Maison romaine extrait

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La maison

romaine par Jean-Pierre Adam

photographies : Hervé Hôte modélisations 3D : Hubert Naudeix

Honoré Clair éditions


TREBIUS VALENS

SOMMAIRE

Introduction 8 La ville romaine 11 Par les rues et ruelles 23 g L’eau à Pompéi 30 Aux origines de la domus 33 Trebius Valens, une domus exemplaire 42 La façade 50 55 g Les structures architecturales 58 g Les parements extérieurs enduits 62 Entrons dans la domus 64 67 g Les sols, la mosaïque 68 L’atrium 74 81 Le tablinum 104 107 Le cubiculum 112 115 g Les étoffes 120 g Le mobilier 124 Le triclinium 134 137 g L’éclairage 144 g Le chauffage 146 L’œcus 148 151 g Les techniques picturales 154 g Les styles pompéiens 156 La culina 164 167 g L’alphabétisation 170 L’hygiène et les bains 174 177 Le péristyle 182 189 Le jardin 202 205 Domus dulcissima domus… 213 Plan de Pompéi 220 Bibliographie succincte 223 Crédits iconographiques et remerciements

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I

ville romaine

La

« Le forum de Pompéi était singulièrement animé à cette heure. Sur toute l’étendue de ses grandes dalles de marbre, des groupes assemblés conversaient avec cet enthousiasme qui accompagne chaque mot d’un geste et, aujourd’hui encore, demeure typique des peuples du Midi. » EDWARD BULWER-LYTTON, Les Derniers Jours de Pompéi

De la Rome caput mundi1, la première mégalopole de l’Histoire, où tout se créait, où la démesure s’est exprimée en quantité et en qualité, seuls des lambeaux squelettiques, superbes, dominateurs encore, témoignent malgré des siècles d’abandon et de pillage de la munificence impériale. Mais entre ces grands corps mutilés, on cherche en vain la ville, l’urbs, encombrée de maisons privées et d’immeubles, son lacis de rues, ses marchés grouillants. Aucune domus, demeure privée, ne subsiste. Ces maisons individuelles, pourtant, étaient fort nombreuses, bien que la spéculation immobilière et l’édifications d’immeubles collectifs les aient repoussées vers les quartiers périphériques. On les connaît néanmoins grâce aux fragments de la Forma Urbis, l’immense plan topographique de Rome, gravé sur le marbre et placé sur un mur du forum de la Paix, vers 206, à l’époque de Septime Sévère2. Sur plusieurs de ces morceaux, figurent en effet des maisons particulières ouvrant directement sur la rue et dont la distribution est conforme à ce que l’on peut rencontrer dans les cités vésuviennes. De plus en plus nombreux durant les siècles de l’Empire, les immeubles, les insulæ, l’invention urbaine romaine certainement la plus spectaculaire, apparus à l’époque tardo-républicaine furent la cause de l’éviction progressive des domus depuis le centre de la ville jusqu’à sa périphérie. D’après les Régionnaires, dans les quatorze régions de Rome, on comptait 46 602 insulæ pour seulement 1 797 domus3. Toutefois, une seule insula reste encore visible à Rome.

Détail de la maquette de la ville de Rome à l’époque de Constantin (IVe siècle ap. J.-C.) Paul Bigot, première moitié du XXe siècle, Université de Caen, Maison de la recherche en sciences humaines. Fragment de la Forma Urbis Marbre, 203-211 ap. J.-C. Plan général de Rome (échelle : 1/240), la Forma Urbis fut entreprise sous le règne de Septime Sévère et affichée dans le forum de la Paix.

