1640 formation continue

Page 1

CDF-1640-CahierFC-Couv_GAB ACTUALITE 13/11/14 10:34 Page1

édité par la

CAHIERS

du

FORMATION CONTINUE

CDF

Les

La sélection 2014 À DÉCOUVRIR ! Médecine buccale ~ Odontologie pédiatrique ~ Odontologie conservatrice ~ Endodontie ~ Prothèse ~ Orthodontie ~ Cas clinique ~ Odontologie gériatrique

ÉDITION

2014


CDF-1640-CahierFC-p01_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:34 Page1

Le Chirurgien-Dentiste de France no 1640 du 20 novembre 2014

Préambule FORMATION CONTINUE

Numéro spécial Formation Continue Notre exercice professionnel a évolué considérablement ces trente dernières années. Nous sommes tous amenés à nous adapter à ce changement, qui coïncide avec des aspirations et des demandes nouvelles des patients demandeurs de soins performants.

Ainsi, cette année comme les précédentes, un jury issu du comité de lecture du CDF a sélectionné 12 articles parmi ceux parus depuis 2012. Pour effectuer son choix, ce jury s’est attaché aux critères suivants : originalité de l’article, intérêt en odontologie, intérêt du cas clinique.

Le DPC permet aujourd’hui aux praticiens de s’informer, de se recycler et de lire plus fréquemment des revues scientifiques, dans le cadre d’une formation continue de qualité.

Nous avons retenu 4 articles par année (2012, 2013 et 2014), qui ont été regroupés par thème dans ce cahier spécial : médecine buccale, odontologie pédiatrique, odontologie conservatrice, endodontie, prothèse, orthodontie, cas clinique, odontologie gériatrique.

Le Chirurgien-Dentiste de France, magazine professionnel syndical hebdomadaire, comporte une rubrique consacrée à la formation continue. À chaque parution, un article scientifique est publié, soit près de 30 fois par an. Depuis 8 ans, nous réalisons un numéro spécial hors série, constitué d’articles parus au cours des trois dernières années.

Bonne lecture

DANIEL NEBOT MCU-PH (Paris Descartes) Responsable scientifique du CDF

1


CDF-1640-CahierFC-p02-03_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 15:10 Page2

Le Chirurgien Dentiste de France no 1640 du 20 novembre 2014

MÉDECINE BUCCALE

Détermination des limitations de l’aptitude des militaires pour causes bucco-dentaires

5

Les malades immunodéprimés en odontologie

13

Les tonsillolithes : souvent méconnus et pourtant si fréquents

21

ODONTOLOGIE PÉDIATRIQUE

Pulpotomie après trauma

27

ODONTOLOGIE CONSERVATRICE

L’éclaircissement interne : utilisation ambulatoire d’un gel pour le traitement des dents dépulpées

33

Interface tissus dentaires/matériaux adhésifs : problématique

2

39


CDF-1640-CahierFC-p02-03_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 15:10 Page3

Sommaire FORMATION CONTINUE

ENDODONTIE

Fracture des instruments endodontiques : éléments de compréhension

45

PROTHÈSE

Endocouronnes et CFAO directe

53

À propos d’un cas de réalisation d’une prothèse complète immédiate

59

ORTHODONTIE

Solution simple à cas complexe : apport de l’égression orthodontique

65

CAS CLINIQUE

Réhabilitation esthétique d’un sourire atteint de fluorose grave

69

ODONTOLOGIE GÉRIATRIQUE

Vieillissement et odontologie : aspects épidémiologiques

75 3


CDF-1640-CahierFC-p05-10_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:32 Page5

MÉDECINE BUCCALE

Formation continue Article publié dans le CDF n° 1543 du 4 octobre 2012

Bertrand FENISTEIN CMA de Poitiers Saint-Maixent

Claire BOUGOURD Régiment d’infanterie de Sarrebourg

Géraldine POULAIN Service d’odontologie militaire de Cayenne

Christian GERBIER HIA Legouest (Metz)

Magalie BROCHARD HIA Legouest (Metz)

Vincent LE VAN Secteur dentaire interarmé de Mourmelon

Laurence LE VAN Secteur dentaire interarmé de Mourmelon

Bruno PENIGUEL HIA Begin (Saint-Mandé)

Détermination des limitations de l’aptitude des militaires pour causes bucco-dentaires L’aptitude médicale aux statuts et missions militaires est une véritable expertise tant au niveau de ses buts que de ses moyens. Les chirurgiens-dentistes civils ne peuvent en aucun cas être sollicités dans la démarche de détermination de l’aptitude des militaires. Néanmoins, ils peuvent être sollicités par des personnels, non pour déterminer, participer à déterminer ou contester une aptitude, mais pour réaliser des actes thérapeutiques. Même si des civils ne peuvent être experts dans ce cadre, il est utile qu’ils puissent appréhender la logique de cette détermination, afin que les soins dispensés s’adaptent au contexte particulier des missions militaires.

Il apparaît que le monde militaire, malgré ses efforts de communication, reste souvent peu connu de nos compatriotes. Les chirurgiens-dentistes n’échappent pas à la règle. Beaucoup n’ont pas fait leur service national actif et, pour ceux qui l’ont fait, les dogmes d’hier ne sont plus ceux d’aujourd’hui. De 400 chirurgiensdentistes aspirants de réserve, on est passé à environ 50 chirurgiens-dentistes d’active. Les missions ont changé, les contextes militaires, économiques, politiques également. Il est important de noter Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

5


CDF-1640-CahierFC-p05-10_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:32 Page6

Formation continue

que les militaires restent des ayants-droit obligés du service de santé des armées pour tout ce qui touche à la détermination des aptitudes. Ils n’ont pas, dans ce cadre, le choix de leur praticien qui ne peut être qu’un praticien des armées. Dans la mesure où l’avis du chirurgiendentiste civil ne sera jamais sollicité dans le cadre des aptitudes, quel intérêt peut avoir ce dernier à connaître, même superficiellement, les normes et la procédure militaires ? Compte tenu du faible nombre des praticiens militaires et de l’étendue des missions de ces derniers, il n’est pas rare que les militaires aient recours à des praticiens de ville tant pour leurs soins médicaux que dentaires. Autant alors que la stratégie thérapeutique utilisée réponde d’emblée au cahier des charges militaires.

Détermination des aptitudes : une expertise strictement réservée aux praticiens des armées Toutes les unités ont besoin de personnels prêts à servir. Or on constate que, lors des missions, une importante part des soins dispensés concerne les pathologies bucco-dentaires. Celles-ci sont à l’origine d’un détournement d’efficacité au détriment de la mission des armées. Nombre de ces problèmes peuvent être prévenus par une préparation efficace visant à restaurer un état de santé buccodentaire et un pronostic compatibles avec les conditions de la mission. Ceci sousentend, pour les praticiens militaires, médecins et chirurgiens-dentistes, en charge de la détermination des aptitudes, une culture générale large des pathologies bucco-dentaires et de leurs possibilités d’évolution. Mais une bonne connaissance des textes réglementaires, les conditions sur le terrain, les plateaux techniques déployés sur les théâtres d’opérations, les possibilités de transport, sont nécessaires. 6

Le chirurgien-dentiste des armées synthétise, dans son domaine de compétences, tous ces paramètres pour répondre aux questions du commandement et donc jouer son rôle de conseiller. L’aptitude médicale aux différents statuts et missions militaires ne peut être déterminée que par des praticiens militaires. C’est une véritable expertise tant au niveau de ses buts que de ses moyens. C’est une autorité habilitée qui pose une ou des questions à un expert désigné par elle qui répond, après examen, à ces questions dans le respect du secret professionnel. Une fois les conclusions médicales rendues, l’autorité reste libre de ses décisions. De même, le praticien des armées, médecin ou chirurgien-dentiste, dans le principe de l’indépendance des praticiens, reste libre de fonder son avis sur les impressions retenues d’après son examen, l’analyse des pièces dont il dispose et de son expérience médicale et militaire. Il ne doit pas oublier que, dans son rôle de conseiller du commandement, ses conclusions doivent intégrer des éléments de prédictivité. Il a toutefois à sa disposition des aides sous forme d’instructions ou de circulaires ministérielles notamment.

Le profil médical (1) Le profil médical de chaque personnel militaire est défini par sept sigles auxquels peut être attribué un certain nombre de coefficients. Ces sigles permettent de transposer les évaluations et observations effectuées par le médecin des armées, lors de la visite médicale en niveaux qui facilitent la détermination de l’aptitude de chaque militaire, vis-à-vis du poste auquel il est ou peut être employé. L’éventail de ces coefficients couvre les différents degrés allant de la normalité, autorisant une aptitude sans restriction, jusqu’à l’affection grave ou l’impotence fonctionnelle majeure, entraînant une inaptitude totale.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

Les sept sigles sont les suivants : S : ceinture scapulaire et membres supérieurs I : ceinture pelvienne et membres inférieurs G : état général Y : yeux et vision (sens chromatique exclu) C : sens chromatique O : oreilles et audition P : état psychique Pour chaque statut et emploi, il existe un SIGYCOP minimal. Il est donc important de noter que ce ne sont pas les praticiens qui fixent les normes ou les conditions nécessaires mais bien le commandement de chaque armée. À l’incorporation, il est bien évident que le bilan initial revêt une importance médicolégale primordiale et qu’il doit être apprécié intrinsèquement. En cours de carrière, au contraire, l’aptitude doit être comprise en fonction des contraintes de l’emploi, de l’expérience professionnelle, des possibilités de compensation du déficit ou du handicap et du statut de l’intéressé. Nonobstant, le commandement peut déroger aux règles qu’il a lui-même édictées en attribuant des « dérogations » qui ne sont pas des décisions médicales mais bien des décisions de commandement. Le chirurgien-dentiste des armées va donc participer à cette démarche et peut être amené à s’intéresser au SIGYCOP par l’intermédiaire du sigle G de l’état général. En effet, il est précisé que « toute affection localisée ou non, fut-elle localisée et par conséquent déjà cotée dans d’autres sigles, peut également influer sur le coefficient attribué au sigle G, dès lors qu’elle est susceptible de retentir sur l’organisme dans son ensemble, par des complications ou une diminution de la résistance et de l’activité du sujet ». L’indice T pour temporaire peut s’employer pour tous les sigles sauf C et P, pour indiquer l’existence d’une pathologie susceptible de guérir ou d’évoluer favorablement, ou s’il existe un doute sur la réalité des symptômes fonc-


CDF-1640-CahierFC-p05-10_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:32 Page7

Formation continue

tionnels à manifestations essentiellement subjectives. De même, le praticien des armées va calculer le coefficient de mastication (CM) en attribuant une valeur à chaque dent : Valeur numérique (coefficient de mastication) : Incisives centrales supérieures ..........2 Incisives centrales inférieures ............1 Incisives latérales supérieures ou inférieures) ................1 Canines (supérieures ou inférieures) ..4 Prémolaires ....................................3 Molaires.........................................5 Dents de sagesse supérieures ...........2 Dents de sagesse inférieures.............3 La valeur maximale attribuée à chaque dent correspond à une dent saine ayant un engrènement normal avec sa dent antagoniste. Le calcul se réalise en additionnant la valeur attribuée à chaque dent. Un engrènement normal vaut pour 100 %. La valeur de la dent peut être diminuée si elle se trouve altérée ou en malocclusion vis-à-vis de son antagoniste. En cas d’absence d’une dent, on ne compte pas sa valeur propre ni celle de son antagoniste. Les prothèses fixées et amovibles permettent de réattribuer partiellement ou totalement la valeur aux dents qu’elles remplacent.

Contrôle de l’aptitude L’aptitude à servir est déterminée à l’engagement durant les étapes de l’incorporation puis au moins une fois par an lors de la visite systématique annuelle (VSA) (2). Lors de cette visite médicale, le médecin des armées s’attache à déterminer : • l’aptitude générale au service, • l’aptitude à l’emploi tenu ou postulé qui peut être le service à la mer (SAM), les opérations extérieures (OPEX), outremer (OM), mais aussi un concours et/ou un changement de statut.

Le médecin des armées doit, au cours de son examen médical, évaluer de manière systématique au-moins cinq points cruciaux que sont : • le statut vaccinal, • l’état bucco-dentaire, • les éventuelles conduites addictives, • la stabilité psychologique, • les contre-indications aux chimio-prophylaxies. Bien sûr, avant de rendre ses conclusions, il peut demander des examens complémentaires ou des avis spécialisés, toujours en milieu militaire. C’est à ce stade que le chirurgien-dentiste des armées peut intervenir en sa qualité de spécialiste. Il est important de noter que par dérogation à la règle commune, les praticiens des armées, contrairement à leurs confrères civils, peuvent jouer les rôles de soignants et d’experts pour le même patient quand ils sont mandatés pour effectuer des expertises au profit des ministères de la Défense ou des Anciens Combattants. Leur éthique leur commande toutefois de se récuser dès lors qu’il y a conflit d’intérêt ou que des éléments défavorables à l’intéressé sont parvenus à la connaissance du praticien expert au cours d’une relation thérapeutique. Ils doivent systématiquement et clairement indiquer à leurs patients quand ils jouent le rôle de soignant et quand ils jouent le rôle d’expert, et les implications des déclarations des patients dans l’un ou l’autre de ces deux rôles. Ceux-ci doivent être toujours séparés dans le temps et quand c’est possible dans l’espace. Ce mélange des genres permis par les textes, validé par l’usage, a pour corollaire la confusion potentielle entre médecine de soins et expertise. Aussi, arrive-t-il que par erreur, un praticien civil soit sollicité pour donner des informations permettant de déterminer l’aptitude. Il est évident que le médecin ou le chirurgien-dentiste civil doit s’abstenir de répondre, a fortiori de donner des informations spontanément, au praticien militaire dans son rôle d’expert, sous peine

FIGURE 1 : Cellulite naso-génienne, d’origine bucco-dentaire, avec œdème palpébral inférieur et supérieur. Une telle infection peut avoir des conséquences graves sur un théâtre opérationnel. C’est pourquoi les dents infectées, même sans symptomatologie clinique, doivent être soignées ou extraites avant une projection.

de créer potentiellement un préjudice à son patient, et ne pas satisfaire d’évidence ses obligations relatives au secret professionnel tel que sa violation est prévue dans l’article 226-13 du nouveau code pénal.

Systématisation de la validation de l’aptitude dentaire Afin de systématiser la validation de l’aptitude dentaire, le chirurgien-dentiste se base sur certains éléments (3, 4, 5, 6, 7) (figures 1 à 7).

L’examen clinique L’examen clinique collecte la totalité des informations tant cliniques que contextuelles dont nous disposons. Le but n’est pas de réaliser un plan de traitement mais de pouvoir répondre aux questions posées par l’autorité. Les examens complémentaires, telles que les radiographies, sont

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

7


CDF-1640-CahierFC-p05-10_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:32 Page8

Formation continue

une aide à la détermination de l’aptitude et en aucun cas ne peuvent être utilisés seuls pour poser un diagnostic. La conclusion d’aptitude donnée par le praticien des armées résulte d’une synthèse de ce qu’il a personnellement observé, conjuguée à ses connaissances médico-mili-

taires. Une lésion ne saurait aboutir à une conclusion seule ou en dehors de son contexte. Toutefois, dans un souci de calibrage inter examinateur, des réponses indicatives aux questions les plus fréquentes ont été résolues dans les années 1990 par quatre notes (4, 5, 6, 7).

Le problème des dents de sagesse est ainsi souvent évoqué dans une population jeune. Le cadre général prévoit une action curative. Par conséquent, les dents incluses ou sur arcade doivent être respectées tout comme les dents en désinclusion dont il est raisonnable de penser qu’elles vont trouver leur place sur l’arcade. Une attitude strictement inverse s’impose vis-à-vis des dents en désinclusion qui ne peuvent manifestement trouver leur place. Dans ce cas, tant que ces portes d’entrée infectieuse ne seront pas supprimées, les patients resteront inaptes aux opérations extérieures, outre-mer, service à la mer.

Le panoramique dentaire FIGURE 5 : Quand les dents de sagesse FIGURE 2 : Infection fistulisée en vestibulaire de la racine de 25 couronnée. Il ne suffit pas que les soins aient été réalisés, il faut aussi le succès de la thérapeutique.

compliquent l’hygiène bucco-dentaire, il n’est pas rare que les faces distales des 2es molaires se carient. Dans un tel cas, c’est plus le risque de pulpite que le risque infectieux qui doit être pris en considération.

Le panoramique dentaire est une tomographie à type de zonographie. Ce type d’examen permet de visualiser globalement une coupe des arcades dentaires et les structures anatomiques connexes. Il est reconnu au panoramique dentaire deux intérêts majeurs : • Observation des structures anatomiques

FIGURE 6 : Les formes chroniques des maladies parodontales ne sont pas une cause d’inaptitude, excepté en phase terminale. FIGURE 3 : Péricoronarite congestive simple sur la 3e molaire mandibulaire. Les dents incluses ou sur arcade doivent être respectées. Une attitude inverse doit être adoptée avec l’extraction des dents en désinclusion qui ne pourront pas trouver une place sur l’arcade.

Il permet d’avoir une vue d’ensemble de la bouche, d’observer les structures osseuses des articulations temporo-mandibulaires, de visualiser les sinus maxillaires. Il permet aussi de montrer grossièrement la forme des racines dentaires et les rapports qu’entretiennent les dents entre elles, et entre elles et les structures environnantes. Dans la mesure où cet examen est disponible lors des visites d’aptitude, il est normal qu’il soit utilisé dans le dépistage ou la caractérisation des pathologies parodontales ou carieuses. Mais il révèle dans cet usage ses limites alors que des clichés rétro-alvéolaires ou rétro-coronaires se révèleraient plus adaptés. • Identification médico-légale

FIGURE 7 : Il arrive que des complications passées inaperçues, conséquences de traumatismes anciens, soient à l’origine d’inaptitude temporaire.

FIGURE 4 : Infection endo-parodontale importante sur 46 à traiter avant un départ. 8

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

Les militaires sont soumis, par les spécificités de leur engagement, à des risques plus importants en moyenne que la population civile. Beaucoup d’éléments peuvent servir à


CDF-1640-CahierFC-p05-10_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:32 Page9

Formation continue

la reconnaissance de la dépouille. En cas d’altération de cette dernière, l’odontogramme est souvent très utile. Le panoramique complète utilement l’odontogramme, et c’est dans cette acceptation qu’il apparaît comme l’un des éléments pertinents à conserver. Dans ce cadre, la durée de validité d’un panoramique dentaire est de 5 ans, et peut être étendu à 10 ans sur avis annuel du chirurgien-dentiste des armées en l’absence de changements importants. Une ou quelques avulsions dentaires ne nécessitent donc pas de nouveaux clichés. De même, le praticien de ville peut demander à ses patients militaires de lui montrer les clichés, ce qui évite d’en refaire inutilement. La sécurité sociale militaire, comme son homologue civil, est en droit de demander la justification des prescriptions d’examens complémentaires. Dans la mesure où tous les militaires disposent d’au-moins un panoramique réalisé par un radiologue en milieu militaire, et qu’on peut se le procurer, l’indication de prescription et la réalisation d’un cliché panoramique chez le militaire sont très difficiles à justifier et doivent donc rester exceptionnelles. Quand c’est le cas, il est obligatoire de leur remettre au-moins un exemplaire du cliché sur support argentique à l’exclusion de tout autre support.

Aptitudes particulières Il existe de nombreuses situations où l’autorité militaire a précisé des contraintes ou des normes particulières relatives à des situations précises.

Règles particulières applicables à l’armée de Terre Sans préjudice du cadre défini (1, 2), l’armée de Terre impose au moins 30 % de coefficient masticatoire et une absence de soins longs et prolongés pour s’engager, un coefficient maximal de G3 pour

participer aux opérations extérieures, aux missions, ou aux séjours outre-mer et même G2 pour la brigade des sapeurspompiers de Paris, les troupes de montagne et l’aguerrissement.

Règles particulières applicables à l’armée de l’Air L’armée de l’Air exige que tous les soins dentaires soient effectués avant un départ en opérations extérieures, en mission, ou en séjour outre-mer. Pour les personnels naviguant, les règles sont plus strictes encore puisqu’il est précisé que non seulement l’état bucco-dentaire doit être jugé bon mais encore que le coefficient masticatoire soit supérieur à 50 %. Sachant que si les prothèses conjointes sont tolérées, il n’en est pas de même pour les prothèses adjointes. De plus, l’articulé doit être normal. En ce qui concerne les pilotes d’essai, en plus des règles applicables aux personnels naviguant dans leur ensemble, il est indispensable qu’ils ne présentent aucune lésion ou affection évolutive de la cavité buccale et du cou, aucun trouble de l’élocution, de la phonation et aucune altération importante de la denture.

Règles particulières applicables à la Marine Nationale Les personnels doivent présenter un sigle G2 maximum et plus de 30 % de coefficient masticatoire pour le service à la mer (SAM). Les praticiens des armées sont invités à tenir compte de l’éloignement d’une structure hospitalière disponible en cas d’aggravation de l’affection en cause. Les sous-mariniers doivent présenter un bon état bucco-dentaire et un coefficient masticatoire de plus de 50 %. Dans ce calcul, les prothèses adjointes et conjointes peuvent entrer en ligne de compte. Le problème des dents de sagesse doit être évoqué avec le chirurgien-dentiste des armées. Dans ce cas, il est judicieux de pronostiquer cet accident d’évolution

pour qu’il ne se produise pas lorsque le sous-marin est en immersion. Dans le cadre des personnels habilités à plonger, la présence et l’intégrité de toutes les incisives, canines et prémolaires doivent être garanties. Seule l’absence de deux ou quatre prémolaires dans le strict cadre d’antécédents d’un traitement d’orthopédie dento-faciale réussi est tolérée. Le port des prothèses adjointes est exclu dans le cadre de la plongée. Les traitements endodontiques et les obturations doivent être homogènes et étanches.

Cas particulier du travail sous expositions à des champs électro-magnétiques (8, 9, 10) Le danger représenté par les engins explosifs improvisés (EEI) existe depuis 2005 sur certains théâtres d’opérations extérieures. La mise à feu des EEI peut être réalisée par un signal radio-électrique déclenché à distance de la charge. Aussi, l’armée de Terre a entrepris d’équiper certains véhicules de la gamme tactique (automobiles P4, véhicules de l’avant blindé, véhicules blindés légers) de moyens de contre-mesures appelés brouilleurs. Ces appareils sont mis en fonctionnement par chaque véhicule au cours des patrouilles. Ils sont mis à l’arrêt en zone sûre. En fonctionnement, ils émettent en continu un rayonnement électromagnétique de puissance variable en trois dimensions qui couvre l’avant et les côtés des véhicules. L’effet recherché est l’interférence inhibitrice de tout signal hostile déclenchant un EEI. Sur la base de la cartographie réalisée pour chaque type de véhicule par l’armée de Terre, les zones de sécurité ou contrôlées sont : • Zone d’accès libre ou zone verte : elle correspond à l’intérieur de tous les véhicules de la gamme tactique. Le temps de séjour est autorisé sans limitation. • Zone jaune ou zone d’accès limité : elle correspond à certaines zones extérieures

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

9


CDF-1640-CahierFC-p05-10_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:32 Page10

Formation continue

latérales, arrière et de toit de certains véhicules. • Zone orange : il s’agit d’une zone d’accès strictement limité. Si l’accès d’un personnel habilité est autorisé par le commandement, le temps de séjour y est défini à l’avance. Il doit être strictement respecté et être obligatoirement très bref. • Zone rouge : il s’agit d’une zone d’accès interdit. Les zones rouge et orange se situent dans un volume d’espace englobant les antennes émettrices et leur proche voisinage. Parmi les contre-indications médicales, la recherche d’éléments métalliques est nécessaire. Ils peuvent, en effet, être l’objet d’un échauffement local ou induire des charges électriques susceptibles de provoquer une symptomatologie (picotements), voire des phénomènes de coagulation locale. Si les châssis métalliques de certaines prothèses amovibles ne posent que peu de problèmes après information des porteurs par la capacité qu’ils ont de les ôter, les implants, les amalgames dentaires, les couronnes coulées comme les céramo-métalliques, les inlay-cores, les implants dentaires, etc.

10

sont à rechercher. Ils sont compatibles avec un séjour occasionnel en zone jaune.

Cas particulier des terres australes et antarctiques françaises Du fait de l’isolement prolongé total pendant la période hivernale correspondant à environ 8 mois, le coefficient masticatoire minimal doit être supérieur à 40 % et un état bucco-dentaire jugé excellent est nécessaire.

Conclusion Il est important pour les chirurgiens-dentistes civils d’avoir une connaissance même approximative des normes d’aptitude et des procédures de détermination de ces dernières. Certes, ils ne peuvent participer de près ou de loin à ces expertises qui s’approchent pourtant des expertises de droit civil, ne serait-ce que pour respecter le secret professionnel. Mais leur rôle reste capital dans le maintien au meilleur niveau de la santé bucco-dentaire des patients militaires qui se confient à eux.

