Être, c’est dès le premier souffle, puis nous sommes et devenons quelque chose, indépendamment parfois de notre propre volonté. Naît la conscience de l’autre, de la mère, puis la conscience de la famille et enfin la conscience de Tribu. Que l’on soit un Indien Jarawa qui subit dans l’océan Indien, l’ethnocide de sa tribu, décimée par le tourisme, un déraciné de la colonisation, un Gilet Jaune à bout de ses factures ou le fils d’un des hommes les plus puissants de la planète, confrontés à la loi des marchés, nous sommes avant tout attendus par les nôtres, par notre Tribu. Longtemps avant que nous ne devenions des adultes, nous devons apprendre le langage des nôtres, pour entrer en contact avec eux, et pour partir à l’exploration du monde. C’est le propre de pratiquement tous les hommes, celui d’appartenir à un camp, de se soumettre à des Dieux, de connaître les rites. Comme le sol qui détermine l’arbre qui peut y pousser, en fonction du climat et de la diversité, le petit homme ne peut que rarement devenir autre chose, que ce pour quoi la terre qui le voit naître le prédestine. Il n’aura que peu de chance, s’il se refuse de quitter la tribu et si cette dernière n’est pas nomade, de voir autre chose, si la richesse n’a pas souri aux siens, ou si l’audace n’est pas inscrite dans son caractère. Alors, ces schémas de pensée que nous héritons de ceux qui nous précédent sont-ils encore adaptés ? Bien avant que les Arawaks ne disparaissent de la terre, toutes les 48 lunes, une grande célébration déterminait qui était la femme la plus courageuse d’entre toutes, la meilleure d’entre elles. Alors une fois qu’elle fut célébrée comme une reine, elle quittait la tribu, seule, vers l’inconnu, pour partir à la rencontre d’autres hypothétiques hommes ailleurs.
Si elle en rencontrait, elle se devait de vivre parmi eux et d’établir un pont commercial. Son voyage était solitaire, sans retour. Ainsi même s’il n’existe plus d’Arawaks, le patrimoine génétique de ses derniers, transmis par la mère se trouve encore aujourd’hui dissimulé parmi nous. Si la tribu protège, le courage de s’en extraire peut libérer et permettre parfois la survie des siens. Que l’on conduise sa propre barque comme une reine arawak, comme la reine d’une ruche, comme le mâle alpha d’une meute de loups, ou comme le maire d’une commune, il vient toujours la 48e Lune, la saison, le combat, ou l’élection, qui d’après les règles de votre camp, de votre espèce, de votre tribu, vont définir, celui qui conduira les siens. Ainsi l’ADN des chefs, nous permet de réguler le voyage, de choisir l’emplacement de la ruche, de définir si les habitations sont suffisantes. Pourtant, partout dans le monde les choses évoluent, les schémas d’hier, qui se fissurent un peu plus chaque jour, se préparent à céder. Le chef est remis en cause, l’ordre sans le pouvoir semble une aspiration renouvelée des peuples. Ce Mag, parcours la question des Tribus qui unit les hommes, les poussent à en affronter d’autre, détermine qui nous sommes et où nous allons. Que nous les rejetions ou nous nous en revendiquions, que nous soyons chef de clan, de famille ou d’une structure, les Tribus sont partout. Pourrons-nous un jour être tous collectivement heureux, sans nous en extraire ? Nos tribus sont-elles des freins ou un terreau fertile ? La guerre naît de la notion de camp et de tribus, faut-il renoncer à soi pour approcher l’autre ? Le temps des jeux politiques, des élections municipales, s’ouvre, face à des décennies de déception, ce modèle est-il encore fiable ? Les guerriers politiques de notre nouvelle aire sont-ils à même de conduire la cité vers le bien-être politique ? Chaque vainqueur n’est-il pas condamné à être un futur vaincu ? Est-il possible de satisfaire politiquement et durablement les siens sans pratiquer la démocratie directe, ceci remet-il le rôle même du chef en cause et au travers lui de la Tribu tout entière ? Les réponses à ces questions ne sont ni blanche, ni noire, mais à l’image de la Nature, un dégradé de couleurs illimitées. Dans cette nature, il n’existe pas de hiérarchie, ni de notion de bien ou de mal, si ce n’est la perception que nous humains, nous en avons. C’est sans doute le plus grand défi qu’il nous appartient de réaliser : l’équilibre.
SOMMAIRE Laura Tared De la tribu des Beni Indel à… De Wendel Claude Frisoni Le tribut, la tribu, les attributs Carole Vilbois La tribu des hommes libres contrariés ou la colonisation des paradis perdus. Martine Révol La tribu des pot « autonomes » Jean-Marc Fortané Les tribus politiciennes Serges Jovial Imbeh Madagascar retour sur les présidentielles JIF Luxembourg tribu de femme Premiére grève des femmes au Luxembourg Sebastien Laye Interview politique « Réconciliation » Berkan Toppeker La guerre des tribus Frank Buhler De l’exaltation de La Tribu au déni de la race, la grande schizophrènie de la bien-pensance. Rencontre avec Saifoulaye Sow Migrant oui, mais l´école pour Tous Maître Renard De la tribu des corbeaux impunis au quadruplator Antoine Fontaine & Carole Vilbois L´arbre de Noé Écologie et Photgraphie La Tribus des Révoltés XR extinction Rebellion Koceila Chougar De la tribu à l’ère du digital Le conseil Les Voeux de l´Unité Nationale Vu sur les réseaux La Tribus des Nantis Le positif Forum Positif pas primiti Antoine Fontaine La tribu des « uns confiants »
L´UNITÉ NATIONALE CAROLE VILBOIS
L au r a Ta r e d D e l a t r i b u d e s B e n i I n d e l à … D e W e n d e l
Laura Tared De la tribu des Beni Indel à… De Wendel
L es tribus ? Appartenons-nous tous à une tribu au sens de communautés soudées, de groupe d’intérêts ou de cultures ou d’origines communes ? Pour beaucoup, les tribus, ce sont avant tout les tribus sauvages, celles qui subsistent en Papouasie ou en Afrique. C’est la formation sociale avant la formation de l’État. Moi, qui suis issue de l’immigration coloniale, je descends plus directement d’une tribu, d’une vraie, si je puis dire… Je suis née dans l’Ouarsenis, dans le berceau des Beni Indel. C’est une tribu berbère mêlée aux Arabes dès le XV ème siècle. Enfant je ressentais déjà très fortement la présence d’autres lieux sans possibilité
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de déchiffrer le silence. Enfant, ma question était : « Dans La gérie (que je prononçais comme mes parents « y avait-il un ciel ? Un sol ? Pouvait-on marcher dessus ? » « Est-ce une chose, un endroit, une idée ? » Cette dimension ethnographique de ma personne, je l’ai découverte pendant mon premier voyage en Algérie. J’avais une vingtaine d’années et c’est à la cinémathèque d’Alger que j’ai visionné le film de Lamine Merbah, « Les déracinés » [1] l’histoire de la dépossession de la tribu dont était issue ma famille. Nous étions bien loin des narrations coloniales sur
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« nos ancêtres les Gaulois ». J’en avais soudain la preuve en sons et en images. Je confirmais par cette découverte ma volonté de poursuivre mes études d’Histoire et de diriger mes recherches vers l’Histoire coloniale. Le territoire des Beni Indel était délimité et constitué d’un seul douar par arrêté du 9 avril 1898 dans la commune mixte de l’Ouarsenis. Il est réuni à la commune mixte du Cheliff par arrêté du 10 décembre 1910 et revient à celle de l’Ouarsenis par arrêté du 20 octobre 1949 [2]. Découvrir cette tribu de l’Ouarsenis procède moins d’une démarche anthropologique que du constat de la discordance entre les récits socio-historiques de l’Algérie française, la mémoire familiale et la curiosité de l’étudiante en Histoire que j’étais. Par le film, je découvrais la destruction brutale des bases économiques de l’ancienne société de mes ancêtres. Je comprenais l’univers de référence de mes arrière-grands-parents spoliés d’une partie de leurs terres. Et l’exil, une génération plus tard, de mon père dans les usines De Wendel.
Et je relus G. Tillion [3] qui décrivait « un monde rythmé par les activités de la terre, aux conditions de vie rudes, insalubres, voire misérables, protégé de l’extérieur par les bordures montagneuses du massif de l’Ouarsenis, cadre visuel et frontière sociale ». La liquidation de la propriété communautaire des tribus [soit l’anéantissement de la tribu] fut organisée par un ensemble de lois mis en place pour favoriser la propriété individuelle au profit des colons et des grandes sociétés alors que les terres des Beni Indel furent exclues du sénatus-consulte de 1863 à cause de l’exiguïté du territoire cultivable, la faiblesse démographique et fiscale et surtout le mode de possession foncière essentiellement privé de l’ensemble de la région de l’Ouarsenis.
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Une tribu épargnée ? Pour autant la tribu ne fut pas épargnée. Les terres indigènes sont transformées en propriétés privées, au mépris de la propriété indivise. Si la propriété collective n’a pas engendré l’européanisation des terres, la destructuration de la propriété indivise a tout de même eu des conséquences quant au fonctionnement familial et aux pratiques socioculturelles, contribuant à l’éclatement du tissu traditionnel et à l’assujettissement de la population. La colonisation dans l’Ouarsenis était d’abord de nature administrative sans pour autant y introduire les services publics. La première école n’ouvre qu’en 1950, quand mon père a 30 ans. Même si les Européens sont totalement absents du paysage colonial des Béni Indel, excepté les agents des impôts et les administrateurs des forêts, les relations sont de facto marquées par la peur des sanctions en cas de transgression aux paiements ou aux règlements forestiers. Partout dominaient l’abus de pouvoir et la pauvreté. Mes ancêtres n’en étaient pas moins des indigènes, même sans relation tangible avec l’administration coloniale. C’était une intrusion sournoise de la colonisation s’insinuant dans le tissu local et l’intimité des habitants, anéantissant les valeurs coutumières de solidarité. Bien que les terres de la tribu soient des « terres collectives » leur appartenant bien sous la forme de propriétés indivises, c’est à dire juridiquement impartageables. C’est une particularité du statut de la terre en milieu tribal : celle-ci n’a pas de caractère marchand. Le passage de l’économie de troc à l’économie de marché, l’abandon inéluctable des traditions agraires conduisirent bien à la rupture des équilibres locaux. La question du statut des terres (4) que parcouraient les tribus nomades a fait l’objet du même démantèlement du nomadisme pastoral. En même temps que
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la dépossession foncière, c’est toute l’économie tribale qui pâtit, privant ainsi les tribus de leurs moyens de subsistance. Les hommes des douars se voient contraints de quitter leur village et leur tribu pour trouver du travail en ville. C’est l’image la plus déchirante du film « Les déracinés ». L’absence des Français ne prémunit pas contre les conséquences désastreuses de l’Algérie coloniale. C’était cela « Tuer l’identité ». C’était un système de spoliation et d’aliénation symbolique et matérielle. L’une des méthodes était aussi l’incitation aux conflits inter tribaux. La résistance menée par l’émir Abd el-Kader fut anéantie entre 1832 et 1847 par les affrontements directs avec l’armée française et les conflits entre tribus attisés par l’armée française. Ces défaites avaient pour conséquence, en dehors des pertes humaines, celle de diminuer l’autorité des chefs de tribus.
Une tribu anéantie ou plutôt utilisée ? En effet, les autorités françaises ne furent pas toujours opposées au système tribal. Les confréries et lignages religieux qui faisaient autorité auprès de leurs coreligionnaires présentaient une vraie menace et une vraie aubaine. La tribu avait une existence juridique. Elle constituait une section de communes (les djemaas). Celles-ci étaient présidées par les caïds des tribus, nommés par les autorités, elles administraient les douars et les terres collectives de ces derniers. Cette organisation
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supposait la préservation du cadre social indigène, et donc tribal, et la nomination de superviseurs administratifs. La tribu devenait une « option administrative ». Les chefs de tribus eux-mêmes sont hiérarchisés dans des collectifs pyramidaux correspondant peu ou prou à nos divisions administratives, la commune, l’arrondissement, le département (5). C’était aussi un moyen de désigner, donc de distinguer, donc d’assigner. L’idéal pour dominer, c’était des communautés closes et organisées, des tribus, mais des tribus remaniées. Les autorités se sont évertuées à les préserver tout en les contrôlant par le biais des caïds et des bachagas. Preuve de cette reconnaissance des tribus : les amendes collectives imposées par les autorités françaises suite aux infractions de l’un de leurs membres, c’est un fondement important du fonctionnement de la culture tribale : la coresponsabilité. Les bachagas et les aghas, titres repris de l’administration ottomane, devenaient des collaborateurs zélés. L’Algérie coloniale se réincarnait par des musulmans comme le bachaga Boualam (6). Pendant la colonisation, il a aidé l’occupant à
dépeupler l’Ouarsenis, enjoignant aux habitants de la région d’aller travailler dans les vignobles des colons dans l’Oranie ou en France. Il gardait ainsi, au passage, le droit exclusif de chasse, en en faisant profiter les administrateurs et militaires coloniaux. Il a ouvert le territoire à l’armée absente depuis la reddition de la tribu en 1845. Le bachaga Boualam souligne, lui-même, que les populations autochtones « avaient pris l’habitude de n’obéir qu’à leur caïd au travers duquel elles voyaient la France » (7). Le bachaga et son adjoint le garde champêtre incarnent la France par la fonction administrative qu’on leur a octroyée et par leur influence auprès de la population participant ainsi directement et indirectement au système de spoliation, de vexation et d’injustice sociale. Mon père pourtant FLN, mais ouvert et homme de conciliation, a rencontré en ma présence, Bachaga Boualam chef d’une autre tribu voisine de celle de mon père, les Beni Boudouanes originaires comme lui de l’Ouarsenis et installée en Lorraine et à Mas-Thibert près d’Arles, après l’indépendance. C’était un homme meurtri, disant avoir été trompé par la France. 8
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Lecture tribale du monde d’aujourd’hui ? Par cet exemple de l’utilisation des tribus par les dominants, peut-on toujours croire aux vertus de résistance des tribus à toute oppression extérieure ? Des représentants de l’État dit « central » réactivent aujourd’hui des entités affaiblies à partir d’un répertoire issu de la période coloniale. La tribu devient une réalité héritée et réactivée. Telle est l’encombrante question de la présence de tribus dans l’Algérie d’aujourd’hui, comme pour nombre de pays musulmans actuellement en crise. Jacques Berque(8) en 1954 expliquait qu’à la tribu s’agrègent selon le contexte, la légende généalogique et l’apport d’éléments extérieurs : « L’analyse de presque chaque groupe, même au stade actuel, le dissout en une complète évanescence d’origines, ou fiction d’origines externes. Là où il y a une légende généalogique pour expliquer l’ensemble, deux systèmes coexistent… Simultanément, il professe le rattachement à l’ancêtre général, et l’ascendance différente assignée par la tradition à la famille. Il invoque selon l’occasion l’une ou l’autre lignée... Cette contradiction entre personnalité collective et l’origine des cellules qui la compose est véritablement une loi du genre ». Autrement dit, le rattachement et l’évocation de l’appartenance à la tribu n’empêche pas l’appartenance à l’État. Au Canada, on dit aujourd’hui « première Nation » pour la tribu d’origine. C’est ainsi, dans le contexte politique déstabilisé de l’Algérie que réapparait la question tribale avec les révoltes en Kabylie en 2001 et l’émergence de la coordination des arouchs, des tribus. On assiste à une revalorisation du fait tribal. C’est là le paradoxe de l’entité « tribu » qui répond à son premier axiome : le refus de l’ingérence étatique ou revendication d’une part de souveraineté. Hors de l’Algérie, le grand rêve d’unité panarabe s’est effondré au profit de zones tribales où se profile une gestion communautarisée du pays. « Les Etats sont concurrencés par une autre configuration, assurant sécurité, solidarité et accès aux ressources, s’attachant aux 9
Laura Tared De la tribu des Beni Indel à… De Wendel
liens primordiaux et identitaires plus anciens ou plus prégnants que la nationalité (…). Daech va disparaître, mais son avatar pourrait bien s’incarner dans une nouvelle sécession des tribus » (9). On voit poindre une histoire de la tribu tour à tour discréditée, valorisée, instrumentalisée. La réapparition de la notion de tribu est nette, même en Europe et au sein de l’immigration lorsque par exemple un indien candidat des travaillistes en 2005 à Coventry au poste de lord major (maire) n’arrive pas se faire élire par sa communauté parce qu’il était chamar, membre de ce groupe d’artisans du cuir considéré comme intouchable, c’est-à-dire
la caste inférieure (10). C’est comme si la structure sociale des origines voyageait avec eux. Elle ne connaît aucun tarissement, ni dans l’espace, ni dans le temps. Le meilleur exemple est la mise en lumière des tribus perdues d’Israël citées de l’Ancien Testament, les Falachas d’Éthiopie ou les Kukis de Birmanie. Pourquoi les régimes réactivent aujourd’hui des entités issues du répertoire colonial et des sociétés traditionnelles à l’heure du citoyen actif ayant des droits et des devoirs ? C’est en définitive pour les mêmes raisons que le fit le régime colonial au temps de la tribu de mon père. Créer un courant d’attention focalisé au sein d’un groupe qui a son propre système de valeurs et indifférent à la construction d’un état démocratique.
