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Présentation
I Présentation
Au début des années 70 commence à ce faire entendre les premières critiques sur le projet des tours. La ville de Paris va devoir élaborer une nouvelle stratégie pour redynamiser le quartier. Pour se faire, une série de projets va être proposée durant une quinzaine d’années avec un fil conducteur : un retour brutal à une urbanisation traditionnelle parisienne pour rompre avec l’architecture moderne des années 60-70.
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En 1967, le sénat et l’assemblée nationale vont adopter la loi d’orientation foncière (LOF). Elle va fixer les grandes règles d’aménagement et d’urbanisme43. Cette loi va permettre, dans la même année, au conseil de Paris et au préfet de pouvoir lancer une révision du PUD, mis en place en 1961 et faire des études pour un nouveau schéma directeur d’urbanisme. Depuis 1963, le conseil de Paris souhaite compléter son équipe avec un atelier spécifique qui puisse réaliser des études afin d’élaborer une politique d’urbanisme. En 1967, l’Etat accepte et créé le comité des quatre. Ce comité a pour but de définir l’Atelier Parisien d’Urbanisme.44
L’Atelier Parisien d’Urbanisme (APUR) association créée en 1967, est un organisme d’étude qui agit comme « un instrument technique et de dialogue entre administration parisienne, administration centrale et gouvernement, Conseil de Paris »45. Cet organisme a pour but de réaliser des plans décidés par les collectivités publiques et d’apporter une analyse. L’APUR a pour premier directeur Lucien Petit qui organise très rapidement une équipe pluridisciplinaire afin d’avoir un regard complet sur les opérations urbaines à venir . 46
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« Loi d’orientation foncière (n°67-1253 du 30 décembre 1967) », Journal Officiel de la République Française, consulté le 06 mars 2019, [en ligne], URL : https:// www.legifrance.gouv.fr/jo_pdf.do?id=JORFTEXT000000501076&pageCourante=00003
APUR, C.B, « Le Conseil de Paris délibère sur la création de l'APUR », APUR 50ans,
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consulté le 03 avril 2019, [en ligne], URL : http://50ans.apur.org/fr/home/1967-1977/leconseil-de-paris-delibere-sur-la-creation-de-lapur-1299.html
45 Ibid.
46 Ibid.
Sur l’opération d’Italie 13, l’organisation va critiquer et dénoncer une approche « trop brutale » de l’urbanisation. Mais ils ne sont pas les seuls à critiquer l’architecture moderne dans Paris apparue dans les années 60-70. François Loyer, historien de l’art et de l’architecture, futur directeur de recherche au CNRS (centre national de recherche scientifique) et membre du Centre de recherche sur l'histoire de l'architecture moderne, « Centre André Chastel » à l'université de Paris-Sorbonne (1990-2009) va prendre la défense de l’art du XIXe siècle. Avec son article « Paris assassiné » , il 47 entraîne notamment l’inscription de la Gare d’Orsay en mars 1973 à l’Inventaire supplémentaire des monuments historiques, puis sa transformation en musée. Avec son expérience dans le patrimoine, il va jouer un rôle important dans l’élaboration des plans d’urbanisme de Paris en 1977 et en 2006. À partir de 1974, il effectue à la demande de l’APUR une cartographie des immeubles parisiens (intégrer dans son ouvrage Paris XIXe siècle : l’immeuble et la rue48 en 1987 et dans le film Paris, roman d’une ville49 en 1991). Cette enquête sur les immeubles parisiens lui permet de réhabiliter l’haussmannisme. Selon lui, les réalisations haussmanniennes assurent une meilleure hiérarchisation des espaces publics et privés, des voies et des constructions. Ce qui conduit à une meilleure cohérence des bâtis. Le modèle haussmannien va être réinterprété dans l’opération d’aménagement de la rive gauche du Sud-Est parisien dans le cadre d’une architecture beaucoup plus contemporaine.
En 1976, la ville de Paris pense un schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme (SDAU), mis en vigueur en 1977 (voir annexe 10). C’est un des documents d’urbanismes qui cadre l’aménagement et l’urbanisme du territoire français, qui détermine les orientations stratégiques du territoire et l’utilisation des sols. Plus précisément, ce document coordonne les programmes d’urbanisation locaux avec la politique d’aménagement du territoire en vigueur. Il est la synthèse de toutes les idées regroupées de l’équipe de l’APUR. Ce document rompt totalement avec le Plan d’Urbanisme Directeur mis en place précédemment. Il marque le début d'une nouvelle ère d’urbanisme dans Paris. Le SDAU abandonne toutes les idées précédemment acquises dans le PUD tel que la mise en avant de
47 Loyer François, 1970, « Paris assassiné », L'Œil, N° 191, novembre 1970, 68 p.
48 Loyer François, 1987, Paris XIXe siècle. L’immeuble et la rue, Paris, Hazan, 478 p.
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Neumann Stan avec François Loyer, 1991, Paris, Roman d'une Ville, Arte – Les Films d’ici, [en ligne] consulté le 25 avril 2019. URL : https://www.youtube.com/watch?v=VsqYRFqcicw
l'automobile avec la création des autoroutes urbaines pour imaginer des opérations plus en lien avec l’environnement. Le SDAU de l’Ile de France est réalisé par l’IAURIF (institut d’aménagement et d’urbanisme d’Ile de France). Il s'appuie sur des études générales, sur les transports sur des diagnostics réalisés par la banque des données urbaines de l’APUR, mais aussi sur les politiques de secteurs et sur des opérations imaginées par les architectes de l’APUR.50 En 1983, une loi remplace le SDAU par le SD, schéma directeur.
