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Hélène Beket, la petite fée

C’est déjà une ancienne à 24 ans. « Je fais du slam depuis mes 15 ans, mais je croyais faire du rap depuis le CM2 », sourit-elle. Elle a 7 ans quand son père décède, et 15 lorsque sa mère d’origine ghanéenne rentre au pays. Celle-ci la confie à une tante qui, trois ans plus tard, la met à la porte. « C’est le début de la galère. J’ai beaucoup dormi dans les mosquées, c’est plus sûr. Il n’y a pas d’agression là-bas. » Elle reste dans la rue deux ans et fait tout pour le cacher : « Je me levais tôt, je me lavais, je m’habillais correctement. »

C’est le slam qui lui permet d’avoir enfin un toit sur la tête. Elle se produit dans les bals de fin d’année des lycées. L’assistante de l’acteur Michel Bohiri lui dit un jour : « Tu ne fais pas du rap, tu fais du slam », et la met en contact avec Bee Joe, qui la reçoit lors d’une répétition à l’Institut Goethe. Elle qualifie sa prestation de « calamiteuse », mais ne se décourage pas. Bee Joe lui parle d’une scène, Plume libre, où elle pourra s’entraîner : « Et là, tout le monde apprécie. J’ai 15 ans, et je suis slameuse. » En 2017, ce dernier l’encourage à concourir au championnat national. Elle arrive en finale. C’est la première femme à atteindre ce niveau. Elle rejoint le collectif Au nom du slam, mais ne peut plus participer aux compétitions nationales, que celui-ci organise. En 2018, le slameur Philo le dompteur de mots la fait venir à Ouagadougou, au festival Un village dans la ville. Puis elle participe au championnat burkinabé et est invitée en guest-star au festival Pluie de mots. L’épidémie de Covid-19 empêchant d’autres déplacements, elle fait des scènes à Abidjan et est engagée pour des prestations ponctuelles par des institutions internationales. Sa réputation est faite.

2022 voit sa carrière prendre une autre dimension. Repérée par la chaîne 7info, elle est souvent invitée dans l’émission Droit dans les yeux. Elle anime aussi un show sur les musiques urbaines sur la radio La Voix de la diaspora : tout ce qu’Abidjan compte d’artistes R’n’B, rap, slameurs, passe dans son studio. Elle prépare d’ailleurs son premier single, « Solo », et son premier concert, qui se tiendra, comme en hommage à ses débuts, à l’Institut Goethe, en mai prochain. « Dans mon slam, je parle de tout ce qui me touche. Mais il y a des choses qu’on ne dit pas.

C’est honteux d’être pauvre, on culpabilise. » Ce qui l’a sauvée, ce sont « les belles rencontres et le slam ». Pourquoi n’a-t-elle pas pris de nom de scène ? « Parce que quand je me produis sur scène ou devant des personnalités, je parle à mon père et lui dis : “Tu vois où ton nom est arrivé ? Tu as réussi !” » ■

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