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Bibliographie et références (1) Amine Merbah, les déracinés, le douar des Béni — Indel, http://fr-wikipédia.org (2) IREC ANOM, Archive Nationales d’Outre — mer (3) Germaine Tillon, L’Algérie en 1957, Paris, Minuit, 1957 (4) Karl Marx, « Le système foncier en Algérie », Paris, Éditions sociales, col. « Cahiers du CERM », 1970. (5) Colette ESTABLET, 1991, Être caïd dans l’Algérie coloniale, Paris. (6) Bachagha Boualam a été vice-président de l’Assemblée nationale et figure emblématique de l’Algérie française. Il est le prototype des chefs traditionnels sur lesquels se basait la pacification de l’Algérie. Officier, il est, nommé caïd, puis bachaga dans la tribu des Beni — Boudouane dans l’Ouarsenis. En mars1962, l’OAS monte un maquis dans l’Ouarsenis avec son soutien. En juillet 62, son mandat de vice-président de l’Assemblée nationale est supprimé par une décision du gouvernement (7) S. Boualam, Mon pays la France, 1962 (8) J. Berque, « Qu’est-ce qu’une tribu nord-Africaine ? », Éventail de l’histoire vivante, Hommage à Lucien Febvre, Paris, Armand Colin (9) Les Echos du 20 oct. 2017, Moyen-Orient : le retour de la tribu ? (10) http://www.monde — diplomatique.fr.
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C l au d e F r i s o n i L e t r i b u t, l a t r i b u, l e s att r i b u t s
Claude Frisoni Le tribut, la tribu, les attributs Fort sentiment identitaire, solidarité à l’intérieur du groupe, soutien mutuel, observation et respect de règles communes, partage de convictions, de croyances ou de superstitions, esprit de corps, besoin de protection du groupe, certitude d’un passé et d’un destin communs et défiance à l’encontre des apports étrangers ou des éléments allogènes… tels sont, grossièrement résumés, les attributs de la tribu. Dans les sociétés dites primitives, l’appartenance tribale est la condition de la survie des individus dans un univers hostile. Dans une société moderne mondialisée, les survivances tribales peuvent étonner. Non pas dans des régions exotiques ou bien dans des territoires où le colonisateur a toléré le droit coutumier ou accepté, de gré ou de force, le maintien de structures tribales, coexistant avec l’organisation étatique et les lois républicaines, comme par exemple en Nouvelle-Calédonie.
Mais au milieu même de nos sociétés centralisées, uniformisées, standardisées, numérisées, des entités tribales se multiplient, des aspirations claniques se répandent, des replis identitaires s’affirment. Il y a plu de 20 ans, le sociologue Alain Touraine relevait déjà un apparent paradoxe. Alors que chacun veut savoir instantanément ce qui est arrivé de l’autre côté de la planète, alors que rien de ce qui fait le quotidien de la police de Los Angeles n’est étranger à un habitant de la Creuse abonné au câble, alors que le pêcheur napolitain n’ignore rien, en temps réel, des attaques de requin sur les plages australiennes, alors que le monde est censé être devenu un village global, dont la place centrale voit se croiser les habitants des cinq continents, chaque villageois veut en même temps être identifié, reconnu comme particulier, différent, spécial, unique.
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Ainsi, on veut être partie du tout mais morceau d’une partie très spéciale. D’une tribu nouvelle. On peut être skateur, rappeur, gaucher, bobo, végane, chasseur, luxembourgophone, membre d’une minorité à forte personnalité, motard, religieux intégriste, radicalisé, barbu de trois jours, chauve de toujours, randonneur, vététiste, hipster, suprématiste, survivaliste ou ultra-sensible aux ondes électromagnétiques, s’affirmer comme tel et se revendiquer comme différent ou, plus exactement remarquable. Et évidemment, pour préserver cette identité remarquable, il est indispensable de se préserver des intrusions, de défendre la pureté du groupe, la cohésion de l’entité, l’intégrité de la tribu. Citoyen du monde, MAIS membre d’une cellule basique remarquable. Tel était l’apparent paradoxe décrit par Alain Touraine. Apparent… Car le vrai paradoxe n’est pas là. Les membres de la tribu sont convaincus que la survie de leur groupe est menacée par toute perméabilité à ce qui est étranger au groupe. Le tribut qu’ils ont à honorer vis-à-vis de la tribu, pour pouvoir en rester membre ou en devenir leader, c’est sa défense contre toute influence extérieure, sa protection contre tout risque de métissage, contre toute immixtion étrangère. La xénophobie, au sens propre du terme, peur de ce qui est étranger, est constitutive de l’esprit tribal. Or, seuls des apports étrangers peuvent sauver la tribu d’une mort lente due à la consanguinité.
C’est là, qu’est le vrai paradoxe.
Les singes bonobos l’ont compris d’instinct, qui sont xénophiles. D’après les scientifiques, spécialistes de ces adorables bestioles aux mœurs très libres, « Il y aurait, en fait, un bénéfice évolutionnaire à être gentil avec les étrangers : lorsqu’elle atteint l’âge adulte, une femelle bonobo va quitter son clan d’origine pour aller rejoindre un nouveau groupe, et va devoir
C l au d e F r i s o n i L e t r i b u t, l a t r i b u, l e s att r i b u t s
tisser de nouveaux liens avec des individus qu’elle n’a jamais rencontrés ». Devenue pubère, la jeune femelle bonobo quitte sa tribu et va être accueillir à bras ouverts par une autre tribu. Ainsi, elle apporte du sang nouveau et dès lors, cet apport étranger maintient la diversité biologique dans chaque clan, régulièrement enrichi par la mixité génétique. Tout groupe constitué, fermé sur lui-même, est à terme menacé de dégénérescence, s’il est privé d’apports extérieurs. Des points de vue génétiques comme sociaux. C’est ce que résume la formule « Les sociétés qui ne sont pas variées, sont avariées ». Cruel paradoxe, en vérité. Menacée de dilution si elle s’ouvre et condamnée au pourrissement si elle reste fermée, la tribu apparaît comme une structure inadaptée au vivre ensemble. Sans doute faut-il chercher à construire une entité voisine par la taille, mais totalement perméable aux autres, car connectée, mise en réseau, partie intégrante
d’un maillage très large. Une entité basée sur la volonté de construire ensemble, d’échanger et de partager. Cette structure existe, elle est éminemment politique et a fait ses preuves. Elle s’appelle la Commune. Elle a commencé à être théorisée par un penseur américain, Murray Bookchin qui a baptisé son projet « Le Municipalisme libertaire ». Les Kurdes du Rojava s’en sont inspirés et avaient entrepris de développer une société démocratique, laïque, paritaire, en se référant à cette théorie. Leurs premiers succès ont été pulvérisés par l’islamo-fascisme turc, démontrant par là même les limites d’une telle utopie. Mais rien ne dit qu’en sous-sol les rhizomes ne sont pas assez résistants pour faire pousser plus tard et plus loin de nouveaux plants, plus vigoureux encore. Il faut y croire, pour ne pas désespérer d’un village global, atomisé en tribus rivales, courant à la décadence. Il faut y croire, pour ne pas se résigner à constater une fois pour toutes que : Plus le monde se mondialise, plus la terre se terrorise ».
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Carole Vilbois L a tribu des hommes libres contr ariĂŠs, ou l a colonisation des par adis perdus.
Carole Vilbois
La tribu des hommes libres contrariĂŠs, ou la colonisation des paradis perdus.
Ă€ feu Michael C. Rockefeller, et au Guerrier blanc.
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CaroleVilboisLatribudeshommeslibrescontrariés,oulacolonisationdesparadisperdus.
Michael Clark Rockefeller
né le 18 mai 1938 Disparu le 19 Novembre 1961 a l´âge de 23 ans dans la région Asmat en Papouasie. Declaré légalement mort en 1964 Fils cadet de Nelson Rockfeller qui fut Vice-président des État-Unis Des images prises en 1969 et découvertes dans les années 2000 montrent un homme blanc adopté par les papous il ressemble à Michael. Le bonheur de Michael en Papouasie tranche avec les images d´archives qu´il reste de lui alors qu´il était dans notre monde dit civilisé. Que cache la disparition de Michael ?
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Carole Vilbois L a tribu des hommes libres contr ariés, ou l a colonisation des par adis perdus.
Ce qu’il reste de l’histoire de Michael, c’est quelques photos et un large sourire. Son père dira à la suite à sa disparition qu’il n’avait jamais été plus heureux que là-bas, ils seront nombreux, ceux qui parleront de son enthousiasme. L’histoire souhaite garder de lui le souvenir d’un étudiant d’Havard, fils cadet du vice-président des États-Unis, mort [i] alors qu’il serait parti chercher des armes tribales en vue de les exposer pour gagner de l’argent. Il était pourtant tout d’abord parti étudier la population Dani du côté ouest de la Nouvelle-Guinée néerlandaise pour le Museum of Archaeology AMD Ethnology de Harvard. Simple preneur de son pour le documentaire Dead Birds (1965) de Robert Gardner, il souhaite alors retourner en Papouasie pour étudier l’art Asmat et en faire une collection. Capturé, dévoré par une tribu ou adopté ? Seulement, voilà, on va retrouver lors du tournage d’un film, l’image d’un homme qui ressemble beaucoup trop à Michael, un guerrier blanc au milieu des Papous, comme eux il pagaye debout, parfaitement intégré, aussi bien dans la cadence que dans la tenue.
Si ce n’est lui, qui est-ce ? Une chose est certaine Michael C Rockfeller est mort, du moins sa représentation occidentale. Celui qui a peut-être renoncé à notre civilisation, à la richesse, pour le bonheur d’une vie tribale, porte un autre nom, le nom d’un guerrier. Nota : Ce blanc qui pagaye au milieu des guerriers papous est-il Michael Rockefeller ? Image tirée de « The Search For Michael Rockefeller » de Fraser S. Heston En 1969, un journaliste new-yorkais, Milt Machlin, mène l’enquête sur place au dire d’un trafiquant local qui prétend avoir vu le jeune homme en vie, quelques semaines plus tôt. Dans le documentaire on voit Milt Machlin arriver sur une petite île où se trouve bien le petit cabanon décrit, mais ce dernier est vide. Alors le livre à succès et l’expédition de Milt prennent la tournure que l’histoire officielle retient : Michael est mort, en représailles à un conflit ayant eu lieu sur place quelques années plus tôt. Les images pour certaines resteront des décennies dans leurs boîtes, et en février 2015 Paris Match titre : « Un Rockefeller “adopté” par une tribu papoue ? ». Dans les années 2000, le documentariste Fraser S. Heston, qui n’est autre que le fils de Charlton Heston retrouve les images de 1969 en couleur tournée par le caméraman Malcolm Kirk. Faut-il dire avec une certaine ironie qu’il fut immédiatement question d’exploiter financièrement ce filon de l’histoire de
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Michael, comme si le rêve américain ne pouvait se matérialiser sans le dollar ? Bien entendu visible alors en VO sur Netflix « The Search For Michael Rockefeller », raconte cette histoire. Mais si vous étiez dans la jungle, en 1961, sans téléphone et recueilli par une tribu, que les recherches soient
CaroleVilboisLatribudeshommeslibrescontrariés,oulacolonisationdesparadisperdus.
abandonnées un mois après votre disparition, alors que les documentaires de l’époque disent :
Ceux qui ont parlé ont-ils menti pour protéger celui qui est devenu un des leurs ?
Tous les moyens modernes de notre civilisation ont été mis en œuvre pour vous retrouver, en 1969, 8 ans après, si vous aviez femme et enfants dans votre tribu, voudriez-vous revenir ? Voudriez-vous que votre histoire, votre famille, votre tribu soient la proie des journalistes, des curieux, voudriez-vous vraiment… dire où vous êtes ?
Et si Michael avait tout simplement renoncé à la civilisation, et si pour notre société occidentale, riche, le renoncement peut être un affront ? Quel message terrible pour tous ses enfants de bonne famille étudiants d’Harvard ? Quel message de disgrâce pour cette richissime famille au pouvoir dans les plus hautes sphères de l’État Amériain !
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Carole Vilbois L a tribu des hommes libres contr ariés, ou l a colonisation des par adis perdus.
Ont-ils enterré l’idée qu’ils se faisaient d’un fils cadet héritier d’une dynastie d’hommes jugés brillants ? L’arrivée de Nelson et de sa fille, sœur jumelle de Michael en Papouasie, comme les images en témoignent, ne montre pas une famille effondrée, en larme. Sa sœur dira bien plus tard à propos de ces images qu’ils pensaient alors retrouver Michael. Beaucoup de théories, des témoignages qui eux regorgent de tant de détails sur sa mort, que l’on soupçonne vite ceux qui les colportent de vouloir surtout vendre une histoire..., motivé par la marchandisation et la rentabilité que l’on peut attendre d’une expédition dont on rentre sans réponse et bredouille. Paradoxalement la réponse était sur la pellicule. Si j’avais été en contact avec lui, je ne l’aurais pas trahi, je lui aurais donné ce droit. Pourtant vivant ou mort c’est bien là-bas que Michael voulait retourner, c’est bien là-bas qu’il se sentait vivre, et bien entendu à la question : mais que vas-tu faire là-bas ? Il n’avait fait que répondre à ce que la civilisation moderne attendait de lui : de l’argent. Accroupi devant eux, modestement il pose son regard d’un humanisme sans faille, d’un respect sans compromis, d’une curiosité non feinte, teinté encore par l’âme de ceux qui regardent avec des yeux d’enfants. Il a ces regards que l’on connaît trop bien, si loin du monde qui dit haut et fort : regarde-moi ces sauvages ! Michael s’est-il perdu à croire qu’il pourrait survivre dans un monde si loin de ses propres traditions, ou manger l’autre est une façon de capter sa force, ou des rites anciens peuvent effrayer nos esprits qui n’ont plus rien de guerrier ? Michael s’est-il trouvé, si loin des apparences, si loin du quand dira-t-on, si loin de la bourgeoisie de siens ? De quelle façon un père a perdu un fils ? Car ce dernier avait la curiosité de l’autre… et si cette histoire de pirogue qui chavire... était une histoire d’un cœur qui chavire ? S’ils n’étaient jamais tombés à l’eau… Si cela avait été la seule façon de fuir la puissance de son père ? Loin de l’argent, agenouillé, sale, et heureux, Michael vit, Michael rit, Michael respire. PAPUA NEW GUINEA - OCTOBER 25: A Kaia Tribe member in traditional clothing and face paint in Kaip Village in Papua New Guinea on October 25, 2013 Photo : Amy Nichole Harris
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Alors ce jeune homme, qui est à genoux, exprimant le bonheur et la joie, alors que l’on danse autour de lui, sur une photo jaunie par le temps, ou bien là, alors qu’un membre de la tribu repose en confiance sur ses jambes, allongé et souriant. Et si Michael Rockfeller n’était mort que pour notre Tribu à nous, pour son père et perdu à jamais pour notre société de consommation ? La disparition le 19 novembre 1961 de Michael, arrive alors que ses parents sont sur le point de divorcer. La future Madame Rockefeller, Happy Rockefeller démissionne la même année des fonctions qu’elle occupe auprès de son futur mari. En mars 1962, malgré la disparition de leur fils Nelson et Mary divorcent, Happy qui est déjà mère de 4 enfants, qu’elle a d’un premier mariage avec un ami de Nelson, ne divorcera qu’en 1963. Le 4 mai 1963, un mois après son divorce Happy et Nelson volent en juste noce alors que ce dernier est pressenti pour devenir le futur vice-président des États-Unis. La disparition de son fils en 1961 est loin d’être alors sa priorité, raison sans doute pour laquelle, il quitta 15 jours après son arrivée la Papouasie. Alors avant de défendre la cause des Papous, il faut rappeler que les tribus sont aussi des entités qui croient en la sorcellerie, qui pratiquent des rites que nous jugeons barbares, et qu’elles ne sont pas exemptes d’injustice. Entre la vie et la mort, entre le guerrier et le vaincu, il y a des liens invisibles, qui dépassent nos croyances. Pourtant… écrivant en Allemagne cet article, mon café vient de Papouasie Nouvelle-Guinée, la tasse fume et dehors l’hiver de l’hémisphère nord offre un temps gris et pluvieux et personne ne s’aventure au dehors. En 1975 à l’Est, la Papouasie Nouvelle-Guinée obtient son indépendance, à l’Ouest c’est une tout autre histoire. C’est surtout l’histoire d’une répression et de conditions de vie dont on ne parle jamais, ou si peu, alors même que les premiers réfugiés climatiques, plus à l’Est au Nord de Bougainville, doivent quitter leurs îlets aux décors paradisiaques qui lentement s’enfoncent dans la mer. Îles Carteret Des enfants chantent et rient. La vie est simple, ici tout est offert par la nature, le mot travail n’a pas plus de sens que celui de l´argent. Pourtant c’est ici dans les contrées les plus riches que l’on montre du doigt les industriels et les pollueurs eux ils sont bien de chez nous alors que c’est le Paradis qu’en silence on assassine. Les pays émergeants émergent du néant à grand coup d’énergie fossile… La une femme explique que le jardin est sur l’îlot d’en face, sa maison de ce côté-ci et maintenant à cause de la montée des eaux il faut attendre marée basse pour se rendre au jardin. Mais combien de temps nous sépare des images de cette vidéo et de leur quotidien, le jardin existe-t-il seulement encore ?
