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Diversification impérative
De trop nombreuses économies continentales restent piégées dans un format postcolonial, matières premières contre produits transformés. L’industrialisation et le développement de chaînes de valeurs locales et régionales sont l’une des clés de la croissance. par Cédric Gouverneur
Le 22 mai dernier, dans la zone franche de Lekki, au sud-est de Lagos, le président nigérian sortant
Muhammadu Buhari a inauguré la méga-raffinerie de l’homme le plus riche du continent et apôtre de l’industrialisation du pays Aliko Dangote, en sa compagnie. La présence à leurs côtés des chefs d’État sénégalais Macky Sall et nigérien
Mohamed Bazoum démontre l’importance accordée dans la région à ce complexe industriel, qui « permettra au Nigeria d’obtenir l’autosuffisance en matière de carburants, et même d’avoir des surplus destinés à l’export », a estimé Buhari. Une semaine avant de passer la main à son successeur fraîchement élu, Bola Tinubu, le président sortant a procédé à cette cérémonie afin de redorer son bilan, le complexe industriel de 2 635 hectares n’étant pas encore en service – seule fonctionne l’usine d’engrais, d’une capacité de 3 millions de tonnes, attenante à la fameuse raffinerie. Cette dernière devrait amorcer sa production d’essence fin juillet ou en août, selon le groupe Dangote, qui pronostique un lancement complet fin 2024. D’après les calculs du Fonds monétaire international (FMI), elle devrait raffiner 100 000 barils par jour en 2024, puis 200 000 en 2025, et 300 000 en 2026-2027. À terme, ses capacités devraient être de 650 000 barils journaliers, à comparer avec les besoins quotidiens des 213 millions de Nigérians, évalués à 450 000 barils. Après des années de retard (notamment en raison du Covid-19) et le doublement de son coût global (de 9 à 20 milliards de dollars !), le complexe devrait faire économiser environ 3 milliards de dollars par an en importations de carburant au pays. Et permettre au poids lourd ouest-africain d’en finir avec cet insupportable paradoxe : l’importation, à prix d’or, de produits transformés issus de l’exportation des richesses de son sous-sol (les hydrocarbures). Une situation évoquant le cynique « pacte colonial » jadis imposé par les métropoles, et qui assignait