Ciel de louis XIV extrait

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Sommaire Avant-propos

10

Marly | apothéose du soleil Sire, Marly... Le Soleil et ses satellites Le pavillon du globe céleste 72 constellations et des milliers d’astres Vincenzo Coronelli

12

Cosmographie | les étoiles du siècle

34

Système solaire Observation nocturne L’Académie royale des sciences L’Observatoire de Paris Portraicts de sçavants

5 septembre 1638 | naissance de Louis Dieudonné

52

Nuit d’orage... La naissance Horoscope royal et thème astral L’enfant Louis Éphéméride de l’année 1638

Épilogue

68

Petit âge glaciaire L’éclipse de 1715 Lire | Sources et bibliographie Découvrir | Les lieux et les curiosités du livre Remerciements et crédits iconographiques

78 79 80


Sommaire Avant-propos

10

Marly | apothéose du soleil Sire, Marly... Le Soleil et ses satellites Le pavillon du globe céleste 72 constellations et des milliers d’astres Vincenzo Coronelli

12

Cosmographie | les étoiles du siècle

34

Système solaire Observation nocturne L’Académie royale des sciences L’Observatoire de Paris Portraicts de sçavants

5 septembre 1638 | naissance de Louis Dieudonné

52

Nuit d’orage... La naissance Horoscope royal et thème astral L’enfant Louis Éphéméride de l’année 1638

Épilogue

68

Petit âge glaciaire L’éclipse de 1715 Lire | Sources et bibliographie Découvrir | Les lieux et les curiosités du livre Remerciements et crédits iconographiques

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Sire, Marly...

« On a joué au portique. Ce jeu divertit fort les dames et les courtisans. Le roi a joué aussi au cadran à l’anneau tournant, jeu d’adresse de son invention. »

« Cette société de plaisir, qui donne aux personnes de la Cour une honnête familiarité avec nous, les touche et les charme plus que l’on peut dire… Journal du marquis de Dangeau Par là, nous tenons leur esprit et leur coeur, quelquefois plus fortement er Description des premières soirées de Marly | 1 avril 1689 peut-être que par les récompenses et les bienfaits. Et à l’égard des étrangers, ce qui les concerne en ses dépenses fait sur eux une impression très avantageuse de magnificence, de puissance et de grandeur. » Louis XIV | Mémoires Promenade de Louis XIV en vue du parterre du Nord dans les jardins de Versailles par Étienne Allegrain, vers 1688 (détail). Château de Versailles. L’actuelle entrée du domaine de Marly porte le souvenir de celle passée. Sur la gravure, un attelage arrive devant l’entrée principale. Derrière la grille, le pavillon central accueille les nouveaux arrivants. Sur la droite, on aperçoit trois des douze pavillons dédiés au plaisir des courtisans. Gravure d’Augustin Guillaumot, Château de Marly, Paris, 1865.

Versailles, 1678. Las du bruissement incessant de la cour et d’une Europe liguée contre lui, Louis XIV recherche un domaine pour y faire construire une retraite plus intime : Marly, un vallon marécageux entouré de collines boisées, répond à son attente. En moins de huit ans, l’architecte Jules Hardouin-Mansart réalise un ensemble architectural exceptionnel tout entier dédié au divertissement. Son accès reste strictement réservé aux membres de la famille royale ainsi qu’à quelques rares élus pour de courts séjours : le roi détient là un merveilleux moyen de s’attacher ceux à qui il en fait bénéficier. Participer à l’un des « Marlys », comme on dit alors, est le plus envié des privilèges : certains membres de la Cour sont ainsi de tous les voyages quand d’autres n’y vont qu’une fois et certains jamais. Venir à Marly signifie partager le quotidien du souverain pendant quelques jours et prendre beaucoup de plaisir dans un lieu où l’étiquette est assouplie. Dans le grand salon octogonal du pavillon central, les convives prennent place sans aucune distinction de rang pour le jeu. Grande loterie, airs d’opéra, pièces de théâtre… le roi fait se succéder des fêtes raffinées tandis que, dans la journée, le parc résonne des clameurs des parties de chasse ou offre la possibilité de promenades et de balades dans les gondoles du Grand Miroir. La nature est traitée comme l’architecture, en décor somptueux et sans cesse renouvelé, au rythme des saisons et au gré de la volonté du roi. Versailles a été l’œuvre d’un monarque voulant affirmer son pouvoir et la suprématie de son pays. Marly n’est que plaisir… Complètement disparu après la Révolution, le pavillon Royal était un carré de quarante-deux mètres de côté et seize mètres de haut. Dans les angles, se trouvaient les appartements principaux, décorés de tentures de damas de couleur : au nord-est, du côté de la Seine, l’appartement du roi était tendu de damas rouge...


