Magazine «environnement» 03/2009 - Déchets: une mine d’or

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Les ressources naturelles en Suisse

environnement

Déchets: une mine d’or

03 09

Vers une économie circulaire > Le bâti regorge de matières premières > La valorisation ménage les ressources > L’utilité des écobilans > Le savoir suisse s’exporte


Sommaire > Dossier Déchets

> Hors dossier

03 Editorial de Gérard Poffet, sous-directeur de l’OFEV

47 A la chasse au moustique tigre

04 Une économie circulaire comme but De la politique des déchets à celle des ressources

Une lutte couronnée de succès au Tessin

50 Cours d’eau naturels Une plus-value pour l’environnement et la population

09 Le tissu bâti en tant que réservoir Un grand potentiel de valorisation

14 Recyclage

53 Hautes-tiges Boire du jus de pomme, c’est soutenir la biodiversité.

Il faut étudier chaque cas.

18 Les UIOM produisent chaleur et courant

56 Des pneus moins bruyants

Une énergie propre à partir de nos ordures

22 La nature ne génère pas de déchets Déchets biogènes: du jetable au précieux

26 Achats durables La Poste montre l’exemple.

30 Ecobilans Des guides pour des produits verts

36 Des coûts d’élimination minimes 30 centimes par jour pour un traitement adéquat

40 Transfert de savoir La Suisse s’implique au niveau mondial.

La nouvelle génération de roues arrive.

> Rubriques 44 46 58 60 61 62 63

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Infos pratiques A part les rubriques, le contenu de ce numéro est également disponible sur Internet: www.environnement-suisse.ch/magazine2009-3 Les articles sont pour la plupart accompagnés d’une liste de liens et de sources bibliographiques.

En couverture Recycler, c’est ménager les ressources. A Emmenbrücke (LU), l’usine de Swiss Steel transforme la ferraille en acier de qualité supérieure.

La rubrique Agenda se trouve sur le site de l’OFEV: www.environnement-suisse.ch/calendrier Elle signale toutes les manifestations de portée suprarégionale concernant l’environnement. L’OFEV sur Internet: www.environnement-suisse.ch

Photo: OFEV/AURA, E. Ammon

> Abonnement gratuit / commandes environnement, Zollikofer SA, service lecteurs, 9001 Saint-Gall tél. 071 272 74 01 / fax 071 272 75 86 umweltabo@bafu.admin.ch www.environnement-suisse.ch/magazine

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> Dans le prochain numéro Le numéro 4/2009 sortira à la fin novembre avec pour thème la politique internationale de l’environnement. Il présentera les objectifs que la Suisse poursuit sur la scène internationale et montrera comment, malgré sa taille modeste, notre pays fait bouger les choses.

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Point de collecte à Lugano. Les collectes sélectives des matériaux valorisables sont une condition essentielle pour un recyclage efficace. Photo: AURA

Sur la bonne voie

En mettant en œuvre toute une série de dispositions

Le passage à une gestion systématique des res­

environnementales à partir du milieu des années 1980,

sources constitue la prochaine étape importante. Elle

la Suisse est parvenue à abandonner la simple mise

ne touche cependant pas seulement les déchets: si l’on

au rebut des déchets au profit de leur valorisation et

compte réduire toujours plus les atteintes écologiques

de leur élimination écologiques. Renoncer à mettre en

engendrées par les gigantesques flux de marchandises,

décharge des déchets non traités a constitué une étape

il ne suffit pas d’apporter des améliorations en fin de

essentielle de ce processus. Il était difficile de trouver

chaîne de production. Les biens et les services doivent

des sites de stockage adaptés dans notre pays densé­

respecter l’environnement et l’équité sociale sur l’en­

ment peuplé. L’entreposage direct des déchets non triés

semble de leur cycle de vie, dans une perspective de

s’étant en outre avéré problématique, les autorités se

développement durable. Cela concerne l’extraction des

sont rapidement tournées vers l’incinération. Grâce au

matières premières, mais aussi leur traitement ainsi que

progrès technique, certains problèmes de jeunesse des

la finition, l’utilisation et l’élimination des produits.

installations – notamment leurs importantes émissions

Cette concentration de l’économie sur les biens les

– ont pu être réglés. Alors que dans d’autres contrées,

moins gourmands en ressources et en énergie doit coïn­

les décharges libéreront encore pendant des décennies

cider, au sein de la population, avec une consommation

des eaux d’infiltration polluées et des gaz nocifs, nos

plus modérée et des modes de vie plus responsables

usines d’incinération éliminent les déchets tout en pro­

tenant également compte des objectifs de durabilité.

duisant – proprement – électricité et chaleur. La moitié de l’énergie utilisée provient de matériaux renouve­ lables qu’on ne saurait valoriser autrement.

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Gérard Poffet, sous-directeur de l’OFEV www.environnement-suisse.ch/magazine2009-3-01

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DE LA POLITIQUE DES DÉCHETS À UNE POLITIQUE DES RESSOURCES

Vers plus de valorisation

En Suisse, l’élimination ne représente plus qu’une part infime des atteintes à l’environnement d’un bien ou d’un service, si l’on considère tout son cycle de vie. Pour améliorer encore les bilans écologiques, il faudrait intervenir davantage au stade de la conception même des produits et promouvoir le recyclage. C’est ce que prône Hans-Peter Fahrni, chef de la division Déchets et matières premières à l’OFEV. environnement: Comment a évolué l’impact écolo­ gique de la gestion des déchets en Suisse depuis l’introduction de la loi sur l’environnement (LPE)?

Hans-Peter Fahrni: Par le passé, les usines d’in­ cinération des ordures ménagères (UIOM), les décharges et parfois même des entreprises de valorisation mal conçues engendraient des émis­ sions considérables, qui polluaient surtout l’at­ mosphère, le sol et les eaux souterraines. Grâce à la LPE, nous avons fait de gros progrès sur tous les fronts, et le traitement des déchets est devenu bien plus propre. Aujourd’hui, les émissions des UIOM modernes n’équivalent le plus souvent qu’à un dixième à peine des valeurs limites de l’ordonnance sur la protection de l’air. Avec les normes techniques, les installations d’élimina­ tion ne causent plus qu’une part infime de la pollution environnementale. Les anciennes décharges n’en constituent pas moins un sérieux motif de préoccupation. Il reste encore nombre de sites contaminés que nous de­ vons assainir, car ils portent gravement atteinte à la qualité des eaux en particulier. Tout le monde a entendu parler du cas de la Sarine, polluée par le PCB qui s’échappe de la décharge de La Pila, près de Hauterive (FR). A cet endroit étaient stockés de vieux condensateurs. A Kölliken (AG) et à Bonfol (JU), on dépense des centaines de millions de francs pour évacuer des décharges de déchets spéciaux et assainir les sites, alors que les déchets incriminés y ont été entreposés en toute légalité il y a trente ans à peine. La protection de l’environnement nous obligera-t-elle dans une trentaine d’années à vider complètement les dé­ charges aujourd’hui en service?

Non! Depuis cette époque, nous avons nettement réduit les risques écologiques. Les analyses préa­ lables des déchets, fondées sur des paramètres chimiques précis, garantissent que les décharges n’accueillent plus de substances toxiques, réac­ tives ou facilement solubles. A l’époque de Bonfol et de Kölliken, les prescriptions de sécurité ré­

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gissant l’emplacement des décharges et la qua­ lité des déchets spéciaux entreposés étaient lacu­ naires. Sur ces sites, ce sont surtout les matières organico-chimiques, tels les solvants épaissis, les résidus de distillation ou les boues de peinture, qui posent problème. Ils contiennent en effet des substances nocives, voire cancérogènes, dont certaines sont persistantes et peuvent se diffu­ ser dans les eaux souterraines. Aujourd’hui, ces déchets sont incinérés, soit dans des UIOM, soit, pour les substances particulièrement toxiques, dans des fours spécifiques à haute température. A 800 °C, toutes les matières organico-chimiques sont détruites et il ne reste que des substances inorganiques inoffensives. Ce pas important, la Suisse l’a également franchi pour les déchets urbains: depuis début 2000, les déchets combustibles ne sont plus ad­ mis en décharge sans traitement préalable. Ils font désormais l’objet d’une valorisation ther­ mique dans les UIOM, et les mâchefers ainsi pro­ duits causent nettement moins de soucis dans une décharge que des ordures mélangées. La technique a aussi progressé au niveau de l’amé­ nagement des sites, maintenant mieux étanchés. Aurons-nous encore besoin de décharges à l’avenir ou parviendrons-nous à tout valoriser?

L’interdiction de mettre en décharge les déchets combustibles et les progrès du recyclage des dé­ chets de chantier ont sensiblement réduit les quantités entreposées. A l’avenir, l’extraction à sec des mâchefers au sortir du four permettra par ailleurs d’en récupérer la fraction métal­ lique. Mais même si nous parvenons à en extraire aussi la fraction minérale, il restera toujours des résidus qu’il faudra bien se résoudre à stocker. Les déchets de chantier contiennent éga­ lement des matières qu’il n’est guère possible de valoriser. Ne résistant pas au gel, les tuiles conviennent ainsi mal à de nouvelles cons­ tructions. Et les éléments en ciment d’amiante doivent tous être éliminés pour éviter que les

environnement 3/09 > Dossier Déchets


encore Hans-Peter Fahrni, chef de la division Déchets et matières premières de l’OFEV, devant le dispositif d’épuration des fumées à l’UIOM de Thoune. De nos jours, les déchets sont valorisés dans des installations ultramodernes efficaces dont l’impact environnemental est restreint. Photo: OFEV / AURA, E. Ammon

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fibres nocives soient réintroduites dans le circuit économique. Bref, le recyclage a ses limites. Les matériaux provenant de l’assainissement des sites contaminés constituent une grande par­ tie des déchets entreposés. Il peut s’agir de terre polluée par du plomb et de l’antimoine, évacuée du pare-balles d’un stand de tir. Certains de ces stands se situent dans une zone de protection des eaux. Même après avoir été traitée, la terre contient encore des résidus de métaux lourds et doit être éliminée dans un endroit où elle ne me­ nacera plus les eaux souterraines. Nous aurons donc toujours besoin de décharges.

cet effondrement sur le recyclage des matériaux valorisables?

En Suisse, plus de la moitié des déchets ména­ gers et une majeure partie des déchets de chan­ tier sont aujourd’hui recyclés. Les raisons de cet effort sont moins économiques qu’écologiques. La production de métal neuf à partir de mine­ rai de fer consomme par exemple beaucoup d’énergie, pollue l’environnement et se déroule parfois dans des conditions sociales douteuses. Les variations journalières des prix des métaux à la bourse ne reflètent qu’insuffisamment ces conditions de production, car les retombées

« Comme nous voulons prendre des décisions écologiquement correctes sans nous faire dicter notre comportement par le marché, nous avons besoin de prescriptions officielles qui garantissent le recyclage même lorsque les prix le rendent peu rentable. » Il y a quelques années, une entreprise hollandaise a excavé la décharge d’Elbisgraben, près de Liestal (BL). Elle en a extrait 108 000 tonnes de mâchefers prove­ nant de l’UIOM de Bâle, qu’elle a traités pour récupérer 4300 tonnes de métaux. Nos décharges sont-elles des mines de matières premières?

C’est peut-être le cas d’anciennes décharges, mais pas des plus récentes, car les métaux sont aujourd’hui systématiquement séparés des mâ­ chefers. Ce ne sont pas les décharges qui contien­ nent les plus grandes réserves de matières pre­ mières, mais les bâtiments, les infrastructures, les entreprises, les machines, les voitures et d’autres biens. Aux Etats-Unis, on estime que la moitié du cuivre exploitable est aujourd’hui em­ ployé dans les infrastructures, c’est-à-dire dans les lignes électriques, le réseau téléphonique, les moteurs, etc. Comment récupérer ces matériaux?

Tant que les infrastructures sont utilisées, les matières premières sont immobilisées. Mais il faut éviter de les gaspiller quand les installations et les produits arrivent en fin de vie. Lorsque l’on démonte des conduites par exemple, les câbles de cuivre ne doivent pas rester dans le sol. On peut aussi très bien récupérer l’acier coulé dans du béton. Pour gérer efficacement ce stock, il im­ porte de connaître les quantités de matières pre­ mières transformées et les procédés nécessaires pour les extraire. Nous devons arrêter de consom­ mer et de jeter, pour nous mettre à recycler. Fin 2008, la crise économique mondiale a fait chuter les prix des matières premières. Quel est l’effet de

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financières des atteintes sont en général repor­ tées sur la collectivité. Comme nous voulons prendre des décisions écologiquement correctes sans nous faire dicter notre comportement par le marché, nous avons besoin de prescriptions officielles pour garantir que ferraille, papier, verre, PET ou piles seront recyclés, même lorsque les prix rendent cette opération peu rentable. Dans quelles conditions la Confédération juge-t-elle le recyclage inutile?

Dans le cas d’un plastique assez coûteux comme le PET, utilisé en grandes quantités et facile à identifier, que l’on peut trier et conditionner à un prix raisonnable, la valorisation matérielle vaut la peine. Cependant, le plastique, surtout celui qu’on trouve dans les poubelles des ménages, est fré­ quemment souillé. De plus, il en existe diffé­ rentes sortes et il est souvent associé à d’autres matières, comme le papier, le carton ou l’alumi­ nium, ce qui accroît grandement le prix du tri et du conditionnement. L’OFEV préfère donc ici une valorisation thermique en UIOM à la collecte sélective. Même en Allemagne, où le plastique est séparé, une grande partie finit en combus­ tible dans les centrales électriques ou les hauts fourneaux. Dans ce pays, les collectes sélectives ont été introduites il y a des années, alors que la plupart des déchets urbains étaient mis en dé­ charge. La Suisse peut fort bien exploiter le pou­ voir calorifique des emballages plastiques dans ses UIOM sans devoir gérer un système onéreux de récupération.

environnement 3/09 > Dossier Déchets


La valorisation thermique revient à perdre des substances précieuses. Depuis qu’ils ne peuvent plus, pour des raisons sanitaires, servir de fumier ou de fourrage, les boues d’épuration et les déchets carnés traités sont incinérés dans des cimenteries, et le phosphore qu’ils contiennent est perdu. Que compte faire la Confédération à ce sujet?

L’efficacité écologique est en amélioration constante. La valorisation matérielle et énergétique des déchets surtout a pris beaucoup d’importance depuis le milieu des années 1980. Alors qu’à l’époque, certains déchets urbains étaient encore mis en décharge non traités, toutes les ordures sont aujourd’hui incinérées en UIOM.

Pourquoi les quantités de déchets continuent-elles de croître?

Les engrais phosphatés aisément exploitables se font plutôt rares et les sites d’extraction contien­ nent des métaux lourds indésirables tels que le cadmium. Pour utiliser ce nutriment sans nuire à la fertilité des sols, il faut conditionner le phos­ phore à grands frais, d’où l’intérêt de gérer cette matière première avec circonspection. A l’avenir, nous voulons pouvoir traiter les déchets riches en phosphore de manière à réduire les risques dus à la maladie de la vache folle et aux micropolluants, sans perdre les nutriments qu’ils contiennent. Il faut pour cela un équipement technique à même de soumettre séparément les résidus contenant des phosphates à des pro­ cédés thermiques, comme les fours à pyrolyse des cimenteries ou les incinérateurs pour boues d’épuration, farines animales et poudre d’os. On obtient ainsi des cendres riches en phosphore qu’il est possible de transformer en engrais. Il s’agit là d’optimisations écologiques que nous ne sommes pas parvenus à mettre au point, faute de temps, au moment où l’utilisation de certains produits secondaires a été interdite. On préconise depuis longtemps de séparer per­ formance économique et utilisation des ressources.

A l’instar des appareils électroniques, la plupart des biens en circulation ne sont pas faits pour durer. En Suisse, la vie d’un téléphone portable ne dépasse pas douze à dix-huit mois, et les gens changent d’ordinateur au bout de quatre ans au plus pour pouvoir utiliser les nouveaux pro­ grammes. L’évolution des écrans, des MP3 et des supports de données numériques montre cepen­ dant aussi que les appareils deviennent de plus en plus légers, consomment moins d’électricité et utilisent beaucoup moins de matériaux. La mi­ niaturisation a du bon, car elle diminue l’impact environnemental, mais elle abaisse aussi les prix, stimulant ainsi la consommation. Le gain d’efficacité écologique est dès lors réduit à néant. Des prescriptions sur les déchets peuvent-elles exercer une influence sur l’utilisation des ressources lors de la production de biens?

Si l’on considère les atteintes qu’un bien ou un service porte à l’environnement tout au long de son cycle de vie, son élimination dans des ins­ tallations modernes n’a plus qu’un effet insigni­ fiant. C’est en général l’extraction des matières premières nécessaires à sa fabrication qui pollue le plus. Leur transformation pose moins de pro­ blèmes. Quant à la phase d’utilisation, elle revêt de l’importance surtout si les produits ont be­ soin d’énergie ou de carburant pour fonctionner. L’optimisation ne vise donc pas uniquement le bout de la chaîne, mais le cycle entier.

ÉVOLUTION DU VOLUME DE DÉCHETS URBAINS ENTRE 1986 ET 2007

volume de déchets (en millions de tonnes)

6

5

4

3

2

1

0 1986

1987

1988 1989 1990

1991 1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004 2005

2006 2007 Source: OFEV

déchets urbains incinérés (partiellement mis en décharge jusqu’en 1999)

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déchets biogènes (déchets verts)

vieux papier

verre

diverses matières recyclées

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L’Etat peut-il prescrire des produits écologiques?

Les dispositions contraignantes et les prescrip­ tions sur les produits ne suffisent pas. La poli­ tique d’acquisition des pouvoirs publics consti­ tue par contre un bon moyen d’action. Avec un marché dont le volume représente plusieurs cen­ taines de milliards d’euros par an, les services de l’Etat peuvent ouvrir la voie à des produits respectueux de l’environnement et des normes sociales. Les modèles de production et de consomma­ tion durables suscitent aussi beaucoup d’intérêt au sein de l’économie. Que ce soit par conviction ou pour soigner leur image, certaines entreprises décident ainsi d’appliquer les principes écolo­ giques et sociaux à leur approvisionnement. Les grands distributeurs avec qui nous sommes en contact jouent ici un rôle décisif. A l’OFEV, nous pensons que l’information des consommateurs et des clients est primordiale. L’acheteur doit pouvoir connaître l’impact des produits offerts et décider en connaissance de cause. D’où l’utilité des étiquettes indiquant la provenance et le mode de transport, de même que des distinctions comme les divers labels bio, le label FSC pour les biens fabriqués avec du bois issu d’une sylviculture durable ou le label Max Havelaar. Il s’agit avant tout d’expliquer et de convaincre.

Quels défis l’Etat devra-t-il relever à l’avenir en matière de réglementation des déchets?

L’élimination des déchets ne doit plus s’orienter en fonction de la méthode la moins chère, sinon nous aurons les mêmes problèmes de pollution que par le passé. Il faut donc maintenir à long terme les normes techniques et organisationnel­ les de haut niveau en vigueur actuellement et assurer que tous les acteurs sont logés à la même enseigne. D’autres optimisations écologiques passent par un accroissement du rendement énergétique des UIOM et une meilleure récupération des ma­ tières premières rares présentes dans les déchets. Si nous voulons atteindre ces objectifs, nous de­ vons concevoir des systèmes de collecte convi­ viaux et veiller à ce que les coûts ne soient pas trop élevés, faute de quoi nous risquons de voir s’épanouir l’élimination illégale, avec son cortège d’effets polluants. Dans bien des cas, une collabo­ ration plus étroite entre les communes pourrait accroître l’efficacité et réduire les frais. Propos recueillis par Beat Jordi www.environnement-suisse.ch/magazine2009-3-02

DÉCHETS STOCKÉS EN DÉCHARGE BIOACTIVE ET EN DÉCHARGE POUR RÉSIDUS STABILISÉS ENTRE 1996 ET 2008

2 500 000

Depuis que le stockage définitif de déchets combustibles a été interdit en 2000, les déchets ménagers ne sont plus mis en décharge, ce qui a nettement réduit le volume des résidus stockés.

2 000 000

déchets stockés (en tonnes)

1 500 000

1 000 000

500 000

0 1996 autres déchets

8

1998

déchets combustibles

2000 mâchefers

2002 résidus

2004

2006

2008 Source: OFEV

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CYCLES DE MATÉRIAUX

Le tissu bâti: un formidable réservoir La construction, l’exploitation et l’élimination des bâtiments accaparent plus de la moitié de l’énergie consommée en Suisse. Notre tissu bâti représente en outre notre plus grand réservoir de matières premières, une richesse pourtant trop peu exploitée jusqu’à présent. Mais il ne suffit pas de recycler les matériaux pour se prévaloir d’une architecture durable. Depuis 2004, le nouvel emblème architectural de Neuchâtel se dresse juste à côté de la gare. Avec son immeuble élancé de verre et d’acier, l’Office fédéral de la statistique (OFS) marque le paysage urbain du pied sud du Jura. Une passerelle relie la tour à un bâtiment administratif oblong qui, achevé dès 1998, a posé de nouveaux jalons dans la construction durable en Suisse. Ouvrage pionnier, il a initié la transformation du quartier de la gare placée sous le nom évocateur d’« Eco-

parc », conforme aux mêmes principes et actuellement en cours d’achèvement. La nouvelle tour de l’OFS a été équipée d’ins­ tallations innovantes permettant de réduire sa consommation à une fraction de l’énergie uti­ lisée par des bâtiments de taille et de vocation similaires. Elle se satisfait d’à peine un cinquième de la valeur moyenne calculée par l’Office fédé­ ral de l’énergie dans une étude de 1999 portant sur les bâtiments de bureaux. Ses nombreuses

ESTIMATION DES FLUX DE MATIÈRES DANS LE BÂTIMENT (2005), sans matériaux d’excavation, en millions de tonnes La gestion ciblée de l’immense réserve de matières premières que représentent les constructions désaffec­ tées (bâtiment et travaux publics) peut contribuer de façon significative à ménager les ressources.

env. 1

bitume 0,3 bois env. 0,5 plastiques env. 0,5

tissu bâti (Suisse) ciment 4,3 plâtre env. 0,3 produits en argile env. 2,5 verre env. 0,1 métaux env. 2

env. 9

dépôt env. 2100 + 60

env. 9

traitement et recyclage

env. 1,5 mise en décharge gravier env. 50

env. 0,5

incinération

Source: OFEV

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qualités lui ont valu d’être le premier bâti­ ment neuf de Suisse à recevoir, en 2006, le label Minergie-ECO qui distingue un mode de construction écologique et sain utilisant rationnellement l’énergie. Lorsqu’il a choisi les matériaux, le bu­ reau Bauart chargé de la planification a fait appel à des ressources renouvelables. L’acier et le verre du côté nord cachent une struc­ ture porteuse en panneaux de bois enrobés de ciment. Cette façade d’une froide élé­ gance est résistante aux intempéries. Elle se compose à 70 % de bois et est isolée par du vieux papier sous la forme d’isofloc. Mais la construction durable va bien audelà du choix délibéré de matériaux renou­ velables ménageant l’environnement. Pour que l’exploitation de la tour se solde par un bilan énergétique favorable, il faut d’abord qu’elle soit bâtie sur un site efficacement desservi par les transports publics, permet­ tant aux 550 personnes travaillant à l’OFS de se passer de leur voiture pour se rendre au travail. Une localisation stratégique. Le quartier modèle Ecoparc occupe un terrain riche d’histoire. Au milieu du XIXe siècle, une imposante terrasse y a été creusée dans le calcaire pour accueillir la future gare de Neuchâtel. Les besoins des CFF en matière de surface ont diminué entre-temps, si bien qu’un terrain à bâtir attrayant, bien des­ servi et donc adapté à une affectation pu­ blique impliquant de nombreuses visites, a été libéré à cet endroit dans les années 1980. « Pour moi, construire dans une optique durable consiste notamment à intégrer un bâtiment dans son environnement de telle façon que sa spécificité et sa genèse restent perceptibles », précise l’architecte Willi Frei, du bureau Bauart. L’entrée, surplombant un grand mur de soutènement, repose sur des piliers, si bien que le regard peut errer à travers la colonnade jusqu’au flanc raide de la pente. « On se rend ainsi compte que ce plateau interrompt la topographie natu­ relle, qu’il est dû à la main de l’homme », note Willi Frei.

