Fiches du Cinéma 1994-95

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Cinéma

les Fiches

du

FIN DE CONCESSION de Pierre Carles

et aussi...

VÉNUS NOIRE de Abdellatif Kechiche

POTICHE de François Ozon

BELLE ÉPINE de Rebecca Zlotowski

RUBBER de Quentin Dupieux

EN PRÉSENCE D’UN CLOWN de Ingmar Bergman

N°1994-95

• Bimensuel • 27 OCTOBRE 2010 • 4,00 €


Allez, raconte ! (1992) Les Amours imaginaires (1990) Arthur 3 - La Guerre des deux mondes (1992) Bassidji (1994) Biutiful (1992) Buried (1994) Captifs (1992) Le Dernier voyage de Tanya (1994) Des filles en noir (1994) Donnant donnant (1992) Draquila, l’Italie qui tremble (1994) En présence d’un clown (1994) Entre nos mains (1992) Fair Game (1994) Fin de concession (1994) L’Homme qui voulait vivre sa vie (1994) Illégal (1992) Il reste du jambon ? (1994) Je ne peux pas vivre sans toi (1994) Kaboom (1992) Kill Me Please (1994) Laisse-moi entrer (1992) Moi, moche et méchant (1992) Mystères de Lisbonne (1992) Nostalgie de la lumière (1994) Les Nuits de Sister Welsh (1994) Les Petits mouchoirs (1992) Petit tailleur (1992) La Princesse de Montpensier (1994) Les Rêves dansants (1992) Rouge comme le ciel (1992) Sans queue ni tête (1990) Simon Werner a disparu... (1990) The Social Network (1992) Un homme qui crie (1990) La Vie au ranch (1992) Vénus noire (1994) Vous allez rencontrer un bel et sombre... (1992) Waking Sleeping Beauty (1992) Wall Street : L’Argent ne dort jamais (1990) ● un film désastreux

❍ un mauvais film

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autres c otes du com ité de réda ction

Camille Lebert L oiret Nicolas Marcad é Marine Quincho n Chloé R olland

Michae l Ghenn am Pierre-S imon G utman Roland Hélié

Michel Berjon

Les Étoiles de la Rédaction Anne B erjon

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★★ un film honorable

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★★★ un bon film

★★★★ un excellent film

★★★★★ une œuvre maîtresse


édito

par Nicolas Marcadé

Mouché !

Les Petits mouchoirs © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

Mercredi dernier, Les Inrockuptibles, dont les pages cinéma, inflation des sorties oblige, pratiquent abondamment la mini-notule ou l’impasse pure et simple, ont fait le choix d’utiliser une page (presque) entière pour atomiser Les Petits mouchoirs. Dans le même temps, Télérama, Libération et bien d’autres, enclenchaient également le Karsher en se pinçant le nez et empilaient les vannes haineuses comme si Canet avait couché avec Marine Le Pen. Or, certes, Les Petits mouchoirs est loin d’être un film parfait, et on ne s’attend pas à ce que cette presse-là ait beaucoup d’indulgence pour lui, mais ce déploiement d’artillerie lourde et ce front uni semblent vouloir indiquer qu’il y a plus, qu’il y a là un combat à mener, quelque chose à défendre. Oui, mais quoi exactement ? Si, aujourd’hui, Les Petits mouchoirs de Guillaume Canet est l’ennemi face auquel la critique se sent en devoir de se radicaliser pour défendre ses valeurs, alors c’est que l’on vit une époque idéologiquement bien calme... Au-delà des arguments avancés officiellement (durée démesurée, personnages médiocres, éloge de la beauferie) qui, tels que, pourraient tout aussi bien s’appliquer à n’importe quel film d’Apatow, on peut lire, dans l’ensemble de ces critiques assassines, deux choses en sous-texte. D’une part, ce que l’on reproche au Canet, c’est le triomphe public qu’il n’a pas encore obtenu, et un soutien dans les médias populaires dont on pressent qu’il sera massif (Canet a fait la couv’ de Première, on a vu Claire Chazal pleurer à une projection de presse...). Chacun croit donc réagir à un consensus acquis d’avance, et fabrique finalement un consensus encore plus fort et tout aussi absurde que l’autre. L’autre chose, c’est que l’on reproche au film d’être français. Ou du moins, on le traite avec condescendance et intransigeance pour cette raison. Et du coup, voir Les Petits mouchoirs envisagé sous un angle politique et moral dans les même journaux que ceux qui avaient trouvé irrésistiblement fun le sado-puritanisme de Piranha 3D me laisse pour ma part quelque peu perplexe... Mais il est acquis qu’aujourd’hui il y a toujours deux poids, deux mesures : quand un film américain est réactionnaire on cite John Ford, quand un film français est réactionnaire on cite Jean Delannoy... D’ailleurs, si Ne le dis à personne (film tout aussi imparfait dans son genre, et tout aussi chargé en vedettes, programmé pour le succès et nourri de gros chèques signés Pierre-Ange Lepogam) était toléré par la critique, c’est parce que Canet y faisait du cinéma américain, et que, donc, il restait dans les clous... Au bout du compte, ce qui est surtout gênant dans cette affaire, c’est que les Inrocks ou Libé, finalement, utilisent ici, pour parler des Petits mouchoirs, exactement la même langue (celle du sarcasme, de la mauvaise foi et du “j’touche pas à ça”) que celle dans laquelle Le Figaro s’exprime sur Oncle Boonmee. Or, il est peu rassurant, d’une part de voir des adversaires fraterniser dans la haine, et d’autre part de voir la critique dans son ensemble évoluer vers un discours qui ne se fait pas sur les films mais sur leur dos.


Bassidji Documentaire

de Mehran Tamadon

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Laetitia Lemerle et Mehran Tamadon Images : Majid Gorjian Montage : Andrée Davanture et Rodolphe Molla Son : Jérôme Cuendet

Production : Box Productions Distributeur : Aloest Distribution.

114 minutes. France - Suisse - Iran, 2009. Sortie France : 20 octobre 2010. Visa d’exploitation : 124331. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SR. 3 copies.

Mehran Tamadon, Iranien athée, exilé en France, retourne au pays pour rencontrer les milices religieuses. Tout en les respectant et en se faisant respecter, il a trouvé ici un dispositif subtil pour les faire parler. Instructif !

Commentaire Documentaire d’un cinéaste iranien, architecte de formation vivant en France, Bassidji aborde un sujet lourd et tente de lever un peu plus le voile sur un pays qui fascine, intrigue ou terrifie de plus en plus. Tourné avant la réélection controversée d’Ahmadinejad, ce film permet de comprendre un peu le fonctionnement mental de son clan en s’intéressant aux Bassidji (les “mobilisés”, en persan), une force paramilitaire émanant des Gardiens de la Révolution islamique. Ce terme désigne aussi les martyrs anciens du Coran et de l’histoire musulmane mais, plus spécifiquement, ceux de la guerre contre l’Irak des années 1980. Le noyau dur des Bassidji est avant tout constitué de vétérans de ce conflit, véritables héros nationaux et pierre angulaire du régime. Mais ce que le film montre, c’est également la présence des morts, le culte particulièrement réglé et construit autour des martyrs, qui infiltre toutes les couches de la société et agit comme modèle indépassable. Du coup, les Bassidji ne sont plus seulement les vétérans, mais tous ceux qui communient dans ce culte et acceptent de rejoindre les rangs informels de ce mouvement. Le cinéaste filme des instants où les Bassidji évoquent l’héritage de la guerre et leur volonté de conserver une société iranienne fidèle à l’héritage du guide suprême et de la révolution de 1979. Les controverses dans les conversations sont nombreuses, filmées sans filtre, et font lentement surgir l’idée d’une guerre (celle contre l’Irak) bénie car ayant permis de fortifier (dans le sang, © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

© Box Prod.

la résistance) toute une génération chargée de porter le nouvel État de Khomeiny. Les rites célébrant ces sacrifices indispensables au ciment de la société afghane sont donc légions. L’un des sommets du film demeure une scène de pleurs collectifs, suivie d’une interview très hermétique de l’Imam ayant présidé à cette cérémonie. Le documentariste tente d’éviter tout raccourci, présupposé ou simplification malheureuse et parvient à ouvrir le débat par le biais de questions posées par des Iraniens (visiblement des jeunes ou des femmes) à un groupe de Bassidji. Ces moments sont précieux en ce qu’ils montrent la dimension souvent intolérante du groupe, mais également l’habilité qu’il peut parfois déployer. Ainsi, cet éditeur, pourvu d’une bonne tête et d’une certaine science rhétorique, qui n’a pas peur de dire au cinéaste qu’il est quelqu’un de bien et qu’il finira probablement par les comprendre. Athée, Tamadon a trouvé le bon dispositif pour “filmer l’ennemi”, e comprendre, le faire parler et révéler son dogmatisme. Mais, à l’inverse d’un Michael Moore, il s’interdit de débattre en son nom, au risque de sembler se laisser manger par son interlocuteur. Ce qui n’enlève rien à la force souvent tranquille, sans haine ni jugements hâtifs, de ce film. S.G. 04


Fin de concession Documentaire

de Pierre Carles

Adultes / Adolescents

Avec Hervé Bourges, Charles Villeneuve, Étienne Mougeotte, Michèle Cotta, Jean-Pierre Elkabbach, Jean-Marie Cavada, Jacques Chancel, Élise Lucet, David Pujadas, Franz-Olivier Giesbert, Bernard Tapie, Audrey Pulvar, Jean-Luc Mélenchon, Patrick Poivre d’Arvor, Arnaud Montebourg, Christine Ockrent.

Équipe technique Images : Pierre Carles, Gonzalo Arijon, Olivier Azam, Ludovic Raynaud, Véronique Rossignol, Boris Perrin, Anne Fribourg, Pascal Boucher, Philippe Lespinasse, Igor Ochronowicz, Éric Biesse, Damien Doignot, Fabrice Ferrari, Gilles Bour, Jean-Marc S. et Éric & George M. Montage : Bernard Sasia et Matthieu Parmentier

Son : Marie-Pierre Thomat, Jean-Baptiste Haehl et David Rit Production : C-P Productions, Les Mutins de Pangée et Touscoprod Productrice associée : Élisabeth Beldame Distributeur : Shellac.

Semaine du 27 octobre

131 minutes. France, 2010. Sortie France : 27 octobre 2010. Visa d’exploitation : 115240. Format : 1,85 - Couleur - Son : DTS SR.

Entremêlant différents codes narratifs - ceux du polar, du road-movie et du journal intime - Fin de concession est un vrai film de cinéma, dont la forme - le doute nourrit intelligemment le propos, sans perdre sa nature de film-tract, hilarant et édifiant.

Commentaire Paris, mai 2010, “tout a failli s’achever ici”. Ici, c’est à l’Automobile-Club, place de la Concorde, où a lieu chaque quatrième mercredi du mois le dîner du Siècle, rassemblant élus de gauche et de droite et journalistes influents dans une ambiance de chaude camaraderie. Il y était question de piéger David Pujadas, le présentateur-vedette du journal de 20 heures de France 2. Flashback. Ainsi commence le nouveau film de Pierre Carles, que l’on a l’habitude de qualifier de trublion. S’il prouve encore qu’il est un semeur de trouble, Fin de concession ne s’arrête pas à sa seule agitation, il en donne les raisons, qui ont toujours à voir avec les médias dominants, dont Carles avait dénoncé les (auto)censures dans Pas vu pas pris, il y a maintenant quinze ans. Le journaliste a donc pris de l’âge et, en s’attaquant cette fois au “scandale” du renouvellement automatique de la concession de TF1 pourtant accordée pour une durée de dix ans au groupe Bouygues en 1987, il en vient à se demander s’il n’a pas perdu son “fighting spirit” sur la route des années. Car il ne se révèle plus aussi facile pour lui d’aller gratter les “grands (journalistes) de ce monde”. C’est là l’atout du film : son hésitation. L’enquête de Pierre Carles sur les raisons du silence, toutes chaînes confondues, entourant la question de la concession de TF1 se double en effet d’une remise à plat du “concept” de critique radicale, tel qu’il l’avait appliqué jusqu’ici. Facilement flatté par celui qu’il voulait piéger (J-M. Cavada), séduit par celle qu’il voulait bousculer (É. Lucet), tendrement éconduit par celle qu’il pensait faire parler (A. Pulvar)... et si Pierre Carles était lui aussi devenu © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

© Shellac

une institution, un “mec qui tutoie les politiques”, comme le lui avait prédit J. Chancel, passé maître en la matière ? Posant sur les images de son enquête sa voix (de making) off, il semble commenter la chronique d’un ratage. Et c’est redoutablement malin ! Car sous ses airs de militant has-been, incapable de se montrer incisif face à des journalistes-à-papa, Pierre Carles s’offre de ressusciter dans un lent travail collectif. Il fait ainsi appel à l’esprit corrosif de Jean-Edern Hallier, se voit imposer par sa productrice, A. Gonzalez, les services d’une journaliste vénézuelienne, V. Martinez, écume toutes les ruses pour décrocher une interview (louant une montgolfière pour pénétrer la citadelle France 2 ou se déguisant en “Carlos Pedro” pour ne pas être reconnu !). Avec un humour débridé, l’enquêteur met en scène ses difficultés et ses propres contradictions pour finalement renouveler ses méthodes. Il invente une forme de contestation “sans concession”, une sorte d’entartage post-moderne : lui et une fine équipe dorent le scooter de David Pujadas, après lui avoir remis la Laisse d’or du siècle. Boucle bouclée. Et entre-temps, il aura tout de même aligné les preuves à charge contre la “confraternité” des journalistes, soumis au pouvoir politique, lui-même dévoué à la sphère économique mondialisée. Ch.R. 05


Il reste du jambon ? Comédie romantique

de Anne Depetrini Avec Ramzy (Djalil Boudaoud), Anne Marivin (Justine Lacroix), Marie-France Pisier (Nicole Lacroix), Fellag (Mahmoud Boudaoud), Biyouna (Houria Boudaoud), Jean-Luc Bideau (Charles Lacrois), Géraldine Nakache (Sophie), Leïla Bekhti (Anissa Boudaoud), Arnaud Henriet (Mathieu), Alex Lutz (Benoît), Frank Bellocq (Pierre), Franck Bruneau (Gilles),

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Anne Depetrini, Benjamin Guedj et Ramzy Bedia Images : Christophe Offenstein Montage : Béatrice Herminie 1er assistant réal. : Denis Imbert Musique : Akhenaton Son : Pierre Excoffier, Bruno Seznec et Joël Rangon Décors : Johann George Costumes : Pascaline Chavanne

Éric Judor (le vigile).

Production déléguée : Les Films du Cap et 4 Mecs à Lunettes Coproduction : TF1 Films Production et Gaumont Producteurs : Jean Cottin, Ramzy Bedia et Laurent Taïeb Dir. de production : Pierre Wallon Distributeur : Gaumont.

90 minutes. France, 2010. Sortie France : 27 octobre 2010. Visa d’exploitation : 121251. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

L’histoire d’amour entre une Française et un Français d’origine arabe, chahutée par leurs différences culturelles. Ce premier film qui ne trouve jamais son rythme donne un nouvel exemple des ravages des bonnes intentions sur un récit sincère.

Commentaire Ancienne Miss météo de Canal+, Anne Depetrini passe derrière la caméra pour s’intéresser au climat des sentiments... Soit les amours d’un Arabe et d’une Française, qui voient de terribles orages s’abattre sur leur couple à cause de leurs différences culturelles. Ce premier film s’inspire de sa propre histoire puisque, à la ville, Depetrini est la compagne du comédien Ramzy. Mais, au lieu de puiser des détails originaux dans son vécu, Depetrini livre un film impersonnel et ennuyeux. Pourtant, tout commençait bien, sur un rythme très enlevé, avec montage efficace et blagounettes rigolotes. Mais le soufflé tombe d’un coup, dès que s’amorce l’histoire d’amour, banale et sans intérêt, dont on ne nous épargne aucun passage obligé : présentation aux parents, dispute, réconciliation... Quant au coup de foudre si fortement revendiqué, il n’existe jamais à l’écran, plaqué tel quel comme une donnée immanente du label “comédie romantique”. De plus, la mise en scène, molle, n’exploite pas la dynamique d’opposition entre les deux cultures des protagonistes. Les acteurs jouent leur partition avec professionnalisme, sans plus. Le duo Jean-Luc Bideau/Marie-France Pisier, mal dirigé, ou Ramzy, à contre-emploi en jeune premier, ne convainquent pas. Finalement, Depetrini est victime de ses bonnes intentions... Alors qu’elle voulait “déjouer les préjugés” qui circulent sur la communauté musulmane en France, elle enquille les clichés éculés sans en tirer le moindre parti comique. Sur un thème similaire, Mauvaise foi de Roschdy Zem se révélait plus subtil et réussi. I.B.

© Gaumont

Résumé Justine Lacroix, journaliste télé dynamique, atterrit à l’hôpital après une allergie. Là, elle tombe sous le charme du jeune docteur Djalil Boudaoud. Elle accepte un dîner, puis un autre... C’est le coup de foudre. Justine présente bientôt Djalil à ses parents, Charles et Nicole, de grands bourgeois parisiens, qui, lors du dîner, enchaînent les remarques pleines de préjugés sur les Arabes. Après des hésitations, Djalil emmène enfin Justine dans sa cité de Nanterre. Sa mère, Houria, réserve un accueil glacé à la “maigrichonne qui fait sa belle”. Malgré ces difficultés, Djalil et Justine emménagent ensemble. Ils dépassent leurs différences, même si Justine dévore des sandwichs devant Djalil en plein ramadan.

