est trop tôt pour crier victoire. L’étape du conclave budgétaire n’est pas infranchissable. D’une part la commission de la Défense a émis une résolution en vue d’améliorer le pouvoir d’achat des militaires et d’autre part, la Ministre de la Défense a mis sur pied un plan POP (‘People Our Priority’) et le dossier des salaires reste une de ses priorités. Ce dossier est solide et a obtenu l’accord unanime des partenaires sociaux. Il existe donc un large consensus en interne et en externe à la Défense en vue de revaloriser le statut pécuniaire des militaires. Enfin, il est important de noter que la MOD ne demande
pas de moyens supplémentaires au gouvernement ; cette opération d’augmentation salariale se réalise dans l’enveloppe budgétaire octroyée par le Gouvernement. La vision stratégique prévoit que le budget de la Défense augmentera de façon substantielle dans les prochaines années. De nombreux investissements ont été consentis et devront être assumés, mais après des années d’économies dont le personnel a fait les frais, il est temps de penser aux hommes et aux femmes qui portent l’uniforme, maintenant que de nouveaux moyens financiers sont enfin prévus. » Que va faire la CGPM si le projet d’Arrêté Royal ne passe pas ? Pour la CGPM, il est très clair que l’accord d’avril est primordial et doit être respecté tel qu’il a été négocié. C’est le plan A ; il y a un accord 'politique' au sein de la Défense et un accord unanime des syndicats représentatifs. Peut-être que certains sont prêts à brader l’avenir des militaires et accepter un plan B, mais pas la CGPM. Nous suivons la situation de très près et sommes en dialogue avec le monde politique en vue de faire aboutir le dossier. Nous partons du principe que ce sera le cas. Si finalement le gouvernement devait ne pas accepter le projet d’arrêté royal, alors nous confronterions ceux qui auraient torpillé l’accord avec leurs responsabilités. Nous garderons nos affiliés informés et c’est à eux que reviendra la décision finale, mais je pense que le climat social déjà très tendu risque d’exploser si le gouvernement met des bâtons dans les roues de l’augmentation salariale combien légitime et justifiée des militaires. »
Piste d’obstacles pour projet d’Arrêté Royal Le parcours d’un projet d’Arrêté Royal comme celui-ci est parsemé d’étapes distinctes : - Le projet d’AR modifiant les échelles barémiques est négocié au Comité de Négociation militaire, le ‘CONEGO’. - Les syndicats, la MOD et les (représentants du) CHOD marquent leur accord ; ils s’engagent à faire aboutir le dossier. Si après cela le document est modifié, sauf corrections techniques ou cosmétiques mineures, on ne parle plus du même accord. - L’Inspecteur des Finances (IF) vérifie ensuite, entre autres, la faisabilité budgétaire du dossier.
Existe-t-il, par exemple, un plan pour financer ce projet ? L'initiative fait-elle partie d'un document politiquement approuvé (note de politique générale, accord de gouvernement, plan stratégique) ou non ? L’impact financier est-il couvert par des moyens suffisants ? … - Le texte est soumis au contrôle administratif par le Conseil d’Etat pour vérifier si le nouvel Arrêté Royal ne contredit pas une législation existante. Par exemple, on ne peut pas prévoir une augmentation qui dépasse le maximum fixé des divers salaires par la loi (ce qui n’est pas le cas du dossier sur l’augmentation des salaires des militaires).
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Opinion
Résistance à deux ou trois étoiles Les militaires ne doivent pas mettre en péril le rôle particulier de notre armée dans la démocratie, non seulement par leurs actions mais aussi par leurs déclarations publiques, même s'ils sont généraux ou amiraux. Par conséquent, les officiers généraux qui commentent des décisions politiques légitimes sur les médias sociaux ne devraient-ils pas être sanctionnés ? Le contrôle démocratique de l’appareil militaire est un principe central de notre système politique. Les relations entre les dirigeants élus et l’armée sont déterminées dans la Constitution et basées sur la confiance. Le Roi est le commandant en chef, mais compte tenu de la responsabilité ministérielle dans la monarchie constitutionnelle belge, la direction et le déploiement de l'armée sont des questions purement politiques. Selon la loi, les militaires doivent donc suivre les ordres des gouvernants élus et accepter les décisions des dirigeants politiques, sauf si ces ordres sont illégaux ou immoraux. Inversement, le Chef de la Défense et les officiers généraux doivent fournir au gouvernement des conseils réfléchis et avisés sur l'organisation, le fonctionnement, l'équipement et le déploiement de l'armée. Ces conseils ne sont appréciés que si les membres du gouvernement sont convaincus qu'ils sont donnés sans parti pris politique ni agenda personnel. En outre, ce que disent les hauts gradés engage leur jugement professionnel et la crédibilité de leur réputation professionnelle. Cela s'applique également aux déclarations publiques faites par les généraux et les amiraux, y compris les commentaires et les déclarations sur les médias sociaux. Donc la question doit être posée de savoir si les déclarations faites par certains officiers généraux sur Twitter suite au remplacement du général-major Boucké à la tête du SGRS doivent être sanctionnées ? Concrètement : les officiers concernés ont-ils outrepassé leurs compétences avec ces déclarations ? Ont-ils dépassé les limites de leur autorité et de leur rôle par ces commentaires ? Et par conséquent : quelle est la manière appropriée pour les généraux d'influencer la politique ?