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décembre 2019 à plus de 98 % pour l’indépendance, de l’autre côté 2019 a été une année de conflit et de rapport de force entre la population papoue et les Indonésiens. Les autochtones se répartissent en 312 ethnies environ. Dans les montagnes de l’est et dans la partie centrale de l’île, l’élevage de porc domestique et de la culture de la patate douce assure à la population la subsistance, sur la côte on chasse le gibier et on cueille des végétaux sauvages. Les populations papoues sont ethniquement bien différentes des Indonésiens qui contrôlent le pays depuis 1963. De nombreuses violations des droits de l’homme ont été commise par l’armée indonésienne, sur fond de racisme, et de discrimination, les Papous n’étant parfois pas plus considéré que des animaux.
Avec en moyenne 1,5 mètre au-dessus du niveau de la mer, 15 cm de montée des eaux fait sombrer les cocotiers à la base de l’alimentation dans le turquoise de l’océan pacifique. Il y a des réunions aux Carterets, et des solutions qui sont recherchées. L’aide est attendue, la main tendue, on ne souhaite pas se séparer… on a grandi ensemble, chez les autres c’est la ville, la misère et surtout là-bas on n’a rien, pourtant il faudra partir. C’est loin, ce n’est pas la terre de nos ancêtres, mais il faudra trouver une solution pour tout le monde. Un homme âgé dit : Moi je vais mourir ici, je ne veux pas partir, il ne se passe rien de grave en dehors de la montée des eaux… la vie est ici si douce.
Paradis perdu à jamais… Alors que Bougainville vient de voter massivement le 11
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Les ressources naturelles sont exploitées non seulement pour les intérêts des Indonésiens, mais également pour le des intérêts privés internationaux. C’est l’armée indonésienne qui protège les installations étrangères et qui permet ce développement qui ne profite pas aux autochtones. Des ONG parlent bien des meurtres, arrestations arbitraires, viols et torture, mais c’est dans un silence total, un bruit de fond tout juste audible. Le Parlement de Papouasie–Nouvelle-Guinée a élu jeudi 30 mai 2019 comme chef du gouvernement un ancien ministre des Finances qui avait démissionné pour protester contre un contrat gazier géant passé avec les Français total et américain Exxon, nous informe alors le journal sud-ouest. Sur Facebook, James Marape a promis de faire de son territoire : « la nation chrétienne noire la plus riche de la Terre » et de placer « l’intérêt national au-dessus
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des intérêts personnels et des intérêts des en cas de crise (vérifier les termes des contrats d’assurance, s’assurer de disposer des moyens entreprises ». financiers nécessaires pour couvrir d’éventuels La Papouasie serait-elle en avance sur son temps frais d’hospitalisation ou d’évacuation). et aurions-nous ici comme là-bas, le même souci ? Celui des intérêts privés qui croisent les intérêts Alors on pense forcément au moyen de Total, au publics ? C’est tout de même une Monarchie combat des Papous, à Michael Rockefeller, à ses constitutionnelle de la Reine Élisabeth 2 dont réfugiés climatiques et au combat des écologistes le gouverneur est Sir Robert Dadae… une in- ici. On se dit que tout est lié, entre affaire d’argent, dépendance toute surfaite, mais une opposition affaire d’État et d’état d’âme, de bons sentiments. Entre les héros qui quittent leurs tribus de riches dorénavant au gouvernement. pour vivre dans des tribus où l’argent n’a pas de De l’autre côté à l’Ouest cette année des étudiants valeur, alors qu’avant il n’avait pas d’odeur. Que sont descendus dans la rue suite à des propos c’est tout de même l’argent qui permet le voyage, racistes qui ont déclenchés une crise majeure, et lui qui le motive parfois ! réprimée aussitôt par l’armée indonésienne Que la volonté des uns est de survivre là et couverte quelque temps avant le blocage où la volonté des autres est de vivre d’internet par la presse internationale avant qu’une au-dessu des autres, chape de plomb ne retombe sur l’actualité de la mais ce qui élève vraiment l’homme, partie ouest de l’île. c’est au fond de s’assoir modestement au pied de ceux qui racontent leur histoire, Sur le site France diplomate, on peut lire : d’écouter, de prendre un son, l’ambassade de France en Papouasie–Nouvelet de vouloir en savoir davantage. le-Guinée dispose de capacités limitées pour venir en aide aux Français en cas de crise. Les Français qui se rendent dans le pays sont responsables de Avoir plus, ou conserver son avoir, ne sera jamais un acte plus majestueux que celui qui consiste a leur propre sécurité. Ils sont invités à s’assurer respecter l’autre pour ce qu’il est, il n’y a qu’un qu’ils disposent de moyens de secours nécessaires
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seul vrai héros dans cette histoire, c’est ce petit garçon riche qui a traversé le globe, peut être au prix de sa vie, en tout cas au prix de celle qu’il s’est choisie, pour afficher le bonheur simple, de la rencontre humaine. C’est le plus beau des voyages et qu’importe sa durée, qu’importe la distance, le voyage vers l’autre, est un voyage vers soi, le sens d’une vie.
[i] « Le 17 novembre 1961, Michael C. Rockefeller et l’anthropologue néerlandais René Wassing naviguent sur une pirogue de 40 pieds, à trois milles de la côte, quand leur bateau prend l’eau et chavire. Les deux guides locaux qui les accompagnent partent à la nage chercher de l’aide, mais celle-ci tarde à venir et les deux hommes continuent à dériver. Au matin du 19 novembre, Rockefeller indique à Wassing qu’il se sent capable de nager jusqu’à la côte chercher les secours. Âgé de 23 ans, il n’est jamais revu. René Wassing est sauvé le lendemain matin, à 22 miles des côtes1. Le corps de Michael C. Rockefeller n’est pas retrouvé en dépit des grands moyens déployés. Michael C. Rockfeller est finalement déclaré mort en 1964. » Source Wiki
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M a r t i n e R é v o l L a t r i b u d e s p ot « au to n o m e s »
Martine Révol La tribu des pot « autonomes »
Qui sommes-nous ? Majoritairement français, puisque le groupe Facebook, puis l’association sont au départ français. Le groupe dit par son nom ce que nous sommes. L’autonomie est la clé de notre futur. À l’heure où les sénateurs vont voter l’indépendance alimentaire des territoires, nous nous sentons dans l’air du temps, bien que nous existions depuis 2008. Nous avons aussi des étrangers, et des expatriés, pour qui, la France était un modèle de démocratie, mais ça, c’était avant….. ! C’est un peu comme une famille de cœur, de bienveillance, d’entraide, comme du temps avant les assurances, avant les crédits et les achats compulsifs pour compenser la misère des liens qui ne sont plus. C’est un peu comme un retour dans l’Histoire pour progresser. Une révolution parce qu’il y a un changement de paradigme. C’est moins de biens pour se faire du bien. Une richesse de valeurs, de partages qui procure la Joie et non le gaspillage... une tribu de cette sorte est la solution aux problèmes des sociétés dites modernes et sur tout la seule voie intelligente face à la catastrophe annoncée. Quelle est la démographie des pot « autonomes ? Énormément de cerveaux ! Médecins, soignants, ingénieurs, diplômés des grandes écoles, et aussi, la population qui rame pour vivre. Vivre tout simplement, se loger, se vêtir, s’alimenter sainement. Nos potes sont le peuple français pensant, qui a réfléchi sur les dérives sur 50 ans de la politique et de la gestion des peuples.
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Par-delà, la réflexion, ce sont les artisans d’une autre société : l’autonomie est la clé d’un AUTRE monde. Dans le constat, ils ont réfléchi à la communication distillée à chaque manifestation dans les médias, et de manifestations en manifestations. Derrière la loi « travail » par exemple ! Avec les forces de l’ordre, qui ont remplacé les « gardiens de la paix », rien que le changement d’appellation est déjà un message de rapport de force, nous avons vu arriver les flash-balls et les grenades de désencerclement. Le management des foules en colère, par la terreur, les amendes, les parcages arbitraires aux abords des grandes villes, les gardes à vue, les rappels à la loi, des amendes inouïes pour des gens réclamants plus de pain. Vous n’allez quand même pas leur faire le coup de la brioche ? Parallèlement l’état ne tient plus que par sa « police ». On lamine les acquis de droits sociaux, par les forces de l’Ordre, équipés avec des armes de guerre, qui estropient à vie le peuple manifestant légitimement pour le maintien de ses droits. Sans suit, les classements sans suite, par l’IGPN, de tous les dossiers des gens atteints, par les armes de guerre, perte de membres, d’œil. Pendant qu’on baisse les APL de 5 euros, pour les pauvres étudiants qui ont bien du mal à se nourrir, on augmente de 300 euros, une indemnité de logement des députés déjà à 900 euros. Monsieur Macron prend l’Assemblée nationale en otage, et le droit de vote des députés LREM en leur faisant signer un document qui ficelle littéralement la démocratie nécessaire à toute loi. C’est fini, les autres députés sont devenus des potiches qui ne servent plus à rien.
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Les pot « autonomes eux se battent pacifiquement, pour que tout le monde ait un toit sur la tête ! Et vous, messieurs les députés et sénateurs, vous votez l’article 14 avec astreinte de 500 euros, pour tous ceux qui tentent de se mettre un toit précaire sur la tête… Mais alors, où pensez-vous donc, qu’ils vont dormir tous ces gens-là ? Êtes-vous conscients des lois qu’on vous demande de voter, comme des aveugles ? Et votre conscience , elle est où ? N’êtes-vous pas élus par le peuple et pour le peuple ? Messieurs les députés, les sénateurs, pensez-vous vraiment que les éléments de langage, qui sont relayés par les médias appartenant au grand capital, fonctionnent ? Les ultra gauches, les ultra jaunes, les ultra droites, les ultras pauvres, les ultras du milieu nous tous ? Nous sommes tous devenus des Ultra quelque chose, mais nous ne sommes pas encore Ultra cons, et nous avons la force du nombre, il ne faut jamais l’oublier. Vous en faites quoi, de tous ces français moyens, qui regardent tout ça, horrifiés, mais qui soutiennent tous les mouvements…… dans tous les communiqués. Éléments de langage qui ne veulent rien dire du tout. Il y a le peuple et vous, vous tous les élus, qui avez des responsabilités énormes : la guerre civile qui arrive. Arrêtez de suivre ce gouvernement qui emmène les gens les uns contre les autres. C’est très grave. Mais où sommes-nous ? Nous nous croyons sous un régime déjà vécu. Certains dans vos assemblées, l’ont déjà dit avec force et réalité, mais les Français le savent, malgré toutes les manipulations médiatiques, les réseaux sociaux fonctionnent. Dans le plus petit village de Haute-Loire, les personnes âgées de plus de 80 ans sont en colère des droits sociaux acquis que vous mettez à sac. Le fameux régime ancien qui avait fait ça, tout le monde s’en rappelle chez les anciens. Mais qui sont tous ces ultra, sinon le peuple français à qui vous ôtez, un à un, tous les droits, jusqu’au droit fondamental de manifester, et pour rappel simple, car pas inutile... la Déclaration universelle des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 dans son article 10 disposant que “nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi”. Le pouvoir en place sait d’une manifestation à l’autre, combien il va y avoir de blacks blocs ?
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Le peuple français est en train de se demander qui sont les gens sous les déguisements de blacks blocs.
Parle - t - on de toutes les gardes à vue ? De gens qu’on parque, du maintien de ces personnes en garde à vue, tout le dispositif qui est mis en place en amont. Augmentation du prix de l’amende, quand on sait que les gilets jaunes se battent pour le pouvoir d’achat, c ’est vraiment d’un cynisme inouï, que d’augmenter l’amende... une amende pour manifester, un droit fondamental. Pas étonnant que la France soit montrée du doigt.. par la communauté internationale, c’est justifié. Il suffit de lire la presse étrangère. L’article 3 a largement porté atteinte au droit d’expression. Pensez-vous que le peuple ne le sait pas ? Nous écoutons Monsieur Castagner, qui égraine le nombre des incarcérations sur les manifestations pour faire peur au peuple. Ils sont en train de gouverner par la terreur. Nous ne sommes plus une démocratie, et vous vous salissez les mains à les suivre. Un peu de courage, redevenez les dignes représentants du peuple, nous vivons une période dangereuse. Tout comme sous le régime de Vichy, nous nous demandions comment les gens avaient choisi leur camp. Nous le savons maintenant, il y a ceux qui sont les laquais du très grand capital, à qui on livre l’argent des Français, sans vergogne (100 milliards de CICE depuis 2013, sans résultat sur l’emploi). Maintenant, on dilapide la FDJ, les barrages, et quoi encore derrière ? Le droit de manifester est devenu interdit, par une multitude de mesures anticonstitu- tionnelles. Des gilets jaunes se sont vus parqués, maintenus en garde à vue, et avec un rappel à loi, disant, mais vous étiez venus pour en découdre ? Non les gens sont normaux, et demandent à vivre de leur salaire. Alors dans ce contexte ainsi posé, quand sur vos bancs d’assemblée vous n’avez plus conscience de ce qui se passe, les pot ‘autonomes savent qu ’il y a un sacré problème national de démocratie. Ils n’ont pas envie de se faire estropier, ils n’ont pas envie de se faire parquer, en périphérie des manifestations avec des rappels à la loi, avec interdiction de faire une manif, alors qu’ils n’ont strictement rien fait, etc ….
Nous luttons sur un autre plan pour un autre monde. Un plan personnel, chez nous, tous. La fin de ce monde que vous défendez, puisqu’il ne nous convient plus. Conditions de travail Démocratie État de droit – (on n’y croit plus ! À qui la faute ?) Droit de manifestation Droit au logement Droit de se nourrir proprement en bio Droit de ne pas avaler de glyphosate Droit de vivre tranquille de nos salaires. Droit à notre identité nationale, aussi. Et nous avons choisi, la résilience, loin de la 5 G, du linky et donc d’EDF, nous avons choisi la permaculture, l’autosuffisance alimentaire, l’autosuffisance énergétique, et par là, nous allons scier la branche sur laquelle vous êtes assis. Pour un monde meilleur pour vos enfants et les nôtres. Il nous suffit d’entraîner autour de nous de plus en plus de monde, à décroître, non pas pour le moyen âge, mais pour l’utilisation des technologies, à notre bénéfice direct, le tout, avec bienveillance et respect de la vie d’autrui. Certains d’entre nous ont choisi la résilience par la force, ils ne peuvent plus vivre décemment. D’autres avec réflexion, sur ce monde infernal que vous laissez faire. Ils sont où les gestionnaires de la France en « bon père de famille » ? Partout on peut désobéir, par notre dé-consommation. Votre État policier ne pourra pas réprimer tout le monde. Au Chili, ils disent, ils nous ont tout volé, même la peur. Est-ce ce que vous voulez Messieurs les députés de droite et de gauche, tous….. Est-ce que c ’est ce que vous voulez ?