La Loi d’Orientation Foncière (LOF) va aussi permettre de créer un nouveau règlement d’urbanisme, le plan d’occupation des sols (POS) qui va remplacer le PUD alors en cours. Il est adopté par la ville de Paris en 1977 mais sera appliqué aux constructions dès 1974. Le changement de nom du règlement renforce le changement politique. Le POS est un document administratif local qui est défini en fonction de chaque commune. Les réglementations imposées par celui-ci vont fortement contribuer au bouleversement architectural dans le 13e arrondissement. De plus, ce nouveau règlement met l’accent sur la relation entre Paris est son paysage. Le paysage urbain va prendre une autre dimension.51
A travers ses nouvelles missions, l’APUR réfléchi a un nouvel aménagement de l’Est parisien. Il concerne, pour le 13e arrondissement, le secteur entre les voies ferrées de la gare Paris Austerlitz et la Seine jusqu'au boulevard périphérique. Elle est cadrée du Nord au Sud par le quartier de la Salpêtrière et le quartier de la Gare. Depuis l’opération d’Italie 13, c’est la plus grande opération d'aménagement qu’ait connu Paris (voir annexe 11). Ce site possède des caractéristiques remarquables de par son paysage, sa desserte de transports en commun ou son foncier.
Le secteur est un ancien quartier industriel, avec peu de logements.52 Les industries présentes et les terrains de la SNCF créent une coupure entre le centre du 13e arrondissement et la Seine. Le but des
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APUR, J.L.S, « Schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de la ville de Paris approuvé par décret », APUR 50ans, consulté le 03 avril 2019, [en ligne], URL : http:// 50ans.apur.org/fr/home/1967-1977/schema-directeur-damenagement-et-durbanisme-de-la-villede-paris-approuve-par-decret-1313.html
APUR, 1975. « Le règlement du POS et le paysage de Paris », Paris Projet, n°13.14, 152
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pages.
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APUR, 1977. « Schéma de secteur Seine Sud-Est » APUR 50ans, consulté le 24 avril 2019, [en ligne], URL : http://50ans.apur.org/data/b4s3_home/fiche/ 74/02_schema_secteur_seine_sud_est_applan59_41c45.pdf
opérations urbaines à venir est donc de renouer entre le paysage exceptionnel de la Seine et le 13e arrondissement. Celui-ci a tout de même conservé de nombreuses marques de son passé industriel. Certains bâtiments ont été conservés tandis que d'autres risquent de disparaître ou d'être en grande partie modifiés pour les intégrer dans l'opération d'aménagement d'urbanisation en cours. Parmi ces bâtiments industriels, nous trouvons (voir annexe 12) : – les Frigos : un ancien entrepôt frigorifique de la Compagnie des Entrepôts et Gares Frigorifiques. Ils sont situés sur le long de la rue Tolbiac et sont occupés par des dizaines d'artistes depuis les années 1980. L’immeuble est reconnaissable aux fresques qui couvrent sa façade. – les Grands Moulins de Paris : ils sont situés le long de la Seine dans le quartier de la gare. Ils ont été très endommagés par un incendie, mais ont été restaurés et intégrés dans l'université de Paris Diderot. Aujourd’hui, ils accueillent une bibliothèque universitaire, une cafétéria, des locaux d'enseignement et des bureaux. – la Halle aux Farines : elle est devenue un bâtiment d'enseignement de l'université. – l’usine de la SUDAC : La société urbaine d'air comprimé est située sur les quais de la Seine proche du périphérique. Elle accueille aujourd'hui l'Ecole Nationale Supérieure d'Architecture de Paris Val-de-Seine. Sa halle en brique et sa cheminée ont été réhabilitées tandis qu’un nouveau bâtiment la complète depuis (architecte Frédéric Borrel). – la Halle Freyssinet : vaste halle en béton armé à trois travées jouxtant les voies ferrées d’Austerlitz. Elle a été à l'état d'abandon jusqu'au jour où sa réhabilitation fut envisagée. Le projet fut abandonné et la SNCF a loué la halle à la une société d'événementiel pour une durée de cinq ans. Quelques travaux de rénovation sommaire ont été réalisés afin de conserver le bâtiment ouvert pour le public. La halle est inscrite au titre des monuments historiques depuis 2012. Elle a été depuis rénovée et est devenue la Station F.
Plusieurs projets ont été proposés durant une vingtaine d’années sur ce site afin de le redynamiser. Il a d’abord été prévu pour accueillir l’exposition universelle de Paris, puis le village des Jeux Olympiques, et un quartier d’affaires. Enfin, des plans d’aménagement d’urbanisme ont été esquissés pour transformer le quartier.