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Pour être parfaitement clair : nous ne voulons pas exprimer ici une opinion sur les erreurs éventuelles du général-major Boucké en sa qualité de chef du SGRS, mais simplement examiner si les principes des relations entre civilo-militaires dans une démocratie ont été respectés. Ce n'est pas la tâche d'un général ou d'un amiral de déterminer ou de dicter une politique. Son travail consiste à donner les meilleurs conseils possibles à son ou ses supérieurs hiérarchiques, à ses pairs, à son personnel et à ses dirigeants politiques. Pour que, dans ce dernier cas, les politiciens élus puissent prendre les meilleures décisions possibles, que le général ou l'amiral met ensuite en œuvre. Ce meilleur conseil aux dirigeants politiques doit être donné en toute franchise, mais dans le contexte des relations civilo-militaires dans une démocratie, il doit également être donné à huis clos. La première question est donc de savoir si les commentaires de ces généraux répondaient à cette
exigence ? Et s'ils n'auraient pas mieux fait de transmettre, à l’abri des indiscrets, leurs réserves sur l'affaire Boucké à la ministre de la Défense ?
lieutenants. Si ça ne plaît pas aux officiers généraux ou s’ils ne peuvent pas s'en accommoder, ils ont toujours la possibilité de démissionner et de protester en civil.
Plus qu'une réputation individuelle, les généraux et les amiraux jouissent d'une réputation collective qu'ils ont gagnée en faisant partie d'une catégorie professionnelle particulière. Il leur est donc presque impossible de ne parler publiquement qu'en leur nom. Et même si cela était possible, peu de gens voudraient les écouter. Leur opinion est estimée principalement parce que l'on suppose qu'ils parlent avec autorité pour ceux qui servent en uniforme. Et leur avis est également apprécié car nos dirigeants politiques élus savent que l'on peut compter sur le fait que les hommes et les femmes de la Défense belge suivront les ordres de leurs dirigeants politiques élus et respecteront leurs choix politiques.
Ces mêmes officiers généraux n'aimeraient en effet pas non plus voir un premier sergent remettre publiquement en question les décisions de son commandant de compagnie. Car un tel comportement nuirait incontestablement au bon ordre et à la discipline au sein de l'unité. C'est essentiellement ce qui s'est passé aujourd'hui, mais à un niveau beaucoup plus élevé. Par des personnes qui, de par leurs études, leur expertise et leur expérience, devraient avoir plus de discernement. C'est pourquoi c'est bien pire que si le premier sergent l'avait fait. En outre, il y a de fortes chances que le premier sergent reçoive une lourde sanction disciplinaire. Par conséquent, il nous semble approprié de poser la question suivante : qu'en est-il de la sanction de ces officiers généraux ? Et, plus largement, comment le système militaire fonctionne-t-il en ce qui concerne la supervision et la responsabilité des généraux et des amiraux ?
Sur ce point, l'argument de la liberté d'expression ne tient pas. Les officiers généraux sont indéniablement libres d'exprimer leurs opinions, leurs pensées et leurs convictions sur les décisions et les choix politiques. Mais ils doivent alors le faire en cercle privé, plutôt que sur Twitter, afin de ne pas donner l'impression qu'ils parlent au nom de l'ensemble de la communauté militaire. Il n'appartient pas aux généraux et aux amiraux de commenter publiquement le bien-fondé des décisions politiques ou le caractère approprié de la politique des dirigeants élus. Dans une démocratie, c'est la prérogative des électeurs. Pas des officiers généraux. Parce qu'ils ont un rôle particulier dans une démocratie. Et parce qu'ils doivent servir celui qui est aussi élu. Le problème est de taille lorsque des officiers généraux remettent publiquement en question le jugement de leur supérieur politique - comme cela a été le cas dans l’affaire Boucké - et limitent ainsi ses options politiques. Ce comportement commence à se rapprocher dangereusement de l'insubordination et à tendre quelque peu vers la dictature militaire. Après tout, la ministre de la Défense, qu'elle ait porté l'uniforme ou non, n'est pas un jeune lieutenant débutant. La ministre, comme expliqué au début de ce texte, est celle qui dirige politiquement l'armée en application de la Constitution. À ce titre, les officiers généraux lui doivent le respect et le dévouement qui doivent lui permettre de remplir correctement les fonctions légalement définies en tant que ministre de la Défense. Cela fait partie, entre autres, de la portée du serment qu'ils ont prêté en tant que
En effet, ces officiers supérieurs ont fait preuve d'un manque de respect - et de méfiance - envers leur supérieur, ce qui est en totale contradiction avec l'éthique professionnelle militaire, le principe constitutionnel du contrôle civil et la discipline militaire. Mais plus encore, ils ont surtout fait preuve d'une résistance choquante à l’égard de la direction politique. Nous craignons que le mépris pour le leadership civil soit largement répandu au sein de l'armée et que le problème soit exacerbé par les déclarations de chefs qui imputent les causes du malaise actuel de l'armée presque exclusivement au politique. L'affaire Boucké montre qu'il règne un climat de commandement dans lequel les expressions de mépris à l'égard des hauts fonctionnaires civils sont autorisées. Bien que les ‘frustrations’ puissent être ‘compréhensibles’ dans une situation aussi difficile, ces déclarations représentent néanmoins un comportement non professionnel, qui peut devenir problématique dans une démocratie. Cette question est le signe d'une crise émergente non seulement dans les relations politico-militaires mais aussi dans le professionnalisme militaire. L'érosion du professionnalisme militaire, à son tour, menace à la fois les relations politico-militaires et la confiance du public dans une force armée apolitique et compétente. Ce qui serait un vrai désastre...