1  Tite-Live (Histoire romaine, I, 16, 7), à l’époque augustéenne, donne de cette formule une explication légendaire en citant un personnage contemporain de la fondation de Rome, Iulius Proculus, à qui Romulus serait apparu pour lui prédire l’avenir de sa ville en ces termes : « Va et annonce aux Romains que la volonté du ciel est de faire de ma Rome la capitale du Monde. » Il semble plus cohérent de faire apparaître cette définition de Rome au moment des grandes conquêtes du iie s. av. J.-C. Voir Léon Homo, Nouvelle Histoire romaine, Fayard, Paris, 1941-1969, plus particulièrement « L’enfance de Rome ». 2  Les milliers de fragments retrouvés ont permis de reconstituer le plan de nombreux quartiers, à l’échelle 1/240, et d’établir que ce document exceptionnel était constitué de 151 plaques de marbre, couvrant 235 mètres carrés, sous la forme d’un quadrilatère de 18,10 mètres de long et de 13 mètres de hauteur. Voir Filippo Coarelli, op. cit., « Les œuvres d’art du Templum Pacis », p. 89-90. 3  Jérôme Carcopino, La Vie quotidienne à Rome à l’apogée de l’Empire, Hachette, Paris, 1939-1969, p. 38-47.

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Trebius Valens


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La

III

façade

Hic habitamus. Felices dii nos faciant. « Nous habitons ici. Les dieux nous rendent heureux ! »

GRAFFITTI SUR UNE FAÇADE DE MAISON DE POMPÉI (Corpus Inscriptionum Latinarum IV, 8670)

La domus des Ceii (I, 6, 15), particulièrement bien préservée, donne une excellente idée de l’aspect des façades dans les rues secondaires. Son parement, bien protégé par une généreuse avancée du toit (restauré), est revêtu d’un stuc blanc dans lequel sont tracées les lignes de joint d’un grand appareil d’opus quadratum de marbre. Sur ce parement se voient encore neuf inscriptions d’annonces électorales, l’une portant le nom de L. Ceius, dont on a fait l’occupant de cette demeure. Deux fenêtres seulement, de modestes dimensions, et une minuscule meurtrière s’ouvrent à un niveau inaccessible, tant pour préserver l’intimité que pour des raisons de sécurité. Lorsque les fenêtres se situent plus près du sol, elles sont munies d’une grille aux épais barreaux, comme on peut le voir dans plusieurs domus d’Herculanum ; mais on trouve également de nombreux claustras en céramique. Les baies de quelque importance, simplement closes le soir par un volet de bois, sont toujours ouvertes à une grande hauteur. Au premier étage, en

Page de gauche Façade de la maison des Ceii. La forme cubique des chapiteaux est représentative de l’architecture samnite.

Façade principale de la maison du Faune, détail de la « restauration » Alfred Normand Mine de plomb, plume, lavis d’encre de Chine et aquarelle, 1850. Rome, Académie de France à Rome, donation Cayla

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Trebius L’entrÊe Valens

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Élévation extérieure et coupe de l’entrée de la maison des Ceii Vittorio Spinazzola, Pompei alla luce degli scavi nuovi di via dell’Abbondanza (anni 19101923), 1953, planche après la p. 264. Coll. part.

À Herculanum, une porte en bois complète, à deux battants, les fores, comme c’était l’usage, a été retrouvée parfaitement conservée au numéro 19 du decumanus maximus1. Chaque battant est formé d’un cadre entourant trois panneaux séparés par des entretoises et raidis par des croix de saint André. Ces battants sont aveugles, alors que sur les moulages pompéiens certains battants de portes très hautes (en I, 6, 15) étaient munis d’une ouverture d’imposte éclairant le corridor. Ce sont des peintures comme celle la maison de Polybius (où une fausse porte est représentée sur une paroi de l’entrée) qui complètent notre information. Les battants de la porte étaient solidement verrouillés à l’aide de plusieurs procédés que l’on peut voir au complet dans la maison de l’Éphèbe (I, 7, 11). Dans cette domus, en effet, la réunion de quatre maisons à la suite d’achats immobiliers avait conduit à condamner l’une des portes (celle du no 10). La prise d’empreinte dans la couche de cendres a permis de retrouver les dispositifs de clôture qui étaient donc tous en place. On y voit une serrure à mi-hauteur des deux battants, doublée d’une barre horizontale engagée dans les murs latéraux ; les barres, mais aussi les verrous, sont nommés repagula (sing. repagulum). Enfin, une longue barre oblique cale l’ensemble en prenant appui dans le sol des fauces. Une fois franchi le seuil, il n’est pas rare de voir sur le sol une mosaïque portant un décor 1