Le nouveau bâtiment administratif de l’Office fédéral de la statistique (OFS), à proximité immédiate de la gare de Neuchâtel, passe pour un modèle d’architecture durable. Son site bien desservi par les transports publics, les matériaux de construction choisis, les techniques innovantes garantissant une faible consommation d’énergie visent à minimiser son impact environnemental sur toute sa durée de vie. Photos: OFEV/AURA, E. Ammon

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Déblais recyclés. Robin Quartier, de la section Déchets urbains et déchets de chantier de l’OFEV, pense également que la construction durable commence bien avant le choix des matériaux ou l’élaboration d’une conception architecturale économe d’énergie. « A l’heure actuelle, le manque de place pour éliminer les déblais et les gravats constitue l’un de nos plus grands défis. » Le problème est effectivement de taille: « Une maison individuelle avec cave construite dans une fouille de trois mètres de profondeur produit à elle seule 300 mètres cubes de terre, dont l’évacuation nécessite trente voyages de camions. » Le recyclage des déblais a aussi préoccupé les planificateurs du siège administratif de l’OFS. Ils ont cherché d’emblée à utiliser les

Robin Quartier. Cela concerne bien sûr le sable et le gravier extraits du sol, mais aussi le contenu du tissu bâti. Les routes, les in­ frastructures et les bâtiments forment un vé­ ritable réservoir qui renferme actuellement 2,1 milliards de tonnes de matériaux de construction et ne cesse de croître. L’augmen­ tation, de 60 millions de tonnes par an en moyenne depuis 1990, correspond à huit ton­ nes par habitant, tandis que deux tonnes seu­ lement sont retirées de ce stock chaque année. « Chez nous, le gravier est de loin la matière première la plus exploitée », relève le collabo­ rateur de l’OFEV. On pourrait le remplacer par­ tiellement en concassant des murs en béton. Bien qu’écologiquement pertinente, la réutilisation des gravats n’est pas toujours

Les routes, les infrastructures et les bâtiments forment un véritable réservoir qui renferme actuellement 2,1 milliards de tonnes de matériaux de construction et ne cesse de croître. Depuis 1990, il a augmenté en moyenne de 60 millions de tonnes par an.

débris de roche aux alentours pour éviter de longs transports. « Parmi plusieurs formules étudiées, l’évacuation par camion s’est avérée la plus écologique, car nous avons pu fournir une entreprise travaillant la pierre à proximi­ té », explique Willi Frei. Lorsque les déblais ne se prêtent pas à la préparation de gravier, il faut les utiliser pour aménager le paysage en faisant preuve d’imagination. « Des modèles de terrain bien pensés permettent de créer des espaces pour des biotopes intéressants ou des activités de plein air », estime Robin Quartier. « Une place de jeux ne doit pas forcément être plate. » La ville de Neuchâtel comprend déjà des paysages aménagés avec créativité en exploitant des dé­ blais: les fragments de roche extraits lors de la construction de la gare au XIXe siècle avaient été utilisés comme remblai pour aménager le quartier des Beaux-Arts au bord du lac. Un stock qui augmente. La démolition des bâti­

CONTACT Robin Quartier Section Déchets urbains et déchets de chantier OFEV 031 322 96 38 robin.quartier@bafu.admin.ch

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ments produit également des quantités de matériaux – dix millions de tonnes par an en Suisse. Or les décharges pouvant les accueillir arrivent à leurs limites et il faudrait réserver la capacité restante aux fractions non valori­ sables. « Les matériaux de construction représen­ tent une ressource précieuse, que notre société doit utiliser parcimonieusement », affirme

rentable. « Le gravier est si bon marché que les matériaux recyclés sont malheureusement peu concurrentiels », déplore Robin Quartier. A Neuchâtel, les maîtres d’ouvrage du bâti­ ment administratif de l’OFS ont fait preuve de beaucoup d’ingéniosité pour gérer les déchets de chantier. Au lieu de simplement démolir les anciennes halles des CFF, ils ont soigneu­ sement démantelé les tuiles, les poutres et les profilés métalliques pour les donner gratuite­ ment aux personnes intéressées. Ainsi, 80 % des matériaux produits lors de la démolition ont été réutilisés. Privilégier les solutions rationnelles et inventives.

Pour assurer l’aération naturelle de la nou­ velle construction, les bâtisseurs ont puisé leur inspiration dans l’architecture indienne et pa­ kistanaise, qui a réussi à ventiler des villes en­ tières comme Hyderabad (IND) en aménageant des cheminées d’aération et des atriums. L’air frais entre dans le bâtiment de l’OFS par les vasistas et par des sortes d’éventails placés sur le toit, dont les lamelles s’orientent en fonc­ tion du vent. Puis il est évacué par les corridors et par des puits verticaux: les cours intérieures hautes de quatre étages assurent la circula­ tion de l’air en exploitant l’effet de cheminée. Ainsi, la maison entière est un conduit d’aéra­ tion. En plus de l’aération naturelle, le bureau Bauart a imaginé un système de transfert de

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chaleur: le centre informatique produisant des rejets thermiques est rafraîchi par un courant d’air acheminé ensuite presque sans perte par les corridors pour chauffer des pièces plus froides. « Les couloirs font partie intégrante du système de chauffage. Mais à la différence des conduits d’aération habi­ tuels placés dans les parois, ils sont toujours propres », se plaît à relever Willi Frei. Les architectes ont aussi fait preuve d’imagination pour concevoir l’alimentation en énergie. Un réservoir saisonnier conte­ nant 2400 mètres cubes d’eau est chauffé par 1200 mètres carrés de capteurs solaires montés sur le toit. Cette installation couvre plus de la moitié de la demande en énergie de chauffage. Le commanditaire de ce bâtiment pion­ nier était l’Office fédéral des constructions et de la logistique (OFCL). Il gère les 2700 immeubles civils de la Confédération, dont la valeur de remplacement se monte à cinq milliards de francs. Ses activités dans la construction et la logistique sont guidées par les principes du développement du­ rable. Un groupe spécialisé y élabore des documents aidant les maîtres d’ouvrage, les planificateurs et les architectes à prendre en compte la protection de l’environnement, les besoins de la société et l’efficacité écono­ mique sur toute la durée de vie des construc­ tions. Un cadre agréable. La construction durable

ne s’arrête pas à la fonctionnalité, mais vise surtout à offrir des logements et des bureaux dans lesquels on se sent à l’aise. Le siège de l’OFS répond à cette exigence. Des corridors et des parquets légèrement incurvés tran­ chent avec la froide efficacité technique en évoquant la matière organique, tandis que les couloirs et les atriums transparents inspirent à la fois des sentiments d’ou­ verture et de sécurité. Quant aux visiteurs de la cafétéria, ils ont la vue sur le lac de Neuchâtel. En langage architectural, on parlera d’une séquence de volumes qui s’en­ chaînent harmonieusement grâce aux tran­ sitions assurées par les halls, les escaliers, les ascenseurs et les passerelles. Les personnes travaillant à l’office sont plus pragmatiques: elles évoquent simplement un nouveau bâti­ ment qu’elles ont plaisir à rejoindre chaque matin, stimulées par son atmosphère lumi­ neuse et sereine. Lucienne Rey www.environnement-suisse.ch/magazine2009-3-03

Dossier Déchets > environnement 3/09

Le ballast des CFF

rey. Le réseau des CFF est long de quelque 3000 kilomètres et ses voies renferment plus de dix millions de tonnes de ballast. Comme les pierres s’usent au gré du passage des trains et des travaux d’entre­ tien, elles doivent être remplacées périodiquement. « Seul un ballast anguleux permet aux pierres de s’emboîter en assurant l’élasticité et la stabilité de la voie », explique Hanspeter Graf, de l’unité Achats stratégiques des CFF. Ainsi, les Chemins de fer fédéraux achètent 400 000 tonnes de pierraille par an pour remplacer ou compléter le ballast usé. Lorsqu’une voie est remise à neuf, le ballast est retiré puis criblé sur place sur de longs convois de chantier. Les pierres encore assez grandes et anguleuses sont réintroduites dans la couche neuve. Les pierres trop fines sont reprises par diverses entreprises qui les tami­ sent ou les lavent pour les utiliser dans la fabrication de béton ou de revêtements. Le ballast usé est aussi appliqué de plus en plus souvent comme matériau de fondation dans les transformations de quais ou dans la construction de parois antibruit. En tout, il est recyclé à 80 %. Ce qui ne peut être valorisé, pour cause de pollution, par exemple, est mis en décharge. Les rails usagés, composés d’acier primaire de haute qualité, constituent eux aussi de précieux stocks de matière première. « On peut régénérer une fois les rails en meulant leur surface pour restau­ rer le profil initial », explique Hanspeter Graf. Lorsqu’ils ne satisfont plus à ces exigences, ils sont fondus pour fabriquer des poutres ou des profilés destinés à la construction, ce qui permet d’en valoriser tout l’acier. En 2007, les CFF ont produit 49 000 tonnes de métal usagé pro­ venant de rails, de locomotives et de wagons mis au rebut.

Renouvellement des voies: le ballast et les rails usagés vont être valorisés.

Photo: CFF

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VALORISATION DES MATIÈRES

Recycler, oui – mais pas à n’importe quel prix! Plus de la moitié des déchets urbains suisses sont recyclés. Malgré des taux record, les collectes sélectives pourraient encore être développées en maints endroits. Mais il ne faut pas vouloir recycler à tout prix. Car selon le matériau, l’incinération – soit la valorisation énergétique des déchets – s’avère plus judicieuse qu’un traitement coûteux.

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Chaque habitant de Suisse produit en moyenne 720 kilos de déchets urbains par an. Mais une bonne partie est récupérable. Seuls 49 % sont effectivement incinérés. Le reste – des matériaux réutilisables tels que papier, verre, métaux ou matières organiques – est acheminé vers une filière de valorisation des matières. Le taux de re­ cyclage a constamment augmenté ces dernières décennies, car les collectes sélectives sont aussi rentables du point de vue économique. Dans notre pays pauvre en matières premières pri­ maires, les industries du papier, du verre et de l’acier valorisent systématiquement les matières premières secondaires. Elles sont activement soutenues par la population: alors que dans les années 1980, avant la loi sur la protection de l’environnement, un quart seulement du volume total des déchets était recyclé, la proportion a plus que doublé depuis. « L’augmentation du tri dans les ménages s’explique principalement par la conscience environnementale croissante et COLLECTES SÉLECTIVES DES DÉCHETS MÉNAGERS (2007) vieux papier et carton

1324,27

930

déchets biogènes verre

319,53 107,51

appareils électroniques

47,5

textiles bouteilles en PET

33,88

fer-blanc

13,1

aluminium

6,5 2,35

piles 0

200

400

Quantités, en milliers de tonnes

Valorisation des matières: au sein du groupe Schmolz + Bickenbach, l’usine Swiss Steel d’Emmen­ brücke (LU) transforme la ferraille en produits d’acier de qualité destinés à l’industrie européenne de l’automobile, des machines et des équipements. Photo: OFEV / AURA, E. Ammon

600

800

1000

1200

1400

Source: OFEV

les incitations financières liées au principe de causalité », constate Peter Gerber, de la section Biens de consommation et écobilans à l’OFEV. « Contrairement aux ordures, les bouteilles vides, le vieux papier, l’aluminium, les métaux usagés, les vêtements, les piles ou les appareils élec­ triques défectueux peuvent être éliminés gratui­ tement presque partout. » Le recyclage actuel ne profite pas uniquement aux ménages, mais aussi à l’économie et l’environnement, car l’extraction de matières premières primaires coûte générale­ ment plus cher, pollue davantage et consomme plus d’énergie que le retraitement de ressources utilisées.

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TEA et TAR. Le financement de la collecte et de la

valorisation diffère selon le matériau. Le papier et les déchets verts sont récoltés par les com­ munes, qui les acheminent vers une filière de recyclage. Pour d’autres matériaux réutilisables, il existe des solutions sectorielles, qui confient la valorisation à des organisations privées. C’est notamment le cas des bouteilles en PET, des ca­ nettes en aluminium et des boîtes en fer-blanc, pour lesquelles la Confédération prescrit un taux de recyclage tout en laissant à l’économie le soin de régler le financement des collectes. Comme il n’a pas été possible de trouver une solution satisfaisante dans chaque secteur, la Confédéra­ tion a dû intervenir pour certains matériaux et prescrire leur valorisation ainsi que le principe de la couverture des coûts (voir tableau page 17). Les fonds nécessaires sont généralement pré­ levés dès l’achat des produits et emballages: la taxe d’élimination anticipée (TEA) fondée sur les prescriptions fédérales ou la taxe anticipée de re­ cyclage (TAR) sont des solutions sectorielles qui ont fait leurs preuves. Ajoutées aux recettes de la vente des matériaux, elles permettent de finan­ cer la valorisation des matières récoltées. « Cette solution est conforme au principe de causalité et tient compte de la fluctuation constante des prix des biens recyclés », explique Peter Gerber. En raison de la crise économique et financière, la demande en acier, en papier et en verre a for­ tement baissé, d’où une diminution importante des revenus. En Suisse comme ailleurs, les acié­ ries ont beaucoup réduit leur production durant le dernier trimestre 2008; à l’échelle mondiale, la baisse a été de 40 à 50 %. « Mais grâce à des modèles de financement et de valorisation bien rodés, toutes les collectes sélectives existantes continuent de fonctionner en Suisse », résume Peter Gerber. Le tri de certains produits est également in­ diqué pour extraire des déchets urbains les subs­ tances nocives pour la santé et l’environnement, telles que les piles ou les ampoules à économie d’énergie. Le tri encore perfectible. Des analyses effectuées par l’OFEV montrent que malgré des collectes sélectives souvent exemplaires, beaucoup de déchets récupérables sont encore jetés avec les ordures, surtout dans les communes sans taxe poubelle. Ces matériaux sont perdus pour le re­ cyclage. Les communes concernées génèrent en moyenne 100 kilos d’ordures de plus par habi­ tant et par an que les régions prélevant des taxes selon le principe de causalité. Aujourd’hui, un sac à ordures contient en­ core en moyenne 20 % de papier et de carton ainsi que 27 % de déchets biogènes (cuisine et jar-

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din). Mais tout n’est pas toujours bon à valoriser partout: les emballages en papier souillés ou les mouchoirs en papier doivent être incinérés; en outre, certaines communes n’ont pas de collecte des déchets verts ni de possibilité de compostage, ce qui limite aussi le recyclage.

moindre qualité tels que poteaux ou meubles de jardin, qui font concurrence à des produits natu­ rels dont l’écobilan est nettement plus favorable, comme le bois. Sans parler du problème d’une contamination possible du matériau recyclé par des polluants comme les produits ignifuges.

Et le plastique? La question de savoir s’il vaut la peine d’étendre l’infrastructure de collecte et la valorisation matérielle dans le cas du plastique revient régulièrement. Actuellement, celui-ci représente 15 % des déchets urbains – une pro­ portion considérable. Le large éventail de types de plastique sur le marché entrave cependant le recyclage, car certaines fractions comme le poly­ éthylène, le polypropylène ou le polystyrol de­ vraient être soit collectées séparément soit triées ultérieurement. Cet investissement est d’autant

Peser le pour et le contre. Malgré ces réserves, cer­ taines communes suisses collectent séparément les plastiques des ménages. Faute de disposer d’une installation de tri régionale, la ville de Berne incinère encore provisoirement les déchets collectés et en utilise uniquement l’énergie. La ville de Zoug participe à un essai de retransfor­ mation des matières plastiques en pétrole. Mais l’avantage environnemental par rapport à l’inci­ nération devrait être modeste, car la collecte, le transport et la décomposition consomment beau-

Alors que la collecte d’une tonne de déchets urbains et leur valorisation dans une usine d’incinération des ordures ménagères coûtent à ce jour quelque 280 francs, elles reviennent à 600 francs pour une quantité équivalente de PET. moins rentable que les emballages en plastique sont souvent souillés ou combinés à du papier et de l’aluminium, ce qui complique encore la valo­ risation matérielle. Pour justifier une collecte pu­ blique, il faudrait en outre réunir des quantités importantes des différentes matières plastiques. Le système de récupération bien établi des bouteilles en PET fait exception. Mais il est coû­ teux: alors que la collecte d’une tonne de déchets urbains et leur valorisation dans une usine d’in­ cinération des ordures ménagères (UIOM) coûtent à ce jour quelque 280 francs, elles reviennent à 600 francs pour une quantité équivalente de PET. Ce prix élevé pourrait encore se défendre sous l’angle des grandes quantités de ressources ainsi ménagées. Mais des chiffres en provenance d’Al­ lemagne révèlent que transformer en regranulat une tonne de pots de yaourt frappés d’une taxe d’élimination coûte jusqu’à 4500 francs. Les prix des déchets de plastique, qui ont baissé de moi­ tié en un an, ont rendu ce procédé encore moins rentable. Les 118 kilos de matières plastiques utilisées par habitant en 2007 ne représentent qu’un pour­ centage infime de notre consommation de pé­ trole, tandis que 95 % sont à mettre sur le compte des combustibles et des carburants. Quant aux débouchés du regranulat issu des collectes des ménages, ils sont incertains, car il s’agit souvent moins d’une valorisation matérielle que d’un recyclage régressif. Il en résulte des produits de

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coup d’énergie. La mise en place d’une infrastruc­ ture régionale de valorisation du plastique est-elle judicieuse sur les plans économique et écologique,

COMPOSITION DES ORDURES MÉNAGÈRES (2001/2002)

fraction résiduelle 1,1 % déchets spéciaux 0,2 % objets composites 14 % piles 0,1 % appareils électriques et électroniques 0,6 % emballages composites 4 % autres plastiques 13 %

métaux ferreux 2 % métaux non ferreux 1 % verre 4 % papier (total) 16 %

carton 4 % minéraux 6 %

récipients plastiques 2 % textiles 3 %

produits organiques naturels 2 %

déchets biogènes 27 % Source: OFEV

Une analyse effectuée en 2002 sur les matières contenues dans les sacs à ordures montre que le potentiel de recyclage des déchets urbains n’est pas encore exploité à fond. Les collectes sélectives des déchets biogènes, du papier et du carton, notamment, peuvent encore être renforcées.

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Organisations de collecte et de recyclage, systèmes de financement

Matériau recyclable

Nom

Bref descriptif

Financement de la collecte et traitement des matériaux recyclables

Piles

Organisation d’intérêt pour l’élimination des piles (INOBAT), www.inobat.ch

Organise la collecte et le recyclage des piles et des accumulateurs pour la Confédération, prélève la TEA

TEA entre 5 ct. et 2 fr. 30 pour les piles les plus courantes

Bouteilles en verre

VetroSwiss, www.vetroswiss.ch

Prélève la TEA sur les bouteilles en verre pour la Confédération et la redistribue aux bénéficiaires d’indemnités

TEA de 2 ct. pour 0,09 à 0,33 litre, 4 ct. pour 0,33 à 0,6 litre, 6 ct. pour plus de 0,6 litre

Canettes, barquettes et tubes en alu

IGORA – Coopérative pour le recyclage de l’aluminium, www.igora.ch

Organise la collecte et le traitement des canettes, tubes et barquettes en alu pour la branche (producteurs et commerçants)

TAR de 1 ct. par canette, tube et barquette

Electroménager

Stiftung Entsorgung Schweiz (SENS), www.sens.ch

Organise la collecte et le recyclage de l’électroménager ainsi que des composants électroniques des appareils de bricolage, de jardinage et de loisirs, des jouets, des luminaires et des sources lumineuses pour la branche

TAR de 50 ct. (appareil pesant moins de 5 kg) à 18 fr. (jusqu’à 140 kg) / Réfrigérateurs: de 9 fr. (moins de 5 kg) à 60 fr. (plus de 250 kg)

Bureautique et électronique de loisirs

Association économique suisse de la bureautique, de l’informatique, de la télématique et de l’organisation (SWICO), www.swico.ch

Organise la collecte et le recyclage dans les domaines de la bureautique et de l’électronique de loisirs pour la branche

Jouets électroniques: 50 ct. / TAR de 7 ct. (petits appareils comme iPod) à 20 fr. (grand écran) Autres tarifs pour les entreprises

Boîtes de conserve

Association pour la promotion du recy­ clage des boîtes de conserve en ferblanc (Ferro Recycling), www.ferro.ch

Organise la collecte des boîtes de conserve pour la branche

TAR de 1 ct. (jusqu’à 1,5 litre) ou 2 ct. (gros récipients jusqu’à 5 litres)

Luminaires et sources lumineuses

Fondation suisse pour le recyclage des sources lumineuses et luminaires (SLRS), www.slrs.ch

Prélève la TAR sur les luminaires et les sources lumineuses (tubes fluorescents, ampoules à économie d’énergie) pour la branche, organise la collecte et le recyclage

TAR de 1 à 15 fr. pour les luminaires et de 50 ct. par source lumineuse

Bouteilles en PET

Association PRS PET-Recycling Schweiz, www.prs.ch

Organise la collecte des bouteilles en PET pour la branche des boissons

TAR de 1,8 ct. par bouteille en PET

Textiles

Bureau de coordination des collectes de textiles en Suisse, www.textil­ koordination.ch

Coordonne dans un calendrier les collectes des organisations Contex, Solitex, Texaid et Satex

Revente de textiles usagés

Source: OFEV

TEA: taxe d’élimination anticipée, prescrite par la Confédération TAR: taxe anticipée de recyclage, prélevée sur base volontaire et sur mandat des branches concernées pour qu’elles puissent remplir les obligations de reprise et de valorisation découlant des ordonnances fédérales sur les emballages pour boissons (OEB) et sur la restitution, la reprise et l’élimination des appareils électriques et électroniques (OREA)

alors qu’il existe déjà vingt-neuf UIOM réparties sur le territoire suisse? Ces usines disposent pres­ que toutes d’une très bonne épuration des gaz de combustion et transforment efficacement l’éner­ gie des déchets en chaleur et en électricité. « Comme l’illustre l’exemple du plastique, la valorisation matérielle n’est pas toujours la meilleure solution », insiste Peter Gerber. Il faut donc chaque fois peser le pour et le contre. « Le recyclage est un outil important pour ménager les ressources, mais il doit présenter des avan­ tages au niveau de l’écobilan global et être finan­ cièrement supportable. » C’est pourquoi l’OFEV suit avec intérêt les essais pilotes menés à Berne et à Zoug, sans toutefois vouloir forcer pour l’ins­ tant l’introduction d’un système de collecte à l’échelle nationale. Si les prix du pétrole devaient remonter au ni­ veau record de l’été 2008, cependant, il pourrait valoir la peine d’organiser des collectes régio-

Dossier Déchets > environnement 3/09

nales de plastiques mélangés de bonne qualité en vue de les recycler. Quant aux résidus de plas­ tique issus des exploitations agricoles et indus­ trielles, qui sont pour une bonne part de nature homogène et peu souillés (chutes de découpage, feuilles de balles d’ensilage), ils ne posent pas les mêmes problèmes que les déchets des ménages. Dans ce domaine, la valorisation matérielle est judicieuse et d’ailleurs le plus souvent pratiquée. Au quotidien, dit Peter Gerber, les consomma­ teurs peuvent souvent décider eux-mêmes de ne générer aucun déchet plastique ou de n’en pro­ duire qu’en très petite quantité: « Divers produits de nettoyage et cosmétiques existent sous forme de recharge. Et les cabas solides réutilisables, le panier traditionnel ou un caddie sont préférables aux sacs en plastique jetables. » Pieter Poldervaart www.environnement-suisse.ch/magazine2009-3-04

CONTACT Peter Gerber Section Biens de consommation et écobilans OFEV 031 322 80 57 peter.gerber@bafu.admin.ch

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VALORISATION THERMIQUE

Tridel montre l’exemple

Aujourd’hui, les usines de traitement des déchets sont équipées des technologies les plus modernes dans le but de juguler au maximum les émissions polluantes et de valoriser ce qui peut encore l’être. Elles récupèrent les métaux et produisent de la chaleur ainsi que du courant électrique. Visite de la plus récente de Suisse, Tridel, à Lausanne.