Bibliographie 1. IM n° 2100/DEF/DCSSA/AST/AME relative à l’aptitude médicale à servir, du 1er octobre 2003.

7. Note n° 455/DEF/DCSSA/AST/TEC/1 du 19/02/1996.

2. IM n° 1700/DEF/DCSSA/AST/AS relative au suivi et au contrôle de l’aptitude à servir du personnel militaire, du 28 janvier 2002.

8. Message n° 497/DEF/EMA/J3/TER/CD du 16 mars 2007 relatif à l’utilisation des brouilleurs contre les engins explosifs improvisés.

3. Fenistein B, Gunepin M, Loiseleux P, Besses R. Logique de la détermination de l’aptitude dentaire en pratique courante, Médecine et armées 2005 ; 33,4 : 323-328.

9. Instruction n° 2900/DEF/DCSSA/AST/SST/MP du 12 octobre 2005 relative à la surveillance médicale des personnels de la Défense exposés à des champs électro-magnétiques de 0 Hz à 300 GHz.

4. Note n° 2923/DEF/DCSSA/AST/TEC/1 du 29/10/1993. 5. Note n° 988/DEF/DCSSA/AST/TEC/1 du 21/04/1994. 6. Note n° 398/DEF/DCSSA/AST/TEC/1 du 6/02/1995.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

10. Note n° 876/DEF/DCSSA/AST/SST/MP du 28 mars 2007 relative aux mesures d’ordre médical concernant le personnel militaire constituant l’équipage de véhicules équipés de brouilleurs d’autoprotection contre les engins explosifs improvisés.


CDF-1640-CahierFC-p13-19_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:31 Page13

MÉDECINE BUCCALE

Formation continue Article publié dans le CDF n° 1569-1570 du 11-18 avril 2013

Julie ZERBIB Attachée hospitalo-universitaire à l’hôpital Bretonneau (AP-HP)

Claude-Bernard WIERZBA MCU - PH, Université Paris-Descartes

Les malades immunodéprimés en odontologie Le chirurgien-dentiste se doit de diagnostiquer un malade immunodéprimé en fonction des différentes formes cliniques exo ou endobuccales.

Dans le cadre de son activité professionnelle, le chirurgien-dentiste doit posséder des connaissances médicales de plus en plus étendues, afin de prodiguer des soins dentaires en toute sécurité chez les patients présentant un risque médical. Concernant les patients atteints d’immunodépression, un certain nombre de précautions va devoir être pris en compte lors des soins dentaires et de chirurgie buccale, notamment la susceptibilité élevée aux infections. La prise en charge de ces patients va devoir se faire en concertation avec le médecin traitant cette pathologie.

Les malades porteurs de virus 1) Les hépatites Le virus de l’hépatite A (VHA) associée souvent à de mauvaises conditions sanitaires, celui de la B (VHB), forme la plus fréquente, de la C (VHC) et celui de la D (VHD), sont les formes les plus communes d’hépatites virales. L’hépatite A et E ne concernent pas particulièrement les odontologistes, par contre les hépatites B et C présentent souvent un risque pour le praticien, aussi bien dans le domaine de la contamination que dans la réalisation de certains actes.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

13


CDF-1640-CahierFC-p13-19_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:31 Page14

Formation continue

En effet, les patients atteints d’hépatites virales vont présenter un risque hémorragique et un risque infectieux élevés (du fait de la leucopénie virale), pendant la phase aiguë ou active de deux semaines environ. C’est pourquoi il n’est pas recommandé que l’odontologiste intervienne durant cette phase.

Conduite à tenir pendant la phase active - Les soins dentaires seront au maximum évités. Ceux-ci pourront être effectués après la guérison du malade et l’apparition des anti-Hbs. La prescription médicamenteuse sera au maximum réduite et les soins d’urgence pourront être effectués en étroite concertation avec le médecin traitant. - En cas d’intervention chirurgicale indispensable, il sera nécessaire d’effectuer un bilan d’hémostase (temps de céphaline activée (TCA), taux de prothrombine (TP) et temps de saignement (TS)), pour la prévention du risque hémorragique. - Concernant la prévention du risque infectieux, une antibiothérapie pré, per et post-opératoire doit être envisagée pour un acte invasif. Des mesures d’asepsie strictes doivent être également prises. - Le risque de contamination est également accru pendant la phase active. Il faut faire très attention aux accidents d’exposition au sang (AES), et c’est pourquoi il est utile pour l’odontologiste de vérifier ses vaccins. L’ictère atteignant la muqueuse buccale (palais, région sublinguale) est la manifestation buccale la plus fréquente de l’hépatite virale aiguë. L’apparition de gingivorragies ainsi que d’autres manifestations hémorragiques peuvent signer le passage d’une hépatite aiguë à une hépatite fulminante. Concernant les hépatites virales anciennes - Le praticien devra prendre contact avec le médecin traitant pour préciser le type d’hépatite et la contagiosité. 14

- Aucune précaution particulière ne sera prise lors des soins chez les patients ayant eu une hépatite virale de type A (après guérison).

quettes ou de sang total, pourront alors être envisagées. La prise en charge de ces patients doit être faite en milieu hospitalier.

Concernant le VHB - L’odontologiste prendra contact avec le médecin traitant pour vérifier l’état porteur sain du patient et éviter d’intervenir si la maladie est active et hautement contagieuse. Les patients sont considérés à risque faible en cas d’antécédents d’hépatites avec tests antigéniques négatifs, présence d’anticorps et tests hépatiques normaux. - Les gestes en odontologie sont à effectuer lorsque la fonction hépatique est rétablie, c’est-à-dire quand les transaminases ALAT et ASAT (reflets des lésions hépatocellulaires) sont normalisées.

2) Le virus de l’immunodéficience humaine (VIH)

Le VHC - Une des formes redoutables du virus de l’hépatite est le VHC, le plus souvent retrouvé chez les patients polytransfusés et toxicomanes. - Chez ce type de patients, l’examen de la cavité buccale peut révéler la présence d’infections à candida albicans, de pétéchies, d’ecchymoses, et de saignements gingivaux, ainsi que des lésions pré-malignes et malignes liées à l’usage de l’alcool, du tabac et de drogues. Ces lésions devront être détectées et traitées. - Au stade de cirrhose post-infectieuse, les malades présentent différents signes cliniques tels que des hémorragies spontanées, dues notamment à l’altération des facteurs de la coagulation vitamine K dépendants synthétisés par le foie, et provoquées lors des actes chirurgicaux, ainsi que des complications infectieuses dues à l’immunodépression. - Si une intervention de chirurgie buccale est nécessaire, la correction avec précaution de la vitamine K (par voie intraveineuse (IV)) et la transfusion de facteurs vitamine K dépendants, de pla-

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

Deux virus, le VIH 1 et le VIH 2 sont à l’origine de pathologies évoluant sur plusieurs années, dont le stade ultime est le SIDA. Il n’existe actuellement aucun traitement antiviral permettant d’éliminer le virus, même si certaines médications freinent l’évolution de la maladie. La contamination interhumaine peut se faire par voie sanguine, sexuelle ou contamination mère-enfant. Les signes cliniques de l’infection VIH vont varier en fonction du stade de la maladie. La primo-infection est rarement symptomatique, ou semblable aux signes communs à toutes infections virales. Par la suite, une altération de l’immunité va apparaître avec progressivement une altération de l’état général jusqu’au stade SIDA. Le traitement des patients infectés par le virus de l’immunodéficience humaine nécessite une étroite collaboration entre le chirurgien-dentiste et le médecin traitant. Des précautions particulières doivent être respectées notamment pour les patients en phase avancée de leur maladie.

Conduite à tenir - La plupart des patients sans complication peut être traitée en cabinet dentaire, les soins en milieu hospitalier étant préférables concernant les cas les plus sévères. - Le risque de contamination doit être évité en instaurant des mesures de protection et d’asepsie strictes. Il est obligatoire de considérer tous les patients comme s’ils étaient porteurs du VIH et d’appliquer pour tous les mêmes


CDF-1640-CahierFC-p13-19_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:31 Page15

Formation continue

- Le sarcome de Kaposi (figure 2) et le lymphome non Hodgkinien (figure 3) sont les manifestations orales les plus caractéristiques du SIDA. Ces lésions, généralement associées à un profond degré d’immunodépression, seront traitées par radiothérapie, chimiothérapie ou interféron gamma.

FIGURE 1 : Leucoplasie orale chevelue du bord

Les malades porteurs d’hémopathies

lingual.

1) Les anémies méthodes de protection, de stérilisation, d’hygiène et d’asepsie. - La planification de soins dentaires va prendre en considération la maladie ellemême ainsi que la médication lourde associée à celle-ci. - La présence d’une anémie, neutropénie ou thrombocytopénie peut être source de complications d’ordre infectieux ou hémorragique. Dans ce cas, une antibiothérapie prophylactique et un bilan d’hémostase seront nécessaires. Quand le nombre de plaquettes se trouve inférieur à 70 000/mm3, il est nécessaire de prévoir des moyens locaux d’hémostase et une surveillance post-opératoire stricte. - La prise d’un certain nombre de médicaments peut être associée à des anomalies de la fonction hépatique et rénale. L’usage prudent de médicaments hépato et néphrotoxiques chez le patient infecté par le VIH sera donc nécessaire. - Un certain nombre de manifestations buccales est fréquemment rencontré et devra être mis en évidence par l’odontologiste. La détection de ces symptômes, tels que les infections fongiques (candidose buccale), virales (herpès buccal, leucoplasie orale chevelue (figure 1), et bactériennes (gingivite et parodontite), va permettre un diagnostic précoce de la maladie et le traitement de ceux-ci.

L’anémie est caractérisée par une baisse de la numération érythrocytaire (hémoglobine inférieure à 13g/dL chez l’homme et 12 chez la femme). Les anémies les plus souvent rencontrées sont l’anémie ferriprive, les anémies mégaloblastiques, les anémies hémolytiques (dont la drépanocytose), les anémies aplasiques, et celles associées à certains troubles chroniques. Différents signes cliniques peuvent être observés tels qu’une pâleur, l’asthénie, les troubles psychiques et de mémoire (difficultés pour les soins), l’hypotension artérielle et la tachycardie. Les anémies donnent de nombreuses manifestations buccales telles que la pâleur des muqueuses (hyposidirémie), la chéilite angulaire, la glossite, des ulcérations aphtoïdes. Le traitement par le fer est parfois responsable de taches noires sur la langue et sur les dents.

Conduite à tenir - Avant tout traitement, il est nécessaire de contacter l’hématologue pour prendre connaissance du type d’anémie. - Le traitement des patients souffrant d’anémie légère ne présente pas de difficulté. Pour les autres patients atteints d’anémie, les soins seront réalisés lors d’une stabilisation médicale et clinique de la maladie (figure 4).

FIGURE 2 : Maladie de Kaposi palatine (malade en phase terminale).

FIGURE 3 : Lymphome non hodgkinien.

FIGURE 4 : Gingivite ulcéro-nécrotique chez un patient atteint d’anémie.

- La prescription de médicaments tels que les barbituriques ou opiacés devra être évitée en raison du risque de dépression respiratoire et d’hypoxie secondaire. - Avant toute intervention chirurgicale, la Numération Formule Sanguine sera demandée (NFS). En cas d’anémie importante, la correction de celle-ci devra être effectuée. Un bilan d’hémostase sera également prescrit (TS, TP, TCA, numération des plaquettes) et les tech-

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

15


CDF-1640-CahierFC-p13-19_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:31 Page16

Formation continue

niques locales d’hémostase seront réalisées. - Chez le patient présentant une drépanocytose, une antibiothérapie prophylactique sera préconisée lors d’actes chirurgicaux. - Concernant les patients à risques élevés ayant un hématocrite inférieur à 30 %, les interventions complexes telles que de nombreuses avulsions, une hospitalisation sera préférée.

2) Les syndromes hémorragiques Désordres plaquettaires Les syndromes hémorragiques peuvent résulter d’une diminution du nombre des plaquettes (inférieur à 150 000/mm3) ou thrombopénie. Un risque hémorragique existe quand le nombre de plaquettes est inférieur à 20 000/mm3. Un risque de saignement avec un nombre de plaquettes supérieur à 20 000/mm3 peut se rencontrer si le patient est soumis à un traitement induisant des thrombopathies associées. La thrombopénie peut être centrale (par envahissement de la moelle osseuse par exemple) : leucémies aiguës (leucémie aiguë myéloïde type 4 ou 5 (associant leucopénie, anémie, et thrombopénie), lymphomes, métastases, myélofibrose… La thrombopénie peut être périphérique : des anticorps vont alors détruire les plaquettes dans le sang périphérique.

Conduite à tenir - Le TS sera demandé, car il permet en effet d’observer le bon fonctionnement des plaquettes. Les techniques locales d’hémostase seront utilisées lors d’une intervention chirurgicale : sutures, compression, colle biologique. - Les patients atteints de thrombopénie sévère ne doivent pas faire l’objet de soins sanglants. En cas de nécessité, le patient sera transfusé en plaquettes 30 minutes avant l’acte (sauf dans les cas de thrombopénie auto-immune où les anticorps détruiront les plaquettes). 16

Hémophilie L’hémophilie A est un déficit en facteur VIIIc de transmission récessive liée à l’X (TCA augmenté). D’autres formes d’hémophilie sont plus rares telles que l’hémophilie B (déficit en facteur IX de la coagulation). Maladie de Willebrand La maladie de Willebrand est une coagulopathie héréditaire. Il s’agit d’une maladie de l’hémostase primaire résultant d’une diminution du facteur Willebrand. Des manifestations hémorragiques sont observées telles que des saignements muqueux. Le TS et le TCA sont allongés.

Conduite à tenir - L’anesthésie loco-régionale mandibulaire est contre-indiquée chez les patients hémophiles en raison du risque d’hématome susceptible d’obstruer les voies aériennes supérieures. - En cas d’intervention chirurgicale, la prescription d’un bilan d’hémostase est obligatoire. - Les soins à l’origine d’un saignement important seront effectués avec précaution et avec compensation du facteur de la coagulation manquant, et éventuellement l’utilisation d’agents antibibrinolytiques (acide tranexamique). Les techniques d’hémostase locale doivent être effectuées. Coagulopathies acquises Le déficit en facteurs vitamine K dépendants dû à une hypovitaminose (par exemple les patients sous anti-vitamines K) va entraîner l’allongement du TP et du TCA. Chez les patients sous AVK, l’International Normalized Ratio (INR) va également être allongé et va trouver tout son intérêt devant les problèmes d’interprétation du TP dont la valeur est fonction de sa réalisation technique, en particulier du réactif (thromboplastine) que chaque laboratoire utilise. La coagulation intra-vasculaire disséminée (CIVD) est un syndrome hémorra-

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

FIGURE 5 : Hyperplasie gingivale chez un patient atteint de leucémie aiguë lymphoblastique.

gique caractérisé par une perturbation du bilan de la coagulation, un déficit en facteurs de la coagulation (fibrinogène, facteur V et VIIIc) et une thrombopénie. Des inhibiteurs pathologiques de la coagulation, type lupus, peuvent également induire une diminution du TP et du TCA.

Conduite à tenir - La prévention du risque hémorragique est indispensable. En cas de prise d’AVK, l’INR sera demandée la veille au matin de l’intervention. - Les AVK ne seront pas arrêtés et les techniques d’hémostase locale seront réalisées (réalisation d’une fenêtre thérapeutique). - Lorsque l’INR est trop élevé (au-delà de 3), il est préférable de prévoir les avulsions en milieu hospitalier. La transfusion de plasma frais congelé (contenant des facteurs de la coagulation) ou un relais héparinique avant l’acte chirurgical peut s’avérer nécessaire.

3) Les pathologies de la série blanche Désordres leucocytaires non prolifératifs Il peut s’agir de désordres lymphocytaires, se traduisant par une réduction du nombre de lymphocytes (lymphopénie) ou par un excès de lymphocytes (par exemple dans le cas d’une leucémie lymphoblastique ou leucémie lymphoïde chronique),


CDF-1640-CahierFC-p13-19_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:31 Page17

Formation continue

ou de désordres associés aux polynucléaires. En effet, les polynucléaires neutrophiles peuvent être présents en nombre insuffisant, et on parlera alors de neutropénie (quantité de neutrophiles inférieure à 1500/mm3) ou d’agranulocytose (absence complète de neutrophiles dans le sang périphérique). La neutropénie n’est pas une maladie en tant que telle, mais le signe d’un désordre sous-jacent (infection, tumeur, maladie systémique syndrome myéloprolifératif) affectant la moelle osseuse et le sang périphérique.

Conduite à tenir - Le médecin traitant sera consulté pour connaître précisément l’état de santé du patient. - Le praticien devra prendre des précautions contre le risque infectieux associé aux désordres leucocytaires. Des actes chirurgicaux ou susceptibles d’être à l’origine d’une infection seront réalisés sous antibioprophylaxie. Le mieux est tout de même d’attendre que la numération soit normalisée avant les soins. - Une neutropénie prolongée peut provoquer des complications qui devront être détectées et soignées telles que la candidose, l’herpès, la gingivite, la parodontite, et les ulcérations des muqueuses. Certains facteurs tels que les traitements de chimiothérapie et corticoïdes favorisent l’apparition de ces dernières. Affections hématologiques malignes : leucémies Les leucémies sont des proliférations malignes du tissu hématopoïétique. Des cellules immatures ou blastes prolifèrent dans la moelle, le sang périphérique et différents organes dans le cas de la leucémie aiguë alors que ce sont des cellules matures qui prolifèrent en cas de leucémie chronique.

Conduite à tenir - Avant tout traitement médical, le praticien devra réaliser l’éradication de tous

les foyers infectieux au moins 10 jours avant le début de la chimiothérapie. - Le médecin traitant sera consulté pour connaître l’état de santé du patient et la nature du traitement. - Chez le patient ayant été traité avec succès ou en rémission, tous les soins peuvent être réalisés. Une numération leucocytaire sera demandée et une antibioprophylaxie prescrite si besoin. En cas de chimiothérapie d’entretien, les soins peuvent être réalisés soit avant les cures, soit trois semaines après. - En cas d’actes chirurgicaux et du fait de la chimiothérapie, un bilan pré-opératoire sera nécessaire (NFS, numération plaquettaire, TS, TP) et les soins pourront être réalisés quand la numération des globules est supérieure à 2000/mm3 et que les plaquettes sont supérieures à 50 000/mm3. - Il existe différentes manifestations buccales chez les patients atteints de leucémie, notamment les hyperplasies gingivales (figure 5), infections et ulcérations muqueuses. Ces manifestations peuvent être compliquées par des traitements par chimiothérapie ou transplantation de moelle (candidose, herpès).

pré-opératoire est indispensable et les soins doivent se faire en étroite concertation avec le médecin traitant ou l’hématologue. - Les principales manifestations buccales associées aux affections hématologiques malignes vont être liées à la chimiothérapie et à la radiothérapie. Concernant le lymphome de Burkitt (forme moins commune de lymphome non Hodgkinien), des déplacements dentaires et une déformation faciale sont à noter. Des mobilités dentaires, des lésions ostéolytiques, des pétéchies et hémorragies buccales sont retrouvées chez les patients atteints d’un myélome multiple.

Les patients soumis à des thérapeutiques particulières 1) Les malades irradiés

Les lymphomes Les lymphomes (maladie de Hodgkin et lymphomes non hodgkiniens) sont des tumeurs malignes qui se développent au sein des tissus lymphoïdes et qui diffusent à distance vers les autres tissus lymphoïdes (moelle, foie). Le myélome multiple correspond à un cancer hématologique touchant les plasmocytes.

La radiothérapie est un traitement utilisé en cancérologie, et notamment concernant les cancers de la sphère cervicofaciale (ORL). La radiothérapie peut être externe, ou interne (curiethérapie). Il faut savoir que les effets secondaires n’existent que s’ils sont dans le champ d’irradiation. Les soins dentaires seront donc effectués sans difficulté chez une patiente ayant été irradiée pour un cancer du sein par exemple. Il existe un certain nombre de complications de la radiothérapie telles que l’inflammation des muqueuses (radiomucites), une modification de la salive plus épaisse et moins présente (xérostomie), et une perte du goût temporaire.

Conduite à tenir - Avant tout traitement, l’élimination de tous foyers infectieux dentaires doit être réalisée. Des précautions devront être prises lors des soins et notamment d’actes invasifs à l’égard des troubles de la coagulation, du risque infectieux, des pathologies associées et des traitements suivis par le patient. Un bilan

Conduite à tenir - Avant une radiothérapie, un bilan dentaire complet et des détartrages réguliers doivent être effectués. Les foyers infectieux d’origine dentaire seront éradiqués. - Des empreintes seront réalisées pour la confection de gouttières de fluoration. - Des bains de bouche au bicarbonate de

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

17


CDF-1640-CahierFC-p13-19_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:31 Page18

Formation continue

L’ostéonécrose des maxillaires est l’une des complications du traitement par radiothérapie. C’est pourquoi il est nécessaire : - De réaliser les avulsions prophylactiques de toutes les dents ne pouvant être conservées avant tout traitement par radiothérapie. - Si une intervention chirurgicale doit avoir lieu pendant ou après le traitement, une prescription anti-infectieuse devra être mise en place et se prolongera jusqu’à la complète cicatrisation. L’avulsion doit être le plus atraumatique possible, avec sutures du site opératoire. Les vasoconstricteurs lors de l’anesthésie seront à éviter. FIGURE 6 : Candidose de la face dorsale de la langue : langue noire villeuse.

sodium (terrain alcalin) seront commencés, puis poursuivis pendant la radiothérapie pour éviter le développement d’une mucite, ainsi qu’une alimentation peu irritante (pas d’épice ni de vinaigre), et l’arrêt de l’alcool et du tabac. - En cas d’apparition de mucite de grade 1 (muqueuse rouge), des bains de bouche au bicarbonate et de la xylocaïne visqueuse en gel seront prescrits. En cas de mucite de grade 2 (ulcération muqueuse), le patient devra prendre des antalgiques. - Le risque de développer des infections secondaires est élevé, notamment l’apparition de mycoses (par exemple la langue noire), et un traitement antifongique tel que le Fluconazole (Triflucan ) devra être prescrit (figure 6). En cas d’œdème buccal ou laryngé, un traitement à base de corticoïdes devra être entrepris. - En cas de xérostomie, des stimulants salivaires seront prescrits si besoin. Les patients prennent rapidement l’habitude d’avoir une bouteille d’eau avec eux.

18

2) Les malades sous chimiothérapie La chimiothérapie est à l’origine de nombreux effets secondaires et de complications buccales. Certaines complications vont résulter de l’effet direct des agents utilisés qui impliqueront les mucites, la xérostomie. Les autres seront la conséquence d’une toxicité générale : les infections secondaires à la leucopénie et à l’immunodépression (risque infectieux majoré), les saignements buccaux (gingivorragies) secondaires à la diminution du nombre de plaquettes (risque hémorragique).

Conduite à tenir - L’oncologiste sera consulté avant tout acte invasif. Un bilan sanguin sera demandé et une antibioprophylaxie sera préconisée. - Le risque hémorragique devra être pris en compte en cas d’intervention chirurgicale. Un bilan d’hémostase sera demandé et les techniques d’hémostase locale utilisées. Les patients combinent souvent les traitements par radiothérapie et par chimiothérapie.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

3) Les malades sous biphosphonates Les biphosphonates sont des molécules utilisées dans le traitement de l’ostéoporose et des métastases osseuses, des hypercalcémies malignes, et dans le traitement des lésions lytiques des myélomes multiples. Le risque d’ostéonécrose des maxillaires doit être pris en compte par l’odontologiste.

Conduite à tenir - L’hygiène buccale et le suivi odontologique doivent être rigoureux. - Le risque d’ostéonécrose étant beaucoup plus important chez les patients traités par voie intraveineuse, les actes invasifs devront au maximum être évités, et les soins conservateurs privilégiés. - En cas d’urgence, les actes de chirurgie buccale seront réalisés sous antibiotiques. - Concernant les ostéonécroses avérées, l’odontologiste devra prendre en charge la symptomatologie douloureuse, contrôler l’infection (bains de bouche à la chlorhexidine, antibiothérapie ciblée), et arrêter la progression de l’ostéonécrose (figures 7 et 8).

4) Les immunodéprimés thérapeutiques Les corticoïdes sont utilisés dans le traitement de nombreuses pathologies autoimmunes (arthrite rhumatoïde, le lupus érythémateux), dermatologiques (lichen plan érosif par exemple), ainsi que dans la prévention du rejet de greffe.

Conduite à tenir - En raison des effets immunosuppresseurs des corticoïdes et de la susceptibilité accrue aux infections, une prophylaxie anti-infectieuse est recommandée chez les patients sous corticoïdes.


