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E-commerce : cap sur les emballages réemployables
engagement en faveur de la réduction de l’impact environnemental est une attente forte de la part des Français, à laquelle nos entreprises se doivent de répondre », affirme Marc Lolivier, directeur général de la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad). L’une des solutions pour réduire les déchets générés par les ventes en ligne est le réemploi. Cela passe par le renvoi du colis à son expéditeur par le client final, de façon qu’il serve à d’autres commandes
Recycler, réutiliser
Selon le dernier baromètre Fevad/Opinionway de mars 2022, 16 % des acteurs de l’e-commerce proposent déjà des emballages réutilisables ou consignés, et 37 % envisagent de le mettre en place prochainement. Une tendance confortée par le cadre réglementaire. Le décret du 8 avril dernier fixe les trajectoires avec plusieurs paliers, selon le chiffre d’affaires, pour atteindre la proportion minimale de 10 % d’emballages devant être réemployés ou réutilisés d’ici 2027. Une obligation qui concerne toutes les entreprises mettant sur le marché plus de 10 000 emballages par an.
Des solutions émergent pour développer cette alternative à l’emballage à usage unique, particulièrement sur les marchés de l’habillement et de la beauté. Depuis 2014, RePack propose des colis réutilisables en polypropylène recyclé (issu d’appareils électroménagers mis en déchetterie). Des marques comme Blissim, Ba&sh, Picture Organic ou Hopaal ont fait ce choix pour leurs ventes e-commerce. « L’impact environnemental est bien meilleur que celui des colis jetables en carton, et surtout par rapport au plastique à usage unique », souligne Clémence Avignon, responsable produit pour RePack. Au moment de la finalisation de leur commande, les clients peuvent faire le choix de profiter d’un tel colis. Il leur suffit ensuite de le déposer, vidé et plié, dans n’importe quelle boîte aux lettres pour qu’il soit renvoyé gratuitement et remis en circulation. L’entreprise facture des cycles comprenant l’utilisation du colis, le retour à vide et le nettoyage, à partir 1,95 € par cycle.
Partenariat avec La poste
La prometteuses start-up Hipli « est née au-dessus de ma poubelle jaune. J’y jetais un colis dans lequel je venais de recevoir un vêtement que j’avais choisi justement parce qu’il respectait notre planète. Et là, penchée au-dessus de ma poubelle, je n’avais pas franchement l’impression de faire un bon geste », raconte Léa Got, la cofondatrice d’Hipli. La société havraise a déjà conquis 350 marques partenaires comme Gayaskin, Asphalte, La Camif ou encore Cdiscount (lire P. 50).
Le principe ? Ces marques se fournissent sur sa plateforme en colis souples (trois tailles à partir de 1,48 €) ou rigides (une taille à partir de 2 €).
Grâce à un partenariat avec La Poste, les clients sont en mesure de renvoyer le colis replié et doté d’une étiquette prépayée au centre de tri Hipli basé à Tours. Ce dernier se charge de valider la qualité du produit et, au besoin, de le réparer.
La gamme Opopop compte un petit format de 2,4 l (type enveloppe A4) et une grande pochette de 12 l dans laquelle peut rentrer une boîte à chaussures.
La solution d’emballage The Box de LivingPackets est sécurisée et connectée. À la clé, un panel de services tels que la surveillance H24.
Le colis est ensuite renvoyé à un partenaire. La boucle prend fin une fois que le colis Hipli est jugé irréparable. Ces pochettes en polypropylène peuvent être réutilisées une centaine de fois, ce qui correspond à 25 kg de déchets évités. Elles sont recyclées en fin de vie. « Dès sa seconde utilisation, Hipli a un impact plus faible que celui d’un carton. C’est -83 % d’empreinte carbone comparé à un carton. », précise Julie Albert, responsable communication et marketing, sachant que les colis mis en circulation en juillet 2020 avoisinent les 15 rotations. « Nous observons un retour en deux vagues : la moitié revient dans les deux mois, le reste revient progressivement après avoir été réutilisé dans des réseaux de seconde main. »
Mise en place d’une consigne
Créée en août 2020, la start-up Opopop compte une cinquantaine de clients, principalement dans l’habillement, tels que B.Solfin, Laines Paysannes ou Une Robe Un Soir. La société lyon- naise propose des colis à la location à un prix moyen de 1,50 € par expédition. Elle rend objectif les bénéfices environnementaux grâce à des études d’impact. La gamme de colis souples est constituée d’un tissu imperméable issu de fins de rouleaux de l’industrie textile. La pochette transparente provient de plastique transparent récupéré par l’industrie événementielle. Les emballages peuvent résister jusqu’à une centaine de cycles, en réalité proches de 33 utilisations. Opopop se distingue par la mise en place d’une caution de 5 €. « Le principal défi du colis réutilisable est qu’il le soit réellement. C’est pourquoi nous appliquons pour la première fois aux colis e-commerce le système de consigne », souligne Charlotte Darmet, la cofondatrice. La caution n’est pas débitée, sauf si le colis n’est pas renvoyé dans les 15 jours, après une série de rappels par SMS et e-mail. « Grâce à ce système, 97 % des colis reviennent, c’est huit fois plus que la moyenne. Dès deux utilisations, Opopop s’avère plus rentable sur le plan environnemental qu’un carton recyclé qui sera jeté », indique la dirigeante. De plus, le suivi du colis permet de remercier le consommateur final pour le renvoi, ce qui ajoute un atout clé à l’expérience client.
