>8
Avant-propos
Mercedes Volait
> 13
Tunis 1860-1880. La naissance de la ville neuve et de nouvelles formes architecturales
Leïla Ammar
> 27
Découverte architecturale et urbanistique du Tunis colonial
Christophe Giudice
> 41
L’aventure arabisante en Tunisie : de la fin du xixe siècle à la Reconstruction
Ahmed Zaouche
> 51
Architectures des Italiens à l’époque du Protectorat français
Ettore Sessa
63 < Promenades architecturales
65 < Arabisance 97 < Art nouveau 111 < éclectisme 143 < Art déco 191 < Modernisme 199 < Lieux de culte
223 < Répertoire des architectes
235 < Bibliographie
241 < Cartes des promenades
251 < Glossaire
>8
Avant-propos
Mercedes Volait
> 13
Tunis 1860-1880. La naissance de la ville neuve et de nouvelles formes architecturales
Leïla Ammar
> 27
Découverte architecturale et urbanistique du Tunis colonial
Christophe Giudice
> 41
L’aventure arabisante en Tunisie : de la fin du xixe siècle à la Reconstruction
Ahmed Zaouche
> 51
Architectures des Italiens à l’époque du Protectorat français
Ettore Sessa
63 < Promenades architecturales
65 < Arabisance 97 < Art nouveau 111 < éclectisme 143 < Art déco 191 < Modernisme 199 < Lieux de culte
223 < Répertoire des architectes
235 < Bibliographie
241 < Cartes des promenades
251 < Glossaire
> Leïla Ammar
Tunis 1860-1880. La naissance de la ville neuve et de nouvelles formes architecturales
Au cours du xixe siècle, Tunis, l’Al-Hadhira des chroniqueurs1, connaît une série de mutations décisives tant sur le plan urbain que sur le plan architectural. Les deux décennies qui précèdent l’établissement du Protectorat français en 1881 voient se développer une ville neuve hors les murs tandis que le paysage urbain des rues de la ville intra-muros se modifie. Avant de nous intéresser à ces transformations, il convient de dresser d’abord à grands traits un portrait de la ville en 1860.
La Médina et ses faubourgs en 1860 Selon un recensement municipal des édifices de la ville en 1860, celle-ci se compose de 9 026 maisons et étages2, 5 514 boutiques, 3 870 entrepôts (makhzin), 688 cafés, 155 moulins, 78 fours, 221 ukala et fondouks, 37 bains, 12 pressoirs, 13 garages (gara’ich), 29 rab’ (petits souks commerçants), 4 fabriques (gamarik wa Dar al-Jild). Au total et sans inclure les madrasas, les zâwiya et les mosquées, la ville compte à ce moment 19 147 constructions3. La ville intra-muros, c’est-à-dire la Médina et ses deux faubourgs (Rbat Bab Souika au nord et Rbat Bab al-Jazira au sud), s’étend sur près de 308 hectares. Les terrains hors les murs situés entre la porte de la Mer (Bab al-Bahr) et le lac al-Buhayra s’étendent quant à eux sur plus de 150 hectares. Dès le milieu du xixe siècle, la vie urbaine et les lieux de sociabilité, traditionnellement orientés vers l’ouest et la haute Médina, s’étaient déplacés vers l’est en direction de la place de la Bourse et des abords de la porte de la Mer intra et extra-muros. L’existence d’un quartier franc dans ce secteur est attestée par les voyageurs dès l’époque hafside mais il semble que l’appellation de « quartier franc » date de la fin du xviiie siècle. Le quartier abritait entre autres le « fondouk des Français », siège de l’administration consulaire, et le « fondouk des négociants ». Outre les fondouks, il existait dans ce quartier plusieurs maisons habitées par des Européens ainsi que des missions et des chapelles. La partie hors les murs qui sera appelée à un grand développement au xixe siècle est alors constituée de fondouks appartenant aux nations chrétiennes qui commercent avec la Régence de Tunis4. En 1860, nombre de quartiers de la ville et des faubourgs disposent de portes qui sont fermées à la tombée de la nuit et surveillées par des gardes (‘assa). Cependant, c’est à cette date que commence le démantèlement de l’enceinte intérieure de la Médina, délabrée en plusieurs endroits, dont les matériaux sont récupérés pour renforcer l’enceinte extérieure des deux faubourgs. Une circulaire de mars 1864 ordonne à la police de la ville de laisser les portes ouvertes toute la nuit, ce qui entraîne la disparition de la fonction symbolique des remparts. Seuls les souks de la ville continuent à être fermés à la tombée de la nuit.
> Leïla Ammar
Tunis 1860-1880. La naissance de la ville neuve et de nouvelles formes architecturales
Au cours du xixe siècle, Tunis, l’Al-Hadhira des chroniqueurs1, connaît une série de mutations décisives tant sur le plan urbain que sur le plan architectural. Les deux décennies qui précèdent l’établissement du Protectorat français en 1881 voient se développer une ville neuve hors les murs tandis que le paysage urbain des rues de la ville intra-muros se modifie. Avant de nous intéresser à ces transformations, il convient de dresser d’abord à grands traits un portrait de la ville en 1860.
La Médina et ses faubourgs en 1860 Selon un recensement municipal des édifices de la ville en 1860, celle-ci se compose de 9 026 maisons et étages2, 5 514 boutiques, 3 870 entrepôts (makhzin), 688 cafés, 155 moulins, 78 fours, 221 ukala et fondouks, 37 bains, 12 pressoirs, 13 garages (gara’ich), 29 rab’ (petits souks commerçants), 4 fabriques (gamarik wa Dar al-Jild). Au total et sans inclure les madrasas, les zâwiya et les mosquées, la ville compte à ce moment 19 147 constructions3. La ville intra-muros, c’est-à-dire la Médina et ses deux faubourgs (Rbat Bab Souika au nord et Rbat Bab al-Jazira au sud), s’étend sur près de 308 hectares. Les terrains hors les murs situés entre la porte de la Mer (Bab al-Bahr) et le lac al-Buhayra s’étendent quant à eux sur plus de 150 hectares. Dès le milieu du xixe siècle, la vie urbaine et les lieux de sociabilité, traditionnellement orientés vers l’ouest et la haute Médina, s’étaient déplacés vers l’est en direction de la place de la Bourse et des abords de la porte de la Mer intra et extra-muros. L’existence d’un quartier franc dans ce secteur est attestée par les voyageurs dès l’époque hafside mais il semble que l’appellation de « quartier franc » date de la fin du xviiie siècle. Le quartier abritait entre autres le « fondouk des Français », siège de l’administration consulaire, et le « fondouk des négociants ». Outre les fondouks, il existait dans ce quartier plusieurs maisons habitées par des Européens ainsi que des missions et des chapelles. La partie hors les murs qui sera appelée à un grand développement au xixe siècle est alors constituée de fondouks appartenant aux nations chrétiennes qui commercent avec la Régence de Tunis4. En 1860, nombre de quartiers de la ville et des faubourgs disposent de portes qui sont fermées à la tombée de la nuit et surveillées par des gardes (‘assa). Cependant, c’est à cette date que commence le démantèlement de l’enceinte intérieure de la Médina, délabrée en plusieurs endroits, dont les matériaux sont récupérés pour renforcer l’enceinte extérieure des deux faubourgs. Une circulaire de mars 1864 ordonne à la police de la ville de laisser les portes ouvertes toute la nuit, ce qui entraîne la disparition de la fonction symbolique des remparts. Seuls les souks de la ville continuent à être fermés à la tombée de la nuit.
23
22
Place Bab-Souika. à l'arrière-plan, la tour de la poste construite par
Cour d'une ukala, angle des rues Mongi-Slim et Bab el-Khadra.
l'architecte Raphaël Guy en 1912 (aujourd'hui démolie).
Les maisons de rapport, bâties par des propriétaires qui entendent valoriser la parcelle acquise, arborent une façade percée d’ouvertures symétriques avec parfois un balcon en position centrale à l’étage. La facture et la modénature de ces maisons extrêmement simples renvoient au savoir-faire des maçons et artisans italiens qui les ont construites. Ce type architectural né dans les années 1865-1870 ne survivra pas au début du xxe siècle. L’ukala, un type d’habitat économique populaire L’ukala ou wakala, édifice organisé autour d'une cour et destiné à héberger des commerçants étrangers, désigne plutôt, à la fin du xixe siècle à Tunis, une construction abritant des populations rurales arrivées depuis peu en ville. Implantée à proximité du quartier franc et dans les zones contiguës au tissu de la ville ancienne, l’ukala constitue au xixe et au début du xxe siècle une réponse éminente à la nécessité d’un habitat économique pour héberger des populations pauvres, qu’elles soient autochtones ou étrangères. On en trouve plusieurs exemples encore aujourd’hui dans les quartiers de la rue des Maltais, à Qallalin, à Bab Souika, à Hafsia, à Bab el-Khadra. Les ukala des faubourgs et des franges de la Médina s’inspirent directement du schéma du fondouk à cour et à cellules14 et s’inscrivent au sein de petites opérations foncières. Elles sont
constituées d’une cour collective dont les dimensions et la géométrie varient selon celles de la parcelle et peuvent être associées à un petit immeuble de rapport en front de rue. Ces édifices issus de la réunion de deux maisons traditionnelles à cour, de la transformation d’une ancienne grande demeure ou d’un type de bâtiment original associant immeuble et ukala, témoignent d’une architecture aux influences diverses qui a souvent dû composer avec l’existant. Ces ukala « modernes » perdureront jusque dans les années 1930. L’immeuble de rapport, une innovation architecturale Tout autre est l’histoire de l’immeuble de rapport, qui naîtra bien après la maison de rapport et sera promis à une grande longévité. Après l’instauration du Protectorat français, et plus précisément à partir de 1885, la direction des Travaux de la ville projette de réaliser de nouveaux axes de communication et de concevoir un nouveau paysage urbain pour accueillir la « ville européenne ». Autour et dans la ville ancienne, elle intervient pour modifier le tissu dense en élargissant et régularisant des voies existantes. Les nouveaux alignements des voies permettent la construction d’un nouveau front bâti qui réalise la jonction avec le parcellaire ancien du reste de l’îlot. Sur les terrains encore vierges, la ville trace un nouveau réseau et lotit les terrains où les constructions sont encore éparses.