Quand on débouche avec le nouveau métro sur le plateau de La Sallaz, on découvre à sa gauche les imposants bâtiments du centre de traitement des déchets par incinération Tridel, nichés au cœur du vallon du Flon. Il n’y a pas si longtemps, l’im­ plantation d’une entreprise de ce genre en pleine ville aurait rencontré une forte opposition auprès de la population. Mais le temps où l’on montrait du doigt les panaches noirs des usines d’incinéra­ tion des ordures ménagères est révolu. Les UIOM de Suisse ont su s’adapter à la législation et ont fait des efforts considérables en ce qui concerne la protection de l’air. « Un autre pas capital vers une politique des déchets plus écologique a été franchi en 2000 grâce à l’interdiction de la mise en décharge des déchets », explique Michael Hügi, de la section Déchets urbains et déchets de chantier à l’OFEV. « Cette mesure favorise la valorisation thermique des résidus, évite l’infiltration d’eau souillée dans le sol et contribue à la protection du climat, tout en empêchant d’importantes émissions de mé­ thane. » Livraison par train. Entre-temps, les régions de Suisse

produisant un important volume de déchets dis­ posent pratiquement toutes d’un incinérateur, ce qui réduit les coûts de transport ainsi que les émissions de substances nocives dues au trafic. Le Tessin, qui, pour l’heure, fait incinérer ses déchets en Suisse alémanique, va voir tourner le sien à

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Giubiasco dès 2010. Il s’agira de l’ultime installa­ tion dont la construction aura bénéficié en partie de subventions fédérales. Parmi les 29 UIOM en fonction dans notre pays, Tridel est la dernière à avoir été mise en ser­ vice. Depuis janvier 2006, deux fours y brûlent an­ nuellement quelque 160 000 tonnes de déchets ve­ nant de 150 communes vaudoises. Pour limiter les nuisances liées à la circulation des poids lourds, 60 % des détritus arrivent en train par un tunnel long de près de 4 kilomètres passant sous la ville.

Près de 100 000 tonnes d’ordures – soit quelque 60 % des déchets inciné­ rés – sont livrées à l’UIOM de Lausanne en train, par un tunnel souterrain. Cette solution épargne à la population la pollution atmosphérique et sonore que causeraient des transports en camion. Photos: Tridel SA

Quand les chênes veillent. En raison de la situation

de Tridel dans un quartier en pleine expansion des hauts de la capitale vaudoise, on n’a rien lais­ sé au hasard pour réduire et épurer les émissions. Mandatée pour déterminer la hauteur de che­ minée idéale par rapport aux courants, l’EPFL a conclu qu’une cheminée de 80 mètres serait plus appropriée que la taille standard de 60 mètres. Au niveau du lavage des fumées, on a également opté pour les technologies les plus pointues. « Le but initial de Tridel était d’obtenir des valeurs plus faibles de moitié que les limites imposées par l’or­ donnance sur la protection de l’air (OPair). Nous avons largement dépassé cet objectif, puisque ce que rejette la cheminée est inférieur d’environ 85 % à la norme actuelle », se réjouit Stefan Nellen, administrateur délégué de Tridel. Un analyseur de fumées contrôle en permanence la qualité des émissions. « Si des techniques plus performantes

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voient le jour, nous en équiperons nos installa­ tions afin de diminuer encore l’impact environ­ nemental », promet Stefan Nellen. Tridel observe en outre de très près les retom­ bées de l’activité du centre sur une trentaine de chênes poussant dans les parages. L’idée est de récolter les feuilles et de les examiner régulière­ ment sur une plus longue période. Le feuillage du chêne est un excellent bio-indicateur, car il est très absorbant et ne tombe que tard pendant l’hiver. Ce projet se fait en collaboration avec l’usine des Cheneviers à Genève qui poursuit le même type d’expérience dans son périmètre de­ puis 1989. « Grâce aux filtres et autres traitements, les émissions générées par les usines d’incinéra­ tion sont devenues minimes si on les compare à d’autres sources de pollution telles que le tra­ fic, le chauffage ou les industries », note Michael Hügi. Les émanations totales de dioxines des UIOM helvétiques, par exemple, qui dépassaient les 250 grammes en 1980, se situaient autour de 5 grammes en 2005, ce qui représente une baisse de 98 % environ. Des résidus valorisés au maximum. Même si les usines d’incinération modernes parviennent à réduire de plus de 90 % le volume des déchets, à la sortie du four, sur une tonne d’ordures, il sub­ siste au moins 20 % du poids initial, soit environ 200 kilos de mâchefers inorganiques, 20 kilos de cendres volantes et 5 kilos de résidus issus du la­ vage des fumées. Au centre de Tridel, un premier

Par ailleurs, l’usine Tridel suit attentivement les résultats du nouveau procédé d’extraction de mâchefers à sec, à l’essai à la SATOM de Monthey (VS) et en service depuis une année à Hinwil (ZH). Une telle méthode s’avère fort prometteuse, car elle permet d’augmenter de façon importante la quantité de métaux ferreux et non ferreux récu­ pérés et d’en améliorer la qualité. De l’énergie en sus. Une autre particularité de Tridel est la production simultanée de courant élec­ trique et de chaleur grâce à un système de cogé­ nération. La vapeur issue des chaudières à une température de 400 degrés et une pression de 50 bars met en route une impressionnante turbine à condensation et sous-tirage, dont l’alternateur génère le courant consommé par l’usine. Le sur­ plus est injecté dans le réseau des services in­ dustriels. En 2007, Tridel a produit une quantité d’électricité correspondant à la consommation moyenne annuelle de plus de 10 000 maisons individuelles. La vapeur soutirée de la chaudière est envoyée dans des échangeurs qui délivrent de l’eau surchauffée à 175 degrés. Cette dernière est ensuite acheminée par une conduite isolée sou­ terraine à l’usine de Pierre-de-Plan avant d’être distribuée aux immeubles raccordés. 60 mé­ gawatts thermiques sont ainsi à même de chauf­ fer et d’approvisionner en eau chaude sanitaire environ 18 000 personnes. Conformément à la proportion de biomasse dans les déchets (près de 50 %), l’énergie pro­ duite dans les UIOM est considérée comme à

« Grâce aux filtres et autres traitements, les émissions générées par les usines d’incinération sont devenues minimes si on les compare à d’autres sources de pollution telles que le trafic, le chauffage ou les industries. » Michael Hügi, OFEV tri de ces matières permet d’envoyer au recyclage plus de 1000 tonnes de ferraille par an à partir de quelque 30 000 tonnes de mâchefers. Les métaux lourds légèrement volatils comme le zinc et le plomb atterrissent dans les cendres volantes, qui, elles, subissent ensuite un lavage acide par les purges du laveur de fumée. « Nous utilisons l’eau de pluie récoltée sur les toits. Cela permet de mé­ nager une précieuse ressource et de réaliser des économies financières », ajoute Stefan Nellen. Les mâchefers ainsi qu’une partie des cendres lavées sont transportés à la décharge bioactive agréée de Saint-Triphon près d’Ollon (VD) où sont triées les plus petites fractions métalliques. Le solde des résidus, d’une très forte teneur en zinc, est valorisé au Havre par la société CITRON qui a son siège à Zurich.

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moitié renouvelable. Chez Tridel, l’énergie issue des déchets est transformée à 39 % en courant et à 40 % en chauffage. La revalorisation thermique permet à la fois d’économiser des énergies fos­ siles – parmi celles-ci le gaz à effet de serre le plus important, le gaz carbonique (CO2) – et de rationaliser les coûts d’exploitation de l’usine. Pour encore mieux bénéficier des apports de Tridel, Lausanne prévoit d’ailleurs d’augmenter le réseau de chauffage à distance qui lui est lié. Dans le hit-parade de production d’éner­ gie des UIOM helvétiques, Tridel arrive en cin­ quième position avec un rendement total de 79 %. C’est Bâle qui remporte la palme, en raison de son important réseau de chauffage à distance et de l’utilisation de l’énergie par les entreprises pharmaceutiques. « En 2006, les usines suisses de

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PRODUCTION D’ÉNERGIE PAR L’INCINÉRATION DES DÉCHETS

5 chaleur et électricité, en milliers de GWh par an

Les quantités de chaleur et d’électricité issues de la valorisation ther­ mique des déchets ne cessent d’augmenter. Depuis 1996, les UIOM ont, à elles seules, accru leur production d’énergie de 60 %.

4,5 4

UIOM

3,5 3 2,5

cimenteries et chauffages industriels

2 1,5 1 0,5 0 1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006 Source: OFEV

traitement des déchets ont généré ensemble en­ viron 2 % de l’énergie de chauffage et du courant électrique nécessaires au pays », précise Michael Hügi. Visions. Quand on parle d’UIOM, la question de la

CONTACT Michael Hügi Section Déchets urbains et déchets de chantier OFEV 031 322 93 16 michael.huegi@bafu.admin.ch

surcapacité revient régulièrement. Selon Pierre Amman, président de l’Association suisse des exploitants d’installations de traitement des dé­ chets (ASED), ce danger n’existe pas pour l’heure en raison des importations de l’étranger, qui re­ présentent autour de 300 000 tonnes par an, soit quelque 9 % des capacités totales d’incinération du pays. Ces apports de l’extérieur sont surtout dus aux sous-capacités actuelles de l’Allemagne. Il est plus judicieux, au niveau écologique, d’im­ porter les déchets des pays voisins et d’assurer leur valorisation thermique en Suisse que de les mettre en décharge sur place; cela permet en outre d’exploiter pleinement les rendements de nos UIOM. Etant donné que l’Allemagne dispo­ sera dans un proche avenir de suffisamment d’usines d’incinération, ces importations pour­ raient cesser peu à peu. Pierre Amman estime que, d’ici 2015, « la tendance sera à une plus grande concentration des installations, ce qui provoquera probablement la fermeture de quel­ ques lignes d’incinération, voire de petites struc­ tures en Suisse ». Moderne et performante comme elle l’est, Tridel ne paraît pas menacée, d’autant plus que l’usine des Cheneviers planifie la fermeture du plus vieux de ses fours autour de 2010. La philo­ sophie de Tridel est en outre conforme aux objec­ tifs de la Charte du climat créée par les incinéra­ teurs dans le but d’augmenter encore l’efficacité énergétique des UIOM et d’optimiser la récupéra­

Dossier Déchets > environnement 3/09

tion de matières de valeur telles que le fer et les métaux non ferreux. D’entente avec les cimenteries. Les usines d’inci­

nération ne sont pas les seules à valoriser les déchets riches en énergie. Les cimenteries le font également. Dans les dernières années, elles ont brûlé en moyenne environ 250 000 tonnes de combustibles de substitution par an, ce qui correspond à 40 % de leurs besoins en énergie. Quelque 200 000 tonnes de charbon peuvent ainsi être économisées chaque année. Poussées, elles aussi, à réduire leurs émissions de CO2, les cimenteries se montrent de plus en plus intéres­ sées par les solvants, les huiles usées, les pneus, les plastiques, les farines animales ou encore les boues d’épuration séchées. Leurs usines ne de­ vraient toutefois pas entrer en concurrence avec les UIOM, étant donné qu’elles possèdent un ca­ hier des charges bien distinct. Stefan Nellen af­ firme à ce propos: « Il y a des matières spécifiques beaucoup plus appropriées pour les cimenteries que les ordures urbaines, par exemple les dé­ chets liquides, les peintures, les solvants ou en­ core les pneus usagés. Ces matières nécessitent un traitement à très haute température que les UIOM ne sont pas en mesure d’offrir. » Il pourrait néanmoins exister des conflits d’intérêts en ce qui concerne les déchets plastiques. « Pour trou­ ver des solutions satisfaisant les deux parties, il faut que les exploitants d’UIOM et les produc­ teurs de ciment se mettent à la même table », es­ time Stefan Nellen.

Cornélia Mühlberger de Preux www.environnement-suisse.ch/magazine2009-3-05

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DÉCHETS BIOGÈNES

A chaque matériau sa filière

La Suisse produit plus de trois millions de tonnes de déchets verts par an. Résidus de jardin, restes alimentaires, boues d’épuration, copeaux de bois, abats et autres permettent notamment d’obtenir de l’électricité, de la chaleur et des engrais. L’OFEV vise une valorisation optimale.

Installation de méthanisation de Jona (SG). Un camion déverse les invendus du commerce alimentaire: fruits et légumes écrasés, fleurs fanées. Des jardiniers apportent des branches coupées. L’entreprise accepte aussi les restes de la restauration, les rebuts de fabrication vé­ gétaux, les résidus de récolte et autres déchets biogènes. Tous ces éléments sont broyés, criblés et acheminés vers un conteneur fermé, puis stérilisés à une température d’environ 55 °C et méthanisés dans un milieu dépourvu d’oxygène.

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Une partie du biogaz issu de ce processus est transmis à une centrale thermique où il produit de l’électricité et de la chaleur. Le reste est traité pour alimenter le réseau de gaz naturel. Les déchets restent deux ou trois semaines dans le digesteur. Une presse sépare alors les fibres solides et les liquides. Les résidus, secs et liquides, riches en nutriments servent d’engrais pour la culture de légumes et d’autres plantes, bouclant ainsi le cycle des substances nutri­ tives.

environnement 3/09 > Dossier Déchets


Comme le montre cet exemple, les déchets biologiques sont aussi des matières premières permettant d’obtenir de l’énergie, des engrais et d’autres produits. Outre les déchets verts et les restes alimentaires de la restauration et du com­ merce, d’autres déchets biogènes abondants peu­ vent faire l’objet de diverses utilisations, notam­ ment les boues d’épuration, les abats, les résidus de bois et le bois usagé. Optimiser circuits et procédés. Tous les regards sont actuellement tournés vers l’utilisation énergé­ tique de ces déchets, car leur transformation en biogaz est un moyen reconnu pour obtenir davantage d’énergies renouvelables. En dix ans, la production d’électricité, de chaleur et de gaz a été multipliée par six dans les installations de

matières premières à l’OFEV. « Suivant le maté­ riau de départ, les déchets doivent être valorisés de manière à éliminer les polluants éventuels. » C’est pourquoi il est par exemple interdit depuis quelques années d’utiliser les boues d’épuration comme engrais. En outre, il ne faut pas que cer­ tains résidus contenant des substances nocives empêchent la valorisation de grandes quantités de déchets verts non pollués. Ainsi, les balayures de routes n’ont pas leur place dans les installa­ tions de méthanisation et de compostage. Malgré ces précautions, il arrive que la te­ neur en métaux lourds du compost et du diges­ tat – donc des matières fermentées selon l’une ou l’autre méthode – soit encore trop élevée. Les exploitants doivent donc améliorer le contrôle des concentrations et éventuellement refuser

PROCÉDÉS DE COMPOSTAGE ET DE MÉTHANISATION EN SUISSE Evolution des volumes entre 1996 et 2006, en tonnes 1 000 000 900 000 800 000 700 000 600 000 500 000 400 000 300 000 200 000 100 000 0 1996

1998

2000

2002

2004

2006

Source: OFEV

installations de compostage > 1000 t/an

installations de compostage de 100 à 1000 t/an

compostage en bord de champ

méthanisation

AURA

biogaz agricoles et industrielles. Les voitures et les camions fonctionnant au gaz affichent une publicité visible pour les avantages environnementaux de la valorisation des déchets verts. L’OFEV tient à ce que le recyclage des maté­ riaux ne soit pas négligé pour autant. Les nu­ triments contenus dans les déchets biogènes devraient pouvoir retourner à la terre. « Nous voulons toutefois éviter d’aggraver la pollution des sols en cherchant à boucler les cycles », ex­ plique Kaarina Schenk, de la division Déchets et

Dossier Déchets > environnement 3/09

certains déchets. Comme l’attestent des analyses demandées par l’OFEV, compost et digestat con­ tiennent également des hydrocarbures aroma­ tiques polycycliques (HAP). Ces substances toxi­ ques résultant d’un processus de combustion, on ne sait pas comment elles parviennent dans les engrais de recyclage. Actuellement, le traitement et les procédés de valorisation des déchets verts restent large­ ment soumis à des considérations économiques et à des structures anciennes. Il faut désormais

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Valorisation des déchets biogènes (2006)

Valorisation actuelle

Produit

Optimisation nécessaire

Compost; engrais de digestat et de jus de pressage; gaz, électricité, chaleur

Prescriptions applicables aux installations pour améliorer la qualité des produits; garantie du respect de l’environnement; meilleure commerciali­ sation du compost et du digestat

Electricité, chaleur, brique recuite (clinker), cendres de boues d’épuration

Récupération du phosphore

Viande Electricité et chaleur issues du gaz; engrais de digestat et de jus de pressage

Méthanisation généralisée suite à l’interdiction de la valorisation alimentaire (risque d’épidémies); fermentation et hygiénisation optimisées

Déchets verts, 880 000 tonnes Installations de compostage (84 %), de méthanisation (16 %); UIOM

Boues d’épuration, 200 000 tonnes (matière sèche) UIOM, cimenteries, mono-incinération (boues seules) Déchets de la restauration, 300 000 tonnes Aliments pour les porcs (60 %) Méthanisation (40 %)

Déchets d’abattage, 220 000 tonnes Déchets de viande de qualité Incinération de farine animale, poudre d’os Incinération de graisse animale Abats, sang, etc.

Aliments pour animaux domestiques Electricité, chaleur Electricité, chaleur Electricité, gaz, digestat, jus de pressage

Récupération du phosphore Fermentation et hygiénisation optimisées

Résidus de bois, 1 222 000 tonnes Incinération Transformation

Electricité, chaleur Dérivés du bois

Utilisation renforcée de résidus de bois des forêts

Electricité, chaleur Dérivés du bois

Valorisation énergétique renforcée du bois usagé en Suisse

Bois usagé, 470 000 tonnes Incinération Transformation

Source: OFEV

Recourir davantage à des installations de biogaz est judicieux lorsque la production énergétique est complétée par la formation de bons engrais. veiller à choisir pour chaque matériau la filière la plus adaptée. « Une optimisation est nécessaire, notamment du point de vue écologique », constate Kaarina Schenk. Généraliser la méthanisation. Même si la tendance à

la méthanisation est en hausse, les déchets verts des jardins et des entreprises horticoles sont encore envoyés pour la plupart dans des installations de compostage. En 2006, la proportion était de 84 %, selon la statistique suisse des déchets. Recourir davantage à des installations de biogaz est judicieux lorsque la production énergétique est complétée par la formation de bons engrais. Pour améliorer la qualité des engrais, les exploitants doivent optimiser le processus de méthanisation. En outre, une maturation est nécessaire

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pour obtenir un compost satisfaisant à partir du digestat. Sans maturation, le digestat peut être utilisé dans l’agriculture mais ne convient pas pour l’horticulture, comme l’ont montré des tests sur des plantes. C’est pourquoi la société Kompogas à Jona assure une valorisation diffé­ renciée de ses produits finaux: dans un hangar, un immense tas de matières fibreuses riches en nutriments attend les agriculteurs. Ce diges­ tat soumis à une brève maturation constitue un engrais bon marché, tout comme le jus de pressage, lui aussi riche en nutriments, livré aux fermes de la région dans des citernes. Le digestat destiné à l’horticulture, en revanche, est transporté dans une installation de compos­ tage et retraité. Ce produit plus cher sert no­ tamment pour des mélanges de terre.

environnement 3/09 > Dossier Déchets


Adopter les dernières techniques. Des nouveautés techniques telles que le traitement mécanobiologique par voie humide Schubio permettent d’espérer une utilisation encore plus efficace des déchets biogènes. En Suisse, cette technique est employée pour la première fois dans l’instal­ lation de valorisation de Beringen (SH). Selon son inventeur, Reinhard Schu, elle présente plu­ sieurs avantages: le lavage des déchets élimine le sable et les pierres qui pourraient entraver la méthanisation. Seul le liquide est fermenté pour produire du biogaz. Après nettoyage, il sert d’en­ grais, alors que la masse sèche, propre, devient un substitut de la tourbe qui entre par exemple dans la composition du terreau. Reinhard Schu souligne l’intérêt de sa tech­ nique pour les pays du Sud qui ne bénéficient pas de collectes sélectives. Elle permet en effet d’obte­ nir un compost respectant les valeurs indicatives pour les polluants même à partir d’ordures mé­ langées. En Suisse, le compost de déchets urbains n’est plus autorisé car les procédés traditionnels accumulaient trop de substances étrangères in­ désirables. Les nutriments présents dans les res­ tes alimentaires qui finissent dans la poubelle ne peuvent donc pas être récupérés. Une analyse de l’OFEV indique que les déchets biogènes repré­ sentent un bon quart du poids des sacs. Récupérer les substances nutritives. L’installation de Beringen, équipée du traitement mécano­ biologique par voie humide, permet de recycler l’azote des ordures en plusieurs étapes. Il est converti en gaz puis en sulfate d’ammonium lors du traitement des effluents gazeux. Il sera aussi possible désormais de séparer une partie des phosphates contenus dans les eaux usées: une nouvelle technique vise à réutiliser comme engrais cet élément nutritif présent dans les cen­ dres de boues d’épuration (voir aussi ENVIRON­ NEMENT 2/2008, pages 52–55). Pour l’instant, les boues des stations d’épura­ tion (STEP), riches en nutriments, ne se prêtent qu’à une valorisation énergétique, car leur épan­ dage a été interdit en raison de résidus problé­ matiques. Dans les bassins de fermentation des STEP, les boues produisent du biogaz qui fournit de l’électricité, de la chaleur et des carburants. A Berne, les bus fonctionnent avec du gaz condi­ tionné provenant de la STEP de Neubrück. Les boues séchées sont aussi utilisées comme com­ bustible dans les usines d’incinération des or­ dures ménagères (UIOM) et les cimenteries. Un nouveau procédé technique permet de sé­ parer le phosphore des cendres de boues d’épu­ ration. Il nécessite toutefois l’incinération des résidus des STEP dans des fours spéciaux et non plus avec les autres déchets dans les UIOM ou les