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Sire, Marly...

« On a joué au portique. Ce jeu divertit fort les dames et les courtisans. Le roi a joué aussi au cadran à l’anneau tournant, jeu d’adresse de son invention. »

« Cette société de plaisir, qui donne aux personnes de la Cour une honnête familiarité avec nous, les touche et les charme plus que l’on peut dire… Journal du marquis de Dangeau Par là, nous tenons leur esprit et leur coeur, quelquefois plus fortement er Description des premières soirées de Marly | 1 avril 1689 peut-être que par les récompenses et les bienfaits. Et à l’égard des étrangers, ce qui les concerne en ses dépenses fait sur eux une impression très avantageuse de magnificence, de puissance et de grandeur. » Louis XIV | Mémoires Promenade de Louis XIV en vue du parterre du Nord dans les jardins de Versailles par Étienne Allegrain, vers 1688 (détail). Château de Versailles. L’actuelle entrée du domaine de Marly porte le souvenir de celle passée. Sur la gravure, un attelage arrive devant l’entrée principale. Derrière la grille, le pavillon central accueille les nouveaux arrivants. Sur la droite, on aperçoit trois des douze pavillons dédiés au plaisir des courtisans. Gravure d’Augustin Guillaumot, Château de Marly, Paris, 1865.

Versailles, 1678. Las du bruissement incessant de la cour et d’une Europe liguée contre lui, Louis XIV recherche un domaine pour y faire construire une retraite plus intime : Marly, un vallon marécageux entouré de collines boisées, répond à son attente. En moins de huit ans, l’architecte Jules Hardouin-Mansart réalise un ensemble architectural exceptionnel tout entier dédié au divertissement. Son accès reste strictement réservé aux membres de la famille royale ainsi qu’à quelques rares élus pour de courts séjours : le roi détient là un merveilleux moyen de s’attacher ceux à qui il en fait bénéficier. Participer à l’un des « Marlys », comme on dit alors, est le plus envié des privilèges : certains membres de la Cour sont ainsi de tous les voyages quand d’autres n’y vont qu’une fois et certains jamais. Venir à Marly signifie partager le quotidien du souverain pendant quelques jours et prendre beaucoup de plaisir dans un lieu où l’étiquette est assouplie. Dans le grand salon octogonal du pavillon central, les convives prennent place sans aucune distinction de rang pour le jeu. Grande loterie, airs d’opéra, pièces de théâtre… le roi fait se succéder des fêtes raffinées tandis que, dans la journée, le parc résonne des clameurs des parties de chasse ou offre la possibilité de promenades et de balades dans les gondoles du Grand Miroir. La nature est traitée comme l’architecture, en décor somptueux et sans cesse renouvelé, au rythme des saisons et au gré de la volonté du roi. Versailles a été l’œuvre d’un monarque voulant affirmer son pouvoir et la suprématie de son pays. Marly n’est que plaisir… Complètement disparu après la Révolution, le pavillon Royal était un carré de quarante-deux mètres de côté et seize mètres de haut. Dans les angles, se trouvaient les appartements principaux, décorés de tentures de damas de couleur : au nord-est, du côté de la Seine, l’appartement du roi était tendu de damas rouge...




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La Nuit, costume porté pour le Ballet royal de la Nuit, anonyme, xviie siècle. Bibliothèque de l’Institut de France. Le Ballet royal de la Nuit, grand ballet baroque, est joué en 1653 dans la salle du Petit-Bourbon, hôtel situé à proximité immédiate du palais du Louvre. Le livret d’Isaac de Benserade, la musique de Jean-Baptiste Lully et les décors de Giacomo Torelli font merveille et remportent un immense succès auprès de la Cour.