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Place Bab-Souika. à l'arrière-plan, la tour de la poste construite par
Cour d'une ukala, angle des rues Mongi-Slim et Bab el-Khadra.
l'architecte Raphaël Guy en 1912 (aujourd'hui démolie).
Les maisons de rapport, bâties par des propriétaires qui entendent valoriser la parcelle acquise, arborent une façade percée d’ouvertures symétriques avec parfois un balcon en position centrale à l’étage. La facture et la modénature de ces maisons extrêmement simples renvoient au savoir-faire des maçons et artisans italiens qui les ont construites. Ce type architectural né dans les années 1865-1870 ne survivra pas au début du xxe siècle. L’ukala, un type d’habitat économique populaire L’ukala ou wakala, édifice organisé autour d'une cour et destiné à héberger des commerçants étrangers, désigne plutôt, à la fin du xixe siècle à Tunis, une construction abritant des populations rurales arrivées depuis peu en ville. Implantée à proximité du quartier franc et dans les zones contiguës au tissu de la ville ancienne, l’ukala constitue au xixe et au début du xxe siècle une réponse éminente à la nécessité d’un habitat économique pour héberger des populations pauvres, qu’elles soient autochtones ou étrangères. On en trouve plusieurs exemples encore aujourd’hui dans les quartiers de la rue des Maltais, à Qallalin, à Bab Souika, à Hafsia, à Bab el-Khadra. Les ukala des faubourgs et des franges de la Médina s’inspirent directement du schéma du fondouk à cour et à cellules14 et s’inscrivent au sein de petites opérations foncières. Elles sont
constituées d’une cour collective dont les dimensions et la géométrie varient selon celles de la parcelle et peuvent être associées à un petit immeuble de rapport en front de rue. Ces édifices issus de la réunion de deux maisons traditionnelles à cour, de la transformation d’une ancienne grande demeure ou d’un type de bâtiment original associant immeuble et ukala, témoignent d’une architecture aux influences diverses qui a souvent dû composer avec l’existant. Ces ukala « modernes » perdureront jusque dans les années 1930. L’immeuble de rapport, une innovation architecturale Tout autre est l’histoire de l’immeuble de rapport, qui naîtra bien après la maison de rapport et sera promis à une grande longévité. Après l’instauration du Protectorat français, et plus précisément à partir de 1885, la direction des Travaux de la ville projette de réaliser de nouveaux axes de communication et de concevoir un nouveau paysage urbain pour accueillir la « ville européenne ». Autour et dans la ville ancienne, elle intervient pour modifier le tissu dense en élargissant et régularisant des voies existantes. Les nouveaux alignements des voies permettent la construction d’un nouveau front bâti qui réalise la jonction avec le parcellaire ancien du reste de l’îlot. Sur les terrains encore vierges, la ville trace un nouveau réseau et lotit les terrains où les constructions sont encore éparses.
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Vue aérienne de l'avenue Habib-Bourguiba (anciennement promenade
Le carrefour du quartier du Passage à la fin des années 1930.
de la Marine), à l'arrière-plan le lac de Tunis.
Sur la droite la gare du Passage, sur la gauche l'immeuble Enicar.
d’une centaine d’hectares, dans lequel on a fait venir les plus jolies plantes et les plus beaux arbres du sol africain […]. À quelques mètres de l’entrée du parc du Belvédère se trouve le jardin d’essais. On y procède à toutes les tentatives d’acclimatation agricole pouvant offrir un intérêt pratique pour le pays.7 » Un pavillon comprenant une magnifique salle de restaurant et une terrasse permet aux visiteurs de profiter d’une superbe vue sur le golfe de Tunis, Carthage et Hammam Lif. À proximité du parc, on aménage également un quartier résidentiel haut de gamme pouvant fournir aux hauts fonctionnaires de la colonisation et à la haute bourgeoisie tunisoise des terrains suffisamment vastes pour accueillir de confortables demeures8. Un autre « quartier haut et de luxe9 » voit également le jour dans le sud de la ville sur les hauteurs de Montfleury.
effet, que le début d’un long processus de transformation de la construction existante. Les quartiers vont ainsi progressivement se densifier. La villa de Félix Cohen, située au n° 19 de la rue Lafayette (actuelle rue d’Égypte) dans le quartier Lafayette, en est une parfaite illustration. Félix Cohen est l’un des premiers propriétaires de la rue à transformer sa villa en immeuble. En 1909, il entreprend la construction d’une villa agrémentée d’un jardin et de deux écuries. C’est un logement modeste, mais qui laisse supposer un cadre de vie bourgeois en raison de la présence de deux chambres et d’un bureau. En 1913, un premier projet d’agrandissement est déposé afin d’ajouter une chambre et une salle de bains à la villa. Le projet est dirigé par l’architecte Scemama de Gialluly ; l’entrepreneur est un Italien, Francesco Cina. Cependant, la demande d’autorisation de bâtir est refusée. Le propriétaire propose alors un deuxième projet plus ambitieux qui consiste à surélever l’édifice pour obtenir un logement supplémentaire. Néanmoins, l’immeuble construit demeure modeste puisqu’il ne possède qu’un étage. La désignation d’immeuble-maison10 est sans doute la plus appropriée, on ne peut pas parler d’immeuble à usage collectif dans ce cas. Pour financer son projet, Félix Cohen emprunte 3 000 francs à un particulier.
Le processus de densification des quartiers L’occupation du sol de l’ensemble des parcelles des quartiers centraux ne marque pas pour autant la fin de l’activité de construction. L’achèvement d’un chantier n’est, en
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Vue aérienne de l'avenue Habib-Bourguiba (anciennement promenade
Le carrefour du quartier du Passage à la fin des années 1930.
de la Marine), à l'arrière-plan le lac de Tunis.
Sur la droite la gare du Passage, sur la gauche l'immeuble Enicar.
d’une centaine d’hectares, dans lequel on a fait venir les plus jolies plantes et les plus beaux arbres du sol africain […]. À quelques mètres de l’entrée du parc du Belvédère se trouve le jardin d’essais. On y procède à toutes les tentatives d’acclimatation agricole pouvant offrir un intérêt pratique pour le pays.7 » Un pavillon comprenant une magnifique salle de restaurant et une terrasse permet aux visiteurs de profiter d’une superbe vue sur le golfe de Tunis, Carthage et Hammam Lif. À proximité du parc, on aménage également un quartier résidentiel haut de gamme pouvant fournir aux hauts fonctionnaires de la colonisation et à la haute bourgeoisie tunisoise des terrains suffisamment vastes pour accueillir de confortables demeures8. Un autre « quartier haut et de luxe9 » voit également le jour dans le sud de la ville sur les hauteurs de Montfleury.
effet, que le début d’un long processus de transformation de la construction existante. Les quartiers vont ainsi progressivement se densifier. La villa de Félix Cohen, située au n° 19 de la rue Lafayette (actuelle rue d’Égypte) dans le quartier Lafayette, en est une parfaite illustration. Félix Cohen est l’un des premiers propriétaires de la rue à transformer sa villa en immeuble. En 1909, il entreprend la construction d’une villa agrémentée d’un jardin et de deux écuries. C’est un logement modeste, mais qui laisse supposer un cadre de vie bourgeois en raison de la présence de deux chambres et d’un bureau. En 1913, un premier projet d’agrandissement est déposé afin d’ajouter une chambre et une salle de bains à la villa. Le projet est dirigé par l’architecte Scemama de Gialluly ; l’entrepreneur est un Italien, Francesco Cina. Cependant, la demande d’autorisation de bâtir est refusée. Le propriétaire propose alors un deuxième projet plus ambitieux qui consiste à surélever l’édifice pour obtenir un logement supplémentaire. Néanmoins, l’immeuble construit demeure modeste puisqu’il ne possède qu’un étage. La désignation d’immeuble-maison10 est sans doute la plus appropriée, on ne peut pas parler d’immeuble à usage collectif dans ce cas. Pour financer son projet, Félix Cohen emprunte 3 000 francs à un particulier.
Le processus de densification des quartiers L’occupation du sol de l’ensemble des parcelles des quartiers centraux ne marque pas pour autant la fin de l’activité de construction. L’achèvement d’un chantier n’est, en
47
46
Porte de l'école de la rue du Pacha, 1912.
école professionnelle de la Place du Leader, Jason Kyriacopoulos et Bernard Zehrfuss architectes, 1943-1947.
Département d’architecture et d’urbanisme situé à l’étage du Dar el-Bey dans la Casbah. La plupart des membres de l’équipe sont diplômés des Beaux-Arts et appartiennent au « groupe d’Oppède » (Lubéron), un groupement d’artistes et d’écrivains formé durant la guerre. Ensemble, ils vont mettre en œuvre un plan d’aménagement de tout le territoire tunisien. Pendant près de six années, en plus des projets de reconstruction et de développement des infrastructures, ils bâtissent des logements et des équipements publics (écoles, marchés, administrations, hôpitaux, lieux de cultes, etc.) d’une grande qualité constructive et d’une cohésion remarquable. Le corpus de références n’est plus celui de l’architecture arabisante de la fin du xixe siècle. Il se décentre des grands monuments religieux, des palais beylicaux et des intérieurs bourgeois. Ce sont les maisons modestes et les architectures vernaculaires avec leurs principes de composition qui intéressent désormais les architectes de la Reconstruction. Le contexte d’urgence, de crise sociale et artistique, le peu de moyens et le manque de matériaux modernes et surtout la présence d’une main-d’œuvre qualifiée les poussent à rationaliser leurs esquisses et à tenter d’intégrer le savoir-faire local en reconduisant, par exemple, certaines typologies traditionnelles.