Dossier Déchets > environnement 3/09

Utiliser la biomasse en cascade La biomasse telle que le bois ou les produits agricoles peut être destinée à divers usages. Pour unifier les objectifs dans ce domaine, quatre offices fédéraux ont adopté une straté­ gie commune. Elle vise notamment à augmen­ ter la valeur ajoutée par une utilisation en cas­ cade de la biomasse. Il s’agit d’obtenir d’abord des produits de qualité – aliments ou maté­ riaux de construction. Les synergies doivent être exploitées systématiquement. Les sousproduits et déchets de l’industrie alimentaire peuvent par exemple servir à l’alimentation des animaux. Les résidus issus de l’élevage peuvent produire du courant dans des instal­ lations de biogaz et les matériaux solides être utilisés sous forme de digestat comme engrais dans l’agriculture. La chaleur obtenue lors de la production d’électricité permet d’alimenter le processus de fermentation et de fournir cha­ leur industrielle et chauffage aux entreprises.

cimenteries, où le phosphore est définitivement perdu. A l’avenir, cette substance nutritive pré­ cieuse et de plus en plus rare sera aussi prélevée dans la farine animale et la poudre d’os. Alors que ces produits servaient autrefois d’aliments pour animaux, ils sont aujourd’hui principale­ ment brûlés dans des cimenteries pour minimi­ ser le risque de contamination par la maladie de la vache folle. « Cette utilisation n’a cepen­ dant jamais été satisfaisante du point de vue des ressources », déclare Kaarina Schenk. « Nous souhaitons donc remplacer complètement les importations d’engrais minéraux contenant du phosphore par la récupération de cette substance dans les déchets biogènes. » Seuls devraient désormais parvenir dans les mâchefers des UIOM et les décharges les déchets verts qui, pour des raisons de sécurité, peuvent uniquement faire l’objet d’une utilisation ther­ mique. Le bois usagé, par exemple, sera incinéré, selon sa qualité, dans des UIOM ou des centrales thermiques s’il est trop pollué pour être trans­ formé en dérivés du bois. Beatrix Mühlethaler www.environnement-suisse.ch/magazine2009-3-06

CONTACT Kaarina Schenk Division Déchets et matières premières, OFEV 031 324 46 03 kaarina.schenk@bafu.admin.ch

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MARCHÉS PUBLICS

Le géant jaune agit vert

La Poste suisse dépense près de trois milliards de francs par an pour acquérir des biens et des services. Dans l’intérêt du développement durable, elle ne réfléchit pas uniquement en termes économiques, mais aussi selon des critères sociaux et écologiques. Nous avons interviewé Axel Butterweck, responsable des achats du groupe.

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environnement: La Poste est l’une des principales entre­ prises suisses. Utilise-t-elle son pouvoir de marché pour promouvoir les produits durables?

Axel Butterweck: Malgré un volume de commandes de près de 3 milliards de francs par an, la Poste suisse ne dispose que d’un pouvoir de marché limité. Pre­ nons les autobus: nous sommes l’acteur principal en Suisse, mais n’achetons même pas la produc­ tion d’une demi-journée de l’industrie de l’autobus en comparaison mondiale. C’est aussi le cas dans d’autres domaines tels que les technologies de l’information. Bien que la Poste compte régulière­ ment parmi les cinq clients principaux des fournis­ seurs importants, elle n’a contribué en 2008 qu’à moins de 0,5 % du chiffre d’affaires annuel (plus de 60 milliards de dollars) du premier producteur in­ formatique. Notre dominance est donc relative. En matière de normes sociales et environnementales, les grandes entreprises disent clairement devoir suivre les consignes de leur siège central. Nous tentons bien sûr de faire valoir nos propres idées, mais ce n’est pas toujours facile. Quelles sont ces idées?

Axel Butterweck est responsable des achats de la Poste suisse à Berne depuis 2004 et fait partie de la direction élargie du groupe. Il a étudié l’économie d’entreprise à l’Université de Passau (D) et s’est spécialisé dans les achats publics. Depuis le milieu des années 1980, il a travaillé en Allemagne, en France, en Angleterre et en Suisse – entre autres comme directeur des achats du groupe biennois Swatch. A la Poste, les acquisitions de biens et de services sont guidées par des critères écologiques. Les véhicules motorisés choisis pour la distribution du courrier et pour les transports internes à l’entreprise en sont un exemple: ils n’émettent pas de substances polluantes. Photo: OFEV / AURA, E. Ammon

Dossier Déchets > environnement 3/09

Je suis résolument d’avis que nous devons « acheter écologique ». Cela s’applique notamment aux bus et aux camions, où le marché propose actuellement des moteurs consommant 15 % de carburant en moins. Ces dernières années, la Poste a aussi équipé plus de la moitié de ses cars de filtres à particules de suie. Depuis 2006, nous n’achetons plus que des véhicules conformes aux normes d’émissions EEV (Enhanced Environmentally friendly Vehicles), plus strictes que la norme EURO 5 dont l’entrée en vigueur est prévue pour 2009. Nous disposons de plus de 35 voitures hybrides pour les déplacements de service. En outre, nous exploitons l’une des plus grandes flottes suisses de véhicules fonctionnant au gaz naturel et sommes en train d’élargir considéra­ blement notre parc de scooters électriques pour la distribution du courrier. Dans quels domaines la Poste tente-t-elle d’améliorer particulièrement les aspects écologiques?

Grâce à un système de gestion environnementale, nous avons investi, ces dix dernières années, plus de 130 millions de francs dans des centaines de mesures visant à réduire la consommation d’eau, d’énergie et de papier ainsi que la production de déchets. Depuis 2000, la pollution globale causée par la Poste a baissé de 14,6 % et son utilisation d’énergie de 6 %. Malgré des transports de per­ sonnes et de marchandises en hausse de 19 %, nous consommons 6 % de carburant en moins, car nous privilégions le rail, évitons les trajets à vide grâce à une bonne planification et utilisons des systèmes de propulsion modernes. Les nouveaux bâtiments tels que les centres de tri sont construits selon le stan-

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dard Minergie et permettent d’économiser 60 % de l’énergie de chauffage et de refroidissement. Depuis début 2008, l’électricité de la Poste pro­ vient à 100 % de sources renouvelables. En outre, nos propres envois sont climatiquement neutres et nous proposons désormais aussi à nos clients, moyennant un petit supplément, une expédition neutre en CO2 des lettres et colis. Mais nos efforts rencontrent parfois des limites sur le marché. Un exemple: nous avons dû attendre jusqu’en automne 2008 pour pouvoir utiliser les scooters électriques pour la distribution du courrier, ces engins n’étant pas disponibles plus tôt. Quels sont les besoins spécifiques de votre entreprise?

Les facteurs parcourent vingt à trente mètres avant d’éteindre le moteur devant la maison sui­ vante. Ces arrêts et démarrages permanents solli­ citent énormément les véhicules. Après avoir testé une série de scooters au service de distribution, nous avons rencontré au bon moment un parte­ naire idéal, qui a décelé un marché potentiel et s’est déclaré prêt à tenter cette expérience avec nous. Vous avez aussi été responsable des achats dans diverses grandes entreprises. Où est-il plus simple de s’engager en faveur de la durabilité, à la Poste ou dans l’économie privée?

l’ensemble de leur cycle de vie. Je suis convaincu qu’à long terme, les achats durables ne coûtent guère plus à une entreprise. Il faut seulement de l’endurance et de bonnes idées. N’est-ce pas là justement le problème? Les entreprises doivent aussi atteindre des objectifs financiers à court terme!

La stratégie de durabilité est soutenue par tous les membres de la direction; là, j’enfonce des portes ouvertes. Dès que l’on réfléchit à plus long terme, le surcoût en vaut la peine. Nos bus les plus efficaces sont de 15 000 à 20 000 francs plus chers que les autres, mais consomment aussi dix litres de diesel de moins aux cent kilomètres. A raison d’un million de kilomètres environ parcourus au total par bus et d’un prix de 1,5 franc par litre de carburant, nous économisons quelque 150 000 francs par véhicule. Selon le rapport de gestion de la Poste, les déplace­ ments des employés entre leur domicile et leur lieu de travail représentent 11,5 % des atteintes environnementales causées par l’entreprise. Il semble que la concentration des centres de tri n’ait pas un effet favorable sur l’écobilan...

C’est plus simple à la Poste, d’autant plus que le Conseil fédéral s’est clairement exprimé dans ce sens. Il existe donc de nombreuses prescriptions qui soutiennent cette politique, dans le domaine des achats publics aussi. S’agissant des machines à laver et lave-vaisselle, par exemple, les entre­ prises de la Confédération ne peuvent plus acheter que des appareils de la classe énergétique A. Il est donc relativement facile pour nous d’imposer des critères écologiques.

Pour notre entreprise, c’est la meilleure option, sur les plans économique et écologique, si elle veut rester concurrentielle à long terme. Les dé­ placements du personnel sont un thème impor­ tant à la Poste bien qu’ils ne représentent qu’une petite part (3 %) du volume global des transports. Tous les collaborateurs reçoivent un abonnement demi-tarif ou un abonnement général à prix ré­ duit. Les places de parc de l’entreprise sont désor­ mais payantes. De plus, la Poste a lancé et soutient une nouvelle ligne de bus vers le centre de tri de Härkingen. Elle favorise aussi le covoiturage pour le travail de nuit.

Quel prix la Poste est-elle prête à payer pour un comportement ménageant les ressources?

Cette concentration est-elle vraiment la meilleure option du point de vue environnemental?

Le coût des achats écologiques est largement tribu­ taire des produits. Depuis 2008, nous n’utilisons plus que du papier certifié FSC (Forest Steward­ ship Council), produit intégralement à partir de matériaux issus d’une gestion forestière respec­ tant des critères sociaux et environnementaux. Au début, cette décision a soulevé un grand débat au sein de l’entreprise. Mais en discutant avec nos principaux fournisseurs, nous avons constaté que le papier FSC n’est pas plus cher s’il est comman­ dé assez tôt. Dans le cas d’appareils consommant de l’énergie tels que les machines à laver, ceux de la classe A coûtent effectivement 100 à 150 francs de plus. Mais comme ils sont moins gourmands en électricité, leur prix d’acquisition se justifie sur

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Oui. La réduction de 18 centres de tri à trois cen­ tres principaux et six centres secondaires a con­ sidérablement amélioré la situation écologique: baisse de la consommation d’eau et des nuisances sonores, diminution de la surface utilisée. A pres­ tations équivalentes de la route et du rail, nous privilégions le rail. Comme certains de nos em­ ployés ont maintenant des trajets plus longs à ef­ fectuer, l’écobilan global n’est peut-être pas encore positif, mais il va le devenir à plus long terme. Votre entreprise établit chaque année un nouvel écobilan. Y a-t-il encore des points faibles, des optimisations possibles?

Bien sûr! Grâce à des appareils plus efficaces, par exemple, la consommation d’énergie des tech­

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nologies de l’information baisse de 5 à 10 % chaque année. C’est pourquoi nous utilisons toujours les appareils de la dernière génération: nos ordinateurs sont remplacés tous les trois ou quatre ans. Et que deviennent les appareils usagés?

Comme d’autres entreprises, nous les donnons à la fondation pour l’intégration profession­ nelle GEWA, qui les revend ou les élimine dans le respect de l’environnement. La Poste ne devrait-elle pas, elle qui s’engage en faveur de la durabilité, veiller à utiliser le plus long­ temps possible des appareils en état de fonctionner?

C’est là le gros problème. L’évolution technique est si rapide dans le domaine informatique que la Poste n’a pas intérêt à garder les appareils plus longtemps, car leur exploitation quoti­ dienne reviendrait trop cher. Et leur utilisation ne serait pas judicieuse d’un point de vue éco­ logique. Cette moindre consommation d’énergie compenset-elle donc les nuisances environnementales dues à la production d’une nouvelle génération d’appareils?

La question n’est pas la consommation d’élec­ tricité, mais la vitesse des machines. Si nos 27 000 employés devaient patienter dix secon­ des à chaque entrée avant que leur ordinateur réagisse, il en résulterait un temps d’attente de 75 heures. Ce serait inefficace.

viennent ont un problème. Nous avons déjà dû nous séparer de plusieurs fournisseurs dans le secteur vestimentaire. Cela n’a pas encore été le cas dans le domaine informatique, où nous ne collaborons qu’avec de gros producteurs qui veillent à ne pas ternir leur image. Contrôlez-vous le respect des normes sociales sur place?

En principe, les fournisseurs et des entreprises de contrôle spécialisées sont nos interlocuteurs. Ils ga­ rantissent le respect du code de la Poste. Mais nous savons bien qu’il est très difficile pour eux aussi de contrôler le respect des normes jusqu’au dernier maillon de la chaîne logistique. Vous fiez-vous donc uniquement aux informations des fournisseurs?

Pour les grandes entreprises, oui. Mais dans le secteur vestimentaire, nous effectuons nous-mêmes des audits sur place ou chargeons une agence de le faire. Quel serait l’impact d’un gros titre tel que « Uniformes de la Poste cousus par des enfants »?

Il serait désastreux. Ce genre de nouvelle sape l’image d’une entreprise et la confiance des clients. Propos recueillis par Kaspar Meuli www.environnement-suisse.ch/magazine2009-3-07

Dans ce cas, vos décisions se fondent sur des critères économiques?

Ici, il y a effectivement conflit d’intérêts. En tant qu’entreprise soumise à la concurrence, nous ne pouvons pas toujours accorder le plus grand poids aux critères écologiques. Sinon nous devrions faire un retour en arrière. Si toute la société vivait à nouveau dans les arbres, ce serait la meilleure solution pour l’environnement. Qu’en est-il de la responsabilité sociale – par exemple concernant les conditions de travail dans les usines asiatiques qui fabriquent les ordinateurs de la Poste?

La Poste peut attirer l’attention sur ces condi­ tions de la mondialisation, mais ne peut guère les influencer. Nos fournisseurs sont tenus de respecter notre code éthique et social, qui de­ mande de se conformer aux lois locales et inter­ dit la corruption et le travail des enfants. Pour certains producteurs, même ces conditions-là ne sont pas si faciles à garantir. Que se passe-t-il lorsque les fournisseurs ne remplissent pas ces conditions?

Ceux qui refusent de signer le code ou y contre­

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AURA

Première source de pollution bjo. Comme le révèle l’écobilan 2006 de la Poste suisse, deux tiers des atteintes environnementales causées par l’entreprise sont imputables au trafic – transport de personnes (33 %), déplacements des collaborateurs (11 %) et transport de marchandises (22 %). La consommation d’électricité occasionne presque 28 % et l’énergie de chauffage à peine 5 % des atteintes. La consommation d’eau et de papier (moins de 1 % chacune) est, quant à elle, d’impor­ tance mineure.

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ÉCOBILANS

Des outils devenus essentiels Les écobilans servent à recenser et à évaluer les principales incidences de tout bien, service ou entreprise sur l’environnement. Les spécialistes les utilisent pour identifier les lacunes écologiques et pour proposer des améliorations.

En glissant un kilo d’asperges vertes du Pérou dans son panier début avril, on se voit gratifié du même coup de douze kilos de gaz carbonique (CO2). Les émissions de ce principal gaz à effet de serre sont surtout dues aux rejets des réacteurs durant le long vol entre les Andes et l’Europe. Mais lorsqu’on se sert à la même date au rayon des asperges blanches du grand distributeur Coop, l’atteinte à l’atmosphère se limite à un kilo de CO2, bien qu’elles proviennent du même pays. La différence est due à la capacité de conser­ vation inégale des deux produits: les asperges blanches, moins délicates, supportent des trans­ ports en bateau de plusieurs semaines. Comme les cargos modernes emportent de grands char­ gements et consomment peu de carburant par rapport au poids du fret, même un trajet de plusieurs milliers de kilomètres n’entraîne pas d’atteintes environnementales excessives. Mais toute personne soucieuse du climat patientera quelques semaines avant de mettre des asper­ ges à son menu. Les premières variétés alsacien­ nes arrivent à mi-avril, suivies en mai par les asperges indigènes, dont le voyage est le plus court et le bilan climatique le meilleur, avec un demi-kilo de CO2 par kilo de légume en rayon. En règle générale, ce sont les aliments de sai­ son provenant de cultures biologiques en plein champ qui présentent le profil le plus positif.

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La Coop très attentive. La comparaison des asper­

ges fait partie des nombreuses pondérations ef­ fectuées par l’institut de génie environnemental (Institut für Umweltingenieurwissenschaften) de l’EPF de Zurich sur mandat de Coop Suisse, qui portent sur 28 fruits et légumes provenant de 29 pays. L’incidence sur le climat constitue un élément de ces évaluations exhaustives concer­ nant l’impact écologique exercé par les aliments de la culture à la vente. L’écobilan intègre des volets tels que consommation de terrain, irriga­ tion, apport d’engrais, utilisation de pesticides, besoins énergétiques, transport, stockage et em­ ballage. Cet instrument a notamment révélé que l’irrigation artificielle des champs d’asperges consomme 600 litres d’eau par kilo au Pérou et même plus de 800 litres dans le sud de l’Espa­ gne, encore plus sec, alors que les précipitations naturelles font tout le travail en Suisse. Coop souhaite utiliser ces données pour améliorer sa gamme de produits alimentaires d’un point de vue écologique. L’entreprise ne proposera donc plus d’actions sur les asperges vertes péruviennes et continuera d’importer les blanches par bateau. Des boussoles pour les consommateurs. « Lorsque les résultats d’évaluations complexes sont com­ muniqués d’une manière simple mais sérieuse, ils aident la clientèle à faire des choix plus écolo­ giques », déclare Norbert Egli, de la section Biens

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de consommation et écobilans à l’OFEV. Une étude scientifique réalisée pour les distributeurs d’eau suisses a par exemple montré que, selon sa provenance, l’eau minérale plate non réfrigérée livrée en bouteille pollue l’environnement de no­ nante à mille fois plus que l’eau du robinet. Il en va de même pour les fruits et les légu­ mes: les longs voyages pénalisent généralement leur écobilan; le transport par avion et camion, en particulier, le grèvent lourdement. Mais lors­ que les plantes poussent dans une serre chauffée, l’impact environnemental est plutôt déterminé par le mode de culture. Selon des calculs réalisés à la demande de Coop, les roses cultivées dans des pays chauds comme le Kenya ou l’Equateur et amenées en Suisse par avion occasionnent moins d’émissions de CO2, malgré le vol inter­ continental, que des fleurs coupées provenant de serres hollandaises chauffées. Et lorsque des pro­ duits moins périssables sont entreposés pendant des mois après leur récolte, c’est l’énergie de ré­ frigération qui est décisive. Un kilo de pommes suisses consommées aussitôt après leur cueillette en septembre ne représente que 100 grammes de CO2 rejetés dans l’atmosphère. Bien qu’augmen­ tant continuellement pour atteindre 350 gram­ mes à la fin du stockage à froid en juillet, cette valeur reste nettement en deçà des 600 gram­ mes de CO2 imputables aux pommes importées

de Nouvelle-Zélande. Ici, le raccourcissement de l’entreposage dû à la récolte décalée de six mois dans l’hémisphère sud ne suffit donc pas à com­ penser le transport maritime. Un meilleur bilan climatique ne signifie pas pour autant que l’évaluation globale sera positive. Ainsi, la Confédération a comparé les écobilans de l’essence fossile et des carburants biogènes. Cette étude a révélé que la plupart des carburants d’origine agricole sont plus nuisibles à l’environnement malgré des rejets moindres de CO2, parce que leur production pollue davan­ tage le sol, l’eau et l’air (voir ENVIRONNEMENT 2/2007, pages 52–54). La Suisse est le premier pays au monde à avoir lié, dans la loi sur l’im­ position des huiles minérales, les allègements fiscaux dont peuvent bénéficier ces carburants à la vérification de leur bilan global. Le traitement préférentiel n’est accordé que si les produits concernés remplissent des exigences minimales d’ordre social et écologique, ce dernier point devant être attesté par un écobilan fondé. « Cet instrument obtient ainsi une base juridique et un caractère contraignant qu’il n’a nulle part ailleurs », remarque Norbert Egli. Le principe de la saturation écologique. Chiffres et énoncés succincts cachent un énorme travail. On commence par délimiter les systèmes impliqués

swiss/Ruth Schürmann

« Lorsque les résultats d’évaluations complexes sont communiqués d’une manière simple mais sérieuse, ils aident la clientèle à faire des choix plus écologiques. » Norbert Egli, OFEV

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par les produits à comparer, puis tous les flux de matières et d’énergie importants sont inven­ toriés. On détermine ensuite les incidences des produits sur l’environnement à chaque étape de leur cycle de vie, avant de pondérer ces impacts sous la forme d’unités de charge écologique (UCE). Avec sa banque de données « ecoinvent », mise sur pied notamment avec l’aide de l’OFEV, la Suisse fait ici figure de pionnière. Cette source de données pour écobilans, actuellement lea­ der mondial, est utilisée dans plus de quarante pays et fournit des informations fiables sur des domaines clés comme la production d’énergie et de matières premières, les produits et les filières agricoles, les matériaux de construction, les transports ou le traitement des déchets (voir ENVIRONNEMENT 3/2003, pages 50–52). La méthode UCE, la plus utilisée en Suisse, évalue différentes atteintes à la santé humaine, aux écosystèmes et à la disponibilité des ressour­ ces en appliquant le principe de la saturation éco­ logique. « Selon ce principe, l’environnement est capable de se régénérer après avoir supporté une certaine charge », explique Norbert Egli. « Mais si un seuil critique est dépassé, des problèmes surviennent. » L’approche se réfère aux objectifs de qualité de l’environnement et aux valeurs li­ mites assignées aux émissions de polluants, pour lesquels une base légale existe en Suisse. Le smog estival, les atteintes aux écosystèmes dues aux pluies acides, les teneurs élevées en substances à effet endocrinien dans les eaux, l’amincissement de la couche d’ozone, l’effet de serre, la menace pesant sur la diversité des espèces ou la consom­ mation de ressources comme le pétrole, l’eau et le sol sont des exemples d’impact écologique excessif. « En ramenant toutes ces informations à un nombre de points, on obtient une représen­ tation simplifiée d’une réalité complexe, basée sur des objectifs environnementaux prédéfinis », relève Norbert Egli. Les évaluations se basent sur différents cri­ tères selon le procédé appliqué. « Il faut par exemple étudier comment pondérer les attein­ tes actuelles à l’environnement local par rap­ port aux problèmes mondiaux futurs. » Dans la méthode de l’éco-indicateur, développée aux Pays-Bas et largement utilisée en Europe, un comité de spécialistes détermine l’importance relative des différentes incidences écologiques. Il confère un poids particulier à la consommation

de terrain, de pétrole et de gaz naturel, dispo­ nibles en quantités limitées. En appliquant plu­ sieurs méthodes, on peut établir simplement si certaines différences entre produits sont réelles ou seulement dues à des particularités des mé­ thodes d’évaluation. « Les écobilans permettent notamment d’analyser et de comparer des biens, des services, des procédés de production ou des entreprises entières en utilisant des critères ho­ mogènes », déclare Norbert Egli. « De l’extraction des matières premières à l’élimination des pro­ duits usagés en passant par les diverses étapes de traitement et d’affinement, on peut ainsi repérer les lacunes écologiques, imaginer des solutions, trouver les meilleures variantes et procéder aux améliorations nécessaires. » Beat Jordi www.environnement-suisse.ch/magazine2009-3-08

CONTACT Norbert Egli Section Biens de consommation et écobilans OFEV 031 322 92 93 norbert.egli@bafu.admin.ch

La méthode UCE, la plus utilisée en Suisse, évalue différentes atteintes à la santé humaine, aux écosystèmes et à la disponibilité des ressources en appliquant le principe de la saturation écologique. 32

environnement 3/09 > Dossier Déchets


L’écobilan des tomates 5000 4500

unités de charge écologique (UCE 2006) par kilo de tomates

4000 3500 3000 2500 2000 1500 1000 500

0

Suisse, PI serre, tard

Suisse, PI serre, tôt

mise en culture

chauffage

Suisse, bio plein champ

Suisse, bio serre, tôt

infrastructure et emploi de machines

Pays-Bas serre, tôt

transport

Espagne, serre non chauffée

Almería plein champ eau de mer dessalée

Almería

plein champ

eau souter­ raine

irrigation

Source: OFEV; photo: Natalie Boo/AURA

La pollution causée par la culture des tomates varie selon leur provenance et selon la saison. Comme le met en évidence l’évaluation des impacts en unités de charge (UCE) selon la méthode de la saturation écologique, ce sont surtout la consommation d’eau dans le sud très sec de l’Espagne (Almería), le transport à partir de l’étranger et le chauffage des serres qui pèsent dans la balance. Les chiffres montrent que la production suisse est concurrentielle du point de vue écologique lorsque les serres n’ont pas besoin d’être beaucoup chauffées. Plusieurs approches sont à l’étude: une meilleure isolation, l’utilisation des rejets thermiques ou le stockage de la chaleur solaire.

