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GESTION DE COLLECTIONS ET D’ÉCOSYSTÈMES VIVANTS : FINE TACTIQUE EN COULISSES
• PAR MARION SPÉE
Présenter des populations d’animaux, d’insectes et d’arthropodes au public, c’est gérer en coulisses d’innombrables détails. C’est jongler avec une multitude d’éléments : les lois, les permis d’importation et d’exportation, les affinités entre espèces ou individus, les naissances, les échanges, les dons ou encore les renouvellements. C’est bien plus compliqué que de transférer un joueur de hockey d’une équipe à une autre, même si ça fait couler moins d’encre dans les journaux.
AU BIODÔME : DÉFI DE COHABITATION ET DE GÉNÉTIQUE
Dans l’établissement, la plupart des habitats sont des écosystèmes abritant plusieurs espèces différentes. La cohabitation y est absolument essentielle et le choix des espèces, un beau casse-tête! S’il est relativement facile de ne pas mettre des proies et des prédateurs ensemble, certaines combinaisons sont moins évidentes à éviter. « Par exemple, il existe des parasites chez les oiseaux qui nécessitent la présence de mollusques pour compléter leur cycle de vie. Il faut donc éviter de les mettre les uns en présence des autres », illustre Gheylen Daghfous, conservateur des Collections vivantes au Biodôme.
Pour l’aider, le Biodôme peut compter sur l’expérience de partenaires, membres comme lui de l’Association des Zoos et Aquariums (AZA). L’AZA est un organisme d’accréditation qui garantit des normes d’intégrité, de santé et de bien-être aux espèces sauvages en captivité ; c’est aussi un précieux réseau.
Gérer les collections vivantes implique de maintenir des populations saines génétiquement. Pourquoi ? Notamment pour éviter l’apparition de maladies héréditaires, garantir une diversité génétique qui favorise l'adaptation des individus à leur milieu et assurer une population de réserve pour la conservation de l’espèce. Voilà un autre atout d’être membre de l’AZA. « Ça permet une gestion à l’échelle de la population », spécifie Gheylen Daghfous. Le choix des partenaires ne se restreint pas aux seuls pensionnaires du Biodôme, mais à tous ceux des nombreuses institutions membres de l’AZA. Cerise sur le sundae, pour certaines espèces telles que le tamarin-lion doré ou le manchot royal, le Biodôme participe à des programmes spécifiques de pérennisation supervisés par l’organisme d’accréditation. Des biologistes spécialistes en la matière cherchent spécifiquement les meilleurs appariements possibles chez ces espèces pour préserver la diversité génétique. C’est du sur-mesure !
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Photo : Espace pour la vie/Claude Lafond
À L’INSECTARIUM : LE DÉFI DU RENOUVÈLEMENT
«Pour la réouverture, on m’a demandé de renouveler le plus possible la collection vivante à présenter », affirme Stéphane Le Tirant, conservateur de la collection scientifique de l'Insectarium. Tout un défi ! Pour montrer des exclusivités, il faut trouver des insectes qui n’ont jamais été élevés en sol montréalais et s’adresser à des fournisseurs capables de sortir des sentiers battus. Heureusement, l’équipe peut compter sur les contacts que l’entomologiste a établis partout dans le monde en plus de 30 ans de carrière. Pour dénicher les perles rares, elle s’est donné des critères de sélection : ces petites bêtes doivent pouvoir être importées au pays et exportées ailleurs, avoir une longévité accrue, un potentiel éducatif intéressant et surtout être spectaculaires ! Émerveiller les visiteuses et visiteurs reste le but.
Le Grand Vivarium sera ouvert toute l’année et pourra accueillir des spécimens venus du monde entier. Et ça n’est pas tout ! Outre des papillons, l’espace accueillera des fourmis, des scarabées et de nombreux autres spécimens à découvrir. « On est la première institution au Canada à avoir le droit de mettre en exposition plusieurs types d’insectes dans une telle serre », s’enthousiasme l’entomologiste. De vrais précurseurs. L’équipe se prépare depuis des années à accueillir de nouvelles espèces. Mais, six mois avant l’arrivée de la pandémie mondiale de COVID-19, les choses commençaient déjà à se compliquer. Certains transporteurs habituels ont annoncé cesser tout transport d’arthropodes. Il faut dire que des scorpions s’étaient échappés
durant un vol, laissant les pilotes dans un état de stress compréhensible. Puis, la pandémie a ajouté un cran de complexité, en entraînant la fermeture de nombreux vols aériens. Alors il a fallu trouver des plans B, s’appuyer sur les fameux contacts de l’entomologiste et compter sur le savoir-faire de toute l’équipe. « Par exemple, j’ai fait venir des insectes d’Indonésie, en les faisant transiter par le Japon, Hong-Kong et Singapour, explique Stéphane Le Tirant. Un ami entomologiste les a récupérés à Berlin, les a gardés en captivité, les a fait pondre jusqu’à ce qu’on puisse les ramener ici ». Tout un détour.
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Photo : Espace pour la vie/Thierry Boislard
Stilpnochlora couloniana, une espèce de sauterelle qui sera présentée dans le nouvel Insectarium.
Vu les efforts déployés pour dénicher des perles rares des quatre coins du monde, l'équipe est plus que fière de les présenter enfin au public !