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à leurs colonies les rôles de sources de matières premières et de débouchés commerciaux… Soixante ans après les indépendances, « trop d’économies africaines demeurent dépendantes de l’exportation de matières premières non-transformées, ce qui les laisse vulnérables à une demande globale fluctuante », déplore l’Observatoire africain de l’industrie, créé l’an dernier par l’Union africaine et l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel (ONUDI), avec le soutien de la Banque africaine de développement (BAD). En moyenne, le continent « ajoute de la valeur à 14 % de ses exportations, a calculé la BAD, contre 27 % dans les économies émergentes asiatiques. Cela représente une opportunité manquée de tirer davantage de bénéfices de nos ressources naturelles »

Trois D Cennies De Recul

L’Afrique postcoloniale est longtemps demeurée la région du globe la moins dynamique dans le domaine de l’industrialisation. L’ONUDI relève que la part de la production manufacturière a même reculé en Afrique subsaharienne entre les années 1980 et 2010, passant de 18 % du PIB en 1981 à 10 % en 2017. Dans les années 1980 et 1990, faute de financement et de volonté politique, les Décennies du développement industriel de l’Afrique (IDDA I et IDDA II) annoncées par l’ONUDI avaient échoué. Il a fallu attendre 2016 pour que se lance enfin sur le continent une action concertée : « Les objectifs de l’IDDA III sont désormais liés à ceux de l’Agenda 2063 et aux objectifs de développement durable, se félicitait l’ONUDI en 2020. Cet engagement à grande échelle se traduit par un élan et des possibilités de financement sans précédent », la BAD ayant par exemple injecté 8 milliards de dollars pour appuyer l’industrialisation. L’agence de l’ONU souligne aussi « des progrès indéniables » dans l’agroalimentaire, le textile, l’automobile et la machinerie, notamment au Maroc, au Rwanda, en Éthiopie et à l’île Maurice, où les autorités exercent une politique industrielle volontariste et planifiée. La diversification demeure cependant « encore insuffisante pour étayer un véritable essor industriel ».

Les chocs extérieurs de la pandémie, puis de la guerre en Ukraine, sont venus cruellement rappeler la vulnérabilité qu’implique la dépendance excessive à des fournisseurs et des marchés extérieurs : fin avril 2020, le cours du pétrole était même devenu négatif, à -40 dollars (l’offre excédentaire contraignant les pays producteurs à payer les acheteurs pour des barils qu’ils ne pouvaient plus stocker). Ces deux crises globales, associées au changement climatique et aux enjeux démographiques, raffermissent le consensus sur la nécessaire industrialisation du continent. L’ONUDI conseille même de percevoir la crise sanitaire comme « une opportunité pour impulser le changement » et de développer « les chaînes d’approvisionnement locales et régionales, afin de tirer parti d’un marché intérieur en pleine expansion », en profitant notamment de la mise en place de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) : le commerce entre États ne représente ainsi que 17 % des échanges (contre deux tiers au sein de l’Union européenne…), du fait de l’étroitesse des marchés intérieurs et de l’existence de barrières tarifaires.

« Le rythme du développement industriel demeure trop lent », regrette la BAD dans un rapport de novembre dernier. « Les emplois ne sont pas créés au rythme requis par la croissance de la population », ce qui permettrait de « tirer parti d’un dividende démographique [lorsque les enfants et les anciens, à charge, deviennent moins nombreux dans la pyramide des âges, permettant aux jeunes actifs d’investir et de consommer davantage – ce fut l’une des clés de la réussite de la Chine à partir des années 1980, ndlr] ». La transition énergétique constitue cependant une formidable opportunité pour accélérer cette industrialisation.

En témoigne la future zone économique spéciale de 2 000 hectares, à la frontière entre la République démocratique du Congo (RDC) et la Zambie, où sera érigé un complexe industriel de batteries pour véhicules électriques. Le projet avance à un bon rythme, un an seulement après la signature à Lusaka de l’accord de coopération entre les deux pays, détenteur de 80 % des minerais nécessaires à ces batteries. Dès septembre devraient être connus les résultats de l’étude de faisabilité, lancée en mars par la Commission économique pour l’Afrique des Nations unies et la Banque africaine d’import-export (Afreximbank). La décarbonation des transports devrait élever le marché des voitures électriques jusqu’au montant astronomique de 7 000 milliards de dollars en 2050 : « Capter 10 % de ce marché représente déjà 700 milliards », a rappelé Julien Paluku, ministre congolais de l’Industrie. ■

Les Chiffres

51 %, c’est l’augmentation des exportations africaines de gaz naturel liquéfié qui est prévue d’ici 2035.

88 % des Africains sondés par la Banque mondiale estiment que le changement climatique impacte leur vie quotidienne.

La dette représente 80 % du PIB de la Tunisie, dont la note souveraine a été dégradée de CC+ à CCC-.

à la pompe.

5,1 MILLIONS DE TOURISTES ONT VISITÉ LE MAROC ENTRE JANVIER ET FIN MAI 2023. C’EST DÉJÀ 20 % D E PLUS QUE POUR TOUTE L’ANNÉE 2019, AVANT LA CRISE SANITAIRE.

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