Bilan énergétique et environnemental de l’eau potable 1 litre consommé dans les ménages

équivalent mazout

unités de charge écologique 2006

eau potable, CH, plate, robinet, non refroidie

0,003 dl

1

eau potable, CH, gazeuse, machine à soda, non refroidie

0,2 dl

40

eau potable, CH, gazeuse, machine à soda, refroidie

0,6 dl

105

eau minérale, CH, plate, récipient à eau, non refroidie

0,5 dl

115

eau minérale, CH, plate, récipient à eau, refroidie

0,9 dl

180

eau minérale, CH, plate, PET non réutilisable, refroidie

1,5 dl

260

eau minérale, CH, gazeuse, PET non réutilisable, refroidie

2,0 dl

360

eau minérale, UE, gazeuse, verre réutilisable, refroidie

2,9 dl

650

Bodensee-Wasserversorgung (Bade-Wurtemberg)

Source: SSIGE / OFEV

L’eau minérale présente un bilan nettement plus négatif que l’eau potable du robinet. Le transport, l’emballage,

la gazéification et la réfrigération sont des facteurs déterminants.

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La trace de nos vols

Production et élimination de l’avion

bjo. Quel impact un aller-retour Zurich-Los An­ geles a-t-il sur l’environnement? L’exemple du trafic aérien illustre la complexité d’un écobi­ lan. Ainsi, un Airbus A340-600 est composé de quelque 177 tonnes de matériaux – aluminium, titane, acier et différents plastiques. Leur ex­ traction et leur transformation à partir de mi­ nerais métalliques, de pétrole brut et d’autres matières premières primaires consomment de l’énergie et génèrent de grandes quantités de déchets, ce qui peut menacer ou même détruire les écosystèmes. Elles libèrent en outre des pol­ luants atmosphériques tels que soufre, oxydes d’azote ou suies de diesel, souillent les eaux et rejettent du dioxyde de carbone, un gaz à effet de serre. Tout cela porte atteinte à l’en­ vironnement et à la santé humaine, influence la diversité biologique, le climat de la planète, la couche d’ozone ou encore notre patrimoine génétique. Et pourtant, si l’on reporte les nui­ sances dues à la production et à l’élimination d’un avion sur toute sa durée de vie, elles pè­ sent nettement moins dans l’écobilan d’un voyage que la consommation de kérosène de la machine en vol. Pour un poids maximal de 380 tonnes au décollage, un Airbus A340-600 peut charger près de 153 tonnes de kérosène. A pleine charge marchande, cela suffit pour un vol de 10 500 kilomètres environ. En moyenne, Swiss compte 40 litres de carburant ou 30 kilos d’essence avion par passager aux 1000 kilomètres. Pour un aller-retour sur la côte ouest des Etats-Unis, cela correspond à 700 litres ou 1,6 tonne de dioxyde de carbone rejeté dans l’atmosphère par voyageur. De l’extraction du pétrole brut à la combustion en passant par le transport, le raffinage, la distribution et le stockage, la forte utilisation de carburant cause de mul­ tiples dommages à l’environnement. Viennent s’y ajouter les atteintes dues aux infrastruc­ tures – pistes, docks, bâtiments aéroportuaires, installations de desserte – dont la construction et l’exploitation nécessitent du terrain, du gra­ vier, du ciment, de l’acier, du verre, des plas­ tiques, de l’électricité, du gaz, de l’eau et beau­ coup d’autres ressources qui grèvent également l’écobilan, quoique bien moins que la consom­ mation de kérosène.

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extraction de bauxite/aluminium >>> titane >>> acier >>>

matériaux composites >>> électronique >>> élimination >>>

Infrastructure de l’aéroport

extraction de gravier >>> production de ciment >>> construction >>>

consommation de terrain >>> chauffage et électricité >>> élimination >>>

Kérosène pour les vols

extraction de pétrole brut >>> transport par pétrolier >>> raffinage >>>

parc à réservoirs >>>

stockage du kérosène >>> ravitaillement >>>

environnement 3/09 > Dossier Déchets


L’empreinte écologique d’un voyage en avion

Pollution aérienne Vols, combustion de kérosène 64,3 % Production et élimination de l’avion 0,4 %

Infrastructure de l’aéroport 3,9 %

Vols, fourniture de kérosène 31,4 %

Kérosène pour les vols 95,7 %

Photos, de gauche à droite et de haut en bas: Rio Tinto-Alcan; de.wikipedia.org; airbus-flickr; AURA; www.avion-europe.de; www.flightglobal.com/Airbus; www.kiesag.ch; www.holcim.ch; www.flightforum.ch; www.skyguide.ch; www.flughafen­ zuerich.ch; www.bkw-fmb.ch; Unique; www.flightforum.ch; www.nautifonds.de; www.egghof.com; www.technikatlas.de; CFF; www.hotelcoronado.ch; swiss (2)

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COÛTS D’ÉLIMINATION DES DÉCHETS MÉNAGERS

30 centimes par jour

En Suisse, le bilan environnemental des déchets n’a cessé de s’améliorer depuis le milieu des années 1980. Malgré ces progrès, la population ne paie pas plus aujourd’hui qu’il y a quelques années pour la valorisation et l’élimination des ordures ménagères, soit environ le prix de deux SMS par jour et par personne.

« Notre activité connaît ses hauts et ses bas. Mais nous n’avons jamais vécu d’effondrement tel que celui de l’automne 2008 », affirme Martin Baltisser, administrateur de l’Association suisse de recyclage du fer, du métal et du papier (VSMR). Le prix des produits recyclés avait atteint des records en été 2008, avant de chuter avec la crise financière et économique. Des mois après son déclenchement, la ferraille de moindre qualité ne trouve encore guère preneur, car certaines aciéries ont temporairement fermé leurs portes. Pour le vieux papier, au printemps 2009, la situa­ tion n’est pas plus réjouissante. « Nous en som­ mes réduits à payer pour pouvoir continuer à li­ vrer certaines sortes », confie Daniel Griesser, commerçant de vieux papier et membre du co­ mité de la VSMR. « Nous traversons la plus grave crise des vingt dernières années et il n’y a pas la moindre lueur d’espoir à l’horizon. » Impossible pour l’instant de faire des prévisions. Martin Baltisser ne craint pourtant pas un avenir particu­ lièrement sombre pour l’industrie privée des dé­ chets en Suisse. « On ne peut exclure que l’une ou l’autre entreprise ait de sérieux ennuis. Mais

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à moyen et à long terme, je pense que les pers­ pectives sont dans l’ensemble favorables pour le secteur du recyclage. » Des contrats à long terme. Du côté des producteurs

de déchets, cette situation dramatique ne se fait encore presque pas sentir. Ainsi, on ramasse toujours le vieux papier – pratiquement sans valeur ces temps – en provenance des ménages, de l’industrie et de l’artisanat. « Ici, on ne cons­ tate pas de grands changements », observe Alex Bukowiecki, administrateur de l’organisation « Infrastructures communales » de l’Union des villes suisses. On doit cette stabilité à des contrats à long terme d’enlèvement des déchets, dont bénéficient près des deux tiers des communes et des villes. Ce mode de gestion atténue les fluctua­ tions de prix que connaît le vieux papier durant le cycle conjoncturel, comme l’explique Alex Bukowiecki. Le recyclage « à la suisse » du vieux papier et du carton est un modèle du genre: en 2007, 79 % des 1,68 million de tonnes annuelles de vieux pa­ pier sont retournés dans le cycle de production.

L’élimination des déchets ménagers coûte 106 francs par personne et par an: 61 francs pour l’évacuation et la valorisation thermique des ordures, 45 francs pour la collecte et la valo­ risation matérielle des biens recyclables. Photos: OFEV / AURA, E. Ammon

environnement 3/09 > Dossier Déchets


Cette réussite est due à l’implication de nom­ breuses organisations de collecte de la société civile. Dans les régions rurales, il s’agit souvent d’associations ou d’écoles, alors que dans les zones urbaines, le ramassage du vieux papier est en général l’affaire de la voirie communale ou de transporteurs privés mandatés par les autorités. Une évolution de taille. Il y a un quart de siècle, lorsque les débats autour de la nouvelle loi sur la protection de l’environnement (LPE) faisaient rage, il était devenu évident qu’on ne pouvait continuer à gérer les détritus comme on l’avait fait jusque-là. Des déchets spéciaux parfois non traités et fortement pollués étaient autrefois en­ treposés même à proximité d’eaux souterraines; les usines d’incinération des ordures ménagères (UIOM) souillaient leurs alentours de suies, de métaux lourds et de substances toxiques, et le re­ cyclage des matières valorisables n’en était qu’à ses débuts. En 1986, les Lignes directrices pour la gestion des déchets en Suisse entament le virage néces­ saire. Désormais, la priorité n’est plus donnée à

une élimination bon marché, mais au respect de l’environnement. Afin de ménager les ressources naturelles, on veut favoriser la valorisation ma­ térielle ou thermique des produits et des embal­ lages usagés et traiter les résidus de telle sorte qu’ils puissent être mis sans danger en décharge. « L’ordonnance de 1990 sur le traitement des dé­ chets, puis la révision de la LPE ont ensuite jeté les bases légales d’une véritable révolution dans ce domaine », explique Hans-Peter Fahrni, chef de la division Déchets et matières premières de l’OFEV. Bien que la réalisation ait été laborieuse et ne soit pas encore partout terminée, le bilan des vingt dernières années est impressionnant. Les déchets spéciaux dangereux pour l’environne­ ment et les résidus combustibles ne vont plus à la décharge. Plus de la moitié des déchets ur­ bains sont recyclés et le reste est mis à profit énergétiquement par les UIOM. On a fermé cer­ taines petites installations et les UIOM assainies ou récemment construites filtrent efficacement leurs fumées de combustion, ce qui réduit leur impact à un minimum.

COÛTS D’ÉLIMINATION DES DÉCHETS MÉNAGERS par personne et par an

divers 18 francs

collecte, transport en UIOM 21 francs

verre 4 francs papier 1 franc

déchets verts 22 francst collecte sélective 45 francs par habitant

Dossier Déchets > environnement 3/09

incinération 40 francs incinération en UIOM (transport inclus) 61 francs par habitant

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Collaborations entre le public et le privé. La clé de

la réussite de la nouvelle politique en matière de déchets a été l’introduction du principe du pol­ lueur-payeur, qui a permis d’atteindre des taux de recyclage records pour le verre et le papier. L’industrie a, elle aussi, rempli ses obligations légales et adopté des processus de production plus respectueux de l’environnement. Pour l’éli­ mination de plusieurs sortes de détritus, des solu­ tions sur mesure adaptées aux différents secteurs ont été mises sur pied avec des partenaires privés. La VSMR, l’Union des villes suisses et l’OFEV sou­ lignent tous la fructueuse collaboration entre les pouvoirs publics et l’économie privée. « Cette coopération permet de trouver des solutions constructives, tout en accordant toujours la prio­ rité au bien commun. L’Etat doit fixer des condi­ tions-cadres si l’on veut s’assurer que les déchets seront valorisés et traités de manière respec­ tueuse de l’environnement sur le long terme », constate Hans-Peter Fahrni. Autres améliorations en vue. Ce service public n’est certes pas gratuit, mais il ne coûte pas même 30 centimes par personne et par jour pour l’en­ semble des ordures ménagères, soit à peu près le prix de deux SMS. La multiplication des collectes sélectives, l’interdiction de mettre en décharge les déchets combustibles, valable depuis l’an

2000, et les milliards investis dans la construc­ tion ou l’assainissement d’installations n’ont pas rendu la gestion des déchets notablement plus chère, parce que les UIOM en particulier se sont mises à commercialiser plus de produits tels qu’électricité, chaleur et métaux. Ainsi, pour éliminer les ordures, on dépense moins aujour­ d’hui par habitant qu’à la fin des années 1980. Brigitte Fischer, du service des déchets, de l’eau, de l’énergie et de l’air du canton de Zurich (AWEL), estime que des améliorations sont encore pos­ sibles, à l’échelle locale surtout: « Il vaudrait par exemple la peine de régionaliser les ramassages et de standardiser les systèmes de collecte, car d’importants volumes permettent d’obtenir de meilleures conditions. » Il n’y a donc pas de quoi se reposer sur ses lauriers. « Pour être encore plus efficaces, nous devons intervenir davantage au niveau de l’élabo­ ration des produits », estime Hans-Peter Fahrni. « Ils doivent notamment être conçus de manière à faciliter la valorisation des matières en fin d’utilisation. » Car si nous ne voulons pas devoir baisser notre niveau de vie, il nous faut réduire nettement notre pression sur les ressources natu­ relles. Urs Fitze www.environnement-suisse.ch/magazine2009-3-09

La clé de la réussite de la nouvelle politique en matière de déchets a été l’introduction du principe du pollueur-payeur.

CONTACT Hans-Peter Fahrni Division Déchets et matières premières OFEV 031 322 93 28 hans-peter.fahrni@bafu.admin.ch

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environnement 3/09 > Dossier Déchets


AURA

Coop recycle deux tiers de ses déchets Une bonne gestion des déchets ménage les ressources naturelles et réduit les coûts d’élimination. Nous avons rencontré le responsable environnement de Coop Suisse, Christian Rüttimann. Christian Rüttimann

environnement: Quels sont les objectifs de Coop en matière de déchets?

Photo mise à disposition

Christian Rüttimann: Notre priorité est de diminuer leur quantité et d’augmenter le taux de recyclage. Nous tentons de trouver des solutions sur mesure pour certaines matières. Ainsi, depuis peu, une grande partie de nos déchets verts sont transformés en biogaz qui sert de carburant ou produit du courant vert. Quant à l’huile de friture des restaurants, elle devient du biodiesel que nous mélangeons au carburant de notre parc de camions. Pour les emballages, Coop recherche toujours des solutions par branche et s’engage afin d’augmenter encore la part des matériaux recyclés. Avec quels résultats?

Nous avons atteint un taux de recyclage de 67 % en 2008. En limitant à la source le volume de nos déchets et en améliorant la collecte sélective des matières valorisables, nous avons pu diminuer nos coûts. Où avez-vous atteint la limite, et que reste-t-il à faire?

Les points de vente renvoient une grande partie des déchets aux centres de distribution. Cette situation n’est pas optimale. Afin que les magasins trient de manière plus systématique, une formation est dispen­ sée à tous les collaborateurs depuis début 2009. Il y aura toujours des détritus, mais en les triant correc­ tement, on peut encore diminuer considérablement leur volume. Les petits emballages de carton ou les feuilles de plastique colorées ne doivent par exemple plus être incinérés.

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COOPÉRATION INTERNATIONALE

La Suisse s’engage

Les pays en développement sont confrontés à des déchets électroniques en constante augmentation. Si cette ferraille n’est pas valorisée et traitée dans les règles de l’art, elle met en danger population et environnement. Afin de diminuer ces risques, la Suisse met à disposition son savoir-faire, particulièrement en ce qui concerne les marchés publics et la gestion des déchets et des ressources.

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environnement 3/09 > Dossier Déchets


Les Etats en développement et en transition se défendent depuis des années contre les im­ portations illégales de ferraille électronique, ou e-déchets, en provenance des pays industrialisés. Maintenant, ils ont aussi affaire à leurs propres engins usagés. Dans ces régions, les vieux appa­ reils sont particulièrement recherchés pour leur cuivre et leur aluminium, mais surtout pour leur or, leur palladium et leur argent. Récupérer ces matières et les revendre représente une activité relativement lucrative. La ferraille électronique contient cependant des substances à risque telles que le mercure, le béryllium ou les agents igni­ fuges bromés dans les plastiques. Les conditions dans lesquelles on récupère ces matières dans de nombreux pays asiatiques et africains, mais aussi latino-américains, sont souvent déplorables. Dans des arrière-cours, des spécialistes improvisés brûlent des câbles d’isola­ tion afin d’en extraire le cuivre ou font chauffer en plein air des plaquettes de circuits imprimés pour en retirer l’or, inhalant ainsi des vapeurs de dioxines ou de mercure. « Les polluants or­ ganiques, les métaux lourds et autres toxiques

Dossier Déchets > environnement 3/09

mettent en danger la santé des travailleurs et polluent aussi l’air, le sol et les eaux », souligne Marco Buletti, de la section Biens de consomma­ tion et écobilans de l’OFEV. Des offices fédéraux impliqués. Le savoir-faire hel­

vétique en matière de traitement écologique des déchets intéresse aussi les pays en développe­ ment et en transition. Afin de protéger ces Etats contre les importations de déchets dangereux, la Suisse avait lancé, il y a plus de vingt ans, l’ini­ tiative pour la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dan­ gereux et de leur élimination. C’est notamment dans le cadre de cette convention internationale, entrée en vigueur en 1992, que plusieurs offices fédéraux participent à des transferts de connais­ sances. Ils contribuent à la mise sur pied de solu­ tions d’élimination respectueuses de l’environne­ ment en Asie, en Amérique latine et en Afrique. Des modèles de coopération entre autorités, or­ ganisations non gouvernementales (ONG) et éco­ nomie privée se sont révélés particulièrement efficaces.