Vous pourrez tout nous voler, certes, mais pas la liberté de penser.
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J e a n - M a r c F o r ta n é
Notre démocratie ne se meurt-elle pas de l’entre soi et de la démagogie politicienne ? Comme l’avait si bien dit Albert Einstein « La folie, c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent » Les élections se suivent et se ressemblent par des joutes verbales médiatiques sans véritable débat contradictoire de fond que se livrent nos politiciens professionnels. Impuissants, les citoyens constructifs apartisans y assistent malgré l’approche de l’effondrement dont de plus en plus de personnes prennent conscience. Les élections municipales à venir permettront-elles enfin de voir émerger de nouvelles formes de pensée capables de créer une unité nationale sur un projet alternatif de société ? Que penser de cette initiative démocratique citoyenne réplicable à toutes les communes de France proposée par le MTRF à Châteaurenard en Provence. Elle est intitulée : ‘Des banques, des élu. e. s et des citoyen.ne. s : ensemble pour l’avenir’ En première partie de soirée des banquier. e. s seront invité. e. s à s’exprimer sur le thème ‘Des banques et des citoyen.ne. s ’. Ensuite, les Châteaurenardais. es traceront la feuille de route des futur. e. s candidat. e. s aux élections municipales en faisant part des sujets qu’ils souhaiteraient voir aborder dans la prochaine campagne électorale municipale. Enfin, les futur. e. s candidat. e. s seront invité. e. s à se présenter pour évoquer l’avenir de Châteaurenard et faciliter la consolidation de leurs équipes de campagne.
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Jean-Marc Fortané Les tribus politiciennes
J e a n - M a r c F o r ta n é
La prochaine étape proposera que les têtes de liste ainsi que leurs futur. e. s adjoint. e. s se présentent et détaillent leur programme de campagne dans leur domaine de compétence. Enfin, un collectif citoyen organisera un grand débat public entre toutes les têtes de liste pour expliquer comment elles souhaitent gouverner la ville et comment elles comptent mettre en place leurs promesses électorales. « Inventer, c’est penser à côté » Albert Einstein Auteur de la trilogie de livres « Le CERFAN Droit dans l’iceberg ou changer de cap ? » en accès gratuit sur http://cerfan.fr et ex-candidat citoyen qualifié sur Laprimaire.org Pour en savoir plus : MTRF sur Facebook et http://mtrf.eu
Contact : fortanejm@mtrf.eu
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Serge Jovial Imbeh
Serge Jovial Imbeh Interview
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Serge Jovial Imbeh
Monsieur Imbeh vous nous aviez accordé une ITW au lancement de votre campagne à Madagascar pour les élections présidentielles, et nous sommes heureux de pouvoir revenir vers vous pour en apprendre davantage sur la situation politique de votre île, alors que notre magazine aborde ce trimestre le thème des tribus humaines. Comment avez-vous vécu cette campagne ? Très enrichissante, en terme humain, car nous avons des contacts avec différentes personnes, de différentes couches sociales. J‘ai pu comprendre leurs maux et les dysfonctionnements que le pays traverse et a traversé. Très dure en termes de campagne, car on a tout fait pour nous bloquer. Que ce soit au niveau de notre financement, que ce soit au niveau de notre organisation et pour le matériel de campagne.
Que pouvez-vous nous dire sur son résultat ? Comme tous les pays africains, les résultats sont connus d’avance, avec des trucages et la complicité des institutions de l’État, je parle ici de CENI, la Haute Cour Constitutionnelle… ceux qui doivent garantir la neutralité. On a bafoué toutes les lois de la République. On a essayé d’attirer l’attention de la communauté internationale sur ce qui se produisait, mais en vain. J’ai été moi-même aux États-Unis, en France et dans certains pays Européens et Africains pour dénoncer cette situation.
Quel rôle comptez — vous jouer dans les années à venir à Madagascar pour aider les Malgaches ? Ce qui est sûr, c‘est je continuerai mon combat. Pas pour moi, mais pour mon pays et pour les générations futures. Ils méritent mieux.
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Serge Jovial Imbeh
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Serge Jovial Imbeh
Quel est votre plus beau souvenir de campagne ?
La cohésion de mes équipes et aussi lors des déplacements pour faire ma campagne. Voir la jeunesse qui vous murmure à l’oreille en disant « SAUVEZ-NOUS », c‘est puissant. A ce moment précis, vous savez pourquoi vous êtes là et qu’est-ce que vous pourriez leurs apporter en termes d’avenir.
Concilier la vie de famille et la campagne, était-ce une chose facile, comment avez-vous vous et votre petite Tribu familiale vécu durant cette période intense ?
Il faut tout d’abord avoir une famille unie et résister à toute attaque que ce soit de l’intérieur ou de l’extérieur. J’ai une famille exceptionnelle qui m’a soutenue durant toute la campagne. Que je passe un moment difficile ou pas, elle avait toujours les mots qu’il fallait. J’ai deux filles en bas âge et ce n’était pas facile pour elles, mais ma femme a toujours trouvé les mots pour les encourager et je la remercie infiniment. Merci Beaucoup, Monsieur Imbeh, nous vous souhaitons beaucoup de succès à venir.
Merci à vous
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F r a e s t r e i k ! L a p r e m i è r e g r è v e d e s f e m m e s au Lu x e m b o u r g !
Fraestreik ! La première grève des femmes au Luxembourg ! 34
F r a e s t r e i k ! L a p r e m i è r e g r è v e d e s f e m m e s au Lu x e m b o u r g !
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F r a e s t r e i k ! L a p r e m i è r e g r è v e d e s f e m m e s au Lu x e m b o u r g !
Il y a toujours une première fois et le 7 mars 2020, ce sera la première fois. Au cœur de l’Europe dans une société plutôt conservatrice, où l’économie florissante cache parfois la misère des travailleuses du sexe, des femmes de ménage qui vont d’un travail précaire à un autre travail précaire, et des salaires qui sont en dessous comme partout de celui des hommes, une réunion prépare l’avenir. Encouragé par la gauche et les syndicats, rejoints par des militantes des associations, parfois féministes, mais rarement exclusivement, on trouve autour de la table des profils variés, mais des profils engagés.
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Avec plaisir, on y découvre une belle jeunesse qui préfigure de belles promesses d’avenir, les femmes politiques de premier plan de demain sont là, elles en ont la fibre, elles en sont l’essence.
Beaucoup de courtoisie, des petits gâteaux faits maison, des fruits, la table et le tour de table est féminins, seul un petit garçon dans les bras de sa mère, qui porte le prénom d’un roi perse, se tenant à l’écart joue bruyamment comme pour rappeler cette chanson qui me revient à l’esprit…
F r a e s t r e i k ! L a p r e m i è r e g r è v e d e s f e m m e s au Lu x e m b o u r g !
« This is a man‘s world, this is a man‘s world But it wouldn‘t be nothing, nothing without a woman or a girl… » Devrim qui m’a invité est kurde, elle représente autour de la table une association féministe et ses femmes combattantes… alors toute la mixité des temps anciens des zoroastriens aux femmes contemporaines qui finalement peuvent et ont déjà été l’égale des hommes dans le passé dans des sociétés que nous occidentaux sommes souvent incapables de nous représenter de par leur richesse me revient à l’esprit.
Beaucoup de sérieux enveloppe la réunion de la première Faestreik. On vit quelque chose d’historique, chacun mesure l’ampleur de l’action, ce petit pas pour la femme, mais ce grand pas pour la société luxembourgeoise, société au visage contemporain et véritable melting-pot. Un rapide tour de table des prénoms, des fonctions et des causes, et l’on comprend qu’on est toutes du même acabit. Alors c’est vrai ce n’est pas une semaine sans femme, ce n’est pas la démonstration grandiose du rôle des femmes dans la société, et la privation totale de leur présence qui se profile, c’est une grève imaginée que par elles, pour elles et avec elles.
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Même si l’absence des hommes autour de la table se fait sentir, dans les associations, il ne faut pas se le cacher, qu’il s’agisse de la Gauche ou des syndicats, il y à tout de même des hommes bienveillants. Ce sera donc un samedi. On devine aux cernes sous les yeux et aux visages marqués que beaucoup sont seules à la manœuvre que beaucoup d’entre elles portent déjà ce pantalon, qu’elles ont arraché, cheville au corps à des hommes qui au final ont bien du mal à le reconnaître, la nature est faite de mixité, c’est la société qui est inadaptée.
Au début de ce millénaire, le Luxembourg prépare sa première grève des femmes… comme si le cœur de l’Europe se réveillait enfin, comme s’il commençait enfin à battre, pour que demain l’aspect social, égalitaire et fraternel s’offre à tous et à toutes, comme si tout se devait de commencer ici, pour être acté. Gageons que c’est le début de belles aventures humaines, et féminines. L’aube de l’Europe sociale, avec et pour les femmes. Carole Vilbois
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F r a e s t r e i k ! L a p r e m i è r e g r è v e d e s f e m m e s au Lu x e m b o u r g !
En savoir plus : https://www.facebook.com/JIFLuxembourg/
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S é b a s t i e n L ay e
R éco n c i l i at i o n s
Sébastien Laye Réconciliations Entrepreneur et investisseurImmobilier, energies renouvelables et infrastructures Chercheur Associé en Economie Think Tank Thomas More Groupe Cincinnatus
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S é b a s t i e n L ay e
R éco n c i l i at i o n s
Bonjour Monsieur Laye, notre magazine se penche ce mois-ci sur les tribus et le sens du collectif. Vous avez entrepris de rassembler des citoyens et des groupes de citoyens autour de « Réconciliation ». Pouvez-vous nous parler de cette démarche ? Les temps modernes, disons après la Renaissance, se sont construits en Europe notamment sur l’idée d’uniformisation et d’homogénéisation couplée au mythe de la raison pure kantienne. C’est ce que des penseurs comme Lyotard ou Maffesoli ont mis en évidence, notant depuis les années 1970 une sortie progressive de ce rouleau compresseur de la modernité : à tâtons certes, nous entrons dans une ère ou les individus sont plus autonomisés, mais où ils ne sont pas réduits à leur propre personne couplée à une raison plus sensible : ils s’autonomisent via des tribus, des affinités sélectives… Ce phénomène n’a rien à voir avec le communautarisme religieux dont on parle dans le débat public : la vie sociale est faite de communautés fluides, qui se composent et se recomposent en permanence : appartenir en bloc à une identité n’intéresse plus les gens. En politique, cela veut dire que la Forme Parti monolithique est définitivement morte. Alors même que les mouvements citoyens, les communautés d’usagers ou de Gilets Jaunes se multiplient. Nous avons donc décidé de soutenir ces initiatives et groupes de terrain (on se référera ici au terme anglo-saxon de grassroots movement) : certains sont organisés en groupes politiques (Refondation, ML2D), citoyens (Évolution Citoyenne, Cincinnatus, Alliance Jaune), mais la plupart sont parfaitement indépendants et sont avant tout des groupes locaux : nous souhaitons leur apporter de la lisibilité nationale et l’appartenance à une communauté de communautés à travers une Charte des Valeurs communes et quelques engagements forts et transpartisans : ne pas reproduire à l’échelle locale les comportements oligarchiques nationaux, favoriser la transition énergétique dans leur bassin de vie et les circuits courts, favoriser les dispositifs zéro chômeurs et zéro SDF sur leurs territoires. Cette démarche commence avec les municipales, qui permettent de repérer ceux de nos concitoyens qui sont les plus engagés et déterminés. Mais au-delà, et en repartant de la base et des Territoires, il y a un potentiel pour rassembler et innover en politique. Les Français sont-ils « fâchés » entre eux, comment les réconcilier ? Dans tous les pays, les élites ont renoncé au cours des trente dernières années à traduire en politiques publiques les revendications des classes moyennes. Ces élites se sont autonomisées sous la férule d’une mondialisation à marche forcée. Ce phénomène, décrit par Christopher Lasch dès les années 90, a suscité un retour de bâton avec des masses populaires qui font sécession et nient toute légitimité aux élites politiques ou réclament des éléments de démocratie directe. Parfois décrié sous le nom de populisme, ce phénomène est sain et nous ne devons pas le craindre. Il a abouti dans de nombreux pays à la recherche, souvent maladroite et incertaine, d’un nouveau compromis démocratique entre élites et masses populaires, les premières acceptant à nouveau de servir les secondes ; funeste exception française, nous sommes restés à l’écart de cette tendance de reconstruction, technocratie et bourgeoisie d’affaires tenant toutes les vannes du pouvoir. Il faut donc, dans une démarche de réconciliation, cesser ces pratiques et mots clivants (la France d’en haut, ceux qui ne sont rien, etc.) et retrouver l’essence même du politique, qui est la poursuite du Bien Commun et non la défense des intérêts de classes des uns ou des autres. Les dernières crises sociales, en fracturant les Français au sein de chaque famille, renforcent les rentes politiques des uns ou des autres au détriment de notre intérêt à tous.
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R éco n c i l i at i o n s
Pensez-vous que c’est la fin des partis traditionnels ?
Depuis quelque temps, on voit naître ici et là des initiatives qui visent à rassembler les citoyens. En quoi votre démarche est novatrice ? Le problème de ces initiatives est leur faiblesse et extrême parcellisation. Face au système politique classique, aux forces économiques, elles pèchent par manque de crédibilité et finissent broyées par le système. Notre ambition est d’amener aussi un réseau national et international, des experts, des personnalités connues, au service de ces causes citoyennes sur le terrain. En fait, ce que les politiques n’auraient jamais dû cesser de faire, en une démarche qu’ils ont abandonnée depuis plusieurs décennies. Quand on regarde les mouvements populaires type Gilets Jaunes, il y a une juste et compréhensible défiance envers les experts et la dimension nationale/internationale : c’est normal puisqu’une grande partie des mauvaises décisions viennent de ces cercles-là. Mais dès que les Gilets Jaunes ont voulu s’impliquer dans le monde politique, ils ont compris l’ampleur du problème : pour remettre sur les rails nos politiques économiques ou la dimension européenne, il faut quand même comprendre et avoir des relais dans le monde économique, administratif ou diplomatique. Cette crédibilité est nécessaire pour réussir la transformation du pays. Si ces univers ne se parlent pas, alors seule la technocratie restera au pouvoir, engoncée dans ses certitudes et en niant toute dimension populaire à la souveraineté politique….
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Au niveau local, pas entièrement, et je crois que la plupart des bons maires PS ou LR seront réunis. Au niveau national, oui. Comme en 2017, les prochains présidents ne seront plus issus de partis. Des coalitions ad hoc se formeront autour de quelques personnalités qui émergeront. Pour l’instant le système a protégé ses rentes avec des obstacles comme les parrainages, le financement (Macron a pu les faire sauteur grâce à d’importants soutiens financiers, mais aussi du PS…), mais rien n’empêche les partis établis, techniquement capables d’avoir un candidat (mais qui serait peut-être très bas dans les sondages) de soutenir des alliés dans le cadre des prochaines législatives et présidentielles. Seuls les egos des uns et des autres entravent ces recompositions aujourd’hui…. Le libéralisme pour vous, c’est une chance à saisir, une fatalité économique, une vue de l’esprit. Pouvez-vous nous dire si vous pensez que c’est un modèle fiable à long terme et en phase avec les attentes des Français ? Se pose le problème de définition du terme. Je comprends le libéralisme classique, celui de Tocqueville ou Benjamin Constant qui était d’abord politique avant d’être économique ; j’adhère aussi aux libéraux classiques qui demandent à l’État de garder une place bien déterminée dans l’économie et de ne pas étouffer l’initiative privée : en tant qu’entrepreneur, je ne peux qu’acquiescer. Mais le néo-libéralisme hors sol qui s’est développé au cours des dernières décennies ne me paraît pas lui un modèle viable. La France a besoin de plus de liberté pour ses entrepreneurs et ses créateurs d’emplois, d’une fiscalité plus simple, de régulations plus fiables, mais elle a besoin aussi de recouvrer sa souveraineté économique : se dissoudre dans la marchandisation européenne ou la mondialisation nous a appauvris et nous pouvons encore revenir en arrière sur ce point. L’Unité le Mag´ vous remercie de nous avoir accordé cette interview.