Johannes Bayer, Uranométrie, 1661. L’uranométrie désigne l’art de la description du ciel et consigne les positions relatives des astres dans des catalogues d’étoiles.


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La Nuit, costume porté pour le Ballet royal de la Nuit, anonyme, xviie siècle. Bibliothèque de l’Institut de France. Le Ballet royal de la Nuit, grand ballet baroque, est joué en 1653 dans la salle du Petit-Bourbon, hôtel situé à proximité immédiate du palais du Louvre. Le livret d’Isaac de Benserade, la musique de Jean-Baptiste Lully et les décors de Giacomo Torelli font merveille et remportent un immense succès auprès de la Cour.

Johannes Bayer, Uranométrie, 1661. L’uranométrie désigne l’art de la description du ciel et consigne les positions relatives des astres dans des catalogues d’étoiles.


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Système solaire

« Il existe d’innombrables soleils et d’innombrables terres, toutes tournant autour de leur soleil comme les sept planètes de notre système. »

« [Le soleil est] le plus noble de tous, et qui, par la qualité d’unique, par l’éclat qui l’environne, par la lumière qu’il communique aux autres astres qui lui composent comme une espèce de cour, par le partage égal et juste qu’il fait Giordano Bruno de cette même lumière à tous les divers climats du monde ; par le bien qu’il De l’infinito , universo et mondi | 1584 fait en tous lieux ; produisant sans cesse de tous côtés la vie, la joie et l’action ; par son mouvement sans relâche, où il paraît néanmoins toujours tranquille ; par cette course constante et invariable, dont il ne s’écarte et ne se détourne jamais, est assurément la plus belle et la plus vive image d’un grand monarque. » Louis XIV | Mémoires pour l’instruction du Dauphin

Au xvie siècle, le savant humaniste Nicolas Copernic bouleverse la vision du monde en plaçant le Soleil au centre de l’Univers. À la théorie du géocentrisme, s’oppose désormais celle de l’héliocentrisme, rapidement frappée d’interdits religieux. Tout le xviie siècle va voir s’affronter sans relâche les partisans des deux pensées, tels Salviati et Simplicio, les deux personnages inventés par Galilée dans son Dialogue sur les deux grands systèmes du monde (1632). Galilée ne réussira jamais à apporter la preuve irréfutable de sa thèse qu’il est condamné à renier devant le tribunal de l’Inquisition. En France, René Descartes apprend l’issue de ce procès et renonce à publier, par sincère soumission aux autorités ecclésiastiques, son Traité du monde et de la lumière. On en retrouvera cependant des extraits dans ses ouvrages philosophiques, notamment dans Le Discours de la méthode (1637). La représentation du Soleil et de son emplacement dans l’Univers restent donc au cœur des débats scientifiques et philosophiques. La prégnance de ces questions comme les progrès de la recherche nourrissent sans cesse le thème solaire développé par Louis XIV et le renouvelle. En haut, à gauche Sphère armillaire de Nicolas Bion, xviiie siècle. Collection particulière. En haut, à droite Représentation du système solaire selon les hypothèses de Nicolas Copernic. Ci-contre Pendule de la création du monde. Mouvement conçu par Claude-Siméon Passement, bronzes de François-Thomas Germain, 1754. Château de Versailles. Ci-dessus Détail d’une porte des grands appartements. Château de Versailles.

Ce célèbre dessin anonyme représente le roi interprétant le Soleil pendant le Ballet de la Nuit (1653). Pour la dernière des quarante-cinq entrées du ballet, l’Aurore paraît sur son char, entourée des douze heures du Jour et du Crépuscule tenant une urne emplie de rosée. Tous se retirent à l’arrivée du Soleil et de ses Génies qui prennent place pour le grand ballet final... Bibliothèque nationale de France.