CDF-1640-CahierFC-p13-19_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:31 Page19

Formation continue

FIGURE 7

FIGURE 8 FIGURES 7 ET 8 : Ostéonécrose après avulsions chez des patients traités par biphosphonates. Des précautions par rapport au stress seront à prendre en compte lors d’actes invasifs. - La dose quotidienne de corticoïdes sera doublée le jour de l’acte pour atteindre 40 à 60 mg. En cas de stress plus

important, la dose sera portée à 60 mg d’emblée le jour de l’intervention puis réduite de moitié le lendemain pour retrouver la dose de maintenance. - Chez un patient présentant une insuffisance surrénalienne, la dose peut être portée jusqu’à 100 mg en cas de stress sévère le jour de l’intervention. - Notons que chez un patient ayant des antécédents de corticothérapie, les doses de 20 à 30 mg par jour prises sur une période de 7 à 10 jours peuvent induire une suppression surrénalienne persistant pendant 1 à 2 ans. Dans le cas d’actes associant du stress, des doses pouvant aller de 20 à 40 mg (stress léger) jusqu’à 60 mg (stress plus important) seront données le jour de l’intervention. - La présence de pathologies associées (hypertension, diabète) nécessite de prendre des précautions supplémentaires spécifiques à ces pathologies.

- Le chirurgien-dentiste se doit de diagnostiquer un malade immunodéprimé en fonction des différentes formes cliniques exo ou endobuccales : par exemple une maladie de Kaposi chez les malades VIH, des hyperplasies gingivales hémorragiques chez les malades atteints de leucémie, des atteintes osseuses nécrotiques relatives à certaines thérapeutiques médicamenteuse ou radiothérapique. - L’observation clinique et le questionnaire médical devront obligatoirement juger de l’état de santé générale du patient et de la faisabilité de soins au fauteuil. - Devant une pathologie spécifique, l’odontologiste devra prendre contact avec le médecin traitant afin de décider des thérapeutiques possibles chez ces patients.

- Quelle que soit l’étiologie, les patients immunodéprimés doivent être diagnostiqués d’une façon stricte et rigoureuse. - Des actes invasifs peuvent avoir des causes dramatiques chez ces patients du fait des paramètres infectieux et hémorragiques pouvant créer des états irréversibles.

Robert JM, Vichova S, Delannoy B, Quadiri T, Lehot JJ. Le patient immunodéprimé. Elsevier Masson, 2009.

Références bibliographiques

Roche, Y. Risques médicaux au cabinet dentaire en pratique quotidienne. Identification des patients à risques - évaluation des risques prise en charge : prévention, précautions. Elsevier Masson, 2010.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

19


CDF-1640-CahierFC-p21-25_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:37 Page21

MÉDECINE BUCCALE

Formation continue Article publié dans le CDF n° 1572 du 2 mai 2013

Marie-Alix FAUROUX Catherine MAS Pierre JACQUEMART Jacques-Henri TORRES Service d’Odontologie, CHRU de Montpellier

Les tonsillolithes : souvent méconnus et pourtant si fréquents Les tonsillolithes restent le plus souvent ignorés du patient et du praticien, mais peuvent être révélés par radiographie panoramique.

La surface des amygdales ou tonsilles est creusée de sillons (les cryptes amygdaliennes), dans lesquels peut s’accumuler une substance blanchâtre et caséeuse, qui est classiquement observée dans les angines érythémato-pultacées (angines à points blancs). Ces points blancs peuvent également évoluer sur un mode chronique, en l’absence de toute inflammation aiguë, et se manifester seulement par une halitose. Ils sont constitués par l’accumulation de la substance organique piégée dans les cryptes amygdaliennes. Il arrive aussi que ces amas

subissent une minéralisation de type lithiasique et deviennent alors des tonsillolithes.

Aspects cliniques Les tonsillolithes peuvent se constituer dans les cryptes des amygdales palatines (tonsillolithes palatins), de l’amygdale linguale ou encore dans les tissus lymphoïdes de la paroi postérieure du nasopharynx (tonsillolithiases nasopharyngées) (1). Les tonsillolithes de petite taille sont le plus souvent

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

21


CDF-1640-CahierFC-p21-25_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:37 Page22

Formation continue

inconnus du patient. À l’opposé, les plus volumineux peuvent entraîner une sensation de corps étranger dans l’arrière gorge, et les patients peuvent aussi se plaindre de dysphagie. Des tonsillolithes géants ont été rapportés dans la littérature, pouvant atteindre plusieurs centimètres (2, 5). Les tonsillolithes semblent être plus particulièrement détectés entre 40 et 50 ans (6), bien qu’on en ait retrouvé à partir de 8 ans (7), et les deux sexes sont également intéressés (8). Les tonsillolithes sont extrêmement fréquents : une étude épidémiologique récente sur des scanners (7) a montré que les tonsillolithes palatins concernent près du quart de la population. Ces concrétions tonsillaires peuvent être uniques ou multiples, unilatérales ou bilatérales. Les tonsillolithes revêtent différentes formes (ronde, cylindrique, ovoïde, pyramidale, plurilobulaire), différentes couleurs (blanche, jaune, brune, grise) et différentes consistances (friable à dur). Si certains aspects de la physiopathogénie des tonsillolithes restent controversés, il semble admis que les inflammations amygdaliennes récurrentes jouent un rôle majeur dès leur formation (1). Le processus inflammatoire entraînerait une fibrose de l’orifice des cryptes amygdaliennes, à l’origine d’une rétention et d’une accumulation de matériel organique (débris épithéliaux et alimentaires, prolifération microbienne et fongique, suppuration chronique). Le nidus ainsi formé est secondairement calcifié par les différents sels issus notamment des sécrétions des glandes salivaires : hydroxyapatite, carbonate de calcium, oxalates, phosphates, radicaux d’ammonium, sels de magnésium, potassium, sodium, silice, manganèse (4). La composition des tonsillolithes est classiquement assimilée à celle du biofilm dentaire (9). Les espèces bactériennes telles que Prevotella, Selenomonas, Eubacterium, Tannerella, Fusobacterium, et Porphy-romonas y sont couramment 22

retrouvées (10). Les espèces bactériennes hébergées sont très variables d’un sujet à l’autre, et la distribution des bactéries anaérobies et aérobies change en surface et en profondeur. Cette participation bactérienne expliquerait l’halitose fréquemment rapportée. En effet, on note une présence constante de bactéries produisant des composés volatiles sulfurés (11), tels que les sulfures d’hydrogène et le méthyl mercaptan, principalement impliqués dans l’halitose et la dysgueusie. En clinique, il faut évoquer l’éventualité de tonsillolithes devant la persistance de maux de gorge, une sensation de corps étranger dans la gorge, une dysphagie, une odynophagie, une otalgie, une dysgueusie ou simplement une halitose (3, 4, 11, 12). Dans la consultation générale, l’halitose constitue une plainte fréquente, et son origine reste plus souvent buccale (poches parodontales, enduit sur le dos de la langue). Mais il faut tout de même penser à rechercher l’existence de tonsillolithes éventuels en cas d’halitose. L’examen clinique orienté commence par un interrogatoire destiné à recueillir les antécédents d’éventuelles inflammations récurrentes des amygdales (angines chroniques). Il faut ensuite inspecter la région amygdalienne, à la recherche de zones érythémateuses ou d’ulcérations (13), d’une hypertrophie de l’amygdale palatine (4) ou encore d’une tuméfaction pouvant siéger sous l’arc palato-glosse (pilier antérieur du voile du palais), au palais mou ou dans la fosse tonsillaire. Sauf cas de réflexe nauséeux, l’inspection doit toujours être associée à la palpation des aires amygdaliennes (2, 5) pour sentir, quand c’est possible, une masse dure et mobile au sein de la tonsille concernée. Les tonsillolithes asymptomatiques ne sont justiciables d’aucun traitement (14). L’immense majorité des personnes atteintes les ignorent en effet, leur vie durant. À l’inverse, certains tonsillolithes peuvent pro-

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

voquer des complications (infections) ou une gêne fonctionnelle (halitose, dysphagie, etc.). Le patient doit alors faire l’objet d’une prise en charge adaptée. La taille des concrétions est déterminante dans le choix thérapeutique : les plus petites peuvent être traitées par simple curetage des cryptes amygdaliennes concernées sous anesthésie locale (13, 15), et les plus grosses requièrent une tonsillectomie sous anesthésie générale (2). Plus récemment, une cryptolyse par laser au CO2 a été proposée. Moins invasive que la chirurgie, l’intervention au laser réduirait la profondeur des poches et par conséquent la rétention du matériel organique (12).

Examen radiologique En l’absence de symptomatologie, la découverte des tonsillolithes palatins se fait généralement au hasard d’un examen radiologique systématique. Le plus souvent, c’est le scanner qui révèle des calcifications dans la loge amygdalienne, par exemple à l’occasion d’un bilan pré-implantaire (figure 1). Mais les plus volumineuses peuvent aussi être décelées à l’orthopantomogramme (OPT) (figures 2 et 3). Sur cet examen très courant, l’image radioopaque générée par les tonsillolithes se projette en général sur la branche mandibulaire, où elle doit être différenciée de celle d’autres radio-opacités visibles (16), condensations intra-osseuses ou autres concrétions des tissus mous (2, 3, 13, 14) : corps étranger, sialolithe, ganglion lymphatique calcifié (par exemple en séquelle d’une tuberculose ganglionnaire cervicale), phlébolithe (sur un angiome ou une varice), calcification de l’artère carotide (mais qui se projette en général en dessous de l’angle mandibulaire), ou du ligament styloïde (qui se projette en arrière de l’angle) (figures 4, 5, 6, 7, 8 et 9). L’observation détaillée de l’OPT suffit en général à porter le diagnostic de tonsillo-


CDF-1640-CahierFC-p21-25_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:37 Page23

Formation continue

FIGURE 4 : Projetée sur la branche mandibulaire à l’OPT, cette image ressemble à celle d’un tonsillolithe palatin. Mais il n’y a pas d’image fantôme.

FIGURE 1 : Image la plus fréquente d’un

FIGURE 7 : Scanner montrant l’un des

tonsillolithe palatin : opacité repérée sur le scanner dans la loge amygdalienne gauche lors d’un bilan pré-implantaire. Ce petit tonsillolithe n’était pas visible à l’OPT.

FIGURE 2 : Tonsillolithe palatin gauche de 8 mm découvert sur un OPT dans le cadre d’un bilan pré-implantaire. À noter aussi l’image fantôme du côté opposé.

phlébolithes (flèche). À noter aussi que le patient présente également un petit tonsillolithe palatin du même côté.

FIGURE 5 : Le scanner montre qu’il s’agit d’un ganglion lymphatique calcifié parotidien, situé en arrière du masséter et en latéral du ramus. À noter que cette formation est tout à fait accessible à la palpation extra-buccale.

FIGURE 8 : L’aspect de cet OPT pourrait évoquer un gros tonsillolithe ou un sialolithe.

FIGURE 6 : Chez ce patient présentant des angiomes veineux de la région jugale gauche, on observe plusieurs phlébolithes à gauche. Il n’y a pas d’image fantôme sur l’OPT.

FIGURE 3 : Sur le scanner, on remarque la forme plurilobulaire de la concrétion.

FIGURE 9 : Il s’agit d’un ostéome développé aux dépens de l’angle mandibulaire, ainsi que le précise le scanner.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

23


CDF-1640-CahierFC-p21-25_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:37 Page24

Formation continue

FIGURE 11 : Le plan focal de l’OPT. FIGURE 10 : La patiente présente deux tonsillolithes palatins du côté droit, suffisamment volumineux pour être visibles sur l’OPT (flèche jaune). Ils se projettent classiquement sur la branche mandibulaire. Ces mêmes concrétions sont à l’origine d’une image fantôme du côté gauche (flèche orange). lithe, en concluant à un objet radio-opaque situé dans les tissus mous, du côté médial de la branche mandibulaire. On retrouve en effet à la fois une image nette du côté du tonsillolithe et une image « fantôme » du côté opposé (figures 2, 3 et 10). L’existence d’une image nette signe la présence d’une opacité proche du plan focal (figure 11) de l’OPT du côté concerné. Cet objet pourrait être situé dans l’épaisseur de la branche mandibulaire (à l’intérieur du tissu osseux), ou bien dans les tissus mous (c’est-à-dire en latéral ou en médial de la mandibule), puisque les éléments radio-opaques présents dans les tissus mous proches des maxillaires apparaissent bien entendu sur le cliché (16). Le principe de l’OPT tend à dissoudre les images des objets éloignés du plan focal, par le mouvement réciproque du film et de la source pendant l’exposition. Seuls apparaîtront nets les objets qui se situent à proximité du plan focal, dans la zone de netteté (17). Au fur et à mesure qu’un objet s’éloigne du plan focal (aussi bien vers le côté lingual que vers le côté vestibulaire), son image devient floue et tend à disparaître. Un objet à distance de la zone de netteté peut néanmoins se manifester sous forme d’une image fantôme. Le cas le plus connu est celui de la boucle d’oreille métallique (figure 12). Un même objet situé dans la zone de netteté peut ainsi générer deux 24

images : une image nette, du côté où il se trouve réellement, et une image fantôme, qui apparaît du côté opposé. Se formant à distance du plan focal, les images fantômes apparaissent floues, plus agrandies, et généralement déformées. Les objets radio-opaques naturels (qui génèrent beaucoup moins de contraste de densité que dans l’exemple caricatural des objets métalliques) peuvent être aussi à l’origine d’images fantômes, mais seulement s’ils sont situés au voisinage de la zone de netteté du côté opposé. Dans le cas d’une concrétion siégeant dans la mandibule ou a fortiori en latéral de la mandibule, l’image du côté opposé serait dissoute par la cinétique de l’OPT. L’existence d’une image fantôme indique donc bien sa situation du côté lingual (figures 13 et 14).

FIGURE 12 : Image classique d’un patient portant une boucle d’oreille en or à gauche (flèche jaune). Dans ce cas, c’est la grande densité du métal qui explique l’apparition de l’image fantôme du côté droit (flèche rouge), malgré l’éloignement au plan focal.

FIGURE 13 : Si une calcification est située dans la zone de netteté (en vert) du côté vestibulaire, elle donne sur l’OPT une image simple.

Conclusion Si les tonsillolithes se manifestent parfois par une halitose, ils restent le plus souvent ignorés du patient et du praticien, mais peuvent être à l’origine sur la radiographie panoramique d’images parfois déconcertantes. Une exploration clinique et une analyse radiographique bien menées suffisent à établir le diagnostic de cette affection peu connue et pourtant très fréquente.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

FIGURE 14 : Si la calcification est localisée du côté lingual, elle peut être assez proche de la zone de netteté de l’autre côté pour y engendrer une image fantôme, qui apparaît floue (voir figures 2 et 10).


CDF-1640-CahierFC-p21-25_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:37 Page25

Formation continue

Bibliographie 1 - Ben Salem D, Guiu B, Duvillard C, Couaillier JF, Ricolfi F. Nasopharyngeal tonsillolith : a report of 31 cases. J Radiol 2007 Feb ; 88(2) : 25962.

7 - Fauroux MA, Mas C, Tramini P, Torres JH. Prevalence of palatine tonsilloliths : a retrospective study on 150 consecutive CT exams. Dentomaxillofac Radiol., Ă paraĂŽtre.

13 - Caldas MP, Neves EG, Manzi FR, de Almeida SM, Boscolo FN, Haiter-Neto F. Tonsillolith-report of an unusual case. Br Dent J 2007 Mar 10 ; 202(5) : 265-7.

2 - Silvestre-Donat FJ, Pla-Mocholi A, Estelles-Ferriol E, Martinez-Mihi V. Giant tonsillolith : report of a case. Med Oral Patol Oral Cir Bucal 2005 MayJul ; 10(3) : 239-42.

8 - Aspestrand F, Kolbenstvedt A. Calcifications of the palatine tonsillary region : CT demonstration. Radiology 1987 Nov ; 165(2) : 479-80.

14 - de Moura MD, Madureira DF, Noman-Ferreira LC, Abdo EN, de Aguiar EG, Freire AR. Tonsillolith: a report of three clinical cases. Med Oral Patol Oral Cir Bucal 2007 Mar ; 12(2) : E130-3.

3 - Cantarella G, Pagani D, Biondetti P. An unusual cause of mechanical dysphagia : an agglomerate of calculi in a tonsillar residue. Dysphagia 2006 Apr ; 21(2) : 133-6. 4 - Thakur JS, Minhas RS, Thakur A, Sharma DR, Mohindroo NK. Giant tonsillolith causing odynophagia in a child : a rare case report. Cases J 2008 ; 1(1) : 50. 5 - Sezer B, Tugsel Z, Bilgen C. An unusual tonsillolith. Oral Surg Oral Med Oral Pathol Oral Radiol Endod 2003 Apr ; 95(4) : 471-3. 6 - Ozcan E, Ural A, Oktemer TK, Alpaslan G. Bilateral tonsillolithiasis : a case report. Oral Surg Oral Med Oral Pathol Oral Radiol Endod 2006 Sep ; 102(3) : e17-8.

9 - Stoodley P, Debeer D, Longwell M, Nistico L, HallStoodley L, Wenig B, et al. Tonsillolith : not just a stone but a living biofilm. Otolaryngol Head Neck Surg 2009 Sep ; 141(3) : 316-21. 10 - Tsuneishi M, Yamamoto T, Kokeguchi S, Tamaki N, Fukui K, Watanabe T. Composition of the bacterial flora in tonsilloliths. Microbes Infect 2006 Aug ; 8(9-10) : 2384-9. 11 - Ansai T, Takehara T. Tonsillolith as a halitosisinducing factor. Br Dent J 2005 Mar 12 ; 198(5) : 263-4. 12 - Rio AC, Franchi-Teixeira AR, Nicola EM. Relationship between the presence of tonsilloliths and halitosis in patients with chronic caseous tonsillitis. Br Dent J 2008 Jan 26 ; 204(2) : E4.

15 - Mesolella M, Cimmino M, Di Martino M, Criscuoli G, Albanese L, Galli V. Tonsillolith. Case report and review of the literature. Acta Otorhinolaryngol Ital 2004 Oct ; 24(5) : 302-7. 16 - Monsour PA, Romaniuk K, Hutchings RD. Soft tissue calcifications in the differential diagnosis of opacities superimposed over the mandible by dental panoramic radiography. Aust Dent J 1991 Apr ; 36(2) : 94-101. 17 - Ram S, Siar CH, Ismail SM, Prepageran N. Pseudo bilateral tonsilloliths : a case report and review of the literature. Oral Surg Oral Med Oral Pathol Oral Radiol Endod 2004 Jul ; 98(1) : 110-4.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

25


CDF-1640-CahierFC-p27-31_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:29 Page27

Formation continue

ODONTOLOGIE PÉDIATRIQUE

Article publié dans le CDF n° 1610-1611 du 13-20 mars 2014

Rita CAUWELS, Luc MARTENS Département de dentisterie pédiatrique UZ Gand, Belgique

Pulpotomie après trauma Lors des fractures coronaires complexes chez les enfants, en présence d’une pulpe vitale, le coiffage pulpaire et la pulpotomie sont des traitements de choix.

de premier choix. Ils ont comme objectif de préserver la vitalité pulpaire pour la poursuite de l’apexogénèse.

Introduction Les incisives centrales supérieures sont impliquées dans 75 % de tous les traumatismes dentaires. Le pic d’incidence se situe entre l’âge de 8 et de 10 ans (1). À cet âge, ces incisives sont encore en plein développement et elles se caractérisent par un apex ouvert, un canal dentinaire large allant de pair avec des parois dentinaires fines et affaiblies. Le traitement des fractures coronaires complexes dans cette tranche d’âge représente de ce fait un véritable défi pour le praticien. En présence de pulpe vitale, le coiffage pulpaire et la pulpotomie sont les traitements

L’apexogénèse se définit comme étant la procédure par laquelle la pulpe vitale est stimulée pour obtenir une maturation radiculaire physiologique (2), et traditionnellement, durant plusieurs décennies, l’hydroxyde de calcium était indiqué. C’est un produit simple à placer et il est en mesure de former une barrière tissulaire dure sous laquelle la pulpe poursuit sa maturation. Malgré les traitements à l’hydroxyde de calcium couronnés de succès, l’on constatait souvent des échecs à long terme. Ces échecs étaient

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

27


CDF-1640-CahierFC-p27-31_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:29 Page28

Formation continue

à attribuer à des formations de ponts avec des faiblesses structurelles et donc de moins bonne qualité. De plus, l’hydroxyde de calcium n’est pas un produit stable car il se résorbe et donne des risques de micro-infiltrations, associés au fait de constituer une moins bonne barrière (3). L’hydroxyde de calcium a la propriété d’affaiblir la dentine par son action protéolytique sur la phase organique de la dentine. Dans les cas de contact prolongé, ceci se traduit souvent en fractures radiculaires cervicales. Une corrélation nette avec la maturité des éléments a, de plus, été mise en évidence (4). Un matériau alternatif à base de silicate de calcium a été présenté en 1993, le « mineral trioxide aggregate » (MTA) (5).

mêmes indications endodontiques que le MTA. À la différence du MTA, les propriétés de matériau de Biodentine sont comparables à celles de la dentine. La résistance à la compression et le module d’élasticité sont comparables avec la dentine. En outre, aucune coloration dentaire n’est constatée lors de l’utilisation coronaire. Le matériau durcit en 12 minutes et peut être utilisé en tant que matériau d’obturation provisoire durant au moins 6 mois, grâce aux propriétés mécaniques améliorées. Du fait de ses excellentes propriétés mécaniques, comparables avec la dentine, Biodentine peut être utilisé pour des dents immatures fragilisées.

Cas cliniques Différentes études ont montré les propriétés biocompatibles et bioactives du MTA (6, 7). Même en présence d’abcès étendus et de résorption osseuse périradiculaire, il a été mis en évidence que le MTA était en mesure de permettre la poursuite de la formation radiculaire de manière conservatrice (8, 9, 10). D’autre part, le MTA ne présente pas des propriétés mécaniques idéales et n’est pas en mesure de renforcer des incisives immatures fragilisées (11). De plus, des colorations coronaires sont toujours constatées après pulpotomie avec le MTA, ce qui représente un désavantage important sur le plan esthétique pour les dents antérieures. En raison des désavantages du MTA telle que sa difficulté de manipulation, son long temps de prise et les colorations coronaires (12, 13), d’autres silicates de calcium ont été introduits sur le marché, parmi lesquels Biodentine™ (commercialisé par les laboratoires Septodont et A.T.O. Zizine). Biodentine™ est un ciment à base de silicate tricalcique, et il a été initialement développé en tant que substitut dentinaire pour les cavités profondes. Comparable au MTA, Biodentine est aussi biocompatible et présente également une action bioactive au contact de tissus vitaux. Il est utilisé comme un ciment de restauration avec, de plus, les 28

L’apexogénèse par pulpotomie avec Biodentine™ est illustrée à l’aide de deux études de cas cliniques.

FIGURE 1 : Radio de la fracture coronaire compliquée de la 21.

Cas n° 1 (Dr Rita Cauwels) Un garçon de 7 ans vient en consultation suite à une fracture coronaire compliquée de la 21 survenue durant une activité sportive (figures 1 et 2). L’élément était sensible à la percussion et un point d’exposition pulpaire était visible en palatin (figure 3). Après anesthésie locale, une préparation pour pulpotomie partielle a été réalisée avec une fraise diamantée à vitesse rapide sous refroidissement à l’eau. La lésion a été nettoyée au sérum physiologique et séchée à l’ouate stérile. Pour réaliser une bonne pulpotomie, la pulpe doit être saine, en d’autres mots rouge vif sans saignement (figure 4). La pulpe exposée a ensuite été recouverte au contact immédiat d’une première couche de Biodentine (figure 5). L’obturation avec Biodentine a ensuite fait office d’obturation provisoire (figure 6). Quatre semaines plus tard, nous avons pu constater qu’aucune douleur n’avait été ressentie durant la période suivant le premier traitement. Après le contrôle clinique de la

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

FIGURE 2 : Aspect clinique vestibulaire de la fracture de la 21. vitalité et l’examen radiologique objectivant l’absence de pathologies, la couche superficielle de Biodentine a été remplacée par une obturation définitive au composite. Le cliché périapical ne présente aucune pathologie. Durant la procédure de suivi ultérieure, il existe une apexogénèse symétrique dans les deux incisives, ce qui indique une activité pulpaire vitale similaire des deux éléments (figure 7).

Cas n° 2 (Pr Luc Martens) Une fille de 7 ans vient en consultation au service de garde après un accident survenu sur une plaine de jeux. Une fracture amélo-


CDF-1640-CahierFC-p27-31_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:29 Page29

Formation continue

FIGURE 3 : Image clinique du point d’exposition pulpaire de la 21. FIGURE 6 : Radio lors du suivi à 1 mois de la pulpotomie réalisée avec Biodentine™ comme matériau d’obturation provisoire.

FIGURE 4 : Image clinique de la préparation pour la pulpotomie de la 21.