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Droguée, alcoolique, antisémite, violente, fainéante, illettrée, que n’a-t-on pas dit sur cette tribu ? En plus, habillée du plus mauvais goût ! Ils portent tous et toutes un gilet jaune. Même Karl Lagerfeld l’avait reconnu quand il en faisait la promotion pour la sécurité routière : c’est laid. Ils forment la tribu des gilets jaunes. Ils déambulent dans les rues, tels des zombies, sans forcément avoir un lieu précis à atteindre. Ils ont même osé se rendre à l’Élysée qui faillit tomber en décembre 2018. La tribu des médias a alors crié que la république avait été attaquée. Mais la République c’est aussi les gilets jaunes. Passons la tribu des médias. Ces illettrés qui ne comprennent rien à rien, incapables d’appréhender la pensée jupitérienne, les accusent de n’être qu’un relais du pouvoir. Ne créons pas ici inutilement de polémique au risque de trouver un jour un Benalla devant notre porte. La tribu des biens habillés a des hommes de main qui peuvent être très violents. Alors, il fallut pour la tribu du pouvoir, propre sur elle, qui paye ses chemises en travaillant, qui a les postes et l’argent qu’il mérite, qui peut même accéder au divorce sans tomber sous la colère de Julie Graziani, les combattre : dénigrer et réprimer. Rendez-vous compte : ces bons à rien osent dire qu’ils ont faim — quelle indécence de crier ça dans la France du 21ème siècle, et en pleine rue — qu’ils ne peuvent plus payer leurs factures, qu’ils ne se chauffent plus correctement, qu’ils ne s’éclairent plus convenablement, qu’ils ne se soignent plus, qu’ils n’habillent plus leurs enfants dont d’ailleurs ils ont du mal à payer la cantine à l’école. Et puis zut ! Ils n’avaient qu’à ne pas se reproduire. Pourtant, ils travaillent !! Et bien, ils n’ont qu’à travailler plus ! Mais bon, la journée ne fait que 24 heures. Faisons des journées de 29 heures ! En plus, ils n’ont même pas assez d’argent pour s’exiler dans les paradis fiscaux. Ils sont même bêtes : ils ont cru en la parole d’un de la tribu en costume qui avait promis qu’il n’y aurait plus de SDF. Ne savent-ils pas que selon le costume cravate Balkany, il n’y a pas de SDF en France ? Que ça n’est là qu’un choix de mode de vie. Vous ne le croyez pas ? Matraquez-moi ça ! Oui, mais ils ont voté pour le chef actuel parce qu’ils ne voulaient pas du FN. Ce n’est pas grave, on n’a qu’à dire qu’ils sont de l’ultra droite. De surcroît, ça fera des retombés pour les prochaines élections. On entend dire que la tribu des gilets jaunes ferait alliance avec la tribu des babouchka. Ils seraient soutenus par les Russes, les Bengalis, les Coumans et les Galates. C’est un complot ourdi de l’étranger !
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Berkan Toppeker La guerre des tribus
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Ils sont jaloux de notre démocratie ! Regardez, au Bangladesh c’est pire. Bande d’ingrats. Et puis de toute façon, les chefs viennent toujours de la tribu des bien habillés. Ils ne vont tout de même pas changer de tenue vestimentaire pour ces gueux. Certains de la tribu des gilets jaunes sont des vieux : tant mieux, ils crèveront plus vite. Tous cherchent du travail quand ils n’en ont pas : ils n’ont qu’à retraverser la rue. Ils ont déjà retraversé la rue : bon dégagez de ce rond-point, vous ne faites que tourner en rond ! Ils sont pacifistes à la base : il n’y a qu’à pourrir leurs sorties hebdomadaires en les nassant. Puis en les gazant. Gazer ? Vite, mettons un monopole sur le verbe. D’autant plus que ça se passe en plein air. Ensuite, il n’y a qu’à les envoyer à la tribu des robes noires : ils les mettront en prison. Devant les robes noires, les gilets jaunes invoquent leurs ancêtres qui eux se promenaient sans culotte. Mais face à la sentence, ils se retrouvent eux-mêmes défroqués. Mais avant, ils doivent comprendre qui est le chef des tribus. Le respect de la république passe avant tout. De plus, rendez-vous compte, les gilets jaunes ont gâché la jeunesse de ce dernier — Jean-Michel Apathie de la tribu des media —. Alors, il faut leur envoyer la tribu des hommes en uniforme : ils sont armés et peuvent être très méchants. Des gilets jaunes ont été mutilés, certains sont morts. Et alors ? Sous Pétain on fusillait pour l’exemple. Ces haineux disent même que l’actuel chef des costumes cravates a eu pour mentor politique un ancien pétainiste, Paul Ricœur. Et alors ? qu’est ce que ça peut vous faire ? C’est sa liberté que vous critiquez là monsieur. Et critiquer la liberté du chef costume cravate qui s’achète ses chemises en travaillant c’est critiquer la République ! Gazez-moi ça ! Hélas, un gilet jaune ça ne sauve pas de vie. Il cherche juste à sauver sa peau. En quelques mois, la tribu des uniformes a blessé en quelques mois autant de gilets jaunes manifestants qu’en vingt années. La chemise du chef des tribus le vaut bien.
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En réalité, les chefs des costumes cravates sont fourbes : ils savent pertinemment qu’ils ont besoin de la tribu des gilets jaunes drogués, alcooliques, antisémites, violents, fainéants et illettrés, pour faire tourner leurs usines. La tribu des gilets jaunes en reprend conscience.
Alors, j’ai vu le gilet jaune dégainer son arme ultime. Une arme extrêmement puissante, dévastatrice. Le gilet jaune se pointe avec quelques plots sous le bras à un péage d’autoroute et il en dépose un devant chaque guichet. Puis il attend. Il n’a pas à attendre bien longtemps pour qu’agisse toute la magie du plot : les véhicules s’arrêtent ! Le plot est tellement puissant que même des 30 tonnes ne passent plus et s’accumulent tels des cadavres sur des kilomètres d’autoroute. Le plot est une prison mentale. Il symbolise toute la force d’une injonction. Celle à laquelle le gilet jaune a lui-même obéit toute sa vie durant. Et le voilà qui maintenant commande, grâce à son plot magique, à un milliard d’euros d’enjeu économique par semaine. Alors, le gilet jaune se poste en retrait avec quelques amis. Il allume sa cigarette, met sa musique, boit son café et discute. Il profite de l’instant présent : il pèse énormément dans l’économie du pays. Pourtant, il a beaucoup de mal avec sa paye. Au bout d’un temps, arrive la tribu des policiers. Cette tribu n’aime pas les plots. Sauf les siens. Alors, ils enlèvent les plots du gilet jaune. Mais ce dernier s’en fiche. Il laisse faire la police qui lui intime l’ordre de partir. Le gilet jaune s’en va, car il est rusé : la police mettra des heures à rétablir la circulation. C’est donc le policier qui continuera à bloquer, malgré lui, durant des heures l’autoroute à sa place. Quand la police part, le gilet jaune revient. Il a des stocks entiers de plots, des litres de café et une conversation à terminer avec ses amis.
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Fr ank Buhler
Frank Buhler
De l’exaltation de La Tribu au déni de la race, la grande schizophrènie de la bien-pensance
La « tribu », les arts premiers, si chers mêmes personnes et pour des motifs incompréhensibles ? Qui songe à Jacques Chirac, l’admirable particularisme de la tribu du chef Amazonien Raoni, si bien adapté à un environnement mortellement dangereux....
à nier que bien que de la même espèce, les chiens ou les chevaux ont des qualités et des aptitudes différentes selon leur appartenance à des groupes (génétiquement, de façon extrêmement légère, différente) que l’habitude et la sémantique nomment « race » ?
Le « génie propre » d’un peuple...
Doit-on faire courir des teckels sur des cynodromes et faire ramper des lévriers dans des terriers au nom de la Sainte Égalité cynophile ?
La bien-pensance vibre, s’enflamme et presque orgasmiquement à de tels concepts. Mais si au mot « tribu » se substitue le mot « race », ces messieurs hurlent et protestent en dégainant leur avocat. Mais en quoi donc y a-t — il une différence entre ces concepts ? D’ailleurs la science a confirmé l’existence des races humaines tout simplement parce que certaines maladies touchent des « ethnies » (soyons un instant politiquement correct) et pas d’autres… Je devrais dire certaines tribus et pas d’autres ?
L’espèce humaine est-elle donc d’une essence divine qui la met à l’abri des différences dues à des millions d’années d’adaptation à des environnements différents ? Comment s’extasier sur les tribus, leurs différences et leur génie propre, en niant l’évidence scientifique des « races » ?
Il est même aujourd’hui contesté par des généticiens (anathèmes) de plus en plus nombreux que l’espèce humaine soit le fruit d’une source unique, africaine et éthiopienne, c’est-à-dire « divergente », mais soit au contraire « convergente » à partir de foyers originels multiples. Ce royaume d’absurdie est, certes, la conséquence dévoyée que des idéologies haineuses ont fait de l’existence du fait racial, ou en réalité tribal, mais pourquoi se ridiculiser dans un grand écart qui loue la Je parle ici de la Drépanocytose. Nier diversité, tout en niant la cause de la dite diversité ? l’existence des races, mais pourquoi ? L’existence de la diversité serait une merveille, mais l’existence des Bien entendu, cette acceptation de races serait une horreur, je ne comprends pas cette contradiction. l’existence de la race n’est pas pour autant Pourquoi la race ne serait-elle pas une richesse dès le moment où elle une théorie agressive voulant hiérarchiser n’est pas, bien au contraire, un motif de stigmatisation ? Reconnaître ces différentes races, ou devrais-je dire ces l’existence des races, ce serait être raciste. Mais être raciste signifie-t-il haïr ou dévaloriser l’une de ces races ? différentes tribus ? En quoi la différence qui nous est vantée par Et si être raciste, et si reconnaître l’existence de tribu, étaient au les bien-pensants, au titre du métissage et contraire reconnaître à chacune d’entre elles l’existence d’un génie de l’enrichissement culturel, deviendrait-elle qui lui est propre ? tout à coup totalement inexistante selon les La tribu, la race, le peuple, aucun de ces concepts n’est négatif en soi. C’est l’histoire qui a connoté et étiqueté le mot race et qui l’a rendu négatif alors que la Sainte Diversité a rendu noble le mot de tribu. Il serait temps selon moi de revenir à la réalité brute des mots et des
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Fr ank Buhler
concepts qu’ils représentent. Un homme, ô combien sulfureux, et maintes fois condamné par des juges ne maîtrisant pas notre langue, a contrario du lauréat du Grand Prix de l’Académie française, nous dit ceci « je suis raciste, car j’aime la diversité et veux la préserver ».
est pénalement répréhensible alors que la seconde est orgasmique pour les bien-pensants même si leur signification est exactement le même : refusons ce métissage qui appauvrit la diversité humaine et détruit de précieuses cultures tribales (raciales). Je parlais bien entendu de Renaud Camus. Alors vive le racisme ? Non.
Changeons la phrase pour que l’inculte puisse la comprendre « je suis tribalisme, car j’aime la diversité et veux la préserver ». En réalité, la première phrase
Car M. Hitler a définitivement stigmatisé un mot qui aurait pu s’entendre bien différemment.
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S a i f o u l ay e S o w
Saifoulaye Sow Migrant oui, mais l´école pour Tous
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S a i f o u l ay e S o w
Sow entre élégamment vêtu, le jeune homme n’a que 18 ans, et personne, á le côtoyer ainsi peut imaginer un instant sont parcours. Il est Peuhl et vient de Guinée. Rien ne le destinait à se trouver là, place de la République à Paris, voilà quelques années. C’est à la fois le parcours tristement ordinaire d’un jeune migrant qui fuit l’Afrique, l’histoire d’un espoir, mais également une histoire personnelle, faite de courage, de peur, d’optimisme et de rencontres. Il perd très jeune ses parents et vit en famille avec un oncle, rien d’un conte de fées, corvéable à souhait, il va avec son grand frère prendre la route vers l’Europe, prendre surtout la fuite. Il n’est pas le meneur de l’expédition aussi lorsqu’en Libye les choses tournent mal, elles tournent pour lui très vite au cauchemar. Sous ses yeux il voit son frère se faire abattre d’une balle dans la tête alors qu’il est lui-même blessé à la cuisse. Il s’effondre. Lorsqu’il se réveille, il doit son salut à une femme qui insiste pour qu’on le soigne. En Libye, il vient de le comprendre, il est considéré encore moins qu’un être humain. Il va pourtant réussir à rejoindre un ami de son frère, qui va lui payer son passage vers l’Italie. Il le sait la traversée est dangereuse, et cette fois c’est sa vie qu’il risque, mais maintenant il n’a plus rien à perdre, il ne peut pas rester, c’est trop dangereux. Ensuite son parcours devient presque ordinaire, il passe de l’Italie à la France. Nous avons rencontré Sow lors de la projection en septembre au Havre d’un documentaire dont nous avions parlé dans notre magazine le trimestre dernier. Après 7 mois à la rue, et ce parcours du combattant qui le conduit au combat qu’il entreprend avec les jeunes du collectif l’école pour tous, il est transformé. La résilience prend tout son sens, il veut comme les autres, comme tous les autres enfants avoir un avenir, d’ailleurs il est chez les Compagnons du devoir. Même si son avenir reste encore incertain et si tout reste à construire, il a pris confiance en lui et avec le Collectif #EcolePourTous il a interpellé le ministre de l‘Education nationale. Ils ont fait un clip et ont été relayés largement sur les réseaux sociaux, puis une carte postale, une pétition...
Ils ont rencontré de nombreux acteurs politiques, mais pour l’instant ce qu’ils demandent est resté lettre morte. Ils veulent obtenir la présomption de minorité, cela semble être un détail, pourtant sans elle, pas de prise en charge. Actuellement il leur faut prouver leurs minorités, ce qui prend parfois des mois, pour ces enfants qui vivent dans la rue dans des situations précaires et dangereuses pour eux. Ils demandent également une trêve scolaire pour éviter les expulsions durant la scolarité des mineurs, lorsqu’ils peuvent accéder à l’école, le démantèlement d’un bidonville peut faire perdre plusieurs mois de scolarité à un enfant, avant qu’il ne puisse réintégrer une autre école. Le collectif demande aussi que les contrats jeunes majeurs deviennent obligatoire jusqu‘à l’âge de 21 ans pour leur permettre de continuer leurs études au-delà de la majorité et ne pas se retrouver à la rue. Car ils sont courageux, combatifs, volontaires, et déterminés, car il demande ce que nos enfants ont la chance d’avoir sans l’apprécier, juste l’accès a l’école, car il rêve d’aider un jour à leur tour les autres, c’est notre devoir de soutenir ceux qui refusent de se laisser aller, et qui prennent leurs destins en main, car ils sont également les hommes et les femmes politiques de demain. Nous vous invitions à découvrir leur site, à regarder leurs vidéos, à rejoindre avec nous leur combat, et de faire en sorte qu’effectivement l’école s’ouvre a tous. Qu’ils soient venus seuls, ou car leurs parents ont pris cette décision pour eux, ils ont laissé derrière eux un passé et nous ne pouvons refuser de leur ouvrir la porte vers l’avenir. Politique soyons actif ! Une place pour chaque enfant, qu’ils soient d’ici ou d’ailleurs, porteur d’un handicap ou juste différent. Semons de l’espoir, pour récolter demain une société qui respire le bien-être.