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Système solaire

« Il existe d’innombrables soleils et d’innombrables terres, toutes tournant autour de leur soleil comme les sept planètes de notre système. »

« [Le soleil est] le plus noble de tous, et qui, par la qualité d’unique, par l’éclat qui l’environne, par la lumière qu’il communique aux autres astres qui lui composent comme une espèce de cour, par le partage égal et juste qu’il fait Giordano Bruno de cette même lumière à tous les divers climats du monde ; par le bien qu’il De l’infinito , universo et mondi | 1584 fait en tous lieux ; produisant sans cesse de tous côtés la vie, la joie et l’action ; par son mouvement sans relâche, où il paraît néanmoins toujours tranquille ; par cette course constante et invariable, dont il ne s’écarte et ne se détourne jamais, est assurément la plus belle et la plus vive image d’un grand monarque. » Louis XIV | Mémoires pour l’instruction du Dauphin

Au xvie siècle, le savant humaniste Nicolas Copernic bouleverse la vision du monde en plaçant le Soleil au centre de l’Univers. À la théorie du géocentrisme, s’oppose désormais celle de l’héliocentrisme, rapidement frappée d’interdits religieux. Tout le xviie siècle va voir s’affronter sans relâche les partisans des deux pensées, tels Salviati et Simplicio, les deux personnages inventés par Galilée dans son Dialogue sur les deux grands systèmes du monde (1632). Galilée ne réussira jamais à apporter la preuve irréfutable de sa thèse qu’il est condamné à renier devant le tribunal de l’Inquisition. En France, René Descartes apprend l’issue de ce procès et renonce à publier, par sincère soumission aux autorités ecclésiastiques, son Traité du monde et de la lumière. On en retrouvera cependant des extraits dans ses ouvrages philosophiques, notamment dans Le Discours de la méthode (1637). La représentation du Soleil et de son emplacement dans l’Univers restent donc au cœur des débats scientifiques et philosophiques. La prégnance de ces questions comme les progrès de la recherche nourrissent sans cesse le thème solaire développé par Louis XIV et le renouvelle. En haut, à gauche Sphère armillaire de Nicolas Bion, xviiie siècle. Collection particulière. En haut, à droite Représentation du système solaire selon les hypothèses de Nicolas Copernic. Ci-contre Pendule de la création du monde. Mouvement conçu par Claude-Siméon Passement, bronzes de François-Thomas Germain, 1754. Château de Versailles. Ci-dessus Détail d’une porte des grands appartements. Château de Versailles.

Ce célèbre dessin anonyme représente le roi interprétant le Soleil pendant le Ballet de la Nuit (1653). Pour la dernière des quarante-cinq entrées du ballet, l’Aurore paraît sur son char, entourée des douze heures du Jour et du Crépuscule tenant une urne emplie de rosée. Tous se retirent à l’arrivée du Soleil et de ses Génies qui prennent place pour le grand ballet final... Bibliothèque nationale de France.


51 à gauche Le mathématicien, astronome et physicien hollandais Christiaan Huygens (1629-1695) expose très jeune des théories prenant le contre-pied de celles de Descartes, initiant le principe de l’énergie cinétique. En 1666, il est membre de la toute récente Académie. Protestant, il ne pourra cependant continuer à travailler en France après la révocation de l’édit de Nantes. Il est l’inventeur de Titan, satellite de Saturne (1655) et de la nébuleuse d’Orion (1656).

Portraicts de sçavans

« Nous sommes des nains juchés sur des épaules de géants. »

À droite Jean-Dominique Cassini (1625-1712), astronome et mathématicien français d’origine italienne, dirige pendant quarante ans l’Observatoire royal de Paris, calculant de nombreuses distances entre les planètes, découvrant des satellites de Saturne, dressant la première carte précise de la Lune. Il laisse la place à son fils Jacques Cassini.

Isaac Newton d’après Bernard de Chartres, philosophe du XIIe siècle (rapporté par Jean de Salisbury dans le Metalogicon)

Un des nombreux extraits des observations de Philippe de la Hire (1640-1718), dans l’Histoire de l’Académie royale des Sciences. Mathématicien et astronome, professeur au Collège de France, Philippe de La Hire est reçu à l’Académie des sciences en 1678. Ses travaux lui permettent de déterminer la vitesse de la lumière, en collaboration avec Cassini et un astronome danois du nom de Roemer. À sa mort, un de ses pairs écrira de lui : « On eût pu avoir en M. de La Hire seul une Académie entière des Sciences. »