Ci-contre, de gauche à droite Claustra (systèmes de fermeture) de l’une des portes de la maison de l’Éphèbe : serrure à clef, barre horizontale et barre oblique calée dans le sol. Trou de calage d’une barre oblique, maison du Poète tragique.

Page de droite Fausse porte peinte dans l’atrium testudinatum (atrium couvert) de la maison de Julius Polybius.

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Longtemps demeuré en place, ce précieux témoin a été transporté dans le nouveau musée du site.


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couvercle1. Le troisième inconvénient était la faculté, pour des voleurs, de pénétrer dans la domus en se hissant sur le toit puis, en usant d’une corde, d’accéder à l’atrium. Plusieurs maisons de Pompéi ont gardé les traces et parfois les vestiges d’une grille permanente clôturant le compluvium, telle celle, reconstituée, de l’atrium tétrastyle de la domus située en I, 2, 28. D’après le texte vitruvien, lorsque les dimensions de l’espace à couvrir sont importantes, la toiture est soutenue, aux angles du compluvium et du bassin, par quatre colonnes qui monumentalisent l’espace. Ainsi construit, l’atrium prend le nom d’atrium tétrastyle, et, lorsque le nombre de colonnes est supérieur, celui d’atrium corinthien. L’ordre de ces colonnes n’obéit à aucune règle. On trouve autant de colonnes doriques (maison des Ceii, I, 6, 15), que ioniques (maison en I, 2, 28) ou corinthiennes ; ces dernières, toutefois, étaient préférées pour les maisons à très grand atrium, telles la maison d’Obellius Firmus (IX, 14, 4) ou encore celle des Noces d’argent (V, 2, i), qui sont parmi les deux plus monumentales de la ville. Même lorsque le foyer n’y est plus entretenu, l’atrium conserve son évidente fonction de distribution du programme et bénéficie d’aménagements témoignant de son rôle initial. L’eau que l’on puise désormais dans la citerne était autrefois également recueillie dans cet espace, où elle était conservée dans un dolium rempli aux rares puits publics, ou plus simplement prélevée dans le fleuve Sarno qui coulait au pied de la ville. Dans sa conception initiale, l’atrium tenait également lieu de salle à manger, dans laquelle se trouvait donc autrefois une table entourée de sièges. L’introduction d’une pièce réservée aux repas rend caduque cette fonction, mais le souvenir en demeure sous la forme d’une petite table de pierre, le cartibulum, généralement en marbre et souvent richement ornée, telle celle de la maison de Caius Vibius (VII, 2, 18), ou celle de la maison d’Obellius Firmus (IX, 14, 4). Sur cette tablette, toujours installée au bord de l’impluvium, on disposait des objets de valeur, vases ou pièces d’argenterie. Un socle étroit, derrière le cartibulum, qui pouvait recevoir une statue au bord même du bassin, servait de fontaine déversant un mince jet dont l’eau partait à la citerne. Une autre sculpture pouvait prendre place dans l’atrium, sur un socle à côté du tablinum, supportant le buste du maître de maison ou d’un ancêtre de la famille. On a ainsi retrouvé la buste du banquier L. Cæcilius Iucundus (V, 1, 26) et celui de Cornelius Rufus (VIII, 4, 15). Si les Romains n’étaient pas farouchement enclins à la religiosité, du moins en ce qui concernait le culte rendu aux dieux du panthéon gréco-romain, ils furent néanmoins attirés par les courants nouveaux venus de l’Orient. Ces derniers comportaient une formation préparatoire et une intronisation, ce que l’on a appelé les « cultes à mystère », tels le culte de Mithra, celui de Dionysos, ou bien la religion égyptienne et son cycle d’Isis 1  C’est avec le sens dérivé de « couvercle » que le mot cortina est ici en usage ; il désigne également le velum ou l’auvent couvrant la scène des théâtres. Le sens de clôture est maintenu dans l’ancien français, puisque, outre la muraille, la courtine désignait le rideau de lit ou de fenêtre.