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Compte-rendu
Juillet 2021 : été meurtrier Comme si cela ne suffisait pas, en pleine crise sanitaire Covid, la Belgique a essuyé une catastrophe inouïe. Les dieux lui sont tombés sur la tête, arrosant le territoire de manière copieuse. Les sols, éponges déjà gorgées, n’ont plus rien retenu. Et arriva ce tsunami ! C’est, en quelque sorte, une seconde plaie qui s’abat sur notre pays. « On peut arrêter le feu, mais on n’arrête pas l’eau », me dit ce monsieur, victime d’inondations pour la deuxième fois en trois semaines. « La première fois, la boue est arrivée par le petit cours d’eau qui coule à côté de ma maison. Mais le 15 juillet, l’eau est arrivée de partout ! Nous nous sommes réfugiés à l’étage, mon épouse et moi. » Des témoignages comme celui-ci, vous en avez entendu des dizaines. Qu’ils soient de Liège, Verviers, Pépinster, Chaudfontaine, Tilff ou encore Vaux-sous-Chèvremont (voir le témoignage de l’un de nos délégués), tous ont dû affronter l’ire de Dame Nature. Une colère de trois jours et qui laisse derrière elle une étendue de ruines, de deuil et de désolation. Cette catastrophe laissera, indéniablement, une trace dans notre histoire nationale. Dans ces moments, on crie à l’aide et l’on pense que les secours arriveront très vite. Certes, pompiers, personnels de la Protection civile et militaires ont rapidement démarré pour parer au plus urgent. Mais un constat s’est vite imposé : pas assez de personnel et pas assez de matériel tant la vague était étendue. Et dans ce dernier cas, aucun susceptible d’acheminer les secours dans les endroits les plus inaccessibles, où le courant emportait tout sur son passage. « Les leçons seront tirées », entend-t-on. Constat tardif, malgré les avertissements
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La Sentinelle
de la Protection civile à l’annonce de la réforme saignante qu’elle a subie en 2017. Des cris qui se sont brisés sur un mur d’indifférence. Les représentants du personnel, civils ou militaires, répètent à n’en plus finir que les moyens doivent toujours être maintenus ; que le recrutement doit être préservé pour assurer les missions, sauvegarder les capacités, les connaissances et les compétences ; que les investissements doivent suivre. Mais la loi des économies est la plus forte. « Où sont les militaires ? » Ici et là, des sinistrés se plaignaient de ne pas voir de militaires chez eux. Pourtant, la Défense a bien réagi : de jeunes soldats formaient une chaîne pour remplir et acheminer des sacs de sable ; on en a vu porter secours à des personnes âgées désorientées ; d’autres ont évacué des meubles enchevêtrés dans la boue ; certains fendaient l’eau brune, au volant d’un Unimog presque submergé ; on les voyait armés de pelles, de brosses et de raclettes, passant d’une maison assainie à une autre violée par les
eaux ; on les suit du regard lorsqu’ils sanglent une voiture sous un NH90 ou lorsqu’ils vont chercher des personnes réfugiées sur le toit de leur habitation. Jeunes recrues, spécialistes du génie, personnel navigant, fantassins, infirmiers ou membres du Commandement militaire de la Province de Liège : on a compté jusqu’à environ 300 militaires déployés par jour, mais ils étaient sans doute plus nombreux, silencieux et dans l’ombre, poussés par l’esprit d’initiative et leur irréfrénable sentiment de solidarité. Tirer les leçons, il faudra le faire et pas seulement le dire. La reconstruction matérielle prendra des mois, si pas des années. Gérer le traumatisme dans les esprits se révèlera être une tâche ardue, surtout si les assurances ne tiennent pas leurs promesses et que les sinistrés sont abandonnés à leur sort. Si des inondations comme celles du 15 juillet 2021 deviennent la norme, il faudra changer de modèle et se donner les moyens nécessaires pour ne pas avouer, encore une fois, notre impuissance face aux cris de désespoir.
Photo : Vincent Bordignon
Compte-rendu
Un délégué CGPM témoigne Michel Ory est délégué local ACMP-CGPM, caserné à Saffraanberg. Originaire de Vaux-sous-Chèvremont, il n’a pas hésité une seconde à prêter main forte aux secours dans ce qui se révèle être déjà la plus grande catastrophe naturelle vécue en Belgique. Témoignage… « Dès les premiers instants, j’ai enfilé ma tenue camouflée et j’ai foncé. En tenue militaire pour passer plus facilement les contrôles, je me suis mis à disposition des pompiers. Mon village natal était touché et ma maman habite en plein centre. Je connais la ville sur le bout des doigts. De cette manière, j’ai pu guider les pompiers. » C’est ainsi que Michel commence son récit haletant. « Ma maman était coincée au premier étage.