Ci-dessus Isaac Newton (1643-1727), mathématicien, astronome et philosophe anglais, bouleverse la théorie de la gravitation universelle, révélée grâce à la légendaire chute d’une pomme : les corps s’attirent avec une force proportionnelle au produit de leur masse et inversement proportionnelle au carré de la distance qui les sépare. Ci-contre Nicolas Copernic (1473-1543), médecin et astronome polonais, est le premier à avancer la double hypothèse selon laquelle la Terre tourne sur elle-même en une journée et fait le tour du Soleil – et non l’inverse – en un an. Par cette théorie, il ouvre la porte à la longue histoire de la compréhension des mouvements célestes.

C’est lors du transfert de la dépouille de Galilée en 1737 à la basilique Santa Croce de Florence, qu’un doigt lui est arraché pour devenir une relique... Ce geste symbolique conforte le statut du scientifique, moins de cent ans après sa mort, comme celui d’un héros et martyr de la science. Véritable objet de curiosités, le doigt de Galilée est aujourd’hui conservé au musée d’Histoire de la Science de Florence.

Le grand siècle est un siècle effervescent, où la science s’enhardit, aidée en cela par les progrès des précurseurs de la Renaissance et du début du xviie siècle ainsi que par le perfectionnement des outils. De cet enthousiasme autour de la science, émergent des personnalités, des lieux et des rencontres. Parmi cette communauté qui parcourt toute l’Europe, Paris s’affirme rapidement comme un centre intellectuel grâce à la création de l’Académie des sciences et la politique de Colbert qui n’hésite pas à débaucher les savants étrangers, distribuant émoluments et charges lucratives. Dans une perception vertueuse du progrès, les sciences sont désormais perçues comme des disciplines s’enrichissant les unes les autres. à ce sujet, Fontenelle dira d’ailleurs que « l’Astronomie a un besoin indispensable de l’Optique [...] ainsi que toutes les parties des Mathématiques sont fondées sur la Géométrie, et pour aller jusqu’au bout, sur l’Algèbre même ». Cette vision des sciences décuple les échanges entre les chercheurs. Les correspondances épistolaires entre savants témoignent du partage des idées et du débat hors des frontières, aidées par l’utilisation du latin, langue commune à tous, à défaut d’être universelle. Au début du xviiie siècle, le mathématicien Marin Mersenne, moine minime, devient ainsi le centre d’un véritable réseau d’échange d’informations. La nouvelle Académie aura pour mission d’organiser et de structurer ces réseaux d’échange informels.


51 à gauche Le mathématicien, astronome et physicien hollandais Christiaan Huygens (1629-1695) expose très jeune des théories prenant le contre-pied de celles de Descartes, initiant le principe de l’énergie cinétique. En 1666, il est membre de la toute récente Académie. Protestant, il ne pourra cependant continuer à travailler en France après la révocation de l’édit de Nantes. Il est l’inventeur de Titan, satellite de Saturne (1655) et de la nébuleuse d’Orion (1656).

Portraicts de sçavans

« Nous sommes des nains juchés sur des épaules de géants. »

À droite Jean-Dominique Cassini (1625-1712), astronome et mathématicien français d’origine italienne, dirige pendant quarante ans l’Observatoire royal de Paris, calculant de nombreuses distances entre les planètes, découvrant des satellites de Saturne, dressant la première carte précise de la Lune. Il laisse la place à son fils Jacques Cassini.

Isaac Newton d’après Bernard de Chartres, philosophe du XIIe siècle (rapporté par Jean de Salisbury dans le Metalogicon)

Un des nombreux extraits des observations de Philippe de la Hire (1640-1718), dans l’Histoire de l’Académie royale des Sciences. Mathématicien et astronome, professeur au Collège de France, Philippe de La Hire est reçu à l’Académie des sciences en 1678. Ses travaux lui permettent de déterminer la vitesse de la lumière, en collaboration avec Cassini et un astronome danois du nom de Roemer. À sa mort, un de ses pairs écrira de lui : « On eût pu avoir en M. de La Hire seul une Académie entière des Sciences. »

Ci-dessus Isaac Newton (1643-1727), mathématicien, astronome et philosophe anglais, bouleverse la théorie de la gravitation universelle, révélée grâce à la légendaire chute d’une pomme : les corps s’attirent avec une force proportionnelle au produit de leur masse et inversement proportionnelle au carré de la distance qui les sépare. Ci-contre Nicolas Copernic (1473-1543), médecin et astronome polonais, est le premier à avancer la double hypothèse selon laquelle la Terre tourne sur elle-même en une journée et fait le tour du Soleil – et non l’inverse – en un an. Par cette théorie, il ouvre la porte à la longue histoire de la compréhension des mouvements célestes.