Dénouement Mais le choc culturel a lieu lors du mariage d’une des sœurs de Djalil, auquel toute la famille Lacroix a été invitée. Justine y apprend que Djalil était promis à une autre femme et qu’il a banni une sœur de la famille car celle-ci a eu un enfant hors mariage. Outrée, Justine se dispute avec Djalil. Le lendemain, elle l’accueille vêtue d’une robe en tranches de jambon. Ils se séparent. Justine se rapproche d’Houria, qu’elle aide à faire ses devoirs. Car Houria est en CE2 ! Justine décide de réaliser un documentaire sur cette mère courage. Lors du dernier jour de tournage, elle retrouve Djalil. Ils se pardonnent et tombent dans les bras l’un de l’autre. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Je ne peux pas vivre sans toi (Bu neng mei you ni) Drame social

de Leon Dai

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Leon Dai, d’après une idée de Chen Wen-Pin Images : Chang Hsiang-Yu Montage : Leon Dai Musique : Kageyama Yukihiko Son : Chen Te-Chuan Décors : Huo Ta-Hua Costumes : Chuang Huel-Yi

Production : Partyzoo Films Producteurs : Leon Dai et Chen Wen-Pin Distributeur : Héliotrope Films.

92 minutes. Taïwan, 2009. Sortie France : 27 octobre 2010. Visa d’exploitation : 127406. Format : 1,85 - Couleur et Noir & Blanc - Son : Dolby SRD. 15 copies (vo).

Pour son passage derrière la caméra, l’acteur L. Dai dénonce, à travers les démarches d’un père qui risque de perdre la garde de sa fille, les travers d’un pays où le modernisme s’accorde mal avec le pluriculturalisme. Un film émouvant mais au style franchement désuet.

Commentaire Les termes théoriques sont parfois trompeurs. Ainsi, le long métrage de Leon Dai est annoncé comme appartenant à la vague du nouveau “nouveau cinéma taiwanais” (c’est-à-dire post-Hou Hsiao-Hsien), or, il faut bien l’admettre, sa forme n’a rien de très novateur. Le film raconte l’histoire d’un Taiwanais pauvre et analphabète, travaillant au noir et exploité par ses employeurs, qui se bat en vain pour faire reconnaître sa paternité auprès des diverses administrations. Le récit oscille donc entre des séquences très descriptives, quasi naturalistes (la préparation de la plongée, la lessive avec les pieds...) et d’autres montrant le personnage principal aux prises avec des services publics modernes désespérants d’immobilisme. Plus que la misère humaine la force d’inertie de l’administration s’avère être le vrai sujet du film, comme tend à le confirmer la polémique qu’il a suscitée à Taïwan. Si cet itinéraire kafkaïen intrigue et intéresse, les scènes plus contemplatives - reproduisant de façon caricaturale les tics du cinéma d’auteur - n’ont en revanche qu’un intérêt limité. Peut-on encore imaginer un réalisme en Noir & Blanc ? Ici, l’esthétique radicale, comme inspirée des années 1940, dénature malgré elle la violence des situations. En dépit de ces maladresses le film parvient parfois à toucher, essentiellement grâce à l’interprétation, d’une tristesse abyssale, de Chen Wen-Pin. Un joli film pour cinéphiles, extrêmement sincère, un peu ennuyeux ; tout à fait honnête en somme pour un premier long métrage. M.Q.

© Partyzoo Films

Résumé Wu-Hsiung vit pauvrement avec sa fille de sept ans, Mei, dans le port de Kaohsiung. Un jour, les policiers viennent l’interroger et le somment de régulariser rapidement la situation de Mei, dont la mère a disparu et dont Wu-Hsiung ne peut prouver qu’il est le père. Il tente d’inscrire sa fille sur les registres d’état civil, mais on lui apprend que la mère de Mei et son compagnon, introuvables, sont les tuteurs légaux de Mei. Son ami A-Tsai lui conseille d’aller trouver un législateur de leur ethnie. Wu-Hsiung part donc pour Taipei en mobylette avec Mei. Le législateur les confie à son assistant, qui les emmène à la préfecture, où on renvoie Wu-Hsiung à son bureau d’état civil, auprès de M. Lin. Wu-Hsiung et Mei repartent pour Kohsiung, et dorment en route dans une école.

Dénouement Ils sont envoyés auprès des services sociaux qui s’avouent impuissants. Lorsque la police revient, Wu-Hsiung et Mei se cachent et repartent pour Taipei. Le législateur et son assistant ne sont pas là. La police les arrête, puis les relâche. Wu-Hsiung menace alors de se jeter d’un pont, devant les médias, Mei accrochée à lui. La police l’en empêche et lui enlève Mei. Deux ans plus tard, Wu-Hsiung vivote toujours de petits boulots et vit avec A-Tsai, continuant à chercher Mei. Une assistante sociale lui confie que Mei va bien, mais qu’elle est muette depuis deux ans. Un jour, en rentrant du travail, Wu-Hsiung trouve Mei qui l’attend. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Semaine du 27 octobre

Avec Chen Wen-Pin (Li Wu-Hsiung, le père), Chao Yo-Hsuan (Mei, la fillette), Lin Chih-Ju (A-Tsai, l’ami).


Nostalgie de la lumière (Nostalgia de la luz) Documentaire

de Patricio Guzmán

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Patricio Guzmán Images : Katell Djian Montage : Patricio Guzmán et Emmanuelle Joly 1er assistant réal. : Cristóbal Vicente Musique : Miranda & Tobar Son : Freddy González et Jacques Quinet Effets spéciaux : Éric Salleron

Production : Atacama Productions, Blinker Filmproduktion, WDR et Cronomedia Productrice déléguée : Renate Sachse Coproducteurs : Meike Martens et Cristóbal Vicente Productrice exécutive : Verónica Rosselot Distributeur : Pyramide.

90 minutes. Chili - France - Espagne - Allemagne, 2010. Sortie France : 27 octobre 2010. Visa d’exploitation : 121200. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 35 copies (vo).

Dans le désert d’Atacama, scientifiques, historiens et victimes de la dictature se côtoient et traquent l’Histoire. P. Guzmán filme les lieux avec maestria, et les témoignages de ces explorateurs avec un intérêt que le spectateur ne partage en revanche pas toujours.

Commentaire Dans un observatoire de Santiago, la lumière glisse amoureusement sur les cuivres d’un immense télescope allemand, offert il y a des décennies au Chili. L’astronomie y serait, en effet, une passion largement partagée : on y voit mieux les étoiles qu’ailleurs. Parce qu’il est le territoire le plus sec du monde, le désert d’Atacama est devenu le paradis des chercheurs, installés dans des observatoires aux allures de temples orientaux, sur les hauteurs, d’où ils scrutent le ciel à la recherche de vérités sur l’origine de l’univers. Lui-même passionné d’astronomie, Patricio Guzmán (Le Cas Pinochet, La Bataille du Chili) est allé à la rencontre de scientifiques, comme Gaspar, un jeune astronome, pour évoquer avec eux les paradoxes de cette science : observer le destin des étoiles, à des années-lumière des faits, pour explorer le passé le plus lointain. Aussi Guzmán regarde-t-il les étoiles avec nostalgie, comme Barthes le portrait de Lewis Payne : un corps qui est déjà mort, mais dont la lumière garde la trace. Une lumière que le réalisateur ne cesse de chercher et d’effleurer dans ce documentaire à l’esthétique souvent captivante. Mais d’autres chercheurs traquent la mémoire dans le désert. Lautaro, l’archéologue, revisite les itinéraires des civilisations précolombiennes, qui balisaient les chemins de dessins d’hommes et d’animaux, redessinant, des centaines d’années plus tard, le tableau d’un désert qui, comme le Sahara, n’aurait jamais cessé d’être traversé. Mais c’est, comme dans les autres films du documentariste chilien, une autre Histoire, beaucoup plus récente, qui prend le dessus. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

© Pyramide

En effet, dans cette immense étendue désertique, un groupe de femmes retourne depuis vingt-huit ans la moindre pierre dans l’espoir de retrouver au milieu du sable un indice, un bout d’os, qui les mènerait aux corps disparus de leurs enfants, victimes de la dictature. Plusieurs années après la fin du régime de Pinochet, elles sont ainsi parvenues à exhumer dans le désert une fosse où étaient enterrés des dizaines de ces autres “desaparecidos”. Depuis, elles n’ont jamais cessé de chercher. Le propos du documentaire est donc d’entrecroiser ces trois approches du désert, du temps et de la mémoire, de distinguer des points communs pour les rapprocher en confrontant les témoignages. Mais à trop explorer l’intangible, cette quête devient parfois vaine, et certains témoignages peinent à intéresser. En revanche, dès que le film abandonne les méditations métaphysiques pour revenir au concret, l’intérêt renaît. Et on préférera aux théories fumeuses l’histoire émouvante de Miguel, passé par cinq camps de concentration dont il est parvenu à redessiner plus tard des plans précis, ou encore l’histoire de Luis qui, prisonnier dans un camp au milieu du désert, a appris, avec un groupe de détenus et l’aide d’un amoureux des étoiles, à regarder le ciel, jusqu’à faire de l’astronomie sa passion. M.Q. 08


Les Nuits de Sister Welsh Fantaisie initiatique

de Jean-Claude Janer

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Jean-Claude Janer, avec la collaboration d’Agnès de Sacy et Hélène Angel Images : Fabien Lamotte Montage : Franck Nakache 1er assistant réal. : Nicolas Saubost Son : Michel Casang, Julien Bourdeau et Stéphane Larrat Décors : Stéphane Levy Costumes : Virginia Vogwill Effets spéciaux :

l’amazone), Sophie Berge (Clémence / l’amazone), Sylvie Dupasquier (Anne-Sophie / l’amazone), Caroline Riou (Odile / l’amazone), Diane Stolojan (Morgane / l’amazone), Guillaume Pavageau (Étienne), Annie Vicaire (Yu Li), Luc Moullet (le professeur Glencoe), Marité Blot (l’infirmière de la prison), François Chomicki (l’homme du chantier).

Antoine Demongeot Production : Arturo Mio et Maïa Cinéma Producteurs : Caroline Roussel et Gilles Sandoz Dir. de production : Anne Bennet Distributeur : Albany Films / Aramis Films.

80 minutes. France, 2009. Sortie France : 27 octobre 2010. Visa d’exploitation : 111927. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SR DTS. 20 copies.

Une réflexion tendre et ironique sur le quotidien parfois morne et l’imaginaire hautement romanesque d’une ado de 16 ans qui rêve sa mère, un rien figée, en religieuse ardente et dévorée de passion dans un univers digne des Sœurs Brontë. Surprenant et réussi.

Commentaire Dans son premier long métrage, Superlove, J-C. Janer mettait en scène un garçon-coiffeur qui rencontrait la Vierge, ici c’est Emma qui imagine sa mère (la décidément fantastique Anne Brochet) en bonne sœur exaltée. Ce qu’Emma voit, ce sont là les deux faces d’une même femme Janus, à la fois celle, réelle, atone, brisée par l’amour jusqu’à s’en être fanée, et l’autre religieuse encore ardente car toujours dans le désir d’aimer. Le va-et-vient entre le monde réel de l’ado et son monde fantasmatique, l’un alimentant l’autre, l’autre inspirant l’un, rythme le film avec humour, rendant l’ensemble sympathique en coupant court à tout dérapage complaisant ou simplement platement réaliste sur le désarroi adolescent. Les scènes imaginaires, fixées dans un incroyable décor de carton-pâte assumé, semblent tout droit inspirées d’un univers à la Jane Eyre revisité par Méliès ou Walt Disney (studio pour lequel Janer a d’ailleurs travaillé). De l’ensemble sourd l’impression, à la fois gaie et mélancolique, d’une divagation féérique que porte la jeune Louise Blachère (Naissance des pieuvres), qui confirme là une vraie personnalité et un indéniable talent par sa capacité à rendre une intériorité intense. Dans la floraison de films récents sur l’état adolescent, de LOL aux Beaux gosses, ne doutons pas que ce film impose une singularité qui fait la part belle à l’imaginaire en surchauffe, aux songes flottants, aux cauchemars éveillés qui peuplent cet âge de la vie, bien plus finalement que les projets concrets et les perspectives ouvertes. C’est d’ailleurs en cela, sans doute, que ce film frappe si juste. N.Z.

© Albany Films / Aramis Films

Résumé Emma a 16 ans et vit à Paris avec sa mère et son beau-père, gentil et inconsistant. Son père, qu’elle visualise sous la forme d’un spoutnik, est parti voilà longtemps et sa mère, beauté glacée et glaçante, génitrice sans tendresse ni émoi, semble définitivement incapable de s’en remettre. Celle-ci est responsable d’un fitness club, l’Amazone Room, où Emma la fantasme en prêtresse, poussant ses disciples femmes à des exercices de détestation des hommes. Emma, elle, se trouve moche et grosse, un dégout qui l’occupe beaucoup, notamment devant la glace face à laquelle elle se houspille. Elle a pour amis et condisciples la belle Marion et son petit ami Fabrice. Ce dernier, avec lequel elle s’imagine partant à Tanger sur son scooter, n’est pas insensible à la folie, douce et fantasque, d’Emma, qui se construit un univers dans lequel sa mère incarne Sister Welsh, héroïne brûlante, follement romanesque et directement issue d’un roman anglais du XIXe siècle.

Dénouement Sister Welsh vit à Plymouth, et guette sur l’horizon de la mer le bateau de son amour perdu, le Capitaine Grant. Autant Sister Welsh est passionnée et nourrie d’idéal, autant la mère d’Emma est refoulée et maniaque. Pour la faire réagir coûte que coûte, Emma lui assène des vérités improbables concernant d’hypothétiques grossesses, jusqu’au jour où, enfin, il lui arrive vraiment quelque chose : Emma est amoureuse de Fabrice, qui le lui rend bien. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Semaine du 27 octobre

Avec Anne Brochet (Sister Welsh / Catherine), Louise Blachère (Emma), Bernard Blancan (Henry), Davia Martelli (Marion), Laurent Delbecque (Fabrice), Lily Bloom (Jane Ashley), Émilie Gavois-Kahn (Brenda Mac Cullock), Brigitte Lucas (Mother O’Brady), François Négret (Paul), Coline Cambois (Isabelle), Tancrède Cervoni (Pierre), Brigitte Barilley (Ghislaine /


(Legend of the Guardians :

Le Royaume de Ga’Hoole La Légende des gardiens The Owls of Ga’Hoole) Animation

de Zack Snyder

Adultes / Adolescents

Avec les voix de Jim Sturgess (Soren), Emily Barclay (Gylfie), Ryan Kwanten (Kludd), Geoffrey Rush (Ezylryb), David Wenham (Spéléon), Hugh Weaving (Noctus / Scrogne), Anthony LaPaglia (Perce-neige), Helen Mirren (Nyra), Miriam Margolyes (Mrs. Plithiver), Joel Edgerton (Bec d’Acier), Abbie Cornish (Otulissa), Sam Neill (Allomere), Richard Roxburgh (Boron), Barry Otto (Échidné),

Équipe technique Scénario : John Orloff et Emil Stern, d’après les romans Les Gardiens de Ga’Hoole de Kathryn Lasky (2003-2008) Montage : David Burrows Animation : Eric Leighton Musique : David Hirschfelder Chansons : Adam Young, Lisa Gerrard et Dead Can Dance Son : Wayne Pashley Décors : Simon Whiteley Effets visuels : Kenneth Bailey

Adrienne deFaria (Églantine), Leigh Whannell (Casus), Gareth Young (Pete), Angus Sampson (Belli), Essie Davis (Marella), Deborra-Lee Furness (Barran), Bill Hunter (Bubo), Sacha Horler (Strix Struma), John Xintavelonis, Andrew McDonnell, Trent Dalzell, Amanda Bishop, Lelda Kapsis, James Evans, Anthony Cogin.

Production : Animal Logic et Village Roadshow Pictures pour Warner Bros. Pictures Producteur : Zareh Nalbandian Producteurs exécutifs : Donald De Line, Deborah Snyder, Lionel Wigram, Chris deFaria, Kathryn Lasky et Bruce Berman Producteurs associés : Katrina Peers, Imke Fehrmann et Wesley Coller Distributeur : Warner Bros.

99 minutes. États-Unis - Australie, 2010. Sortie France : 27 octobre 2010. Visa d’exploitation : 127861. Format : 1,85 (2D / 3D) & IMAX - Couleur - Son : Dolby SRD DTS SDDS.

Après deux adaptations de comic books, Zack Snyder s’attaque à la littérature jeunesse. Le Royaume de Ga’Hoole est un spectacle visuellement époustouflant, mais qui peine à s’adresser à un public précis : ni film pour tout-petits, ni œuvre totalement adulte.

Commentaire Pour Zack Snyder (300, Watchmen), Le Royaume de Ga’Hoole est un triple événement, puisqu’il marque sa première incursion dans les mondes à la fois de l’animation, de la 3D relief et du cinéma familial. Ses précédentes productions s’adressaient à chaque fois avant tout à un public assez ciblé (amateurs de zombies ou de comic books) et ne lésinaient pas sur une violence très graphique et esthétisée. Toutefois, en se plongeant dans l’intrigue surchargée (chouettes guerrières, rivalités ancestrales et trahisons à foison) des romans de Kathryn Lasky, le cinéaste ne s’éloigne pas totalement de ses repères. Par ailleurs, Snyder se plie ici avec une étonnante facilité aux contraintes de l’animation et de la 3D. Le Royaume de Ga’Hoole est ainsi un spectacle visuel époustouflant, qui mise sur le rendu photo-réaliste des textures et sur une intégration discrète du relief plutôt que sur une avalanche d’effets spectaculaires. Pourtant, si Snyder se montre à l’aise sur le plan technique, ses deux scénaristes ont bien plus de mal à donner une cohérence narrative à l’intrigue, qui se déployait à l’origine sur plusieurs livres. Dès lors, le film balbutie, se cherche une identité - quelque part entre la naïveté tout enfantine du premier Harry Potter, le souffle épique du Seigneur des Anneaux et la stylisation de 300 - et néglige les attentes du public. Car, pour un film familial, Le Royaume de Ga’Hoole se révèlera trop sombre. Et, à l’inverse, sa naïveté assumée et son recours récurrent à des valeurs “nobles” (courage, solidarité, sacrifice) excluant toute ambiguïté, le rendront moins attrayant pour un public plus âgé... Mi.G.