Il ne restait que 4 marches avant que l’eau n’arrive en haut. Elle ne se rendait pas compte de la situation : il y avait déjà 2,5 m d’eau au rez-de-chaussée ! Plus tard nous avons vu que la cuve à mazout a été descellée par l’eau et s’est retrouvée dans la pièce d’à côté ! » « Nous sommes allés chercher ma maman, non sans mal »… Car le courant s’est montré violent ; même les zodiacs avaient du mal à se frayer un ‘chemin’. « Les différents
courants se rejoignaient à la rue de la Station, où ils formaient une sorte de 8 tourbillonnant », se souvient notre témoin, forcé de penser à sa propre sécurité avant de pouvoir agir. « Le courant était trop fort ! » La famille de Michel a été doublement impactée, puisque la maison de sa tante, évacuée avec son mari, s’est effondrée. « C’est une zone de guerre comme j’en ai vu en ex-Yougoslavie. Beaucoup de personnes avaient accroché des draps blancs aux fenêtres du 1er étage pour être secourues, mais certaines étaient bloquées plus bas et nous sommes allés les chercher. J’ai avancé de 10 mètres mais j’ai dû reculer. J’avais de l’eau jusqu’à la taille, puis jusqu’aux épaules. Les dinghys se sont révélés inutiles mais les jet skis arrivaient à passer. Avec un policier, nous avons sauvé un monsieur qui avait une jambe cassée. Le courant secouait notre zodiac et les deux sont tombés à l’eau. Je les ai remontés en tirant sur leur harnais. » Les images fortes que Michel Ory retiendra de cet épisode le poursuivront encore longtemps. Mais le sentiment d’avoir fait ce qu’il fallait, au moment opportun, le consolera pour toujours. « Il a fallu deux jours et demi pour nettoyer la maison de ma maman qui a logé chez moi après l’évacuation. Mais il faudra des mois pour s’en remettre. »
Photo : Raphaël Sanchez Calvo
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Opinion
Tirer tous azimuts Un comité stratégique de dix experts universitaires mandatés par la ministre Ludivine Dedonder a rédigé au printemps un rapport contenant des recommandations pour la mise à jour de la Vision stratégique 2030. Cet article examine les grandes lignes de ce rapport, la teneur de ses recommandations et explique également pourquoi il s'agit d'une occasion manquée. Nécessité La Vision stratégique de Steven Vandeput a été rédigée en 2014 et 2015, avant les attentats de Zaventem et de Bruxelles. Depuis lors, les tensions internationales ont fortement augmenté et le rythme des changements stratégiques s'est accéléré, estiment les experts. Les relations entre les États-Unis, la Russie et la Chine se sont dégradées et quatre années de Donald Trump ont mis la coopération internationale sous pression. D'où la nécessité de réviser la Vision stratégique 2030. Le rapport d'expertise a été présenté au gouvernement le 18 juin et discuté au sein de la Commission de la Défense Nationale de la Chambre des Représentants le 23 juin. Il a également été présenté au Conseil des ministres le 23 juillet. Le débat parlementaire sur ce texte aura lieu après l'été. Avec la contribution de l'État-major de la Défense, la réflexion devrait conduire à une mise à jour de la Vision stratégique d'ici la fin de l'année, afin que l'armée puisse se préparer de manière appropriée pour la décennie 2030-2040. Recommandations Le message central du rapport concerne les tâches principales
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de l'armée. Sur la base de leur analyse de l'environnement sécuritaire (futur), les experts en voient deux. La première tâche principale est la défense collective, par le biais de l'OTAN et de l'UE, de son propre territoire. La notion de ‘territoire’ inclut également le cyberespace. Dans le cadre de cette mission, l'armée doit également contribuer à renforcer la résilience de la société belge face aux menaces dites ‘hybrides’, telles que l'espionnage, le sabotage et la désinformation. La deuxième tâche principale consiste à (continuer à) contribuer à la sécurité collective de l'Europe et de sa périphérie par des déploiements importants à l'étranger. Le rapport conclut qu'en raison de ces deux tâches principales, l'Armée belge doit être capable d'opérer sur l'ensemble du spectre de la violence. Une dissuasion et une défense efficaces exigent la capacité de mener une guerre de haute intensité. Cette redéfinition des priorités a un certain nombre de conséquences. Premièrement, si la défense et la sécurité collectives sont les tâches principales, l'aide à la Nation doit toujours être possible en cas de crise, mais elle ne peut plus être une mission permanente de la
Défense. Ainsi, les patrouilles dans les rues, le soutien dans les hôpitaux et les centres de soins ne peuvent plus être effectués de manière continue ou sur de longues périodes. Deuxièmement, la Défense doit investir davantage dans son personnel : dans l'attractivité de son statut, dans son bien-être et dans son environnement de travail. En outre, l’effectif de 25.000 personnes est loin d'être suffisant et doit être augmenté. Troisièmement, outre l'acquisition d'autres nouvelles capacités et le complément des capacités existantes, des investissements doivent être réalisés principalement dans la puissance de feu de la Composante Terre (systèmes de feu direct et indirect et de défense antiaérienne) et dans les capacités médicales. Réflexions En substance, la mise à jour de la Vision stratégique 2030 revient à ‘un gigantesque tir tous azimuts politique’ : au cours de la prochaine décennie, la Défense doit être capable de faire face à toutes les menaces imaginables. L'environnement sécuritaire et les menaces décrits par les experts sont d'une noirceur absolue : des missiles nucléaires russes aux gangs criminels en passant par l'espionnage par des ressortissants chinois ;