FIGURE 7 : Radio lors du suivi à 10 mois. Apexogénèse symétrique des deux éléments : la 11 (physiologique) et la 21 avec Biodentine™.

FIGURE 5 : Image clinique après placement de la couche de couverture de Biodentine™ sur la pulpe de la 21. Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

29


CDF-1640-CahierFC-p27-31_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:29 Page30

Formation continue

dentinaire avec exposition pulpaire a été constatée au niveau de la 11 (figures 8 et 9). Vu la forte anxiété, la patiente a été traitée le lendemain matin sous anesthésie générale. L’ouverture pulpaire a été réalisée avec une fraise diamantée stérile et la pulpe a été éliminée jusqu’au niveau de la jonction corono-radiculaire (figure 10). Après un rapide tamponnement avec une boulette d’ouate, la Biodentine a été appliquée sur la pulpe (figure 11). Après la prise, la restauration au composite a été réalisée immédiatement (figure 12). Une radiographie (figure 13) a été prise. L’apex ouvert est clairement visible sur celle-ci. La Biodentine est identifiable au niveau du cingulum. Au cours des suivis à 6-12-18-24 mois, des tests de vitalité ont été réalisés à chaque fois tout comme des contrôles radiographiques (figures 14, 15, 16). La patiente n’a présenté aucune plainte durant cette période et aucune coloration n’a été constatée. Il est clair qu’à partir de 18 mois après le traitement, une apexogénèse se produit, laquelle se confirme au contrôle à 24 mois.

FIGURE 8 : Aspect vestibulaire de la fracture amélo-dentinaire de la 11.

FIGURE 9 : Vue palatine de l’exposition pulpaire de la 11.

Conclusion Biodentine™ peut être considéré comme un matériau idéal pour la réalisation de pulpotomies sur des incisives traumatisées, immatures. Une dizaine de cas analogues sont suivis actuellement. Cliniquement, aucune plainte significative n’est constatée. Radiographiquement, nous avons observé à chaque fois une apexogénèse parfaite. Pas la moindre coloration n’a été rapportée jusqu’à présent, même lorsque le matériau a été placé dans la couronne.

FIGURE 10 : Poursuite de la préparation en vue de la pulpotomie.

FIGURE 11 : Biodentine est placé en comblement de toute la chambre pulpaire.

30

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014


CDF-1640-CahierFC-p27-31_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:29 Page31

Formation continue

FIGURE 12 : Restauration esthétique de la 11.

FIGURE 15 : Contrôle radiographique après 18 mois.

FIGURE 16 : Contrôle radiographique après 24 mois.

Bibliographie

FIGURE 13 : Contrôle radiographique juste après la pulpotomie.

1. Andreasen JO, Andreasen FM, Andersson L. Textbook and color atlas of traumatic injuries to the teeth. 4th edn. 2007 Blackwell Munksgaard. ISBN 978-1-4051- 2954-1.

8. Iwaya SI, Ikawa M. Revascularization of an immature permanent tooth with apical periodontitis and sinus tract. Dent Traumatol 2001 ; 17 : 185-187.

2. Rafter M. Apexification: a review. Dent Traumatol 2005 ; 21 : 1-8.

9. Banchs F, Trope M. Revascularization of immature permanent teeth with apical periodontitis : new treatment protocol ? J Endod 2004 ; 30 : 196-200.

3. Walia T, Chawla HS, Gauba K. Management of wide open apices in non-vital permanent teeth with calcium hydroxide paste. J Clin Pediatr Dent 2000 ; 25 : 51-6. 4. Cvek M. Prognosis of luxated non-vital maxillary incisors treated with calcium hydroxide and filled with gutta-percha. A retrospective clinical study. Endod Dent Traumatol 1992 ; 8 : 45-55. 5. Lee SJ, Monsef M, Torabinejad M. Sealing ability of a mineral trioxide aggregate for repair of lateral root perforations. J Endod 1993 ; 19(11) : 541-544. 6. Torabinejad M, Hong CU, Lee SJ, Monsef M, Pitt Ford TR. Investigation of mineral trioxide aggregate for root-end filling in dogs. J Endod 1995 ; 21 : 603-608. 7. Torabinejad M, Pitt Ford TR, McKendry DJ, Abedi HR, Miller DA, Kariyawasam SP. Histologic assessment of mineral trioxed aggregate as a root-end filling in monkeys. J Endod 1997 ; 23 : 225228.

10. Garcia-Godoy F, Murray PE. Recommendations for using regenerative endodontic procedures in permanent immature traumatized teeth. Dent Traumatol 2012 ; 28 : 33-41. 11. Cauwels RG, Pieters IY, Martens LC, Verbeeck RM. Fracture resistance and reinforcement of immature roots with gutta percha, mineral trioxide aggregate and calcium phosphate bone cement : a standardized in vitro model. Dent Traumatol 2010 ; 26 : 137-42. 12. Parirokh M, Torabinejad M. Mineral trioxide aggregate: a comprehensive literature reviewPart I : chemical, physical and antibiotic properties. J Endod 2010a ; 36 : 16-27. 13. Parirokh M, Torabinejad M. Mineral trioxide aggregate: a comprehensive literature reviewPart III : clinical applications, drawbacks and mechanism of action. J Endod 2010b ; 36 : 400-413.

FIGURE 14 : Contrôle radiographique après 12 mois. Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

31


CDF-1640-CahierFC-p33-37_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 12:00 Page33

ODONTOLOGIE CONSERVATRICE

Formation continue Article publié dans le CDF n° 1510-1511 du 5-12 janvier 2012

Bruno PELISSIER Camille BERTRAND Jean-Christophe CHAZEL François DURET Service OCE, UFR d’Odontologie de Montpellier I

L’éclaircissement interne : utilisation ambulatoire d’un gel pour le traitement des dents dépulpées Introduction L’éclaircissement interne d’une dent présentant une dyschromie est un acte thérapeutique qui ne peut être réalisé que dans un cabinet dentaire, par un chirurgien-dentiste. En effet, il est indispensable, soit de faire le traitement endodontique avant l’éclaircissement interne, soit de vérifier l’étanchéité du traitement. Lors de l’éclaircissement, il est nécessaire de réaliser une cavité, de protéger le traitement endodontique par un CVI ou autre matériau photo-polymérisable, avant de placer le produit d’éclaircissement et de renouveler le traitement tous les 5 à 7 jours. Tout comme l’éclaircissement externe en ambulatoire, l’éclaircissement interne nécessite plusieurs séances au fauteuil.

Depuis très longtemps, l’esthétique a été une préoccupation pour la plupart des gens. L’odontologie a fait d’énormes progrès sur le plan de l’esthétique et les techniques utilisées actuellement ont fait leurs preuves. L’éclaircissement ou blanchiment des dents, une activité fortement en demande depuis quelques années, donne de très bons résultats sur les dents vitales (5). Cependant, il n’est pas toujours aussi spectaculaire lorsqu’il s’agit de dents dépulpées. Le blanchiment des dents dévitalisées a été décrit pour la première fois en 1864.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

33


CDF-1640-CahierFC-p33-37_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 12:00 Page34

Formation continue

Une variété d’agents de blanchiment étaient alors utilisés, tels le chlorite, l’hypochlorite de sodium, le perborate de sodium et le peroxyde d’hydrogène, seuls ou en combinaison, avec ou sans activation par la chaleur. La technique du blanchiment ambulatoire a été introduite en 1961. À cette époque, un mélange de perborate de sodium et d’eau était placé dans la chambre pulpaire, qui était ensuite scellée par un pansement entre les différents rendezvous chez le chirurgien-dentiste. Plus tard, la méthode a été modifiée et l’eau a été remplacée par du peroxyde d’hydrogène pour améliorer l’effet blanchissant.

Les différentes dyschromies rencontrées Les différentes dyschromies peuvent être associées au patient ou bien être iatrogènes, c’est-à-dire associées au praticien (1, 4, 5).

1) Causes associées au patient Nécrose pulpaire Des substances nécrotiques peuvent pénétrer dans les tubules dentinaires et colorer la dentine. Cette coloration est directement proportionnelle à la durée de la nécrose pulpaire. En effet, plus longtemps les substances sont présentes dans la chambre pulpaire, plus la pénétration à l’intérieur des tubules dentinaires est profonde et plus importante sera la coloration. Ce type de coloration est habituellement corrigé par un blanchiment interne. Hémorragie intra-pulpaire L’hémorragie à l’intérieur de la dentine est la cause la plus fréquente d’une couleur foncée de la dent dépulpée. Le produit de la désintégration du sang, principalement des sulfites ferreux, est introduit à l’intérieur des tubules dentinaires et colore le tissu dentinaire. Si la pulpe commence à nécroser, la décoloration persiste et devient généralement plus sévère avec le temps. 34

Si la pulpe récupère et devient plus saine, la décoloration peut être renversée, redonnant ainsi à la dent sa teinte originale. En général, un blanchiment interne donne de bons résultats pour ces colorations. Hyper-calcification dentinaire Une formation excessive de dentine irrégulière dans la chambre pulpaire et sur les parois des canaux radiculaires peut survenir, suite à une blessure traumatisante de la dent. On remarque alors la diminution graduelle de la translucidité de la couronne et une augmentation de la coloration jaunâtre ou brunâtre. Le premier traitement est le blanchiment externe. Il se peut cependant, dans certains cas, qu’un traitement endodontique soit effectué suivi d’un blanchiment intra-coronaire. Âge Chez les personnes âgées, un changement de la couleur de la dent survient de façon physiologique et constitue en fait le résultat d’une apposition excessive de dentine, de la diminution de l’épaisseur de l’émail et d’un changement optique. La nourriture et certaines boissons entraînent aussi une coloration qui devient de plus en plus prononcée avec le vieillissement, en raison du phénomène de fissures de la dent et de changements sur la surface de l’émail et dans la dentine sous-jacente.

2) Causes associées aux traitements effectués par le praticien Tissu pulpaire restant Les tissus restant dans la chambre pulpaire se désintègrent graduellement et peuvent causer une coloration par une libération de toxines. La cavité d’accès doit être correcte pour s’assurer d’enlever tous les tissus restants. Dans ces cas, le blanchiment interne est alors indiqué. Produits intra-coronaires Plusieurs produits comme les produits à base de phénol et d’iode introduits dans

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

FIGURE 1 FIGURE 2

FIGURES 1 ET 2 : Éclaircissement interne et réalisation composite (Opalescence® Endo d’Ultradent). Cas clinique de Camille Bertrand.

la chambre pulpaire et dans les canaux radiculaires, laissés pour une longue période peuvent pénétrer. Ces substances ont tendance à colorer graduellement la dentine. Matériaux d’obturation Lorsque ces matériaux ne sont pas complètement retirés de la chambre pulpaire, une coloration foncée peut apparaître. Cela peut donc être évité en retirant complètement ces matériaux à un niveau juste en dessous de la gencive. Avant de commencer un blanchiment interne, il est important de bien nettoyer la surface de la dent afin d’estimer le degré de coloration externe. Le patient doit être bien informé du traitement qu’il recevra, mais il doit savoir aussi que les résultats de blanchiment ne sont pas parfaitement prévisibles, et qu’un rétablissement total de la couleur originale de la dent n’est pas garanti.


CDF-1640-CahierFC-p33-37_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 12:00 Page35

Formation continue

FIGURE 3

FIGURE 4

FIGURE 5

FIGURES 3, 4 ET 5 : Protocole de l’éclaircissement interne.

Le chirurgien-dentiste devra également informer le patient des différentes étapes du traitement, des complications possibles, et le traitement sera peut-être répété dans l’avenir pour obtenir des résultats esthétiques optimaux. La méthode utilisée pour blanchir les dents dépulpées est essentiellement le blanchiment ambulatoire (figures 1 et 2) (2, 3, 7). Les techniques interne/externe peuvent lui être également associées. Cette technique requiert un temps acceptable en cabinet et en pratique quotidienne. De plus, elle est intéressante pour le patient et surtout plus sécuritaire qu’avec certaines techniques thermo-catalytiques. (4)

Protocole du blanchiment ambulatoire interne (figures 3, 4 et 5) 1. Évaluer la qualité de l’obturation endodontique avec une radiographie rétro-

alvéolaire. Le canal radiculaire doit être bien obturé. Tout traitement canalaire incorrect, avant de procéder au traitement d’éclaircissement doit être repris. 2. Évaluer la qualité et la teinte des restaurations présentes. Il est nécessaire de les remplacer si elles sont défectueuses. Dans certains cas, le fait de nettoyer la chambre pulpaire et de remplacer la restauration défectueuse peut être suffisant. Si la dent dépulpée présente une lésion carieuse, avant de commencer le blanchiment, il est nécessaire de traiter cette lésion. 3. Bien nettoyer la dent. 4. Prise de la teinte de la dent. 5. Prendre des photographies au début et durant le traitement pour visualiser l’évolution du traitement par comparaison. 6. Isoler si possible la dent avec un champ opératoire. 7. Enlever les matériaux de restauration présents.

8. Nettoyer toute la chambre pulpaire. Tous les restes de matériaux de restauration et de tissus pulpaires nécrotiques doivent être enlevés complètement. Pour ce qui est du matériau d’obturation canalaire se retrouvant à l’intérieur de la chambre pulpaire, ce dernier doit être enlevé jusqu’à une profondeur d’un millimètre à l’intérieur du canal de la racine. Il est important d’enlever tout le composite, afin de permettre aux agents de blanchiment de bien pénétrer dans les tubules dentinaires. Il faut noter qu’il est important d’enlever tous les matériaux jusqu’à un niveau juste en-dessous de la limite gingivale. 9. Appliquer sur le traitement à la gutta percha une couche de verre ionomère ou de composite fluide afin de maintenir le scellement de l’obturation canalaire. 10. Insertion de l’agent blanchissant dans la cavité (perborate de sodium, peroxyde d’hydrogène). 11. Mettre un pansement provisoire et informer le patient que les résultats devraient être visibles seulement quelques jours plus tard. Revoir le patient chaque semaine et répéter la procédure. Il faut en moyenne 4 à 6 visites pour atteindre les résultats escomptés. 12. Lorsque la dent dépulpée a atteint la couleur voulue, restaurer la cavité d’accès avec un composite. Pour obtenir un lien adhésif optimal entre le matériau de restauration et les tissus durs de la dent, il est conseillé de procéder à la mise en place de la restauration permanente après une période d’environ 10 jours minimum, après la dernière thérapie de blanchiment. Le traitement de blanchiment laisse les tissus dentaires sursaturés en oxygène, ce qui inhibe la polymérisation des résines. 13. Prendre une radiographie de la dent éclaircie à tous les rendez-vous annuels afin de diagnostiquer le plus tôt possible les résorptions cervicales.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

35


CDF-1640-CahierFC-p33-37_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 12:00 Page36

Formation continue

Cas clinique Une jeune patiente de 25 ans se présente en consultation pour un problème esthétique lié à la coloration d’une dent dépulpée (figures 6 et 7). Dans le cadre de la dentisterie a minima et la patiente étant jeune, il a été décidé de faire un éclaircissement interne ambulatoire de cette incisive centrale, après avoir validé le traitement endodontique par une radio rétro-alvéolaire. Pour cet éclaircissement interne, nous avons utilisé le matériau Opalescence® Endo de la société Ultradent (voir tableau). Ce produit est du peroxyde d’hydrogène formulé spécifiquement pour la technique de blanchiment ambulatoire et son pH est 5. Le protocole opératoire est celui décrit en introduction ; le nettoyage de la cavité d’accès est réalisé en enlevant tout matériau d’obturation à partir de l’ouverture d’accès jusqu’au niveau déterminé à partir de la radiographie. Tout matériau de restauration, tout matériau d’obturation temporaire et/ou endodontique doit être enlevé pour permettre à l’agent de blanchiment d’entrer en contact avec la structure interne de la dent. Pour assurer une

bonne étanchéité, un composite fluide est mis en place avec une épaisseur de 1 à 2 mm. Un CVI aurait pu être utilisé (figures 8, 9 et 10). La mise en place du produit de blanchiment est rapide et facilitée par sa consistance et son conditionnement en seringue. Il est important de mettre un tout petit tampon d’ouate sur le gel et de laisser environ 1 mm d’espace pour mettre le ciment provisoire qui scellera la cavité. Pour ce cas clinique, 5 séances ont été nécessaires pour obtenir un résultat correct. Avant de restaurer la dent, nous avons mis un produit neutralisant pendant 15 jours. Cela permet à la couleur de la dent de se stabiliser, mais il est important de noter que le traitement de blanchiment laisse les tissus dentaires sursaturés en oxygène, ce qui inhibe la polymérisation des résines. Le composite a été ensuite réalisé selon les procédures classiques de la dentisterie adhésive. Une teinte plus claire a été utilisée, et pour cela, le composite Amelogen® plus a été utilisé (figures 11, 12, 13, 14 et 15). Un résultat esthé-

Caractéristiques et avantages de l’Opalescence® Endo (source Ultradent) Caractéristiques de L’Opalescence® Endo Couleur semi-transparente

36

FIGURE 7

FIGURES 6 ET 7 : Cas préopératoire et radiographie rétro-alvéolaire.

FIGURE 8

Avantages de L’Opalescence® Endo - La couleur visible permet une mise en place facile dans la dent - Ne modifie pas l’apparence de la dent, ne se voit pas à travers la dent

Consistance Gel

- Pratique, reste en place

Peroxyde d’hydrogène

- Blanchiment efficace

Actif 3 à 5 jours dans la chambre pulpaire

- Réduit le temps au fauteuil et augmente la productivité - Blanchiment rapide et efficace

Application : seringue + embout

FIGURE 6

- Application rapide et précise

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

FIGURE 9

FIGURE 10 FIGURES 8, 9 ET 10 : Mise en place d’un composite fluide en protection radiculaire puis de l’Opalescence Endo, et pansement provisoire.


CDF-1640-CahierFC-p33-37_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 12:00 Page37

Formation continue

tique correct a été obtenu et convient à la patiente. Cela évite dans un premier temps de passer par une phase prothétique, la patiente étant jeune (figures 16 et 17).

FIGURE 11

FIGURE 12

FIGURE 13

Conclusion Généralement pour l’éclaircissement interne, du perborate de sodium est utilisé. Ce produit mélangé à de l’eau se décompose lors de la réaction chimique en métaborate, léger dégagement d’oxygène et peroxyde d’hydrogène. Ensuite, la réaction à partir du peroxyde d’hydrogène se développe. Pour ce cas clinique, nous avons employé de l’Opalescence® Endo qui est du peroxyde d’hydrogène. Dans de nombreuses études, les auteurs ont pu montrer que le blanchiment interne était sûr (8). Cette conclusion a été basée sur le fait que des cas précédents montrant une résorption, une base de type CVI ou autre n’avait pas été placée pour protéger le traitement canalaire avant le blanchiment. L’absence de chaleur, la protection de l’obturation et la connaissance

FIGURE 16 : Cas clinique initial.

FIGURE 17 : Cas final. de l’historique de la dent assureront le succès. On peut donc traiter la coloration des dents non vitales en utilisant la technique ambulatoire (1). Les procédures cliniques doivent être strictes et permettront de préserver l’intégrité de la dent, et surtout des tissus environnants, tout en conservant un bon résultat esthétique (6, 8).

Bibliographie FIGURE 14

1) ATTIN T, PAQUÉ F et al. Review of the Current status of tooth whitening with the walking bleach technique, Intl Endc Journal, 2003 ; 36 : 313329. 2) CAVALLERI G, URBANI G, VINCENZI GP. Bleaching technics for non-vital teeth. G Stomatol Ortognatodonzia. 1984 Apr-Jun ; 3(2) : 15562. 3) CHELEUX N. Éclaircissement de la dent dépulpée : méthode ambulatoire. In Les 10 points clés sur les dyschromies dentaires. Collection les dix points clés en odontologie. 2010 : 4852.

FIGURE 15 FIGURES 11, 12, 13, 14 ET 15 : Évolution du traitement (5 séances).

4) DAHL JE., PALLESEN U. Tooth Bleaching – A critical review of the biological aspects, critical reviews in Oral Biology and Medicine, 2003; 14(4) 292.

5) DIETSCHI D, KREJCI I. Traitements chimiques des dyschromies dentaires. Real Clin 1999 ; 10 : 7-24. 6) FISHER NL, RADFORD JR. Internal bleaching of discoloured teeth. Dent Update. 1990 Apr ; 17(3) : 110-1, 113-4. 7) LOUIS JJ, BONNET E. Techniques d’éclaircissement dentaire et projet esthétique. Real Clin 2003 ; 14 : 393-407. 8) VALERA MC, CAMARGO CH, CARVALHO CA, DE OLIVEIRA LD, CAMARGO SE, RODRIGUES CM. Effectiveness of carbamide peroxide and sodium perborate in non-vital discolored teeth. J Appl Oral Sci. 2009 May-Jun ; 17(3) : 254-61.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

37


CDF-1640-CahierFC-p39-43_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:26 Page39

ODONTOLOGIE CONSERVATRICE

Formation continue Article publié dans le CDF n° 1623 du 19 juin 2014

Rémy BALTHAZARD MCU - PH, Odontologie Conservatrice – Endodontie Faculté d’Odontologie de Nancy

Stéphanie JAGER AHU, Odontologie Pédiatrique Faculté d’Odontologie de Nancy

Éric MORTIER MCU - PH, Odontologie Conservatrice – Endodontie Faculté d’Odontologie de Nancy

FIGURE 1 : Cas clinique : Restauration initiale sur la 12. Le joint interfacial dent/obturation paraît disgracieux.

Interface tissus dentaires/ matériaux adhésifs : problématique L’obtention d’une interface tissus dentaires/matériaux de qualité reste pour le praticien et ce, malgré les avancées technologiques proposées par les fabricants, un défi de taille à chaque restauration directe collée employant les résines composites. L’obtention d’une étanchéité parfaite est encore à ce jour un idéal difficilement accessible. Seul le respect d’un protocole opératoire rigoureux permet d’optimiser cette zone clef qu’est l’interface tissus dentaires/matériaux.

Exemple clinique Nous nous proposons d’aborder ici la problématique des endommagements interfaciaux tissus dentaires/matériaux à partir d’un cas clinique. Une patiente de 52 ans se présente en consultation, avec pour doléance une incisive maxillaire droite à l’aspect disgracieux. Cette dent n°12 présente effectivement une volumineuse restauration mésio-vestibulo-palatine englobant une grande partie du bord libre. On note également une coloration marquée du joint interfacial tissus dentaires/matériau (figure 1). Les tests de vitalité sont posi-

tifs. La face palatine de la restauration permet une fonction satisfaisante en termes d’occlusion tant statique que dynamique (guidage antérieur). Il est dès lors proposé à la patiente de renouveler sa restauration selon une technique directe de stratification, à l’aide d’une clef guide en silicone. Ladite clef est réalisée directement en bouche avec un silicone de haute viscosité, et découpée de façon à autoriser un repositionnement précis sur l’arcade tout en respectant l’intégralité des bords libres. Un champ opératoire permettant un travail à l’abri des fluides oraux est mis en place avant la dépose de l’ancienne restauration. Un biseau amélaire vestibulaire

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

39


CDF-1640-CahierFC-p39-43_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:26 Page40

Formation continue

FIGURE 2 : L’ancienne obturation est déposée, l’adaptation de la clef est vérifiée, le biseau amélaire est réalisé, un champ opératoire permet le travail à l’abri des fluides oraux.

FIGURE 3 : La « pelle palatine » en résine composite émail permet de transformer la cavité complexe en cavité plus simple.

FIGURE 4 : La restauration terminée répond aux impératifs biologiques, fonctionnels et esthétiques.

40

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

à l’aide d’une fraise diamantée à grains fins est réalisé de manière à promouvoir la transition optique dent/matériau et à augmenter la surface de collage à l’émail. Par ailleurs, ce biseau permet également de sectionner les prismes selon une direction perpendiculaire à leur grand axe majorant ainsi la qualité du collage (figure 2). Pour des raisons mécaniques, la finition marginale en palatin est réalisée en congé quart de rond plutôt qu’en biseau. Le conditionnement tissulaire à l’aide d’un système mordançage/rinçage en deux temps (M&R2) est effectué. Une première apposition d’une couche de composite émail est réalisée dans la clef avant repositionnement de cette dernière en bouche. La photopolymérisation du matériau permet l’obtention d’une « pelle palatine » transformant une cavité complexe en une cavité plus simple (figure 3). La mise en place des masses dentines se fait par appositions successives et orientées. L’objectif de cette incrémentation est de diminuer les contraintes liées à la contraction de prise du matériau en tentant de minimiser le rapport surfaces collées/surfaces libres à chaque apposition. Une dernière apposition superficielle de composite émail est déposée afin de terminer l’obturation. Un soin tout particulier est apporté à la finition marginale de ce dernier incrément, directement impliqué dans l’étanchéité interfaciale de la restauration. Une photopolymérisation finale au travers d’une couche de glycérine peut être intéressante afin d’éviter la création d’une couche superficielle de composite non polymérisée, du fait de la présence d’oxygène en surface. Un polissage minutieux sous spray à l’aide d’une instrumentation à granulométrie décroissante permet l’obtention d’une surface la moins rétentive possible de plaque bactérienne. Le polissage ne doit pas pour autant se faire au détriment de la micro-géographie de surface nécessaire à l’obtention d’une restauration mimétique (figure 4).