Hermès en bronze de la domus de Cæcilius Jucundus Naples, Musée archéologique national. Ce portrait est caractéristique de l’époque augustéenne. Il pourrait représenter le père du banquier propriétaire de la maison en 79.

Page de gauche La discussion (The discourse) Lawrence Alma-Tadema Huile sur toile, 1870 H. 42,5 cm ; l. 28 cm Coll. part. Fred et Sherry Ross.

Éléments décoratifs d’atrium : cartibulum, piédestal de statue, Faune dansant (original au Musée archéologique national de Naples).

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LE MOBILIER, SIEGES ET BANCS

Amours près du trône de Vénus (dét.) Provenance : Herculanum Naples, Musée archéologique national, 9210

Tabouret Bronze, Ier siècle ap. J.-C. H. 27,5 cm ; L. 28 cm ; l. 24,8 cm Provenance : Herculanum Naples, Musée archéologique national, 74009

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Relevé de tabourets Fausto et Felice Niccolini Le case ed i monumenti di Pompei, Vol. IV, Nuovi scavi, 1896, pl. XXXV


LE MOBILIER

Ci-dessus et ci-contre Lit en bois carbonisé et reconstitution H. : 55,3 cm ; L. 1,95 m ; Profondeur : 1,06 m Provenance : Herculanum, insula orientale II, 10 Herculanum, réserve archéologique. L’état de conservation de ce lit permet d’admirer le savoirfaire des artisans en matière de marquetterie. À partir d’un losange dessiné sur l’axe central se développent des méandres composés de pièces de bois alternativement claires et sombres. Le Musée archéologique national de Naples en présente une reconstitution.

Banc en bois carbonisé H. : 39 cm ; L. 105 cm ; Profondeur : 33,2 cm Herculanum, réserve archéologique. Le banc se compose de deux supports sur lesquels repose l’assise. Les pieds du banc situés à l’arrière sont droits, sans décor, tandis que ceux destinés à être vus prennent la forme stylisée d’une patte d’animal.

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Trebius LE triclinium Valens Sur la droite de l’atrium de la maison de Trebius Valens, se situe le triclinium. Cette vaste salle ne possède pas de porte sur l’espace commun et n’est accessible, curieusement, que par la petite chambre située à droite de l’entrée. Une porte originelle ouvrait bien sur l’atrium, mais elle fut murée, et son emplacement se lit clairement dans la maçonnerie non enduite. La pièce, longue de 7,15 mètres et large de 3,86, est la plus importante de la demeure. Ses proportions sont fort proches de ½, soit le rapport mentionné par Vitruve comme étant le plus efficace pour une salle à manger. Son sobre décor de IIIe style à fond noir se perçoit difficilement dans la pénombre d’une pièce pratiquement aveugle, car les petites ouvertures situées en hauteur n’ont pas été restituées.

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Page de gauche Triclinium de la maison du Moraliste (III, 4, 2-3). Au-dessus des oiseaux ornant les panneaux, trois distiques moralisateurs sont à l’origine de l’appellation de la demeure. État en 1996, photographie Jean-Pierre Adam Double page suivante Triclinium estival de la maison de Neptune et Amphitrite à Herculanum (V, 6-7). Les parois sont décorées de mosaïques en pâte de verre, ce qui explique la grande vivacité des couleurs à dominante bleue. Sur la droite, le tableau représente Neptune tenant un trident et Amphitrite soulevant son vêtement. Au fond, un nymphée est orné de pampres de vigne et de scènes de chasse.