Des boîtes robustes et tracées
Sur ce marché en pleine ébullition, LivingPackets se différencie en s’intéressant aux produits sensibles et haut de gamme grâce à des emballages connectés, réutilisables et recyclables. « Tout le monde a compris que l’emballage de demain doit être réutilisable, c’est une tendance mondiale. Mais pour qu’il le soit, il faut proposer du service, c’est-à-dire de la sécurité, et de l’intelligence pour favoriser l’acte de restitution », affirme Denis Mourrain, son dirigeant. Conçue en polypropylène expansé, la boîte pliable The Box est dotée d’un panel de fonctionnalités : verrouillage mécano-électronique, caméra embarquée, localisation par GPS et étiquette électronique. D’où une surveillance permanente qui permet l’analyse du flux logistique et le suivi qualitatif, par exemple de la température et de l’hygrométrie ainsi que la détection des chocs. Un service d’alerte en cas de détection d’ouverture est aussi disponible. En mai dernier, la start-up nantaise a lancé The Box Pro, une version non pliable, isotherme et étanche. Elle embarque également la tablette qui assure les principales fonctionnalités de protection et de tracking.
« Grâce à la connectivité, nos emballages ont une chance d’être réellement réemployés », fait valoir Denis Mourrain. De quoi intéresser les secteurs stratégiques où il est interdit de perdre le contenu, tels que le médical, la défense ou l’électronique, mais aussi les marchés haut de gamme comme l’envoi d’œuvres d’art, de produits précieux ou sensibles à la casse tels que les vins et spiritueux. LivingPackets a accompagné Docaposte pour sécuriser le transport de documents sensibles. Sur la période 2022-2023, la start-up nantaise vise la mise en circulation de 20 000 unités The Box et prévoit de développer des emballages souples ou de plus petites tailles. Autant de solutions techniques qui ne doivent pas masquer l’intérêt des consommateurs finaux pour le réemploi maison via des sites de ventes d’occasion tels que Leboncoin et Vinted. Par exemple, le cartonnier DS Smith propose la solution non collée e-secure, facilement réutilisable. Elle bénéficie d’une bande adhésive trois en un permettant la fermeture par le commerçant, l’ouverture facile par le client final et le
Les bacs font des boucles
Créée il y a quatre ans, Pandobac propose des bacs pliables et emboîtables équipés d’un système de suivi, afin de favoriser le réemploi. Parmi ses premiers clients, Transgourmet à Rungis (Val-de-Marne) livre les restaurants en poissons avec glace et en fruits et légumes. Les clients renvoient les bacs à la prochaine livraison. Leur durée de vie va jusqu’à 400 cycles. « Dès vingt utilisations, l’impact environnemental est meilleur que la caisse en polystyrène, et dès quarante cycles par rapport au carton », assure Maël Girard, en charge du développement commercial. La société travaille à la mise en place de points de collecte massifiés afin d’asseoir son développement. Du côté du leader Gamma-Wopla, l’équipe R&D s’est distinguée en collaborant avec la chaîne Domino’s Pizza pour élaborer des bacs au design spécifique. Ils sont composés de bols intérieurs arrondis de façon à contenir trois fois plus de pâte à pizza. « On livrait en magasin notre pâte fraîche, qui a une durée de vie de seulement 7 jours, dans des plateaux contenant en moyenne 6 à 10 pâtons. Ce schéma logistique consistait à transporter près de 80 % de vide », rappelle Hugo Ruiz, directeur supply chain France. Avec trois fois plus de pâtes dans un contenant de même dimension, Domino’s Pizza a diminué l’empreinte carbone du transport, gagné 50 % sur l’espace de stockage en magasin et divisé par trois les allers-retours pour récupérer les pâtons dans les chambres froides. Au total, plus de 150 000 bacs seront produits et livrés pour approvisionner 1 000 magasins en Europe.
Les bacs de Pandobac permettent de passer du jetable au réutilisable grâce à une plateforme de suivi.
réemploi. Deux formats d’expédition sont possibles. Soit elle est remplie en pleine hauteur, soit elle est repliée sur elle-même, afin d’allier réemploi et chasse au vide. n