A Soweto, dans la ban­ lieue de Johannesburg, les ramasseurs d’ordures font la queue pour vendre des matériaux recyclables (à gauche). La Suisse a mis en place en Afrique du Sud une installation pilote pour le traitement écologique des déchets électroniques. Photos: EMPA

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Le Laboratoire fédéral d’essai des matériaux (EMPA) et le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) ont réussi à faire participer le leader mondial Hewlett-Packard à un projet pilote de ce type. L’installation inaugurée au Cap en 2008 a commencé par traiter cinquante-huit tonnes d’ordinateurs et imprimantes mis au rebut, créant dix-neuf places de travail. On y évalue le potentiel de valorisation des appareils avant de les démonter à la main, de trier les pièces de métal de valeur et d’éliminer le reste écologi­ quement. L’atelier a même réalisé un bénéfice de quelques milliers de dollars. Des collecteurs et recycleurs informels de déchets, qui jouent un rôle important dans toute l’Afrique, ont eux aussi suivi cette formation. « Notre projet a mis en lumière un grave problème environnemental de l’Afrique du Sud. Il devrait maintenant faire école », espère le responsable, Mathias Schluep, qui travaille au département Technologie et so­ ciété de l’EMPA. En 2007, l’Afrique du Sud a pro­ duit à elle seule dix-neuf mille tonnes de vieux ordinateurs: afin de maîtriser ce phénomène, le gouvernement sud-africain envisage d’intro­ duire, à l’instar de la Suisse, une taxe d’élimi­ nation anticipée sur les appareils électriques. Le

douze à dix-huit mois de modèle, soit afin de dis­ poser de nouvelles fonctions, soit par effet de mode. Bien que certains téléphones servent encore comme appareil de remplacement ou de seconde main, des centaines de millions sont jetés chaque année. Soucieuse d’agir face à ce problème, la Suisse a, dans le cadre de la Convention de Bâle, lancé l’Initiative pour un partenariat sur les télé­ phones portables, dite MPPI (Mobile Phone Part­ nership Initiative). « Notre objectif était de créer un système qui garantisse une gestion écolo­ giquement rationnelle des téléphones portables, et de le faire adopter par tous les acteurs concer­ nés », explique Marco Buletti, promoteur de la MPPI, qui a réussi à gagner à sa cause les douze plus gros producteurs de portables ainsi qu’une grande partie des principaux opérateurs. Cinq directives ont été définies en accord avec les ins­ tances gouvernementales, les entreprises de recy­ clage et les organisations non gouvernementales (ONG). Elles portent sur des systèmes de collecte efficaces, des réparations selon les meilleures techniques disponibles, un recyclage respectant l’environnement, les mouvements transfron­ tières des appareils usagés et la conception éco­

« Il faut concevoir les produits de manière à ce que leur fabrication, leur fonctionnement, leur valorisation et leur élimination soient le moins polluants Eveline Venanzoni, OFEV possible. » pays peut depuis peu compter sur l’organisation eWASA (e-Waste Association of South Africa), qui soutient et conseille entreprises et particuliers en matière de recyclage. Depuis la Déclaration de Nairobi sur les dé­ chets électroniques, adoptée en 2006 lors de la huitième conférence de la Convention de Bâle, les choses ont bougé, constate Mathias Schluep. Des projets semblables à celui du Cap ont été lancés au Maroc, en Tunisie et au Kenya avec l’aide de la Suisse. L’EMPA et le SECO se sont en­ gagés dans des initiatives semblables au Costa Rica, en Colombie, au Pérou et au Chili, ainsi qu’en Chine et en Inde, deux pays en transition où l’utilisation des technologies de l’informa­ tion a explosé ces dernières années, et avec elle la quantité d’e-déchets. Seconde vie pour portables et ordinateurs. Les télé­ phones portables sont un exemple typique de conquête du marché mondial. Un milliard d’ap­ pareils neufs sont vendus chaque année. Dans les pays industrialisés à haut niveau de vie comme la Suisse, on change en moyenne tous les

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logique des produits. Les 172 Etats Parties à la Convention de Bâle les ont adoptées à Bali, en 2008. Marco Buletti s’en félicite: « Ainsi, non seu­ lement les problèmes sont clairement reconnus à l’échelle internationale, mais on dispose aussi de pistes concrètes pour s’y attaquer. » Le succès de la MPPI lui vaut d’avoir mainte­ nant son pendant pour les ordinateurs. Le Par­ tenariat pour une action sur les équipements informatiques, ou PACE (Partnership for Action on Computing Equipment), est né lui aussi d’une collaboration entre pouvoirs publics, économie privée et ONG. L’un de ses principaux objectifs est d’améliorer le recyclage afin de ménager les ressources naturelles. Le processus de Marrakech. Dans de nombreuses régions du globe, les problèmes sanitaires et environnementaux posés par les déchets élec­ troniques ne sont pas résolus. Il ne suffit donc pas de se soucier de la sécurité des biens et des prestations à la fin de leur durée de vie. « Il faut concevoir les produits de manière à ce que leur fabrication, leur fonctionnement, leur valori­

environnement 3/09 > Dossier Déchets


sation et leur élimination soient le moins pol­ luants possible », explique Eveline Venanzoni, de la section Biens de consommation et écobilans à l’OFEV. Les innovations techniques permettent déjà de fabriquer des biens qui nécessitent seule­ ment une fraction des ressources utilisées tradi­ tionnellement, et cela, sans perte de confort. Les constructions Minergie-P en sont un exemple, de même que les voitures électriques ou le courant provenant des éoliennes. A la suite du Sommet mondial sur le déve­ loppement durable qui s’est tenu à Johannes­ burg en 2002, la communauté des Etats a lancé le processus de Marrakech. Il s’agit d’élaborer un programme-cadre de modèles de consomma­ tion et de production qui soient respectueux de l’environnement et socialement équitables. Sept groupes de travail ont été formés afin de s’atteler aux différents aspects de ce qu’il faut bien quali­ fier de travaux d’Hercule. L’OFEV dirige celui qui traite des marchés publics durables.

systématique à l’introduction ou au développe­ ment de marchés publics durables. Une fois la situation de départ, les bases légales et le marché analysés, le programme de formation se déroule sur place. Tous les acteurs du processus d’achat y participent – industrie comprise. « Il est essentiel pour nous de penser en termes de cycle de vie des produits », souligne Eveline Venanzoni. « Les biens qui présentent un meilleur écobilan sont souvent plus chers à l’achat, mais leurs coûts de fonction­ nement sont moindres, par exemple parce qu’ils consomment moins d’énergie. De plus, leur éli­ mination est meilleur marché. En leur accordant la préférence, les pouvoirs publics ne réduisent pas seulement leur empreinte écologique. Ils éco­ nomisent aussi sur plusieurs fronts. » Stefan Hartmann, Beat Jordi www.environnement-suisse.ch/magazine2009-3-10

CONTACTS Marco Buletti (Convention de Bâle) Section Biens de consommation et écobilans OFEV 031 322 68 37 marco.buletti@bafu.admin.ch Eveline Venanzoni (marchés publics écologiques) Section Biens de consommation et écobilans OFEV 031 322 93 19 eveline.venanzoni@bafu.admin.ch

Le rôle des pouvoirs publics. « Grâce à leur forte

présence sur le marché, les administrations et les entreprises d’Etat peuvent contribuer de ma­ nière déterminante à favoriser des biens et des prestations durables », avance Eveline Venanzoni, qui dirige le groupe de travail international. « De plus, en tant que gros acheteurs, les pouvoirs pu­ blics doivent donner l’exemple aux services d’ac­ quisition privés et aux ménages. » Avec des vo­ lumes d’achat qui représentent dans de nom­ breux pays industrialisés près d’un dixième du produit intérieur brut, ils sont à même d’aider les articles fabriqués de manière écologiquement et socialement responsable à percer sur le mar­ ché. Rien qu’en Suisse, les autorités dépensent trente-deux milliards par an pour des construc­ tions, des biens et des prestations. Cela va des véhicules aux uniformes, en passant par le maté­ riel de bureau, les meubles, les ordinateurs, le pa­ pier, l’électricité ou les voyages de service. Etant donné les volumes en question, des marchés pu­ blics durables contribuent fortement à la réali­ sation des objectifs fixés dans les conventions internationales relatives à l’environnement. Pour des achats publics durables. Le groupe d’ex­ perts mené par l’OFEV veut soutenir tous les gouvernements intéressés à instituer un mar­ ché public durable. Un des principaux buts est de sensibiliser et de former les spécialistes res­ ponsables des achats. Après un projet pilote en Argentine, d’autres essais sont en cours jusqu’en 2010 au Mexique, au Costa Rica, en Uruguay, en Tunisie, au Ghana, à l’Ile Maurice et en NouvelleZélande. Le groupe de travail a mis au point une méthode qui lui permet d’œuvrer de manière

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A notre porte

GE

ARC LÉMANIQUE

Au secours des batraciens

Sus aux micropolluants

Genève prend des mesures pour préserver ses vingt-trois sites naturels reconnus d’im­ portance nationale pour les batraciens. Ainsi, à Bernex, quatre « crapauducs » sont en projet sous la route de Loëx pour que les grenouilles, crapauds, tritons et salamandres puissent at­ teindre sans encombres le Bois des Mouilles en période de migration. Par ailleurs, depuis 2008, à Plan-les-Ouates, le chemin de l’Abé­ rieu est fermé la nuit pendant la période de re­ production des batraciens.

VS

> Gottlieb Dändliker, inspecteur de la faune et de la

Installations du pilote d’ozonation à la STEP de Vidy (Lausanne)

mise à disposition

pêche du canton de Genève, 022 388 55 40

Sierre se met à l’écologie industrielle

NE Iles solaires couronnées

mise à disposition

Sierre nourrit un projet de synergies indus­ trielles. L’objectif est de gérer les ressources et les déchets de façon plus économe et res­ pectueuse de l’environnement en transformant notamment les déchets en nouvelles matières et en échangeant les flux d’énergie et d’eau. C’est le bureau Sofies, spécialisé dans l’éco­ logie industrielle et basé à Genève, qui ap­ porte ici le soutien technique au canton du Valais. Dans un premier temps, la commune a fait parvenir un questionnaire aux entreprises de la région pour connaître leurs systèmes de management environnemental. Après avoir visité celles qui présentent le meilleur potentiel, Sofies déterminera un plan d’action pour opti­ miser la consommation des ressources locales.

> Benoît Charrière, Sofies, 022 338 15 24 44

Le lauréat 2009 du Prix Evenir, décerné depuis 2003 par l’Union pétrolière, est le directeur du Centre suisse d’électronique et de microtech­ nique (CSEM) à Neuchâtel, Thomas Hinderling. Son projet d’îles solaires, dont un prototype est en cours d’achèvement aux Emirats arabes unis, s’avère très prometteur puisqu’il per­ met la production non polluante et à moindre coût de grandes quantités d’énergie. Les îles solaires possèdent en effet plusieurs atouts: leur structure est légère, les panneaux peu­ vent facilement être orientés pour bénéficier d’une exposition maximale tout au long de la journée et, si l’on augmente la taille de l’île, la quantité d’énergie obtenue croît plus vite que le surcoût.

Après la diminution des métaux lourds et des phosphates dans les eaux du Léman, certains micropolluants comme les pesticides et les résidus de médicaments semblent aujourd’hui également en recul. La Commission interna­ tionale pour la protection des eaux du Léman (CIPEL) recommande cependant de ne pas baisser la garde et émet une série de recom­ mandations destinées autant aux industries et aux agriculteurs qu’à la population. Les sta­ tions d’épuration sont aussi concernées. Celle de Vidy teste deux nouveaux procédés pour supprimer les micropolluants des eaux usées: l’un utilise de l’ozone, l’autre du charbon actif. A terme, le but des essais est de valider ces techniques.

> Sébastien Lehmann, section Eaux de surface – qualité, OFEV, 031 324 76 94

FR

> Thomas Hinderling, Centre suisse d’électronique et de microtechnique, Neuchâtel, 032 720 56 57

CSEM

Un salon pour les technologies vertes

Du 21 au 24 octobre 2009, le Forum Fribourg accueille GREENTECH, le salon professionnel de la gestion des déchets, des ressources et des technologies de l’environnement. Cette ren­ contre, qui inclut un programme de conférences,

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s’adresse aux entreprises, mais aussi aux insti­ tutions et organisations actives dans ce secteur.

Elle bénéficie notamment du soutien de l’OFEV.

Thèmes abordés: traitement des pollutions

(poussières fines, smog, boues d’épuration,

bruit...), optimisation des ressources (valorisa­ tion, recyclage, analyse du cycle de vie, etc.),

services et organismes (management environ­ nemental et formation, p. ex.).

BE Tout sur le climat dans un décor grandiose

manque de soin accordé à ces zones augmente le risque de glissement. C’est donc pour éviter des événements destructeurs qu’un projet du département Architecture, bois et génie civil de la Haute école spécialisée bernoise a déve­ loppé des méthodes de drainage plus efficaces et plus économiques. Dans la foulée, un sentier didactique consacré à ce thème – le GEOpfad – a été inauguré cet été à la Lenk.

> Christophe Maurer, 079 634 12 69,

> Martin Stolz, 034 426 42 66,

christophe.maurer@greentech-expo.ch,

martin.stolz@bfh.ch, www.ahb.bfh.ch

www.greentech-expo.ch

CH/LU/ZH

GE

Le Silberhorn

Les hautes-tiges et la petite chevêche

mise à disposition

Le vieux verger haute-tige de Jussy a retrouvé un second souffle. Dix-huit arbres de variétés anciennes ont été plantés à l’initiative de la paroisse catholique de Meinier-Gy-Jussy et de la Fondation Pro Specie Rara. L’action permet de faire connaître les hautes-tiges et pourrait également contribuer à offrir un habitat fa­ vorable à une espèce rarissime en Suisse, la chouette chevêche, déjà présente sur la com­ mune. L’entretien de la prairie sera en partie réalisé avec des moutons de races rustiques et menacées, une solution convenant parfaite­ ment à la petite chevêche.

mise à disposition

Sept sentiers climatiques ont été mis en place au pied de l’Eiger, du Mönch et de la Jung­ frau, à partir de Grindelwald, de Mürren et de Wengen. Ils présentent au promeneur les principaux effets du réchauffement dans les Alpes. Un téléphone mobile du type iPhone, équipé d’écouteurs, peut être loué à l’office du tourisme: il sert de guide audio (en français, allemand et anglais) et fournit également de nombreux textes, images et films, ainsi que des conseils pour protéger le climat. La partie scientifique du sentier a été élaborée par l’Uni­ versité de Berne.

> Jungfrau Region Marketing SA, 033 854 12 40, www.jungfrau-klimaguide.ch

BE Drainer les pentes pour les stabiliser

> www.prospecierara.ch mise à disposition

Par le passé, les pentes instables ont souvent été consolidées grâce à des mesures d’éva­ cuation de l’eau. De nos jours, toutefois, le

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Comment se débarrasser des néophytes?

Renouée du Japon et berce du Caucase

Peter Kull

Certaines plantes exotiques envahissantes po­ sent de vrais problèmes en Suisse: elles mo­ difient le paysage, concurrencent les espèces utiles ou endommagent les infrastructures de transport et de protection contre les crues. L’an passé, la Confédération a lancé un projet pilote avec six cantons. Pendant trois ans, on étudie­ ra diverses approches pour éliminer la renouée du Japon, ainsi que leur coût et leur effet sur l’environnement. Le canton de Zurich recense depuis plusieurs années les populations de néophytes envahissants à l’aide d’un système d’information géographique accessible sur In­ ternet. Le canton de Lucerne prévoit une ap­ plication similaire, afin de fournir à toutes les communes et aux personnes intéressées un aperçu actuel de la situation.

> Peter Kull, Service de l’environnement et de l’énergie du canton de Lucerne, 041 228 58 05, peter.kull@lu.ch, www.umwelt-luzern.ch > Gemeinden; www.biosicherheit.zh.ch > Neophyten

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En politique internationale Accidents industriels: collaborer au-delà des frontières Le 1er novembre 1986 reste de sinistre mémoire pour l’environnement: suite à un incendie sur un site du groupe chimique Sandoz, dans la zone industrielle bâloise de Schweizerhalle, des eaux d’extinction contaminent le Rhin et provoquent la mort de milliers de poissons. Sur 400 kilomètres, les populations d’anguilles, entre autres, sont exterminées. Cette catastrophe secoue durablement la Suisse et les autres pays riverains. La Conférence internationale pour la protection du Rhin (CIPR), fondée en 1950, joue pour la première fois un rôle actif et les ministres compétents des Etats mem­ bres en viennent à formuler des objectifs explicites de protection de l’environnement. Aujourd’hui encore, l’OFEV représente la Suisse au sein de la CIPR. Les accidents industriels peuvent avoir des conséquences dévastatrices qui ne s’arrêtent pas aux frontières. La coopération internationale n’en revêt que plus d’importance. Ces dernières années, l’OFEV a largement utilisé les possibilités d’échange d’informations et d’expériences entre les pays, par exemple dans le cadre de la Convention sur les effets transfrontières des accidents industriels, élaborée au sein de la Commission économique pour l’Europe des Nations Unies (CEE-ONU). L’objec­ tif est d’établir des normes de sécurité à l’échelle internationale. Le traité permet aussi à l’OFEV de mettre son savoir-faire à la disposition d’autres Etats (notamment en Europe de l’Est, dans le Caucase, en Asie centrale et en Europe du Sud-Est). En retour, l’office peut profiter des expériences faites à l’étranger. Il participe en outre au groupe de travail de l’OCDE qui a élaboré des directives sur la prévention et la gestion des accidents chimiques. Ces documents ont suscité de l’intérêt bien au-delà des pays de l’OCDE.

Bernard Gay Chef de la section Prévention des accidents majeurs et mitigation des séismes OFEV 031 322 54 76 bernard.gay@bafu.admin.ch

Trente ans de lutte pour la qualité de l’air La Convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance fête son 30e anni­ versaire. Conclue sous l’égide de la Commission économique pour l’Europe des Nations Unies (CEE-ONU), elle rassemble 50 pays (l’ensemble de l’Europe, le Canada et les Etats-Unis). Ses sept pro­ tocoles additionnels – relatifs aux métaux lourds, aux polluants organiques persistants (POP), aux oxydes d’azote, à l’ammoniac ou au soufre, par exemple – ont permis à cette convention signée à Genève en 1979 de remporter des succès incontestables. Depuis 1980, le soufre émis par les chauf­ fages et les industries a reculé de 70 %. Quant à la limitation du plomb dans l’essence, elle a réduit la pollution atmosphérique causée par ce métal de 60 voire 70 % depuis 1990. Dans le même temps, la teneur de l’air en oxydes d’azote et en composés organiques volatils (COV) a diminué de 40 %. Toutefois, la lutte continue: ces prochaines années, la coopération avec les pays d’Europe orientale et d’Asie centrale sera renforcée. Par ailleurs, on accorde de plus en plus d’importance aux nouvelles perspectives énergétiques et à leur influence sur les changements climatiques et sur la qualité de l’air (dépôts azotés, ozone et poussières fines en particulier).

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Richard Ballaman Chef de la section Qualité de l’air OFEV 031 322 64 96 richard.ballaman@bafu.admin.ch

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ORGANISMES DANGEREUX POUR LA SANTÉ

Sus au moustique tigre!

Le moustique tigre, immigré des régions tropicales asiatiques, est potentiellement porteur de maladies dangereuses. Le Tessin lutte systématiquement depuis des années, avec succès, contre sa propagation. La méthode appliquée est considérée comme exemplaire à l’échelle internationale.

Il a fallu plus de trois ans à la biologiste tessinoise Eleonora Flacio, infatigable poseuse de pièges à insectes pour le compte du groupe de travail cantonal, pour parvenir à démontrer la présence du moustique tigre (Aedes albopictus) dans les régions de Mendrisio et de Locarno, en août 2003. Un labeur de Sisyphe pour cette scientifique opérant seule: tous les dix jours, elle devait changer l’eau de 40 pièges placés dans des centres com­ merciaux, des restoroutes, des stations­ service et des terrains de camping, et analyser les œufs qu’elle y trouvait. Ces essais sur le terrain se sont en­ suite transformés en programme ambi­ tieux auquel les communes concernées doivent maintenant participer active­ ment. La méthode a été constamment développée et affinée au fil des ans. Aujourd’hui, le monitoring s’étend de la frontière suisse longeant la N2 jusqu’à Biasca; il couvre les zones latérales du Mendrisiotto, l’agglomération de Lugano et Locarno avec ses environs. Plus de 1200 conteneurs noirs remplis d’eau sont répartis dans la région pour servir de pièges. En 2008, on a trouvé les premiers œufs de moustique tigre dès le mois de juin. Puis leur progression s’est nette­ ment accélérée: à Chiasso, 80 % de tous les pièges contenaient des œufs. Coldre­ rio semble particulièrement exposé avec son restoroute. C’est dû, pense Eleonora Flacio, au trafic sud-nord, « car de nom­ breux touristes et chauffeurs de poids

Organismes > environnement 3/09

lourds s’offrent une pause après avoir passé la frontière. Leurs passagers clan­ destins en profitent pour les quitter et se mettre en quête d’endroits propices à la ponte. » Une menace cantonnée. Théoriquement, le moustique tigre peut trouver des condi­ tions de vie idéales jusque dans le bassin du Rhin supérieur. On a d’ailleurs cru avoir découvert deux individus en Argo­ vie en 2007. Mais il s’agissait de repré­ sentants d’une espèce très ressemblante qui s’est établie au nord de la Suisse il y a longtemps, l’Aedes japonicus japonicus. Au stade actuel des connaissances scien­ tifiques, ce moustique-là est nettement

Anne-Gabrielle Wust Saucy, de la section Biotechnologie et flux de substances de l’OFEV. Eleonora Flacio se veut elle aussi rassurante: « Nous sommes parvenus à éliminer toutes les populations que nous avons trouvées au Tessin. » C’est un argument de poids, car la région sud du canton sert de zone tampon entre l’es­ pace méditerranéen et le versant nord des Alpes. Les travaux menés au Tessin pour lutter contre cet insecte sont d’ailleurs salués par la communauté internatio­ nale. L’OFEV collabore étroitement avec l’Italie sur le sujet. La situation est sur­ tout critique dans la région frontalière de Chiasso, où l’insecte s’est solidement

L’exemple de l’Italie montre combien il est difficile d’éradiquer l’espèce si elle n’est pas combattue systématiquement dès le départ. moins dangereux en tant que porteur potentiel de virus. « Mais il faudrait à mon avis le combattre aussi, car on en sait encore trop peu sur les risques qu’il présente », observe Francis Schaffner, de l’Institut de parasitologie de l’Université de Zurich. Quand une espèce est très ré­ pandue, il devient quasiment impossible de la maîtriser. Dans le cas du moustique tigre, on espère avoir agi à temps: « En Suisse alémanique, on n’en a pas encore dé­ couvert un seul », insiste la biologiste

établi entre Côme (I) et la Suisse dans sa progression vers le nord. « Les nombreux œufs trouvés à Chiasso et dans la loca­ lité frontalière de Vacallo s’expliquent par une arrivée directe d’Italie », sup­ pose Eleonora Flacio. Fièvre de Chikungunya à Ravenne. L’exemple

de l’Italie montre combien il est dif­ ficile d’éradiquer l’espèce si elle n’est pas combattue systématiquement dès le départ. Les répercussions peuvent être suite page 49

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Bellinzona

Locarno

Lugano

Le moustique tigre (en haut) nous vient des régions tropicales asiatiques. Il peut trans­ mettre des maladies infectieuses graves. Au Tessin, on le trouve depuis 2003 surtout dans la région frontalière de Chiasso. Pour surveiller cet insecte indésirable, le canton a mis en place des milliers de pièges (zones rouges). Lorsque des œufs, des larves ou des moustiques tigres adultes y sont identifiés, on les combat à l’aide d’insecticides. Photos: Centre européen de prévention et de contrôle des maladies, Stockholm; Peter Lüthy, Institut de microbiologie de l’EPFZ

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Mendrisio Chiasso Italie Source du graphique: Gruppo di lavoro zanzare, Bellinzona

environnement 3/09 > Organismes


Petit mais féroce

graves: durant l’été 2007, la fièvre de Chikungunya a sévi dans la région de Ravenne, touchant quelque 300 person­ nes. Cette infection virale, qui provoque de fortes douleurs des membres et des articulations, a été déclenchée par un touriste qui avait importé le virus après l’avoir contracté en Inde. Elle a ensuite été véhiculée par les piqûres agressives des moustiques tigres, très répandus dans cette partie de l’Italie, ce qui a per­ mis à la contagion de se propager. Pour éviter ce genre de situation, le canton du Tessin s’engage dans la prévention. « Dès que nous découvrons des sites avec des œufs et des larves de moustiques tigres ou des individus adul­ tes, nous les traitons de manière ciblée avec des insecticides chimiques ou bio­ logiques », explique Eleonora Flacio. « Nous opérons dans l’eau ou dans l’air. Le cas échéant, nous ne pulvérisons que les buissons et les haies. Il s’agit de trouver un équilibre entre la protection de la population et celle de l’environ­ nement. » C’est la raison pour laquelle l’OFEV et l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) participent tous deux financièrement à la lutte. Le projet sert également de modèle à l’élaboration de stratégies pour des cas analogues. « Nous ne connaissons pas encore le nombre d’insectes à partir duquel il y a un risque de propagation de maladies », reconnaît Anne-Gabrielle Wust Saucy. Mais toute intervention chimique en­ traîne des dégâts environnementaux indésirables en nuisant à la faune. « La perturbation des écosystèmes se reporte sur la chaîne alimentaire de nombreux

Organismes > environnement 3/09

amphibiens et d’autres espèces anima­ les. » Il y va du maintien de la biodiver­ sité. C’est pourquoi la prévention doit avoir la priorité. Infos au point. Les relations publiques ont leur rôle à jouer. La plupart des lieux d’incubation potentiels du moustique tigre se trouvent en effet sur des ter­ rains privés, comme dans les coupelles des plantes en pot ou les collecteurs d’eau de pluie. Le canton du Tessin in­ forme par conséquent régulièrement la population par la presse, la radio et le site internet www.ti.ch/zanzare. Des prospectus sont également distribués aux ménages dans la région proche de la frontière italienne. La consigne est de ne pas laisser de l’eau stagner inutilement ou de la renouveler toutes les semaines, et de recouvrir les collecteurs d’eau de pluie d’une moustiquaire. Qui découvre un moustique suspect doit le tuer et ap­ peler le numéro 091 935 00 47. De l’avis de l’OFEV, la méthode sui­ vie par le Tessin n’est pas seulement exemplaire, « mais riche d’enseigne­ ments sur l’évolution du climat, car il s’agit d’un monitoring à long terme », dit Anne-Gabrielle Wust Saucy. « A la suite du réchauffement, de plus en plus de territoires vont devenir des habitats potentiels pour des espèces importées pour lesquelles ils étaient trop froids naguère. Vue sous cet angle, la propaga­ tion du moustique tigre est un indicateur de changements climatiques durables. » Vera Bueller www.environnement-suisse.ch/magazine2009­ 3-11

vb. L’insecte ne mesure que cinq à dix millimètres et porte le nom scientifique d’Aedes albopictus. Il est facile à reconnaître: son corps et ses pattes sont noirs tigrés de blanc, et une rayure blanche court sur sa tête et son thorax. Le moustique tigre peut trans­ mettre 23 virus différents, dont ceux de la dengue, de la fièvre jaune et de la fièvre de Chikun­ gunya. Il est plus désagréable que les moustiques courants parce qu’il est agressif et pique aussi de jour; en outre, ses piqûres sont ex­ trêmement douloureuses. Vivant à l’origine en Asie, le moustique tigre conquiert petit à petit la terre entière, bien qu’il vole fort mal et ne se déplace pas plus de deux cents mètres par ses propres forces. Généralement, il voyage comme passager clandes­ tin des voitures ou des bateaux. Ses lieux d’incubation sont de petites flaques dans les trous des troncs d’arbre et les cavités ro­ cheuses, mais aussi dans les pneus mis en décharge, les canettes vides, les coupelles des plantes en pot ou les réceptacles d’eau de pluie. Sous nos latitudes, il est actif entre mars et novembre.