derrière chaque arbre se cache un malheur. Nous sommes inondés d'idées noires. Un membre d'une secte brandissant une pancarte : « La fin est proche ! » ne ferait pas mieux… On ne peut s'empêcher de penser que les experts sont victimes de l'asymétrie des idées en matière de recommandations de politique étrangère et de défense : il est beaucoup plus sûr de prédire le malheur et la morosité que de prédire que tout ira bien. Les avertissements concernant des catastrophes improbables sont moins risqués pour la réputation de quelqu’un (qui passe alors pour quelqu’un de prudent) et si vous deviez par hasard avoir raison, vous serez traité comme un prophète. Ce tir à mitraille a un prix sans précédent : les dépenses de défense doivent être portées à 1,7% du PIB. En d'autres termes : le budget de la Défense doit augmenter de 3,5 à 4 milliards. Par an. Chaque année de nouveau. Cela représente environ un doublement par rapport au budget de 2021. En temps normal, donc sans guerre à l’horizon, et dans une période où il faudra en même temps payer la crise du Covid : une aventure financière complètement irréaliste sur le plan politique. En affirmant que l'Armée belge doit être en mesure de remplir ses cinq missions - préparation et résilience nationales, défense collective, projection de forces à l'étranger contribuant à la sécurité collective, diplomatie de défense et aide à la société belge - et que cellesci impliquent la capacité d'opérer sur tout le spectre de la violence et de mener une guerre de haute
Photo : Vincent Bordignon
intensité, l'avis des experts se résume à ce qui suit : la Défense doit pouvoir tout faire, ou presque. En réalité ce n'est pas une vraie recommandation car même avec 10.000 militaires supplémentaires et 3,5 à 4 milliards d'euros de ressources financières additionnelles, un tel niveau d’ambition est impossible en réalité. C’est précisément ici que réside le problème : l'analyse et les recommandations couvrent littéralement toutes les menaces et tous les déploiements opérationnels possibles. Ceux qui, en matière de vision et de planification de la défense, tirent tous azimuts et veulent atteindre des objectifs partiellement contradictoires, tombent rapidement dans un piège classique qu'une stratégie politique et militaire claire vise justement à éviter. À savoir, le vieil adage selon lequel une armée qui se prépare à tout en même temps, ne se prépare finalement à rien - ou du moins, ne peut rien entreprendre dans la durée. C'est là que réside la grande faiblesse de la Défense belge, que nous subissons ad nauseam depuis 15 ans,
à notre grande honte. En raison d'un manque de choix, nous avons un peu de tout, mais finalement rien en suffisance. Est-ce que ce n’était pas précisément le moment temps de proposer des choix majeurs dans les recommandations ? Quoi qu’il en soit, un quasi-doublement du budget de la Défense sera certainement mis en balance avec le fait que les pays européens de l'OTAN dépensent déjà un montant considérable de 230 milliards d'euros pour la défense. Bien plus que ce que la Russie dépense et pourrait jamais dépenser. La voie à suivre ne passe pas nécessairement par une augmentation des finances, mais par une coopération politique et militaire plus efficace et une spécialisation poussée des tâches. Alors, zéro pointé pour ce rapport ? Pas si le document déclenche enfin un débat approfondi sur le rôle et les tâches de la Défense, notamment au Parlement, débat dans lequel les tâches requises pour assurer la sécurité de notre société sont également discutées. Il est temps de faire de vrais choix.
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Info
Le vaccin ou la porte ? Avec plus de 70% de la population vaccinée contre la COVID-19, la Belgique affiche un des taux d’acceptation les plus élevés au monde. Cependant, certains préfèrent ne pas se faire vacciner. Ce n’est pas notre rôle de militer pour ou contre la vaccination. En revanche, nous tenons à informer les militaires sur les conséquences de leur choix sur leur carrière à la Défense. Nous avons interpellé l’autorité militaire concernant les conséquences d’un refus de vaccination contre la COVID-19. Le problème n’est pas nouveau. En effet, certains vaccins sont depuis longtemps obligatoires dans le cas de missions à l’étranger. On pense par exemple à la fièvre jaune en Afrique. À l’heure actuelle, la seule vaccination obligatoire pour la population est celle contre la poliomyélite, qui est appliquée en bas âge. Pour les militaires, l’Arrêté Royal du 28 mars 1983 ajoute le tétanos (dans tous les cas) et une longue liste de vaccins obligatoires selon les missions ou sur décision des autorités (MOD ou chef de la composante Médicale) : cholera, grippe, coqueluche, tuberculose, ... Dans le civil, certains vaccins, comme la COVID-19, ne sont pas obligatoires mais fortement recommandés. Être vacciné facilite en outre les déplacements et l’accès à certains évènements ou activités. Pour les militaires, il en va de même : le vaccin n’est pas obligatoire mais il est nécessaire pour certaines activités. La réponse de la Défense à nos questions est claire à ce sujet : « Par mesure de précaution, il a été décidé au sein de la Défense que la vaccination contre la COVID-19 était dorénavant une condition
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indispensable pour qu'un militaire puisse rester dans la catégorie d'aptitude opérationnelle A (CatOps A). Le vaccin COVID-19 n'est pas obligatoire mais il est indispensable pour pouvoir partir en mission. Selon la loi, chacun est donc libre de le refuser. Cependant, une personne qui part en mission et refuse le vaccin, devient MedCatOps W, c’est-à-dire, inapte aux missions qui nécessitent une vaccination COVID-19. Cette décision permet de ne pas mettre en danger l'opérabilité du détachement. » Attention, il n’est pas exclu que cette situation change et que la vaccination contre la COVID-19 devienne obligatoire : « Le cas échéant, cette question devra également être examinée à la lumière de l'introduction éventuelle d'une obligation générale de vaccination pour l'entièreté de la population ou pour certains secteurs et/ou de l'évolution de la réglementation dans le cadre du bien-être au travail. »