CDF-1640-CahierFC-p39-43_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:26 Page41

Formation continue

Problématique Malgré l’évolution constante des matériaux adhésifs depuis plusieurs décennies, l’obtention d’une obturation étanche reste aujourd’hui encore un défi de taille. Si les matériaux répondent maintenant en grande partie au cahier des charges pour lequel ils sont conçus, tant du point de vue mécanique que du point de vue optique, la rétraction de prise reste problématique. Effectivement, au cours de la polymérisation des résines composites méthacryliques couramment retrouvées au sein de nos cabinets dentaires, les liaisons covalentes C-C qui se mettent en place, au détriment des liaisons électrostatiques de Van der Waals préexistant entre les unités monomériques, sont des liaisons plus courtes : la distance intermoléculaire initiale de l’ordre de 4 Å est alors réduite à une distance de 1,5 Å [1]. Il en résulte une contraction du matériau pouvant initier la formation d’un hiatus colonisable par les bactéries. Si la qualité du joint interfacial est liée pour une grande part aux caractéristiques intrinsèques du matériau (plasticité, adaptabilité aux parois de la cavité, stabilité dimensionnelle, absorption, solubilité, facilité de manipulation), elle dépend aussi des conditions de mise en place de l’obturation, de la structure des tissus dentaires, du mode de polymérisation et de l’environnement buccal du patient. Audelà de l’endommagement interfacial engendré immédiatement par la contraction de polymérisation et les contraintes qui en découlent potentiellement, différents éléments intervenant ultérieurement dans la vie du matériau sont à considérer, comme les finitions/polissages de l’obturation, l’hygiène orale et alimentaire du patient, les stress mécaniques et thermiques, l’occlusion et les habitudes masticatoires, les changements de pH et de température de l’environnement buccal ainsi que les mouvements des fluides dentinaires, le flux et la composition sali-

vaires. Tous ces éléments sont susceptibles d’influencer les interactions entre structures dentaires et matériaux. L’ouverture d’une brèche entre le matériau et les tissus dentaires va permettre la pénétration des fluides oraux. Ces phénomènes dynamiques de percolation entraînent le passage de composants salivaires, d’ions, de molécules, de bactéries et de leurs toxines, favorisant ainsi la contamination au niveau de l’interface dent/restauration [2, 3]. L’absorption d’eau va potentiellement engendrer une variation dimensionnelle de l’obturation, par expansion hygroscopique. En théorie, cette expansion pourrait s’avérer intéressante puisqu’elle va dans le sens d’une compensation de la contraction de prise. En réalité, ce changement volumétrique n’est pas superposable au retrait ni dans le temps ni en termes de localisation et peut même, dans une moindre mesure, engendrer une « surcompensation » alors nuisible à la qualité de l’interface [4, 5]. D’un point de vue esthétique, un hiatus interfacial pourra conduire à la création d’un liseré coloré disgracieux sur tout le pourtour de la restauration. Ce phénomène s’accentue avec le temps, donnant un aspect en relief à l’obturation du fait de la destruction des tissus dentaires périphériques. D’un point de vue bactériologique, ces défauts sont des niches susceptibles d’être colonisées dès que celles-ci atteignent 1 à 2 µm. Les récidives carieuses par libération d’enzymes et de toxines au sein même du hiatus sont dès lors favorisées. D’autres conséquences cliniques sont à redouter, comme des douleurs postopératoires persistantes, des hypersensibilités dentinaires initiées par des mouvements hydrodynamiques suite à l’ouverture des tubulis [6], et surtout des pathologies pulpaires pouvant évoluer jusqu’à la nécrose. La dentine étant un tissu perméable, il est à craindre un enva-

hissement des canalicules, autorisant la diffusion des bactéries et de leurs toxines vers le tissu pulpaire [7]. Les tubules deviennent alors des zones de développement bactérien, où la concentration en toxines devient significativement plus importante que celle que l’on peut retrouver dans le milieu buccal. Plusieurs études ont rapporté que les réactions inflammatoires et les nécroses pulpaires sont dues principalement à l’absence ou au défaut d’étanchéité des matériaux plutôt qu’aux matériaux proprement dits et à leurs composants chimiques. La préservation pulpaire dépend donc de la capacité de la restauration à prévenir la diffusion bactérienne et donc de son étanchéité [8]. Certains auteurs rapportent que les monomères de résine peuvent affecter le système immunitaire et induire une immunosuppression, engendrant ainsi une diminution de la résistance pulpaire face aux agents infectieux. Par conséquent, l’immunosuppression du système pulpaire, due aux composants résineux augmente la capacité destructive des bactéries [9] et donc le risque de nécrose pulpaire. Mount, en 1995 [10], démontrait qu’en l’absence d’invasion bactérienne, aucun matériau utilisé et manipulé dans le respect du protocole opératoire et des indications cliniques, ne provoquait d’inflammation pulpaire irréversible. Sasafuchi et coll. [11] rapportent en 1999 qu’une obturation non étanche est responsable d’une plus forte invasion bactérienne qu’une cavité préparée non obturée. La nature du tissu dentaire en périphérie de la cavité importe également. En effet, l’émail, la dentine et le cément n’ont pas les mêmes aptitudes au collage. On préférera le collage sur l’émail plus fortement minéralisé. La réalisation de biseaux amélaires, en plus d’améliorer la transition optique dent/matériau, permet d’augmenter la surface de collage et donc d’améliorer l’étanchéité de l’obturation. Le

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

41


CDF-1640-CahierFC-p39-43_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:27 Page42

Formation continue

sation ne le rendent que peu propice au collage.

FIGURE 5 : Échantillon analysé en microscopie optique montrant une pénétration de colorant à l’interface cémentaire et propagation dans la dentine par voie tubulaire en direction pulpaire (x20).

FIGURE 6 : Échantillon analysé en microscopie optique montrant une décohésion du matériau aux interfaces amélaire et cémentaire (x20).

collage nécessite un système adhésif, initiant au niveau dentinaire la formation d’une couche hybride organo-minérale, par imbrication de brides résineuses dans les canalicules. Du fait d’une dentine fortement hydratée, on parlera de wet bonding ou collage en milieu humide. Si le collage dentinaire s’avère plus délicat et plus « opérateur dépendant », l’obtention de résultats cliniquement satisfaisants est actuellement tout à fait à la portée des praticiens. Quant au cément, sa structure plus faiblement minéralisée et sa locali42

Plusieurs stratégies de fabrication sont aujourd’hui disponibles afin de réduire la rétraction de prise des résines. Deux possibilités s’offrent aux fabricants. Ils peuvent employer des monomères de haut poids moléculaire, lesquels, plus volumineux et moins mobiles, limitent de fait le nombre de liaisons disponibles pour la formation du réseau de polymères ; ou bien augmenter le pourcentage de charges et donc diminuer la proportion matricielle à l’origine du phénomène de rétraction. Toutefois, ces changements structurels modifient le comportement des matériaux, notamment la viscosité et les propriétés rhéologiques de ces derniers mais également leurs propriétés mécaniques, physico-chimiques et optiques. C’est pourquoi il existe aujourd’hui une troisième voie, comme nous le verrons plus loin (2e partie), visant à modifier totalement la chimie matricielle du matériau, à l’image du Filtek™ Silorane® de la société 3M™ ESPE™ [12]. De nombreuses techniques de visualisation ou d’évaluation quantitative de la micro-infiltration à l’interface dent/obturation sont aujourd’hui disponibles. Parmi celles-ci, on retrouve notamment l’étude de la pénétration de colorants (figures 5 et 6), de marqueurs radioactifs, de bactéries ou encore d’air comprimé en microscopie optique. Il existe aussi la microscopie à balayage et à balayage environnemental (figures 7 et 8), la microscopie laser confocal ou à force atomique, et plus récemment la tomographie à rayons X à haute résolution assistée par ordinateur (figures 9 et 10). Cette dernière, contrairement aux techniques en microscopie optique ou électroniques à balayage couramment utilisées pour ce genre d’étude, a l’avantage de ne nécessiter aucune préparation de l’échantillon (ni coupe, ni déshydratation, ni métallisation, etc.), et donc de n’engendrer aucune perte d’informations.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

FIGURE 7 : Échantillon analysé en microscopie électronique à balayage environnemental, montrant une fracture au sein de la couche d’adhésif (flèches noires) (x3000).

FIGURE 8 : Échantillon analysé en microscopie électronique à balayage environnemental montrant une fracture au sein de la couche d’adhésif (flèche noire) et du substrat dentinaire (flèche blanche) (X1000).

Cette méthode repose sur le principe d’absorption des rayons X. En effet, un rayon incident se trouve plus ou moins atténué suivant la densité et l’épaisseur des matériaux qu’il traverse selon la loi de BeerLambert. L’intensité alors reçue sur chaque pixel du capteur correspond à l’intensité initiale du faisceau atténuée par le milieu traversé. Ainsi, l’appareil va réaliser l’acquisition d’un grand nombre de projections radio-


CDF-1640-CahierFC-p39-43_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:27 Page43

Formation continue

graphiques de l’échantillon qui tourne sur lui-même, autorisant par la suite, la reconstruction 3D de ce dernier. En plus d’une très grande résolution spatiale et de la possibilité de reconstruire virtuellement l’échantillon en trois dimensions, cette méthode d’observation permet d’objectiver clairement la qualité de l’interface mais surtout autorise une quantification précise des défauts (porosité, fracture, fêlure, etc.). La semaine prochaine, dans l’article intitulé : « Interface tissus dentaires/maté-

FIGURE 9 : Coupe d’une obturation au Filtek ®

Silorane montrant l’intimité de l’interface émail/matériau.

La 2e partie de cet article sera publiée dans le prochain numéro.

Bibliographie 1. Yap AU, Wang HB, Siow KS, Gan LM. Polymerization shrinkage of visible-light cured composites. Oper Dent. 2000 Mar-Apr ; 25(2) : 98-103. 2. Bergenholtz G, Cox CF, Loesche WJ, Syed SA. Bacterial leakage around dental restorations : its effect on the dental pulp. J Oral Pathol. 1982 Dec ; 11(6) : 439-50. 3. Camps J, Dejou J, Remusat M, About I. Factors influencingpulpal response to cavity restorations. Dent Mater. 2000 Nov ; 16(6) : 432-40. 4. Brännström M, Mattsson B, Torstensson B. Materials techniques for lining composite resin restorations: a critical approach. J. Dent. 1991 Apr ; 19(2) : 71-9. 5. Huang C, Kei LH, Wei SH, Cheung GS, Tay FR, Pashley DH. The influence of hygroscopic expansion on resin-based restorative materials on artificial gap reduction. J. Adhes Dent. 2002 Spring ; 4(1) : 61-71.

FIGURE 10 : Coupe d’une obturation au Filtek

riaux adhésifs. 2e partie : investigations », nous décrirons et discuterons des images d’obturations obtenues en tomographie 3D, réalisées in vitro à l’aide de deux résines composites reposant sur des chimies différentes (base méthacrylate avec polymérisation par ouverture des doubles liaisons C=C et siloxane/oxyrane avec polymérisation par ouverture d’anneaux cationiques).

6. Brännström M, Linden LA, Astrom A. The hydrodynamics of the dental tubule and of pulp fluid. A

discussion of its significance in relation to dentinal sensitivity. Caries Res. 1987 ; 1(4) : 310-7. 7. Bergenholtz G. Pathogenic mechanisms in pulpal disease. J Endod. 1990 Feb ; 16(2) : 98101. 8. Hebling J, Giro EMA, Costa CAS. Human pulp response after an adhesive system application in deep cavities. J Dent. 1999 Nov ; 27(8) : 557-64. 9. Lemons JE. Dental implant biomaterials. J Am Dent Assoc. 1990 Dec ; 121(6) : 716-9. 10. Mount GJ. Some physical and biological properties of glass ionomer cement. Int Dent J. 1995 Apr ; 45(2) : 135-40. 11. Sasafuchi Y, Otsuki M, Inokoshi S, Tagami J. The effects on pulp tissue of microleakage in resin composite restorations. J Med Dent Sci. 1999 Dec ; 46 : 155-64. 12. Weinmann W, Thalacker C, Guggenberger R. Siloranes in dental composites. Dent Mater. 2005 Jan ; 21(1) : 68-74.

P60® montrant une interface régulière.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

43


CDF-1640-CahierFC-p45-50_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:43 Page45

Formation continue

ENDODONTIE

Article publié dans le CDF n° 1589 du 3 octobre 2013

Laurent SCHERMAN Docteur en Sciences Odontologiques Docteur de l’Université Ancien Assistant Hospitalo-Universitaire (Paris-Descartes)

Fracture des instruments endodontiques : éléments de compréhension La fracture des instruments endodontiques peut poser des problèmes aux praticiens. Certains points doivent être connus pour prevenir cet incident.

La fracture d’un instrument endodontique est un incident en odontologie qui pose un problème technique souvent difficile à résoudre, et une source potentielle de conflit avec le patient. Il n’existe pas de thérapeutique sans risque et l’incidence sur le traitement

est très variable. En revanche, le stress engendré est très important pour le patient comme pour le praticien. Le nombre de déclarations d’incidents de ce type en France est assez limité (tableau 1). Dans la pratique quotidienne, les chiffres doivent être

Nombre total

Fractures d’instruments d’endodontie

Pourcentage par rapport au nombre global de sinistres

2006

1061

64

6%

2007

1051

87

8%

2008

1071

69

6,5 %

2009

1081

75

6,9 %

2010

1087

77

7%

2011

1309

76

5,8 %

TABLEAU 1 : Rapport du Sou Médical. Déclarations de sinistre. Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

45


CDF-1640-CahierFC-p45-50_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:43 Page46

Formation continue

plus importants car il faut tenir compte de tous les bris d’instruments non déclarés à l’assurance et parfois non signalés aux patients. Dans les chiffres donnés par le Sou Médical, il apparaît une très grande majorité d’instruments NiTi en rotation continue. Ce point particulier se retrouve dans la bibliographie. 74 % des études cliniques et des travaux de laboratoire traitant des fractures d’instruments en endodontie concernent ce type de matériel. Une double étude en 2008 (1, 2) a montré que 75 % des praticiens interrogés ont rencontré ce problème dans leur pratique (82,82 % des endodontistes et 70,92 % des omnipraticiens). En ce qui concerne les fractures au niveau du tiers apical, 25,9 % des endodontistes et 18,5 % des omnipraticiens tentent de les récupérer. La même année, des auteurs (3) ont analysé le nombre de fracture d’instruments chez des étudiants se spécialisant en endodontie pour un total de 4897 canaux traités. Lors de la consultation, 7,41 % des dents présentaient un bris instrumental. La fréquence d’incidents lors des soins par les étudiants a été de 1,83 %. Une partie de cette étude a porté sur les résultats obtenus lors de la tentative de retrait des bris d’instruments (tableau 2). Les conclusions de l’étude ont montré un nombre global de fractures d’instruments

Position coronaire Position médiane Position apicale

Position initiale en %

% de succès

12,5

100

27,5

45,4

52,5

37,5

TABLEAU 2 : Localisation initiale et pourcentage de succès de retrait des bris.

46

assez bas dont une fréquence de fracture d’instrument NiTi en rotation continue élevée. Une étude statistique récente (4) a abouti à une conclusion identique. La fréquence de fracture calculée avec des opérateurs ayant peu d’expérience en endodontie (étudiants de 3e année) utilisant le système Protaper® est relativement basse (1,1 %).

Jurisprudence et fracture d’instruments endodontiques Traditionnellement, le praticien a une obligation de moyens. Il doit réaliser des soins consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science. Il n’a pas d’obligation de résultat. L’erreur (non grossière) ne constitue pas dans ce cadre une faute et le juriste cherchera à savoir ce qu’un praticien consciencieux et averti aurait fait dans les mêmes circonstances (5). Dans ce cadre précis, l’existence d’une faute n’est donc pas forcément à l’origine de l’échec du traitement et du préjudice s’il y en a un. La jurisprudence a pourtant évolué sous les contraintes sociétales. Dans les cas de thérapeutiques chirurgicales, le praticien a une obligation de sécurité de résultat. Il doit maîtriser ses techniques (produits et matériel) et toute maladresse sera assimilée à une faute (5). Certains auteurs considèrent que la mauvaise utilisation de l’instrument endodontique est la principale raison de la fracture (6, 7). D’autres auteurs nuancent le propos en considérant que le système utilisé peut présenter des risques accrus (8). Il faut aussi prendre en compte les conditions anatomiques (courbure et rétrécissement), ou structurales (minéralisation et fibrose) pouvant expliquer des difficultés trop importantes dans la réalisation des soins endodontiques. Nous verrons que le problème est bien plus complexe et que de nombreux facteurs

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

interviennent dans la genèse de la fracture. Ainsi, la responsabilité du praticien dans la fracture de l’instrument endodontique peut être mise en cause dans la mesure où le patient subit un préjudice. Globalement, la jurisprudence assimile toute maladresse dans l’acte chirurgical médical à une faute. Le praticien est tenu à l’exactitude du geste chirurgical sauf s’il prouve une anomalie non décelable à l’examen (5). Un point très important dans les cas de fracture d’instruments endodontiques est l’obligation d’information. L’expérience montre que beaucoup des patients ne sont pas contents, parce que le praticien ne leur a pas signalé le bris d’instrument et non en raison du bris lui-même. Outre le fait de respecter l’obligation d’information, il faut dédramatiser la situation. L’incidence d’un bris n’a pas automatiquement de conséquence importante sur le devenir de la dent. Un instrument coincé dans un canal minéralisé ou dans un feuillet entre deux canaux n’engendre aucun préjudice. Un bris empêchant d’atteindre une zone infectée peut remettre en cause le pronostic de la dent lorsque la chirurgie apicale n’est pas réalisable. La position du bris dans le canal va influencer le taux de succès de la tentative de retrait. En résumé, l’obligation de sécurité de résultat s’applique. Il y a une modulation possible pour les reprises de traitement et les canaux courbés. La technique doit être adaptée au cas et être une solution valable. Il ne doit pas y avoir d’utilisation excessive des instruments, en particulier pour les instruments NiTi en rotation continue.

Influence de la fracture instrumentale sur le pronostic L’analyse de la bibliographie permet de séparer deux cas de figures. Le bris instrumental va influencer négativement le pronostic lorsque la dent est nécrosée ou présente une lésion périapicale. Les dents


CDF-1640-CahierFC-p45-50_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:43 Page47

Formation continue

présentant un bris apical sans qu’un processus infectieux ne soit présent ont un meilleur pronostic (reprise de traitement et dent vitale en minéralisation-fibrose). Dans une étude (9), sur un total de 146 dents, le groupe présentant une infection et un bris instrumental présente une baisse de 6,2 % de guérison par rapport au groupe sans bris. Le groupe ne présentant pas de lésion apicale avec un bris ne présente que 2,7 % de guérison en moins. D’autres auteurs (6) ont référencé les travaux ayant obtenu les mêmes résultats que l’étude précédente : Strindberg (1956), Grossman (1969), Fox et al. (1972), Kerekes et Tronstad (1979), Molyvdas et al. (1992). Cette étude a référencé aussi les auteurs considérant que le pronostic n’est pas modifié par la fracture de l’instrument : Engström et al. (1964), Engström et Lundberg (1965), Crump et Natkin (1970). Une analyse bibliographique (10) a montré des résultats similaires. Un bris d’instrument augmente le risque d’échec de 11,7 % lorsqu’une lésion apicale est présente. Dans la suite de cette étude, il faut différencier les systèmes NiTi en rotation continue des autres instruments endodontiques, dans la mesure où la gestion du risque de fracture est nettement plus difficile à gérer dans le cas de la rotation continue et/ou du Nickel-Titane.

Éléments de compréhension de la fracture des instruments endodontiques La fracture de l’instrument endodontique est le résultat de la convergence d’éléments variables aboutissant à une contrainte d’étirement et/ou de torsion mal évaluée. En fait, l’élasticité de l’instrument et le couple de torsion exercés au niveau de la partie travaillante sont des éléments suffisants à expliquer une fracture plutôt que la seule notion de mauvaise utilisation d’un système quel qu’il soit (6, 7).

Ce point est très important car, ne tenant pas compte de l’aléa thérapeutique clinique ou radiologique, il a une incidence directe sur la mise en cause du praticien. Il s’agit, lors de la consultation préopératoire, d’analyser et de comprendre le risque en fonction des différents éléments influençant la probabilité d’apparition d’une fracture. C’est-à-dire, tout simplement, de juger de la difficulté ou de la faisabilité du cas, sachant que la radiographie rétroalvéolaire a ses limites (11). Dans ce sens, des auteurs (12) ont mis au point un modèle mathématique tenant compte de différents paramètres de l’instrument : configuration, élasticité, superficie longitudinale, superficie de la coupe transversale, module d’élasticité et inertie de torsion. Des contraintes de torsion et de flexion ainsi que la déformation résultante ont été exprimées mathématiquement. Avec ces paramètres géométriques et en fonction de la charge appliquée, la capacité de torsion et le degré de courbure maximale de trois systèmes (ProTaper®, Hero 642®, et Mani NRT®) ont été analysés mathématiquement. Les résultats numériques ont confirmé que le modèle mathématique était une méthode fiable pour analyser les propriétés mécaniques et pour prévoir l’effort et la déformation pendant la préparation du canal radiculaire.

Plus le canal est courbé, plus le risque de fracture est important (figures 1 et 2), les situations extrêmes étant la courbure

FIGURE 1 : Molaire maxillaire obturée et présentant des canaux V très courbés.

Le tableau 3 (ci-dessous) nous donne les différents éléments influençant la probabilité d’apparition d’une fracture. Forme globale du canal Diamètre du canal et qualité de la pulpe Visibilité de la fatigue instrumentale Modalité du travail de l’instrument Caractéristiques intrinsèques de l’instrument

TABLEAU 3 : Éléments influençant la probabilité

FIGURE 2 : Autre molaire obturée et couronnée présentant une courbure importante du canal mésio-vestibulaire.

d’apparition d’une fracture. Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

47


CDF-1640-CahierFC-p45-50_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:43 Page48

Formation continue

FIGURE 3 : Molaire mandibulaire obturée avec une double courbure du canal distal.

FIGURE 4 : Prémolaire mandibulaire présentant une double courbure du canal. Radiographie pré-opératoire.

FIGURE 5 : Prémolaire mandibulaire avec une double courbure du canal. Radiographie post-opératoire.

48

angulaire et la double courbure (figures 3, 4, 5). De plus, il ne faut pas oublier que 80 % des canaux présentent une courbure apicale de 0,5 à 3 mm (13) (figure 6). Un point très important est la variation de diamètre du canal liée à une minéralisation. Une variation brusque du diamètre entraîne un accroissement brutal très localisé de la tension sur l’instrument. C’est probablement une des raisons de la fracture instrumentale dans la technique de l’instrument unique, actuellement préconisée par les industriels. Ce type d’anatomie canalaire demande une préparation progressive de l’ensemble de l’endodonte. Un canal peut être aussi très courbé au niveau du tiers occlusal et être responsable d’un blocage instrumental, d’où l’importance de l’ouverture de la chambre pulpaire (14). Une étude (15) a montré l’importance de la courbure dans la difficulté à retirer le bris instrumental : plus le degré de courbure est grand, plus le temps sera long pour l’intervention. De même, plus la courbure est en position basse, plus la difficulté sera importante, car la contrainte s’exerce à la pointe de l’instrument entraînant ainsi une fracture basse. Le diamètre du canal est un paramètre important, et plus le canal est fin, plus le risque de fracture est important (figure 7). Les situations extrêmes sont la courbure et la double courbure d’un canal minéralisé ou fibreux. La visibilité de la fatigue instrumentale est un point fondamental dans la prévention de la fracture. Une visibilité claire de la déformation de l’instrument en fonction des contraintes exercées lors des procédures endodontiques permettra d’éliminer l’instrument avant sa rupture (figures 8 et 9). Il est beaucoup plus difficile de voir la fatigue au niveau d’un instrument en Nickel-Titane, car la contrainte sera répartie sur l’ensemble de la partie travaillante étant donné le mode de fonctionnement centré et la conicité

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

FIGURE 6 : Molaire mandibulaire obturée et présentant une courbure apicale en mésial. importante. Le module d’élasticité étant très important avec ce type de métal, les fatigues mécaniques ne seront pas visibles cliniquement. La modalité de travail de l’instrument influera énormément sur les contraintes exercées. Un mouvement réalisé manuellement ou une technique utilisée avec un mouvement alternatif permettra de compenser plus facilement les compressions des parois convexes et les tensions des parois concaves tout en empêchant le vissage. Dans le cas de la technique en rotation continue, les contre-angles débrayables utilisant le « quotient de sécurité de Mac Spadden » permettront de diminuer les contraintes et les tensions excessives aboutissant à la fracture. La technique de l’appui pariétal est un exemple de modalité de travail sûr. Elle utilise comme instrument principal le Shaper®du Pr Laurichesse (MM) qui génère une fréquence sonore de 1500 hertz, grâce à un mouvement aléatoire strictement linéaire sans vissage agissant par pression sur les parois du canal. Cette absence de vissage potentialise la sécurité du système.


