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b) Un laboratoire architectural
sont identiques et impulsés par l’économie. Les bâtiments de taille standard s’organisent avec un rez-dechaussée commercial, des étages supérieurs de logement ou de tertiaire et une toiture végétalisée. Ainsi, entre une architecture cosmopolite en confrontation avec l'héritage de Paris et des programmes impulsés le système capitaliste, la ZAC de Paris Rive Gauche se place comme une bulle étrangère dans une ville telle que Paris. Seulement, ce sytème de conception est voué à se répandre dans les futures opérations urbaines. De ce fait, si aujourd'hui la ZAC fait exception dans la ville, le fera-t-elle toujours autant d’ici trente ans ? Le macro-lots n'a donc pas participé à l’unification du paysage entre la ZAC et Paris. Cela est dotant plus renforcé par le sytème de gestion des terrains de l’opération urbaine. La ZAC de Paris Rive Gauche se développe sur une superficie inouïe. Ainsi, les aménageurs l’ont séparé en quatre secteurs - Austerlitz, Tolbiac, Masséna, Bruneseau - en vue de faciliter la coordination des opérations. Chaque secteur est géré par un coordinateur qui définit les formes urbaines et les tracés selon le PAZ en vigueur. Il est donc du ressort de chaque architecte-coordinateur de concevoir en prenant en compte les secteurs avoisinants.
Un autre enjeu majeur et exceptionnel de la conception de cette ZAC réside dans le franchissement d’infrastructures imposantes qui ont longtemps desservi le site. La ZAC se développe sur le faisceau de voies ferrées d’Austerlitz. Si la SNCF cède une partie de ses terrains à la Ville en vue de construire le nouvel aménagement urbain, ils conservent leur activité. De plus, avec la réhabilitation de la gare d’Austerlitz, les voies ferrées reprennent du service et augmente leur trafic. Il était donc impératif de concevoir avec cette infrastructure ferroviaire. Le projet visait à faire disparaître le réseau ferré sous la ville. Ainsi, les architectes ont pris le parti d’imaginer un projet en suprastructure grâce à un aménagement sur dalle sur trois des secteurs : l'Avenue de France, Tolbiac et Masséna. Les secteurs Austerlitz et Bruneseau se forment en retrait des voies ferrées, ce qui provoque des vides dans le paysage urbain et une incohérence dans la lecture du site. La ZAC inclut également une autre infrastructure forte : le boulevard périphérique. Elle se situe à la limite sud du secteur (Annexe. 1.). Le boulevard se positionne actuellement comme une fracture urbaine en bord de la ville, une barrière visuelle, mais aussi la frontière entre Paris centre et Paris hors-les-murs, soit Ivry-surSeine. Initialement la ZAC ne prévoyait que trois secteurs, mais au fil des années un quatrième, le secteur Bruneseau, s’est inséré dans le projet. Par le biais de cette opération, il s’agissait de repenser l’échangeur du boulevard périphérique et de recréer un lien étroit entre Paris et sa banlieue. Aujourd’hui, l’infrastructure représente un certain nombre de désavantages pour les habitants du quartiers : nuisances sonores, pollution, peu franchissable, … Il s’agissait donc de remodeler la portion du secteur afin de le rendre habitable. Si dans le cas de la ZAC de Paris Rive Gauche le périphérique est restructuré en vue d’améliorer le transit et l’aménagement de l’espace pour le faire disparaitre dans la future ville, nous observons une incohérence dans le traitement global de l’infrastructure. Son réaménagement est décomposé en différentes opérations ponctuelles en fonction des besoins des secteurs et des projets urbains envisagés. Nous observons une discordance entre les différents tronçons qui fait perdre au périphérique son unité et son patrimoine.
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b) Un laboratoire architectural Les quatre secteurs qui composent la ZAC sont pensés de manière distincte. Les secteurs d’Austerlitz et de Tolbiac sont pensés dans la tradition parisienne. Les architectures respectent les gabarits, les volumétries et une certaine sobriété.
Toutefois d'autres secteurs ont pris de nouvelles orientations, en rupture franche avec le retour à la ville des années 80. Tout en s’inscrivant dans les règles des gabarits Haussmanniens, le sud du secteur Tolbiac, le secteur Masséna et surtout l’avenue de France innovent et développent une nouvelle identité dans la ZAC. Le secteur Masséna expose le concept de l’îlot ouvert développé par Christian de Portzamparc, dans les années 80, également architecte coordinateur de ce secteur. Dans les ilots, les bâtiments sont indépendants et créent une variation de hauteur. Ce jeu de gabarit tisse un lien entre le secteur Tolbiac, composé d’immeubles standards et le secteur Bruneseau, de tours.
L’avenue de France se place comme la colonne vertébrale de la ZAC. Elle tient un rôle central dans l’organisation et la conception. Ainsi, les aménageurs ont porté un soin particulier quant aux architectures qui bordent cette avenue. Elle joue le rôle de vitrine où chaque architecture est mise en scène, telle une exposition passants. Les réglementations établies telles que le PAZ fixent des hauteurs de gabarit cependant il n’y en a aucune concernent l’esthétique des façades. Un panel très divers de matériaux, de couleurs et de formes se développe sans réelle cohérence (Annexe. 2.). Cette manière de concevoir l'architecture et son design est impulsée par la logique du star-system. Selon cette logique, les architectures sont soumises à une concurrence permanente en vue d’être la plus innovante. Ainsi, l’espace urbain devient un laboratoire où les plus grands noms de l’architecture entreposent leurs œuvres à l’image d’une galerie d’art, encouragés par les commanditaires et les politiques. Des tours prennent également place dans le projet. En effet, la ZAC de Paris Rive Gauche marque le retour des constructions de hauteur dans la capitale. Auparavant, si la tour était un moyen de construire pour répondre à des besoins techniques ou de logements, aujourd’hui elle est devenue un outil de développement économique, un acte politique fort. Très sollicitée dans un environnement urbain dense, elle permet de répondre à la problématique soumise par le manque de parcellaire dans la capitale, tout en symbolisant le dynamisme et la modernité d’une ville. La ville de Paris a cessé la construction de tours pendant près de 40 ans suite au rejet de la population. Ce retour à la hauteur témoigne de l’évolution des pensées et des pratiques de l’habiter. La tour renvoie des signaux positifs dans une ville, elle permet également de vendre une image de quartiers d'affaires internationaux et puissants. Ainsi cette image est très intéressante pour une ville comme Paris qui souhaite se redynamiser et s’inscrire dans la course des villes internationales. Les tours sont le reflet même du système capitaliste. Seulement leur conséquence n'est pas moindre sur le paysage urbain. Elles dénotent avec le reste de la ville historique par des architectures variées et spectaculaires et se placent comme une barrière face à l’horizon bas de la capitale. Par ailleurs ces géantes s’inscrivent dans des problématiques actuelles comme le développement durable. À la suite des débats sur la COP21, les politiques ont pris conscience de l’urgence écologique dans la conception de la ZAC. La ville de Paris imagine alors le premier écoquartier de la ville répondant au label E+C- au niveau 3 avec des immeubles de grande hauteur qui répondront à de hautes exigences écologiques. Il marque une nouvelle ère pour l’aménagement de la capitale : il devient le démonstrateur de la ville de demain. Ainsi, le projet de Bruneseau Seine répond au défi d'habiter la hauteur au XXIe siècle en insérant les ambitions écologiques portées par la Mairie de Paris.