L’intérêt pour « l’art indigène » est donc bien présent dans l’architecture de la Reconstruction, même s’il est difficile de lui trouver des similarités formelles avec la première architecture arabisante. Bien que la démarche de projet, sensible aux usages et savoirfaire traditionnels, dénote une réelle continuité, le système de pensée est néanmoins inversé. Les « arabisants » tentent d’assurer l’assimilation de la culture architecturale et des coutumes tunisiennes dans l’architecture moderne. Ils injectent des attributs de l’arabisance issus de l’observation du patrimoine traditionnel dans des édifices modernes. Les architectes des années 1940 partent, quant à eux, d’une vision de la modernité qui allie recherche de pureté, de vérité et de simplicité pour exploiter des données de la tradition. Les principes de l’architecture vernaculaire émergent a posteriori dans leurs projets : vérité de la matière, rigueur des volumes. L’intérêt commun pour l’architecture traditionnelle « n’est pas le fruit d’une reconnaissance culturelle réelle, mais plutôt le résultat d’une " coïncidence ", lieu d’un seul et unique filon né du contact entre la tradition méditerranéenne et la modernité du Nord7 ». Soucieux de construire des édifices portant la marque de leur temps, Bernard Zehrfuss, Michel Patout, Jacques Marmey, Jason Kyriakopoulos, Paul Herbé, Jean-Pierre
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Porte de l'école de la rue du Pacha, 1912.
école professionnelle de la Place du Leader, Jason Kyriacopoulos et Bernard Zehrfuss architectes, 1943-1947.
Département d’architecture et d’urbanisme situé à l’étage du Dar el-Bey dans la Casbah. La plupart des membres de l’équipe sont diplômés des Beaux-Arts et appartiennent au « groupe d’Oppède » (Lubéron), un groupement d’artistes et d’écrivains formé durant la guerre. Ensemble, ils vont mettre en œuvre un plan d’aménagement de tout le territoire tunisien. Pendant près de six années, en plus des projets de reconstruction et de développement des infrastructures, ils bâtissent des logements et des équipements publics (écoles, marchés, administrations, hôpitaux, lieux de cultes, etc.) d’une grande qualité constructive et d’une cohésion remarquable. Le corpus de références n’est plus celui de l’architecture arabisante de la fin du xixe siècle. Il se décentre des grands monuments religieux, des palais beylicaux et des intérieurs bourgeois. Ce sont les maisons modestes et les architectures vernaculaires avec leurs principes de composition qui intéressent désormais les architectes de la Reconstruction. Le contexte d’urgence, de crise sociale et artistique, le peu de moyens et le manque de matériaux modernes et surtout la présence d’une main-d’œuvre qualifiée les poussent à rationaliser leurs esquisses et à tenter d’intégrer le savoir-faire local en reconduisant, par exemple, certaines typologies traditionnelles.
L’intérêt pour « l’art indigène » est donc bien présent dans l’architecture de la Reconstruction, même s’il est difficile de lui trouver des similarités formelles avec la première architecture arabisante. Bien que la démarche de projet, sensible aux usages et savoirfaire traditionnels, dénote une réelle continuité, le système de pensée est néanmoins inversé. Les « arabisants » tentent d’assurer l’assimilation de la culture architecturale et des coutumes tunisiennes dans l’architecture moderne. Ils injectent des attributs de l’arabisance issus de l’observation du patrimoine traditionnel dans des édifices modernes. Les architectes des années 1940 partent, quant à eux, d’une vision de la modernité qui allie recherche de pureté, de vérité et de simplicité pour exploiter des données de la tradition. Les principes de l’architecture vernaculaire émergent a posteriori dans leurs projets : vérité de la matière, rigueur des volumes. L’intérêt commun pour l’architecture traditionnelle « n’est pas le fruit d’une reconnaissance culturelle réelle, mais plutôt le résultat d’une " coïncidence ", lieu d’un seul et unique filon né du contact entre la tradition méditerranéenne et la modernité du Nord7 ». Soucieux de construire des édifices portant la marque de leur temps, Bernard Zehrfuss, Michel Patout, Jacques Marmey, Jason Kyriakopoulos, Paul Herbé, Jean-Pierre
> Arabisance
Bab el-Khadra [1]
65
Raphaël Guy, fin du xix siècle e
Art nouveau Éclectisme Art déco Modernisme Lieux de culte Dès la fin du xixe siècle, la plupart des portes et des remparts de la vieille ville ont été rasés. Les démolitions se sont poursuivies après l’Indépendance, en 1956. On lit bien souvent dans la presse que Bab el-Khadra est l’une des rares portes du vieux Tunis qui nous soient parvenues et l’un des témoignages de l’architecture militaire hafside. Il n’en est rien. Bab el-Khadra, ou « porte de la verdure », est un ouvrage colonial, œuvre de l’architecte français Raphaël Guy, qui s’est peut-être inspiré du modèle d’origine. Ce dernier remontait à 1320 et présentait une arche unique. La porte actuelle a été construite à la fin du xixe siècle. Elle se distingue par la présence de deux arches, disposées à angle droit, ce qui a permis d’augmenter le volume des échanges commerciaux et des transports, depuis et vers cet ancien quartier maltais de la Médina. Les deux arches, de grande hauteur, sont constituées de claveaux en pierre calcaire. L’intrados de la plus grande arche est revêtu de pierre de même type. Chacune des deux arches est surmontée d’un chemin de ronde protégé de merlons de pur style
arabisant. Elles sont reliées par un mur de plus de cinq mètres de haut, surmonté d’une bretèche. Cet élément est présent dans plusieurs constructions coloniales, pastiches d’ouvrages défensifs hafsides, dont Tunis garde encore quelques exemples, telle Bab Saadoun. Au pied et en arrièreplan de Bab el-Khadra, à l’intérieur de la ville, se dresse le minaret très sobre de la mosquée Barrak-Jemal, ou « campement des chameaux », dont l’axialité donne aux deux arches et à la muraille une réelle unité. Aujourd’hui Bab el-Khadra est située au centre de l’un des quartiers les plus animés et les plus populaires du faubourg nord. On y trouve une étonnante mixité d’ambiances et de styles architecturaux (le marché, l’ancienne église du Sacré-Cœur transformée en commissariat de police, les écoles modernes, le tramway, les mosquées…). [AZ] BaB el-Khadra, vue depuis la place. Extrait De L'architecture
moderne de style arabe. Bab el-Khadra, détail des merlons de la petite arche.
> Arabisance
Bab el-Khadra [1]
65
Raphaël Guy, fin du xix siècle e
Art nouveau Éclectisme Art déco Modernisme Lieux de culte Dès la fin du xixe siècle, la plupart des portes et des remparts de la vieille ville ont été rasés. Les démolitions se sont poursuivies après l’Indépendance, en 1956. On lit bien souvent dans la presse que Bab el-Khadra est l’une des rares portes du vieux Tunis qui nous soient parvenues et l’un des témoignages de l’architecture militaire hafside. Il n’en est rien. Bab el-Khadra, ou « porte de la verdure », est un ouvrage colonial, œuvre de l’architecte français Raphaël Guy, qui s’est peut-être inspiré du modèle d’origine. Ce dernier remontait à 1320 et présentait une arche unique. La porte actuelle a été construite à la fin du xixe siècle. Elle se distingue par la présence de deux arches, disposées à angle droit, ce qui a permis d’augmenter le volume des échanges commerciaux et des transports, depuis et vers cet ancien quartier maltais de la Médina. Les deux arches, de grande hauteur, sont constituées de claveaux en pierre calcaire. L’intrados de la plus grande arche est revêtu de pierre de même type. Chacune des deux arches est surmontée d’un chemin de ronde protégé de merlons de pur style
arabisant. Elles sont reliées par un mur de plus de cinq mètres de haut, surmonté d’une bretèche. Cet élément est présent dans plusieurs constructions coloniales, pastiches d’ouvrages défensifs hafsides, dont Tunis garde encore quelques exemples, telle Bab Saadoun. Au pied et en arrièreplan de Bab el-Khadra, à l’intérieur de la ville, se dresse le minaret très sobre de la mosquée Barrak-Jemal, ou « campement des chameaux », dont l’axialité donne aux deux arches et à la muraille une réelle unité. Aujourd’hui Bab el-Khadra est située au centre de l’un des quartiers les plus animés et les plus populaires du faubourg nord. On y trouve une étonnante mixité d’ambiances et de styles architecturaux (le marché, l’ancienne église du Sacré-Cœur transformée en commissariat de police, les écoles modernes, le tramway, les mosquées…). [AZ] BaB el-Khadra, vue depuis la place. Extrait De L'architecture
moderne de style arabe. Bab el-Khadra, détail des merlons de la petite arche.
Place Pasteur
70
[4]
71
Institut Pasteur de Tunis Architecte : Raphaël Guy, 1904
L’Institut Pasteur de Tunis était l’un des équipements sanitaires phares de la Tunisie au début du siècle dernier. Conçu en 1893 comme un modeste laboratoire situé au centre-ville, il joua un rôle déterminant dans la recherche scientifique et la lutte contre les maladies infectieuses. C’est Charles Nicolle, prix Nobel de médecine, directeur de l’Institut de 1903 à 1936, qui, en 1904, convainquit la Direction de l’agriculture d’accorder un crédit pour construire un laboratoire plus grand. Il en choisit l’emplacement, dans le quartier dit Jardins d’Essais, à la lisière du parc du Belvédère, et veilla à la construction de l’édifice. Œuvre de Raphaël Guy, l’Institut n’a cessé de s’agrandir jusqu’aux années 1950, à la mesure de sa notoriété et de ses réalisations. À l’origine, le bâtiment accueillait une demi-douzaine d’employés, puis 80 en 1953. De nos jours, il en accueille environ 250. Le programme comprenait un pavillon principal sur deux niveaux, au plan moderne et rationnel, et un sous-sol de 500 m², une vingtaine de laboratoires, une bibliothèque, des écuries, des magasins, des chambres froides et d’autres unités qui feront tripler le budget alloué à l’extension entre 1903 et 1953. Dominant la place Pasteur, les façades du pavillon principal se cachent aujourd’hui derrière une végétation touffue. Elles déclinent des éléments ornementaux issus du vocabulaire traditionnel (motifs géométriques du moucharabieh, arcs outrepassés, céramiques tunisoises pour le kiosque d’accueil, fer forgé ouvragé, etc.). Les éléments qui ornent traditionnellement l’espace intérieur
des constructions de la Médina s’exposent et s’articulent ici, de manière innovante, sur l’extérieur. Le travail des percements, tout en conférant une touche « régionaliste » à l’architecture de l’Institut, ouvre largement l’édifice sur la place. L’Institut, qui était relié à la maison mère de Paris, faisait partie d’un réseau mondial
de 25 instituts. À la veille de l’Indépendance, un projet de décret devait permettre l’extraterritorialité de l’Institut et le rattacher ainsi à l’autorité du gouvernement français. Une campagne dans les journaux arabes et français menée contre cette mesure a conduit au rejet de ce projet par le bey de Tunis. L’Institut
était d’ailleurs intégralement financé par l’État tunisien. Un grand projet de réhabilitation est en cours pour redonner à cet édifice emblématique son lustre d’antan. [AZ]
Portail d’entrée de l’Institut Pasteur.