Pour signer la pétition http://bit.ly/2R0SAi4 Pour en savoir plus : https://www.facebook.com/CollectifEcolePourTous/
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À tous ceux qui jettent l’éponge, à Lionel le compagnon d’armes, Isabelle et à Françoise, à tous les perdus de l’existence que nous ne connaîtrons jamais, à ceux que nous avons connus, ceux pour qui le monde ne s’adapte pas, ceux que la tribu moderne des hommes riches laisse de côté, ceux qui ne veulent pas en être. À celui qui préfère un trottoir à un dortoir, à celui qui préfère se taire, à celui qui se sent seul et impuissant. À celui pour qui le monde paraît trop grand, à ceux qui passeront Noël dans la solitude alors qu’ils ont toujours eu foi en Dieu et ceux qui n’y croient plus. À ceux qui ne croiseront jamais une main tendue, à ceux qui ne savent pas la prendre, à ceux à qui il ne reste que la fierté. À ceux dont
la liste sans fin ira grossir celle de nos abjects silences, et notre complicité mélancolique, aux excuses que nous nous cherchons, à notre morale que nous drapons trop souvent de l’indifférence, de la distance, que nous plaçons entre lui, l’étranger, et notre sphère d’habitude, a tout cela et surtout dans cette période ou la fête est de façon calendaire, un point de ponctuation de nos existences, le rappel blafard des jours où il en est autrement, et ou vivre, devient le quotidien, l’ordinaire, l’habitude. L’habitude d’être pauvre, l’habitude d’être riche, et au-dessus de nos têtes, le vol incessant des corbeaux. Alors que certains sont poussés au suicide, par des hiérarchies, des comportements humains fratricides, que des États génocidaires, des pouvoirs « peuplicides » ; que l’armée qui se doit de défendre sa population et que des chefs d’État à la solde d’intérêts privés, d’amitiés intéressées, gouvernent des peuples trop occupés a se débattre avec les corbeaux qui rôdent autour d’eux, pour focaliser leurs luttes sur le véritable ennemi, celui de l’intérieur. Combien de Gilets Jaunes surendettés, combien de pas content qui n’osent ouvrir leur courrier juste pour ne pas les voir, ces corbeaux en noir, blanc, parfois en robe et si peu en humanisme ?
De la tribu des corbeaux impunis au QUADRUPLATOR 54
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Il y a aussi les autres, ceux qui ne bougent pas, car informatiquement ils vont s’abattre plus assurément encore sur leur proie.
Aussi alors qu’une fin de contrat d’assurance et un nonprélèvement du dernier montant reporta le paiement de décembre dû en janvier au 15 février, mon corbeau commença à vouloir une part de ressources de mon 6.5 milliards d’agios ont été perçus auprès de personne fromage de revenu statistique. qui n’avait pas d’argent en 2017 selon l’UFC Que Choisir et 60 millions de consommateurs. 86 % de marge serait Ce n’était pas bien légal, mais il commença par ne pas réalisé par les banques, loin des frais réels engendrés. Pour tenir compte de la date de paiement… le 15 devenant le ne pas déranger ce système qui consiste à prendre à ceux 20, et vous connaissez la suite. Vous n’avez pas de dette, qui n’ont pas, la moyenne des frais étant de 131,00 € par mais votre corbeau ne lâche rien à l’affaire, et le voilà à personne non solvable, le gouvernement en place a décidé vous faire des courriers… chaque courrier étant un peu de plafonner les frais à 200 €, au lieu de tout simplement d’argent fictif, il n’est pas avare du papier, au diable les réduire aux frais réels, environ 20 € d’après les calculs. la forêt amazonienne, tout peut brûler autour, votre Permettant ainsi de demander un montant forfaitaire corbeau veut ses sous ! Il a fait des études de rapaces, se supérieur au frais moyen. prend pour un aigle, n’a aucune notion de son reflet dans le miroir ! La loi, le droit c’est lui… vous… une proie. Même si vous n’y êtes pour rien, vous êtes forcément coupable, car vous êtes pauvre… Normalement la victime qui voit venir la mention d’un avocat et du tribunal, tremble… elle sait que les frais vont s’alourdir et fini par céder. En plus on sait que les Combien de sang sur les mains ? Combien de suicide ? corbeaux travaillent entre eux, et que les affaires se Combien de fin de non-recevoir et d’ordonnance de discutent au coin d’une table entre volatiles… Un jour paiement ? tu gagnes ton affaire, demain tu fais un geste pour la mienne. Mon corbeau parlait allemand et profitant de l’idée qu’il Alors cela devient hitchcockien, vous êtes pris entre pouvait se faire de mon orthographe dans la langue de la colère et la frayeur. Vous êtes dans votre bon droit, Goethe, j’étais un « Auslander »… un étranger. mais le droit c’est lui ! Vous n’êtes pas dans votre pays, vous êtes un migrant français, pas un expatrié pour lui et
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ses semblables, vous savez que vos courriers bourrés de fautes vont vous desservir, vous priez presque pour que l’autre ne soit pas raciste, celui d’en face, celui qui va lire votre dossier vide, celui d’une facture payée ! Vous avez la chance de ne pas être pauvre, vous avez une assurance juridique, vous pouvez parler de votre corbeau, et dire haut et fort que partout en Europe, il existe des personnes qui use et abuse du droit, pour s’enrichir, au dépens de ceux qui ne peuvent ou ne savent se défendre ! Alors vous comprenez ce que Mohamed, Nikita, Joshua, Tangabouna, Jored, et les autres vivent, lorsque migrant, les factures impayées les poussent avec justice ou non vers les tribunaux, ce que Louis, David, Nathalie et Anne-
Combien de pères de famille qui se sentent émasculés par leurs incapacités à nourrir leurs familles, et si je vous contais l’histoire de cette Gitane veuve qui venait de perdre dans un accident de voiture son mari et son fils aînés, les seuls qui pouvaient subvenir au besoin de sa famille nombreuse, et qui pour un jambon volé pour nourrir sa famille, car il s’agissait d’un flagrant délit et d’une comparution immédiate fut condamnée à 18 mois de prison ? Les parloirs, les pleurs des enfants ? L’indifférence de notre société, au cœur trop froid, à l’âme
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Sophie, ressentent lorsque licenciés ils ne peuvent plus honorer des crédits. Lorsque les corbeaux arrivent et guète la fin des proies pour se servir là où il n’y a plus rien. Combien de « Pas contents », de « Gilets Jaunes », de simple « Gens », face aux corbeaux que la société alimente, combien de victimes, qui un jour, car elles ne peuvent voir la sortie du tunnel mettent dans une impunité totale fin à leur jour, sans même que le corbeau qui volent là-haut ne réalise son crime ? Combien de TGV qui ne partent pas à l’heure pour « Accident de personne », pour un courrier de trop, une lettre de trop, un déshonneur de trop ?
défaillante, et au pas lourd. On ajoute de la misère à la misère d’une veuve. Nous nommons cela droit ? Le droit de tuer ? Le droit d’achever ? Le droit à l’indifférence ? Le corbeau allemand Ohletz, crée le droit de poursuivre en justice pour un montant de 160,00 euros un tiers
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qui n’a pas de contrat avec lui au nom de son client qui ne l’a pas mandaté pour cela, pour un solde entre les parties qui est nul. Bien entendu, des sociétés comme celle-là il en existe beaucoup en France, et souvent on recommande de ne pas payer les frais, mais comment pouvons-nous tolérer de telles pratiques en Europe ? Quid des étrangers, et des familles surendettées qui voient à coup d’agios la situation s’empirer ? Il est grand temps que les politiques se penchent sur la question de la dette des ménages, sur les sociétés de recouvrement et sur la création de pôles de soutien psychologique aux familles endettées, avec des ponts vers l’emploi, la formation, l’accompagnement. Les grandes entreprises ne peuvent pas d’un côté vouloir participer à des programmes de bonne conscience écologique, sauver la planète, investir dans l’économie circulaire, pour ne pas étouffer le système qui les alimente et tout de même broyer ceux qui traînent en fin du peloton. La Justice serait bien plus juste si elle était la même pour tous, et seule l’intelligence artificielle peut le garantir. Des aides virtuelles, à la prise de décision des achats, pourraient être des outils pour les acheteurs compulsifs, notre société á besoin d’intelligence, de compassion, de bienveillance, loin des corbeaux et fins de non-recevoir, des recouvrements, de l’étouffement et de l’effondrement. L’État a déjà volé au secours des banques. La Société Générale dont le bénéfice a augmenté de 25 % en 2015 à 1,35 milliard avait déjà supprimé près de deux mille emplois, la banque annonçant de surcroît un autre plan visant cette fois une économie de 850 millions pour 2017. Ce plan s’accompagnant de la fermeture de 400 agences d’ici 2020 (soit 20 % du réseau d’agences) et la suppression de plus de 2 500 postes. 99 % des Français possèdent au moins un compte bancaire, courant ou d’épargne. La Revue Banque titrait : « La fin des banques ? » Selon Philippe Herlin, les évolutions technologiques annonceraient une rupture avec le système monétaire actuel, centralisé rigide et donc fragile. Alors, que penser de l’avenir des BFI ?
L’avenir sera-t-il raisonnable et raisonné ?
Et si en quittant le pouvoir l’homme qui venait d’une banque ne fermait sans le vouloir la porte derrière elle ? Et si c’était au peuple de choisir sa monnaie, au monde réel de vaincre le monde virtuel de la spéculation libérale, la victoire de la matière sur l’esprit ? La fin des corbeaux. Et si De Fugger à Napoléon, les banques nées du besoin de faire la guerre et de financer les armées, il ne restait rien que la paix en ce début de 21e siècle ? Une paix qui nous oblige à mettre un système en place qui ne repose pas sur son propre effondrement ? En 2011, on pouvait lire, le marché du recouvrement de créances: un marché en pleine expansion. Cette activité représentait un chiffre d’affaires global de 350 millions d’euros en 2011. L’expansion du marché de recouvrement de créances s’explique par l’explosion du nombre de créances civiles et commerciales, ainsi que par l’externalisation de la fonction recouvrement. La crise économique perdurant, les entreprises sont de plus en plus confrontées à des situations difficiles vis-à-vis de leurs débiteurs. Elles font donc régulièrement appel aux professionnels du recouvrement pour recouvrer leurs créances et améliorer leur trésorerie. Le marché de recouvrement de créances est ainsi florissant et compte de nouveaux acteurs. Le recouvrement de créances consiste en tous moyens légaux mis en œuvre pour qu’un débiteur s’acquitte de la dette qu’il a envers un créancier, certes, mais l’enrichissement dans ce domaine est-il moral ? L’usure ne l’était pas, dans les religions,les empires tel que celui de Rome, car les anciens savaient que cette pratique pouvait mener à la perte. Même si les quadruolator, délateur qui recevait le quart des biens de l’accusé, avaient porte ouverte dans les anciennes cités, pour la défense des intérêts de l’État, faut-il accepter que dans notre modernité nulle évolution ne voit le jour, au nom des habitudes ? Ainsi, alors que seul le principal devrait être réclamé, en cas de non-paiement, que l’enrichissement sur le dos des plus pauvres devrait être banni de nos pratiques le monde dit moderne qui nourrit toute une filiale et fait un chiffre d’affaires exorbitant sur le dos de personnes non solvable. Insurgeons-nous, au nom de ceux qui vont quitter le monde demain pour des factures, des dettes, des rêves, des soldes, des chiffres, est-ce vraiment ce monde-là que nous voulons laisser à nos enfants ?
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L´A r b r e d e N o é C a r o l e V i l b o i s & A n to i n e F o n ta i n e
L´Arbre de Noé Carole Vilbois & Antoine Fontaine
L’arbre de Noé est un conte philosophique imaginé par Carole Vilbois et Antoine Fontaine. Il s’inscrit dans le cadre d’un projet initié par le Collectif pour le maintien des activités au cœur de La Réunion visant à planter des arbres endémiques de La Réunion dans la zone de La Crête située dans le sud de l’île, sur l’ilet Marronne. Une campagne de parrainages d’arbres sera lancée au second trimestre de l’année 2020. Cette forêt-jardin est réalisée à des fins pédagogiques afin de permettre aux différents publics de La Réunion de reconnaître ces plantes, d’apprendre à les multiplier pour de replanter la forêt primaire, tout en renouant avec une tradition ancestrale de l’île : la tisanerie.
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Il y a quelques années, sur la route de la Crête j’ai rencontré un petit garçon qui ressemblait à tous les petits garçons du monde, c’était un enfant du « Péi », il était d’ici. Il me regardait droit dans les yeux, comme le font ceux qui n’ont peur de rien avec l’assurance de l’ignorance. - Comment c’est la vie la vie des hommes ? Comment fait-on pour en devenir un ? Je dû retenir un rire, mais je voyais bien que la question était très sérieuse. - Tu sais il faut pousser beaucoup de portes pour devenir un homme. - Ah oui des portes, mais comment vais-je les trouver ? - Ce ne sont pas des portes ordinaires, ce sont des portes imaginaires. - Je ne peux pas les voir, c’est ça ? Elles sont imaginaires comme moi ? - Non, toi tu as vraiment existé, tu es le petit garçon en chacun de nous. - Parle-moi de tes portes. - Derrière chacune d’elle, tu as une personne qui t’aide à avancer pour aller plus loin. Il y a en premier lieu la porte du passé. Derrière celle-ci, il y avait monsieur Bebère, c’était un vieux monsieur. Tu le sais, tous les hommes sont des vieux messieurs quand on est petit.
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La première chose qui t’enivrait c’était le parfum du géranium, alors tu savais que tu étais arrivé. Avec les autres enfants de la famille, on nous avait confié la tâche de tasser les plantes dans l’alambic avant leur distillation. Nous sautions tous à pieds joints sur ce matelas de feuille. Monsieur Bebère fabriquait de l’essence de géranium. Le soir venu, dans les cases en bois qui sentait la paille et l’enfance, nous nous racontions des histoires pour nous faire peur. - Il vit encore, Monsieur Bebère ? Tu y retournes parfois ? - La mémoire des hommes est ainsi faite. L’on se retourne toujours, le poète chante que nul ne guérit de son enfance. - Tu es malade alors ? - Non je ne le suis pas, la société peut-être. D’ailleurs vois-tu c’est bien la deuxième porte, celle du présent. Tu es bien jeune pour que je te montre ce qu’il y a derrière. - Tu as commencé à raconter alors tu dois aller jusqu’au bout. - C’est vrai, et puis tu t’en rendras compte tôt ou tard, comme Bernard Moitessier. - C’est qui Bernard Moitessier ? - C’est un homme qui devait être fêté comme un grand vainqueur. Il avait fait un grand tour du monde en solitaire, et alors que tous l’attendaient, il a renoncé à la gloire et il est parti, plus loin, sans s’arrêter pour vivre une vie plus simple. - Comme celle de monsieur Bebére ? - Un peu comme celle de monsieur Berbère qui plantait du géranium, Bernard Moitessier voulait que tous les hommes plantent des arbres fruitiers devant leur maison et en ville,
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pour qu’il y ait des fruits gratuits pour tout monde. - C’est une bonne idée, pourquoi personne ne le fait ? - Car les gens travaillent tous pour la troisième porte, et l’on devient très vite le passé pour les personnes du présent. Derrière la porte du présent, tout va très vite. Trop vite. Les grandes personnes aujourd’hui n’ont plus le temps. Il faut produire et gagner de l’argent pour être sûr que ce que l’on trouvera derrière la troisième porte sera agréable. Alors, il y a de la production, de la pollution, de la consommation, et beaucoup d’énergie, les hommes oublient qu’ils aimaient l’odeur du géranium, de la forêt, et les rires des enfants. - Les hommes m’oublient ? - Oui, les hommes oublient les enfants qu’il était. Le petit garçon eut un regard grave. - Alors, il y a quoi derrière la troisième porte ? - La troisième porte c’est celle de l’avenir… - On ne sait pas ce qu’il y a derrière alors ? - Il peut y avoir des merveilles. Par exemple dans le livre de Jean Giono qui souhaitait la politique des arbres, il y avait un homme qui plantait des arbres. Ainsi, il fit renaître la forêt, il créa un monde et de l’espoir dans le cœur des hommes. - C’était Bernard Moitessier ? - Non, c’était un homme imaginaire : Elzéard Bouffier. - Pourquoi les hommes inventent des hommes imaginaires pour planter des arbres ? - Peut-être, parce qu’ils veulent rendre heureux l’enfant qui était et vit encore en eux.