Ci-contre Table dressée dans le triclinium de la maison du Moraliste Reconstitution in situ, photographie Jean-Pierre-Adam

maison du Moraliste (III, 4, 2-3) : « On doit laver les pieds à l’eau, après qu’ils sont lavés un esclave doit les essuyer. Une toile doit couvrir le lit, de façon à ne pas salir le lin [des coussins et du matelas]. » Les propos qui suivent relèvent de la morale : « N’adresse pas de regards lascifs et des yeux languides à la femme d’autrui, ta bouche doit conserver la pudeur. » Quant au déroulement des fastueuses orgies, il convient de renvoyer aux textes aussi évocateurs que truculents que Pétrone, dans son Satyricon, consacre au déroulement du festin chez Trimalcion1. 1  Sur la nourriture commune comme sur les fastes culinaires, on consultera avec le plus grand profit l’incontournable ouvrage de Nicole Blanc et d’Anne Nercissian, La cuisine romaine antique, Grenoble, Glénat, 1992. Le Satiricon est traduit par Pierre Grimal dans Romans grecs et latins, Paris, La Pléiade, Gallimard, 1958.

Les roses d’Héliogabale (Roses of Heliogabalus) Lawrence Alma-Tadema Huile sur toile, 1888 H. 1,32 m ; L. 2,14 m Londres, Whitford Fine Art. Ce tableau spectaculaire raconte l’histoire d’un festin au cours duquel les convives finirent étouffés par la masse des pétales de rose. Au-delà de cette anecdote tragique, le peintre Alma Tadema offre sa vision d’un repas dans un triclinium d’été.

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Les styles pompĂŠiens

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Les Styles POMPéIENS

DEUXIÈME STYLE C’est à partir de l’installation de la colonie romaine, en 80 av. J.-C., que le stuc réaliste du premier style disparaît pour faire place à une véritable révolution picturale. Désormais, l’artiste n’utilise que la peinture pour exprimer une architecture tridimentionnelle en trompe-l’œil, incluant la perspective et les effets de lumière et d’ombre, et recourant à l’usage de couleurs éclatantes. La villa des Mystères est justement célèbre pour ses remarquables décors de IIe style particulièrement bien préservés en dépit de leur ancienneté. Ce style pictural ne se limite pas à l’illusionnisme architectural, mais introduit des scènes avec personnages et animaux, l’exemple le plus fameux

étant, toujours à la villa des Mystères, la célèbre mégalographie de l’initiation dionysiaque. Contrairement au premier style, qui demeure figé dans le simulacre des parements, le IIe style conduit à un réalisme perspectif de plus en plus élaboré, et dont la grande villa d’Oplontis témoigne avec éclat1.

1  La grande villa d’Oplontis est située dans la commune de Torre Anunziata à faible distance, à l’ouest de Pompéi.

Page de gauche Détail d’un décor du IIe style en trompe-l’œil, maison des Noces d’argent. On note l’ombre portée des sveltes consoles de bronze soutenant la corniche. Ci-contre Relevé d’une fresque de IIe style, maison des Noces d’argent Fausto et Felice Niccolini Le case ed i monumenti di Pompei, Vol. IV, 1896, Nuovi scavi, pl. 16

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Page de gauche Jardin de la maison d’Octavius Quartio Le jardin est traversé par un euripe (canal) orné d’édicules à fontaine. L’ensemble est couvert par une pergola et des treillages bordent les allées.

« Le jardin est couvert d’une abondance de mûriers et de figuiers, arbres auxquels ce terrain est favorable. » PLINE LE JEUNE, II, XVII

Ci-contre, de haut en bas Jardin de la maison d’Octavius Quartio : matérialisation des trous de poteaux du treillage, moulage d’arbuste et reconstitution. Vittorio Spinazzola, Pompei alla luce degli scavi nuovi di via dell’Abbondanza (anni 1910-1923), 1953, p.413, 414 et 418. Coll. part.

