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Le futur sera Art déco ou ne sera pas

Ci-dessus, l’immeuble d’en face, vue de l’intérieur, propose le même vocabulaire propre à l’Art déco casablancais. On retiendra ce délicat panneau de zellij à la polychromie flamboyante. Page de droite, zoom sur le sol en granito jaune, rouge et terre de Sienne, serti de petits carreaux bleus, blancs et noirs.

En exaltant la modernité classique de cet appartement typique du centre-ville, Mohammed Lahlou Kitane s’inscrit dans cette démarche de réconciliation esthétique que nous appelons de nos vœux.

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Ci-contre et page de droite, vues du double salon. Canapé Cassina, chaises Eames, table et buffet de style scandinave, miroir de bistrot. La frise du plafond a été soigneusement décapée. Chinée localement, la suspension en laiton a été customisée par l’architecte-designer.

L’appartement est un bien familial. Autrement, seraitil venu à l’esprit de Mohammed Lahlou Kitane de s’établir dans ce 180m 2 , sis au premier étage de l’immeuble îlot du passage Tazi ? Peut-être bien que oui, se dit ce jeune architecte et designer qui affirme sa volonté d’inscrire son expression contemporaine dans la tradition architecturale et ornementale de sa ville natale. Donnant sur la place du 16-Novembre d’un côté, sur le boulevard de Paris de l’autre, ce vaste ensemble – livré, au milieu des années 1930, par les frères Pertuzzio à leur promoteur le pacha Tazi – représente, incontestablement, un des plus ambitieux et des plus aboutis fleurons de cet Art déco casablancais dont on vous vante tant – et avec raison – l’originalité.

3,75 m de hauteur de plafond Dès l’entrée, nous sommes impressionnés par l’ampleur du couloir distribuant l’appartement : 2 m de large sur 6 m de long, sous 3,75 m de hauteur de plafond. A droite,

Six mois de chantier ont été nécessaires pour redonner son lustre d’antan à ce logement jadis très bourgeois.

Pages précédentes, détails de l’escalier de l’immeuble, avec la cage d’ascenseur, les paliers et la porte d’entrée de l’appartement.

La richesse des matériaux admirablement ouvragés (marbre de Carrare, fer forgé et bois massif) nous laisse pantois. Page de droite, vue du couloir. A noter les embrasures et les plinthes en marbre noir, judicieuse intervention du maître de céans.

le double salon avec ses deux doubles portes ont perdu leurs vantaux pour une plus belle perspective et une meilleure circulation. Leurs embrasures ont été élégamment soulignées de marbre noir. Le même marbre noir d’Agadir ayant remplacé les plinthes originelles et composant le matériau dominant de la cuisine et des salles de bain entièrement repensées. La salle de bain des invités a été gagnée sur l’ex-office précédent la cuisine. Deux belles chambres à coucher, plus une pièce-bureau – peut-être un ancien dressing? – parachèvent l’appartement.

design fifties, tendance scandinave Six mois de chantier ont été nécessaires pour redonner son lustre d’antan à ce logement jadis très bourgeois. De longues semaines ont été consacrées au ponçage du sol en granito dont le calepinage en tapis déploie une palette d’ocres allant du jaune moutarde au terre de Sienne en passant par un rouge antique. Les murs ont été simplement reblanchis, mais une attention particulière a été portée aux moulures du plafond, délicatement décapées. Le mobilier traduit le parti pris du maître de céans : un goût prononcé pour le design fifties, tendance scandinave. Ici et là, des exceptions confirment la règle: tels luminaires ou fauteuils

De gauche à droite, vues partielles de la chambre d’invités sobrement décorée, puis de la salle de bain. Entièrement recouverte de marbre noir d’Agadir, elle a été intelligemment repensée dans un esprit années trente.

seventies, ou encore ce beau miroir de bistrot certifié made in Casablanca –comme nombre d’autres objets chinés et amoureusement restaurés par l’architecte-designer. Comble de snobisme, les chaises signées Charles Eames côtoient, en toute égalité, une collection d’acryliques sur papier, dues à un artiste peintre marocain non identifié. Après des études d’architecture à Paris-Malaquais, Mohammed Lahlou Kitane a exercé quelques années dans un cabinet parisien avant de s’installer, à son compte, à Casablanca. Parmi ses nombreux projets actuels, un chantier a retenu notre attention: celui de l’aménagement d’une brasserie au style néo-casablancais affirmé. Espérons que cette démarche, très dans l’air du temps, soit suivie par bien d’autres, avec autant de talent et de conviction. w

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