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- Alors, pour des petits garçons imaginaires ils créent des hommes imaginaires qui font pousser des arbres imaginaires ? - C’est à peu près ça. - Et qu’est-ce qu’ils y gagnent ? - Des rêves. Le petit garçon eut l’air songeur, et me demanda - Mais, les arbres c’est bien, ça existe vraiment, c’est eux qui nous aident à respirer, qui peuplent les forêts, et tous les enfants aiment la forêt. Quand il fait trop chaud, on monte dans les hauts. - C’est vrai tu as raison, mais dans le présent les hommes n’ont pas le temps, ils veulent faire des lois pour gagner de l’argent, avec les plantes et tout ce qui peuple la nature, pour la contrôler, la maîtriser, l’utiliser. - Mais c’est aussi ce que faisait monsieur Bebére, et ce que voulait faire Monsieur, non ? Non pas vraiment, ces hommes-là eux ne veulent plus que le Tizanere puisse cueillir lui-même les plantes, ils veulent dompter la nature et faire pousser les arbres dans des champs, d’arbre. Il appelle ça de l’agriculture. - Pourquoi ils font ça ? - À chaque fois ils disent que c’est pour le bien de tous, pour la réglementation. - Ils n’ont pas été des enfants ces hommes-là ? - Si, mais ils ont oublié, il ne passe jamais la porte du passé, ou lorsqu’il la passe c’est si triste, qu’il n’y retourne plus. - Et toi derrière ta porte du futur, il y a quoi ? Je pris une grande inspiration. Je n’avais parlé de ce projet à personne, mais je voulais rester fidèle à l’enfant que j’avais été. - Je veux vivre sur ma terre, et en harmonie avec elle, c’est un aveu. Les enfants sont trop jeunes pour comprendre
et les adultes ne comprennent plus les enfants, pas même ceux qu’ils ont un jour été, je veux également vivre en harmonie avec moi-même. - Que vas-tu faire ? - Planter des arbres ! - Toi aussi ? Des arbres imaginaires ? Ou tu vas demander à d’autres de le faire ? - Non, je vais les planter moi-même, je vais planter des arbres qui ont toujours servi les hommes, qui les soignent, qui les aident, et qui permettront à la nature de reprendre un peu ses droits. - Tu vas le faire pour moi ? - Non je vais le faire pour tous. Je pousserai la porte du futur, et chacun pourra y planter un arbre, lui donner un nom, et devenir son tuteur, celui qui lui permettra de grandir, en devenant son parrain. - Tu sais que je ne suis pas un vrai petit garçon ? - Oui, mais tu es bien curieux tout de même. Je vais le faire avec d’autres pour les enfants que nous étions pour être fidèles à nos rêves, pour tous les enfants à venir et ceux qui viendront après eux. - Je n’ai été qu’une excuse pour que tu racontes cette histoire ? - Non, les hommes se cherchent souvent beaucoup d’excuses pour ne rien faire, tu n’es pas né dans mon imaginaire, mais dans celui d’une amie, elle m’a demandé si elle pouvait parrainer le premier des arbres, et l’appeler Noé. - Tu as accepté ? - Oui, depuis que j’ai compris que Noé, c’était toi.
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La Tribu des Révoltés XR - Extinction Rébellion Parc de La Villette le dimanche 6 octobre 2019 et lors du déploiement le lundi 7 au cœur de Paris le groupe Extinction Rébellion a fait appel à des Médiactivistes. Nous avons photographié l’événement avec d’autres photographes indépendants. Nous aurions pu écrire un article sur la tribu de la Rébellion, mais les images parlent d’elles-mêmes. Nos images ne sont ni à prendre pour un soutien ni comme un désaveu. Nous soutenons tous les Français librement engagés dans ce mouvement, au titre de l’autodétermination politique de chacun, à titre individuel. Concernant la structure, le financement, les ramifications, et les interactions, public-privé ainsi que les interactions entre certains protagonistes et les forces de l’ordre, nous invoquons un devoir de réserve. Nous rappelons que ce mouvement est non violent et contre les dégradations. Qu’il se place en lanceur d’alerte. Qu’il est contre les attaques à la personne ! Nous avons été les témoins de l’événement et c’est à ce stade la seule posture que nous pouvons prendre. Si vous rejoignez ce mouvement ou un autre mouvement, nous vous invitons vivement à vous renseigner, et vous faire votre propre avis sur la question. Aucun média ne peut et ne doit se substituer à un avis construit sur la base de votre propre expérience. Ceci n’est donc pas la promotion du mouvement Extinction Rébellion.
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Ko c e i l a C h o u g a r D e l a t r i b u à l’ è r e d u d i g i ta l
Koceila Chougar
De la tribu à l’ère du digital La tribu survivra-t-elle à l’ère du digital et de l’ultra mondialisation ? Le mot tribu dérive du mot tribus qui appartient au latin. Plusieurs générations de femmes et d’hommes qui se considèrent, du fait qu’ils affirment descendre d’un ancêtre commun comme solidaire. Le terme « ethnie » désigne un ensemble linguistique, culturel et territorial d’une certaine taille, le terme de « tribu » étant généralement réservé à des groupes de plus faible dimension. Cet article prend la liberté d’agréger et se faire confronter plusieurs idées reçues et contenus informationnels. La notion de tribu est considérablement débattue chez les ethnologues : ceux-ci voient des différences entre la conception historique « la tribu avant l’État » et la conception contemporaine ; Les anthropologues établissent une succession en cinq stades de l’organisation socio-politique : famille, bande, tribu, chefferie puis État. • La famille : fondée sur le mariage ; • La bande : à faible effectif, sans direction politique formelle et sans spécialisation ; • Le clan : revendiquant un même ancêtre ; • La chefferie : centrée sur un chef, un roi, un prêtre, un prêtre-roi, ou sur une famille. • L’État : caractérisé, par gouvernement centralisé, souveraineté territoriale, corps administratif spécialisé, monopole de l’emploi légitime de la force. Tribu : groupe homogène et autonome au point de vue politique et social et occupant un territoire qui lui est propre... Une tribu est composée de groupes plus réduits, tels que des clans, et elle peut s’associer, temporairement ou en permanence, avec d’autres tribus pour former une confédération à des fins militaires ou religieuses, confédération qui ne possède presque jamais un système centralisé d’autorité politique ou judiciaire ». « Pour un petit groupe habitant une île du Pacifique, la tribu égale le groupe local ; ou, parmi les tribus amérindiennes, l’unité tribale peut coïncider avec le groupe politique », mais cela ne vaut pas pour des tribus plus larges, sans unité territoriale, politique, linguistique ou culturelle.
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La consanguinité est définie comme étant le résultat d’une reproduction sexuée entre deux individus apparentés, c’est-à-dire ayant un ancêtre commun proche. Pour un individu donné, elle est d’autant plus importante que le lien de parenté entre ses géniteurs est étroit. Ce concept d’abord empirique et approximatif a été précisé par la génétique avec la découverte des supports matériels de l’hérédité. L’endogamie géographique obligatoire d’un peuple isolé de faible effectif ne favorise pas le brassage génétique et la variation aléatoire des fréquences alléliques d’une génération à l’autre, appelée dérive génétique. La formation d’une nouvelle population à partir d’un faible nombre d’individus a pour effet d’augmenter la consanguinité dans la population et augmente le pourcentage d’homozygotie, ce qui la fragilise fortement. Les archéologues continuent à explorer le développement des tribus pré-étatiques. Les recherches montrent que les structures tribales ont un type d’adaptation selon les situations, qui explique qu’elles soient aujourd’hui toujours présentes et actives dans de nombreuses régions du monde. Ces peuples qui ont leur propre langage, leurs coutumes et leur culture, sont les plus vulnérables de la planète. Beaucoup sont nomades et vivent de chasse, de pêche et de cueillette, mais certains ont planté des cultures autour de leurs campements temporaires. Ils ont parfois vu leurs proches mourir d’épidémies ou victimes de massacres perpétrés par leurs envahisseurs. Constituées de chasseurs-cueilleurs, ces populations ne commercent pas ou presque pas ; elles sont habituées à se suffire à elles-mêmes. Plus généralement, le désir de contact n’est ni universel ni forcément réciproque. Les maladies exogènes représentent la première cause de décès pour les tribus isolées qui n’ont pas développé de défenses immunitaires contre les virus de la grippe, de la rougeole ou de la varicelle, comme l’ont fait la plupart des sociétés en contact avec le monde extérieur depuis des centaines d’années. Au Pérou, plus de la moitié de la tribu récemment contactée des Nahuas a été anéantie à la suite de l’exploration pétrolière de ses terres au début des années 1980. L’un des survivants de la tribu a raconté à un enquêteur de Survival que « la maladie est apparue lorsque les bûcherons ont pris contact avec nous alors que nous ne savions pas ce qu’était un rhume. La maladie nous a tués. La moitié des nôtres sont morts. Ma tante est morte, mon neveu est mort. La moitié de mon peuple est mort. »
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Des industries extractives empiètent sur les territoires des peuples isolés. Certains gisements de pétrole et de gaz les plus prometteurs du monde se trouvent en profondeur dans les forêts tropicales, là où vivent ces peuples isolés. L’extraction de ressources naturelles se traduit par de vastes clairières en forêt, des fouilles, des explosions, des constructions de sites d’atterrissage d’hélicoptères, de pipelines et de champs de pétrole. L’Amazonie est endommagée et polluée par l’extraction des ressources. Du mercure provenant de l’extraction de l’or est lavé dans les affluents du fleuve Amazone, ce qui contamine l’une des plus importantes réserves mondiales d’eau douce. Lorsque les industries ont pris ce qu’elles veulent, les peuples autochtones sont laissés à la contamination et aux dommages environnementaux de leurs terres et de la faune dont ils dépendent pour leur subsistance.
Certains jeux ont même été interdits aux moins de 16 ans jugés beaucoup trop aliénants et addictifs. Que ce soit en communauté, en tribu, dans la vie réelle ou sur le net, cette notion d’appartenance et de tribu ne laisse jamais indifférent. Plusieurs récits héroïques font part de ces aventures où plusieurs tribus collaborent ou se détruisent dans un but purement vital. Ces groupes n’ont qu’un seul objectif, maintenir la paix au sein du clan, le but primordial étant une volonté collective de préservation le mode de vie ou les coutumes. Nos instincts de protection et d’appartenance sont hautement stimulés sur nos chères plateformes de MMO RPG. Or, les peuples n’ont aucune idée de la taille du monde et de sa composition : on ne sait pas s’ils ressentent de la curiosité ou de l’enthousiasme face à des inconnus. Ils peuvent les craindre et percevoir un désir de contact comme une intrusion sur leur territoire de chasse et de cueillette. Dans l’imagination populaire, les tribus reflètent un mode de vie prétendument plus « naturel » en opposition à l’État moderne. Certains croient que les tribus sont organisées selon des liens de parenté, et ont une idéologie sociale basée sur la solidarité.
La forêt amazonienne est sacrifiée pour produire l’énergie verte pour le monde occidental. De grandes parties de la forêt amazonienne sont défrichées pour la production d’huile de palme et de soja pour alimenter les voitures et les centrales électriques d’Europe et d’Amérique du Nord. Par ailleurs la construction de barrages hydroélectriques conduit à la perte de forêt tropicale par les inondations des lacs de retenue. Les barrages détruisent les habitats de la faune aquatique Pour exemple, le peuple le plus isolé du monde se trouve sur déplaçant les peuples indigènes isolés de leurs terres et les îles Andaman endommageant leur environnement. Lors du tsunami de décembre 2004, la survie de ces tribus Ces tribus, composées d’individus, souvent liés de façon indigènes demeura un mystère. Il semblait inconcevable que génétique entre eux. La tribu est avant tout un groupe les insulaires de North Sentinel aient pu survivre dans leur d’individus liés par le sang. L’imaginaire, marqué par de île, située sur le passage du tsunami. Lorsqu’un hélicoptère violentes guerres tribales ou tribus rassemblées paisib- survola l’endroit, une Sentinelle se précipita sur la plage, lement autour du feu parlent de façon symbolique et intimant de son doigt pointé un message clair : « nous populaire. ne voulons pas de vous ici ». Les Sentinelles ne sont plus qu’environ 200, pense-t-on. Mais alors qu’en est-il de la tribu à l’ère du tout digitalisé ? Qu’en est-il du reste ADN ou de la filiation Le fait que leur langue soit très différente de celles des patriarcale ou matriarcale à l’ère du World Wild Web ? autres habitants des îles Andaman suggère qu’ils n’ont pas Ces tribus nous inspirent et nous font relativiser sur établi de contact avec d’autres peuples depuis plusieurs notre façon d’appréhender le monde et la Nature. milliers d’années. Ils sont capables de fabriquer des outils et des armes avec du métal récupéré sur les épaves de Pourtant jeux et simulations proposent sur internet bateaux échoués sur les récifs de leur île. Ils sont visiblement d’adhérer et faire prospérer une tribu que les joueurs en bonne santé, alertes et vigoureux, ce qui contraste peuvent rejoindre. Ce besoin, souvent inné, peut se fortement avec les deux autres peuples Andaman ayant été transformer de manière déraisonnable en addiction de au contact de la civilisation mondiale, comme les Onge et les gaming. Ces besoins assouvis de manière digitale Grands Andamanais dont la population est passée d’environ cachent bien souvent plusieurs dérèglements sociaux. 5 000 lors de la conquête britannique de l’Inde, à 53 de nos Des mondes majestueux aux grottes les plus profondes, jours et qui sont largement dépendants des aides de l’État les personnages virtuels s’envolent et explorent ces pour assurer leur survie. Les Sentinelles continuent de mondes inconnus. Qu’en est-il de la Nature réelle ? Les rejeter tout contact avec l’extérieur et tirent des flèches « gamers » y sont-ils aussi sensibles ? sur quiconque s’approche de leur territoire.
Une photo prise depuis un hélicoptère par un garde-côte indien, lors du tsunami de 2004, montre un membre du peuple Sentinelle en train de le viser avec son arc. - Survival International - Indian coast Guard - AFP
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Les Voeux 2020 De l´Unité Nationale
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L a t r i b u d e s n a n t i s Lu s u r l e s r é s e au x
La tribu des nantis Lu sur les réseaux
Mon dernier cadeau de Noël, garanti par un surcoût de livraison via Chronopost, devait m‘être délivré ce matin.
Confirmation de livraison par mail à 9h, mon colis devait arriver entre 10h et 12h... Je ne bouge pas de chez-moi... 12h30, n‘ayant pas de nouvelles, pas d‘avis de passage, je consulte mon service client en ligne : votre colis est livré EN LIEU SUR ! J‘appelle la plateforme : 20 minutes de dialogue de sourds pour n‘avoir ni précision, ni compassion de l‘opératrice qui met en doute ma parole. Son responsable refuse de prendre l‘appel (comme quoi, être responsable chez Chronopost doit consister à faire les plannings et se laver les mains des vrais clients mécontents que les pauvres opérateurs doivent gérer...). Au passage je me pose aussi la question du sens que l‘on peut trouver dans un service „assistance clients“ quand la seule initiative consiste à lire les informations que vous avez à l‘écran devant vous et qu‘on ne peut ni entrer en contact avec le livreur ni donner les coordonnées de la plateforme responsable de ce cirque. Bref, impossible d‘avoir des précisions sur le „lieu sûr“ où se trouve mon colis. Contact, final et duquel je n‘attends rien, avec ma boutique en ligne : On se renseigne et revient vers vous dans 48h...
Nous vivons dans un pays où le sens de la responsabilité ou de l‘empathie n‘existe plus. L‘individualisme est roi et le manque de professionnalisme ne trouvent aucun écho dans le management d‘individus qui peuvent s‘exempter de faire leur travail en toute impunité... à tous les échelons. Il faut dire que ce n‘est pas la première fois que ce type de mésaventure m‘arrive avec eux... Et que je crois savoir que je ne suis pas la seule à subir dans cette zone géographique. #Chronopost Ce propos public est signé Laurence Taillade Lu sur Linkedin
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P os i t i f pa s P r i m i t i f
Positif pas Primitif La Tribu de ceux qui s´engagent
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P os i t i f pa s P r i m i t i f
Angel Prieto Photographie Carole Vilbois
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P os i t i f pa s P r i m i t i f
Audrey Tcherkoff ( Présidente Exécutive de l´institut de l´économie positive ) et Jacques Attali ( Président de Positive Planet et président du conseil de surveillance de l´institut de l´économie positive ) Paris le 3 décembre 2019 au Global Positive Forum, pour sa troisiéme édition ( Photographie : Carole Vilbois)
Dès l’ouverture du troisième Global Positive Forum qui se tenait au Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères le 3 décembre 2019, on peut percevoir une orientation qui au fil du temps témoigne du travail fait et pour connaitre l’intégralité de l’action nous vous invitons à visiter le site www.institut-economiepositive.com. Nous avons eu la chance d’assister aux trois Forums aussi nous pouvons parler d’essence même du travail de ceux qui depuis des années mettent tout en action pour sensibiliser le monde à une évolution prévisible et au changement qui devraient être opérés d’après eux.