CDF-1640-CahierFC-p45-50_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:43 Page49

Formation continue

FIGURE 8 : Déformation des spires d’une broche.

FIGURE 9 : Déformation des spires de limes K.

FIGURE 7 : Molaire mandibulaire présentant des canaux fins.

Les caractéristiques intrinsèques des instruments sont aussi un point important dans le risque de fracture. Plus l’instrument présentera des zones de fragilisation possible ou de contraintes importantes, plus le risque de fracture sera grand. Nous donnerons comme exemple le tableau 4 comparant le nombre de points de contact des flûtes avec les parois du canal de trois instruments différents. Dans une double étude (16, 17), les auteurs ont montré que des instruments similaires pouvaient réagir à la contrainte d’une manière différente. Ainsi pour 2 marques de forêts de Gates® de différentes tailles, les fractures pouvaient avoir une localisation différente indépendamment des tests (sens de rotation et contrainte excessive). Aucune différence significative n’est apparue en comparant les fabricants. Ceci signifie probablement que la structure du métal ou le protocole de fabrication peuvent être des éléments déterminants dans le risque de fracture.

Ce point a été confirmé par d’autres travaux (18, 19) en comparant 2 types de forets Peeso® ou de forets de Gates®. Le métal utilisé étant soit de l’acier inoxydable, soit de l’acier-carbone. Des résultats similaires ont été obtenus (20) en montrant que la résistance à la fracture et sa localisation dépendaient du diamètre et de la conception de l’instrument. Ainsi les limes K®, les limes H®, les limes Unifile® et Helifile® présentent un point de rupture très localisé avec des craquelures aboutissant à une fracture élastique. Les limes K-Flex® et Flexofile® présentent une déformation élastique et des fissures axiales. Un résultat identique a été obtenu (21) en comparant les propriétés de torsion de différents instruments (C-Pilot® (VDW), C+® (Maillefer/Dentsply), et lime KCC+ ® (VDW)). De plus, les instruments réagiront différemment à la contrainte en fonction de l’alliage utilisé. Il existe une différence de résistance à la déformation (22) entre 2 instruments en acier

(C-Pilot® (VDW) et C+® (Maillefer/Dentsply)), et un instrument en Nickel-Titane (PathFile® (Maillefer/Dentsply). Les résultats ont montré une résistance à la déformation diminuant dans l’ordre suivant : C+® > C-Pilot® > PathFile®. La vitesse de rotation va être un facteur favorisant dans ce cas de figure (23). Un autre facteur pouvant modifier la résistance de surface des instruments endodontiques (24) est le milieu de travail, en raison d’une plus ou moins grande oxydation de surface. Le sang, lors des biopulpectomies, s’est montré très oxydant. Il serait donc important de nettoyer rapidement les instruments après utilisation. En conclusion de cette première partie, les points importants pour prévenir la fracture sont l’identification des difficultés liées à la dent (ouverture de la chambre pulpaire, la forme et le diamètre du canal), le choix de la technique (méthode de travail et visibilité de la fatigue instrumentale), ainsi que les caractéristiques intrinsèques de l’instrument (modalité de travail de l’instrument et alliage).

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

49


CDF-1640-CahierFC-p45-50_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:43 Page50

Formation continue

Bibliographie 1. Madarati AA, Watts DC, Qualtrough AJ. Opinions and attitudes of endodontists and general dental practitioners in the UK towards the intracanal fracture of endodontic instruments : part 1. Int Endod J. 2008 Aug ; 41(8) : 693-701. 2. Madarati AA, Watts DC, Opinions and attitudes of endodontists and general dental practitioners in the UK towards the intra-canal fracture of endodontic instruments. Part 2.Int Endod J. 2008 Dec ; 41(12) : 1079-87. 3. Tzanetakis GN, Kontakiotis EG, Maurikou DV, Marzelou MP. Prevalence and management of instrument fracture in the postgraduate endodontic program at the Dental School of Athens : a five-year retrospective clinical study. J Endod. 2008 Jun ; 34(6) : 675-8. 4. Ünal GÇ, Maden M, Orhan EO, Sarıtekin E, Teke A. Root canal shaping using rotary nickel-titanium files in preclinical dental education in Turkey. J Dent Educ. 2012 Apr ; 76(4) : 509-13. 5. Alcouffe F. Comment gérer nos nouvelles obligations. Quintessence-Environnement 2001 ; Les cahiers de l’ADF. 6. Simon S, Pertot WJ, Lumley P, Machtou P. Influence de la fracture instrumentale sur le pronostic en endodontie. Clinic-Janvier 2009-Vol 30 : 9-15. 7. Une séance exceptionnelle d’endodontie exécutée par le maestro Clifford Ruddle. JSOP-No 3mars 2009. 8. Orthodontie et endodontie génèrent de plus en plus de litiges. ONCD La lettre, N° 75 Février-Mars 2009.

50

9. Spili P, Parashos P, Messer HH. The impact of instrument fracture on outcome of endodontic treatment. J Endod. 2005 Dec ; 31(12) : 845-50. 10. Panitvisai P, Parunnit P, Sathorn C, Messer HH. Impact of a retained instrument on treatment outcome : a systematic review and meta-analysis. J Endod. 2010 May ; 36(5) : 775-80. 11. Scherman L. À propos du syndrome de la fenestration apicale. CDF, 2010 ; n°1426/1458 : 45-49. 12. Zhang EW, Cheung GS, Zheng YF. A mathematical model for describing the mechanical behaviour of root canal instruments. Int Endod J. 2011 Jan ; 44(1) : 72-6. 13. Kuttler Y. Microscopic investigation of root apexes. J. Am Dent Assoc. 1955 ; 50 : 544-552. 14. Scherman L. L’ouverture de la chambre pulpaire. CDF, 2009 ; n°1403-1404 : 57-59. 15. Fu M, Hou BX, Zhang ZL. The effect of curvature of simulated root canal and location of fragment on removal of broken file from simulated root canal. Hua Xi Kou Qiang Yi Xue Za Zhi. 2010 Dec ; 28(6) : 607-10. 16. Luebke NH, Brantley WA. Physical dimensions and torsional properties of rotary endodontic instruments. 1. Gates Glidden drills. J Endod. 1990 Sep ; 16(9) : 438-41. 17. Luebke NH, Brantley WA. Torsional and metallurgical properties of rotary endodontic instruments. 2. Stainless steel Gates Glidden drills. J Endod. 1991 Jul ; 17(7) : 319-23.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

18. Luebke NH, Brantley WA, Sabri ZI, Luebke JH. Physical dimensions, torsional performance, and metallurgical properties of rotary endodonticinstruments. 3. Peeso drills. J Endod. 1992 Jan ; 18(1) : 13-8. 19. Lausten LL, Luebke NH, Brantley WA. Bending and metallurgical properties of rotary endodontic instruments. IV. Gates Glidden and Peeso drills. J Endod. 1993 Sep ; 19(9) : 440-7. 20. Haikel Y, Gasser P, Allemann C. Dynamic fracture of hybrid endodontic hand instruments compared with traditional files. J Endod. 1991 May ; 17(5) : 217-20. 21. Lopes HP, Elias CN, Amaral G, Vieira VT, Moreira EJ, Mangelli M, Siqueira JF Jr. Torsional properties of pathfinding instruments. Oral Surg Oral Med Oral Pathol Oral Radiol Endod. 2011 Nov ; 112(5) : 667-70. 22. Lopes HP, Elias CN, Mangelli M, Lopes WS, Amaral G, Souza LC, Siqueira JF Jr. Buckling resistance of pathfinding endodontic instruments. J Endod. 2012 Mar ; 38(3) : 402-4. 23. Brantley WA, Luebke NH, Luebke FL, Mitchell JC. Performance of engine-driven rotary endodontic instruments with a superimposed bending deflection: V. Gates Glidden and Peeso drills. J Endod. 1994 May ; 20(5) : 241-5. 24. Saghiri MA, García-Godoy F, Lotfi M, Mehrvazfar P, Aminsobhani M, Rezaie S, Asgar K. The Effect of Some Fluids on Surface Oxidation and Amount of Released Iron of Stainless Steel Endodontic Files. Scanning. 2012 Jun 26.


CDF-1640-CahierFC-p53-57_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:40 Page53

Formation continue

PROTHÈSE

Article publié dans le CDF n° 1517 du 23 février 2012

Lionel ISRAEL Josette ISRAEL Faculté de chirurgie dentaire Paris Descartes

FIGURE 1 : Unité de prise d’empreinte Cerec 3D.

Endocouronnes et CFAO directe ble, biocompatible, sans métal et cela en une séance unique.

Introduction Les nouvelles technologies permettent une solution alternative pour restaurer les molaires délabrées, en réalisant dans une séance unique une restauration entièrement en céramique, grâce à la CFAO, au Cerec et aux techniques de collage, alliant efficacité, rapidité, esthétique, longévité et biocompatibilité.

Face à une molaire dépulpée présentant une importante perte de substance coronaire, nous n’avons pas d’autre alternative, pour restaurer cette dent, que de réaliser un inlay-core ou une reconstitution foulée, autour d’un pivot solidement ancré dans la racine, et de poursuivre la réhabilitation de cette dent avec une couronne classique métallique ou céramo-métallique. Les progrès de la CFAO (Conception et Fabrication Assistée par Ordinateur) permettent une nouvelle approche esthétique, simple, rapide et précise. C’est une technique durable, de haute qualité, réversi-

Présentation La réalisation des endocouronnes en céramique est possible grâce à l’informatique, et à l’utilisation d’un appareil révolutionnaire, le Cerec 3D de la société Sirona qui comprend deux parties : - Une unité de prise d’empreinte composée d’un ordinateur relié à une caméra 3D (d’une résolution de 25 microns), avec un logiciel de CAO (conception assistée par ordinateur) (figure 1). - Une unité d’usinage, véritable machine outil qui va tailler un bloc de céramique

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

53


CDF-1640-CahierFC-p53-57_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:40 Page54

Formation continue

bre pulpaire, il faut imaginer l’axe d’insertion de la couronne, et supprimer la majorité des contre-dépouilles, ce qui correspond souvent à la cavité d’accès qui est pratiquée lors d’un traitement endodontique (de petites contre-dépouilles peuvent subsister, elles ne seront pas enregistrées lors de l’empreinte optique, et seront comblées par du composite lors du collage) (1). FIGURE 2 : Unité d’usinage MCXL. avec une précision d’une trentaine de microns (figure 2). Les matériaux utilisés sont des blocs de céramique feldspathique ou de vitrocéramique renforcée en leucite, qui sont collés sur un support métallique. Les propriétés mécaniques de ces blocs de céramique sont telles que leur dureté et leur résistance à l’abrasion sont très proches de la dent naturelle, tandis que leur résistance à la flexion est plus faible, de l’ordre de 160 M Pa. Cela va conditionner les règles de préparation des dents et les impératifs de morphologies des restaurations. Ces restaurations doivent avoir une épaisseur minimale de 1,5 à 2 mm, pour pouvoir encaisser des charges importantes dans un sens axial. Des forces de torsions ou des forces latérales pouvant entraîner une fracture de la céramique, il faut éviter d’avoir des bords trop fins ou angulés, avec des limites orientées parallèlement aux contraintes, c’està-dire parallèles au plan d’occlusion. Il faut garder à l’esprit que c’est la liaison entre la dent et la céramique, c’est-à-dire le collage, qui détermine la solidité de ce nouvel ensemble, et qui est la garantie de sa pérennité.

Règle de préparation des dents La préparation est extrêmement simple et rapide à réaliser (environ une dizaine de minutes). On commence par le curetage de la lésion carieuse. Au niveau de la cham54

Il n’est pas nécessaire de désobturer les canaux radiculaires, sauf dans certaines situations où la préparation manque cruellement de rétention. On désobture alors l’entrée des canaux sur 1 à 2 mm, afin d’améliorer l’ancrage, la caméra 3D n’ayant aucun problème à enregistrer cette zone. Ensuite il faut réaliser un trottoir cervical, en gardant un maximum de hauteur des parois, ce qui correspond à une « mise à plat » de la dent. Ce trottoir cervical devra être horizontal, parallèle au plancher et à la face occlusale des dents, en ayant une largeur minimale de 1 mm, au moyen d’une fraise à épaulement de grand diamètre (3). Une taille supra gingivale facilitera la prise d’empreinte, ainsi que le collage, tout en augmentant la rétention, sans préjudice esthétique (il n y a pas de liseré métallique à cacher) (figures 3 et 4).

L’empreinte optique Afin de supprimer des différences de réfraction des différents tissus de la cavité buccale, on vaporise sur le secteur concerné au moyen d’un aérographe, une fine couche de poudre de dioxyde de titane de couleur blanche, le plus finement et le plus régulièrement possible (figure 5) (2, 3, 4, 6). On introduit alors la caméra 3D pour visualiser aussitôt la zone à enregistrer sur l’écran de l’ordinateur. Il faut orienter la caméra en choisissant une vue complète de la préparation et des dents adjacentes, qui correspond à l’axe d’inser-

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

FIGURE 3 : On note une 46 délabrée.

FIGURE 4 : Vue clinique après la taille de la préparation.

FIGURE 5 : Poudrage de la préparation au dioxyde de titane. tion de la future prothèse, et aussi au futur axe d’usinage. On enregistre cette image en donnant une impulsion sur une pédale. Il est possible de prendre plusieurs clichés pour enregistrer la surface complète des dents adjacentes, ou de certaines zones en contre-dépouille, en changeant légèrement l’orientation de la caméra. Il faut savoir que trop de clichés risquent de nuire sur la précision de l’empreinte, le logiciel faisant des moyennes sur les différentes mesures enregistrées.


CDF-1640-CahierFC-p53-57_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:40 Page55

Formation continue

Dans un deuxième temps avec un silicone d’occlusion, on enregistre l’empreinte de la dent antagoniste sur le mordu, puis on réalise une nouvelle empreinte optique en essayant d’orienter la caméra de façon identique à la première empreinte (après avoir coupé les débordements du mordu et repoudré cette zone). Le logiciel va effectuer la superposition des deux images en intégrant donc le volume de la dent antagoniste.

FIGURE 6 : Vue complète de l’écran du Cerec, la grande fenêtre de gauche montrant en temps réel l’image donnée par la caméra.

FIGURE 10 : Vue de la couronne avec visualisation des contacts de la dent antagoniste.

FIGURE 7 : Modélisation de l’empreinte optique,

FIGURE 11 : Utilisation de l’outil « cut » pour

la ligne bleue marquant les limites de notre préparation.

visualiser des coupes de la restauration.

FIGURE 8 : « Squelette » de la couronne (ligne de la préparation : bleue, ligne de grand contour : rose, ligne de sommet des cuspides : turquoise, ligne de fond des sillons : verte).

FIGURE 12 : Vue de l’intrados de l’endocouronne.

FIGURE 9 : Vue mésiale de la couronne avec

FIGURE 13 : Vue externe de la couronne et du point d’ancrage.

Modélisation À l’écran apparaît une vue en 3 D des dents enregistrées. Il est possible de tourner le modèle virtuel dans tous les plans de l’espace pour bien observer tous les détails, ceci à une échelle 20 fois supérieure à la taille réelle de la préparation. Comme au laboratoire de prothèse, on réalise un die virtuel, en séparant la préparation des dents adjacentes, puis on surligne les limites de notre préparation au moyen de la souris. À cette étape, le logiciel nous propose de choisir entre des dents jeunes, adultes ou matures et aussitôt se matérialise sur l’écran une couronne, qui se déforme, pivote, se déplace et s’ajuste automatiquement au volume à combler. On visualise alors à l’écran la proposition de cette couronne faite par le logiciel, qui est adaptée aux dents voisines et antagonistes. Avec des outils informatiques, il est possible d’opérer très facilement des modifications de morphologie ou de position de la couronne. Les contacts avec la dent antagoniste sont affichés avec un code de couleur correspondant à des intensités de contacts (vert : contact faible, jaune : contact moyen, et rouge : contact fort) (figures 6 à 13). Il en est de même pour les points de contacts proximaux, qui deviennent visi-

visualisation de l’intensité du point de contact.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

55


CDF-1640-CahierFC-p53-57_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:40 Page56

Formation continue

bles lorsque l’on supprime l’affichage des dents voisines. Il est possible d’intervenir également sur les lignes de structures de cette couronne (ligne de grand contour, ligne de sommet des crêtes, ligne de fond de sillon). Le logiciel permet également d’effectuer des coupes de la prothèse dans tous les plans pour vérifier les épaisseurs de céramique. Il existe un paramétrage du logiciel qui affine ces réglages, dont l’épaisseur de l’espacement et l’épaisseur du joint de collage. Toutes les restaurations céramique doivent impérativement avoir une insertion passive, qui est obtenue par un espacement de l’ordre de 20 à 50 microns correspondant au film qu’occupera le composite de liaison. Cela va permettre d’éviter un effet de « coin » et une fracture de la restauration, tandis que l’épaisseur du joint de collage doit être proche de 0 (5).

Choix de la teinte À l’aide d’un teintier nous choisissons la teinte la plus appropriée Il est toujours possible de foncer un collet lors du maquillage mais jamais l’inverse. Il existe des blocs céramique stratifiés composés de quatre couches avec des teintes saturées au collet, et de plus en plus claires vers le bord occlusal, permettant de restituer un dégradé de teinte très proche de la dent naturelle. La taille des blocs à utiliser nous est donnée par le logiciel. Il existe des blocs de différentes tailles : 5-8-10-12-14 mm.

port dans l’unité d’usinage et on lance la fabrication de la couronne, qui est réalisée par deux fraises diamantées tournant à grande vitesse sous un puissant spray d’eau et d’huile sans autre intervention. En fonction du modèle d’unité d’usinage (classique ou MCXL) et du choix de la vitesse d’usinage, il faut entre 8 à 20 minutes pour tailler la couronne (figures 14 et 15). En cas d’incident (fracture ou usure d’une fraise), le logiciel détecte une anomalie, interrompt l’usinage et indique la marche à suivre pour y remédier. En fin d’usinage, il suffit de sectionner et de régulariser la petite languette résiduelle qui relie la couronne au bloc de céramique pour pouvoir faire l’essayage de notre couronne.

FIGURE 14 : Usinage du bloc de céramique par deux fraises diamantées.

Essayage La caméra 3D n’enregistrant pas les éventuelles contre-dépouilles, si la couronne est difficile à insérer, seuls les points de contacts peuvent être en cause. La couronne étant fragile avant le collage, le contrôle de l’occlusion doit être réalisé très délicatement. Il faut de préférence utiliser un silicone light pour répartir les contraintes et maintenir l’endocouronne, puisqu’il n’y a pas de friction avec la préparation (résultat de l’espacement et de l’insertion passive).

Glaçage

FIGURE 15 : Couronne en fin d’usinage encore reliée au bloc de céramique par une fine languette.

FIGURE 16 : Collage sous digue d’une endocouronne.

La couronne obtenue par usinage est d’un aspect mat et légèrement rugueux. Il est nécessaire, pour lui donner un aspect naturel et brillant, d’effectuer un polissage soigné au moyen de meulettes caoutchouc de granulométrie différentes.

Usinage Après avoir sélectionné le bloc de céramique approprié, on le clipse sur son sup56

Le résultat esthétique sera bien meilleur en maquillant la couronne. Cette étape ne prend que quelques minutes : sur la cou-

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

FIGURE 17 : Résultat en bouche.


CDF-1640-CahierFC-p53-57_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:40 Page57

Formation continue

ronne dégraissée et parfaitement sèche, on applique de la glaçure au pinceau, puis nous caractérisons la dent en maquillant le fond des sillons avec des colorants appropriés. Selon les besoins il reste possible de foncer un collet ou de marquer des taches de calcification, ou d’accentuer certaines zones. L’endocouronne est posée sur une pâte réfractaire pour la maintenir, et le cycle de glaçage (d’une durée totale de 10 mn) du four à céramique est enclenché, pour obtenir une montée en température progressive jusqu’à atteindre 950 °C.

Collage Le collage sera effectué sous digue, et la dent concernée sera clampée en utilisant une digue fine, ce qui facilitera le collage et évitera d’éventuels résidus de colles au niveau des dents adjacentes (figure 16). Nous réalisons un sablage de la dent grâce au Prep K1 (EMS) avec spray d’oxyde d’alumine et d’eau pour améliorer l’état de surface de la dent. L’intrados de l’endocouronne sera mordancé par de l’acide fluorhydrique pendant 1 minute, puis rincé abondamment 1 minute (sous l’eau du robinet, puis dans une cuve à ultra sons) et soigneusement séché. Nous appliquons le silane (céramique primer) et nous attendons l’évaporation complète du solvant (3).

Il existe plusieurs types de colles, autopolymérisables, photopolymérisables ou duales utilisant des protocoles de collages différents. Elles peuvent également être auto-adhésives (ou auto-mordançantes).

provoquant la sortie de l’excédent de composite. Une brève photopolymérisation de 2 à 3 secondes fige les excès de colle que nous enlevons à la sonde et avec une petite curette CK6.

Notre choix s’est porté sur le Relyx Arc, colle duale qui a de bonnes valeurs adhésives et nous appliquons donc le protocole du fabricant : Application d’acide orthophosphorique sur l’émail et la dentine 20 secondes, rinçage 30 secondes et séchage modéré sans déshydratation de la dent. Avec un applicateur, on tamponne l’adhésif (schotchbond), puis jet d’air doux pour faire évaporer le solvant suivi de la photopolymérisation de l’adhésif 10 secondes avec une lampe à led.

La photopolymérisation au niveau de toutes les faces permet le durcissement rapide du composite au niveau de toute la périphérie du joint, mais ce n’est qu’au bout de 9 minutes après le début du mélange que nous avons la polymérisation complète du composite de collage.

Sur un bloc, nous mélangeons les 2 composants du composite de collage et déposons le mélange dans la chambre pulpaire et sur l’intrados de l’endocouronne, qui est alors insérée et maintenue sous pression,

Nous pouvons alors procéder aux finitions en utilisant des fraises diamantées bague rouge ou jaune, et des meulettes caoutchouc de différentes granulométries, sans oublier le contrôle de l’occlusion et du passage du fil de soie sur les faces proximales. Ce domaine du collage est en perpétuel révolution avec la mise sur le marché de nouvelles colles de plus en plus performantes, et reste la clé de voûte de cette dentisterie adhésive (figure 17).

Bibliographie 1) Fages M, Raynal j, Felenc S, Margerit J. Les endocouronnes : apport de la CFAO directe du Cerec 3D. Stratégie prothétique, février 2008 ; 8 : 15-22.

4) Moussally C, Coudray L, Attal JP. L’empreinte optique. Alternatives. Quint Internnat. 2007 ; 33, 5 : 23-32.

2) Moussally C. Les inlays céramiques avec l’utilisation d’un système 3 D en pratique quotidienne, CDF, 2005 ; 1209-1210 : 41-55.

5) Raynal J. Reconstruction céramique d’une dent non vitale : apport de la CFAO directe biogénérique du CEREC. Stratégie prothétique, 2007 ; l 5 : 361-367.

3) Moussally C, Chieze JB, Attal JP. Inlay céramique par CFAO directe. Inf Dent. 2007 ; 29 : 16711674.

6) Fasbinder DJ. Clinical performance of chairside CAD/CAM restorations. J Am Dent Assoc. 2006 Sep ; 137 Suppl : 22 S-31 S.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

57


CDF-1640-CahierFC-p59-63_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:23 Page59

PROTHÈSE

Formation continue Article publié dans le CDF n° 1612 du 27 mars 2014

Jean-François NGUYEN Maître de Conférences des Universités Praticien-Hospitalier Faculté de chirurgie dentaire de Paris 7 (Garancière)

FIGURE 1 : Situation initiale.

À propos d’un cas de réalisation d’une prothèse complète immédiate Passer de « partiel » à « total » en matière d’édentement est une situation délicate à gérer pour le patient au niveau psychologique, et pour le praticien sur le plan technique. Il existe trois stratégies thérapeutiques : la prothèse complète immédiate, la prothèse transitoire et la prothèse à recouvrement radiculaire.

FIGURE 2 : Radio panoramique.

Un patient de 70 ans, fumant 5 cigarettes par jour, en bonne santé générale, vient en consultation pour une réhabilitation orale, avec une demande esthétique et fonctionnelle.

