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VIBRATIONS À DAKAR
MALIKA SLAOUI est une éditrice de talent et qui a de la suite dans les idées. Installée à Casablanca, son entreprise, Malika Éditions, créée en 1998, s’est spécialisée dans le beau livre d’art, le patrimoine historique et artistique du Maroc. Avec près d’une centaine de titres en catalogue, dont certains en coédition avec de grandes maisons françaises, comme Actes Sud, Gallimard, ou avec l’Imprimerie nationale. Plus récemment, Malika Slaoui s’est lancée dans une collection dédiée à la scène contemporaine culturelle africaine. Celle liée aux grandes villes, à l’énergie urbaine. C’est le concept de « Nid d’artistes ». Après Casablanca en 2018, Dakar vient de sortir sous la direction et l’écriture d’Aisha Dème, militante, activiste et entrepreneure culturelle. Le livre offre un voyage dense et émotionnel dans la capitale sénégalaise, une échappée lumineuse, à la rencontre de plusieurs dizaines d’artistes et d’auteurs : Youssou Ndour, Omar Victor Diop, Baba Maal, Soly Cissé, Alain Gomis, Germaine Acogny, et bien d’autres… Entre les textes, les images, la mise en scène des œuvres, le dialogue est permanent, comme pour nous faire partager la vibration et les ambivalences de la ville. Parmi les prochaines étapes prévues de la collection « Nid d’artistes », une descente un peu plus au sud, à Abidjan, la Perle des lagunes. On s’impatiente… ■ Zyad Limam AISHA DÈME, Dakar, nid d’artistes, Malika Éditions, 368 pages, 45 €.
DOUNIA ET LA PRINCESSE D’ALEP (Canada-France),de
Marya Zarif et André Kadi. Avec les voix de Rahaf Ataya, Elsa Mardirossian, Raïa Haidar. En salles.
ANIMATION LA PETITE FILLE ET L’EXIL
La POÉSIECONTRE LA GUERRE : un dessin animé tout public et joyeux malgré la tragédie…
UNE FILLETTE DE 6 ANS, à la coiffure brune imposante, va bientôt devoir quitter Alep, en Syrie, où elle vit une enfance harmonieuse, malgré le décès de sa maman. Dans sa main, des graines de nigelle qui vont aider sa famille sur le chemin de l’exil… Réaliste tout en étant poétique (comme cette scène au clair de lune où s’ouvrent les pistaches dans les arbres), graphiquement superbe, ce film d’animation est à la fois délicieux et tragique. L’originalité et la simplicité du trait accompagnent un parcours semé d’embûche pour cette famille et ses voisins qui fuient les bombes. Les voix des personnages sont assurées par des comédiens exilés au Québec, dont le français mâtiné d’accent moyen-oriental alterne avec de l’arabe, pas
Exposition
toujours traduit, ce qui ajoute à l’authenticité du récit mais aussi à sa magie : un arabe levantin complété par des mélodies échappées de l’oud et des flûtes de la bande-son, et aux effluves qu’on devine des épices et des gâteaux de semoule. La coréalisatrice, « née en Syrie dans une famille chrétienne cosmopolite trilingue qui voyageait beaucoup », comme elle le dit elle-même, a choisi d’appeler son héroïne Dounia, c’est-à-dire « le monde », « la vie terrestre » en arabe. Et de l’entourer de femmes au caractère bien trempé et d’hommes bienveillants, qui résistent comme ils peuvent à la guerre. Il se dégage de ce conte chaleureux, rondement mené, une musicalité et une harmonie inattendue pour un tel sujet. Un enchantement. ■ J.-M.C.
Insolite Immortalit
Un parcours à la croisée du divin, de l’éthique et du scientifique. RÉSURRECTION, réincarnation, postérité… Évoquer les momies plonge dans une double fascination, celle de la mort et celle de la préservation des corps. La question de l’éternité y est centrale, à la fois métaphysique et matérielle. C’est ce rapport au temps et à la mort que propose d’explorer le muséum d’histoire naturelle de Toulouse, deuxième plus grand de France, après celui de Paris. Si l’année passée a été marquée par le bicentenaire du déchiffrement des hiéroglyphes par Jean-François Champollion et le centenaire de la découverte du tombeau de Toutânkhamon, cette exposition choisit de mettre en lumière le processus de momification, qu’il soit artificiel ou ait été naturellement induit par des actions physico-chimiques ou climatiques. Loin de concerner essentiellement les pratiques des Égyptiens de l’Antiquité, ce thème fait écho aux croyances en un au-delà, aux rituels symboliques, sociétaux ou religieux dans de nombreuses cultures et civilisations. Plus encore, il invite à se poser la question des avatars actuels ou à venir, de la cryogénisation, et autres procédés d’immortalisation. Captivant. ■ C.F.
« MOMIES : CORPS PRÉSERVÉS, CORPS ÉTERNELS », Muséum de Toulouse, Toulouse (France), jusqu’au 2 juillet. museum.toulouse.fr DR