Quatrième promenade:
Planchez bois à Amiens! ZAC Intercampus
J’ai eu l’occasion il y’a quelques mois de démarrer les études d’un projet de 30 logements collectifs dans la ZAC Intercampus d’Amiens pour le compte d’un promoteur qui n’a pas beaucoup d’expérience à son actif mais qui souhaite se spécialiser dans le logement en bois. Il ne s’agit pas seulement de construire en bois, mais aussi de rendre visible le bois à l’intérieur des logements. Du côté maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre les ambitions environnementales, paysagères et de qualité des logements sont élevées. Il y’a une vraie volonté de faire du logement « autrement » des deux côtés. Dès les premières études cependant, nous allons rapidement nous rendre compte d’une part de l’incompatibilité du budget du maître d’ouvrage avec l’économie imposée par l’emploi de matériaux bio-sourcés ; d’autre part nous heurter à la quasi impossibilité réglementaire de construire en structure poteau-poutre bois apparente ou en solivage bois apparent lorsqu’il s’agit de plancher séparatif. Nous nous sommes refusés à employer un plancher bois composé d’une dalle CLT : d’une part leur utilisation entraine un surcoût important : les dalles sont onéreuses et nécessitent une chape isolante supplémentaire ; d’autre part leur esthétique de produit abstrait et lisse, qui peut finir peint en blanc par les habitants, nous intéressait moins qu’un solivage traditionnel. Les bonnes intentions en terme de bilan carbone ne suffisant pas à valoriser un logement pour un promoteur privé, le béton, qui lui peut tout à fait rester apparent en structure porteuse, refait rapidement son apparition. Ces deux contraintes nous poussent cependant à revoir la copie, à chercher des solutions dans le sens de l’hybridation des techniques constructives entre béton et bois, mais aussi des typologies, en proposant par exemple plus de duplex où il est possible de faire du plancher bois intermédiaire sans soucis acoustique. Nous voyons donc qu’aujourd’hui en France, il est réglementairement quasi impossible de réaliser un solivage bois apparent entre deux logements, impossible de réaliser une structure à poteau-poutre bois apparente sans l’encoffrer dans des épaisseurs invraisemblables de placo et de laine minérale, alors que cela est possible dans d’autres pays. Le voile et la dalle béton de 20cm qui sont la norme en logement sont-ils vraiment plus performants d’un point de vue acoustique ? L’expérience que nous avons tous au quotidien nous montre que rien n’est moins vrai, et pourtant la dalle béton mince est l’un des fondements des procédés constructifs utilisés en France. Même lorsqu’il s’agit de construire en bois, la logique de dalle ou de voile béton est transposée de manière littérale par l’utilisation de dalles CLT contrecollées. Faut-il pour autant sous prétexte de qualité architecturale et d’ambiance intérieure prendre le risque de faire subir un calvaire acoustique à de futurs habitants ?
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