Place Pasteur
70
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71
Institut Pasteur de Tunis Architecte : Raphaël Guy, 1904
L’Institut Pasteur de Tunis était l’un des équipements sanitaires phares de la Tunisie au début du siècle dernier. Conçu en 1893 comme un modeste laboratoire situé au centre-ville, il joua un rôle déterminant dans la recherche scientifique et la lutte contre les maladies infectieuses. C’est Charles Nicolle, prix Nobel de médecine, directeur de l’Institut de 1903 à 1936, qui, en 1904, convainquit la Direction de l’agriculture d’accorder un crédit pour construire un laboratoire plus grand. Il en choisit l’emplacement, dans le quartier dit Jardins d’Essais, à la lisière du parc du Belvédère, et veilla à la construction de l’édifice. Œuvre de Raphaël Guy, l’Institut n’a cessé de s’agrandir jusqu’aux années 1950, à la mesure de sa notoriété et de ses réalisations. À l’origine, le bâtiment accueillait une demi-douzaine d’employés, puis 80 en 1953. De nos jours, il en accueille environ 250. Le programme comprenait un pavillon principal sur deux niveaux, au plan moderne et rationnel, et un sous-sol de 500 m², une vingtaine de laboratoires, une bibliothèque, des écuries, des magasins, des chambres froides et d’autres unités qui feront tripler le budget alloué à l’extension entre 1903 et 1953. Dominant la place Pasteur, les façades du pavillon principal se cachent aujourd’hui derrière une végétation touffue. Elles déclinent des éléments ornementaux issus du vocabulaire traditionnel (motifs géométriques du moucharabieh, arcs outrepassés, céramiques tunisoises pour le kiosque d’accueil, fer forgé ouvragé, etc.). Les éléments qui ornent traditionnellement l’espace intérieur
des constructions de la Médina s’exposent et s’articulent ici, de manière innovante, sur l’extérieur. Le travail des percements, tout en conférant une touche « régionaliste » à l’architecture de l’Institut, ouvre largement l’édifice sur la place. L’Institut, qui était relié à la maison mère de Paris, faisait partie d’un réseau mondial
de 25 instituts. À la veille de l’Indépendance, un projet de décret devait permettre l’extraterritorialité de l’Institut et le rattacher ainsi à l’autorité du gouvernement français. Une campagne dans les journaux arabes et français menée contre cette mesure a conduit au rejet de ce projet par le bey de Tunis. L’Institut
était d’ailleurs intégralement financé par l’État tunisien. Un grand projet de réhabilitation est en cours pour redonner à cet édifice emblématique son lustre d’antan. [AZ]
Portail d’entrée de l’Institut Pasteur.
88
35, rue Jamal-Abdel-Nasser [17] Maison française Architecte : Henri Piquart, 1907
Cet immeuble baptisé « Maison de France » est daté de 1907. Œuvre de l'architecte français Henri Piquart, il est un des rares exemples d'immeuble de rapport de cette ampleur construit en style néomauresque. L’étude de sa structure en béton armé avait été confiée en 1906 au bureau technique pour la Tunisie de l’entreprise Hennebique. L’immeuble comprend deux corps de bâtiment de quatre étages, un sur rue et un sur cour. Chaque bâtiment compte quatre appartements par étage. La façade sur cour, pourvue de deux colonnes de balcons en fonte, est ornée de carreaux de céramique. Les références à l’art islamique se concentrent sur les baies en forme d’arcs outrepassés et sur les parois des cages d’escalier entièrement revêtues de carreaux de céramique. L’accès au bâtiment
en fond de parcelle se fait au travers d’un large passage ouvert, rythmé par une file de colonnes surmontées d'arcs outrepassés. Les grilles de l'entrée sont de bels exemples de ferronnerie en style arabisant. [IV]
21, avenue de Carthage
Immeuble de rapport [18] Architecte non identifié, 1912
Édifié en 1912 le long de l’avenue principale de la Petite Sicile, l’immeuble s’inscrit dans la continuité de la rue par son gabarit et se démarque par son décor de façade. Concentré sur l’étage de couronnement, celui-ci emprunte au vocabulaire arabisant merlons, ouvrages fins de menuiserie, moulures et panneaux
4, rue Mustapha-Mbarek
Immeuble de rapport [19] Architecte : attribué à Jean-Émile Resplandy, années 1910
Piliers et arcs outrepassés du passage vers la cour.
89
L’immeuble présente sur deux étages une longue façade lisse couronnée d’une frise en carreaux de céramique. Elle est ponctuée de trois balcons en bois réalisés sur le modèle des moucharabiehs traditionnels. [IV] Détail de la façade, frise de céramique.
en stuc. Le hall d’entrée, qui ouvre sur la place, possède également un plafond décoré d’une frise de stalactites, ou muqarna. Ses parois sont ornées d'un motif d’arcatures aveugles et de carreaux de céramique. [IV] Plafond du hall de l’immeuble.
88
35, rue Jamal-Abdel-Nasser [17] Maison française Architecte : Henri Piquart, 1907
Cet immeuble baptisé « Maison de France » est daté de 1907. Œuvre de l'architecte français Henri Piquart, il est un des rares exemples d'immeuble de rapport de cette ampleur construit en style néomauresque. L’étude de sa structure en béton armé avait été confiée en 1906 au bureau technique pour la Tunisie de l’entreprise Hennebique. L’immeuble comprend deux corps de bâtiment de quatre étages, un sur rue et un sur cour. Chaque bâtiment compte quatre appartements par étage. La façade sur cour, pourvue de deux colonnes de balcons en fonte, est ornée de carreaux de céramique. Les références à l’art islamique se concentrent sur les baies en forme d’arcs outrepassés et sur les parois des cages d’escalier entièrement revêtues de carreaux de céramique. L’accès au bâtiment
en fond de parcelle se fait au travers d’un large passage ouvert, rythmé par une file de colonnes surmontées d'arcs outrepassés. Les grilles de l'entrée sont de bels exemples de ferronnerie en style arabisant. [IV]
21, avenue de Carthage
Immeuble de rapport [18] Architecte non identifié, 1912
Édifié en 1912 le long de l’avenue principale de la Petite Sicile, l’immeuble s’inscrit dans la continuité de la rue par son gabarit et se démarque par son décor de façade. Concentré sur l’étage de couronnement, celui-ci emprunte au vocabulaire arabisant merlons, ouvrages fins de menuiserie, moulures et panneaux
4, rue Mustapha-Mbarek
Immeuble de rapport [19] Architecte : attribué à Jean-Émile Resplandy, années 1910
Piliers et arcs outrepassés du passage vers la cour.
89
L’immeuble présente sur deux étages une longue façade lisse couronnée d’une frise en carreaux de céramique. Elle est ponctuée de trois balcons en bois réalisés sur le modèle des moucharabiehs traditionnels. [IV] Détail de la façade, frise de céramique.
en stuc. Le hall d’entrée, qui ouvre sur la place, possède également un plafond décoré d’une frise de stalactites, ou muqarna. Ses parois sont ornées d'un motif d’arcatures aveugles et de carreaux de céramique. [IV] Plafond du hall de l’immeuble.
94
Rue Alain-Savary [27] Villa Zaouche
95
Architecte : Raphaël Guy
Face à l’Institut Pasteur, la villa construite par Raphaël Guy pour Abdeljelil Zaouche témoigne de l’intérêt que portait l’architecte à l’architecture domestique. Maison de maître et cabinet d’avocat, la villa est composée de deux niveaux entourés d’un verger de proportions moyennes. Aujourd’hui propriété de l’État, elle abrite le siège de l’Union syndicale des travailleurs maghrébins. La villa se distingue par le traitement original de ses façades sud et est. La première, sobre et totalement symétrique, présente un moucharabieh reposant sur un socle tapissé de céramiques que soutiennent des consoles en maçonnerie garnies de motifs en bas relief. Permettant de voir sans être vu, le moucharabieh filtre également la lumière du sud et présente de très fines ouvertures permettant d’apprécier la floraison du jardin. Mais c’est dans la façade latérale, perpendiculaire à la rue Savary, que se niche l’accès de la villa. Un perron de marbre dessert un porche coiffé d’une arcade en fer à cheval dont les claveaux et les piédroits sont en marbre vert et blanc. L’entrée est surmontée de fenêtres géminées éclairant une pièce à l’étage. L’ensemble est délimité par un bandeau fin en maçonnerie formant un cadre où s’incrustent deux colonnettes à chapiteaux composites. À l’angle de l’édifice, une tour carrée s’élève sur toute la hauteur du bâtiment. Elle dessert les différents niveaux jusqu’au toit-terrasse offrant une vue imprenable sur la colline du Belvédère.