© Animal Logic

Résumé Bercé par les récits épiques des légendaires Gardiens de Ga’Hoole, la chouette Soren passe une jeunesse heureuse avec ses parents, son frère aîné Kludd et sa petite sœur Églantine. Une nuit, alors que leurs parents sont partis chasser, Soren et Kludd sortent s’entraîner à voler. Maladroits, ils tombent au pied de l’arbre. Ils sont alors enlevés par deux émissaires des terrifiants Sangs Purs et emportés, comme des dizaines d’autres, à l’“orphelinat” de Saint Aegolius. Là-bas, Bec d’Acier et Nyra, sa concubine, préparent une offensive contre les Gardiens de Ga’Hoole. Soren, se lie d’amitié avec la petite Gylfie, et voit Kludd s’éloigner de lui. Avec l’aide de l’un de leurs geôliers, Scrogne, ils apprennent à voler et résistent au “déboulunage” qui fait perdre leur volonté aux jeunes chouettes.

Dénouement Ils s’enfuient, mais Scrogne est tué, et Kludd entre au service de Bec d’Acier. Après un long voyage, où Spéléon et Perce-Neige se joignent à eux, ils parviennent à l’Arbre de Ga’Hoole. Soren y rencontre le vieux Ezylryb, qui se révèle être le grand Lyze de Kiel : la chouette qui terrassa Bec d’Acier... Avertis de la menace qui gronde, les Gardiens partent pour Saint Aegolius. Ils y tombent dans un piège tendu par Allomere, l’un des Gardiens, et les Sangs Purs. Mais Soren, qui a découvert la trahison d’Allomere, intervient à temps pour sauver les Gardiens. Il affronte Kludd puis Bec d’Acier, et triomphe. Mais Nyra s’est échappée, et Kludd a survécu... © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Vénus noire Drame historique

de Abdellatif Kechiche

Équipe technique Scénario : Abdellatif Kechiche et Ghalya Lacroix Images : Lubomir Bakchev et Sofian El Fani Montage : Camille Toubkis, Ghalya Lacroix, Laurent Rouan et Albertine Lastera 1re assistante réal. : Sylvie Peyre Scripte : Claire Dumaze et Betty Greffet Musique : Slaheddine Kechiche Son : Nicolas Waschkowski

(Théobald de Méry), Violaine de Carne (Diane de Méry), Violaine Gillibert (Géraldine Rivière), Philip Schurer (Peter Van Wageninge), Christian Prat (M. Campanile), Olivier Loustau (le capitaine des hussards), Diana Stewart (la femme au parasol), Jeanne Corporon (une invitée), Yann Sorton (le client du cabaret), Éric Moreau (un spectateur).

et Jean-Paul Hurier Décors : Florian Sanson et Mathieu Menut Costumes : Fabio Perrone Effets visuels : Stéphane Bidault Casting : Anne Frémiot et Monya Galbi Production : MK2 Coproduction : France 2 Cinéma Producteurs : Charles Gillibert et Marin & Nathanaël Karmitz Distributeur : MK2 Diffusion.

159 minutes. France, 2010. Sortie France : 27 octobre 2010. Visa d’exploitation : 122112. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 300 copies.

L'histoire vraie de la “Vénus Hottentote”, une SudAfricaine qui fut exhibée, de son vivant dans les foires et post-mortem au Musée de l'Homme. Un film sec et trouble, hésitant entre portrait compassionnel de l'héroïne et portrait à charge de ceux qui la regardent.

Commentaire Vénus noire est un objet protéiforme, par rapport auquel il est difficile de se positionner, à moins de réagir de façon épidermique dans l’adhésion ou le rejet. En effet, ambigu et contradictoire, le nouveau Kechiche est à la fois peu aimable et assez fascinant, ennuyeux et percutant, politiquement clair et éthiquement discutable. La question du sujet du film est la première qui pose problème. Kechiche parle d’un film sur l’“oppression du regard”. Et en effet, c’est sous cet angle que Vénus noire peut être passionnant et envoûtant, lorsqu’il montre un personnage monolithique et silencieux donné en pâture à toutes sortes de publics (scientifiques, journalistes, voyeurs de foire, libertins...) qui projettent sur lui leurs propres attentes et leurs propres fantasmes. Hélas, ce beau sujet est souvent dilué et entravé par deux autres axes, auxquels le cinéaste ne parvient pas à renoncer : le biopic historique et le film antiraciste. Deux options qui enchaînent l’œuvre à un souci de réalisme, quand le sujet premier, lui, le tire vers l’abstraction et l’onirisme cauchemardesque. La forme aussi déconcerte. L’étirement et la répétition des séquences apparaissent parfois comme une manœuvre d’intimidation du spectateur ; et l’éprouvant inventaire des humiliations subies par Saartjie peut être ressenti comme une dérangeante mise en abyme, où Kechiche devient forain, son actrice victime et nous voyeurs. L’impact que produit l’ensemble est pourtant indéniable. Mais derrière la radicalité agressive du film, on sent que les choix (jouer la carte du trouble ou celle du didactisme ? Faire du Bresson ou du cinéma à l’estomac ?) ne sont pas si clairs. N.M.

© MK2

Résumé Paris, 1817. À l’Académie de médecine, l’anatomiste Georges Cuvier développe des thèses racistes en s’appuyant sur l’étude du corps de Saartjie Baartman. Sept ans plus tôt. Fraîchement débarquée d’Afrique du Sud, Saartjie est exhibée dans des baraques foraines comme un animal sauvage, sous le nom de Vénus Hottentote. Caezar, un Afrikaner, dont elle était la servante, anime ces représentations. Saartjie se prête au jeu mais refuse que le public la touche. Le spectacle se fait une réputation, qui attire bientôt l’attention de l’Institution Africaine : un procès pour esclavagisme est intenté contre Caezar. Grâce au témoignage de Saartjie, qui dit se considérer comme une actrice, l’affaire est classée. Après avoir fait baptiser Saartjie, ils quittent Londres pour Paris.

Dénouement Là-bas, Caezar s’associe à Réaux, un montreur d’ours, qui organise des exhibitions privées dans les salons de la haute société. Informé de la présence de la “Vénus Hottentote”, Cuvier offre une forte somme pour l’examiner. Mais, face au scientifique, Saartjie refuse d’enlever son pagne. Or, c’est la protubérance de ses organes sexuels qui motive son intérêt. En devoir de rembourser Cuvier, Caezar rompt avec Saartjie et la cède à Réaux. Celui-ci l’entraîne dans des soirées libertines, où elle refuse d’être touchée et provoque sa colère. Elle bascule dans la prostitution. L’alcoolisme et la maladie l’emportent. Réaux vend son corps à Cuvier. Il sera rapatrié en Afrique du Sud en 2002. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Semaine du 27 octobre

Avec Yahima Torrès (Saartjie “Sarah” Baartman), Andre Jacob (Hendrick Caezar), Olivier Gourmet (Réaux, le forain), Elina Löwensohn (Jeanne), Michel Gionti (Jean-Baptiste Berré), Jean-Christophe Bouvet (Charles Mercailler), François Marthouret (Georges Cuvier), Jonathan Pienaar (Alexander Dunlop), Ralph Amoussou (Harry), Gilles Matheron

Adultes / Grands Adolescents, des idées et des images peuvent heurter


Very Bad Cops (The Other Guys) Comédie policière

de Adam McKay Avec Will Ferrell (Allen Gamble), Mark Wahlberg (Terry Hoitz), Eva Mendes (le docteur Sheila Gamble), Michael Keaton (le capitaine Gene Mauch), Steve Coogan (David Ershon), Ray Stevenson (Roger Wesley), Dwayne Johnson (Christopher Danson), Samuel L. Jackson (P.K. Highsmith), Rob Riggle (Martin), Damon Wayans Jr. (Fosse), Lindsay Sloane

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Adam McKay et Chris Henchy Images : Oliver Wood Montage : Brent White Réal. 2e équipe : Conrad E. Palmisano 1er assistant réal. : William M. Connor Musique : Jon Brion Son : Eric Harwood et Tom Nelson Décors : Clayton Hartley

(Francine), Michael Delaney (Bob Littleford), Zach Woods (Douglas), Bobby Cannavale (Jimmy), Andy Buckley (Don Beaman), Rob Huebel (l’officier Watts), Natalie Zea (Christinith), Derek Jeter (lui-même), Brooke Shields (elle-même), Rosie Perez (elle-même), Adam McKay, Anne Heche (Pamela Boardman [non créditée]), la voix d’Ice-T (le narrateur [non crédité]).

Costumes : Carol Ramsey Effets spéciaux : Mark Hawker Dir. artistique : Jim Gloster Production : Gary Sanchez Prod. et Wintergreen Prod. pour Columbia Pictures Coproduction : Mosaic Media Group Producteurs : Will Ferrell, Adam McKay, Jimmy Miller et Patrick Crowley Distributeur : Sony Pictures.

107 minutes. États-Unis, 2010. Sortie France : 27 octobre 2010. Visa d’exploitation : 126348. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SR SRD DTS SDDS.

Seuls contre tous, deux flics complémentaires mettent à jour une énorme magouille financière. Un “buddy movie” policier dans les grandes règles de l’art, l’humour en plus : Very Bad Cops est une belle réussite avec un duo inédit qui cartonne !

Commentaire Le “buddy movie” policier, genre surexploité au cinéma depuis les succès de 48 heures et L’Arme fatale, ne s’était pas aussi bien porté depuis longtemps ! Le mérite en revient principalement à l’association d’Adam McKay (derrière la caméra et au scénario) et de Will Ferrell. C’est en travaillant avec McKay que le comique américain a tourné ses meilleurs films, et c’est encore sous sa houlette qu’il livre sa prestation la plus aboutie. Dans leurs collaborations précédentes (Présentateur vedette, Ricky Bobby... et Frangins malgré eux), Ferrell interprétait des personnages excentriques voire totalement aliénés et incapables de s’intégrer socialement. Dans Very Bad Cops, la grande nouveauté est que le personnage fébrile serait plutôt Mark Wahlberg : bas du front, tout à la fois arrogant et attachant, l’acteur se joue avec enthousiasme de son image de héros de film d’action au premier degré. Ferrell, lui, mise sur la subtilité d’un personnage plus effacé, mais très heureux de son existence sans relief. Avec un tel duo, le moteur comique du film peut tourner à plein régime. Là où McKay va exceller, c’est en perpétuant avec soin les codes souvent éculés des buddy movies, tout en les saupoudrant d’humour et en multipliant les personnages secondaires hauts en couleurs. De plus, en situant leur récit dans le milieu de la finance, les auteurs ne se privent pas de donner leur avis sur le grand fléau du moment : la délinquance financière. Very Bad Cops n’est donc pas une parodie, mais une relecture contemporaine et délirante des grands standards du genre. On aurait tort de s’en priver ! Mi.G.

© Sony

Résumé À New York, quand un crime est commis, il faut faire appel aux meilleurs : les inspecteurs Danson et Highsmith. Mais voilà : après le casse d’une bijouterie, les deux superflics ont pris en chasse les cambrioleurs, acrobates sur les bords, et dans la poursuite, ont sauté dans le vide... et se sont tués. La police est en deuil, mais l’inspecteur Hoitz, éternel second couteau, voit enfin là l’occasion de briller. Il est handicapé par son coéquipier, Gamble, un gratte-papier précautionneux qui ne voudrait pour rien au monde se retrouver sur le terrain. Hoitz lui force la main, et Gamble lui propose un dossier qu’il juge intéressant : un permis de construire douteux enregistré par David Ershon, magnat de la finance...

Dénouement Gamble et Hoitz ignorent qu’Ershon est un escroc qui a monté une “pyramide de Ponzi” pour s’enrichir, et que l’une de ses victimes, Pamela Boardman, PDG d’une multinationale majeure, a envoyé son homme de main, Wesley, pour s’assurer d’être remboursée. Menés en bateau par Ershon et menacés par Wesley, Gamble et Hoitz lient le casse de la bijouterie à leur affaire : il s’agissait pour Boardman de faire disparaître ses rapports comptables... Ils comprennent que, pour sauver sa peau, Ershon a besoin d’un gros pigeon : il vise en fait le fonds de pension de la police ! Courageusement, Gamble et Hoitz dévoilent toute l’affaire et deviennent des héros pour leurs collègues. Mais, si Ershon et Wesley vont croupir en prison, Boardman ne sera pas inquiétée... © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Buried (Buried) Suspense

de Rodrigo Cortés

Et les voix de Robert Paterson (Dan Brenner), José Luis García-Pérez (Jabir), Stephen Tobolowsky (Alan Davenport), Samantha Mathis (Linda Conroy), Warner Loughlin (Donna Mitchell / Maryanne Conroy / Rebecca Browning), Ivana Miño (Pamela Lutti), Erik Palladino (l’agent spécial Harris),

Équipe technique Scénario : Chris Sparling Images : Eduard Grau Montage : Rodrigo Cortés 1er assistant réal. : Manel Martínez Scripte : Anna Vilá Musique : Víctor Reyes Son : James Muñoz Costumes : Elisa de Andrés Effets visuels : Álex Villagrasa Dir. artistique : Gabriel Paré et María de la Cámara

Cade Dundish (Shane Conroy), Kali Rocha (l’opératrice du 911), Mary Songbird (l’opératrice du 411), Kirk Baily (l’opérateur du 411), Chris William Martin (le représentant du Département d’État), Juan Hidalgo et Abdelilah Ben Massou (les kidnappeurs), Michalla Petersen, Anne Lockhart (l’opératrice de CRT), Robert Clotworthy, Joe Guarneri et Heath Centazzo.

Maquillage : Mónica Alarcón Virgili Production : Versus Ent. Coproduction : The Safran Company et Dark Trick Films Producteurs : Adrián Guerra et Peter Safran Coproducteur : Ken Hirsh Producteurs exécutifs : Alejandro Miranda et Rodrigo Cortés Distributeur : Studio 37 / Rezo Films.

95 minutes. Espagne, 2009. Sortie France : 3 novembre 2010. Visa d’exploitation : en cours. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

Un Américain est enterré vivant en Irak. Il a 90 mn pour trouver une rançon à l’aide d’un portable. Sans concession, ce vrai cauchemar est une réussite pertinente, brillamment réalisée par un artisan efficace, et justement interprétée par Ryan Reynolds.

Commentaire Le film avec téléphone portable est devenu un nouveau genre cinématographique depuis quinze ans (Denise au téléphone). Combiné avec le bon vieux dispositif hitchcockien du suspense en vase clos (Lifeboat, La Corde), cela donne Buried, film aux allures de cinéma expérimental (l’écran ne reste pourtant noir que quelques minutes, disséminées dans le film). Plus encore que dans Phone Game, l’unité de temps et de lieu renforce le suspense, d’autant que le lien entre l’enterré vivant et l’extérieur est tributaire de la batterie du portable. Les voix off de ses correspondants sont essentielles et ces personnages (ils sont crédités au générique pour leur seule voix) sont tout aussi réels que Paul, seul visible à l’écran. La réussite du film tient au fait que pas une seule image n’est prise hors de ce cercueil : des flashbacks ou des contrechamps avec les correspondants auraient rompu un suspense construit sur la claustrophobie, et distrait le spectateur s’identifiant au personnage abandonné dans sa tombe. Jamais statiques, le montage et la dramaturgie sont astucieusement gérés et ne faiblissent pas. L’unité de ton est presque parfaite : seule la séquence du serpent transforme Buried en film d’action et Paul en Indiana Jones, ce qui peut passer pour une facilité inutile... Enfin, il est bon de souligner que ce film n’est jamais gratuit, qu’il nous parle aussi de nos démêlés avec les serveurs vocaux et autres administrations kafkaïennes, qu’il dénonce au passage intelligemment une économie libérale cynique et surtout la présence des Américains en Irak, y compris les civils ! M.B.

© Versus Ent.

Résumé Paul Conroy reprend connaissance dans l’obscurité. Il allume son briquet et se rend compte qu’il est dans un grand cercueil. Enterré vivant, il crie au secours, en vain. Camionneur civil sous contrat en Irak, il a été pris dans une embuscade près de Bakubah. Ses bourreaux lui ont laissé une torche et un téléphone portable à moitié chargé. Il essaye de joindre sa femme Linda, le FBI et son chef. En vain. Il reçoit un appel de son ravisseur : il doit réunir 5 millions de dollars d’ici une heure et demi. Paul finit par joindre l’agent Dan Brenner qui va le sortir de là, comme il l’a fait pour un certain Mark White. Le ravisseur lui demande d’envoyer une “vidéo de rançon”.

Dénouement Paul chasse un serpent s’étant faufilé dans le cercueil et entend au loin une prière. Dan peut alors le localiser. Sur son portable, Paul voit la vidéo de l’exécution de Pamela, son amie et collègue. Il est tenté de se suicider. Le site étant bombardé, le sable s’infiltre dans le cercueil. Son chef l’appelle pour lui signifier son licenciement (à cause de sa liaison avec Pamela) prenant effet avant son enlèvement. Sa famille ne touchera donc pas d’indemnités. Le sable remplit la tombe, l’oxygène se fait rare. On lui demande de couper son doigt, sinon Linda et son fils seront menacés. Il s’exécute. Il rêve qu’on le délivre, puis demande à Linda de se cacher. Dan est sur la piste d’une tombe, mais c’est celle de Mark White ! © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Semaine du 3 novembre

Avec Ryan Reynolds (Paul Conroy).