À l’examen exobuccal, la dimension verticale d’occlusion est maintenue par les contacts entre 34-24 et 14-44, avec une égalité entre l’étage moyen et inférieur. On constate à l’examen endobuccal une inflammation gingivale marquée et des mobilités dentaires de 2 à 4 (figure 1). L’examen radiographique révèle un rapport couronne racine/couronne clinique défavorable (figure 2), et le bilan long cône montre une alvéolyse à 80 % sur les dents maxillaires et mandibulaires sauf pour 34 et 35 qui présentent une alvéolyse à 50 %.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

59


CDF-1640-CahierFC-p59-63_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:23 Page60

Formation continue

Le patient présente une parodontite chronique sévère nécessitant l’avulsion des dents à faible pronostic et une thérapeutique prothétique permettant la restauration des différentes fonctions (esthétique, manducation, phonation). FIGURE 3 : Porte-empreinte à ouverture occlusale.

FIGURE 7 : Désinsertion du porte-empreinte individuel à ouverture occlusale.

Décision thérapeutique

FIGURE 4 : Enregistrement des bords périphériques. FIGURE 8 : Empreinte secondaire maxillaire.

FIGURE 5 : Première couche à l’Impression Paste®. FIGURE 9 : Empreinte secondaire mandibulaire.

FIGURE 6 : Meulage des zones de surpression mises en évidence par la première couche à l’Impression Paste®. 60

FIGURE 10 : Maquette d’occlusion.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

Il a été décidé la réalisation au maxillaire d’une prothèse amovible complète immédiate et à la mandibule d’une prothèse amovible partielle transitoire avec la conservation de 34 et 35. Dans un premier temps, les dents mandibulaires et les 17, 14 et 28 sont extraites, puis après 7 semaines de cicatrisation, les empreintes préliminaires sont réalisées. La prothèse amovible complète immédiate est une prothèse d’usage, conçue et réalisée à partir d’un édentement de classe I de Kennedy, avant l’extraction des dents restantes et insérée immédiatement après (3, 4, 5, 13, 14). Empreintes secondaires avec choix du porte-empreinte individuel (PEI) (en fonction de la situation clinique) L’empreinte secondaire en prothèse complète a pour objectif l’enregistrement des caractéristiques morphologiques et physiologiques des surfaces d’appuis, de la position, du volume de la zone de réflexion muqueuse. À ces objectifs, la prothèse immédiate nécessite l’enregistrement de la position et de la morphologie des dents restantes, sans les extraire involontairement (3, 4, 7 ,8 ,12 ,13 ,14). En fonction de la situation clinique, différentes techniques d’empreinte avec leur PEI associé sont proposées (2, 5, 6, 7, 9,10, 11, 13, 14) : • une technique avec un PEI conventionnel, dans le cas d’une faible mobilité dentaire, sans ou avec peu de zones rétentives. • une technique avec un PEI à volet vestibulaire amovible ou un PEI sans volet,


CDF-1640-CahierFC-p59-63_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:23 Page61

Formation continue

dans le cas de fortes zones rétentives, avec une mobilité faible à élevée, • enfin, une technique avec un PEI fenêtré ou avec un couvercle occlusal amovible et présentant une mobilité dentaire élevée, lorsqu’il n’y a pas ou peu de zones rétentives.

FIGURE 11 : Plan d’occlusion parallèle au plan de Camper.

Dans le cas présent, la mobilité des dents maxillaires est associée à des zones faiblement rétentives, et nous avons choisi un PEI à ouverture occlusale, avec un couvercle amovible au maxillaire et un PEI classique à la mandibule (figure 3). Les dents restantes contiguës ont été solidarisées avec de l’adhésif afin de minorer le risque d’avulsion involontaire. Après avoir ajusté les limites du PEI, le joint périphérique en latéral et en postérieur sont enregistrés à la pâte de Kerr® verte et à la Permadyne orange® en antérieur (figure 4). Un premier surfaçage à une pâte à l’oxyde de zinc (Impression Paste SS White®), au niveau des zones édentées, permet d’améliorer la stabilité et met en évidence les zones de surpression qui sont fraisées (figures 5 et 6). Les bords et l’intrados sont enduits d’adhésifs tandis qu’un agent séparateur (huile de vaseline) est appliqué au niveau de l’intrados de l’opercule occlusal. Le second surfaçage est réalisé avec un matériau à faible viscosité (Permlastic light®). Après la prise du matériau, le couvercle occlusal est retiré, l’empreinte désinsérée délicatement tout en maintenant les dents antérieures avec les doigts (figures 7 et 8). L’empreinte à la mandibule est réalisée classiquement avec l’enregistrement des bords périphériques à la pâte de Kerr suivi du surfaçage au Permlastic light® (figure 9). Montage des modèles secondaires sur articulateur Le bourrelet de la maquette d’occlusion maxillaire est prolongé au niveau du secteur antérieur par du silicone pour déterminer le point inter-incisif (figure 10). Le modèle maxillaire est monté via une table

FIGURE 14

FIGURE 12

FIGURES 12, 13 ET 14 : Essayage fonctionnel.

FIGURE 13 Essayage fonctionnel La dimension verticale d’occlusion et la relation intermaxillaire doivent être minutieusement vérifiées et validées avant la polymérisation (figures 12, 13, 14). La position et la dépressibilité du joint postérieur sont délimitées à l’aide d’un brunissoir et reportées sur le modèle secondaire. de transfert. Après avoir déterminé la dimension verticale d’occlusion, la relation intermaxillaire est enregistrée en relation centrée (figure 11). Le modèle mandibulaire est ensuite monté.

Montage des dents antérieures La réalisation d’une clé vestibulaire et occlusale en silicone de haute viscosité enregistre la forme et la position des bords libres

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

61


CDF-1640-CahierFC-p59-63_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:23 Page62

Formation continue

FIGURE 15 : Clé vestibulaire.

FIGURE 19 : Avulsion des dents restantes et plastie osseuse. FIGURE 16 : Report du sondage sur le modèle secondaire.

FIGURE 17 : Modèle secondaire modifié.

des dents antérieures (figure 15). Dans le cas où le patient souhaite conserver son esthétique initiale, la reproduction de malpositions, formes et dimensions des dents originales permet de caractériser le montage et favorise l’intégration psychologique de la prothèse. Un sondage des poches est nécessaire pour prendre en compte la résorption osseuse. Ces valeurs sont reportées sur le modèle secondaire (figure 16) pour permettre la préparation du modèle lors du meulage des dents en plâtre (figure 17). Polymérisation Un guide chirurgical est produit à partir du modèle des dents rasées (figure 18). Par ailleurs, la réalisation d’un duplicata de la prothèse complète immédiate peut être demandée au prothésiste à ce stade. Ce duplicata pourra être utilisé lors du délai de laboratoire pour la réfection de base ultérieure.

FIGURE 18 : Guide chirurgical. 62

Mise en place Un lambeau de pleine épaisseur est réalisé pour l’avulsion des dents et la plastie

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

des crêtes avec le guide chirurgical (1, 11) (figure 19). Ce dernier, placé sous pression, peut mettre en évidence des surfaces blanchies. Ces surfaces correspondent à des zones qui feront l’objet d’une résection osseuse. L’absence de blanchiment de la muqueuse doit être vérifiée avant de suturer et poser les prothèses (figure 20). Après avoir prodigué les conseils post-opératoires, il faut insister pour que le patient ne retire pas sa prothèse complète immédiate pendant 48 h. Il est aussi conseillé au patient de manger mou ou liquide (7, 11). Suivi et pronostic Après 48 h, la prothèse est retirée par le praticien. Des modifications légères de la base prothétique sont nécessaires et l’équilibration occlusale peut être commencée. Pendant une semaine, la prothèse est portée 24 h sur 24 pour contrôler l’hématome (7) (figures 21, 22). L’occlusion est équilibrée sur le plan statique puis dynamique pendant 1 mois. Avec une perte osseuse de 30-40 % la première année, une réfection de base peut


CDF-1640-CahierFC-p59-63_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:23 Page63

Formation continue

FIGURE 21 FIGURE 20 : Prothèses posées.

être nécessaire malgré les précautions mises en œuvre pour simuler la résorption osseuse (7).

Conclusion En permettant au patient de conserver ses dents antérieures jusqu’à la pose de la prothèse complète immédiate, cette technique lui rendra service. Toutefois, elle nécessite une importante rigueur dans sa réalisation, et il faut informer le patient de la nécessité d’une ré-intervention l’année suivante. Enfin, cette thérapeutique peut aussi être la première étape vers un traitement prothétique implantaire.

FIGURE 22

FIGURES 21 ET 22 : Résultat après une semaine.

Bibliographie 1. Apap G. La prothèse immédiate - La technique chirurgicale. Les cahiers de prothèse, 1978 ; 24 : 85-97.

8. Herbout B, Postaire M. Prothèse complète immédiate d’usage. Actualisation de la technique. Les cahiers de prothèse, 2000 ; 111 : 55-65.

2. Bolouri A. Double-custom tray procedure for immediate dentures. Journal of prosthetic dentistry, 1977 ; 37(3) : 344-348.

9. Navarro M, La prothèse immédiate - Le laboratoire. Les cahiers de prothèse, 1978 ; 24 : 6575.

3. Buchard P. La prothèse immediate - Introduction. Les cahiers de prothèse, 1978 ; 24 : 37-40.

10. Nguyen JF, Douyère D, Hüe O. Le porteempreinte individuel en prothèse immédiate. Alternatives, 2007 ; 34 : 57-63

4. Buchard P. La prothèse immediate - Principes généraux. Les cahiers de prothèse, 1978 ; 24 : 45-60. 5. Daas M, Pompignoli M. L’empreinte secondaire maxillaire en prothèse immédiate d’usage. Alternatives, 2003 ; 20 : 29-35. 6. Escure S, Hue O. Les empreintes en prothèse complète immédiate : quelques propositions techniques. Revue d’odontostomatologie, 1995 ; 24(3) : 153-162. 7. Hue O, Berteretche MV. Prothèse complète Réalité clinique Solutions thérapeutiques. Quintessence internationale, Paris, 2004.

11. Pompignoli M, Postaire M, Roux D. La prothèse complète immédiate. Quintessence internationale, Paris, 2004. 12. Postaire M, Naser B. La prothèse immédiate d’usage. Information dentaire, 1998 ; 80(10) : 669-675. 13. Rignon-Bret C, Rignon-Bret JM. Prothèse amovible complète, Prothèse immédiate, Prothèse supraradiculaire et implantaire. Édition Cdp, 2002. 14. Swenson M. Complete denture. 2nd edition. St-Louis : Mosby Company, 1947.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

63


CDF-1640-CahierFC-p65-67_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:41 Page65

ORTHODONTIE

Formation continue Article publié dans le CDF n° 1540-1541 du 13-20 septembre 2012

Étienne LABASSY Ancien Assistant Hospitalo-Universitaire (Paris Descartes)

Solution simple à cas complexe : apport de l’égression orthodontique La gestion d’un problème esthétique est souvent délicate du fait d’une demande importante et légitime de nos patients. Les traitements préservant les tissus ou idéalement créant du tissu parodontal sont à privilégier.

La gestion d’un excès tissulaire est beaucoup plus simple que de tenter de recréer les tissus durs et mous disparus lors d’une cicatrisation préalable. Dans ce contexte, l’égression orthodontique présente un intérêt particulier sur le plan esthétique, car elle permet un réaménagement et une augmentation des tissus. L’égression est un déplacement induit par une force verticale agissant dans le sens de l’éruption. Ce déplacement est relativement facile à réaliser et requiert des forces de faible intensité. La compression est négligeable étant donné l’axe de déplacement

par rapport à l’alvéole, par contre elle génère des contraintes de traction dans toutes les zones du ligament alvéolo-dentaire. Une tension appliquée sur le ligament parodontal va allonger les fibres supracrestales et être à l’origine de stimulation ostéoblastique et d’une apposition osseuse. L’égression orthodontique lente est obtenue par l’application de forces légères (30 à 60 g) et continues provoquant un mouvement lent pendant lequel la dent emporte avec elle son système d’attache. Ce mouvement peut être utilisé pour niveler un défaut intra-osseux superficiel. Il permet d’augmenter la hauteur de la gencive attachée,

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

65


CDF-1640-CahierFC-p65-67_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:41 Page66

Formation continue

de corriger une récession vestibulaire ou de prévenir tout effondrement de crête. L’égression orthodontique peut constituer une alternative de choix afin de minimiser le délabrement osseux sur les dents adjacentes.

(os et gencive) dans le sens du mouvement. Lors du déplacement dentaire apparaît une zone radioclaire périapicale asymptomatique qui disparaît lors de la période de contention de deux mois environ qui fait suite à l’égression. Le tissu parodontal translaté avec le mouvement orthodontique va être réaménagé.

L’extrusion orthodontique Elle consiste à déplacer verticalement la dent fracturée à travers le parodonte en exerçant une force orthodontique lourde dans l’axe de la dent. Il est important d’éviter les mouvements parasites sur les dents support d’ancrage. La vitesse de déplacement de la dent peut être augmentée par des fibrotomies hebdomadaires réalisées au bistouri dans le sulcus afin de couper les fibres supra-crestales selon un protocole défini par Pontoriero et al. en 1987 (3). Un déplacement de près de 3 mm par mois peut-être obtenu. Lorsque la distance entre la crête osseuse et le rebord dentaire résiduel est suffisante pour le rétablissement d’un espace biologique, une période de temporisation par contention est instaurée pendant une période d’environ deux mois pour permettre la réorganisation des tissus parodontaux.

L’égression orthodontique Elle est utilisée comme un moyen pour déplacer le parodonte avec la dent afin de créer un excès tissulaire qui pourra être ensuite aménagé dans un but esthétique. Il faut, pour cela, exercer une force orthodontique légère et continue de 50 à 75 gr/mm2 (4), et ne pas réaliser de fibrotomie sulculaire, ce qui permet d’obtenir une apposition osseuse après étirement des fibres supra-crestales et in fine une translation du parodonte. Ces forces légères et continues (modelage-remodelage) sur un parodonte non inflammatoire sont très intéressantes dans tous les cas où nous désirons emporter un maximum de parodonte 66

Certains auteurs vont même jusqu’à proposer une différenciation de l’épithélium sulculaire en épithélium gingival (1), de consistance ferme et de même aspect clinique qu’un épithélium gingival constitutif sain (de couleur rose pâle, en piqueté d’orange, de contour festonné). Il y aurait donc un phénomène d’éversion gingival. L’application directe de ce concept, est le traitement des récessions parodontales localisées par égression lente (2).

FIGURE 1

FIGURE 2

Cas clinique Une patiente de 35 ans se présente en consultation pour des mobilités dentaires importantes surtout au niveau incisif maxillaire (mobilité IV des incisives centrales), ainsi qu’au niveau des dents de 6 ans. Cette situation parodontale est associée à une classe II, 2 squelettiques avec une supraclusie incisive créant une situation de verrouillage de l’occlusion interdisant tout mouvement de diduction (figures 1 à 4). L’examen clinique et radiologique ainsi que microbien conclut à la présence d’une parodontite agressive localisée, due à des germes pathologiques (A.A), en quantité importante. Après motivation et traitement local associés à une antibiothérapie ciblée, on assiste à une stabilisation de la maladie parodontale par une amélioration des données cliniques et microbiologiques (Disparition de A.A). En fin de traitement parodontal subsiste des mobilités importantes de 11 et 21 due

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

FIGURE 3

FIGURE 4 FIGURES 1, 2, 3 ET 4 : Parodontite agressive localisée avec verrouillage de l’occlusion et grande mobilité de 11 et 21.


CDF-1640-CahierFC-p65-67_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 11:41 Page67

Formation continue

FIGURE 5

FIGURE 9

11 et 21 ont été dépulpées et égressées progressivement. Ce mouvement est suivi d’un meulage de ces dents. Ce mouvement a permis une formation osseuse et gingivale pour éviter les destructions tissulaires et consécutives à des extractions classiques. Par la suite, la 11 et la 21 ont été extraites (figures 6 et 7).

FIGURE 6

Une mécanique de fermeture d’espaces aidée par des micros-vis (ancrage absolu) (figure 8) a permis d’obtenir un résultat satisfaisant pour la patiente (figures 9 et 10). Ce résultat pourrait être amélioré par la prothèse.

FIGURE 7 FIGURE 10 FIGURES 9 ET 10 : Résultat final.

Conclusion

FIGURE 8 FIGURES 5, 6, 7 ET 8 : Égression orthodontique lente utilisant les micro-vis.

au verrouillage occlusal (interférences) et à la perte du support parodontal. Un traitement orthodontique a été proposé : il consiste à l’extrusion orthodontique de 11 et 21 et à la fermeture des espaces par une mésialisation et un recul des dents maxillaires permettant un déverrouillage de l’occlusion (figure 5).

Cet exemple permet de constater que la rapidité thérapeutique n’est pas toujours gage de succès, et que la connaissance de la physiologie osseuse et parodontale permet de proposer des solutions stables et durables, laissant aux patients le choix de pouvoir garder ses dents.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

67


CDF-1640-CahierFC-p69-72_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:20 Page69

CAS CLINIQUE

Formation continue Article publié dans le CDF n° 1613-1614 du 3-10 avril 2014

Ralph BADAOUI Maxime LUCAS Frédéric COURSON Service d’odontologie de l’hôpital Bretonneau (AP-HP) et Université Paris Descartes

Réhabilitation esthétique d’un sourire atteint de fluorose grave Les défauts de structure amélaire se traduisent par des dyschromies. La présence de ces tâches peut être mal vécus chez certains patients.

La présence de taches au niveau du secteur esthétique du sourire est un élément qui peut être vécu comme un véritable complexe pour certains patients, notamment lors du passage à l’adolescence. La détermination de l’étiologie exacte de ces anomalies qualitatives de structures permet de poser le bon diagnostic, élément indispensable à la mise en place d’une thérapeutique adaptée. Il existe principalement 3 familles de défauts de structure amélaire qui se traduisent par des dyschromies : les White Spots et les perturbations de l’amélogénèse, héréditaires ou acquises (2, 4, 5).

Les taches blanches de l’émail, connues sous le nom de « White Spots » (WS) Elles sont le résultat de l’instauration d’un processus carieux post-éruptif. La libération massive et cyclique d’acides organiques entraîne la dissolution progressive de la phase minérale. L’alternance de phase de dissolution/reminéralisation associée à l’organisation prismatique de la phase cristalline de l’émail, fait que cette dissolution ne progresse pas toujours de façon érosive. Aux stades précoces, elle est non cavitaire.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

69


CDF-1640-CahierFC-p69-72_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:20 Page70

Formation continue

Les défauts de structure, sans altération de volume Responsables de dyschromie de la denture permanente, ils peuvent également être le résultat d’une perturbation de l’amélogénèse affectant principalement l’organe dentaire au cours du stade d’édification coronaire, soit généralement avant 3 ans pour les incisives permanentes. Le défaut est donc surtout qualitatif. Dans cette catégorie, outre les anomalies de structure héréditaires que nous n’aborderons pas ici (type amélogénèse imparfaite), la plupart sont d’origine systémique. Parmi ces anomalies présentant une porosité amélaire accrue, on retrouve : La fluorose (F) Son expression dépend de la susceptibilité individuelle, de la dose ingérée, de la durée et de la période d’exposition aux fluorures (7). Les hypominéralisations molaire incisive (MIH) Leurs étiologies sont actuellement considérées comme multifactorielles, sachant que les facteurs étiologiques sont de nature systémique (6).

Les hypominéralisations d’origine traumatique (HT) Ce sont des séquelles sur la denture permanente survenant à la suite de traumatisme en denture temporaire. Il en ressort donc quatre groupes principaux d’étiologie différente : les WS, les fluoroses, les traumatismes, et les MIH. Suivant l’origine de ces lésions amélaires, la thérapeutique peut être différente, car une technique d’infiltration de résine n’est pas utilisable dans tous les tableaux cliniques. Dans cet article, l’accent est porté sur la gestion d’un cas de fluorose grave, d’après la classification de Dean (Voir tableau cidessous). Elle résulte d’une intoxication chronique de fluor, causée par des prises en quantité supérieures au seuil toléré (dose maximale 0,05 mg/kg/24H) (1). La sévérité dépend de la quantité de fluor ingéré, ainsi que de la durée de l’exposition en fonction du stade d’évolution de la dent. Son origine endémique résulte d’une présence de fluor en quantité élevée dans l’eau de certains pays. Si la teneur en fluor des eaux de surface est généralement faible (0,01 à 0,03 ppm,), des teneurs supérieures à 25 ppm peuvent être observées.

Classification de Dean

70

Critères

Description de l’émail

Dent normale

Aspect lisse et glacé, couleur blanc crème, surface claire et translucide.

Suspicion

Quelques taches blanches, ou points blancs.

Fluorose très légère

Petites taches opaques (évoquant des morceaux de papier blanc qui seraient collés sur la dent), couvrant jusqu’à 25 % de la surface de la dent.

Fluorose moyenne

Des zones opaques blanches couvrant jusqu’à 50 % de la surface de la dent.

Fluorose modérée

Toute la surface de la dent est touchée, avec une usure marquée des surfaces en contact. Des taches brunes sont parfois présentes.

Fluorose grave

Toute la surface de toutes les dents est touchée, avec piqûres discrètes éparses ou groupées. Présence de taches brunes.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

L’OMS a défini que la concentration optimale du fluor dans les eaux de consommation devait être inférieure à 1 mg/l. Pour traiter ce type de lésions, la dentisterie offre un arsenal thérapeutique étendu, allant de l’éclaircissement, la micro-abrasion à la pose de facette céramiques, voire de couronnes céramo-céramiques. Selon le gradient thérapeutique et dans un souci de préservation tissulaire, la thérapeutique mise en œuvre était d’infiltrer la partie amélaire des dents afin de modifier l’indice de réfraction de la lumière (10).

Cas clinique Un jeune Sénégalais de 24 ans, en bonne santé générale, se présente au service de l’hôpital Bretonneau à Paris (figure 1). Il nous rapporte que les habitants de son village natal possédaient tous un sourire identique, et ainsi, depuis son arrivée en France, l’image qu’il présentait en souriant le complexait de plus en plus. En effet, il avait remarqué que son sourire ne s’inscrivait plus dans le « schéma esthétique » de la population actuelle.

Plan de traitement Il se compose de 2 grandes parties (3, 9, 11). L’éclaircissement maximal des dents par traitement d’éclaircissement externe ambulatoire, potentialisé préalablement par une séance de micro-abrasion.

Une séance de finition par traitement de macro-abrasion avec stratification de composite au niveau des endroits dysplasiques amélaires, puis l’infiltration résineuse grâce à une résine type TEGDMA pour pérenniser la thérapeutique et modifier la réflexion de la lumière incidente. La première séance débute par une microabrasion des faces vestibulaires des dents antérieures (figure 2). Cette technique n’a


CDF-1640-CahierFC-p69-72_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:21 Page71

Formation continue

FIGURE 1 : Patient présentant une fluorose grave. Présence de taches brunes et de dysplasies amélaires.

pas pour but de corriger la coloration des dents comme pour un cas de fluorose légère, mais simplement de créer une micro-rugosité laissant le produit d’éclaircissement externe agir en profondeur. Le produit restera actif sur les dents pendant 30 secondes à 1 minute (Opalustre/Ultradent). Une fois la micro-abrasion réalisée, le traitement d’éclaircissement externe ambulatoire pourra débuter pendant une durée de 15 jours. Des gouttières (figure 3) sont confiées au patient avec des seringues de peroxyde de carbamide à 16 % (SDI/PolaNight 16 %).

FIGURE 5 : Macro-abrasion des zones les plus marquées.

FIGURE 2 : Micro-abrasion avec la pâte opalustre (acide chlorhydrique à 6,6 %/Ultradent).

FIGURE 6 : Mise en place d’une couche de composite opaque au niveau des zones brunes dans le but de les masquer.

FIGURE 3 : Essayage des gouttières d’éclaircissement externe.

FIGURE 7 : Stratification de composite de teinte

FIGURE 4 : Résultat à 2 semaines, l’effet du peroxyde d’hydrogène a permis un éclaircissement important, les taches les plus profondes persistantes seront traitées par macro-abrasion.

dentinaire pour imiter l’aspect crayeux des dents.

FIGURE 8 : Polissage à l’aide d’une pâte diamantée (Enhance/Dentsply).