C’est lors du transfert de la dépouille de Galilée en 1737 à la basilique Santa Croce de Florence, qu’un doigt lui est arraché pour devenir une relique... Ce geste symbolique conforte le statut du scientifique, moins de cent ans après sa mort, comme celui d’un héros et martyr de la science. Véritable objet de curiosités, le doigt de Galilée est aujourd’hui conservé au musée d’Histoire de la Science de Florence.

Le grand siècle est un siècle effervescent, où la science s’enhardit, aidée en cela par les progrès des précurseurs de la Renaissance et du début du xviie siècle ainsi que par le perfectionnement des outils. De cet enthousiasme autour de la science, émergent des personnalités, des lieux et des rencontres. Parmi cette communauté qui parcourt toute l’Europe, Paris s’affirme rapidement comme un centre intellectuel grâce à la création de l’Académie des sciences et la politique de Colbert qui n’hésite pas à débaucher les savants étrangers, distribuant émoluments et charges lucratives. Dans une perception vertueuse du progrès, les sciences sont désormais perçues comme des disciplines s’enrichissant les unes les autres. à ce sujet, Fontenelle dira d’ailleurs que « l’Astronomie a un besoin indispensable de l’Optique [...] ainsi que toutes les parties des Mathématiques sont fondées sur la Géométrie, et pour aller jusqu’au bout, sur l’Algèbre même ». Cette vision des sciences décuple les échanges entre les chercheurs. Les correspondances épistolaires entre savants témoignent du partage des idées et du débat hors des frontières, aidées par l’utilisation du latin, langue commune à tous, à défaut d’être universelle. Au début du xviiie siècle, le mathématicien Marin Mersenne, moine minime, devient ainsi le centre d’un véritable réseau d’échange d’informations. La nouvelle Académie aura pour mission d’organiser et de structurer ces réseaux d’échange informels.


À droite Détail du Repas de paysans par Louis Le Nain, 1642. Musée du Louvre.

70

Petit âge glaciaire

« Il fait un froid horrible,nous nous chauffons et vous aussi, ce qui est une bien plus grande merveille.»

« Cette année 1709 est très remarquable par le froid extraordinaire et surprenant qu’il fit cet hiver... Le 21 janvier, il arriva à un homme qu’une assiette sur laquelle on avait mis du bouillon tout chaud sortant du pot pour le goûter, se prit à ses lèvres et en la retirant lui emporta la peau de dessous, quand il voulut l’ôter. Des gens qui dormaient dans leur lit, en s’éveillant trouvaient leur bonnet collé et gelé au chevet du lit, leur haleine épaissie s’étant glacée sur le coussin. Lors de cette première grande gelée le froid était si véhément, qu’on trouva des hommes morts sur les chemins par la rigueur de la saison. On allait pour lors à la chasse sans poudre ni fusil parce qu’on prenait les lièvres, les lapins, les perdrix et les autres oiseaux de plusieurs espèces sans peine à la main. Une infinité d’arbres moururent, de sorte que la campagne fut presque sans feuillage au mois de mai et elle paraissait si triste pour l’espérance d’une bonne récolte que le blé devint extrêmement cher aussi bien que le vin. Ce fut enfin une chéreté horrible que les vivres et une misère générale dans tout le royaume de France dont toute l’Europe se ressentit aussi et qui se plaignit d’un froid si extraordinaire. » Étienne Cabrol | Annales de Villefranche de Rouergue | 1709

Madame de Sévigné | Correspondance à sa fille, madame de Grignan, en Provence | été 1675