Photo : Vincent Bordignon
La base légale invoquée est l’article 5 de l’Arrêté royal du 29 novembre 2000 : « Le commandant de la Composante Médicale peut imposer des vaccinations obligatoires au soldat qui présente un risque accru de contracter une maladie infectieuse afin de le protéger suffisamment ainsi que les autres militaires et le personnel civil. » La vaccination des militaires qui partent en mission n'a pas seulement pour but de limiter le nombre de malades au sein du détachement. Sur le théâtre d'opérations il n'y a pas toujours de structures de soins adéquates et une évacuation médicale urgente n'est pas toujours possible. Or, selon la Science, les personnes vaccinées présentent des symptômes moins sévères en cas d'infection par le COVID-19. Que risque un militaire qui refuse la vaccination ? La décision de la Défense ne porte à ce stade que sur la catégorie opérationnelle. Dans certains cas, les conséquences professionnelles seront très limitées. Par exemple, si le militaire occupe un poste pour lequel la catégorie opérationnelle A n’est pas requise. Légalement, le refus du vaccin ne peut pas directement conduire à
Photo : Vincent Bordignon
une perte de la qualité de militaire (démission d’office, inaptitude définitive, …). Cependant, il est clair que, par exemple, un militaire BDL ne pouvant être CatOps A pour cause de refus de vaccination ne met pas toutes les chances de son côté s’il tient à évoluer comme militaire. Il en est de même pour un candidat qui ne pourrait plus être CatOps A parce qu’il ne veut pas être vacciné. Si l’autorité ne peut (théoriquement) pas prendre de mesures contre un chauffeur de bus ou un cuisinier sous prétexte qu’il n’est pas vacciné, pour un fantassin la situation est différente. Comme l’intéressé ne peut plus partir en mission, l’autorité pourrait se poser la question de son maintien dans un poste requérant la CatOps A ou dans certaines fonctions spécifiques. Les conséquences d’un refus de vaccination sont alors très importantes et signifient pour le personnel concerné un fameux frein dans la carrière opérationnelle.
Par exemple, si un pilote d’A400M refuse de se faire vacciner, il va de soi que son futur en tant que personnel navigant est sérieusement compromis, tout simplement parce que la Composante Air ne peut pas faire ‘grand-chose’ d’un pilote qui ne peut plus partir en mission. Pareil pour un marin à bord d’une frégate, un para-commando, etc. Les militaires dans cette situation risquent en outre de s’exposer à des tracasseries : mutations défavorables, refus de formations, mauvaises évaluations, … Une stigmatisation, voire une forme de pression morale qui peut à terme les pousser à démissionner. Nous avons aussi demandé à l’autorité si la Défense interviendrait en cas de séquelles ou complications à la suite de l’inoculation d’un vaccin contre la COVID-19. En dehors de la – très utopique – gratuité des soins de santé accordée aux militaires, la Défense n’accepte aucune responsabilité spécifique : « Toute complication qui serait la
conséquence de la vaccination contre la COVID-19 ne pourrait être constitutive d’un accident du travail. En effet, le risque de la vaccination en tant que tel n'est pas lié à la fonction de militaire. Quelle qu’en soit sa motivation précise, le risque existe pour chaque personne qui est vaccinée et pas uniquement ou particulièrement pour les membres du personnel de la Défense. » Au vu des réponses de l’autorité, le syndicat militaire ACMP-CGPM ne peut que constater que les militaires en service actif n’ont quasi pas d’autre option que de se faire vacciner contre la COVID-19, sans quoi ils risquent de compromettre sérieusement leur carrière, en particulier sur le plan opérationnel. Cela dit, à ce stade le choix leur appartient encore. S’ils refusent la vaccination, ils devront en assumer les conséquences en connaissance de cause.
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Compte-rendu
MESA 2021 La Marche Européenne du Souvenir et de l’Amitié (MESA) s’est tenue pour la 54e fois du 22 au 25 juin, entre Marche-en-Famenne, Saint-Hubert, Bastogne et Durbuy. L’ACMP-CGPM était bien sûr présente pour soutenir l’évènement ! C’est sous une bonne ‘drache’ qu’a débuté cette édition de la MESA, trois semaines avant les inondations catastrophiques qui ont touché notre pays… Sous la pluie, mais dans la bonne humeur ! C’est ce que les marcheurs ont dû se dire, car le public était à nouveau présent en masse, malgré les intempéries et la crise sanitaire. L’édition 2020 avait dû être annulée, au grand dam des organisateurs et du Bataillon des Chasseurs ardennais, pour qui l’événement est une tradition ancestrale. C’est donc avec plaisir et soulagement que les nombreux militaires mobilisés pour l’occasion ont vu débarquer les hordes de marcheurs. Les participants pouvaient opter pour un parcours entre 8 et 31 km. Comme toujours, la MESA attire son lot de sportifs, avec poche à eau, bâtons et bottines, mais aussi de simples promeneurs en quête des superbes paysages de la région. De nombreux anciens collègues étaient aussi de la partie, mais également des pelotons de militaires détachés par des unités des quatre coins de la Belgique. On notait par exemple, outre la participation massive des Chasseurs ardennais, une belle délégation de candidats de la Marine, francophones et néerlandophones confondus et aussi des militaires étrangers : Norvégiens, Danois, Néerlandais,… ainsi qu’un Ukrainien, très remarqué dans sa tenue de combat inhabituelle. Le CHOD est même venu nous saluer ; pour une fois que ce n’est pas l’inverse ! La MESA, c’est un grand moment d’amitié, tous grades et uniformes confondus.
