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EXPERTS EN DROIT

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CARNET HUMANITAIRE

CARNET HUMANITAIRE

LE BAIL COMMERCIAL ET LA CRISE SANITAIRE

La crise sanitaire liée à la Covid-19 et la fermeture administrative des chantiers et magasins ont choisi de privilégier la santé publique à l’économie, ce qui était fondamental pour éviter une propagation du virus. Toutefois, la dure réalité de la vie économique nous amène à réfléchir sur les obligations contractuelles du bailleur et du locataire durant cette période de fermeture administrative des magasins alors qu’en l’absence de chiffres d’affaires et de trésorerie, un bon nombre n’ont pas pu payer les loyers de cette période.

Quelles sont les conséquences du coronavirus sur les baux commerciaux ?

Une fermeture administrative a été décidée par règlement grand-ducal du 18 mars 2020, le bailleur n’était plus en mesure donner la jouissance des lieux à son locataire. Pourtant, il a l’obligation contractuelle de permettre à son locataire d’occuper son local commercial en contrepartie du loyer. Le bailleur a donc obligé son locataire à fermer son commerce sur décision des pouvoirs publics sans pour autant être responsable de cette fermeture administrative qui est due à un événement, la COVID-19, qui a les caractéristiques de la force majeure. En effet, le propriétaire doit se soumettre à la loi et il se trouve donc exonéré de son obligation de permettre jouissance qui est une obligation de résultat.

Le propriétaire peut-il réclamer les loyers impayés de cette période et demander la résiliation du bail ?

Il n’y a pas encore de réponse tranchée. Cela reviendrait à obliger le locataire à payer le loyer et considérer alors que même si le locataire n’a pas la jouissance de son local commercial, il se trouverait dans l’obligation de payer les loyers relatifs à la période de crise sanitaire. Le bailleur se trouverait donc exonéré de son obligation de permettre la jouissance en invoquant la force majeure qui est la fermeture administrative liée à la Covid 19 mais le locataire ne serait donc pas exonéré de son obligation de paiement alors même qu’il n’a pas pu user de son local. À ce titre le propriétaire pourrait alors contraindre son locataire à payer les loyers impayés pendant la crise sanitaire.

FRÉDERIC FRABETTI & CARMEN RIMONDINI

Le locataire a-t-il l’obligation de payer son loyer ?

Le locataire subit une fermeture administrative et se trouve dans l’impossibilité d’utiliser les lieux qu’il loue.En principe, son obligation contractuelle est le paiement du prix du loyer qui est la contrepartie de la jouissance paisible des lieux. Il est également dans l’obligation de se soumettre à la loi de fermer son local sous peine de sanctions. De plus, le local commercial faisait immédiatement l’objet d’une fermeture administrative de l’entreprise commerciale jusqu’à la fin de l’état de crise. Le locataire peut invoquer (sauf clause contractuelle de renonciation signée dans son contrat de bail) l’article 1135-1 du code civil afin d’opposer l’exception d’inexécution pour permettre le non-paiement du loyer. Le bailleur n’exécuterait pas son obligation de jouissance de sorte que le locataire serait en droit de ne pas payer les loyers seulement pendant la période de crise sanitaire à moins d’avoir accepté le paiement dans une clause du bail. Il serait ainsi suspendu de son obligation de payer le loyer.Le locataire ne ferait pas de paiement pour les loyers impayés limités à la période de crise sanitaire, si le locataire est empêché de jouir de son local commercial à 100% et si le locataire n’a pas acceptéle payement du loyer dans le contrat dans ce cas.

Le législateur doit il intervenir ?

En effet, le débat entre les arguments du locataire et ceux du propriétaire devra être tranché par les juges si le législateur n’intervient pas. Différents contentieux sont déjà engagés par les propriétaires demandant la condamnation aux loyers impayés et la résiliation du bail commercial. Il faut préciser qu’une proposition de loi a été rédigée et devrait être votée à la chambre des députés.Il s’agit de la Proposition de loi 7551 portant suspension pendant la durée de l’état de crise des loyers relatifs aux baux commerciaux et à usage professionnel.

Quelles mesures prévoit de projet de loi ?

Elle prévoit la suspension de l’obligation de paiement des loyers durant l’état de crise. Cette suspension s’accompagne de la privation du droit de résiliation avec effet immédiat dont dispose le bailleur en temps normal, avec la précision que cette privation ne concerne que le non-paiement des loyers échus ou à échoir pendant la durée de l’état de crise. Néanmoins, si le locataire s’abstient de payer les loyers venant à échéance après la fin de l’état de crise, le bailleur retrouve la totalité de ses droits et pourra réclamer les loyers impayés après cette période.

De même, si le locataire ne règle pas les arriérés de loyers accumulés durant l’état de crise au plus tardle 30 juin 2021. Le propriétaire retrouvera ses droits. Le projet prévoit également la faculté pour les deux parties de revoir à la baisse le loyer dû, la possibilité pour le bailleur de renoncer aux loyers en question. Il faudra donc attendre de savoir si le législateur entend intervenir afin d’éviter que le juge ne puisse engendrer des décisions inéquitables dans un contexte de force majeure.Il faut tout de même noter que si le législateur n’intervient pas, il est plus judicieux pour les propriétaires de trouver un arrangement avec leur locataire alors qu’en période de crise économique, il est certainement plus cohérent de conserver le locataire actuel que d’avoir un local vide suite à une résiliation du bail.●

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