Cette tour est couronnée de fenêtres hautes de type barmaqli (bois ajouré de facture tunisoise) rappelant les ouvertures des patios couverts (ou raqba) de la Médina. De petits percements aux niveaux inférieurs participent à l’aération de l’ensemble. Dans la préface de L’architecture moderne de style arabe, les éditeurs de Raphaël Guy soutiennent : « L’exubérante imagination d’un conte des mille et une nuits ne convenait pas à cette renaissance architecturale sous peine de la faire sombrer immédiatement dans l’exposition exotique. Dans la villa construite pour Si Abdeljelil Zaouche, par exemple, l’effet architectural est obtenu par des moyens si simples que nous ne nous trouvons plus là devant un style néo-arabe, comme certains le pourraient croire, mais bien devant du style, tout simplement. » L’intérieur de la villa, largement modifié au gré des réaffectations de l’édifice, témoignait de l’engouement des classes réformatrices dirigeantes du début du siècle pour les modes architecturales européennes, en particulier pour le style orientaliste. Un patio couvert entièrement rehaussé de céramiques jaunes, vertes et bleues, s’ouvre au nord sur un joli verger agrémenté de vasques italianisantes en marbre. Au sud, il communique avec deux grands salons en enfilade et aux plafonds peints (entrelacs stylisés à dominantes ocre et rouge). Des panneaux de céramique entourés d’une jolie frise dite « Patte de Lion » surmontent les portes en menuiseries. Bois
ajouré et peint, plâtre sculpté rehaussé de feuilles d’or, calligraphie reprenant des versets du coran, stalactites en stuc ciselé et céramiques de Chemla se superposent dans le goût des demeures de la Médina. « Des meubles étroits s’esquissèrent dans la pénombre […] Gaudron nota une banquette en bois de teck avec des coussins blancs, un poignard courbe au-dessus d’une aquarelle, des livres de poche poussiéreux, une pile de quarantecinq tours, et dans un cadre ovale en cuir, le portrait d’un barbu coiffé d’une chéchia. » (Coatalem, 1994) [AZ]
Villa Zaouche, intérieur du grand salon. extrait de L'architecture
moderne de style arabe.
94
Rue Alain-Savary [27] Villa Zaouche
95
Architecte : Raphaël Guy
Face à l’Institut Pasteur, la villa construite par Raphaël Guy pour Abdeljelil Zaouche témoigne de l’intérêt que portait l’architecte à l’architecture domestique. Maison de maître et cabinet d’avocat, la villa est composée de deux niveaux entourés d’un verger de proportions moyennes. Aujourd’hui propriété de l’État, elle abrite le siège de l’Union syndicale des travailleurs maghrébins. La villa se distingue par le traitement original de ses façades sud et est. La première, sobre et totalement symétrique, présente un moucharabieh reposant sur un socle tapissé de céramiques que soutiennent des consoles en maçonnerie garnies de motifs en bas relief. Permettant de voir sans être vu, le moucharabieh filtre également la lumière du sud et présente de très fines ouvertures permettant d’apprécier la floraison du jardin. Mais c’est dans la façade latérale, perpendiculaire à la rue Savary, que se niche l’accès de la villa. Un perron de marbre dessert un porche coiffé d’une arcade en fer à cheval dont les claveaux et les piédroits sont en marbre vert et blanc. L’entrée est surmontée de fenêtres géminées éclairant une pièce à l’étage. L’ensemble est délimité par un bandeau fin en maçonnerie formant un cadre où s’incrustent deux colonnettes à chapiteaux composites. À l’angle de l’édifice, une tour carrée s’élève sur toute la hauteur du bâtiment. Elle dessert les différents niveaux jusqu’au toit-terrasse offrant une vue imprenable sur la colline du Belvédère.
Cette tour est couronnée de fenêtres hautes de type barmaqli (bois ajouré de facture tunisoise) rappelant les ouvertures des patios couverts (ou raqba) de la Médina. De petits percements aux niveaux inférieurs participent à l’aération de l’ensemble. Dans la préface de L’architecture moderne de style arabe, les éditeurs de Raphaël Guy soutiennent : « L’exubérante imagination d’un conte des mille et une nuits ne convenait pas à cette renaissance architecturale sous peine de la faire sombrer immédiatement dans l’exposition exotique. Dans la villa construite pour Si Abdeljelil Zaouche, par exemple, l’effet architectural est obtenu par des moyens si simples que nous ne nous trouvons plus là devant un style néo-arabe, comme certains le pourraient croire, mais bien devant du style, tout simplement. » L’intérieur de la villa, largement modifié au gré des réaffectations de l’édifice, témoignait de l’engouement des classes réformatrices dirigeantes du début du siècle pour les modes architecturales européennes, en particulier pour le style orientaliste. Un patio couvert entièrement rehaussé de céramiques jaunes, vertes et bleues, s’ouvre au nord sur un joli verger agrémenté de vasques italianisantes en marbre. Au sud, il communique avec deux grands salons en enfilade et aux plafonds peints (entrelacs stylisés à dominantes ocre et rouge). Des panneaux de céramique entourés d’une jolie frise dite « Patte de Lion » surmontent les portes en menuiseries. Bois
ajouré et peint, plâtre sculpté rehaussé de feuilles d’or, calligraphie reprenant des versets du coran, stalactites en stuc ciselé et céramiques de Chemla se superposent dans le goût des demeures de la Médina. « Des meubles étroits s’esquissèrent dans la pénombre […] Gaudron nota une banquette en bois de teck avec des coussins blancs, un poignard courbe au-dessus d’une aquarelle, des livres de poche poussiéreux, une pile de quarantecinq tours, et dans un cadre ovale en cuir, le portrait d’un barbu coiffé d’une chéchia. » (Coatalem, 1994) [AZ]
Villa Zaouche, intérieur du grand salon. extrait de L'architecture
moderne de style arabe.
Avenue de Paris
118
119
Hôtel Majestic [49] Architecte : Paul-Auguste Baron, 1912
manquent de fondations, menacent littéralement ruines. » L'ingénieur propose de construire un nouveau bâtiment qui, selon lui, serait une réponse plus fonctionnelle que la restauration du pavillon central et la construction de nouvelles annexes. On retiendra pourtant cette dernière solution. La restauration du pavillon central est engagée dès 1889, son plan est modifié, un nouveau salon revêtu de boiseries est aménagé. Le projet de reconstruction des annexes, qui forment deux ailes alignées sur les rues Nasser et de Hollande, est élaboré en 1904 par l'architecte Raphaël Guy. Les deux ailes sont reliées sur l’avenue HabibBourguiba par une élégante grille dont le portail central s’ouvre sur l’ancienne place
de la Résidence (rebaptisée en 1956, place de l’Indépendance), laquelle accueillait jadis le tombeau du soldat inconnu. Les ailes ont été prolongées à plusieurs reprises : celle de la rue de Hollande en 1907, sur un plan de Raphaël Guy, et celle de la rue Nasser en 1953. En 1965, un projet d’extension destiné à abriter les services du consulat, hébergés dans des bâtiments loués avenue de Paris, est confié à l’architecte Aimé Krief (archives CAPA). Il ne sera finalement pas réalisé. Les dernières constructions, situées à l’angle des rues de Hollande et d’Allemagne, datent des années 2000. [IV] Jardin de l’ambassade de France.
Le Majestic hôtel, comme on le nommait jadis, date de 1912. Construit par l'architecte français Paul Baron, il est situé le long de l’avenue de Paris, principale artère nord/sud de la ville européenne, et devient une des adresses recherchées de la capitale de la Régence. Le journal La Tunisie illustrée présente l'hôtel en 1913 comme un « splendide bouquet de pierres sculptées, de marbres précieux, de fers forgés, de cuivres ciselés, de faïences artistiques, [...] un féerique palais des mille et une nuits. » Sa renommée provient aussi des services qu'il offre à sa riche clientèle à l'image de « la superbe voiture automobile qui va aux gares et aux quais chercher les voyageurs ou les y ramener ».
L'hôtel a été transformé à plusieurs reprises. Le jardin d’hiver qui était abrité sous la véranda de la terrasse, ajoutée quelques années après la construction, a été supprimé dans les années 1960. L’intérieur a perdu les décors arabisants du salon oriental. Les dernières restaurations datent de 2008. [IV]
Façade de l’hôtel Majestic sur l’avenue de Paris.
Avenue de Paris
118
119
Hôtel Majestic [49] Architecte : Paul-Auguste Baron, 1912
manquent de fondations, menacent littéralement ruines. » L'ingénieur propose de construire un nouveau bâtiment qui, selon lui, serait une réponse plus fonctionnelle que la restauration du pavillon central et la construction de nouvelles annexes. On retiendra pourtant cette dernière solution. La restauration du pavillon central est engagée dès 1889, son plan est modifié, un nouveau salon revêtu de boiseries est aménagé. Le projet de reconstruction des annexes, qui forment deux ailes alignées sur les rues Nasser et de Hollande, est élaboré en 1904 par l'architecte Raphaël Guy. Les deux ailes sont reliées sur l’avenue HabibBourguiba par une élégante grille dont le portail central s’ouvre sur l’ancienne place
de la Résidence (rebaptisée en 1956, place de l’Indépendance), laquelle accueillait jadis le tombeau du soldat inconnu. Les ailes ont été prolongées à plusieurs reprises : celle de la rue de Hollande en 1907, sur un plan de Raphaël Guy, et celle de la rue Nasser en 1953. En 1965, un projet d’extension destiné à abriter les services du consulat, hébergés dans des bâtiments loués avenue de Paris, est confié à l’architecte Aimé Krief (archives CAPA). Il ne sera finalement pas réalisé. Les dernières constructions, situées à l’angle des rues de Hollande et d’Allemagne, datent des années 2000. [IV] Jardin de l’ambassade de France.
Le Majestic hôtel, comme on le nommait jadis, date de 1912. Construit par l'architecte français Paul Baron, il est situé le long de l’avenue de Paris, principale artère nord/sud de la ville européenne, et devient une des adresses recherchées de la capitale de la Régence. Le journal La Tunisie illustrée présente l'hôtel en 1913 comme un « splendide bouquet de pierres sculptées, de marbres précieux, de fers forgés, de cuivres ciselés, de faïences artistiques, [...] un féerique palais des mille et une nuits. » Sa renommée provient aussi des services qu'il offre à sa riche clientèle à l'image de « la superbe voiture automobile qui va aux gares et aux quais chercher les voyageurs ou les y ramener ».
L'hôtel a été transformé à plusieurs reprises. Le jardin d’hiver qui était abrité sous la véranda de la terrasse, ajoutée quelques années après la construction, a été supprimé dans les années 1960. L’intérieur a perdu les décors arabisants du salon oriental. Les dernières restaurations datent de 2008. [IV]
Façade de l’hôtel Majestic sur l’avenue de Paris.