CONTACTS Anne-Gabrielle Wust Saucy Section Biotechnologie et flux de substances OFEV 031 323 83 44 anne-gabrielle.wust-saucy@bafu.admin.ch Nicole Gysin

Office fédéral de la santé publique

OFSP

031 323 87 08

nicole.gysin@bag.admin.ch

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NATURE ET PAYSAGE

Cours d’eau: on les préfère naturels Les projets fleurissent aujourd’hui pour libérer les cours d’eau de leurs lits de béton et les rendre à leur état naturel. Comme nous l’apprend une étude de l’OFEV, les rivières ainsi revitalisées représentent une réelle valeur ajoutée pour la population.

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environnement 3/09 > Nature et paysage


Les cours d’eau revitalisés – ici l’Aire, dans le canton de Genève – sont des lieux de détente très prisés. Dans une nouvelle étude, la Confédération a sondé la disposition des habitants à soutenir une renaturation. Photo: service cantonal genevois de renaturation des cours d’eau

L’Aire prend sa source au sud de Genève, au pied du Salève, et se jette dans l’Arve peu avant de rejoindre le Rhône. Il y a quelques années encore, elle était cana­ lisée, complètement transformée par la main de l’homme: « C’était un fossé avec un mètre de béton de chaque côté. La ri­ vière était souvent complètement sèche en été », se souvient Benoît Lance, qui habite juste à côté. Et pas question de s’y rafraîchir: la pollution était telle que la pêche et la baignade y étaient inter­ dites entre 1982 et 2005 pour des rai­ sons sanitaires. Entre-temps, la nature est à nouveau reine sur un tronçon de 600 mètres et les berges sont redevenues accueillantes, autant pour la faune et la flore que pour les promeneurs. « Main­ tenant, c’est attractif toute l’année », ra­ conte Benoît Lance. « La rivière reprend ses marques, le paysage est beaucoup plus varié. De nombreuses plantes s’y installent naturellement, et ça a amené plus de vie au niveau de la faune. » D’ici quelques années, environ 4,5 kilomètres de l’Aire auront ainsi quitté leur corset de béton, dans le cadre d’un programme de renaturation lancé en 1997 par le canton de Genève. Loisirs et détente en prime. Dans la grande majorité des cas, les revitalisations sont réalisées au sein de plans plus vastes de protection contre les crues ou d’assainis­ sement des eaux usées. A Genève au contraire, le paysage et la nature sont souvent au centre des projets. « Si, depuis les inondations de Lully en 2002, les ha­ bitants sont très préoccupés par l’aspect sécuritaire de la protection contre les crues, je rencontre de nombreuses per­ sonnes très satisfaites des aménagements du paysage », nous explique Francis

Nature et paysage > environnement 3/09

La méthode des choix discrets Ce qu’on appelle en anglais « discrete choice experiment » est une méthode de plus en plus utilisée pour donner une va­ leur monétaire aux biens environnemen­ taux. Dans le cas présent, elle a été adop­ tée pour chiffrer la valeur immatérielle associée aux cours d’eau. Les habitants des régions concernées ont dû, à plu­ sieurs reprises, choisir entre le statu quo et différents scénarios de revitalisation. Ils ont ainsi pu opter pour une renatu­ ration simple ou élaborée, évaluer les variantes avec ou sans accès pour la mo­ bilité douce et se décider entre un trajet long d’un ou de deux kilomètres. Chaque variante impliquait une imposition dif­ férente. C’est donc indirectement que les personnes interrogées ont donné un prix à leur rivière et défini quelle sorte de projet elles seraient prêtes à soutenir.

Delavy, du service cantonal de renatura­ tion des cours d’eau. Une fois rendus à leur état naturel, les cours d’eau deviennent plus sédui­ sants pour la population, non seulement grâce à la beauté du paysage, mais aussi parce qu’on peut s’y détendre ou prati­ quer sports et loisirs à proximité. C’est ce qui ressort de l’étude sur la valeur ajou­ tée des cours d’eau naturels réalisée par l’OFEV en collaboration avec l’Office fé­ déral des routes (OFROU) et l’association faîtière Suisse Rando. Quatre cours d’eau fortement altérés mais ne faisant pas l’objet d’un projet de renaturation ont été sélectionnés pour l’étude: la Broye

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(VD), la Glatt (ZH), la Dünnern (SO) et la Sorne (JU). Le « prix » d’une rivière. Près de la localité

vaudoise de Payerne, les alentours de la Broye ont été fortement bâtis et sa mor­ phologie corrigée. Si les habitants se ren­ dent encore régulièrement et volontiers sur ses bords, 73% des personnes inter­ rogées se disent tout de même en faveur d’une renaturation. L’étude de l’OFEV avait pour objectif de connaître la dis­ position des habitants à soutenir finan­ cièrement un tel projet, et par là même

sirs existe déjà. Si la population est prête à soutenir financièrement une revitali­ sation à raison d’au moins 71 francs par personne et par an, elle ne soutiendrait pas un projet supprimant le sentier. Les gens préféreraient alors en rester au sta­ tu quo: laisser la morphologie de la Broye telle quelle mais conserver la possibilité de pratiquer des activités sur ses rives. Dans le canton de Soleure, les ha­ bitants de Balsthal sont encore davan­ tage disposés à soutenir la renaturation de la Dünnern, sur la base d’au moins 149 francs par an et par personne. Comme

La possibilité de randonner ou de faire du vélo près des cours d’eau est très importante pour l’acceptation d’une renaturation. de chiffrer la valeur ajoutée d’un cours d’eau revitalisé. Mais la rivière, si elle a une dimension affective pour beaucoup de monde, n’a pas de prix, on ne peut ni l’acheter, ni la vendre. C’est donc grâce à des méthodes statistiques que les auteurs de l’étude ont pu déterminer quelle va­ leur les habitants lui attribuent et ce qu’ils seraient prêts à payer pour une re­ naturation (voir encadré page 51). L’accès est essentiel. De manière géné­ rale, les projets ne proposant pas de che­ min le long de la rivière sont rapidement écartés. La possibilité de randonner ou de faire du vélo près des cours d’eau est en effet très importante pour l’acceptation d’une renaturation, selon Gabrielle Gspo­ ner, de l’OFROU. Cela se vérifie à Payerne, où un sentier permettant détente et loi-

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il n’existe pas encore de chemin, l’amé­ nagement d’un sentier représenterait un réel plus pour la région. Cela se traduit par une participation financière addi­ tionnelle de 107 francs par an et par per­ sonne que seraient prêtes à accepter les personnes interrogées. Andreas Hauser, économiste à l’OFEV, est convaincu que mettre la politique environnementale au service du bienêtre de l’homme profite, à long terme, un maximum à la nature. Il précise que « l’étude menée nous donne des indica­ tions concrètes sur la manière dont cela peut se passer dans le cas de revitalisa­ tions des fleuves ». Des atouts multiples. Ainsi, un chemin de randonnée peut rendre un projet de renaturation attrayant. Les habitants

se contenteraient d’une infrastructure simple et préfèrent des sentiers non gou­ dronnés, qui permettent parfois un accès direct au cours d’eau. La présence de bancs ou d’emplacements pour faire des feux est considérée comme moins impor­ tante par la population, qui ne serait pas prête à financer davantage un parcours fortement aménagé qu’un projet plus modeste. Le paysage naturel, la rivière coulant à sa guise, la faune et la flore qui repren­ nent leurs droits: l’existence même de tous ces éléments est précieuse en soi – les économistes parlent de valeurs non utilitaires (« non-use values »). Mais si une revitalisation profite ainsi à la protection de la nature, elle constitue également une valeur ajoutée pratique (« use value ») pour la population, par la création non seulement d’un paysage attractif, mais aussi d’une zone de détente, de loisirs et de mobilité douce. Wieke Chanez www.environnement-suisse.ch/magazine2009­ 3-12

CONTACT Andreas Hauser Section Economie OFEV 031 322 79 15 andreas.hauser@bafu.admin.ch

environnement 3/09 > Nature et paysage


AGRICULTURE

Des pommes et des oiseaux

Le jus de pomme a de nouveau la cote. Ce succès profite au développement des vergers haute-tige ainsi qu’à une bonne trentaine d’espèces d’oiseaux indigènes qui aiment y nicher. Certaines sont menacées, comme le rouge-queue à front blanc.

Vue panoramique garantie: l’agriculteur Robert Schwander dans son verger près de Nunwil (LU), au-dessus du lac de Baldegg.

Quand le père de Robert Schwander s’occupait encore de la ferme près de Nunwil (LU), il le faisait le matin de bonne heure ou le soir après le travail. Avec ses 6,4 hectares de surface agricole utile, l’exploitation est petite même pour la région. Les quelques vaches ne fournissaient qu’un revenu d’appoint à son salaire de manœuvre.

Biodiversité > environnement 3/09

En 1992, Robert a repris le domaine avec sa femme Rita. Lui aussi a commencé par travailler à l’extérieur. Aujourd’hui, il est paysan à plein temps, a deux enfants et la famille s’en sort bien. Les Schwander ont trouvé une niche sur le marché des produits agricoles: la vente directe de fruits et légumes de production biologique – et la biodiversité.

Photo: OFEV / AURA, E. Ammon

260 hautes-tiges. La ferme est située sur un coteau ensoleillé surplombant le lac de Baldegg. La maison d’habitation, les cultures de légumes en plein champ et sous tunnel et les vergers basse-tige sont entourés de 260 arbres fruitiers haute­ tige. Ceux-ci portent surtout des pom­ mes, mais aussi des quetsches, des poires et des cerises. Entre les troncs paissent

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Les hautes-tiges ne donnent pas seulement des fruits savoureux; ils abritent aussi une bonne trentaine d’espèces d’oiseaux indigènes nichant surtout dans les vergers. Le rouge-queue à front blanc en fait partie.

des bovins écossais. Tous les samedis, Robert et Rita Schwander dressent leur stand au marché de Lucerne et vendent légumes, fruits de table et jus de pomme à une clientèle fidèle. Le jus est pressé exclusivement à partir de la production des hautes-tiges (cinq à dix tonnes par an). Pendant la saison des pommes, une fois par semaine, l’agriculteur apporte à la cidrerie les fruits récoltés les jours précédents par secouage. « Ainsi, seuls

Un paradis pour le rouge-queue à front blanc.

Le meilleur jus de pomme est celui qui est fraîchement pressé après la récolte. Mais même pasteurisé, il est aussi diffé­ rent ici d’un jus ordinaire qu’un grand cru d’un simple vin de table. Et les oi­ seaux apprécient le cadre: à la mi-avril 2009, un concert de gazouillis accueille les visiteurs. Un pic-vert lance ses appels depuis la couronne d’un pommier d’en­ viron 150 ans.

Avec leurs plantations peu denses et leurs cultures intercalaires de prairies et de pâturages extensifs, les vergers haute-tige forment un paysage qui attire de nombreuses espèces animales. les plus mûrs sont livrés au pressoir », explique-t-il, « ce qui permet de garantir toute la saveur du jus. » Celle-ci change d’une fois sur l’autre en fonction des variétés parvenues à maturité. Il y en a trente-cinq, dont quelques-unes, très anciennes, sont aujourd’hui menacées et figurent sur la liste de Pro Specie Rara. Elles portent des noms mélodieux comme « Rouge de Stettin » ou « Reine des reinettes ».

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Le rouge-queue à front blanc, lui, n’est pas encore rentré de ses quartiers d’hiver dans le Sahel africain. Ce grand migrateur achèvera bientôt son man­ dat d’oiseau de l’année 2009. Une dis­ tinction de l’Association suisse pour la protection des oiseaux (ASPO/Birdlife Suisse) dont il se serait volontiers passé, sachant qu’elle n’est généralement oc­ troyée qu’à des espèces en voie de dispa­ rition.

Le rouge-queue figure parmi la bonne trentaine d’oiseaux nichant principalement dans les vergers. Il construit son nid dans les cavités d’arbres âgés et cherche sa nourriture dans les prairies alentour: araignées, coléoptères et che­ nilles. Il a connu son heure de gloire au milieu du XXe siècle, lorsque quinze millions d’arbres fruitiers haute-tige s’élevaient dans notre paysage. Aujour­ d’hui, il n’en reste que 2,3 millions. Des encouragements bienvenus. Les vergers

de hautes-tiges comptent parmi les mi­ lieux naturels les plus riches en espèces des régions agricoles. Les plantations peu denses et leurs cultures interca­ laires de prairies et de pâturages exten­ sifs forment un paysage semi-ouvert rappelant celui de la savane. Des insectes aux chauves-souris, il attire de nom­ breuses espèces animales. Voilà pourquoi, depuis 1993, la Con­ fédération paie une contribution écolo­ gique annuelle de quinze francs pour chaque haute-tige. Ainsi, aujourd’hui, les paysans conservent plus volontiers un vieil arbre, même s’il ne donne pas beaucoup et que la cueillette est plus dif­ ficile. Mais il ne s’agit pas encore d’une véritable incitation à planter et entrete­

environnement 3/09 > Biodiversité


Photos: Nicolas Martinez (au centre); OFEV / AURA, E. Ammon

nir des vergers. Les choses deviennent plus intéressantes lorsqu’une prime de trente francs à la qualité vient s’y ajou­ ter. Depuis 2009, les exigences ont été renforcées tant pour la contribution de base que pour le supplément. Par exemple, un verger doit comprendre au moins dix hautes-tiges. Il faut en outre une autre surface de compensation éco­ logique éloignée de cinquante mètres au maximum, et au moins un élément structurel pour vingt arbres – haie, tas de bois mort, nichoir à abeilles sau­ vages, etc. L’exploitation de Robert Schwander remplit aisément toutes ces exigences, car le développement de la biodiver­ sité fait partie de la philosophie de l’entreprise, et cela pour une raison très pratique: il faut toujours suffisamment d’insectes prédateurs pour contenir les divers ravageurs. Depuis 2004, le paysan participe également au projet de mise en réseau de Römerswil-Herlisberg-Retschwil (LU): regroupant aujourd’hui plus de qua­ rante exploitations, ce projet repose pour l’essentiel sur la conservation et la promotion des arbres fruitiers et des haies. Le domaine de Robert et Rita Schwander a ainsi droit à une contribu­

Biodiversité > environnement 3/09

tion complémentaire de cinq francs par arbre et par an pour la mise en réseau. Un engagement rentable. En 2008, leurs

prestations spéciales pour la biodiversi­ té, le bien-être des animaux de rente et la protection des eaux ont rapporté aux Schwander un peu plus de 17 000 francs. Ces contributions écologiques ont donc représenté nettement plus de la moitié des paiements directs reçus. Ces derniers temps, des impulsions en faveur des hautes-tiges proviennent aussi du marché. Coop, par exemple, propose depuis 2008 du jus de pomme issu exclusivement de ce type de cul­ tures. Il coûte deux francs cinquante la bouteille d’un litre et demi et se vend bien. Selon Simona Matt, coordinatrice du projet Naturaline, en une année, il a déjà atteint 9 % du chiffre d’affaires dans le segment des jus de pomme et de poire. Le jus de pomme revient à la mode. Au cours de la seconde moitié du XXe siè­ cle, le jus de pomme, qui détenait quasi­ ment le monopole des boissons sucrées en Suisse, a été presque entièrement évincé par d’autres produits. Mais il connaît aujourd’hui un regain de po­

pularité. La consommation a augmenté de 20 % par rapport à 2001, où elle était tombée à son plus bas niveau. Cette tendance a des effets positifs sur la biodiversité, car pour des raisons de qualité, même le jus de pomme or­ dinaire est fabriqué pour près des deux tiers à partir de variétés haute-tige. « Sans elles, impossible d’obtenir ce goût corsé et épicé », explique Stephan Dur­ rer, secrétaire de l’organisation de certi­ fication « Hautes-tiges Suisse » qui œuvre pour la valorisation économique de ces vergers. Boire du jus de pomme, voilà une fa­ çon bien agréable de contribuer concrè­ tement à la protection des oiseaux! Cet automne, on peut de nouveau l’acheter fraîchement pressé. A votre santé – et longue vie au rouge-queue à front blanc! Hansjakob Baumgartner www.environnement-suisse.ch/magazine2009­ 3-13

CONTACT

Sarah Pearson Perret

Cheffe de la section Espèces et biotopes

OFEV

031 322 68 66

sarah.pearson@bafu.admin.ch

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LUTTE CONTRE LE BRUIT

Il est temps de changer les pneus

Lorsqu’une voiture est équipée de pneus silencieux, le bruit du roulement sur la chaussée est réduit de plus des deux tiers. Une nouvelle liste publiée par l’OFEV fournit des indications facilitant l’achat de modèles optimisés pour limiter les émissions sonores.

En Suisse, 1,2 million de personnes subissent à longueur de journée un bruit nuisible ou incommodant causé par le trafic routier. Les moteurs et le roulement des camions, voitures et motocycles sont donc de loin la source principale de pollution sonore. Depuis que les valeurs limites applicables aux moteurs des voitures de tourisme ont été abaissées, ce n’est plus la propulsion qui domine; à partir de 40 kilomètres à l’heure (km/h), ce sont les pneus qui sont les plus bruyants. Nous pouvons certes déplacer le tra­ fic et durcir les critères d’homologation des véhicules, mais deux approches techniques permettent de réduire ces émissions directement à la source: po­ ser des revêtements phonoabsorbants sur les chaussées et monter des pneus silencieux sur les véhicules à moteur. « Aujourd’hui déjà, des pneumatiques nettement moins bruyants sont en vente », déclare Gregor Schguanin, de la division Lutte contre le bruit à l’OFEV. « Mais les personnes intéressées ne pouvaient malheureusement pas les identifier jusqu’à présent, faute d’indi­ cations. » Aide à l’achat. Afin d’améliorer l’infor­ mation, l’OFEV a publié récemment sur son site (www.bafu.admin.ch/bruit > Liens et informations > Pneus silen­ cieux) une liste des pneus particuliè­ rement silencieux commercialisés en Suisse. Cette aide à la décision, qu’il est prévu de mettre à jour périodiquement, se base sur des mesures expérimentales indépendantes, réalisées par des cen­ tres de contrôle officiels allemands et néerlandais. Plus de 200 types de pneus provenant de divers fournisseurs ont été

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testés sur des parcours standardisés. Les essais consistent à lancer des véhicules à 80 km/h, moteur coupé, sur une chaus­ sée asphaltée bordée de micros. Si les pneus standard – selon l’homologation officielle – génèrent un niveau sonore de 74,5 décibels au maximum, les mo­ dèles silencieux émettent cinq à huit dé­ cibels de moins. L’échelle de mesure est logarithmique, si bien qu’une réduction de trois décibels correspond à une dimi­ nution du bruit de moitié et une réduc­ tion de cinq décibels supplémentaires à une diminution des deux tiers. La liste de l’OFEV propose des pneus « silencieux » dont le niveau sonore est inférieur d’au moins cinq à huit déci­ bels à la valeur limite européenne et mentionne ici 26 produits de fabricants connus comme Goodyear, Yokohama, Pi­ relli, Vredestein, Bridgestone, Continen­ tal, Dunlop et Michelin. Les 48 autres pneus signalés ont un niveau sonore qui se situe trois à quatre décibels en dessous des normes de l’UE, également adoptées par la Suisse; ils sont jugés

n’affectent pas la sécurité. Au contraire, les pneus silencieux se comportent mieux sur route humide et raccour­ cissent la distance de freinage. Cerise sur le gâteau, la résistance moindre au roulement permet d’économiser du car­ burant et de réduire ainsi les rejets de gaz carbonique, le principal gaz à effet de serre. Limites sonores bientôt abaissées? Le bruit émis par la plupart des pneus de voiture disponibles sur le marché étant déjà inférieur de plusieurs décibels aux valeurs limites en vigueur en Europe, le centre de recherche spécialisé FEHRL (Forum of European national Highway Research Laboratories) a évalué à la demande de la Commission européenne ce qu’impliquerait l’instauration de seuils plus sévères. Le rapport conclut que toutes les classes de pneumatiques ont de la marge. Abaisser de cinq déci­ bels les limites applicables aux pneus de voiture reviendrait à inscrire dans la loi le niveau technique atteint par de nom-

Abaisser de cinq décibels les limites applicables aux pneus de voiture inciterait les fabricants à perfectionner leurs procédés pour réduire encore le niveau sonore. « relativement silencieux ». Les deux ca­ tégories comprennent des pneus d’hiver et d’été. Composés d’un mélange spécial de gomme au silicium, ils présentent un profil plus fin et sont parfois un peu plus étroits que les pneus standard. Des tests de freinage sur chaussée mouillée ont montré que ces caractéristiques

breux fabricants et les inciterait à per­ fectionner leurs procédés pour réduire encore le bruit de ces articles. La mise en œuvre systématique de cette mesure permettrait de diminuer des deux tiers les émissions sonores de la route et d’épargner à la collectivité et au secteur privé des mesures antibruit – nouveaux

environnement 3/09 > Lutte contre le bruit


Si toutes les voitures étaient équipées de pneus silencieux, le bruit de la route pourrait être diminué des deux tiers. Photo: Keystone

revêtements, parois phonoabsorbantes, fenêtres insonorisées, etc. – qui coûtent des milliards. Au moins 210 millions de victimes de la pollution sonore due à la route devraient en profiter dans les 27 pays européens, sans compter les derniers adhérents, la Roumanie et la Bulgarie, qui ne sont pas encore pris en compte dans l’étude. Des milliards économisés. D’après les

calculs du FEHRL, l’introduction des nouveaux seuils de bruit proposés pour les pneus de voiture permettrait d’éco­ nomiser 48 à 123 milliards d’euros en­

