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DANS LES COULISSES DE LA GRANDE SERRE

• PAR VALÉRIE LEVÉE

Fin février, la Grande serre du Jardin botanique ouvre ses portes pour l’événement printanier Jardin de l’étrange. Dans une symphonie végétale où se côtoient des plantes flamboyantes, énigmatiques, succulentes, géantes et autres extravagances, le public peut admirer les belles fleurs en houppettes oranges de Stifftia chrysantha, les étranges fleurs du Dorstenia bahiensis, les phylloclades du Muehlenbeckia platyclada et bien d’autres curiosités végétales. Pour offrir ce spectacle, l’équipe horticole du Jardin botanique a travaillé plusieurs semaines, voire des mois, et bravé une succession de difficultés.

« Il y a autant de défis à relever que de plantes à cultiver», affirme l’horticultrice spécialisée Josée Massé. Chaque plante a en effet son propre rythme de croissance. Un premier défi est de les faire fleurir au bon moment pour l'ouverture de l'exposition. Pour les plantes commerciales, les temps de production sont connus et l’équipe peut établir un calendrier avec les dates de semis, de divisions, de bouturage, de rempotage… propres à chaque plante. Néanmoins, toutes ces plantes poussent sous des climats différents : elles ont des exigences particulières de température, d'humidité et de lumière tant pour leur croissance que pour leur floraison.

Dans les serres, l'équipe reproduit donc une diversité de conditions environnementales en jouant sur les consignes de température, d’humidité et d'arrosage. Des plantes qui ont besoin d’une période de dormance font un séjour au caveau ; des bulbes vont même au réfrigérateur. Ces conditions de culture se compliquent encore au moment de la floraison qui, pour certaines plantes, dépend de la longueur du jour. On ajoutera alors un éclairage artificiel à l’une ou, au contraire, on installera des toiles opaques pour simuler une longue nuit.

Ça, c'est quand les conditions de culture des plantes sont connues! « Le défi se corse lorsqu'on se livre à des expérimentations sur des plantes plus rares », relève Josée Massé. Il faut alors tester diverses conditions d'éclairages, de températures et d'arrosage, surveiller la réaction des plantes en espérant trouver la condition gagnante.

Enfin, le jour J approche et toutes les plantes sont prêtes pour l'exposition. Ici, un autre défi se présente : leur déplacement vers la serre d'exposition. Si la plupart des plantes ne subissent pas de stress, « quelques-unes ont parfois le mal des transports et affichent une mine basse à l’arrivée dans la serre », observe Josée Massé. D’autres réagissent mal au changement des conditions environnementales entre la serre de production et celle d’exposition. «La difficulté réside dans le fait de rassembler toutes ces plantes aux exigences culturales différentes dans un seul et même endroit », explique Viviane Fortier, horticultrice spécialisée de la serre thématique. Dans leur nouveau lieu de résidence, les conditions ne sont pas strictement homogènes, ce qui permet à la savante équipe d’installer les plantes aux endroits qui leur conviennent le mieux. Ainsi, la plupart vont surmonter le stress du transport et s’adapter à leurs nouvelles conditions avant l’ouverture des portes.

C’est le jour J. Tout est prêt, les plantes sont parées de leurs plus beaux atours et l'exposition peut enfin accueillir le public. Cependant, l'équipe d’horticulture doit continuer d'être quotidiennement aux petits soins autour de chaque plante pour qu’elle reste en santé jusqu’à la fin de l'exposition. Les feuilles séchées sont coupées, de même que les fleurs fanées, pour favoriser une deuxième floraison et des plantes de réserve viendront remplacer celles qui ont perdu leurs fleurs. Maintenir la floraison et le coloris du feuillage de toutes ces plantes aux exigences différentes durant toute la durée de l'exposition est le dernier défi. « C'est pourquoi l'événement ne dure que quelques semaines et qu’il faut saisir l’occasion et venir le voir», recommande Viviane Fortier.

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