120
61, rue Farhat-Hached, 18 bis, rue Ibn-Khaldoun [50] Immeuble de rapport
121
Architecte : Salvatore Desiato, 1934
Cet immeuble d’habitation conçu par l’architecte Salvatore Desiato, qui fut l’un des plus grands représentants de l’Art nouveau à Tunis, se caractérise par son ornementation riche et abondante qui emprunte à la fois aux styles néoclassique et Art nouveau. Le décor en béton moulé se développe sur toutes les surfaces planes de la façade et vient aussi souligner chaque élément d’architecture (console de balcon, corniche, baie). Cette décoration surabondante, à la fois caricaturale et ostentatoire, traduit les ambitions du propriétaire qui souhaitait sans doute imiter les prestigieuses réalisations européennes (Italie du Nord par exemple) du début du siècle. Le choix est pourtant anachronique, puisque dans les années 1930, ce style éclectique a déjà été abandonné au profit de l’Art déco. [IV]
Détail de la guirlande décorative sur la rue Ibn-Khaldoun.
114-116, rue de Yougoslavie [51] Immeuble Disegni Architecte : Auguste Peters, 1908
Œuvre de l’architecte Auguste Peters, l’immeuble a été réalisé en 1908 pour le compte d'Adolphe Disegni, personnalité incontournable du monde de l’immobilier. À la tête de la Banque foncière et immobilière belgo-tunisienne, Disegni s’était rendu maître en quelques années d’une grande partie des terrains de la partie nord de la ville et avait amassé
une fortune colossale. Impliqué dans des actions de bienfaisance, il œuvrait plus particulièrement en direction de la communauté italienne. Le bâtiment se devait d’être à l’image de son commanditaire. Il se distingue de l’ensemble des immeubles de la rue de Yougoslavie par une façade richement décorée, des moulures à la vénitienne et des encorbellements.
Les solutions architectoniques proposées par Auguste Peters en font l’un des immeubles les plus remarquables de cette partie de la ville. Ce qu'offrent les espaces intérieurs est également surprenant : le hall d’entrée et la cage d’escalier sont pourvus d’arcades qui rappellent celles de la façade, et le motif de la rampe en fer forgé, qui évoque les ailes déployées d’un oiseau, compte parmi les plus originaux de Tunis. On remarquera aussi, dans l’escalier, le revêtement mural de carreaux de faïence biseautés blanc et vert semblable à celui du métro parisien ouvert quelques
années plus tôt, en 1900. D’autres halls d’entrée tunisois seront également pourvus de ces mêmes carreaux. On ne sait, toutefois, s’il s’agit d’une fabrication locale ou bien de carreaux importés de France, de l’entreprise Boulenger ou des faïenceries de Gien, qui détenaient le marché du métro parisien. La façade est protégée depuis 2000. [CG]
Cage d’escalier de l’immeuble Disegni.
120
61, rue Farhat-Hached, 18 bis, rue Ibn-Khaldoun [50] Immeuble de rapport
121
Architecte : Salvatore Desiato, 1934
Cet immeuble d’habitation conçu par l’architecte Salvatore Desiato, qui fut l’un des plus grands représentants de l’Art nouveau à Tunis, se caractérise par son ornementation riche et abondante qui emprunte à la fois aux styles néoclassique et Art nouveau. Le décor en béton moulé se développe sur toutes les surfaces planes de la façade et vient aussi souligner chaque élément d’architecture (console de balcon, corniche, baie). Cette décoration surabondante, à la fois caricaturale et ostentatoire, traduit les ambitions du propriétaire qui souhaitait sans doute imiter les prestigieuses réalisations européennes (Italie du Nord par exemple) du début du siècle. Le choix est pourtant anachronique, puisque dans les années 1930, ce style éclectique a déjà été abandonné au profit de l’Art déco. [IV]
Détail de la guirlande décorative sur la rue Ibn-Khaldoun.
114-116, rue de Yougoslavie [51] Immeuble Disegni Architecte : Auguste Peters, 1908
Œuvre de l’architecte Auguste Peters, l’immeuble a été réalisé en 1908 pour le compte d'Adolphe Disegni, personnalité incontournable du monde de l’immobilier. À la tête de la Banque foncière et immobilière belgo-tunisienne, Disegni s’était rendu maître en quelques années d’une grande partie des terrains de la partie nord de la ville et avait amassé
une fortune colossale. Impliqué dans des actions de bienfaisance, il œuvrait plus particulièrement en direction de la communauté italienne. Le bâtiment se devait d’être à l’image de son commanditaire. Il se distingue de l’ensemble des immeubles de la rue de Yougoslavie par une façade richement décorée, des moulures à la vénitienne et des encorbellements.
Les solutions architectoniques proposées par Auguste Peters en font l’un des immeubles les plus remarquables de cette partie de la ville. Ce qu'offrent les espaces intérieurs est également surprenant : le hall d’entrée et la cage d’escalier sont pourvus d’arcades qui rappellent celles de la façade, et le motif de la rampe en fer forgé, qui évoque les ailes déployées d’un oiseau, compte parmi les plus originaux de Tunis. On remarquera aussi, dans l’escalier, le revêtement mural de carreaux de faïence biseautés blanc et vert semblable à celui du métro parisien ouvert quelques
années plus tôt, en 1900. D’autres halls d’entrée tunisois seront également pourvus de ces mêmes carreaux. On ne sait, toutefois, s’il s’agit d’une fabrication locale ou bien de carreaux importés de France, de l’entreprise Boulenger ou des faïenceries de Gien, qui détenaient le marché du métro parisien. La façade est protégée depuis 2000. [CG]
Cage d’escalier de l’immeuble Disegni.
128
4, avenue de la Liberté, angle avenue de Madrid [58] Immeuble Bismuth Architecte : Auguste Peters, 1909
L’immeuble, commandé en 1909 à l'architecte Auguste Peters, est mitoyen d'un bâtiment réalisé par Paul-Auguste Baron. Les deux immeubles appartenaient aux sieurs Bismuth, propriétaires des deux parcelles situées sur cette partie de l'avenue de la Liberté qui, à l'époque, était baptisée avenue de Paris. Le faux appareil de pierre et les baies de commerce en menuiserie de bois du rez-de-chaussée ont aujourd’hui disparu.
Le décor de façade des étages est en revanche parfaitement conservé. Soulignée par deux rangées de pointes de diamants et deux bandeaux de croisillons, la travée centrale en encorbellement anime la façade et introduit des jeux d’ombres et de lumière. Des colonnes monumentales soutiennent les balcons du troisième étage. Un pan de toiture, couvert de tuiles vertes vernissées, masque un toit-terrasse. L’immeuble abrite deux appartements par étage. La distribution « à l’orientale » des pièces, qui s’articulent autour d’un vaste patio, contraste avec le style éclectique européen des façades. [IV]
façade principale, vue actuelle et dessin signé par l’architecte Auguste Peters.
2, rue Lucie-Faure, angle avenue de Paris Immeuble de rapport [59]
129
Architecte non identifié
Cet ensemble, propriété de la Compagnie d’assurance des mutuelles du Mans, est constitué de deux immeubles, quasiment identiques, séparés par un passage qui s’ouvre sur l’avenue de Paris. Le riche décor des façades est représentatif des compositions éclectiques du début du xxe siècle : baies de l’attique surmontées de frontons monumentaux et précédées de balustres, consoles de balcons aux moulures renouvelées à chaque étage ; guirlandes de feuilles de laurier en chute le long des oriels. L’édifice tire aussi son originalité de son hall d’entrée, situé au 2 de la rue LucieFaure. Celui-ci dessert deux cages d’escalier, décorées de carreaux de céramique bleu et blanc qui se déploient de part et
d’autre d’une petite cour. Outre l’élégance de ses formes courbes, le hall présente un bel ensemble décoratif : les boîtes aux lettres en bois finement sculpté sont insérées dans le lambris de carreaux de céramique aux couleurs chaudes tandis que les décors en stuc des corniches se prolongent sur le plafond. [IV]
Hall de l’immeuble de la rue Lucie-Faure.
128
4, avenue de la Liberté, angle avenue de Madrid [58] Immeuble Bismuth Architecte : Auguste Peters, 1909
L’immeuble, commandé en 1909 à l'architecte Auguste Peters, est mitoyen d'un bâtiment réalisé par Paul-Auguste Baron. Les deux immeubles appartenaient aux sieurs Bismuth, propriétaires des deux parcelles situées sur cette partie de l'avenue de la Liberté qui, à l'époque, était baptisée avenue de Paris. Le faux appareil de pierre et les baies de commerce en menuiserie de bois du rez-de-chaussée ont aujourd’hui disparu.
Le décor de façade des étages est en revanche parfaitement conservé. Soulignée par deux rangées de pointes de diamants et deux bandeaux de croisillons, la travée centrale en encorbellement anime la façade et introduit des jeux d’ombres et de lumière. Des colonnes monumentales soutiennent les balcons du troisième étage. Un pan de toiture, couvert de tuiles vertes vernissées, masque un toit-terrasse. L’immeuble abrite deux appartements par étage. La distribution « à l’orientale » des pièces, qui s’articulent autour d’un vaste patio, contraste avec le style éclectique européen des façades. [IV]
façade principale, vue actuelle et dessin signé par l’architecte Auguste Peters.
2, rue Lucie-Faure, angle avenue de Paris Immeuble de rapport [59]
129
Architecte non identifié
Cet ensemble, propriété de la Compagnie d’assurance des mutuelles du Mans, est constitué de deux immeubles, quasiment identiques, séparés par un passage qui s’ouvre sur l’avenue de Paris. Le riche décor des façades est représentatif des compositions éclectiques du début du xxe siècle : baies de l’attique surmontées de frontons monumentaux et précédées de balustres, consoles de balcons aux moulures renouvelées à chaque étage ; guirlandes de feuilles de laurier en chute le long des oriels. L’édifice tire aussi son originalité de son hall d’entrée, situé au 2 de la rue LucieFaure. Celui-ci dessert deux cages d’escalier, décorées de carreaux de céramique bleu et blanc qui se déploient de part et
d’autre d’une petite cour. Outre l’élégance de ses formes courbes, le hall présente un bel ensemble décoratif : les boîtes aux lettres en bois finement sculpté sont insérées dans le lambris de carreaux de céramique aux couleurs chaudes tandis que les décors en stuc des corniches se prolongent sur le plafond. [IV]
Hall de l’immeuble de la rue Lucie-Faure.