Adultes / Adolescents


Le Dernier voyage de Tanya (Ovsyanki) Chronique mortuaire

de Aleksei Fedorchenko

Adultes / Adolescents

Avec Igor Sergeyev (Aist), Yuri Tsurilo (Miron), Yuliya Aug (Tanya), Viktor Sukhorukov (Vesa).

Équipe technique Scénario : Denis Osokin, d’après le roman Les Bruants d’Igor Sergeyev Images : Mikhaïl Krichman Montage : Sergei Ivanov et Anna Vergun Musique : Andrei Karasyov Son : Kirill Vasilenko, Elena Titova et Nelly Ivanova Costumes : Anna Barthuly et Lidiya Archakova Dir. artistique :

Andrey Ponckratov et Aleksei Potatov Casting : Olga Gileva Producteurs : Igor Mishin et Mary Nazari Distributeur : Memento Films.

75 minutes. Russie, 2010. Sortie France : 3 novembre 2010. Visa d’exploitation : 127498. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 40 copies (vo).

Un film court (1h15) qui prend son temps pour évoquer dans un long silence apaisant les traditions humanistes du peuple Méria. Trois personnages, dont un cadavre, traversent la Russie et nous initient à leurs rites ancestraux. Une perfection formelle.

Commentaire Après First on the Moon, documentaire dans lequel Aleksei Fedorchenko dévoilait avec un sérieux imperturbable l’existence d’un programme spatial jusqu’alors inconnu qui aurait fait d’un cosmonaute soviétique le premier homme à avoir marché sur la lune, en 1938, et The Railway, l’échappée délirante d’un cirque au cœur de la steppe, il prolonge son œuvre avec Le Dernier voyage de Tanya. Sélectionné en compétition officielle à la Mostra de Venise 2010, le film a remporté le Prix FIPRESCI et l’Osella de la meilleure image. S’appuyant sur un scénario écrit par Denis Osokin à partir du roman d’Igor Sergeyev, Fedorchenko appréhende la culture Méria au travers d’une histoire contemporaine : celle d’un homme qui vient de perdre sa femme et qui se tourne vers les rituels antiques des Méria pour prolonger et magnifier son amour. Fedorchenko évoque et imagine les rites et coutumes de ce peuple mystérieux (originaire de Finlande et de Hongrie, assimilé par les Russes au XVIe siècle et dont il subsiste peu de traces) et ce faisant sublime une Russie ancestrale, à laquelle il prête des valeurs humanistes. Fedorchenko appelle ainsi à une résurgence de ces valeurs afin d’envisager l’avenir du pays, loin du communisme chaotique et du consumérisme galopant. Il filme des personnages simples, emplis de qualités exceptionnelles, semblables aux bruants, sorte de canaris, très courants en Russie, dont émane un chant virtuose. Enfin, comment ne pas évoquer l’image et surtout le cadre qui construit ce film. Un cadre dont l’équilibre et la simplicité lui confèrent une forme de perfection. G.Bo.

© Memento Films

Résumé Neïa, petite bourgade de la région de Kostroma, en Russie centrale. Miron dirige une usine de papier. Son meilleur ami, Aist, est le photographe officiel de l’usine. Enfin Tanya, artiste-peintre, est l’épouse adorée de Miron. Alors qu’Aist prend des clichés des ouvrières de l’usine, Miron lui apprend qu’il vient de perdre Tanya, son épouse. Afin de respecter le rituel des Méria (une ancienne tribu finno-ougrienne), Miron souhaite entreprendre un voyage à travers la Russie pour porter le corps de Tanya jusqu’au fleuve Volga, là où son âme pourra perdurer. Il demande à Aist de l’accompagner. Les deux hommes enveloppent le corps de Tanya et le transportent dans leur voiture.

Dénouement Aist emporte avec lui un couple d’oiseaux dont il vient de faire l’acquisition. Les deux hommes ne dialoguent guère et leurs silences ne sont entrecoupés que par le chant envoûtant des bruants, le couple d’oiseaux apporté par Aist. Les moments qu’ils partagent sont consacrés à la figure de Tanya. Miron retrace avec Aist, les épisodes de sa vie conjugale et sexuelle. Aist évoque lui aussi Tanya. Ils prennent conscience tous deux qu’ils ont aimé la même femme. Lorsque les deux hommes parviennent au bord du fleuve, ils dressent un bûcher sur lequel ils portent le corps de Tanya. Miron enflamme le bûcher dans le but de prolonger la vie de Tanya après sa mort. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Des filles en noir Drame psychologique

de Jean-Paul Civeyrac

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Jean-Paul Civeyrac Images : Hichame Alaouie Montage : Louise Narboni 1er assistant réal. : Thomas Longuet Scripte : Mathilde Profit Son : François Mereu, Sébastien Savine et Stéphane Thiebaut Décors : Brigitte Brassart Costumes : Marie-Laure Pinsard Casting : Sarah Teper

et Leïla Fournier Production : Les Films Pelléas Coproduction : Rhône-Alpes Cinéma Producteur : Philippe Martin Productrice exécutive : Lola Gans Dir. de production : Hélène Bastide Distributeur : Les Films du Losange.

85 minutes. France, 2010. Sortie France : 3 novembre 2010. Visa d’exploitation : 119514. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 50 copies.

Avec Des filles en noir, J-P. Civeyrac essaie d’incarner les affres de l’adolescence, de donner corps à cette mortifère pureté des sentiments qui tourmente les jeunes gens. Il en résulte un film appliqué qui démontre que le cinéaste n’a rien vu que nous ne sachions déjà.

Commentaire Bien qu’en France le suicide des jeunes reste une cause de mortalité très importante ainsi qu’une légitime source d’inquiétude, Jean-Paul Civeyrac prend judicieusement le parti de ne pas l’approcher sous l’angle sociologique pour se concentrer sur l’inextinguible soif d’absolu et le sentiment de révolte qui peuvent tourmenter les adolescents et les conduire à se donner la mort. Il n’en demeure pas moins que le couple de jeunes filles auquel il consacre son attention repose essentiellement sur des notations qui, par défaut, s’apparentent à des clichés. Ainsi sont délaissés les sous-entendus, ou plutôt les non-dits, qui, en termes de désir, de pulsion amoureuse, semblent traverser et charpenter le couple que forment Noémie et Priscilla. Ni tout à fait gothiques, ni vraiment punkettes, ces jeunes amazones vêtues de noir n’en portent pas moins une colère emblématique de la jeunesse dont le cinéaste tente de se faire le porte-voix. Il apparaît plus surprenant en revanche que les parents, les adultes, ne soient quant à eux les vecteurs d’aucune parole en contrechamp, parole un tant soit peu habitée, susceptible de tempérer la ferveur des adolescentes, d’apaiser leurs tourments. Il est bien difficile par ailleurs de ne pas songer au Virgin Suicides de Sofia Coppola, lequel était parvenu à donner une tout autre dimension à ses personnages de jeunes filles rongées par un mortifère ennui. De ces jeunes Filles en noir, on retiendra néanmoins, outre l’interprétation de L. Tissier et É. Lhomeau, la séquence de la double tentative de suicide menée par téléphone interposé, l’acmé du film brillamment mis en scène. R.H.

© Carole Bethuel

Résumé Deux lycéennes, Noémie et Priscilla, sont amies “à la vie, à la mort”. Quand l’une chante, l’autre aussi. Elles partagent tout : leur colère contre le monde qui les attend, leur solitude face à la classe, l’incompréhension dont elles savent faire l’objet. Au cours d’un exposé consacré à Heinrich Von Kleist - lequel a mis fin à ses jours après avoir tué sa compagne Noémie annonce à la classe leur intention de se donner la mort. Priscilla, qui n’était pas au courant, en accepte le principe. Alertée, la directrice les convoque et prévient leurs parents respectifs. Pour se venger, elles vandalisent sa voiture. Une plainte est déposée. Tenues pour responsables, elle sont entendues par la police.

Dénouement Inquiète des penchants suicidaires de sa fille, la mère de Noémie les emmène passer la soirée, en famille, à la campagne où celle-ci découvre, dans le sac de sa fille, une boîte de puissants sédatifs pendant que l’un des convives essaie d’abuser de Priscilla. La soirée tourne au cauchemar. Priscilla repartie, les deux adolescentes se téléphonent en pleine nuit, et décident, chacune à sa fenêtre, de mettre leur projet à exécution. L’une saute, l’autre pas. Tout à fait seule désormais, Noémie est hospitalisée en psychiatrie et reçoit la sœur de Priscilla qui l’exhorte à ne jamais recommencer. Noémie reprend les cours de flûte qu’elle avait délaissés et commence une carrière de concertiste. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Semaine du 3 novembre

Avec Élise Lhomeau (Noémie), Léa Tissier (Priscilla), Élise Caron (Martha), Isabelle Sadoyan (Sonia), Roger Jendly (Toni), Thierry Paret (Alain), Aurore Soudieux (Isabelle), Youlia Zimina (la professeure de musique), Christine Vézinet (Madame Schaeffer), Jérôme Derre (l’inspecteur), Robinson Delacroix (Clément), Brice Fazekas (Sam).


Draquila, l’Italie qui tremble (Draquila : L’Italia che trema) Documentaire politique

de Sabina Guzzanti

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Sabina Guzzanti Images : Mario Amura et Clarissa Cappellani Montage : Clelio Benevento Animation : Sergio Gazzo Musique : Riccardo Giagni et Maurizio Rizzuto Son : Erwan Kerzanet

Production : Secol Superbo, Sciocco Produzioni, Gruppo Ambra et ALBA Produzioni Producteurs exécutifs : Sergio Bernardi, Sandro Frezza et Ferdinando Vicentini Orgnani Dir. de production : Anita Lamanna Distributeur : Bellissima Films.

93 minutes. Italie, 2010. Sortie France : 3 novembre 2010. Visa d’exploitation : en cours. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 30 copies (vo).

Documentaire sur les scandales immobiliers du régime de Berlusconi, Draquila... commence comme un Michael Moore mais, grâce à une rigueur plus affirmée, finit par ressembler davantage aux récents et glaçants docus américains sur le krach de 2008.

Commentaire Pour se consoler des gesticulations de notre cher Sarkozy, et depuis que le regretté Bush a quitté la scène, rien ne vaut un bon coup d’œil vers l’Italie, dont le leader élu et réélu, Silvio Berlusconi, fait parfois passer notre Président pour un modèle d’homme d’État. Le cinéma italien, malgré ses problèmes évidents de production, voire de créativité, s’est déjà penché sur la question notamment avec Le Caïman de Nanni Moretti, vision complexe et détournée du pouvoir berlusconien. D’ailleurs, ce film évoquait précisément, au sein même de son récit, la question de la difficulté à représenter Berlusconi. Heureusement, il reste le documentaire et ce Draquila, l’Italie qui tremble se place dans la continuité directe du cinéma de Michael Moore. On y voit en effet, devant et derrière la caméra, une animatrice télé-actrice-cinéaste-comique, se faire la porte parole des damnés du régime. Toutefois, l’intelligence de la démarche de Sabina Guzzanti (Viva Zapatero !) consiste à refuser l’attaque générale. Il ne s’agit pas ici d’un tableau baroque de l’Italie sous Berlusconi, mais de la dénonciation d’un scandale plus spécifique et assimilable : celui qui a entouré les tremblements de terre ayant ravagé l’Italie du Nord. Ces désastres ont donné lieu, à l’époque, à des visites émues de Berlusconi, mais la reconstruction a ensuite été très lente. Et surtout, elle a fait l’objet d’étonnantes magouilles financières. Cette attaque ciblée devient plus globale lorsque la réalisatrice démontre comment, en se servant d’une clause exceptionnelle prévue pour les travaux urgents mais sur-appliquée par le régime, toutes les mesures écologiques © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

© Bellissima Films

ou économiques minimums ont pu être totalement bafouées. Le film suit ce fil et en vient ainsi à tirer le portrait d’un État devenu, à travers l’immobilier, tout puissant, méprisant de toutes régulations et mafieux dans son fonctionnement financier. La démonstration est faite avec quelques traits d’humour, et divers coups d’éclat montés par Guzzanti, qui se grime et adopte le ton du clown provocateur, familier des adeptes de Moore. Mais Draquila... se démarque de l’Américain en faisant preuve d’une véritable rigueur dans sa démonstration. Le film joue de manière plus mesurée la carte de l’émotion et, surtout, se concentre sur des faits spécifiques au lieu d’accumuler des généralités souvent plus discutables. Les témoignages ne jouent pas au jeu du plus malin, même si, comme souvent dans ce genre de film militant, la partie adverse n’est pas tellement invitée à prendre la parole pour se défendre ou mettre en perspective les accusations dont elle est l’objet. L’œuvre reste donc subjective, mais pas manipulatrice pour autant. Le résultat n’en est que plus déprimant, car le constat est d’une sévérité, voire d’une noirceur, souvent implacable. Tout cela donne donc un film glaçant, plus proche d’une enquête comme Inside Job (sur les subprimes, sortie le 17 novembre) que d’un brûlot comme Fahrenheit 9/11. Le spectateur y gagne, même s’il n’est guère plus rassuré... S.G. 16


En présence d’un clown (Larmar och gör sig till) Drame

de Ingmar Bergman Équipe technique Scénario : Ingmar Bergman, d’après sa pièce S’agite et se pavane (1993) Images : Tony Forsberg et Irene Wiklund Montage : Sylvia Ingemasson re 1 assistante réal. : Antonia Pyk Musique : Franz Schubert Son : Magnus Berglid, Göte Carlsson et Göran Nylander Décors : Göran Wassberg Costumes : Mette Möller

Folke Asplund (Fredrik Blom), Anna Björk (Mia Falk), Inga Landgré (Alma Berglund), Alf Nilsson (Stefan Larsson), Tord Peterson (Algot Frövik), Harriet Nordlund (Karin Persson), Birgitta Pettersson (Hanna Apelblad), Ingmar Bergman (un patient [non crédité]).

Effets spéciaux : Lars Söderberg Dir. artistique : Rasmus Rasmusson Maquillage : Cecilia Drott-Norlén et Christina Sjöblom Production : Sveriges Television AB Producteurs : Pia Ehrnvall et Mans Reuterswärd Distributeur : Capricci Films.

118 minutes. Suède, 1997. Sortie France : 3 novembre 2010. Visa d’exploitation : 127340. Diffusion numérique. Format : 1,33 - Couleur - Son : Mono.

Attention, chef d’œuvre ! Bergman au sommet à 79 ans. Superbe, dépouillé, poignant, bouffon, tragique : ce “téléfilm” de 1997 adaptant une de ses pièces de théâtre, synthèse magistrale de ses obsessions, restera à jamais comme son inéluctable testament.

Commentaire “S’agite et se pavane” était le titre initial, évoquant bien sûr Shakespeare (Macbeth) mais aussi Beckett (auquel on ne peut que penser, particulièrement dans la deuxième partie), tellement plus juste, du pénultième opus de Bergman. Tourné en 1997, ce fut, auparavant, une pièce de théâtre. Ironie suprême du réalisateur, dont on sait que le cinéma avait fini par le lasser : ce soi-disant “téléfilm” qui, face à tout ce que le cinéma peut avoir d’artificiel, exalte (non sans raison ?) l’inégalable communion que permet le théâtre, est une de ses plus magistrales réalisations. Références autobiographiques, réminiscences de ses œuvres antérieures : un exemple parmi des dizaines ? Carl était le nom de son oncle à la lanterne magique de Fanny et Alexandre, joué par le même acteur, un fidèle du réalisateur. Tout Bergman est là, avec ses obsessions et ses fantasmes : la mort, le sexe, la folie, la peur de la déchéance physique, la bouffonnerie de la condition humaine... Et l’amour, surtout, l’espoir même, portés par Le Voyage d’hiver de Schubert qui envahit littéralement ce film. Film, oui, auquel le grand écran va enfin permettre de s’épanouir, magistrale leçon de mise en scène : des premières minutes (les gros plans sur Carl écoutant sans cesse les premières notes du dernier lied du Voyage... sur son gramophone) au plan final (fascinante plongée sur les corps enlacés de Carl et Pauline), la mise en images force en permanence l’admiration tant elle est pertinente, évidente, superbe. Véritable testament de Bergman (plus encore que son ultime Saraband), En présence d’un clown est un inéluctable chef d’œuvre. Ch.B.

© Capricci Films

Résumé 1925. Le service psychiatrique du Dr. Egerman, à l’hôpital d’Uppsala, accueille Carl Akerblom. Veuf, inventeur mythomane, sujet à des crises de violence, obsédé par Schubert, Carl a frappé sa jeune compagne, Pauline. Il sympathise avec Vogler, autre interné, exégète, membre unique de sa “société des péteurs du monde”, dont l’épouse, Emma, est sourde-muette et... riche. Tous s’associent pour concrétiser la grande invention de Carl, un cinéma parlant, et son premier film qui retracera la fin de Schubert et sa passion inventée pour Mizzi, une prostituée vierge.