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Entouré d’une équipe jeune et performante aux commandes de l’évènement on retrouve Audrey Tcherkoff. Un peu discret, un homme que tout le monde connait se tient non loin, Jacques Attali. Depuis des années avec passion et conviction, l’orientation de l’humanité, du monde anime Jacques Attali, et ce forum, ces rencontres, entre acteurs de la société civile, classe politique et gestionnaires de grand groupe, c’est un peu la soupe primordiale qui donne vie à une version épurée, mais pleine de fondement de ce troisième Forum.
P os i t i f pa s P r i m i t i f
Gabriel Attal, Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse, à propos de l’engagement nous proposera une lecture allant dans ce sens : l’activisme est plus efficace sur le long terme, il évolue dans ses formes, il cherche à être efficace à tout prix, la question de l’impact est importante. « Il y a des synergies autour de l’intérêt général », il nous parle également de l’utilité de l’engagement des entreprises pour l’innovation sociale. Et à propos du bénévolat : le bas du CV devient le haut du CV. Lamya Essemlali, Présidente de l’association Sea Shepherd France nous dit : « Rien de plus déprimant que de voir le monde qui tombe et se sentir impuissant ». Il faut pour elle : faire ce que l’on sait faire de mieux au-delà des choses qui nous dépassent. Elle nous raconte qu’on lui a posé la question : Es-tu prête à risquer ta vie pour sauver une Baleine ? Ce n’est pas la croisière s’amuse ajoute-t-elle, ça va du Trader au Vegan Tatoué. Geoffroy Roux de Bézieux, Président du Medef : « Aujourd’hui on ne peut plus faire croître une entreprise sans s’engager au sens large ». Laura Bellois, Présidente, Visage de jeunes : « La jeune génération est engagée » nous dit-elle, elle doit mettre en avant ses engagements, partager son expérience, parler des projets concrets et communs. Maud Fontenoy, navigatrice, Présidente, Maud Fontenoy Fondation nous l’affirme : « Le continent de déchets est le stigmate de notre société ». L’urgence n’est pas déconnectée de nos quotidiens, devant l’urgence, l’extinction des espèces, elle fait le parallèle entre une immense bibliothèque de livres, et dont chaque livre brule dès qu’on tente de le prendre. Pour nous donner un exemple concret, elle prend l’exemple de la peau de requin, qui permet grâce au savoir que nous en tirons de produire des revêtements qui empêchent le dépôt des bactéries. Cynthia Fleury, philosophe, Psychanalyste : dorénavant ils ne veulent plus travailler avec des entreprises qui ne prennent pas la COP au sérieux. « Nous voulons préserver l’humanisme de l’homme ». �n pourra y voir des politiques de premier plan, des prix Nobel de la Paix, et beaucoup de Isabelle Kocher, Directrice générale Engie : « De plus en plus personnes qui ont fort à gagner à s’écouter, et à de gens se sentent exclus », les étudiants nous rappelle-t-elle nous disent : Attention à la fin du monde ! le samedi on entend : apprendre les uns des autres. Attention aux fins de mois ! Nous ne pourrons revenir sur l’ensemble des échanges tant ses derniers ont été riches, mais Makoma Lekalakala, Directrice, Earthlife Africa : « ça nous concerne tous, on ne peut pas le faire seul ! L’impact négatif nous voici quelques morceaux choisis. oblige à agir aujourd’hui ! Pas d’accès à l’eau, à la nourriture, les Antoine Frérot, Président-Directeur Général, effets négatifs du changement climatique se font sentir ». « Veolia revient sur la question l’humilité, nous chaque génération doit relever des Challenges ». parle des différentes formes d’engagement, des différents ressorts, de leur impact, de ce qui se Vasco Cordeiro, Président de la Région autonome des Açores, Portugal : « L’éducation est la clé du problème, le système social mérite et ne se déclare pas. est déterminant. » « Si vous avez des personnes engagées pour
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changer la vie, il faut une transparence totale. », « Les personnes doivent savoir pourquoi vous décidez quelque chose, même si c’est impopulaire » vous avez besoin de temps ? En avez-vous ? Vous devez le prendre pour expliquer ! La possibilité de l’engagement dépend de ceci nous confie-t-il. Christophe Itier, Haut-Commissaire à l’Économie sociale et solidaire et à l’innovation sociale, ministère de la Transition écologique et solidaire : « Ce siècle est celui de la coalition, le dernier était celui de la production. » Il nous parlera également des 10 % nécessaire d’opinion publique favorable pour opérer une bascule, ce qui n’est
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pas sans rappeler les théories plus minimalistes des militants d’Extinction Rébellion. Aurélien Barrau, Professeur, Université Grenoble-Alpes à propos de la dévastation il nous rappelle que 60 % des animaux sauvages ont disparu de la planète, nous renvoie vers la « Folie humaine ». « Cela n’a rien à voir avec le réchauffement climatique, avec un bulldozer solaire on peut détruire la forêt amazonienne » Dominique Louis, Président, Assystem nous remémore : « Il faudra faire vivre 12 milliards d’individus ! » Hugo Viel, secrétaire général, Climats, proclame « On
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n’acceptera pas qu’on nous parle des Rhinocéros comme on nous a parlé des Dinosaures ! » Shirin Ebadi, prix Nobel de la paix (2003) nous parle en ces termes : J’aime la France, car sa culture est basée sur la démocratie. Elle nous parlera également de l’interdépendance des pays, et de nos coresponsabilités, tout en revenant sur son histoire, et sur l’oppression qui pèse sur les habitants de son pays. Elle nous parlera de l’effet des sanctions économiques, pas toujours mesurables, et de l’action de l’Europe qui tenta avec la France de venir en aide au peuple iranien. David Syed, Partner Dentons nous parlera de repenser
le modèle des pays émergeant en nous rappelant que « Nous sommes les pays riches ». Cynthia Fleury, Philosophe, Psychanalyste nous rappellera que les 10 % de pays les plus riches au monde sont responsables de la moitié des émissions de CO2. Isabelle Kocher, Directrice générale Engie, nous affirme : nous devons nous poser la question de la raison d’être des entreprises que nous dirigeons. Ainsi au milieu d’interventions toutes plus touchantes les unes que les autres, on sent la parfaite sincérité du propos de chacun, souder par l’expérience des prenants part. Le temps est à l’urgence et au faire. Une volonté d’avancer dans la même direction.
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Jacques Attali a questionné Monsieur Pech notament sur les méthodes concernant le tirage au sort des citoyens prenant part à la convention Citoyenne pour le climat.
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Thierry Pech Directeur général de Terra Nova co-président comité de gouvernance de la Convention Citoyenne pour le climat
Image : Convention Citoyenne pour le climat Photographie: Carole Vilbois
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L’Unité Nationale présente a signé le « Manifeste des 12 engagements pour accélérer la révolution positive au service des générations futures », vous pouvez le consulter sur le site à l’adresse suivante : www.institut-economiepositive.com/ L’après-midi il fut question de l’indice de positivité, qui fut rendu public par Audrey Tcherkoff en personne. Un tour de table, très nourri en présence d’Anne Hidalgo la maire de Paris et d’autres acteurs, dont le président de la région Réunion Didier Robert qui rappela que son île était un bon exemple en matière de protection de l’environnement puisque 70 % de cette dernière était composée d’un parc naturel. L’intervenant suivant rappelant lui que l’index de positivité passait aussi par le bien-être des populations. Jacques Attali plaisantera sur son implication personnelle, afin de se rendre à la Réunion dans le cas où Monsieur Robert envisageait d’effectuer un audit. Dans une ambiance studieuse, mais chaleureuse, chacun apporta sa pierre à la réflexion, Audrey Tcherkoff très sollicitée se prêta en fin de journée volontiers avec beaucoup de délicatesse aux photos avec les jeunes participants, où chacun était fier de poser avec le manifeste, véritablement engagement, pour une société plus digne, plus responsable. Ainsi se clôtura, avec des perspectives d’avenir meilleur ce forum tourné vers la planète.
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Antoine Fontaine
La tribu des « uns confiants »
En ces temps où plus personne n’a confiance est sans doute la tribu constituée du plus grand nombre de personnes. La tribu c’était cette cellule de proximité dans laquelle la confiance régissait normalement les rapports des individus au sein d’un groupe plus ou moins grand et plus ou moins fermé. La confiance est cette force à la fois discrète, autant que mystérieuse. Elle est ce signe de foi dans l’avenir. La confiance est cet ingrédient nécessaire à toute vie sociale, à toute tribu quelque soit sa taille. Quand la confiance irrigue une tribu, ou tout type de communauté, celles-ci sont préservées des tourments.
ou peu importe le nom que l’on donne à toute forme de vie sociale.
Le sociologue allemand, Georg Simmel qui fut l’un des premiers à avoir consacré ses travaux à la confiance écrivait en 1900 : « Sans la confiance des hommes les uns envers les autres, la société tout entière se disloquerait ». Selon les travaux les plus aboutis sur le sujet, sans confiance, les individus ne confieraient Depuis la nuit des temps, la confiance inonde pas leur argent aux banques ni leur destin l’humanité. Elle est le cœur même de la tribu, politique à des élus. Sans confiance, ils ne se dirigeraient pas vers des juges pour obtenir justice, ils ne mettraient pas leur vie entre
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ses avoirs à la banque, à laisser le destin commun aux mains des élus, à confier ses injustices à la justice, ou à mettre sa vie entre les mains de prescripteurs de „big pharma“.
les mains de médecin pour conserver une bonne santé. Et c’est exactement ainsi, tout ceci se passe comme cela, car la confiance est là, pour tout le monde ou presque, dans ces parties du monde qui se pensent civilisées. La moindre petite place au doute ferait, au contraire, l’effet d’un cancer qui ronge chacune des cellules, doucement, mais sûrement. Il suffit de se lancer dans une campagne électorale pour se rendre compte à quel point en politique la confiance n’est nulle part et la méfiance partout. Évoquez les élections, et vous verrez le mot confiance poindre à chaque bout de phrase, pour finir par constater que personne n’a confiance en personne ni en rien. Et pourtant, chacun continue à déposer
« Et vous, présentez-vous. En vous, vous avez confiance ? » À cette question, la réponse ne fuse pas spontanément. Parfois, le silence est pesant. Beaucoup en arrivent à douter d’eux-mêmes, pourraient-ils être tout autant des bonimenteurs ou de fieffés « voleurs », comme les élus qu’ils dénoncent. Et si au fond, nos élus étaient représentatifs de la population ? Que vous vous présentiez pour la première fois, vous n’êtes pas plus épargnés. Finir voleur et menteur quand on est élu, c’est la norme. Les gens doutent de tout. Ils doutent de leur pouvoir. D’ailleurs ils sont nombreux à penser qu’ils n’ont pas de pouvoir. Cependant, la dislocation annoncée de nos sociétés ne vient pas. C’est donc que nous vivons dans une tribu qu’elle soit insulaire, nationale ou planétaire qui arrive à avancer sans confiance.
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Pourquoi ce système fonctionne-t-il « si bien » ? Parce que nous cédons à la violence. La plupart des politiques prétendent vouloir se mettre au service de leur prochain. Mais, ils ne sont en réalité animés que par une volonté de domination. Toute autorité qui nous est imposée par la force doit être combattue. L’esclavage encore et toujours. Ici à La Réunion, il est facile de voir aujourd’hui que la force et la violence ne sont pas toujours du côté où l’on croit. La violence institutionnalisée en filigrane, celle qui prétend s’appuyer sur la volonté du plus grand nombre devenu gâteux, non sous l’action du « zamal », mais sous l’intoxication des médias et des automatismes culturels. « C’est ainsi » disent les gens. Les élus en place savent manier du chantage, tantôt à l’emploi, tantôt au logement, tantôt au compteur d’eau, tantôt pour une salle, tantôt pour une inscription à l’école, tantôt, tantôt… et cela sans aucune limite. Cela souvent sur plusieurs générations, lorsque ces élus sont en place depuis des décennies, comme c’est souvent le cas dans la colonie de La Réunion. Cette violence des « justes », de ces sachants, de ces bien-pensants, de ces dirigeants, ceux-là même qui envoyèrent le Christ en croix, solidement attachés à leur temple, leurs décorations et leurs marchandises, la violence qui s’ignore ou se croit justifier est toutefois il faut le dire FONDAMENTALEMENT contraire à l’espèce humaine. Pourquoi ce système fonctionne-t-il « si bien » ? Parce que nous manquons de confiance. Parce qu’aucune vison d’ensemble de la situation n’est venue chez les contradicteurs proposer une perspective claire de résolution des problèmes ; parce que la nature même de la société réunionnaise, héritage de la colonisation, ne permet pas les replis culturels et collectifs qui auraient permis de n’être pas contaminé ni usé par le consumérisme ; parce que la nature même de cette colonisation avec la formation de cette élite de représentation sans fonction permet qu’on fasse aujourd’hui encore l’impasse d’une production entière au bénéfice d’opérations plus rentables de dépendance. Ce qu’il y a de parfait dans ce système, c’est avant tout qu’il fonctionne. La perfection de ce système a ceci d’encore plus parfait qu’il se renforce de lui-même. Le système devient autonome, en dehors de toute volonté de ceux qui y gagnent et ceux, toujours plus nombreux, qui y perdent. Une telle organisation socio-économique est un idéal que toutes les personnes aujourd’hui à la tête de ce monde reproduisent. Une tribu idéale, celle des « uns confiants ». La nôtre. Nous sommes alors à ce moment de mutation où nous assistons à la disparition du monde connu.
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L’irrémédiable semble alors se réaliser sous nos yeux. Le Titanic est en train de couler, le bétail humain en fond de cale meurt noyé et plus haut dans les étages, ils dansent de plus en plus à mesure que l’on monte dans cette hiérarchie de la domination. Tel est l’implacable constat de notre société. Les grands patrons des multinationales sont pris pour de grands hommes, tandis qu’ils se font des milliards sur le dos des enfants. Nos héros modernes se révèlent souvent des imposteurs. Notre classe politique s’assure elle des places au soleil jusqu’à la fin de ses jours et préfère étaler leur vie privée plutôt que de faire de la Politique. Notre époque est au fond un vaste canular où l’on se spamme mutuellement de baratins déguisés en savoir, tandis les réseaux sociaux altèrent la notion d’intimité. Une époque faillie qui finira aux rebus. Si la situation est ainsi usante, et elle l’est, si nous sommes liés à ce monocolonialisme consumériste, et nous le sommes, il ne s’agit pas d’en dresser le constat pour en conclure à la fin de tout. « C’est comme ça ». Non, ça ne peut être qu’ainsi. Ça ne peut l’être tout le temps. Ce n’est pas normal. D’abord, parce que les peuples, ici comme ailleurs, n’ont jamais cessé de se battre contre cette folle « logique » historique. Ensuite, , parce que des poches de résistances subsistent, tout le monde n’est pas résigné et que le virus peut encore se répandre. Mais, l’objet du présent texte est aussi de mettre en garde contre tout triomphalisme d’un hypothétique grand soir, car le réel se corrode et s’élime chaque jour davantage. Car, il faut bien commencer quelque part, l’avenir en ce début de 21iéme siècle est au petit.. Le temps du micro est en route. Là où nous avons encore une capacité d’agir. Prendre l’existant pour le transformer en quelque chose plus porteur d’espoir. Les plus petits dénominateurs communs, ceux qui nous unissent à l’échelle de la plus petite et la plus ancienne institution organisée qu’est la commune, c’est une direction. Travailler à satisfaire les besoins fondamentaux d’un territoire communal, c’est l’ambition. À l’approche des élections municipales, nous avons le choix, pour que cette si grande tribu des « uns confiants » devienne celle des confiants, cette denrée trop rare.
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