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Stand, concours et sponsoring Le syndicat militaire était présent à chaque étape, avec un stand installé dans la zone des départs et arrivées. Le rôle des délégués présents était comme toujours d’accueillir et de conseiller les militaires mais aussi d’informer le public sur le rôle que joue l’ACMP-CGPM au sein de la Défense. Comme en 2019 et 2020, nous avions décidé de sponsoriser la marche, par une contribution financière à l’organisation. Et comme lors de l’édition précédente, notre concours a remporté un franc succès. En effet, nous mettions en jeu deux vols en montgolfière pour deux personnes. Marie-Laure de Vaux-sur-Sûre et Joris, candidat à la Marine, de Renaix, ont entre-temps été tirés au sort et ont reçu leur ‘carte d’embarquement’. Si les deux premiers jours la météo s’est avérée morose, les étapes de Bastogne et Durbuy ont largement compensé, avec un soleil moins timide. Notre stand, bien visible près des tables de nos amis de la boutique Full Tactical, a connu un beau succès et permis d’affirmer l’attachement de l’ACMP-CGPM à la MESA. Alors plus d’hésitation, nous vous attendons encore plus nombreux pour l’édition de juin 2022, qui se déroulera sous le soleil (c’est promis !) avec une fois de plus le stand de l’ACMP-CGPM !
Portrait
Pour le mérite ! Ce 29 juin, Le premier caporal-chef Frank Boelens a reçu le prix du ‘Volontaire le plus méritant de la Composante Air’ des mains du général Dupont. Frank est bien connu à l’ACMP-CGPM puisqu’il fait depuis longtemps partie de nos délégués locaux. Il est même récemment devenu responsable régional, le couronnement d’un parcours syndical aussi exemplaire que sa carrière sous les drapeaux. La carrière de Frank ne date pas d’hier puisqu’il a endossé l’uniforme en août 1985 comme milicien. Après son service militaire à la Marine, à Zeebruges, il a rejoint la Force aérienne comme volontaire temporaire, à l’ATCC (Air Trafic Control Centre) de Semmerzake. Il a beau être ‘aérien’, le travail d’infanterie ne lui fait pas peur : il intègre le flight de défense à Zellik et décroche de nombreux brevets : commando B, para aux Pays-Bas et en Allemagne, police d’aérodrome, air commando, … Bodyguard Au gré des mutations, il arrive à Evere où il devient chauffeur VIP et garde du corps des hautes autorités. A cette époque, il roule surtout au profit de feu le général Van Daele, alors ‘patron’ de la Force aérienne. Constatant un besoin au sein de l’unité, il prend l’initiative de créer le brevet supérieur de ‘Chauffeur VIP’, en étroite coopération avec la Police fédérale. Finalement, après quelques années à l’État-major général, il saisit l’opportunité de retourner à l’ATCC, sa première unité FAé. En 2006/2007 il participe avec brio aux missions ISAF – KAIA en Afghanistan. Fort de cette expérience et de l’excellent travail
effectué pendant les opérations, on le trouve peu après Officier responsable de la surveillance à l’ATCC, une fonction assez exceptionnelle pour un volontaire de carrière ! En même temps, son engagement au sein de l’ACMP-CGPM est remarqué et apprécié de sa hiérarchie, qui reconnait bien là son souci d’améliorer le bien-être du personnel. Prestigieux Frank est actuellement adjoint-CSM et chauffeur du Chef de Corps, un job qu’il exécute toujours avec la même ardeur alors
qu’il n’est plus qu’à deux ans de la pension. Sa nomination en tant que ‘Volontaire le plus méritant de la Composante Air’ vient couronner une carrière modèle au profit de la Nation et de ses collègues militaires. C’est un plaisir et un honneur de compter le ‘Volontaire le plus méritant de la Composante Air’ parmi le cadre de notre organisation. Félicitations à Frank pour ce prix prestigieux !