Dénouement Resté seul, Carl voit apparaître le clown Rigmor de son enfance, vieille femme qui le provoque, lui demande de la sodomiser... Des mois après, Carl, avec Mia, maîtresse et actrice, Pauline et Vogler, organise la première séance dans la salle des fêtes de son bourg natal, avec l’aide de Landahl, factotum dévoué. Anna, la belle-mère de Carl, arrive : avec Pauline, l’échange, d’abord glacial, devient chaleureux, chacune évoquant ce que Carl représente pour elle... L’argent manque, Mia est partie, le clown hante la salle... Devant onze spectateurs, le film débute, muet mélodrame, doublé derrière l’écran par Carl, Vogler et Pauline, et s’interrompt brutalement : le tableau électrique explose, Landahl parvient à éteindre l’incendie, et le théâtre remplace le cinéma, à la satisfaction de tous. Au petit matin, Carl meurt dans les bras de Pauline. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Semaine du 3 novembre

Avec Börje Ahlstedt (Carl Akerblom), Marie Richardson (Pauline Thibault), Erland Josephson (Osvald Vogler), Pernilla August (Karin Bergman), Anita Björk (Anna Akerblom), Agneta Ekmanner (Klovnen Rigmor), Lena Endre (Märta Lundberg), Gunnel Fred (Emma Vogler), Gerthi Kulle (Sœur Stella), Johan Lindell (Johan Egerman), Peter Stormare (Petrus Landahl),

Adultes / Grands Adolescents


Fair Game (Fair Game) Drame

de Doug Liman

Adultes / Adolescents

Avec Naomi Watts (Valerie Plame), Sean Penn (Joseph Wilson), Sam Shepard (Sam Plame), Bruce McGill (Jim Pavitt), David Andrews (Lewis “Scooter” Libby), Satya Bhabha (Jason Neal), Ashley Gerasimovich (Samantha Wilson), Ty Burrell (Fred), Quinn Broggy (Trevor Wilson), Sean Patrick Reilly (l’agent Flynn), Kristoffer Ryan Winters (Joe Turner), Geoffrey

Équipe technique Scénario : Jez & John-Henry Butterworth, d’après les ouvrages The Politics of Truth de Joseph Wilson (2004) et Fair Game de Valerie Plame Wilson (2007) Images : Doug Liman Montage : Christopher Tellefsen 1re assistante réal. : Kim H. Winther Musique : John Powell Son : Drew Kunin

Cantor (Ari Fleischer), Tricia Munford (Cathie Martin), Brian McCormack (Stephen Hadley), Brooke Smith (Diana), David Denman (Dave), Noah Emmerich (Jack), Sunil Malhotra (Ali), Khaled Nabawy, Tim Griffin, David Warshofsky, Anand Tiwari, Philipp Karner, Liraz Charhi, Scott Takeda, Anastasia Barzee, Byron Utley, Kevin Makely, Melody Weiss, Chet Grissom.

Décors : Jess Gonchor Costumes : Cindy Evans Production : Fair Game Prod., Zucker Pictures, Weed Road Pictures et Hypnotic Coproduction : River Road Ent., Participant Media et Imagenation Abu Dhabi Producteurs : Bill Pohlad, Doug Liman, Jez Butterworth, Janet & Jerry Zucker et Akiva Goldsman Distributeur : UGC.

106 minutes. États-Unis - Émirats Arabes Unis, 2010. Sortie France : 3 novembre 2010. Visa d’exploitation : en cours. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SR SRD DTS.

À partir de l’affaire Valerie Plame et la présence d’armes nucléaires en Irak, Doug Liman tente et rate une incursion dans le film politique. La facture est propre et claire, l’interprétation solide, mais le film n’ose rien dire sur notre temps.

Commentaire Fair Game est la reconstitution de l’affaire V. Plame, mettant en lumière le mensonge d’État de la Maison Blanche concernant l’hypothétique présence d’armes de destruction massive en Irak. Le film trouve sa filiation dans les films politiques d’A. Pakula. Malheureusement, il peine à provoquer plus qu’un intérêt poli. Le problème ne se situe pas dans le rythme, soutenu, ni dans la clarté d’exposition des méandres politico-médiatiques de l’affaire. Les interprétations de N. Watts et de S. Penn ne sont pas non plus en cause, même si les convictions politiques de Penn collent très frontalement à celles du personnage qu’il incarne avec talent, mais aussi facilité. Cela tiendrait plutôt à une imagerie hollywoodienne passablement usée : la vision prévisible des pays du Proche et Moyen Orient, interlopes, chaotiques et mystérieux ; les méchants clairement désignés dans leurs costumes noirs incroyablement bien coupés, cheveux courts et cynisme assumé ; le triomphe de la volonté individuelle... Les films politiques des années 1970 (Les Hommes du Président, À cause d’un assassinat...) portent en eux les caractéristiques de l’époque dans laquelle ils furent tournés. C’est ce qui les rend encore visibles aujourd’hui, passée l’analyse du dossier. Même si les événements relatés ici sont très récents, Fair Game, du pourtant intéressant Doug Liman (La Mort dans la peau), n’affiche aucune contemporanéité. Il perd ainsi la possibilité de nous transmettre un plus - l’air du temps ou la psyché américaine à ce moment-là - qui aurait permis au film d’échapper à une dimension intemporelle préjudiciable au genre visité. J.C.

© UGC

Résumé 2002. Valerie Plame, agent de la CIA affectée au département chargé de la non prolifération des armes dans le monde, dirige secrètement une enquête sur l’existence potentielle d’armes de destruction massive en Irak. Elle confie à son mari, le diplomate Joe Wilson, la mission d’apporter les preuves d’une supposée vente d’uranium enrichi en provenance du Niger. Une fois sur place, il s’aperçoit que la piste ne mène nulle part et rédige un rapport dans ce sens. Mais lorsque l’administration Bush ignore ses conclusions pour justifier le déclenchement de la guerre en Irak, Joe Wilson réagit en portant l’affaire sur la place publique via un éditorial dans le New York Times, lançant ainsi la polémique. Peu après, la véritable identité de Valerie Plame est révélée par un célèbre journaliste de Washington.

Dénouement Sa source est un proche collaborateur du vice-président. Le combat de Joe Wilson est taxé de partialité. Valerie voit s’effondrer sa carrière et sa vie privée. Sa couverture étant réduite à néant, ses contacts à l’étranger se retrouvent en danger de mort, ses proches se désolidarisent. Contrairement à son mari qui continue de lutter, elle choisit de se taire et d’endurer sa disgrâce. Acculée par les ragots colportés sur son compte, elle brise enfin le silence et accepte de témoigner devant le Congrès afin d’effacer le discrédit porté à sa famille. Les journalistes et leur source sont poursuivis, et l’honneur de Valerie Plame sauf. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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L’Homme qui voulait vivre sa vie Thriller psychologique

de Éric Lartigau

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Éric Lartigau et Laurent de Bartillat, d’après le roman de Douglas Kennedy (1998) Images : Laurent Dailland Montage : Juliette Welfling 1er assistant réal. : Fabien Vergez Musique : Evgueni & Sacha Galperine Son : Pierre Excoffier, Gwenolle Leborgne, Dominique Gaborieau et Damien Lazzerini

Casting : Pierre-Jacques Bénichou Production : EuropaCorp, TF1 Films Production et CiBy 2000 Producteur : Pierre-Ange Le Pogam Producteur exécutif : Didier Hoarau Dir. de production : Grégory Barrau Distributeur : EuropaCorp.

115 minutes. France, 2010. Sortie France : 3 novembre 2010. Visa d’exploitation : 124332. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD DTS.

Ambition, jalousie, crime, fuite, usurpation d’une identité finalement non usurpée, culpabilité... Cette adaptation d’un roman de D. Kennedy, portée par un R. Duris au meilleur de sa forme, brasse avec talent tous les ingrédients d’un bon polar psychologique.

Commentaire Avec cette adaptation d’un roman policier à succès de Douglas Kennedy, Éric Lartigau (Mais qui a tué Pamela Rose ?, Prête-moi ta main) s’attaque pour la première fois au registre dramatique. Assisté au scénario par Laurent de Bartillat, épaulé par la détermination de son producteur Pierre-Ange Le Pogam, Lartigau réussit, sur une narration rocambolesque, voire invraisemblable, un film prenant, qui mêle action, suspense et tourment psychologique avec un juste dosage. La réalisation, rigoureuse, assume des partis pris forts de cadrages, de lumière et de rythme, qui agissent comme un moteur à friction entraînant par à coups un récit parfois sur le point de s’écrouler. Partagé en deux périodes de part et d’autre du crime “déclic”, le film adopte deux gammes chromatiques distinctes - raffinée et chic dans la première, contrastée et dé-saturée pour la seconde - qui correspondent aux sentiments du protagoniste : d’abord lisse mais contraint, puis libéré mais tourmenté. Sans effets de caméra virtuoses, Lartigau sait nous épargner les acrobaties pour accompagner son personnage en toute fluidité. Romain Duris, présent à chaque plan, est magistral de bout en bout. Son animalité inquiète fait merveille dans l’incarnation de ce Paul, meurtrier malgré lui, à qui la vie offre dans le même temps de se réaliser enfin et d’être à jamais un coupable en fuite. Vie volée à Grégoire, qui permet au talent de s’épanouir, vie rendue au clandestin avant de s’évanouir dans une ruelle : le film se teinte in fine d’une discrète morale qui clôt élégamment cette bonne surprise. M.D.

© Nicolas Guiraud / EuropaCorp

Résumé Brillant avocat, successeur désigné d’un prestigieux cabinet parisien, Paul s’est conformé à un destin tracé d’avance, renonçant à son goût pour la photographie. Il vient d’emménager avec sa femme, Sarah, et leurs deux enfants dans une villa d’une banlieue cossue quand il découvre que Sarah le trompe avec Grégoire Kremer, un voisin reporter photographe. Après que Sarah l’a quitté, Paul se rue chez Grégoire mais l’entretien dégénère et il tue accidentellement son rival.

Dénouement Il fait disparaître le corps dans l’explosion de son voiler en Bretagne, passant ainsi pour mort. Grégoire allait partir en reportage. Paul emprunte son matériel, falsifie son passeport et part vivre au Monténégro, à l’écart d’une ville portuaire où il prend quelques photos. Il y rencontre Bartholomé, français à la forte personnalité, rédacteur en chef d’un journal belgradois. Impressionné par le talent de Paul, Bartolomé le convainc de le publier sous réserve que son visage n’apparaisse jamais. Rapidement les photos de Paul rencontrent un succès tel qu’il menace son identité usurpée. Coupant à nouveau les ponts il s’embarque sur un cargo à destination du Venezuela. Une nuit, caché, il photographie le passage par-dessus bord de clandestins kurdes. Repéré, il est lui aussi jeté à l’eau. Il réussit à sauver un des clandestins. Plus tard, il s’éloigne dans une ruelle italienne après avoir a laissé au clandestin le montant de la vente des clichés chocs sauvegardés. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Semaine du 3 novembre

Avec Romain Duris (Paul Exben), Marina Foïs (Sarah Exben), Niels Arestrup (Bartholomé), Branka Katic (Ivana), Catherine Deneuve (Anne), Éric Ruf (Grégoire Kremer), Enzo Caçote (Hugo), Rachel Berger (Fiona).


Kill Me Please Comédie dramatique

de Olias Barco Avec Aurélien Recoing (le docteur Krueger), Benoît Poelvoorde (M. Demanet), Bouli Lanners (M. Vidal), Saul Rubinek (M. Breiman), Philippe Nahon (M. Antoine), Virginie Efira (l’inspectrice Evrard), Zazie de Paris (Mme Rachel), Virgile Bramly (Virgile), Muriel Bersy (Muriel), Clara Cleymans (Mme Julia), Olga Grumberg (Ingrid), Vincent Tavier (M. Plouvier),

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Olias Barco, Stéphane Malandrin et Virgile Bramly Images : Frédéric Noirhomme Montage : Ewin Ryckaert 1er assistant réal. : Guillaume Malandrin Son : Thomas Berliner Décors : Manu De Meulemeester Costumes : Élise Ancion Effets spéciaux : Olivier de Laveleye Production : La Parti Production,

Bruce Ellison (MC5), Gérard Rambert (M. Nora), Stéphane Malandrin (Steve), Nicolas Buysse (Luc), Jérôme Colin (Bob), Ingrid Heiderscheit (Sylvie), Ewin Ryckaert (le chauffeur), Philippe Grand’Henry (le chasseur), Stéphanie Crayencour (Sophia).

Les Armateurs et OXB Coproduction : RTBF, Mollywood et Minds Meet Producteurs délégués : Vincent Tavier, Olias Barco, Philippe Kauffmann, Didier Brunner et Guillaume & Stéphane Malandrin Producteurs associés : Arlette Zylberberg, Tomas Leyers, Jan Vrints et Wilfried Van Baelen Distributeur : Le Pacte.

95 minutes. Belgique, 2010. Sortie France : 3 novembre 2010. Visa d’exploitation : 125309. Format : 1,85 - Noir & Blanc - Son : DTS SR.

Un jour comme un autre dans la clinique du Suicide qui tournerait au carnage collectif : c’est l’idée un peu folle d’Olias Barco, aux manettes de ce film burlesque, aussi audacieux que rigoureux dans sa direction d’acteurs.

Commentaire “Le suicide devrait être inscrit dans la Constitution, être un Droit de l’Homme !” explique le Dr. Krueger dans le salvateur Kill Me Please. Ce film est courageusement pro-suicide, mais s’insurge aussi contre une société trop aseptisée où l’État prendrait en charge jusqu’à nos pulsions les plus intimes. Un monde où l’on ne parlerait plus de tentative de suicide mais de “sa 1re TS” autour d’une coupe de champagne, accompagné d’une pilule mortelle à l’allure de bonbon. C’est avec beaucoup d’humour qu’Olias Barco, cinéaste français (Snowboarder) “réfugié artistique” en Belgique, nous livre son esprit incisif, d’obédience plutôt anar’. Le scénario est excellent : original, rythmé, des dialogues d’une rare justesse, des personnages bien trempés... Chacun se traînant sa folie douce, sans jamais être caricatural... Interprétés, qui plus est, par des acteurs excellents, d’une précision surprenante au milieu d’un grand chaos burlesque qui pourrait vite virer au grand n’importe quoi. Mais la rigueur de la mise en scène, avec son image en Noir & Blanc extrêmement élégante, livre le message de manière épurée, sans fausse note. Même la fin, absurde, déjantée et violente, évite tout mauvais goût. Certes, on est parfois saisi par le caractère glauque de certaines situations, mais vite repêché par la finesse de ton du réalisateur. Un film véritablement audacieux, rendu possible par la production belge La Parti (C’est arrivé près de chez vous), dont le goût du risque devrait peut-être inspirer davantage le cinéma français... C.L.L.

© Olivier Donnet

Résumé Un humoriste dépressif essaie de convaincre le Dr. Krueger de l’accepter dans sa clinique de Suicide Médical Assisté. Face à son refus, il s’ouvre les veines. Cette clinique, subventionnée par l’État, a pour vocation d’accompagner les “malades” vers la fin - ou vers le retour à la vie. Jean-Marc, riche cartésien, a décidé de choisir le jour de sa mort pour dire “merde” à sa famille. Virgile rêve de mettre en scène son suicide en jouant à la guerre. M. Vidal a fait un crédit pour se payer ce suicide de luxe. Jack Breiman espère en finir sans que sa femme, restée au Canada, le sache. Mme Rachel a perdu sa voix de soprano et le goût à la vie. Enfin, Sophie est atteinte d’une maladie qui l’empêche d’avoir une vie décente. Au milieu de ces patients, Mme Evrard enquête sur cette drôle de clinique, jusqu’au jour où...

Dénouement Il y a le feu à la clinique. Un patient meurt dans l’accident et la réserve de nourriture est détruite. Les dernières volontés des patients, aussi simples soient-elles, ne peuvent plus être exaucées. La colère monte. Une star du hip-hop décide de partir pour une autre clinique, mais se fait assassiner sur le chemin de la gare. Une véritable tuerie commence. Jean-Marc essaie de violer Sophie dans les bois, M. Vidal enferme une infirmière dans un cercueil, Virgile élimine un à un leurs agresseurs avec son paintball, et le Dr. Krueger tue Virgile au couteau avant de se suicider. Ahurie, Mme Rachel sort, seule, et chante la Marseillaise. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Le Plein pays Documentaire

de Antoine Boutet

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Antoine Boutet Images : Antoine Boutet Son : Julien Ngo Trong

Production : Red Star Cinema Production déléguée : Dard Dard Association Productrice déléguée : Marie-Odile Gazin Distributeur : Les Films du Paradoxe.

Semaine du 3 novembre

58 minutes. France, 2009. Sortie France : 3 novembre 2010. Visa d’exploitation : 124074. Format : 1,33 - Couleur - Son : Stéréo.

Un documentaire magnétique et puissant, qui suit une sorte d’ermite, vivant depuis plus de 40 ans seul en creusant les entrailles de la terre et en déplaçant des rochers à mains nues. Une vertigineuse plongée dans la solitude, la résistance, la création et la folie.