Ironie du sort pour celui qui s’était choisi le soleil pour emblème : le siècle de Louis XIV sera frappé de plein fouet par un climat catastrophique. Pendant les années de Fronde, le royaume est marqué par un rafraîchissement provoquant de médiocres moissons et des émeutes de subsistance. Dans certaines campagnes, on mange du pain seulement deux ou trois fois par semaine et l’on abandonne les terres ; certaines familles sont décimées. En 1658, l’année des vingt ans de Louis XIV, le royaume subit de terribles inondations et une pluviosité continuelle. Mais le pire reste à venir. Si la décennie 1680 sera remarquablement chaude et sèche, ce n’est qu’un trop court répit avant le début d’une période que l’on désigne aujourd’hui de « petit âge glaciaire ». Ces années resteront parmi les plus froides que l’on ait connues en Europe. Tous les records seront d’ailleurs battus lors de l’hiver 1709 : le froid glace toute la France ; à Versailles, le vin gèle dans les carafes…

à gauche Cette estampe représente l’Hiver, d’après la statue exécutée en marbre par François Girardon, sur un dessin de Charles Le Brun. Simon Thomassin, Recueil de cinquante des plus belles figures antiques et modernes de Versailles. Château de Versailles. Ci-dessous L’hiver, par DavidTeniers II (1610-1690), dit le Jeune. Musée du Louvre. Double page suivante Le Grand Canal gelé.


À droite Détail du Repas de paysans par Louis Le Nain, 1642. Musée du Louvre.

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Petit âge glaciaire

« Il fait un froid horrible,nous nous chauffons et vous aussi, ce qui est une bien plus grande merveille.»

« Cette année 1709 est très remarquable par le froid extraordinaire et surprenant qu’il fit cet hiver... Le 21 janvier, il arriva à un homme qu’une assiette sur laquelle on avait mis du bouillon tout chaud sortant du pot pour le goûter, se prit à ses lèvres et en la retirant lui emporta la peau de dessous, quand il voulut l’ôter. Des gens qui dormaient dans leur lit, en s’éveillant trouvaient leur bonnet collé et gelé au chevet du lit, leur haleine épaissie s’étant glacée sur le coussin. Lors de cette première grande gelée le froid était si véhément, qu’on trouva des hommes morts sur les chemins par la rigueur de la saison. On allait pour lors à la chasse sans poudre ni fusil parce qu’on prenait les lièvres, les lapins, les perdrix et les autres oiseaux de plusieurs espèces sans peine à la main. Une infinité d’arbres moururent, de sorte que la campagne fut presque sans feuillage au mois de mai et elle paraissait si triste pour l’espérance d’une bonne récolte que le blé devint extrêmement cher aussi bien que le vin. Ce fut enfin une chéreté horrible que les vivres et une misère générale dans tout le royaume de France dont toute l’Europe se ressentit aussi et qui se plaignit d’un froid si extraordinaire. » Étienne Cabrol | Annales de Villefranche de Rouergue | 1709

Madame de Sévigné | Correspondance à sa fille, madame de Grignan, en Provence | été 1675

Ironie du sort pour celui qui s’était choisi le soleil pour emblème : le siècle de Louis XIV sera frappé de plein fouet par un climat catastrophique. Pendant les années de Fronde, le royaume est marqué par un rafraîchissement provoquant de médiocres moissons et des émeutes de subsistance. Dans certaines campagnes, on mange du pain seulement deux ou trois fois par semaine et l’on abandonne les terres ; certaines familles sont décimées. En 1658, l’année des vingt ans de Louis XIV, le royaume subit de terribles inondations et une pluviosité continuelle. Mais le pire reste à venir. Si la décennie 1680 sera remarquablement chaude et sèche, ce n’est qu’un trop court répit avant le début d’une période que l’on désigne aujourd’hui de « petit âge glaciaire ». Ces années resteront parmi les plus froides que l’on ait connues en Europe. Tous les records seront d’ailleurs battus lors de l’hiver 1709 : le froid glace toute la France ; à Versailles, le vin gèle dans les carafes…

à gauche Cette estampe représente l’Hiver, d’après la statue exécutée en marbre par François Girardon, sur un dessin de Charles Le Brun. Simon Thomassin, Recueil de cinquante des plus belles figures antiques et modernes de Versailles. Château de Versailles. Ci-dessous L’hiver, par DavidTeniers II (1610-1690), dit le Jeune. Musée du Louvre. Double page suivante Le Grand Canal gelé.