6, rue d’Annaba, 11, rue Mohamed-Ali
150
[80]
Immeuble de rapport des Assurances générales Constructeur : Casaluce, années 1930
L’immeuble, propriété de la compagnie des Assurances générales, a été réalisé par l’entrepreneur-constructeur Casaluce, dont le nom est gravé sur la façade. À l’exemple de la plupart des immeubles de rapport construits à Tunis pour le compte de sociétés d’assurances, il occupe la totalité d’un îlot. Les attributs de l’Art déco se déclinent à toutes les échelles : depuis l’articulation des volumes, le dessin des balcons et des ferronneries, jusqu’à la signalétique qui utilise des caractères typographiques propres à ce style. [IV]
Immeuble des Assurances générales, angle des rues d'Annaba et Mohamed-Ali. Détail de la signalétique en fer forgé.
31, avenue de la Liberté, angle rue Labid [81] Immeuble de rapport Architecte non identifié, années 1930
Surnommé parfois « Petit Colisée » en référence à l’immeuble de l’avenue Habib-Bourguiba, cet immeuble de rapport est un bel exemple du style Art déco de la fin des années 1930. Le décor se concentre sur les garde-corps des balcons et le couronnement de l’angle de l’immeuble, tandis que les façades présentent déjà
un style épuré propre au Mouvement moderne. Les cages d’escalier, dont les revêtements jouent sur la bichromie des marbres blancs et noirs, sont particulièrement élégantes. [IV] Cage d'escalier de l'immeuble du 31, avenue de la Liberté.
151
6, rue d’Annaba, 11, rue Mohamed-Ali
150
[80]
Immeuble de rapport des Assurances générales Constructeur : Casaluce, années 1930
L’immeuble, propriété de la compagnie des Assurances générales, a été réalisé par l’entrepreneur-constructeur Casaluce, dont le nom est gravé sur la façade. À l’exemple de la plupart des immeubles de rapport construits à Tunis pour le compte de sociétés d’assurances, il occupe la totalité d’un îlot. Les attributs de l’Art déco se déclinent à toutes les échelles : depuis l’articulation des volumes, le dessin des balcons et des ferronneries, jusqu’à la signalétique qui utilise des caractères typographiques propres à ce style. [IV]
Immeuble des Assurances générales, angle des rues d'Annaba et Mohamed-Ali. Détail de la signalétique en fer forgé.
31, avenue de la Liberté, angle rue Labid [81] Immeuble de rapport Architecte non identifié, années 1930
Surnommé parfois « Petit Colisée » en référence à l’immeuble de l’avenue Habib-Bourguiba, cet immeuble de rapport est un bel exemple du style Art déco de la fin des années 1930. Le décor se concentre sur les garde-corps des balcons et le couronnement de l’angle de l’immeuble, tandis que les façades présentent déjà
un style épuré propre au Mouvement moderne. Les cages d’escalier, dont les revêtements jouent sur la bichromie des marbres blancs et noirs, sont particulièrement élégantes. [IV] Cage d'escalier de l'immeuble du 31, avenue de la Liberté.
151
1, rue Abou-Dulama
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[110]
Immeuble de rapport Architecte : Vito Silvia, 1937-1938
Dans ce long immeuble à deux blocs d’appartements, Vito Silvia joue encore avec une composition tripartite de la façade principale en privilégiant les lignes verticales sur les travées latérales, et horizontales sur la travée centrale. Les bandeaux, balcons semi-circulaires et pilastres à décrochements donnent un léger relief aux façades qui, par ailleurs, présentent peu d’originalité. L’intérêt de cet immeuble réside avant tout dans la qualité de son hall d’entrée revêtu d’une superbe mosaïque à motif géométrique et à tesselles bleues, ocres et dorées. [IV]
Détail du décor du hall d'entrée du 1, rue Abou-Dulama.
179
1, rue Abou-Dulama
178
[110]
Immeuble de rapport Architecte : Vito Silvia, 1937-1938
Dans ce long immeuble à deux blocs d’appartements, Vito Silvia joue encore avec une composition tripartite de la façade principale en privilégiant les lignes verticales sur les travées latérales, et horizontales sur la travée centrale. Les bandeaux, balcons semi-circulaires et pilastres à décrochements donnent un léger relief aux façades qui, par ailleurs, présentent peu d’originalité. L’intérêt de cet immeuble réside avant tout dans la qualité de son hall d’entrée revêtu d’une superbe mosaïque à motif géométrique et à tesselles bleues, ocres et dorées. [IV]
Détail du décor du hall d'entrée du 1, rue Abou-Dulama.
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133, avenue de la Liberté [120] Maison Architecte : Edmondo Boccara, années 1930
Cette maison, œuvre de l'architecte Edmondo Boccara et de l'entrepreneur Giuseppe Agugliaro dont les noms figurent sur la façade, est l’un des plus beaux exemples de la modernité tunisoise des années 1930. La façade sur rue est constituée d’une loggia à deux étages dont les lignes orthogonales délimitent avec netteté les pleins et les vides. Au rez-de-chaussée, des balustres en forme de fleurs de lotus stylisées, surmontées d’une grille dont le motif s’efface dans l’ombre de la loggia, constituent l’unique concession décorative de la façade. [IV]
Façade du 133, avenue de la Liberté.
147, avenue de la Liberté [121] Villa Architecte non identifié, années 1930
Cette somptueuse villa de maître est un bel exemple d’une architecture offrant une synthèse entre des thèmes récurrents de la tradition Art déco et les acquis de la modernité. Sa modénature, propre au style Art déco, se décline dans les motifs de ferronnerie des balcons et de la grille qui orne la verrière d’entrée. Le thème moderniste s’exprime dans le balcon cintré soutenu par de fins pilotis cylindriques, liaison entre la façade sur l’avenue de la Liberté et celle sur la rue de Jérusalem. La première, en retrait, laisse la place à un jardin et s’inscrit dans l’unité de l’avenue : symétrie et hiérarchie dans le traitement des ouvertures. L’autre façade, à
l’alignement de la rue, affiche de petites ouvertures et se distingue par la grande verrière protégée par une grille de fer forgé qui marque l’entrée principale de la maison. Le hall est caractérisé par une double hauteur et annonce l’escalier majestueux qui mène aux étages. La villa a été restaurée récemment dans le plus grand respect de son architecture originelle, alliant aménagement contemporain et conservation d’éléments singuliers tels que les moulures et les boiseries. [SA]
Façade de la villa sur le jardin.
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133, avenue de la Liberté [120] Maison Architecte : Edmondo Boccara, années 1930
Cette maison, œuvre de l'architecte Edmondo Boccara et de l'entrepreneur Giuseppe Agugliaro dont les noms figurent sur la façade, est l’un des plus beaux exemples de la modernité tunisoise des années 1930. La façade sur rue est constituée d’une loggia à deux étages dont les lignes orthogonales délimitent avec netteté les pleins et les vides. Au rez-de-chaussée, des balustres en forme de fleurs de lotus stylisées, surmontées d’une grille dont le motif s’efface dans l’ombre de la loggia, constituent l’unique concession décorative de la façade. [IV]
Façade du 133, avenue de la Liberté.
147, avenue de la Liberté [121] Villa Architecte non identifié, années 1930
Cette somptueuse villa de maître est un bel exemple d’une architecture offrant une synthèse entre des thèmes récurrents de la tradition Art déco et les acquis de la modernité. Sa modénature, propre au style Art déco, se décline dans les motifs de ferronnerie des balcons et de la grille qui orne la verrière d’entrée. Le thème moderniste s’exprime dans le balcon cintré soutenu par de fins pilotis cylindriques, liaison entre la façade sur l’avenue de la Liberté et celle sur la rue de Jérusalem. La première, en retrait, laisse la place à un jardin et s’inscrit dans l’unité de l’avenue : symétrie et hiérarchie dans le traitement des ouvertures. L’autre façade, à
l’alignement de la rue, affiche de petites ouvertures et se distingue par la grande verrière protégée par une grille de fer forgé qui marque l’entrée principale de la maison. Le hall est caractérisé par une double hauteur et annonce l’escalier majestueux qui mène aux étages. La villa a été restaurée récemment dans le plus grand respect de son architecture originelle, alliant aménagement contemporain et conservation d’éléments singuliers tels que les moulures et les boiseries. [SA]
Façade de la villa sur le jardin.
187
Arabisance
Rue de la Bourse-du-Travail
Art nouveau
Architecte : Levandowski, 1re moitié des années 1950
191
Ancienne Bourse du travail [125]
Éclectisme Art déco
> Modernisme Lieux de culte
L’édifice, rénové entre 2009 et 2010, est situé à l’extrémité de l’ancienne avenue Jules-Ferry, à proximité des entrepôts du port de Tunis réaménagé à la fin de la Seconde Guerre mondiale dans le cadre de la Reconstruction. Ce bâtiment, construit au début des années 1950 par l’architecte Levandowski, était destiné à remplacer une ancienne Bourse du travail datant des années 1920 et située rue al-Jazira. Sa forme circulaire, qui se reflétait jadis dans un bassin situé sur un vaste parvis au sud, ainsi que sa structure en poutres de béton armé rayonnantes l’inscrivent pleinement parmi les icônes architecturales du Tunis des années 1950. La présence de matériaux indigènes et de détails artisanaux, qui caractérise la Vue de l'ancienne bourse du travail DANS LES ANNÉES 1950 ET AUJOURD'HUI.
production de cette période, prend ici la forme d’une fresque qui représente les ouvriers du port, et de panneaux de céramique signés de l’artiste tunisien Abdelaziz Gorgi. La bourse du travail a accueilli, jusque dans les années 1970, la plupart des grands congrès internationaux qui se tenaient à Tunis. [IV]
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Rue de la Bourse-du-Travail
Art nouveau
Architecte : Levandowski, 1re moitié des années 1950
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Ancienne Bourse du travail [125]
Éclectisme Art déco
> Modernisme Lieux de culte
L’édifice, rénové entre 2009 et 2010, est situé à l’extrémité de l’ancienne avenue Jules-Ferry, à proximité des entrepôts du port de Tunis réaménagé à la fin de la Seconde Guerre mondiale dans le cadre de la Reconstruction. Ce bâtiment, construit au début des années 1950 par l’architecte Levandowski, était destiné à remplacer une ancienne Bourse du travail datant des années 1920 et située rue al-Jazira. Sa forme circulaire, qui se reflétait jadis dans un bassin situé sur un vaste parvis au sud, ainsi que sa structure en poutres de béton armé rayonnantes l’inscrivent pleinement parmi les icônes architecturales du Tunis des années 1950. La présence de matériaux indigènes et de détails artisanaux, qui caractérise la Vue de l'ancienne bourse du travail DANS LES ANNÉES 1950 ET AUJOURD'HUI.