Commentaire Le réalisateur Antoine Boutet a d’abord étudié les arts visuels et axé une grande partie de son travail sur les mutations urbaines et l’implication politique de la mise en espace, avant de se tourner vers des vidéo-installations, qui l’ont ensuite conduit aux documentaires. Il filme ici, dans une forêt, dans sa masure, avec respect et une infinie douceur, Jean-Marie, un vagabond habité, rêveur, créateur et à l’évidence un peu psychotique. À sa suite, nous découvrons les profondes galeries souterraines, qu’il fore puis orne de gravures archaïques. On l’observe encore déplaçant d’énormes blocs de pierre qu’il sort des entrailles de la terre puis rassemble et ordonne sur un champ. Il les caresse avec tendresse, leur parle dans son sabir improbable, mâtiné de patois et d’étranges psalmodies, leur donnant alors une part d’humanité. Sisyphe moderne, à la fois héraut d’un passé en ruine et pythie d’une catastrophe à venir, il agence inlassablement les pierres d’une utopie perdue, dans une quête infinie de sens, comme s’il voulait aller au secret des origines. Son lien à la terre est vital, essentiel, instinctif, viscéral, comme celui du nourrisson à sa mère. Cette lecture psychanalytique s’impose. En effet, la première image de Jean-Marie le montre pénétrant dans une de ses galeries. Il se love, se blottit dans cette matrice sûre et précieuse. Cette image soulignera, plus avant dans le documentaire, ses préoccupations morbides autour de la peur de l’enfantement, de la grossesse, des césariennes qui souillent la femme ou la mettent en danger, ainsi que ses obsessions, qu’il veut prémonitoires, sur la surpopulation humaine. On plonge avec lui, près de lui, dans cette radicale © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

© Red Star Cinema

expérience de création totale, qui semble, tel un talisman, le prémunir de la folie. Son absolue solitude, dans laquelle le spectateur est vertigineusement projeté, pouvant être le carburant attendu de cette déraison. Son travail trouve, pour Antoine Boutet, une résonance dans l’histoire de l’art, qu’il soit primitif, brut, contemporain, rejoignant alors certaines démarches artistiques du XXe siècle dans lesquelles l’artiste habite son œuvre. Cet homme, troublant, dérangeant, touchant, parfois émouvant aux larmes dans son isolement fondamental et sa dignité de démiurge, est un Petit Prince farouche, qui plonge en nous et nous regarde, mais qu’il a fallu apprivoiser pour sceller doucement une confiance mutuelle. Certaines règles initiales ont dû être respectées : maintenir une distance de rigueur, ne pas être intempestif. Peu à peu Jean-Marie a compris que ce travail de réalisation, sobre et respectueux, pouvait témoigner de sa propre création et répandre ses messages. Ceux gravés sur les parois de ses grottes comme ceux fixés sur bande magnétique. Aujourd’hui, ses forces s’amenuisant, il s’oriente plus franchement vers la création sonore. Son “grand œuvre” est désormais à l’arrêt, mais cet homme si plein de tourments et de grâce continuera longtemps de creuser en nous, comme au cœur de nos interrogations humaines les plus essentielles. N.Z. 21


La Princesse de Montpensier Drame historique

de Bertrand Tavernier Avec Mélanie Thierry (Marie de Montpensier), Lambert Wilson (le comte de Chabannes), Grégoire Leprince-Ringuet (le prince de Montpensier), Gaspard Ulliel (Henri de Guise), Raphaël Personnaz (le duc d’Anjou), Anatole de Bodinat (Joyeuse), Éric Rulliat (Quelus), Samuel Theis (La Valette), Michel Vuillermoz (le duc de Montpensier), Judith Chemla

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Jean Cosmos, François-Olivier Rousseau et Bertrand Tavernier, d’après la nouvelle de Madame de La Fayette (1662) Images : Bruno de Keyzer Montage : Sophie Brunet 1re assistante réal. : Valérie Othnin-Girard Musique : Philippe Sarde Son : Olivier Schwob, Élisabeth Paquotte et Olivier Do Huu

(Catherine de Guise), Philippe Magnan (le marquis de Mézières), César Domboy (Mayenne), Jean-Pol Dubois (le cardinal de Lorraine), Florence Thomassin (la marquise de Mézières), Joséphine de La Baume (Jeanne), Christine Brücher, Nathalie Krebs, Olivier Loustau.

Décors : Guy-Claude François Costumes : Caroline de Vivaise Maquillage : Émilie Rozier Production : Paradis Films, StudioCanal, France 2 Cinéma et France 3 Cinéma Coproduction : Pandora Filmprod. Production associée : Outsider Productions Producteur délégué : Éric Heumann Distributeur : StudioCanal.

139 minutes. France - Allemagne, 2010. Sortie France : 3 novembre 2010. Visa d’exploitation : 115106. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SR SRD DTS.

Bertrand Tavernier signe une adaptation soignée d’une nouvelle de Madame de La Fayette. Un film qui fleure bon les révisions du bac français mais qui parvient aussi à se laisser gagner par un certain appétit de vie. À vous de voir.

Commentaire Un film de Tavernier est souvent l’occasion d’un débat. Débat collectif, évidemment, au sein d’un comité de rédaction, d’un cercle critique ou d’une tablée cinéphile ; mais débat interne aussi parfois, à l’intérieur de sa propre tête. C’est que le cinéaste a un certain sens de la digression inattendue, de tous ces petits détails qui déstabilisent et empêchent de trancher de façon définitive. C’est l’apparition d’un héros de la guerre de Sécession au milieu du très contemporain Dans la brume électrique, c’est Jean Rochefort faisant le singe dans Que la fête commence ou encore Jean-René Caussimon chantant dans Le Juge et l’assassin... L’art de Tavernier tient à ce goût particulier pour l’inégal, le perfectible, quand, d’un coup, il lâche ici ce qu’il retenait là, ou quand il ouvre soudain un espace que tout le reste du film semblait contenir. À première vue, justement, il n’est question que de contraintes dans La Princesse de Montpensier. Contrainte de cette princesse tiraillée entre les élans de son âge et les obligations de son rang. Contraintes d’une adaptation - Madame de La Fayette - qui fleure bon le Lagarde & Michard et les révisions du bac français. Contraintes d’une reconstitution soignée à l’extrême, comme un appel aux César des meilleurs costumes. Contraintes d’un casting qui fait dans le tout “bankable”. Mais voilà, de toutes ces contraintes, de toute cette application corsetée, Bertrand Tavernier arrive à laisser échapper une forme de vie. Peut-être parce qu’il prend son temps. Peut-être parce qu’il révèle Mélanie Thierry dans un rôle sensible. Après, à chacun de mener son propre débat interne... C.L.

© StudioCanal

Résumé 1562, sous le règne de Charles IX, en pleine guerre de religions. À la suite d’un combat particulièrement violent, le comte de Chabannes décide de renoncer à se battre. En fuite, il trouve refuge chez le marquis de Mézières, qui lui confie le soin d’éduquer sa fille, Marie. Depuis son enfance, la jeune fille est amoureuse d’Henri, le duc de Guise. Mais, par tactique politique, son père la force à épouser le prince de Montpensier. Appelé par Charles IX à se battre contre les Protestants, ce dernier laisse bientôt la jeune épouse en compagnie du comte de Chabannes, isolée du monde, au château de Champigny. Un jour, traversant une rivière, Marie croise le duc de Guise. Cette entrevue ravive ses sentiments.

Dénouement Les hasards de la guerre mènent également le duc d’Anjou à Champigny. Le futur Henri III tombe lui aussi sous le charme de la jeune femme. D’Anjou et de Guise se disputent ses faveurs. Le comte de Chabannes tente de la raisonner, mais doit bien lui avouer qu’il est aussi épris d’elle. Au cours d’une réception costumée, de Guise parvient, par la ruse, à attirer Marie, qui succombe. D’Anjou ne lui pardonnera pas. Le prince de Montpensier, de retour de la guerre, non plus. La nuit du 24 août 1572, jour de la Saint Barthélémy, les protestants sont massacrés en pleine rue. Le comte de Chabannes est tué. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Les Yeux ouverts Documentaire

de Frédéric Chaudier

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Frédéric Chaudier et Patricia Mortagne, avec la collaboration de Jean-Louis Fournier Images : Frédéric Chaudier Montage : Nadia Ben Rachid Animation : Jean-Paul Guigue Musique : Loik Dury et Christophe Minck Son : Christophe Robert Dir. artistique : Dominique Welinski et Nathalie Notebaert

Production : Flair Films Producteur délégué : Guillaume Roy Producteur exécutif : Laurent Ramamonjiarisoa Producteurs associés : Christophe Février, Pierre Barnerias, Jacqueline Bart et Dominique Auroy Distributeur : Zelig Films.

Semaine du 3 novembre

93 minutes. France, 2010. Sortie France : 3 novembre 2010. Visa d’exploitation : 125475. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SR. 20 copies.

Un documentaire tendre et respectueux sur une unité de soins palliatifs à Paris. Ce film, dont le Ministère de la Santé est coproducteur, pourrait tenir du simple travail de commande s’il ne savait imposer un ton singulier, porté par l’implication du réalisateur.

Commentaire En 2003, Frédéric Chaudier, le réalisateur des Yeux ouverts, a accompagné pendant dix mois son père, alors atteint de sclérose en plaque, dans l’unité Jeanne Garnier. Sept ans après sa mort, Chaudier revient dans cette structure, avec le personnel de laquelle il a manifestement gardé des liens de proximité et d’amitié, et filme ce qu’il convient de faire quand il n’y a plus rien à faire, partageant avec nous la force de cet éprouvé. À sa suite nous découvrons des malades en toute fin de vie, à ce moment de vertige, de fragilité extrême et de force redoutable qui est le lot des sursitaires. Leur grâce est émouvante, filmés qu’ils sont avec tant de douceur qu’ils deviennent comme des elfes fragiles. Le personnel médical, médecins, infirmières, kinésithérapeutes, est filmé avec la même attention délicate dans son stupéfiant dévouement et sa merveilleuse obstination à maintenir vivante la dignité de ceux dont le corps a définitivement trahi. On découvre alors, incrédule, qu’ici la langue de bois n’existe pas et que ceux qui veulent mourir sont non seulement écoutés mais plus encore entendus. La problématique est posée sans tabou et sans posture lénifiante, mais dans l’évidence de l’idée qu’on ne peut supporter que ce que l’on peut supporter et que nul n’est là pour juger, qu’il faut savoir recevoir la demande d’un homme, fut-il jeune, qui n’en peut plus pour que justement il reste un homme, et un homme libre jusqu’au bout. La loi Léonetti, que l’on voit ici © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

© Flair Films

dans son application la plus concrète, pèse de sa force en instaurant un dialogue adulte et vertigineux entre soignants et soignés, dans une humanité conjointe. Sa grande force et sa profondeur c’est cette réponse apolitique et claire qu’elle apporte à l’inéluctable et qui est ici en acte. Pour autant, le propos s’affranchit de toute dimension pédagogique : il ne cherche pas à démontrer mais à témoigner de ce que c’est qu’être un humain, retranché dans le silence d’une chambre, loin de la clameur, de la fureur de la ville, dont les images intercalées, chantiers, couloirs de métro, avenues bondées, nous rappelle que la vie est mouvement et parfois fureur. Alors, si ces Yeux ouverts sur la vie, la mort, l’impensable, l’impensé, la peur insondable, sont parfois d’une facture un peu naïve et le commentaire un peu théâtral, là où l’on aurait souhaité plus de sobriété, l’extrême honnêteté de la démarche et la tendresse infinie des images, la clarté des regards, emportent le morceau. Enfin, le choix de séquences d’animation et l’utilisation d’un petit personnage dessiné, incarnation lyrique et burlesque du réalisateur, finit de donner à l’ensemble des interrogations - bien plus sociétales que médicales la puissance d’une profondeur toute poétique. N.Z. 23


Belle épine Chronique initiatique

de Rebecca Zlotowski Avec Léa Seydoux (Prudence Friedmann), Anaïs Demoustier (Sonia Cohen), Agathe Schlencker (Marilyne Santamaria), Johan Libéreau (Franck), Guillaume Gouix (Reynald), Anna Sigalevitch (Frédérique Friedmann), Marie Matheron (Delphine), Marina Tome (Nelly Cohen), Carlo Brandt (Michel Cohen), Nicolas Maury (Daniel Cohen), Swann Arlaud

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Rebecca Zlotowski et Gaëlle Macé, avec la collaboration de Christophe Mura et Marcia Romano Images : Georges Lechaptois Montage : Julien Lacheray 1er assistant réal. : Jean-Baptiste Pouilloux Scripte : Roselyne Bellec Musique : Rob Son : Mathieu Descamps Décors : Antoine Platteau

(Jean-Pierre), Michaël Abiteboul (Gérard), Sébastien Haddouk (Sébastien).

Costumes : Isabelle Kerbec Dir. artistique : Jean-René Étienne Maquillage : Sarai Fiszel Casting : Philippe Elkouby Production : Les Films Velvet Coproduction : Moby Dick Films Producteur : Frédéric Jouve Coproducteur : Frédéric Niedermayer Distributeur : Pyramide.

80 minutes. France, 2010. Sortie France : 10 novembre 2010. Visa d’exploitation : 118871. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 50 copies.

Une jeune fille de 17 ans se jette de façon un peu éperdue dans sa fascination pour l’univers des motards. Un scénario sans doute insuffisant, mais soutenu par une mise en images et une direction d’acteurs très gracieuses. Prometteur.

Commentaire Dans son aspect extérieur, Belle épine peut apparaître comme une sorte d’archétype de premier film, tant par ses thèmes (histoires d’adolescence, d’éveil compliqué à la sexualité, de tensions familiales, d’incertitudes existentielles, etc.) que par son ancrage dans une tradition héritée de Pialat, faite de réalisme sec et d’intensité rentrée. Pourtant, très vite, le film échappe à la suspicion de n’être qu’un “à la manière de” ou un banal épanchement autobiographique. En effet, ce qu’impose presque instantanément Rebecca Zlotowski, c’est un regard : personnel, original, assumé. Sans volonté démonstrative, ses plans sont souvent d’une vraie beauté plastique, qui ne découle pas d’un sens du joli, mais d’un placement juste face à ce qui montré, d’un art de faire dire aux images ce qui n’est pas formulé dans le dialogue. Par ailleurs, les acteurs relaient avec beaucoup de subtilité la volonté de la cinéaste de maintenir une sorte de tension permanente, sans que celle-ci ne débouche jamais sur aucune forme d’hystérie. Toutefois, il vient un moment où l’on regrette que cette atmosphère et cette justesse de ton ne soient pas mises au service d’un propos plus consistant, ou que la fin referme un peu artificiellement un récit qui semblait avoir pour vocation de rester ouvert. Il n’en reste pas moins que la façon dont Zlotowski a su, auparavant, imposer sa personnalité dans des scènes ressemblant autant à des figures imposées que la “discussion de filles dans la salle bains” ou le “repas dans une famille juive”, donne la certitude qu’il y a déjà chez elle l’essentiel de ce qui fait une vraie cinéaste. N.M.

© Les Films Velvet

Résumé Fin des années 1970. Prudence, 17 ans, est seule dans un grand appartement. À la télévision elle voit un reportage sur le circuit de Rungis, où des blousons noirs font de dangereux rodéos à moto. Fascinée par cette univers, elle se rapproche de Marilyne, qui est dans son lycée, et qui fréquente une bande de motards. Elle l’invite chez elle. Le soir, sa sœur, qui partage l’appartement mais n’est jamais là, passe la prendre pour aller dîner chez des parents. Là, Prudence retrouve sa cousine Sonia. Elle tente de l’emmener avec elle à Rungis, mais celle-ci se ravise sur le chemin. Prudence y va seule, et fait connaissance. Plus tard, elle organise une fête chez elle avec tous les motards. Elle sort avec Franck, et lui confesse que sa mère vient de mourir. Elle passe la nuit avec la bande, se rend avec eux au bord de la mer.

Dénouement Prudence accepte très rapidement de coucher avec Franck, et se montre même entreprenante. Mais un soir, alors qu’elle est au cinéma avec toute la bande, elle se sent mal à l’aise et prend la fuite. Franck la rejette alors violemment et embarque aussitôt une nouvelle fille sur sa moto. Après avoir erré sous la pluie, Prudence arrive sur les lieux d’un accident. La moto de Franck est à terre. Sa passagère, dont l’écharpe s’est prise dans les rayons de la roue, est morte. Prudence rentre chez elle. Elle voit sa mère dans la cuisine. Elle lui parle, et pleure enfin. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Le Braqueur La Dernière course (Der Raüber) Portrait

de Benjamin Heisenberg Équipe technique Scénario : Benjamin Heisenberg et Martin Prinz Images : Reinhold Vorschneider Montage : Andrea Wagner et Benjamin Heisenberg 1re assistante réal. : Katharina Biró Scripte : Wolfgang Widerhofer Musique : Lorenz Dangel Son : Marc Parisotto et Veronika Hlawatsch Décors : Renate Schmaderer

Köllner (les secouristes), Roman Kettner (le concierge), Hannelore Klauber-Laursen (la caissière), Josef Romstorffer (le collègue d’Erika), Michaela Christl, Alex Scheuber, Alexander Fennon, Leopold Böhm, Walter Huber, Friedrich Stindl, Georg Mlynek, Peter Vilnai, Martin Prinz, Gerda Drabek, Michael Steinbrecher, Erwin Reichel, Hannes ipirotis, Robert Müllner, Tabea Werich.

Costumes : Stephanie Riess Maquillage : Wiltrud Derschmidt Casting : Markus Schleinzer Production : Nikolaus Geyrhalter Filmproduktion et Peter Heilrath Filmproduktion Producteurs : Markus Glaser, Nikolaus Geyrhalter, Wolfgang Widerhofer et Peter Heilrath Producteur exécutif : Michael Kitzberger Distributeur : ASC Distribution.

97 minutes. Autriche - Allemagne, 2009. Sortie France : 10 novembre 2010. Visa d’exploitation : en cours. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 20 copies (vo).

Deuxième long métrage d’un cinéaste représentatif d’une nouvelle vague allemande encore peu connue, Le Braqueur conte l’histoire vraie d’un ancien détenu devenu à la fois champion de marathon et braqueur, dans un récit sobre, tendu et virtuose.

Commentaire Depuis quelques années, est apparu dans le cinéma allemand une sorte de nouvelle vague, dont Christoph Hochhäusler pourrait être identifié comme le leader, qui propose des œuvres fortes et porteuses de promesses, mais n’arrive pourtant pas à s’imposer totalement auprès de la critique et du public. Benjamin Heisenberg, qui signe ici son deuxième film, est un proche de Hochhäusler, avec lequel il avait fondé une revue de cinéma et dont il fut coscénariste du premier long métrage : Le Bois lacté. C’est donc assez logiquement que l’on retrouve dans Le Braqueur bien des qualités et spécificités des films de Hochhäusler : une même sécheresse narrative, une même virtuosité sans esbroufe, une volonté commune de filmer les dysfonctionnements d’une certaine société moderne, avec une froideur parfois clinique s’opposant à toute forme de jugement moral. Le Braqueur raconte une histoire vraie : celle d’un homme qui, sorti de prison, devint champion de marathon mais continua en fait inexorablement à faire des braquages. Entre les mains du cinéaste, ce récit devient le portrait, sec et rempli de zones d’ombre, d’un homme sans cesse en proie à l’obsession. Une obsession de la course, qui se traduit par la précision avec laquelle il se prépare physiquement, que ce soit pour un marathon ou pour un braquage. Le Braqueur peut ainsi être vu comme une histoire d’addiction, finissant par entraîner le héros vers une mort programmée. C’est en tout cas un film sobre mais souvent virtuose, confirmant le ton et l’originalité du nouveau cinéma allemand. S.G.