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Statut
Congés : les week-ends comptent aussi ! Comme souvent pendant l’été, des membres nous contactent pour signaler des problèmes avec leur demande de (grand) congé. En effet, certains chefs tentent d’imposer un service à leur personnel le week-end avant ou après sa période de congé. Pour certains collègues, les vacances commencent mal avant même le départ ! C’est le cas pour le Xavier K., qui nous contacte fin juillet parce que son commandant de compagnie l’a mis de service le week-end qui précède son congé. Même son de cloche auprès d’autres militaires, eux aussi désemparés. Le raisonnement de l’autorité est ‘brut de fonderie’ : les intéressés ont demandé congé à partir du lundi, donc on peut les faire travailler le samedi et le dimanche avant ! Et si la demande de congé se termine un vendredi, on peut prévoir une activité le week-end qui suit. Sauf que la plupart des gens demandent congé du lundi au vendredi, mais partent et reviennent pendant le weekend… Que dit le règlement ? Le règlement TRAVARB traite de ce problème : ‘ 107. a. (1) L'approbation de la période d'absence par l'autorité militaire reconnaît l'indisponibilité de l'intéressé pour la totalité de la période demandée, y compris [...] les week-ends qui entourent la demande. ‘ ‘ Exemple : quand l’intéressé demande un jour de congé le lundi, il est déjà indisponible à partir du
vendredi après-midi quand son service se termine, jusqu’au mardi matin où son service débute ’. Donc même si vous n’avez demandé que cinq jours de congé, du lundi au vendredi, vous êtes bien indisponible pour le service pendant neuf jours. Exceptions et subtilités Attention toutefois : si l'activité de week-end était connue avant la demande de congé, alors elle a priorité. Par exemple si vous êtes de garde le dimanche, il ne suffit pas de demander congé le lundi pour que la garde soit supprimée. De même, si vous partez en mission le samedi 4 septembre, vous pouvez demander congé jusqu’au vendredi 3 septembre mais vous devrez effectuer votre mission le samedi 4. Notez que c’est bien la date de l’accord du congé qui compte, pas celle de la demande ! Aussi, l’autorité peut vous imposer une activité seulement si vous étiez au courant avant de faire votre demande de congé. Par exemple, le commandant de compagnie ne peut pas vous dire qu’il comptait depuis longtemps vous mettre de garde. Si rien n’a été publié, vous n’êtes pas sensé le savoir. Vérifiez donc bien le rôle de garde et de permanence, le calendrier de l’unité, les OJ, … et contrôlez si votre demande a été accordée avant de réserver vos billets d’avion. Enfin, sachez que l'autorité peut très exceptionnellement annuler un congé. Il faut une décision du Chef de Corps motivée, uniquement pour des raisons opérationnelles. Il est même prévu une indemnisation, si par exemple vous ratez un voyage déjà payé à cause de l'annulation du congé. Autant dire que c'est très rare qu'un CO prenne une telle mesure. Dans la pratique, cela n’arrive quasi jamais.
Photo : Vincent Bordignon
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NAISSANCES
MARIAGES
NECROLOGIE
LUCAS – 19/09/2019 Dans la famille de Yves HENRIVAUX (Namur)
10/04/2019 VANHAUWAERT Frank et DESTRÉE Françoise (Namur)
HASSEWER LÉON (Diest) 1931 - 22/03/2021
MILA – 24/08/2020 Dans la famille de Jérémy BODART (Huy)
16/04/2020 NIKOGHOSYAN Suren et MELKI Juliette (Grimbergen)
MERCKX ALBIN (Namur) 1930 - 13/04/2021
THÉO – 25/02/2021 Dans la famille de Mathieu GROSSART (Liège)
22/07/2020 OUARRANA Redouan et VITTOZ Mélisande (Morlanwelz)
DE BRAUWER ROGER (Anvers) 1932 - 21/04/2021
CASPER – 01/03/2021 Dans la famille de David SCHROOTEN (Maaseik)
24/09/2020 SOLIS PRIETO Martin et HAUBRUGE Justine (Andenne)
VRANCKEN THEODOOR (Genk) 1946 - 01/05/2021
ARTHUR – 20/03/2021 Dans la famille de Thomas VANHIXE (Deinze)
26/09/2020 VAN DEN NEUCKER Marc et SALENGROS Ingrid (Huy)
REYNDERS MARIA (Heusden-Zolder) 1936 - 11/05/2021
JANNE – 05/04/2021 Dans la famille de Marnix MARX (Leuven)
29/12/2020 MAES Dries et RANGELOVA Fetia (Anvers) (Par cohabitation légale)
LÉNA – 15/04/2021 Dans la famille de Stephen RIKIR (Liège) NEILA – 15/04/2021 Dans la famille de Tars DERRE (Pelt) AMADEO – 21/04/2021 Dans la famille de Thomas CASADEI (Charleroi) THÉO – 23/04/2021 Dans la famille de Kenny NEYMAN (Namur) CEDER – 03/05/2021 Dans la famille de Bengt RUYMEN (Diest) ARTHUR – 10/05/2021 Dans la famille de Georges VANMESSEM (Namur)
12/03/2021 COLIN Rudy et VOS Patricia (Aarschot) (Par cohabitation légale) 26/03/2021 BARREZ Erik et MEESTERS Viviane (Lanaken) 30/03/2021 DERRE Tars et VOZGIRDAITE Brigita (Bocholt) (Par cohabitation légale) 03/04/2021 GROSSART Mathieu et WIJNEN Emeline (Oupeye) 14/04/2021 ADAM Anouk et BERTELS John (Mont-Saint-Guibert) (Par cohabitation légale)
Indice des prix à la consommation - Mai : 111,05 points - Juin : 111,30 points - Juillet : 112,25 points
Indice santé - Mai : 110,99 points - Juin : 111,31 points - Juillet : 112,18 points L’indice santé lissé s'élève en mai 2021 à 109,13 points. L’indice-pivot pour la Fonction publique et les allocations sociales, fixé à 109,34 points, n’est donc pas atteint. Le précédent dépassement de l'indice-pivot remonte à février 2020.
Source : Statbel
La Sentinelle 19
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