production de cette période, prend ici la forme d’une fresque qui représente les ouvriers du port, et de panneaux de céramique signés de l’artiste tunisien Abdelaziz Gorgi. La bourse du travail a accueilli, jusque dans les années 1970, la plupart des grands congrès internationaux qui se tenaient à Tunis. [IV]
Avenue Habib-Bourguiba [126] Hôtel Africa
192
Architectes : Olivier-Clément Cacoub et Jason Kyriacopoulos, 1971
L’hôtel Africa, construit en 1971 par les architectes associés Olivier-Clément Cacoub et Jason Kyriacopoulos, est le premier immeuble de grande hauteur édifié au cœur de Tunis. Construit sur un sol extrêmement meuble, le bâtiment est porté par des pieux de béton qui s’en foncent à 40 m de profondeur. Le bâtiment est conçu selon le modèle du mall américain et rassemble au sein d’un même lieu diverses activités commerciales : un centre commercial, un cinéma, un hôtel de 180 chambres, une salle de congrès, des bureaux, ainsi qu’un restaurant panoramique et une piscine sur la terrasse.
L’édifice est composé de deux bâtiments : un bâtiment sur rue de cinq niveaux en béton armé et à l’arrière, en retrait d’environ 30 m par rapport à la rue, une tour de dixsept niveaux à ossature métallique. Des fontaines du mosaïste Charles Gianferrari décoraient le vaste hall d’entrée. Les revêtements originels intérieurs et extérieurs qui contribuaient à donner à cet ensemble une valeur particulière ont tous été remplacés au cours des derniers travaux de réhabilitation. [IV]
Vue de l'avenue Habib-Bourguiba et de la tour de l'hôtel Africa.
Avenue Mohamed-V Hôtel du Lac [127]
193
Architecte : Raffaele Contigiani, 1973
L’hôtel du Lac était sans doute à l’époque de sa construction l’un des édifices les plus inquiétants du centre-ville de Tunis. L’impression d’équilibre instable que dégage sa volumétrie originale y est pour beaucoup. En effet, le gabarit de l’édifice adopte la forme d’un triangle isocèle d’une hauteur de douze niveaux, posé sur son sommet. Le bâtiment est conçu en 1973 par l’architecte italien Raffaele Contigiani qui reprend le thème de la pyramide inversée qu’il avait déjà exploré en 1954 dans son projet de pavillon italien pour la foire de Zagreb. L’hôtel, d’une capacité de 416 lits, est entièrement climatisé et présente deux façades rideaux composées de menuiseries à châssis fixe qui furent importées d’Autriche. Les façades latérales, bien moins larges que les façades principales, prennent la forme complexe des escaliers de services placés aux extrémités du bâtiment. La structure en béton et acier repose sur des fondations composées de 190 pieux en béton armé de 60 m de profondeur.
Ce volume, qui semble osciller entre le lac et le centre-ville, est une pièce majeure de l’échiquier urbain de Tunis-Centre et en marque sensiblement le paysage. Situé à proximité des grandes banques, à l’intersection des avenues Habib-Bourguiba et Mohamed-V, cet édifice résolument moderniste est, avec l’hôtel El-Hana et l’ancien Abou Nawas-Tunis, l’un des premiers grands hôtels de la Tunisie indépendante. Placé à cinq minutes de la Médina et à dix minutes de l’aéroport de Tunis Carthage, cet ensemble immobilier présente donc une position stratégique et de réels atouts d’exploitation. Or, le bâtiment est à l’image du quartier vétuste qui l’abrite : ravagé par la proximité et les nuisances d’une double bretelle autoroutière et largement décrépi. L’importante capacité d’accueil du bâtiment et son accessibilité exceptionnelle susciteront sans doute bientôt d’importants travaux de réhabilitation. [AZ et MB] Vue de l'hôtel dans les années 1970 et détail d'une des façades latérales.
Avenue Habib-Bourguiba [126] Hôtel Africa
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Architectes : Olivier-Clément Cacoub et Jason Kyriacopoulos, 1971
L’hôtel Africa, construit en 1971 par les architectes associés Olivier-Clément Cacoub et Jason Kyriacopoulos, est le premier immeuble de grande hauteur édifié au cœur de Tunis. Construit sur un sol extrêmement meuble, le bâtiment est porté par des pieux de béton qui s’en foncent à 40 m de profondeur. Le bâtiment est conçu selon le modèle du mall américain et rassemble au sein d’un même lieu diverses activités commerciales : un centre commercial, un cinéma, un hôtel de 180 chambres, une salle de congrès, des bureaux, ainsi qu’un restaurant panoramique et une piscine sur la terrasse.
L’édifice est composé de deux bâtiments : un bâtiment sur rue de cinq niveaux en béton armé et à l’arrière, en retrait d’environ 30 m par rapport à la rue, une tour de dixsept niveaux à ossature métallique. Des fontaines du mosaïste Charles Gianferrari décoraient le vaste hall d’entrée. Les revêtements originels intérieurs et extérieurs qui contribuaient à donner à cet ensemble une valeur particulière ont tous été remplacés au cours des derniers travaux de réhabilitation. [IV]
Vue de l'avenue Habib-Bourguiba et de la tour de l'hôtel Africa.
Avenue Mohamed-V Hôtel du Lac [127]
193
Architecte : Raffaele Contigiani, 1973
L’hôtel du Lac était sans doute à l’époque de sa construction l’un des édifices les plus inquiétants du centre-ville de Tunis. L’impression d’équilibre instable que dégage sa volumétrie originale y est pour beaucoup. En effet, le gabarit de l’édifice adopte la forme d’un triangle isocèle d’une hauteur de douze niveaux, posé sur son sommet. Le bâtiment est conçu en 1973 par l’architecte italien Raffaele Contigiani qui reprend le thème de la pyramide inversée qu’il avait déjà exploré en 1954 dans son projet de pavillon italien pour la foire de Zagreb. L’hôtel, d’une capacité de 416 lits, est entièrement climatisé et présente deux façades rideaux composées de menuiseries à châssis fixe qui furent importées d’Autriche. Les façades latérales, bien moins larges que les façades principales, prennent la forme complexe des escaliers de services placés aux extrémités du bâtiment. La structure en béton et acier repose sur des fondations composées de 190 pieux en béton armé de 60 m de profondeur.
Ce volume, qui semble osciller entre le lac et le centre-ville, est une pièce majeure de l’échiquier urbain de Tunis-Centre et en marque sensiblement le paysage. Situé à proximité des grandes banques, à l’intersection des avenues Habib-Bourguiba et Mohamed-V, cet édifice résolument moderniste est, avec l’hôtel El-Hana et l’ancien Abou Nawas-Tunis, l’un des premiers grands hôtels de la Tunisie indépendante. Placé à cinq minutes de la Médina et à dix minutes de l’aéroport de Tunis Carthage, cet ensemble immobilier présente donc une position stratégique et de réels atouts d’exploitation. Or, le bâtiment est à l’image du quartier vétuste qui l’abrite : ravagé par la proximité et les nuisances d’une double bretelle autoroutière et largement décrépi. L’importante capacité d’accueil du bâtiment et son accessibilité exceptionnelle susciteront sans doute bientôt d’importants travaux de réhabilitation. [AZ et MB] Vue de l'hôtel dans les années 1970 et détail d'une des façades latérales.
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Sous la direction de Juliette Hueber et Claudine Piaton
Photographies Arnaud du Boistesselin Préface Mercedes Volait
ARCHITECTURES 1860-1960
InVisu, laboratoire du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et de l’Institut national d’histoire de l’art (INHA), étudie l’histoire de l’architecture et du patrimoine en Méditerranée aux XIXe et XXe siècles. L’ouvrage a été mené sous la direction scientifique de ses membres Juliette Hueber, ingénieur d’études, et Claudine Piaton, architecte et urbaniste de l’État.
Sous la direction de Juliette Hueber et Claudine Piaton
Auteurs des contributions Leïla Ammar est architecte, historienne. Elle enseigne à l’École nationale d’architecture et d’urbanisme (Tunis). Christophe Giudice est historien, chercheur associé au Centre d’étude des mondes africains (Paris). Ettore Sessa est architecte, enseignant chercheur en histoire de l’architecture (Palerme). Ahmed Zaouche est architecte-urbaniste (Tunis). Photographies Arnaud du Boistesselin, photojournaliste résidant au Caire, a contribué à de nombreux ouvrages sur l’architecture des villes d’Égypte.
TUNIS
En fin d’ouvrage, un répertoire des architectes offre une synthèse inédite de l’état des connaissances actuelles sur ce patrimoine encore à découvrir. Chaque édifice est situé sur un plan de la ville afin de permettre au promeneur d’y accéder aisément.
1960
TUNIS
Depuis la fin du XIXe siècle, l’attention des écrivains, historiens, amateurs d’architecture ou photographes passionnés par Tunis s’est beaucoup portée sur la Médina. Plus récent en revanche est l’intérêt suscité par la ville hors les murs, ou « ville européenne », qui se développe à l’est de la Médina à partir de 1860. C’est à la découverte d’un siècle d’architecture particulièrement fécond que nous invitent les auteurs de Tunis, architectures 18601960. Quelque cent cinquante notices présentent un panorama original de la diversité du patrimoine tunisois et de ses multiples courants stylistiques : Art nouveau, Art déco, éclectisme, style néomauresque, mouvement moderne…
ITEC
0– S 186 TURE
LIBRAIRIE DE L’ARCHITECTURE ET DE LA VILLE
28 € Dépôt légal France : mai 2011 ISBN : 978-2-918371-08-3 (France)
9 782918 371083
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Honoré Clair éditions
11/04/11 15:03