© ASC Dist.

Résumé Sur le point de sortir de prison, Johann poursuit un quotidien fait de courses à pied dans la cour. Il rencontre Markus, qui est chargé de le suivre à sa libération. Une fois sorti, il se lance dans la préparation obsessionnelle d’un très célèbre marathon. Contre toute attente, il remporte ce marathon et devient instantanément une célébrité. Markus le félicite, mais remarque que Johann reste isolé et taciturne. Il le met en garde : ce type d’attitude est héritée de la prison et, souvent, y ramène. Johann met un masque et commence alors à commettre des braquages. Mais il ne dépense pas vraiment l’argent qu’il gagne ainsi.

Dénouement Johann retrouve Erika, avec laquelle il emménage rapidement et entame une liaison. Il continue de remporter des marathons, tout en poursuivant ses braquages. La police commence à le suspecter. Johann disparaît alors. Markus le retrouve à l’issue d’un marathon où il a de nouveau triomphé, et le sermonne. Brusquement, Johann se met à le frapper avec sa coupe et le tue. Les policiers interrogent Erika, qui revoit brièvement Johann, et a avec lui une dispute plutôt animée. Johann devient un fugitif, volant pour survivre. Il entre chez un homme par effraction et le ligote lorsque celui-ci rentre. Mais l’homme a le temps de le poignarder avec des ciseaux. Joahnn s’enfuit. En voiture, alors qu’il se vide de son sang, il appelle Erika. Puis il meurt au volant. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Semaine du 10 novembre

Avec Andreas Lust (Johann Rettenberger), Franziska Weisz (Erika), Florian Wotruba (Markus Kreczi, Johann Bednar (le commissaire Lukas), Max Edelbacher (le commissaire Seidl), Michael Welz (le commissaire Welz), Johannes Handler et Katharina Hülle (les médecins du sport), Markus Schleinzer (l’agent de probation), Jürgen & Karin

Adultes / Adolescents


Potiche Comédie politique

de François Ozon Avec Catherine Deneuve (Suzanne Pujol), Gérard Depardieu (Maurice Babin), Fabrice Luchini (Robert Pujol), Karin Viard (Nadège), Judith Godrèche (Joëlle), Jérémie Renier (Laurent Pujol), Sergi Lopez (le routier espagnol), Évelyne Dandry (Geneviève Michonneau), Bruno Lochet (André), Élodie Frégé (Suzanne, jeune), Gautier About (Babin, jeune), Jean-Baptiste

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : François Ozon, d’après la pièce de Jean-Pierre Barillet et Jean-Pierre Grédy (1980) Images : Yorick Le Saux Montage : Laure Gardette 1er assistant réal. : Hubert Barbin Scripte : Joëlle Hersant Musique : Philippe Rombi Son : Pascal Jasmes Décors : Katia Wyszkop Costumes : Pascaline Chavanne

Shelmerdine (Robert, jeune), Noam Charlier (Flavien), Martin de Myttenaere (Stanislas), Vincent Colin (le reporter d’Europe 1).

Maquillage : Aurélie Elich Casting : Sarah Teper et Leïla Fournier Production : Mandarin Cinéma Coproduction : Scope Pictures, Wild Bunch, Mars Films, France 2 Cinéma et FOZ Producteurs : Éric & Nicolas Altmayer Coproductrice : Geneviève Lemal Dir. de production : Pierre Wallon Distributeur : Mars Distribution.

103 minutes. France, 2010. Sortie France : 10 novembre 2010. Visa d’exploitation : 124669. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD.

Dans la France provinciale des années 1970, une épouse “potiche” se libère et prend la place de son mari, en famille comme en affaires. Dans la lignée de 8 femmes, François Ozon réalise un portrait de femme aussi percutant qu’agréable, drôle et léger.

Commentaire Après plusieurs échecs en salles avec des films plus dramatiques ou intimistes (Angel, Ricky, Le Refuge), F. Ozon revient à la formule qui avait fait le succès de 8 femmes : une adaptation délicieusement kitsch et gentiment trash d’une pièce du théâtre de boulevard. La reconstitution exagérée des années 1970 est assumée jusqu’au bout, les répliques fusent, le résultat est comique et énergique, plus taquin que vulgaire. Le réalisateur réunit de nouveau un casting prestigieux, dont on retiendra surtout les rôles féminins (les personnages de Fabrice Luchini et Jérémie Rénier étant tous deux un peu fades et convenus) : Karin Viard, touchante en secrétaire qui s’émancipe, Judith Godrèche, très drôle en garce de droite, et surtout Catherine Deneuve, qui brille dans le rôle titre. Ozon joue évidemment avec son statut de star “patrimoniale” (quel merveilleux clin d’œil de la faire diriger une usine de parapluies !), mais construit tout de même un véritable personnage : une femme soumise qui se réveille et s’épanouit, trouvant dans les revendications de ses salariés un écho à sa propre servitude. Faisant ouvertement allusion au duel entre Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy, François Ozon s’amuse à replacer tout au long du film les phrases célèbres de la politique de ces dernières années, du “Casse-toi pauv’ con” au “Mais qui va s’occuper des enfants ?”. Il réussit cependant à ne pas limiter son film à un patchwork de références : grâce à un savant équilibre entre premier et second degrés, il ne délaisse jamais son récit et les personnages existent au-delà de la caricature. An.B.

© Mandarin Cinéma

Résumé 1977. Suzanne est l’épouse “potiche” de l’industriel Robert Pujol, aussi tyrannique avec elle et leurs enfants - Joëlle, mère au foyer réac, et Laurent, étudiant artiste un brin communiste qu’avec ses ouvriers. Ceux-ci font grève et, un soir, le séquestrent. Suzanne fait appel à un ancien amant, le député-maire communiste Maurice Babin, pour le faire libérer. Mais suite à une attaque, Robert doit rester à l’hôpital. Suzanne prend alors la tête de l’usine de parapluies. Grâce à l’aide de Nadège, la secrétaire de Robert (et une de ses nombreuses maîtresses, heureuse de voir enfin son travail valorisé), de Joëlle et Laurent, qu’elle emploie à ses côtés, et grâce aux conseils de Maurice, Suzanne devient une patronne efficace, ouverte et appréciée, et une femme épanouie.

Dénouement Mais Robert rentre de convalescence et, ne voulant pas devenir la potiche à son tour, compte bien reprendre sa place... Pour déstabiliser l’entreprise, il répand une fausse rumeur - Suzanne compterait délocaliser la production - relayée par Maurice, très déçu de découvrir qu’il n’a pas été l’unique amant de Suzanne. Robert convoque le conseil d’administration et grâce au soutien de Joëlle, redevient patron. Non découragéee, Suzanne fait campagne, sans étiquette, aux élections législatives, assistée par Nadège. Elle bat brillamment Maurice, qui lui a pardonné. Élue député, elle commence à penser aux présidentielles... © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Réfractaire Drame

de Nicolas Steil Équipe technique Scénario : Jean-Louis Schlesser et Nicolas Steil Images : Denis Jutzeler Montage : Loredana Cristelli 1er assistant réal. : Daniel Texter Scripte : Elizabeth Alexandris Musique : André Mergenthaler et Michel Wintsch Son : Carlo Thoss Décors : Christina Schaffer Costumes : Uli Simon Maquillage : Katja Reinert-Alexis

(le docteur Bernard Weber), Judith Davis (Lou), Patrick Hastert (le père de François), Véronique Fauconnet (la mère de François), André Jung (le professeur nazi), Luc Feit (le gestapiste), Daniel Plier (Gustave), Frédéric Frenay, Hervé Sogne, Kim Hermans.

Casting : Constance Demontoy Production : Iris Productions Coproduction : CAB Productions Producteur : Nicolas Steil Coproducteur : Gérard Ruey Dir. de production : Jesus Gonzalez-Elvira Distributeur : Albany Films / Aramis Films.

100 minutes. Luxembourg - Suisse, 2008. Sortie France : 10 novembre 2010. Visa d’exploitation : 127046. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 35 copies.

Avec ce premier long métrage, Nicolas Steil, ancien journaliste devenu producteur, enferme, pendant l’occupation nazie au Grand-Duché, une poignée de personnages stéréotypés au fin fond d’une mine de fer. Et ce faisant il signe un film honorable. Sans plus.

Commentaire Si Réfractaire jette un éclairage particulier sur l’une des formes qu’a pu prendre la résistance dans le Grand-Duché du Luxembourg, cette fiction documentée muée en huis clos ferrugineux peine à convaincre tout à fait malgré un casting relativement alléchant (Carlo Brandt, Marianne Basler...). Excessivement théâtralisées, les séquences conflictuelles qui ont la mine pour cadre semblent caricaturales et témoignent d’une définition des personnages esquissée à gros traits. Il en va de même des rivalités idéologiques qui sont les leurs comme des ressorts psychologiques qui les animent et les opposent. En ce sens, les conversations politiques entre les réfractaires semblent relever d’un travail de contextualisation qui sent la sueur. En revanche, dès que la caméra s’éloigne des territoires du huis clos, le film trouve son juste ton et le récit sa fluidité. Reste le personnage de François, incarné par Grégoire Leprince-Ringuet, sur les épaules duquel repose essentiellement le film. En misant sur sa complexité, en tournant le dos au spectaculaire, en refusant de jouer la carte d’un héroïsme flamboyant, Nicolas Steil, ancien journaliste devenu producteur, signe un film qui ne fait jamais de la séduction son carburant. Relativement rêche également, le charte chromatique de Réfractaire parvient à restituer, non sans élégance ni crédibilité, l’atmosphère des années de plomb de l’occupation. Au final, ce premier long métrage laisse une impression en demi-teinte qui n’interdit pas d’attendre le prochain film de Nicolas Steil avec une bienveillante curiosité. R.H.

© Iris Prod.

Résumé Dans le Luxembourg annexé par le IIIe Reich, François, fils d’un Ingénieur des Mines qui collabore avec l’occupant, est, par obéissance filiale, étudiant à l’université allemande. Il aime une jeune fille, Lou, laquelle lui préfère René, un ami d’enfance aux origines plus modestes. En décidant de quitter la faculté, où sont professées discrimination et haine raciale, François prend le risque d’être enrôlé de force et de devoir partir sur le front russe. Déterminé, il part se cacher au fin fond d’une mine de fer où, dans des conditions pénibles, survit une poignée de réfractaires, parmi lesquels il retrouve René. Mal accepté, François doit faire face à la méfiance d’ouvriers communistes qui ont connu son père.

Dénouement Pendant que la cohabitation s’organise, François découvre que certains de ses compagnons d’infortune entretiennent des liens avec la résistance. Un soir, il suit René qui quitte la mine. Pris à parti par une patrouille, son rival est abattu sous ses yeux. Alertée par le bruit, Malou, une femme de collaborateur esseulée, lui ouvre sa porte. Ils deviennent amants. De retour à la mine, François est soupçonné de les avoir trahis mais il parvient à prouver sa bonne foi et remplace René comme coursier. Faute de médicaments, l’état d’Émile, l’un des réfractaires, empire. François tente d’alerter la résistance. Il est arrêté et torturé pendant que ses compagnons sont évacués. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Semaine du 10 novembre

Avec Grégoire Leprince-Ringuet (François), Marianne Basler (Malou), Arthur Dupont (Théo), Guillaume Gouix (René), Pierre Derenne (Albert), Raphaël Tilliette (Émile), Yoann Denaive (Enrico), Swann Arlaud (Ady), Pierre Niney (Armand), Michel Voïta (Pierrot), Carlo Brandt (Jacques), Thierry van Werveke (Édouard), Charles Muller (Samuel Pétry), Marc Olinger

Adultes / Adolescents


Rubber Comédie absurde

de Quentin Dupieux

Adultes / Adolescents

Avec Stephen Spinella (le lieutenant Chad), Roxane Mesquida (Sheila), Jack Plotnick (le comptable), Wings Hauser (l’homme en chaise roulante), Ethan Cohn (Ethan, le cinéphile), Charley Koontz (Charley, le cinéphile), Daniel Quinn (le père), Devin Brochu (le fils), James Parks (l’agent Gilber), Blake Robbins (l’agent Roque), Thomas F. Duffy (l’agent Xavier),

Équipe technique Scénario : Quentin Dupieux Images : Quentin Dupieux Montage : Quentin Dupieux 1er assistant réal. : Ian J. Putnam Scripte : Kevos Van Der Meiren Musique : Gaspard Augé et Quentin Dupieux Son : Zsolt Magyar et Stéphane De Rocquigny Décors : Pascale Ingrand et Nathan Amondson Costumes : Jamie Bresnan

Courtenay Taylor (l’agent Lynn), Pete Dicecco (Luke), Hayley Holmes (Cindy), Tara Jean O’Brien (Martina), Remy Thorne (Zach), Haley Ramm (Fiona), Cecelia Antoinette (la femme), Gaspard Augé (l’auto-stoppeur), David Bowe (le flic), Gayle Drinhaus, Pedro Winter [non crédité].

Dir. artistique : Zach Bangma Maquillage : Akiko Matsumoto Casting : Andy Henry et Donna Morong Production : Realitism Films Producteurs : Grégory Bernard et Julien Berlan Producteur exécutif : Josef Lieck Dir. de production : Julien Berlan et Kevos Van Der Meiren Distributeur : UFO Distribution.

84 minutes. France, 2010. Sortie France : 10 novembre 2010. Visa d’exploitation : 124473. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 25 copies (vo [anglaise]).

L’histoire d’un pneu serial killer sur les routes de Californie... Découverte à la Semaine de la Critique, cette série Z cultive l’absurde en l’élevant au niveau des beaux-arts. Un conte bizarre qui fera rire les esprits curieux...

Commentaire La réalité existe-elle ? Pourquoi ne voit-on pas l’air autour de nous ? (Évidemment, il n’y a aucune raison à cela !) Ces questions, hautement métaphysiques, hantent Rubber, qui aurait pu s’intituler “Ceci est un film” ou aussi bien “Ceci n’est pas un pneu”. Car Rubber est absurde, nonsensique, certains diront totalement cinglé, tout en étant une métaphore pataphysique de la Condition humaine, à la manière d’un tableau de Magritte accroché dans un motel hitchcockien. Le final peut évoquer le Joueur de flûte de Hamelin à l’heure de la société de consommation (bagnole & cinéma), entraînant derrière lui les spectateurs jusqu’à leur mort... Et pourtant, on peut aussi se contenter du premier degré et découvrir avec curiosité un personnage encore jamais représenté à l’écran : un pneu, juste un pneu comme n’importe quel pneu, mais qui respire, qui boit, qui regarde la télé (la Formule 1, of course)... Et en cela, Rubber est un film totalement original. Sorti en 2007, Steak, le premier film tout aussi conceptuel de Quentin Dupieux (plus connu dans la sphère musicale électro sous le nom de Mr. Oizo) jouait déjà de l’absurde, de la bizarrerie et de la débilité. Cette fois, on se retrouve dans un décor de série B américaine d’il y a cinquante ans, celui d’un Monte Hellman qui aurait lu Watzlawick et digéré Psychose. Dupieux ne cesse de s’amuser en parlant du cinéma, des travers des spectateurs, en jouant de la distanciation avec un sens de la provocation assumé, mais sans arrière-pensées brechtiennes. Car on reste (malheureusement ?) dans le registre de la gratuité ludique. M.B.

© Realitism Films

Résumé Quelque part dans le désert californien, le lieutenant Chad s’adresse à un groupe et prévient que ce film sera un hommage à la plus répandue des figures de style, le “No Reason”. On distribue des jumelles pour suivre les aventures d’un pneu vivant. En roulant, le pneu découvre avec plaisir qu’il possède un pouvoir psycho-kinésique : il peut faire exploser à distance aussi bien une bouteille qu’un lapin, ou un corbeau... Le matin suivant (alors que les spectateurs réclament de la nourriture...), le pneu croise, fasciné, la jolie Sheila. Il la suit. Après s’être vengé d’un chauffard en lui faisant exploser la tête, il retrouve Sheila dans un motel, et l’épie sous la douche.

Dénouement Le lendemain, on empoisonne les spectateurs. Seul, un handicapé a refusé de manger. Le pneu tue une femme de chambre du motel. Chad débarque pour enquêter. Le fils du patron est le seul à avoir compris les manigances du pneu, mais personne ne veut croire. Les spectateurs étant morts, Chad demande à ses hommes d’arrêter de jouer la comédie. Ils ne le comprennent pas. Mais le film doit continuer pour le spectateur survivant... Le pneu roule toujours, semant la mort sur son passage. On le localise dans un motel et on se sert de Sheila pour le piéger. Chad le tue, mais le pneu est réincarné en un tricycle d’enfant, qui extermine le dernier spectateur avant de partir pour Hollywood en levant derrière lui une armée de pneus... © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Le Secret de Charlie (Charlie St. Cloud) Drame romanesque

de Burr Steers

Adultes / Adolescents

Équipe technique Scénario : Craig Pearce et Lewis Colick, d’après le roman The Death and Life of Charlie St. Cloud de Ben Sherwood (2004) Images : Enrique Chediak Montage : Padraic McKinley 1re assistante réal. : Lisa C. Satriano Musique : Rolfe Kent Son : Michael Williamson et Bruce Carwardine Décors : Ida Random

Hough (Ben Carroll), Jill Teed (Grace Carroll), Tegan Moss (Cindy), Julia Maxwell (Rachel), Paul Chevreau (Hoddy Snow), Paul Duchart (le révérend Polk), Renu Bakshi (le reporter), Darren Dolynski (l’ambulancier), Sophie Stukas (Mary Rogers), Marci T. House (la photographe), Ted Whittall, Natasha Denis, D. Neil Mark, Valerie Tian, Grace Sherman, Brenna O’Brien.