Chanson populaire, xvıııe siècle

Collection « Curiosités »

« Au bout de neuf mois vint au jour Un petit enfant de l’amour Avec des dents longues et belles ; Lors on consulta son étoile, Et dés ce temps-là on prédit Qu’il mangerait grands et petits.»

Aujourd’hui disparu, le pavillon du globe céleste de Marly restitué en image de synthèse constitue notre point d’ancrage pour débuter un voyage original et inédit à travers tous les ciels de Louis XIV. Celui que l’on subit dans sa météorologie ; Celui que l’on observe grâce aux progrès de l’astronomie ; Celui que l’on redoute dans les prédictions astrologiques... Tous accompagnèrent le roi dès sa naissance, le favorisant souvent, le malmenant parfois. La collection « Curiosités » associe une architecture, un homme et un sujet. Se dessinent alors des liens insoupçonnés, historiques ou poétiques, qui font le caractère d’exception de certaines réalisations. Curieux, inédits, volontairement éclectiques, les ouvrages de cette collection se lisent facilement, esquissant d’un trait les thématiques sans s’y appesantir… à paraître : « L’éléphant de Napoléon »

32 €

Dépôt légal : septembre 2009

www.editions-honoreclair.fr ISBN : 978-2-918371-02-1

9 782918 371021

à Marly, l’architecte Jules Hardouin-Mansart transforme deux pavillons pour y faire installer les globes immenses réalisés par l’astronome Vincente Coronelli. Exemple saisissant de cette alliance entre le ciel et le roi, l’un d’eux représente le firmament à l’instant précis de sa naissance.

Le Ciel de Louis XIV

S’il est un règne qui a largement filé la métaphore céleste, c’est bien celui de Louis XIV. Le soleil, évidemment, mais aussi les étoiles et les planètes… Aucun astre n’a manqué au système grandiose de la monarchie. Légende ? à tout moment, le ciel semble s’être mêlé de la destinée royale. La personnalité de Louis XIV fera le reste...

Curieux de tout et en particulier des créations originales entreprises à travers les siècles, Mathilde Béjanin et Hubert Naudeix sont à l’initiative de la collection « Curiosités» dont les ouvrages évoquent des architectures rares et des histoires savoureuses, à déguster comme des mignardises...

Le ciel de  Louis XIV Mathilde Béjanin | Hubert Naudeix Préface de Béatrix Saule

Pour cette incursion dans l’histoire dont « Le Ciel de Louis XIV » constitue le premier opus, ils ont arpenté les chemins de Marly, de Saint Germain-en-Laye et de Versailles, consulté les Comptes des bâtiments du roi et relu les mémoires des grands de la Cour. L’ouvrage rassemble des documents méconnus, souvents inédits, en provenance des collections de la Bibliothèque nationale de France, de l’Observatoire de Paris ou de lieux plus réculés, tous témoins de l’émulation scientifique d’une Europe savante. Pour ce voyage au coeur du grand siècle, les auteurs ont sollicité la complicité de Béatrix Saule, Conservateur en chef du Château de Versailles et de Stéphane Castelluccio, historien de l’architecture au CNRS.

Mathilde Béjanin a suivi une double formation en littérature et archéologie. Après avoir travaillé au dévelopement des actions culturelles de la Villa Médicis, à Rome, elle rejoint les équipes de la Cité de l’architecture & du patrimoine pour la création de formations liées à l’histoire de l’architecture. En parallèle, elle est auteur de plusieurs documentaires audiovisuels culturels. Hubert Naudeix, diplômé de l’école nationale des arts décoratifs, travaille pendant plusieurs années dans des agences d’architecture au sein desquelles il devient l’un des premiers spécialistes de la représentation virtuelle de l’architecture. Fasciné par la notion de mémoire, il évolue naturellement vers les restitutions 3D du patrimoine et crée la société Aristéas, agence multimédia œuvrant pour de nombreuses institutions culturelles.


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