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pas absente, mais il évoque avec une profonde sincérité tout l’amour que lui apporte l’existence dans cette demeure ; on retrouve dans ses propos tous les éléments vus à Pompéi, la plupart du temps à une échelle plus modeste, et qui caractérisent le bonheur domestique des Romains. Le ton de la lettre qu’il adresse à son ami Gallus1, l’invitant à venir séjourner aux Laurentes, exprime son enthousiasme à la simple perspective de ce séjour bienheureux. Les mots choisis pour sa description sont puisés au registre de la félicité. Il suffit d’en égrener quelques-uns, à commencer par les premiers : Miraris cur me Laurentinum vel, si ita mavis, Laurens meum tanto opere delectet… « Vous vous étonnez que j’aime tant ma propriété du Laurentin, ou, si vous préférez, des Laurentes… Son entrée donne sur un atrium simple mais non sans élégance… l’ensemble offre un abri merveilleux… puis deux chambres d’une décoration exquise mais simple… au bout du jardin est un pavillon, que j’appelle mes délices, oui mes vraies délices… ne trouvez-vous pas que j’ai de bonnes raisons de m’y être établi, de m’y tenir habituellement, y faire mes délices ? » Laissons les derniers mots à des Pompéiens certainement plus modestes et plus réalistes, qui témoignèrent sur le mur de leur domus de leurs espérances de bonheur, et probablement de leurs illusions : Hic habitamus. Felices nos dii faciant, « Nous habitons ici. Que les dieux nous rendent heureux ! » Combien de jours leur restait-il avant le réveil du Vésuve ?

Page de gauche Détail d’un visage de jeune femme, maison des Amours dorés

1  Pline le Jeune, Livre II épître XVII. Extrait des Lettres de Pline le Jeune, t. I, Les Belles Lettres, trad. A.-M. Guillemin. Lesbia pleurant la mort d’un moineau (Lesbia weeping over a sparrow) Lawrence Alma-Tadema Huile sur toile, 1866 H. 63,5 cm ; l. 48,3 cm Coll. part.

Double page suivante Détail des fresques de la maison de Julius Polybius

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Atrium, péristyle, jardin… C’est en compagnie de l’architecte-archéologue Jean-Pierre Adam que nous partons, pour une visite privilégiée, à la découverte des différents espaces qui caractérisent la domus. Il nous convie à une déambulation sensible, au cœur de la sphère privée. La Maison romaine constitue la première synthèse de référence, exclusivement consacrée à l’habitat pompéien. L’ouvrage propose une description et une analyse précise de son architecture et du mode de vie de ses occupants. Les œuvres des peintres académiques font écho à de spectaculaires images en 3D ; elles redonnent souffle aux vestiges archéologiques, offrant ainsi la représentation d’une société valorisant un art de vivre exceptionnel.

Architecte-archéologue, Jean-Pierre Adam a dirigé le bureau de Paris de l’Institut de recherche sur l’architecture antique (CNRS). Son champ d’activité le conduit à intervenir en métropole et dans le monde méditerranéen concerné par les cultures grecques et romaines, en particulier Rome et Pompéi, de même que sur certains sites de l’Égypte pharaonique. Outre la recherche de terrain, il a collaboré avec plusieurs départements du Louvre et assure un enseignement dans différents établissements, parmi lesquels l’École polytechnique fédérale de Lausanne, l’École du Louvre, l’École de Chaillot et l’université de Rome III. Il est l’auteur de nombreuses publications ainsi que d’ouvrages de référence.

La maison romaine

La qualité remarquable des travaux publics des Romains ne doit pas faire oublier leur réalisation la plus évidente dans l’art de bâtir : la domus, ou maison d’habitation, que les Romains vont porter à un niveau étonnant de confort et de luxe décoratif.

La maison

romaine Jean-Pierre Adam

Dépôt légal France : octobre 2012

ISBN : 978-2-918371-03-8 www.editions-honoreclair.fr

49 €

9 782918 371038

couv Maison romaine.indd 1

Honoré Clair

14/09/2012 10:28:05


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