Lutte contre le bruit > environnement 3/09

tre 2010 et 2022. La borne inférieure de cette fourchette dépasse déjà largement les coûts à consentir par les fabricants pour adapter leurs produits, car ils ont déjà investi par le passé les sommes nécessaires à la recherche et au déve­ loppement de pneus silencieux. Ils de­ vraient tout au plus prendre en compte les pertes occasionnées par l’arrêt de la production de certains modèles qui ne satisferaient plus aux normes. « Quel que soit l’abaissement des li­ mites légales applicables dans l’UE et en Suisse, les personnes qui achètent et consomment en se souciant de l’en­

vironnement peuvent dès maintenant faire un geste et accorder la préférence aux modèles silencieux lorsqu’elles changent leurs pneus », recommande Gregor Schguanin. Beat Jordi www.environnement-suisse.ch/magazine2009­ 3-14 CONTACT

Gregor Schguanin

Section Routes, véhicules

Division Lutte contre le bruit

OFEV

031 324 86 74

gregor.schguanin@bafu.admin.ch

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Du côté du droit

Crues: le Tribunal fédéral soutient la stratégie de l’OFEV

En rejetant un recours contre l’assainissement du canal de la Linth, le Tribunal fédéral (TF) a confirmé les principes modernes de protection contre les crues promus par l’OFEV. L’ouvrage de la Linth, composé essentiellement du ca­ nal Escher et du canal de la Linth, s’étend sur trois can­ tons: Glaris, Saint-Gall et Schwyz. Construit au début du XIXe siècle, il n’est plus en mesure de répondre aux dan­ gers présentés par une crue centennale (HQ 100). Pour le canal de la Linth, le projet « Linth 2000 » pré­ voit désormais l’écoulement de 360 mètres cubes d’eau par seconde (m3/s), soit le débit d’une crue centennale. Un déversoir de secours est planifié pour des masses d’eau encore plus importantes. Des mises en valeur éco­ logiques doivent en outre améliorer les habitats aqua­ tiques de la rivière. Devant le TF, les recourants ont exigé que le canal puisse écouler sur toute sa longueur au moins 500 m3/s. Le déversement des eaux vers les zones riveraines ne de­ vrait se faire, selon eux, qu’à partir d’un débit supérieur à 500 m3/s. Le TF leur répond que, conformément à la « matrice des objectifs de protection » de l’OFEV, la norme appli­ quée en Suisse n’est pas identique pour toutes les zones: les aires bâties sont protégées contre une crue centen­ nale (HQ 100), tandis qu’une prise en compte des événe­ ments de type HQ 20 est suffisante pour les terrains agri­ coles. Malgré cela, Linth 2000 protège l’ensemble de la plaine de la Linth, y compris les terrains agricoles des recourants, contre une crue HQ 100; il sera même pos­ sible, pour une durée limitée, d’évacuer dans le canal un débit de 420 m3/s (soit la valeur HQ 300). Les dommages éventuels subis par les parcelles lors de l’utilisation du déversoir de secours seront couverts par la Commission de la Linth. Pour le TF, les recourants bénéficient ainsi de conditions nettement supérieures à la norme suisse. Ce jugement confirme la légalité et l’opportunité d’une protection moderne contre les crues telle que la conçoit l’OFEV, avec – à côté des constructions tech­ niques – des mesures d’aménagement du territoire et de mise en valeur écologique.

Paru récemment

> Informations complémentaires: Mark Govoni, division Droit,

OFEV, 031 323 78 08, mark.govoni@bafu.admin.ch;

TF: arrêt 1C_148/2008

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Environnement en général

Economie

L’environnement suisse – Statistique de poche 2009. Petite brochure

publiée par l’Office fédéral de la statistique (OFS) et l’OFEV. 36 p.; F, D, I, E;

gratuit; à commander auprès de l’OFS, 2010 Neuchâtel, 032 713 60 60,

fax 032 713 60 61, order@bfs.admin.ch, www.environment-stat.admin.ch,

n° de commande: 522-0900.

Avec des données clés, des graphiques et des commentaires succincts, la

statistique de poche présente l’état actuel de l’environnement en un bref

tour d’horizon.

Cette publication est jointe aux exemplaires du magazine adressés aux abonnés.

Wohlfahrtsbezogene Umweltindikatoren. Eine Machbarkeitsstu­ die zur statistischen Fundierung der Ressourcenpolitik. 164 p.; D;

Bruit Pollution sonore en Suisse. Résultats du monitoring national SonBase. 64 p.; F, D, I, E; pas de version imprimée; UZ-0907-F. Première description à l’échelle nationale de l’ampleur de l’actuelle pollu­ tion sonore en Suisse. Le rapport couvre les trois sources majeures de bruit, la circulation routière, le trafic ferroviaire et le trafic aérien, ainsi que les surfaces, personnes, logements, bâtiments et places de travail qui y sont exposés.

SonBase – die GIS-Lärmdatenbank der Schweiz. Grundlagen. 61 p.; D, E; pas de version imprimée; UW-0908-D.

Le rapport décrit la structure de SonBase et les méthodes qui sont appliquées.

Résultat d’une surveillance continue, cette banque de données renseigne sur

l’état de la pollution sonore en Suisse. Elle permet ainsi des évaluations sta­ tistiques et des analyses locales.

20 francs; UW-0913-D.

L’approche décrite ici permet de recenser les prestations environnementales

sous forme de prestations environnementales finales (FES, Final Ecosystem

Services). Elle est utile, même si son application est difficile.

Economie / Cours d’eau Mehrwert naturnaher Wasserläufe. Untersuchung zur Zahlungs­ bereitschaft mit besonderer Berücksichtigung der Erschliessung für den Langsamverkehr. 124 p.; D; 20 francs; UW-0912-D. Pour quatre cours d’eau, l’étude a calculé la disposition des gens à financer différents aspects des projets de revitalisation. Elle s’appuyait sur la méthode des choix discrets. Les rivières proches de l’état naturel représentent une va­ leur ajoutée pour la population si elles sont accessibles à la mobilité douce.

Education à l’environnement Agir pour l’avenir. Dossier pour l’éducation en vue du développement du­ rable, réalisé par la Fondation Education et développement et la Fondation suisse d’éducation pour l’environnement. 16 p.; F, D, I; gratuit; commande de la version imprimée: Fondation Education et développement, case postale 8366, 3001 Berne; téléchargement: www.globaleducation.ch > Références > Education en vue du développement durable.

Dangers naturels Confortement parasismique de constructions. Stratégie et recueil d’exemples en Suisse. 86 p.; F, D; pas de version imprimée; UW-0832-F. Cette publication présente un aperçu détaillé de la problématique du confortement parasismique d’ouvrages existants. Elle illustre les stratégies pos­ sibles à l’aide de 24 exemples de projets réalisés et fournit des aides à la décision.

Déchets Rapport sur la gestion des déchets 2008. Politique suisse de ges­ tion des déchets 2005–2007: données et perspectives. 121 p.; F, D;

gratuit; UZ-0830-F.

Ce rapport contient les données concernant les domaines principaux de la

gestion des déchets, notamment l’élimination et la valorisation des déchets

urbains, des déchets spéciaux et des déchets de chantier.

Eau / Energie Exploitation de la chaleur tirée du sol et du sous-sol. Aide à l’exécution destinée aux autorités d’exécution et aux spécialistes de géothermie. 51 p.; F, D; gratuit; UV-0910-F. Cette aide à l’exécution vise à harmoniser l’octroi d’autorisations en faveur de sondes géothermiques, pompes à chaleur eau-eau, circuits enterrés, cor­ beilles géothermiques et pieux énergétiques en Suisse. Elle fixe également les mesures de protection des eaux à mettre en œuvre.

environnement 3/09

Toutes les publications de l’OFEV sont disponibles sous forme électronique; les fichiers PDF peuvent être téléchargés sous www.environnement-suisse.ch/publications Certains ouvrages existent également en version imprimée; ils peuvent être commandés à l’adresse suivante: OFEV Centrale d’expédition CH-3003 Berne tél. +41 (0)31 322 89 99 fax +41 (0)31 324 02 16 docu@bafu.admin.ch www.environnement-suisse.ch/publications

N’oubliez pas le numéro de commande de la publication souhaitée! Vous trouverez un bulletin de commande inséré dans ce numéro. Des frais de port sont prélevés pour les grandes quantités, même si la publication est gratuite. Indications bibliographiques: Titre. Sous-titre. Editeur (autre que l’OFEV). Nombre de pages; langues disponibles; prix; numéro de commande pour les versions imprimées ou code à saisir dans le champ de recherche pour le téléchargement gratuit du fichier PDF.

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Faits et gestes

demandes, Rétropomme mettra sur pied une aide technique et financière à la plantation, des conseils pour le choix des variétés, des cours de taille et un suivi à long terme.

Opération SOS vergers

Ça roule pour les petites reines

Saviez-vous que le gonflage des pneus a une influence sur votre facture de carburant? Que la consommation de courant en mode veille d’un ménage de quatre personnes s’élève en moyenne à 435 kilowattheures par an et re­ présente un coût de 90 francs? Qu’il existe des sèche-linge à pompe à chaleur intégrée? Toutes ces informations sont à découvrir sur le site www.les-petits-trucs.ch, tout comme les vidéos désopilantes qui complètent cette cam­ pagne de SuisseEnergie.

Le réseau des vélos en libre service ne cesse de grandir. Il est maintenant possible d’em­ prunter des deux-roues dans nombre de villes romandes. A Lausanne, Renens, Vevey, Genève, Sion et Neuchâtel se sont ajoutés dernièrement plusieurs cités valaisannes, Morges, Yverdon, Echallens, ainsi que le site de l’EPFL. Le sys­ tème est simple: on dépose sa carte d’identité et une petite caution et, une fois sa course ter­ minée, on ramène l’engin à la station de prêt.

www.arboretum.ch; 45 francs

Environnement et école

> www.suisseroule.ch

suisseroule

SOS vergers

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L’Arboretum national du Vallon de l’Aubonne (VD) est connu à la ronde pour sa collection d’environ 4000 plantes ornementales, fores­ tières ou fruitières et son Musée du bois. Ce printemps, il a sorti un jeu de société permet­ tant de se familiariser avec les différentes es­ sences. Le principe et les règles s’apparentent au Trivial Pursuit avec une touche typique du jeu de l’oie. Les pions sont fabriqués à partir d’essences fournies par l’Arboretum. L’argent récolté sert au développement et à l’entretien du lieu.

> Disponible en trois langues, sur place ou sous

> www.les-petits-trucs.ch

L’hiver 2008/2009 et ses tempêtes ont fait payer un lourd tribut aux vieux arbres de nos campagnes. Pour remédier à cette hécatombe, l’hebdomadaire « Terre & Nature », en collabo­ ration avec l’association Rétropomme, lance un appel aux communes et particuliers désireux de planter au minimum trois arbres fruitiers à hautes tiges. En fonction de l’ampleur des

> www.pro-velo.ch, www.actif-trafic.ch Connaître les arbres en jouant

> www.retropomme.ch

Les petits trucs

toute la Suisse romande. La seconde concerne plus particulièrement le canton de Genève et entend y soutenir la mobilité douce en général.

Mobilisations cyclistes Rouler à vélo, c’est bien, se sentir en sécurité en pédalant, c’est mieux. Deux pétitions ont été lancées ce printemps en pays romand pour améliorer la circulation des deux-roues. Celle de l’association Pro Vélo milite pour davantage d’égards vis-à-vis des cyclistes ainsi que pour des aménagements adéquats et sécurisés dans

Il est désormais possible, sur le site internet du WWF, de s’abonner à un bulletin électronique destiné aux enseignants. Six fois par an, celuici présente de nouveaux projets scolaires dans le domaine de l’éducation à l’environnement et propose du matériel pédagogique à télécharger.

> www.wwf.ch > Soyez actifs > Formation et écoles > WWF Ecole

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Chèque énergie

Clic-clac pour la nature L’Association des photographes naturalistes de Suisse a pour but de promouvoir la protection de l’environnement, de la nature et du paysage en mettant l’accent sur la photographie des beautés minérales, végétales et animales. Les membres bénéficient de formations, de sémi­ naires et d’ateliers, ainsi que d’échanges entre personnes intéressées.

Mergoscia, à l’entrée du val Verzasca (TI), et loue également cinq chalets aux vacanciers, classes d’écoles et autres organisations.

mise à disposition

> Coopérative Campo Cortoi, Mergoscia (TI), 091 745 26 08, campocortoi@email.ch, www.campocortoi.ch (en allemand)

Martin-pêcheur

Jusqu’à la fin de l’année, le canton de Genève donne un sérieux coup de pouce aux énergies renouvelables. Il met à disposition des pro­ priétaires genevois entre 12 et 18 millions de francs pour des travaux visant à réduire la consommation d’énergie des bâtiments ou à utiliser une source d’énergie renouvelable. Conditions: les travaux doivent être terminés en décembre, s’effectuer sur le territoire canto­ nal et dépasser 1000 francs. Ces subventions s’inscrivent dans la lignée du projet de loi ge­ nevois sur l’énergie œuvrant pour une « société à 2000 watts sans nucléaire ».

> www.cheque2009energie.ch

Hansruedi Weyrich

> Photographes naturalistes de Suisse, c/o Hansruedi Weyrich, Täuffelen (BE), 079 396 10 82, info@naturfotografen.ch, www.naturfotografen.ch (en allemand). Cotisation annuelle: 100 francs (150 francs pour les couples).

Veiller sur les troupeaux Le WWF recherche des aides-bergers disposés à soutenir les gardiens de troupeaux pendant deux à quatre semaines sur des alpages où rodent peut-être de grands prédateurs. L’objectif est d’améliorer la coexistence de l’économie alpestre et des carnassiers comme le loup, l’ours ou le lynx. Le WWF cherche éga­ lement des bergers et des éleveurs intéressés.

La main à l’ouvrage dans les mayens tessinois

> WWF Suisse, siège régional romand,

La coopérative Campo Cortoi conjugue travail des jeunes et entretien du paysage rural. Elle organise des camps de vacances et des cours dans des anciens mayens situés au-dessus de

www.wwf.ch > Soyez actifs > Devenez bénévole >

022 939 39 90, service-info@wwf.ch, Aide aux bergers

Impressum 3/09, septembre 2009 / Le magazine environnement paraît quatre fois par an; l’abonnement est gratuit; n° ISSN 1424-7135 / Editeur: Office fédéral de l’environnement

(OFEV). L’OFEV est un office du Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC) / Direction du projet: Bruno Oberle, Thomas Göttin / Conception, rédaction, production: Georg Ledergerber (direction), Kathrin Schlup (suppléante); Beat Jordi (bjo) et Peter Gerber (coordina­ tion du dossier Déchets); Hansjakob Baumgartner, Cornélia Mühlberger de Preux; Valérie Fries (secrétariat de la rédaction) / Collaborations externes: Vera Bueller, Wieke Chanez, Urs Fitze, Stefan Hartmann, Kaspar Meuli, Beatrix Mühlethaler, Pieter Poldervaart, Lucienne Rey; Peter Bader et Nicole Bärtschiger (rubriques); Danielle Jaurant (coordination et rédaction linguistique de la version française) / Traductions: André Carruzzo, Nadine Cuennet, Stéphane Cuennet (éditorial, rubriques), Milena Hrdina, Tatiana Kolly, Christian Marro, Stéphane Rigault, Catherine Trabichet / Réalisation et mise en page: Atelier Ruth Schürmann, Lucerne / Délai rédactionnel: 22 juin 2009 / Adresse de la rédaction: OFEV, Communication, rédaction environnement, 3003 Berne, tél. 031 323 03 34, fax 031 322 70 54, magazine@bafu.admin.ch / Langues: français, allemand;

italien (extraits) uniquement sur Internet / En ligne: sauf les rubriques, le contenu du magazine se retrouve sur www.environnement-suisse.ch/magazine / Papier: Cyclus Print, 100 % de vieux papier sélectionné / Tirage: 17 000 environnement, 46 000 umwelt / Impression et expédition: Zollikofer SA, 9001 Saint-Gall, www.swissprinters.ch / Abonnement gratuit, changement d’adresse et commande de numéros supplémentaires: voir page 2 / Copyright: reproduction du texte et des graphiques autorisée avec indication de la source et envoi d’un exemplaire justificatif à la rédaction.

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Filières et formations

Mettre une touche verte à son métier Au printemps 2010 débutera le quatrième cycle Conseil et communication en environnement du Centre de formation WWF. Mettant l’accent sur les aspects pratiques du dé­ veloppement durable, cette formation en cours d’emploi qui s’étend sur un an s’attache à proposer des solutions concrètes aux problèmes environnementaux et permet de se constituer un large réseau dans le domaine. En effec­ tuant une spécialisation, les participants peuvent obtenir le > www.wwf.ch > Actualités brevet fédéral de conseiller en environnement. et services > Centre de formation Commandez la brochure par téléphone au 022 939 39 90 ou par e-mail à centredeformation@wwf.ch. Une soirée d’information aura lieu le 28 octobre à Lausanne (sur ins­ cription).

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Dans le cadre de Midi Panda, le WWF invite les cantines scolaires et autres restaurants d’entreprises à ne proposer que des menus végétariens le 15 septembre 2009. Les ins­ titutions intéressées peuvent s’inscrire sur le site de l’organisation. > www.wwf.ch > Gestes écologiques > Alimentation > Actualités > Action Midi Panda

Journée romande de l’EDD

> www.scich.org Evaluer la durabilité des projets Les 11, 14 et 15 septembre 2009, l’ARE, l’IDHEAP et le sanu organisent un séminaire intitulé « Planifier et évaluer des projets selon le développement durable ». Les élus et les employés des communes et des cantons dé­ couvriront les instruments qui permettent de passer leurs projets au crible du développe­ ment durable. > www.idheap.ch > SSC

Agir pour l’avenir Les enseignants jouent un rôle prépondérant dans la promo­ tion du développement durable. Pour les soutenir dans cette démarche, la Fondation Education et développement (FED) et la Fondation suisse d’éducation pour l’environnement (FEE) ont réalisé un dossier national intitulé « Agir pour l’ave­ nir », en partenariat avec les revues pédagogiques régio­ nales Educateur, Scuola ticinese et Bildung Schweiz. Cette publication de 16 pages propose un éclairage sur la thé­ matique, met en valeur quatre projets scolaires et recense de nombreuses ressources pédagogiques. Elle a été soute­ nue par divers offices fédéraux – dont l’OFEV – et peut être commandée gratuitement ou téléchargée sur le site de la FED, en français, en allemand ou en italien. Elle est destinée à tous les acteurs suisses de l’éducation.

Sans viande à la mi-septembre

Les écogestes seront au cœur de la journée pratique romande d’éducation en vue du développement durable (EDD), le 12 septem­ bre 2009 à la HEP Fribourg. Idée centrale de cette rencontre: « Il ne suffit pas d’étein­ dre la lumière pour sauver la planète » – ou comment proposer davantage que de petits gestes concrets lorsqu’on sensibilise au déve­ loppement durable. > www.educ-envir.ch/jpedd/

S’engager à l’étranger S’attaquer aux problèmes environnementaux de manière concrète tout en découvrant les réalités d’un autre pays? C’est possible grâce aux camps de travail proposés par le Service civil international (SCI). Pendant deux semaines, des volontaires locaux et étrangers cherchent ensemble des so­ lutions créatives dans le cadre d’un projet d’intérêt général. Qu’il s’agisse de construire un pavillon pour soutenir le tou­ risme vert sur les rives bulgares du Danube ou de s’occuper d’oiseaux blessés dans une réserve naturelle espagnole, l’objectif du SCI reste de favoriser la paix grâce à la coopé­ ration et au développement durable.

BLOC-NOTES

Un siècle dans la vie d’une localité

> www.globaleducation.ch

Le centre Pro Natura de Champ-Pittet pré­ sente, jusqu’au 8 novembre 2009, une ex­ position interactive sur l’évolution des villes et des villages au cours du temps. « Cent ans dans la vie d’une localité » permet au visiteur de prendre des décisions d’aménagement du territoire et d’observer leurs répercussions sur huit localités. > www.pronatura.ch/champ-pittet > Expositions

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Portrait

Le rhododendron, une beauté protégée?

Le rhododendron ferru­ gineux (ci-dessus) et le rhododendron cilié se différencient principale­ ment par la face inférieure de leurs feuilles. Photo: Arthur Brühlmeier

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De nombreux randonneurs, après une virée dans les Alpes, redescendent un bouquet de rhodo­ dendrons roses ou rouges à la main, pour faire participer le bas pays aux beautés des sommets. Ces « roses ligneuses » – leur nom combine les mots grecs rhodon (rose) et dendron (arbre) – n’ont pas grand-chose à voir avec leurs semblables à épines: comme les bruyères ou les myrtilles, elles appartiennent à la grande famille des éri­ cacées. Les deux espèces présentes en Suisse sont d’ailleurs typiques des montagnes. On trouve d’une part le rhododendron ferru­ gineux (Rhododendron ferrugineum), aussi appelé rosage ou rose des Alpes. Présent également dans le Jura, les Pyrénées et les Apennins, il fleurit de juin à août. Le rhododendron cilié ou hirsute (Rhododendron hirsutum), quant à lui, dévoile ses fleurs de mai à juillet. On ne le trouve que dans les Alpes. Les feuilles du rhododendron ferrugineux sont glabres et leur face inférieure est brunrouge. De plus, cette espèce recherche les sols acides. Le rhododendron cilié, en revanche, pré­ sente des poils drus sur le bord de ses feuilles. La partie inférieure de celles-ci est vert clair par­ semé de taches rouille. Cette plante préfère les sols calcaires, notamment dans les éboulis.

Les rhododendrons sont toxiques. Leurs feuilles, leur nectar et leur pollen contiennent de la rhodotoxine ou andromédotoxine, une substance qui peut provoquer un empoisonne­ ment chez l’homme (par l’intermédiaire du miel) et chez les herbivores (par les feuilles). A l’échelle nationale, nos rhododendrons ne sont pas menacés et ne disposent donc d’aucune protection. Dans certains cantons, cependant, il est interdit de cueillir les deux espèces. C’est le cas de Lucerne, d’Obwald, de St-Gall, de Zurich et des deux demi-cantons d’Appenzell. Vaud et Grisons protègent le rhododendron ferrugineux, alors que son cousin hirsute bénéficie du même statut au Tessin. Il n’est guère judicieux de prendre des rho­ dodendrons indigènes dans les montagnes pour les replanter dans son jardin. Ces plantes n’ont presque aucune chance de survie, même si on en prend grand soin. Des espèces hybrides cultivées spécialement à cet effet sont disponibles dans les jardineries: elles croissent nettement mieux, même si elles restent plutôt exigeantes.

Georg Ledergerber www.environnement-suisse.ch/magazine2009-3-15

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