Costumes : Denise Wingate Effets visuels : Todd Shifflett Production : Charlie Film Prod. et Marc Platt Prod. pour Universal Pictures Coproduction : Relativity Media Producteur : Marc Platt Producteurs exécutifs : Michael Fottrell, Ryan Kavanaugh, Ben Sherwood, Jared Leboff et Adam Siegel Distributeur : Universal Pictures.

99 minutes. États-Unis, 2010. Sortie France : 10 novembre 2010. Visa d’exploitation : 127237. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SR SRD DTS SDDS. 200 copies (vo / vf).

Dévasté par la perte de son petit frère, un jeune homme à l’avenir radieux s’emmure dans le chagrin et les regrets. Zac Efron, yeux embués et cheveux au vent, cherche désespérément à émouvoir dans ce recyclage indigeste de Ghost pour midinettes préados.

Commentaire Star auprès des jeunes depuis High School Musical, Zac Efron n’a, jusqu’à présent, que peu capitalisé sur cette popularité au cinéma, puisqu’il n’a été la tête d’affiche que d’un seul film : la comédie 17 ans encore. Pour le jeune acteur, las de jouer les sex-symbols de seconde zone pour adolescentes en fleur (catégorie Robert Pattinson), Le Secret de Charlie était l’occasion de démontrer qu’il était un vrai comédien dramatique. Sans doute aurait-il dû être mieux conseillé, et choisir un film qui évite d’accumuler les poncifs du mélo larmoyant... Ici, tous les ingrédients sont réunis pour faire pleurer dans les chaumières : le jeune adulte prêt à prendre son envol, mais dont les ailes sont arrachées par la mort du petit frère adoré ; la culpabilité latente qui découle de l’accident ; et enfin la quête d’une impossible rédemption auprès du fantôme du disparu... Comme si tout cela ne suffisait pas, le scénario rajoute une petite romance, et un croustillant rebondissement cousu de fil blanc ! Le réalisateur, Burr Steers (repéré avec l’indépendant Igby en 2002) fait l’erreur de ne jamais ménager ses effets : plans serrés sur sa star pour bien signifier les émotions, gros violons pour accompagner la moindre larme... De plus, en refusant d’expliquer les éléments fantastiques, Steers, qui pense sans doute faire le choix de la subtilité et de la poésie, alourdit encore son film, qui bascule dans une morale pieuse un peu lourdingue. Les apparitions de K. Basinger et R. Liotta, pour épauler un Efron en manque de charisme, achèvent de donner à l’ensemble une facture de téléfilm de luxe. Mais au cinéma, difficile de zapper. Mi.G.

© Universal

Résumé À Quincy, Charlie St. Cloud et son jeune frère, Sam, remportent une régate. À la rentrée suivante, Charlie doit intégrer l’université de Stanford grâce à une bourse. Il promet à Sam, grand amateur de baseball, de l’entraîner une heure chaque soir durant tout l’été. Un soir, alors que Charlie compte se rendre à une fête, sa mère, Claire, lui demande de garder Sam. Charlie accepte de déposer Sam chez un ami. Sur la route, ils sont percutés par un camion. Un ambulancier, Florio Ferrente, réussit à réanimer Charlie. Pour Sam, il est trop tard...

Dénouement Cinq ans plus tard, Charlie n’a pas quitté Quincy, contrairement à sa mère. Il est désormais le gardien du cimetière, et son collègue, Alistair, tolère son comportement étrange. Car Charlie peut voir les fantômes des morts de passage... Chaque soir, il va entraîner Sam. Par hasard, Charlie croise Tess Carroll, une ancienne camarade de classe, qui est devenue skipper et se prépare à un tour du monde en solitaire. Ils sympathisent, et finissent par passer une nuit ensemble. Mais, à cause d’un rendez-vous avec elle, Charlie arrive en retard pour l’entraînement de Sam. Le lendemain, Charlie apprend que Tess a disparu en mer quelques jours plus tôt : il comprend qu’elle est encore en vie mais aux portes de la mort. Il choisit d’aller la secourir, et laisse alors Sam quitter ce monde. Au péril de sa vie, il sauve Tess. Quelques temps plus tard, le couple part en voyage. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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Semaine du 10 novembre

Avec Zac Efron (Charlie St. Cloud), Charlie Tahan (Sam St. Cloud), Amanda Crew (Tess Carroll), Augustus Prew (Alistair Woolley), Donal Logue (Tink Weatherbee), Kim Basinger (Claire St. Cloud), Ray Liotta (Florio Ferrente), Dave Franco (Sully), Matt Ward (Connors), Miles Chalmers (Latham), Jesse Wheeler (Green), Desiree Zurowski (Carla Ferrente), Adrian


Welcome to the Rileys (Welcome to the Rileys) Chronique

de Jake Scott

Adultes / Adolescents

Avec James Gandofini (Doug Riley), Melissa Leo (Lois Riley), Kristen Stewart (Mallory), Joe Chrest (Jerry), Ally Sheedy (Harriet), Tiffany Coty (Tara), Eisa Davis (Vivian), Lance E. Nichols (Hamilton “Ham” Watkins), Peggy Walton Walker (Brenda), Sharon Landry (Sharon), Kathy Lamkin (Charlene), Ken Hixon (Danny), Elliott Grey (Randy), David Jensen (Ed), Greg Di Leo

Équipe technique Scénario : Ken Hixon Images : Christopher Soos Montage : Nicolas Gaster 1er assistant réal. : Jesse Nye Scripte : Tony Osso Musique : Marc Streitenfeld Son : Robert Bigelow et Gabriel J. Serrano Décors : Happy Massee Costumes : Kim Bowen Maquillage : Robin Mathews Casting : Avy Kaufman

(Ernie), Michael Wozniak (Lee), Russell Steinberg (Anthony Yuse), Kim Collins (le garant), Jack Moore [non crédité], Terry Lee Smith [non crédité], Allen Boudreaux [non crédité], Tony Pallo [non crédité], Garret A. Lain [non crédité], Melissa Claude [non créditée], Lara Grice [non créditée], Kerry Cahill [non créditée], Laurie Lee [non créditée].

et Elizabeth Coulon Production : Scott Free Prod. et Argonaut Pictures Producteurs : Scott Bloom, Giovanni Agnelli, et Michael Costigan Producteurs délégués : Ridley & Tony Scott, Steven Zaillian, Ken Hixon et Manny Mashouf Producteur exécutif : Bergen Swanson Distributeur : Bac Films.

110 minutes. Royaume-Uni - États-Unis, 2010. Sortie France : 10 novembre 2010. Visa d’exploitation : 127601. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 100 copies (vo).

Un couple marié de longue date, confronté à une stripteaseuse : un cliché que détourne intelligemment le scénariste Ken Hixon. Si l’ensemble peut souffrir de son estampillage “Sundance”, les prestations de son trio d’acteurs apportent une chaleureuse humanité.

Commentaire Au premier abord, Welcome to the Rileys ne se distingue pas vraiment du tout-venant de la production indépendante américaine : on y retrouve un savoir-faire évident, mis au service d’une histoire universelle et traitée à échelle humaine. Et dans la forme, il ne surprend malheureusement jamais : la mise en scène est tout en retenue, ne s’autorise que de très rares fantaisies, et suit de façon pointilleuse l’évolution de personnages ordinaires. Pourtant, le film se démarque par fines touches : l’humour qui surgit dans la “libération” de Lois, incapable de se servir d’une voiture moderne, la colère moralisatrice de Doug, mari infidèle mais furieux d’entendre les grossièretés de sa jeune protégée... De fait, si Welcome to the Rileys fonctionne à merveille, c’est avant tout grâce à son trio de comédiens. James Gandolfini (la série Les Soprano), Melissa Leo (Frozen River) et Kristen Stewart (Twilight ou Les Runaways) réussissent là où beaucoup d’acteurs confirmés échouent : dans l’incarnation de la normalité. Leurs prestations respectives prennent le pas sur les thèmes du film - le deuil et l’acceptation de soi -, y apportent une authenticité trop souvent absente de ce type de projet et font oublier le manque d’originalité de l’ensemble. Reste un dernier élément non négligeable : c’est Jake Scott (fils de Ridley et neveu de Tony, producteurs du film) qu’on retrouve derrière la caméra, lui qui s’était tenu éloigné du grand écran depuis l’échec du survitaminé Guns 1748. Et soudainement, les choix de mise en scène, que l’on pourrait qualifier de trop sages, en font une œuvre pleine de maturité. Mi.G.

© Christopher Soos

Résumé Doug Riley vit avec son épouse, Lois, dans l’Indiana. Il partage son temps entre son travail - il fabrique des fournitures de plomberie -, les parties de poker avec ses amis et ses rendez-vous avec Vivian, sa maîtresse depuis quatre ans. Avant un déplacement professionnel à la Nouvelle-Orléans, Doug propose à Vivian de l’accompagner. Le lendemain, Doug apprend qu’elle est morte d’une crise cardiaque. Il part seul et désorienté. Sur place, il échoue dans un club de strip-tease miteux, où il est repéré par Mallory, une danseuse aux mœurs très légères dont il refuse les avances.

Dénouement Le soir, Doug croise Mallory dans un restaurant. Ils sympathisent. Mallory l’invite chez elle, mais Doug refuse de coucher avec elle. Fasciné par la jeune fille et décidé à améliorer sa vie, il annonce à Lois, qui n’est pas sortie de leur maison depuis la mort tragique de leur fille, il y a huit ans, qu’il va rester quelque temps à la Nouvelle-Orléans, et décide de vendre son entreprise. Lois se prend alors en main et part en voiture le rejoindre. Pendant ce temps, Doug s’est installé chez Mallory. Il la présente à Lois, qui voit immédiatement la ressemblance avec leur fille défunte et s’en inquiète. Pendant quelques jours, ils s’occupent pourtant ensemble de Mallory, jusqu’à ce que la jeune fille, qui continuait ses activités, leur rappelle qu’elle n’est pas leur enfant. Doug et Lois se résignent à rentrer chez eux. Mais le couple gardera le contact avec Mallory. © les Fiches du Cinéma 2010 - N°1994-95

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S o m m a i r e

toutes les sorties

Les Étoiles de la rédaction p.2 Édito p.3 Bassidji ............................................. ★★ ..................... p.4 Fin de concession .......................... ★★★★ ............. p.5 Il reste du jambon ? ....................... ★ ......................... p.6 Je ne peux pas vivre sans toi ...... ★★ .................... p.7 Nostalgie de la lumière ................. ★★ ..................... p.8 Les Nuits de Sister Welsh ............ ★★ ..................... p.9 Le Royaume de Ga’Hoole .............. ★★ ..................... p.10 Vénus noire ..................................... ★★ .................... p.11 Very Bad Cops ................................ ★★★ ................. p.12 Buried ............................................... ★★★ ................. p.13 Le Dernier voyage de Tanya ........ ★★ .................... p.14 Des filles en noir ............................. ★★ ..................... p.15 Draquila, l’Italie qui tremble ......... ★★★ ................. p.16 En présence d’un clown ................ ★★★★ ............. p.17 Fair Game ......................................... ★★ ..................... p.18 L’ Homme qui voulait vivre sa vie ... ★★★ ................. p.19 Kill Me Please ................................. ★★ ..................... p.20 Le Plein pays ................................... ★★★ ................. p.21 La Princesse de Montpensier ...... ★★ ..................... p.22 Les Yeux ouverts ............................ ★★★ ................. p.23 Belle épine ....................................... ★★★ ................. p.24 Le Braqueur ..................................... ★★★ ................. p.25 Potiche ............................................. ★★★ ................. p.26 Réfractaire ....................................... ★ ......................... p.27 Rubber .............................................. ★★★ ................. p.28 Le Secret de Charlie ...................... ★ ......................... p.29 Welcome to the Rileys ................... ★★★ ................. p.30

Allez, raconte ! Visa : 117441 1,85 - Dolby SR 92 copies Dist. : Gebeka Films. Alpha et Oméga Visa : 127634 1,85 (3D) - Dolby SR SRD 391 copies (vo / vf) Dist. : Metropolitan Filmexport. Bassidji Visa : 124331 1,85 - Dolby SR 3 copies Dist. : Aloest Distribution. Biutiful Visa : 127590 1,85 - Dolby SRD 150 copies (vo / vf) Dist. : ARP Sélection. Divorce à la finlandaise Visa : 126234 Scope - Dolby SRD 50 copies (vo) Dist. : .Kanibal Films Ma petite planète chérie Visa : 127464 1,85 - Stéréo 43 copies Dist. : Folimage. Mystères de Lisbonne Visa : 127131 1,78 - Dolby SRD 12 copies (vo) Dist. : Alfama Films. Paranormal Activity 2 Visa : 127537 1,85 - Dolby SRD 200 copies (vo / vf) Dist. : Paramount Pictures. Les Petits mouchoirs Visa : 121898 Scope - Dolby SRD DTS 555 copies Dist. : EuropaCorp. Picture Me Visa : 127676 Diffusion numérique 1,77 - Dolby SR 10 copies (vo) Dist. : Eurozoom.

Semaine du 27 octobre The American Visa : 127603 Scope - Dolby SRD DTS Copies : n.c. Dist. : Mars Distribution. Blind Test Visa : 126653

1,85 - Dolby SRD Copies : n.c. Dist. : Les Films à Fleur de Peau. Capelito Visa : 127066 1,37 - Dolby SR Copies : n.c. Dist. : Cinéma Public Films. Fin de concession Visa : 115240 1,85 - Dolby SR DTS Copies : n.c. Dist. : Shellac. Il reste du jambon ? Visa : 121251 Scope - Dolby SRD Copies : n.c. Dist. : Gaumont. Je ne peux pas vivre sans toi Visa : 127406 1,85 - Dolby SRD 15 copies (vo) Dist. : Héliotrope Films. Journal d’un dégonflé Visa : 127461 1,85 - Dolby SR SRD DTS Copies : n.c. Dist. : 20th Century Fox. Nostalgie de la lumière Visa : 121200 1,85 - Dolby SRD 35 copies (vo) Dist. : Pyramide. Les Nuits de Sister Welsh Visa : 111927 1,85 - Dolby SR DTS 20 copies Dist. : Albany Films / Aramis Films. Le Royaume de Ga’Hoole Visa : 127861 1,85 (2D / 3D) & IMAX - Dolby SR SRD DTS SDDS Copies : n.c. Dist. : Warner Bros. Vénus noire Visa : 122112 1,85 - Dolby SRD 300 copies Dist. : MK2 Diffusion. Very Bad Cops Visa : 126348 Scope - Dolby SR SRD DTS Copies : n.c. Dist. : Sony Pictures.

Semaine du 3 novembre Buried Visa : 127836 Scope - Dolby SRD Copies : n.c. Dist. : Studio 37 /

Rezo Films. Le Dernier voyage de Tanya Visa : 127498 Scope - Dolby SR SRD 40 copies (vo) Dist. : Memento Films. Des filles en noir Visa : 119514 Scope - Dolby SRD 50 copies Dist. : Les Films du Losange. Draquila, l’Italie qui tremble Visa : en cours 1,85 - Dolby SRD 30 copies (vo) Dist. : Bellissima Films. En présence d’un clown Visa : 127340 1,33 - Mono Copies : n.c. Dist. : Capricci Films. Fair Game Visa : en cours Scope - Dolby SRD DTS Copies : n.c. Dist. : UGC. L’Homme qui voulait vivre sa vie Visa : 124332 Scope - Dolby SRD DTS Copies : n.c. Dist. : EuropaCorp. Jackass 3D Visa : 127621 1,77 (3D) - Dolby SR SRD Copies : n.c. Dist. : Paramount Pictures. Kill Me Please Visa : 125309 1,85 - Dolby SR DTS Copies : n.c. Dist. : Le Pacte. Le Plein pays Visa : 124074 1,33 - Stéréo Copies : n.c. Dist. : Les Films du Paradoxe. La Princesse de Montpensier Visa : 115106 Scope - Dolby SR SRD DTS Copies : n.c. Dist. : StudioCanal. Les Yeux ouverts Visa : 125475 1,85 - Dolby SR 20 copies Dist. : Zelig Films.

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• Directeur de Publication : Cyrille Latour • Rédacteur en chef : Nicolas Marcadé (redaction@fichesducinema.com) • Secrétaire de Rédaction : Michael Ghennam • Ont collaboré à ce numéro : Christian Berger, Anne Berjon, Michel Berjon, Géraldine Borrely, Isabelle Boudet, Jef Costello, Marguerite Debiesse, Michael Ghennam, (Pierre-)Simon Gutman, Roland Hélié, Cyrille Latour, Camille Lebert Loiret, Nicolas Marcadé, Marine Quinchon, Chloé Rolland, Nathalie Zimra. Les commentaires des «Fiches» reflètent l’avis général du comité. • Administration : Chloé Rolland (administration@fichesducinema.com) • Trésorier : Guillaume de Lagasnerie • Conception Graphique : pinkpunk (contact@pinkpunk.fr) • Impression : Compédit Beauregard S.A. Zone industrielle Beauregard 61600 La Ferté-Macé Tél : 02.33.37.08.33 • Dépôt légal : Octobre 2010 • Commission paritaire : 0310 G 86313 • ISSN 0336-9331 «Les Fiches du Cinéma». Tous droits réservés. Toute reproduction même partielle des textes est soumise à autorisation.

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Prochain numéro le 10 novembre 2010

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Semaine du 10 novembre

Semaine du 3 novembre

Semaine du 27 octobre

Semaine du 20 octobre

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