Deux semaines plus tard, une réévaluation nous permet de constater qu’au niveau global, une amélioration est nettement visible (figure 4). Les seules contraintes à gérer dans un second temps, pour atteindre le résultat escompté, sont les taches les plus foncées. En effet, l’atteinte étant plus profonde, les produits d’éclaircissement n’atteignent que très peu ces lésions. Pour pallier ce problème, une séance de macroabrasion de ces secteurs est réalisée grâce à des fraises bagues rouges montées sur turbine (figure 5). Un composite de teinte opaque est déposé en fond de cavité pour masquer les dysplasies (figure 6), puis une stratification est réalisée, n’utilisant que les composites dentinaires. En effet, la texture crayeuse de l’émail nous impose de ne pas se servir de composite amélaire, pour ainsi respecter l’aspect global des dents (figure 7) (VOCO/Amaris Teinte O1). Cette séance est poursuivie par un polissage des composites vestibulaires, à l’aide d’une cupule caoutchouc avec une pâte diamantée (Dentsply/Enhance) (figure 8). Une fois réalisée, une infiltration résineuse est mise en œuvre dans le but d’augmenter le rendu esthétique en infiltrant les microzones d’hypominéralisations persistantes. L’objectif de l’érosion/infiltration est d’infiltrer le corps de la lésion par une résine fluide hydrophobe de très basse viscosité qui permet, après photopolymérisation, de bloquer la diffusion des acides bactériens, et ainsi masquer l’opacité blanche des défauts.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

71


CDF-1640-CahierFC-p69-72_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:21 Page72

Formation continue

FIGURE 9 : Résultat après polissage.

L’érosion/infiltration se compose de 3 étapes (DMG/Icon) (8) : 1- La déminéralisation grâce à un mordançage à l’acide chlorhydrique à 15 % (Icon-Etch), afin d’éliminer la couche superficielle et de créer un accès aux microporosités sous-jacentes (figure 9). 2- Application d’un primaire (Icon-Dry) visant à sécher les surfaces dentaires grâce à l’éthanol (figure 10). 3- Infiltration résineuse type TEGDMA (IconInfiltrant), pendant 3 min et photopolymérisation pendant 40 secondes sur chaque dent. Une seconde application d’1 minute peut être réalisée (figures 11 et 12). Le résultat obtenu en moins de 15 jours est tout à fait satisfaisant, en ayant respecté l’intégrité des dents (figure 13).

Conclusion FIGURE 10 : Protocole ICON : mordançage à l’aide d’acide chlorhydrique à 15 %.

Ces situations cliniques restent assez exceptionnelles dans l’exercice quotidien du

FIGURE 13 : Résultat final.

chirurgien- dentiste. Elles peuvent être facilement abordées en optimisant nos choix thérapeutiques à disposition en fonction du diagnostic. Grâce aux avancées scientifiques en matière de produits physicochimiques, la dentisterie a minima est donc le traitement de choix pour ces patients avec un contexte économique limité.

Bibliographie

FIGURE 11 : Application d’un primaire visant à sécher les surfaces dentaires.

1. Afssaps 2008. Utilisation du fluor dans la prévention de la carie dentaire avant l’âge de 18 ans.

6. GOTLER M, RATSON T. Molar incisor hypomineralization (MIH) - a literature review. Refuat Hapeh Vehashinayim. 2010 Apr ; 27(2) : 10-8, 60.

2. BAILLEUL-FORESTIER I. Expressions bucco-dentaires de maladies systémiques en Pédiatrie. Archives de pédiatrie 2003 ; 10 Suppl. 1 (11s13s).

7. MOULTON FR, ed. Fluorine and dental health. Washington, DC: American Association for the Advancement of Science, 1991, Publication N°19, pp. 23-31.

3. DANIELSON GUEDES PONTES, KETLEN MICHELE LEITE CORREA, FLAVIA COHEN-CARNEIRO. Reestablishing Esthetics of Fluorosis-Stained Teeth Using Enamel MicroabrasionandDental Bleaching Techniques. Eur J Esth Dent, Vol. 7, number 2, 2012, A30-139.

8. PARIS S, MEYER-LUECKEL H. - Resin infiltration of artificial enamel caries lesions with experimental light curing resins. Dent Mat J 2007 ; 26 : 582-8.

4. DENIS M, ATLAN A, TIRLET G, ATTAL JP. White defects on enamel : diagnosis and anatomopathology : two essential factors for proper treatment (part 1). Int Orthodontics 2013 ; 11 : 139-165 139; doi : 10.1016/j. ortho. 2013.02.014.

FIGURE 12 : Infiltration résineuse type TEGDMA pendant 3 minutes et photopolymérisation. 72

5. FORD D, SEOW WK, KAZOULLIS S, HOLCOMBE T, NEWMAN B. A controlled study of risk factors for enamel hypoplasia in the permanent dentition. Pediatr Dent 2009 ; 31(5) : 382-8.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

9. SAPIR S, SHAPIRA J. Clinical solutions for developmental defects of enamel and dentin in children. Pediatr Dent 2007 ; 29 : 330-6. 10. TIRLET G, ATTAL JP. Le gradient thérapeutique : un concept médical pour les traitements esthétiques. Info Dent 2009 ; 41-2 : 2561-8. 11. TOLIDIS K, BOUTSIOUKI C, GERASIMOU P, Minimally invasive techniques for the esthetic management of severe fluorosis. e-Journal of Dentistry Oct - Dec 2012 ; Vol 2 Issue 4, 277281.


CDF-1640-CahierFC-p75-80_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:19 Page75

ODONTOLOGIE GÉRIATRIQUE

Formation continue Article publié dans le CDF n° 1592 du 24 octobre 2013

Pierre-Yves CHAUX Docteur en chirurgie dentaire DU d’anatomie clinique cranio-cervico-faciale (Paris Descartes) DU de formation permanente en odontologie (Paris Descartes)

Vieillissement et odontologie : aspects épidémiologiques C’est au début des années 2000 que les professionnels de santé ont commencé réellement à prendre conscience des problèmes médicaux des personnes âgées.

La canicule de 2003 a accéléré les décisions politiques. Il a alors été créé la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) qui gère désormais les fonds publics destinés à la prise en charge de la dépendance.

en compte la pathologie neurologique qui l’accompagne souvent (démence de type Alzheimer ou DTA). Il faut noter aussi que les pathologies dentaires sont nombreuses et particulières pour cette population, et que les soins sont souvent difficiles à appréhender et à réaliser.

C’est un devoir pour le praticien de dispenser des soins aux sujets âgés et notamment aux déficients cognitifs. Ces patients nécessitent une prise en charge spécifique, en fonction de paramètres humains, médicaux et sociaux.

1) Définition de la personne âgée (6, 7, 8, 10)

La population âgée étant en constante augmentation, il est intéressant d’en mesurer l’évolution actuelle et future, et de prendre

La définition reste délicate : il n’existe pas de marqueur clinique de la gériatrie. Il existe deux formes de vieillissement : chronolo-

Épidémiologie du vieillissement

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

75


CDF-1640-CahierFC-p75-80_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:19 Page76

Formation continue

gique et biologique. Le terme « âgé » est associé à une baisse des capacités physiologiques de l’individu. Définition de l’OMS L’Organisation mondiale de la Santé définit chronologiquement le sujet âgé en : - jeune vieillard : de 60 à 75 ans, - vieillard : de 75 à 90 ans, - grand vieillard : au-delà de 90 ans. Il est très fréquent qu’une personne âgée soit encore très active et en bonne santé à un âge avancé. L’âge est un critère reconnu lors d’une anesthésie générale : une personne âgée en bonne santé est classée ASA II. Cliniquement, un patient sur deux de plus de 85 ans est classé ASA III à V. Patient gériatrique Le terme de patient gériatrique est plus spécifique car il décrit la spécialité médicale centrée sur les soins de la personne âgée. Les études du vieillissement humain sont compliquées par la difficulté de différencier le vieillissement lui-même des conséquences des maladies liées au vieillissement. Le vieillissement est un processus physiologique universel et progressif, caractérisé par des changements dégénératifs à la fois au niveau des structures et des réserves fonctionnelles des organes et des tissus. La différence entre la capacité maximale et le niveau basal de fonctionnement définit la réserve fonctionnelle du système organique. Le vieillissement est le plus souvent accéléré par des pathologies associées dont la fréquence et la gravité augmentent avec l’âge. L’appréhension du patient gériatrique induit la notion de personne fragile. Le terme de fragilité vise à décrire la réduction multi-systémique des réserves fonctionnelles qui apparaît chez certaines personnes âgées, limitant alors la capacité de leur organisme à répondre au stress, même mineur. Cet état d’instabilité physiologique expose l’individu à un risque de décompensation 76

fonctionnelle, de perte d’autonomie, d’institutionnalisation et de décès. La fragilité est un ensemble multifactoriel, où interviennent des aspects biologiques (où l’on retrouve les grands syndromes gériatriques dus aux effets combinés des maladies et du vieillissement), mais également des aspects fonctionnels (personne dépendante dans la vie quotidienne), physiologiques (diminution des réserves), sociaux et psychologiques.

FIGURE 1

La fragilité est évidemment variable avec l’âge, passant de 10 à 25 % chez les 65 ans et plus, et atteignant 30 à 70 % chez les plus de 85 ans. Les objectifs de l’évaluation de la fragilité sont nombreux : apprécier les réserves physiologiques d’un sujet, établir un pronostic, prévenir la dépendance par l’identification d’une population à risque, aider à la prise de décision thérapeutique. Plus que l’âge lui-même, le concept de fragilité est intéressant pour classifier les personnes à risque en vue d’une intervention médicale ou chirurgicale. Le tableau clinique et la prise en charge des patients gériatriques fragiles sont alors différents des sujets âgés ne présentant pas de pathologie handicapante au plan physique ou psychique. La prise en charge de patients déments type Alzheimer (DTA), donc fragiles, sous-entend la connaissance des aspects du vieillissement au niveau cognitif et sensoriel, qui peuvent interférer avec la communication entre le praticien et son patient lors des soins (figures 1 et 2).

2) La situation démographique (1, 4, 14) Selon les chiffres de l’Insee, en fin 2011, la population française s’élevait à 65 millions d’habitants. Population par groupe d’âge La baisse de la fécondité, comparée aux très forts niveaux du baby-boom, et l’al-

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

FIGURE 2 FIGURES 1 ET 2 : Personnes âgées dépendantes. longement de la durée de vie ont depuis une trentaine d’années sensiblement modifié la structure par âge de la population française. Le nombre de personnes âgées augmente, celui des jeunes diminue, et pour la première fois les moins de 20 ans représentent moins d’un quart de la population. L’âge médian de la population de 34 ans en 1950 est passé à 40 ans en 2010. En 1950 la part de la population des plus de 60 ans représente 16,2 %, dont 3,8 % des plus de 75 ans. Cette part concerne en 2010 23 % des plus de 60 ans, dont 8,9 % de 75 ans et plus, et donc globalement la population française vieillit. Espérance de vie En 2008 (dernières statistiques disponibles), l’espérance de vie « en bonne santé » à la naissance est estimée à 64,2 ans pour les femmes et à 62,4 ans pour les hommes. Pour les femmes et les hommes âgés de 65 ans, elle est respectivement de 9,4 et 8,2 années.


CDF-1640-CahierFC-p75-80_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:19 Page77

Formation continue

L’espérance de vie augmente donc régulièrement, mais les 10 à 20 dernières années des personnes âgées peuvent conduire à une dépendance sociale et médicale importante. Les projections de l’Insee prévoient en 2050 72,3 millions d’habitants en France, avec 31,9 % de plus de 60 ans dont 16 % de plus de 75 ans. Le sous-groupe des plus de 80 ans est celui qui augmente le plus rapidement. La prise en charge appropriée des personnes âgées fragiles va devenir une priorité de santé publique, et ce dans le but de diminuer le nombre de patients dépendants et les coûts du vieillissement. Les besoins en soins spécifiques pour une partie d’entre eux ne peuvent qu’augmenter, et se révéler être de plus en plus aigus. Prise en charge des personnes dépendantes • À domicile Cette solution, lorsqu’elle est possible, est de loin préférable. Elle permet de conserver une meilleure qualité de vie tout en soulageant les charges financières de la collectivité. Le maintien à domicile retarde l’entrée en institution, et la spécificité de sa prise en charge est reconnue. Pour faciliter le maintien à domicile et éviter l’institutionnalisation, il existe de nombreux services dont l’hospitalisation à domicile, pour les patients dont l’état ne justifie pas le maintien au sein d’une structure hospitalière. Toutes les pathologies peuvent être prises en charge à l’exclusion des malades mentaux pris en charge en secteur psychiatrique. • En établissement Les malades peuvent être placés en institution d’hébergement (logement foyer, maison de retraite) ou en établissements d’hospitalisation publics et privés, en court, moyen ou long séjour, qui prennent en charge les malades dépendants nécessitant une surveillance médicale permanente.

3) Santé orale de la population gériatrique État de santé bucco-dentaire des personnes âgées de 65-74 ans en France Les 65-74 ans, dont seulement 2 % vivent en milieu médicalisé, représentent 7,2 % de la population française. Une étude sur l’état de santé bucco-dentaire des 65-74 ans non institutionnalisés, autonomes, a été réalisée en 1995 en Rhône-Alpes, région représentative de la structure démographique de la population française. Les résultats montraient que l’état dentaire de cette population paraissait satisfaisant en regard de la faible proportion des dents cariées non traitées, le besoin de soins s’établissant à 17,4 %. Le bon état de santé dentaire et les faibles besoins en traitement de caries dentaires observées apportent une base de réflexion en faveur de la qualité et de la quantité des soins délivrés aux personnes âgées de 65 à 74 ans non institutionnalisées et autonomes en France. État de santé bucco-dentaire des personnes âgées dépendantes en institution (2, 3, 5, 9, 11, 12, 13) (figures 3 et 4) • Objectifs des enquêtes Les enquêtes sur la santé et les soins médicaux ont montré que le mode de vie des personnes âgées se diversifiait, en particulier du fait des états de dépendance liés à l’augmentation de la longévité. Ainsi, l’incapacité des personnes âgées résidant à leur domicile diminue alors que la dépendance des personnes vivant en institution s’aggrave. Pour les personnes âgées non institutionnalisées, les maladies bucco-dentaires arrivent au troisième rang des affections déclarées. Leurs complications sont constituées par les risques d’infections systémiques, de maladies broncho-pulmonaires et de malnutrition. L’image de soi et le confort

FIGURE 3 : Examen clinique bucco-dentaire chez une personne âgée en EHPAD.

FIGURE 4 : État bucco-dentaire défectueux chez une personne âgée de 79 ans.

de vie au quotidien peuvent également être altérés. Pour les personnes dépendantes, les critères d’efficacité d’une action de santé sont assez complexes car ils relèvent non seulement des caractéristiques du patient, mais également de la demande de la famille et de celles des directeurs et du personnel des établissements. • Constat clinique L’URCAM (Union régionale des caisses d’assurance maladie) a réalisé ces dernières années plusieurs études transversales descriptives concernant l’exhaustivité des Ehpad (Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), afin d’établir l’état bucco-dentaire des personnes âgées en institution, dans le Nord-Pas-de-Calais (2006) (12), en Provence-Alpes-Côte d’Azur

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

77


CDF-1640-CahierFC-p75-80_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:19 Page78

Formation continue

(2006) (11), en Essonne (2002) (5), et dans le Limousin-Poitou-Charentes (2006) (2). Une synthèse clinique a été réalisée sous forme de tableau (voir ci-contre). Le constat clinique est sans équivoque. Alors que l’état bucco-dentaire des personnes âgées de 65 à 74 ans non institutionnalisées est satisfaisant, la population gériatrique en Ehpad, de 85 ans d’âge en moyenne (soit 10 ans plus tard), présente un état bucco-dentaire globalement à l’abandon, tant au niveau des soins que des besoins prothétiques. Ces enquêtes montrent que pour la majorité des résidents des Ehpad, les besoins en santé bucco-dentaire ne sont pas couverts, particulièrement dans les domaines de la prévention et de l’accès aux soins, d’autant que les états de dépendance s’accompagnent souvent d’une incapacité à mesurer et à exprimer ses propres besoins. La présence de plaque et de débris alimentaires révèle l’absence ou l’inefficacité des mesures simples d’hygiène pour cette population. Peu d’établissements disposent d’un équipement dentaire. Son coût, le manque de locaux et l’absence de praticien volontaire sont les motifs les plus évoqués pour expliquer ce déficit. Il est à noter que le pourcentage de vacations le plus élevé se situe en PACA, région à densité professionnelle importante. Parmi les motifs constituant un obstacle au développement d’une filière de soins, l’absence de structure de soins et/ou de praticiens à proximité, le coût des soins et l’absence de personnel pouvant accompagner les résidents sont les plus cités. Les soins d’hygiène bucco-dentaire réalisés par du personnel soignant peu ou pas formé sont insuffisants. Il faut à ce stade intégrer le fait que la moitié des pensionnaires en Ehpad sont déficients cognitifs. 78

4) Discussion Du fait de l’allongement de la durée de vie, la population des 65 ans et plus augmente chaque année. Le vieillissement, les maladies chroniques, les troubles cognitifs et moteurs, les effets secondaires des médicaments apparaissent et font des personnes âgées un groupe à risque, d’autant plus que s’installent la dépendance et le handicap, conduisant à l’institutionnalisation. La littérature a montré qu’environ 70 % des personnes en institution souffrent d’une malnutrition protéino-énergétique, du fait en partie d’un mauvais état bucco-dentaire, ou d’un coefficient masticatoire insuffisant. Celle-ci agit en diminuant les mécanismes de défense de l’organisme et en augmentant le risque des complications infectieuses dont peut souffrir le résident. Sa perte d’autonomie peut être accélérée. Il paraît donc important de chercher à améliorer la prise en charge curative des pathologies buccales ainsi que de développer la prévention et le diagnostic précoce des pathologies bucco-dentaires chez les personnes âgées. L’importance des besoins non couverts révèle les difficultés d’accès aux soins pour la population gériatrique dépendante. En santé bucco-dentaire, l’offre de soins est inadaptée aux besoins spécifiques que présentent les patients dépendants, les patients porteurs de troubles neuromoteurs ou cognitifs. L’exercice libéral conventionné, qui représente le mode d’exercice dominant en odontologie (environ 93 % des praticiens), n’est pas adapté pour recevoir les patients dépendants ou médicalisés. Les obstacles à la prise en charge sont liés soit au manque de coopération du patient qui conduit le praticien à transiger sur les modalités du traitement ou à y renoncer, soit au manque de moyens et de formation des praticiens à la prise en charge de patients médicalisés. L’organisation de filières ou de réseaux de soins spécifiquement construits pour cette

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

population du troisième âge pourrait permettre d’améliorer l’accessibilité aux soins. Les procédures de prise en charge de ces patients par les praticiens libéraux passent par l’aménagement particulier des locaux et des équipements, la formation et le recours à une sédation adaptée à ces cas particuliers. Une rémunération spécifique de ces procédures permettrait l’indemnisation de séances plus longues du fait des difficultés de communication et d’installation des patients. L’accès aux soins en établissement avec en parallèle la sensibilisation des différents acteurs (résidents, famille, personnel soignant, réseaux) doit faire l’objet d’une réflexion. La santé bucco-dentaire des résidents en Ehpad est un problème de santé publique, et s’inscrit dans une démarche de prévention qui permettra à tous de gagner en qualité de vie. Ainsi, l’augmentation de la durée de vie est en soi une victoire puisque l’entrée en retraite n’est plus associée à l’entrée en vieillesse. Mais dans nos sociétés, la vieillesse est devenue un modèle dévalorisant et non plus d’accomplissement et de sagesse. Le phénomène du vieillissement devient une réalité démographique qui sonne comme un défi et devrait faire l’objet d’une préparation personnelle et sociétale à long terme. L’analyse des besoins et des souhaits reste à faire pour le grand défi qu’auront à affronter les pays industrialisés vieillissants dans un avenir très proche. La question bucco-dentaire s’impose comme primordiale puisque la durée de vie des dents ne se calque pas encore sur cette nouvelle longévité. L’alimentation et la communication ne sont pleinement possibles qu’avec un état buccodentaire satisfaisant. Une bouche indolore, saine, présentable aux autres, doit accompagner chaque être humain jusqu’au terme de sa vie.


CDF-1640-CahierFC-p75-80_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:19 Page79

Formation continue

Nord/Pas-de-Calais

Provence/Alpes/ Côte d’Azur

Essonne

Limousin/ Poitou-Charentes

Nombre d’établissements

164

47

41

152

Âge moyen des pensionnaires (ans)

83

83,5

86

85

50 %

42 %

15 %

14 %

Dernière consultation Plus de 5 ans Plus de 1 an

64 %

Moins de 1 an GIR* niveau 1 à 4

83 %

75 %

Vacations dentaires en Ehpad

73 %

12 %

31 %

15 %

11 %

Nombre d’établissement correspondant

20

13

6

17

Établissements équipés en matériel

8

4

1

5

Plaque dentaire

45 %

36 %

Tartre

36 %

65 %

55 %

Dépôts alimentaires

28 %

33 %

37 %

Parodontopathies

32 %

33 %

21 %

35 %

Bouche sèche

20 %

33 %

Lésions muqueuses

5%

12 %

6%

11 %

1 ou 2 prothèses adjointes à réaliser

52 %

66 %

27 %

46 %

1 ou 2 prothèses adjointes à corriger

18 %

25 %

46 %

Observations cliniques/hygiène 55 %

Besoins soins Édentés totaux Besoins soins prothétiques

Dentés

Prothèses 1 ou 2 prothèses adjointes à réaliser

73 %

1 ou 2 prothèses adjointes à corriger

12 %

67 %

Couronne à réaliser

10 %

8,4 %

Détartrage-parodontologie

63 %

53 %

65 %

Extractions

60 %

60 %

53 %

Conservateurs

39 %

33 %

35 %

66 %

86 %

Soins dentaires

% en besoins de soins

78 % en tout

* Groupes GIR : groupes définis par la grille Aggir, définissant l’état de dépendance d’une personne âgée.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

79


CDF-1640-CahierFC-p75-80_GAB FORMATION CONTINUE 13/11/14 10:19 Page80

Formation continue

Bibliographie 1) Chassagne P, Rolland Y, Vellas B. La personne âgée fragile. Éditions Springer, 2009. 2) Cohen C, Tabarly P, Hourcade S, Kirchner-Bianchi C, Hennequin M. Quelles réponses aux besoins en santé bucco-dentaire des personnes âgées en institution ? Presse Méd. 2006 ; 35(11) : 1639-48.

8) Muravchick S. Gerontology. ASA Syllabus on geriatric anesthesia, 2000 ; www.asahq.org/clinical/geriatrics/syllabus.htm 1-4

3) Coviaux F, Goffart O, Yves-Deville C, Lavallart B, Gallopin V. Indication et procédure d’utilisation du mélange protoxyde d’azote-oxygène dans les soins en gériatrie. Revue de Gériatrie 2002 ; 27(4) ; 273-6.

9) Nebot D, Buch D, Duverneuil G, Wolmark Y, Drunat O, Benbekina M, Gridel G, Laize F, Prieur V, Lasfargues JJ. Évaluation de l’état bucco-dentaire des personnes âgées en institution. Réalités cliniques 2007 ; 18(2) : 201-12.

4) Detruit JC, Sornin G, Bitton D, Guivante-Nabet C. Démographie des personnes âgées et incidences medico-sociales. Act. Odonto. Stomatol. 2001 ; 214 : 137-48.

10) Sahel C, Tanguy A, Fix MH, Chevalet P, Rodat O. Iatrogénèse médicamenteuse chez la personne âgée. Réalités Cliniques 2007 ; 18(2) : 121-7.

5) Dorin M, Candes C, Chevalier J, Cohen C, Collet C, Hubscher N, Nadeau F. État de santé buccodentaire des personnes âgées dépendantes. Inf. Dent. 2002 ; 23 : 1547-56. 6) Jimenez JL, Giménez-Prats MJ. Sedation in the geriatric patient. Med. Oral. 2004 ; 9 : 45-55.

80

7) Lassauzay C. La problématique de la personne âgée pour les soins dentaires. Attestation d’Études Universitaire de Sédation Consciente, Faculté de Clermont-Ferrand. 2008.

11) Union régionale des caisses d’assurance maladie PACA. Minguet-Fabbri J, Santoni R, Delas G, Favier P, Georgel P, Moretti J,Moretti R, Schodet P. Experts pour la Faculté d’Odontologie de Marseille : Chevaux JM, Tosello A. L’état de santé bucco-dentaire des personnes âgées en maisons de retraite en région Provence Alpes Côte d’Azur.

Le Chirurgien Dentiste de France n o 1640 du 20 novembre 2014

www.urcam.assurance-maladie.fr/uploads/media/ EtudeSanteBDPersAgees. 2006. 12) Urcam Nord Pas-de-Calais. Laforet J, Bui H, Catussie E, Corroyez JM, Coubronne C, Donadieu A, Meresse S, Semaille B, Devillers A. Les personnes âgées dépendantes hébergées en établissement (EHPAD). État de santé bucco-dentaire et organisation des soins. www.npdc.assurance-maladie.fr 2006. 13) Veyrune JL, Lassauzay C, Nicolas E, Hennequin M. Considérer le risque de dénutrition chez les personnes âgées. Réalités Cliniques 2004 ; 15(4) : 361-73. 14) Insee, statistiques de la population française. www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?theme=2


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.