Fiches du Cinéma #2019 (4 janvier 2012)

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n°2019

Une vie meilleure de Cédric Kahn

Take Shelter

de Jeff Nichols

Millénium : Les Hommes qui n’aimaient pas les femmes de David Fincher - Les Acacias de Pablo Giorgelli Dans la tourmente de Christophe Ruggia

N°2019 • 4 JANVIER 2012 • SORTIES DES 4 / 11 / 18 JANVIER 2012 • 5,00 €


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H Les Acacias (n°2019)

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Corpo celeste (n°2018) m

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Dans la tourmente (n°2019) La Délicatesse (n°2018)

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Des vents contraires (n°2018)

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10 jours en or (n°2019) 17 filles (n°2018)

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Duch, le Maître des Forges de l’Enfer (n°2019)

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Et si on vivait tous ensemble ? (n°2019)

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Freakonomics (n°2019)

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Goodbye Mister Christie (n°2019) El Gusto (n°2019)

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Le Havre (n°2018)

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Hugo Cabret (n°2018) Ici-bas (n°2019) Il n’y a pas de rapport sexuel (n°2019)

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Millénium (n°2019)

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Mission : Impossible - Protocole fantôme (n°2018)

On the Ice (n°2018)

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L’Orpheline avec en plus un bras en moins (n°2019)

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Le Pacte (n°2019)

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Parlez-moi de vous (n°2019)

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Le Projet Nim (n°2019)

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Shame (n°2017)

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Take Shelter (n°2019)

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Trust (n°2019) Une nuit (n°2019)

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Une vie meilleure (n°2019)

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H un film passable

HH un film honorable

les films préférés de la rédaction

HHH un bon film

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HHHH un excellent film

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Turn Me Øn ! (n°2019)

m un mauvais film

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Killing Fields (n°2018) Louise Wimmer (n°2019)

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J. Edgar (n°2019)

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Les Nouveaux chiens de garde (n°2019)

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Carnage (n°2017)

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Anonymous (n°2019)

Les Crimes de Snowtown (n°2018)

autres c otes du comit é de réda ction §

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L’Amour dure trois ans (n°2019)

La Colline aux coquelicots (n°2019)

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A Dangerous Method (n°2018)

Beau rivage (n°2019)

Marine Quin

Pierre-S imon Gu tman Nicolas Marcadé Gaël Ma rtin

am Michael Ghenn

Patrick Flouriot Thomas Fouet

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François Barge-P rieur Michel B erjon

Les Étoiles de la Rédaction

§ le coup de cœur

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édito

Chers amis, LES FICHES DU CINÉMA 69, rue du Faubourg Saint Martin 75010 Paris Tél : 01.42.36.20.70 Fax : 01.42.36.10.65 .............................................................. PRÉSIDENT Cyrille Latour RÉDACTEUR EN CHEF Nicolas Marcadé redaction@fichesducinema.com RÉDACTEUR EN CHEF ADJOINT SECRÉTAIRE DE RÉDACTION Michael Ghennam .............................................................. ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO François Barge-Prieur, Christian Berger, Anne Berjon, Michel Berjon, Géraldine Borrely, Isabelle Boudet, Iris Brey, Delphine Cazus, Patrick Flouriot, Thomas Fouet, Michael Ghennam, (Pierre-)Simon Gutman, Marine Héligon, Rocco Labbé, Cyrille Latour, Nicolas Marcadé, Gaël Martin, Marine Quinchon, Chloé Rolland, Benjamin Untereiner, Nathalie Zimra. Les commentaires des «Fiches» reflètent l’avis général du comité

.............................................................. ADMINISTRATRICE Chloé Rolland administration@fichesducinema.com TRÉSORIER Guillaume de Lagasnerie CONCEPTION GRAPHIQUE Sébastien Ragel ragels@wanadoo.fr IMPRESSION IRO - Zone industrielle rue Pasteur 17185 Périgny Tél : 05.46.30.29.29 .............................................................. DÉPÔT LÉGAL Janvier 2012 COMMISSION PARITAIRE 0315 G 86313 - ISSN 0336-9331 «Les Fiches du Cinéma». Tous droits réservés. Toute reproduction même partielle des textes est soumise à autorisation.

WWW.FICHESDUCINEMA.COM

Vous tenez entre vos mains le tout premier numéro en couleur des Fiches ! C’est une petite révolution pour une revue ayant déjà 77 ans d’existence, mais c’est surtout, dans son histoire, l’amorce d’une nouvelle phase d’évolutions. Les Fiches ont vu le jour en 1934. Interdite de publication pendant la Seconde Guerre mondiale, mais assurée en clandestinité par les équipes bénévoles qui la dirigeaient, la revue s’est doublée d’une édition annuelle en 1944 pour assurer sa mission d’exhaustivité. Et dès lors, chaque année, L’Annuel du Cinéma a compilé toutes les fiches des films sortis sur les écrans français. En 2005, nous avons fait nos premiers pas sur Internet. En 2012, notre site devrait accueillir l’intégralité des fiches collectées depuis 1934, soit quelque 35000 films référencés. C’est une base de données unique en France. Nous préparons sa mise en ligne depuis plus d’un an, avec l’aide et le soutien d’amis, qui ont bien voulu - par sympathie, passion, voire inconscience ! - nous accompagner dans cette aventure gigantesque. Nous découvrons nos archives avec la même curiosité teintée d’appréhension que celle qui étreint quiconque se penche sur ses photos de famille : tout comme nos tenues des années 1980 font bien rire aujourd’hui, certains avis critiques des fiches des années passées peuvent nous surprendre ou nous faire un peu rougir. En tout cas, ils dessinent une histoire cohérente et dont nous sommes fiers : celle d’un groupe - sans cesse renouvelé - de cinéphiles différents les uns des autres, mais tous indépendants et sincères, construisant ensemble une histoire passionnée du cinéma. Nous envisageons nos trois supports – revue, Annuel et site – comme trois vecteurs de transmission de la cinéphilie. La revue offre une existence égale à chacun des films en salles ; L’Annuel répertorie, indexe et analyse la somme de ces sorties ; le site trie par filmographies, ordonne les thématiques et rapproche les influences. L’incursion dans le web n’a pas vocation à ringardiser le papier. Notre approche est bel et bien multifonctions et multi-publics, de la même façon que nos équipes restent éclectiques. Depuis sept ans désormais, nous avons constitué une équipe solide (Cyrille Latour, Nicolas Marcadé et Chloé Rolland, rejoints par Michael Ghennam) afin d’assurer la continuité et le développement du travail des Fiches. Pour cela, nous avons la chance de pouvoir compter, à la fois dans le comité de rédaction et dans le conseil d’administration de l’association, sur des fidèles (jusqu’à 25 ans d’ancienneté !) et sur de prometteuses nouvelles plumes. Nous sommes très heureux de démarrer cette année avec vous, que vous soyez, vous aussi, des fidèles (parfois depuis plus de 25 ans !) ou de nouveaux lecteurs. 2012 est une année décisive pour Les Fiches. Par une fâcheuse ironie du sort, les changements annoncés s’inscrivent dans de difficiles perspectives financières. Mais gageons tous ensemble que l’esprit de résistance favorisera “une vie meilleure”. Au nom de toute l’équipe, meilleurs vœux à tous et bonne lecture ! CHLOÉ ROLLAND


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Bilan 2

Top 10 de la rédaction

1.

Melancholia de Lars Von Trier

2.

Pater de Alain Cavalier

3.

L’Apollonide de Bertrand Bonello

4.

Drive de Nicolas Winding Refn Polisse de Maïwenn Tomboy de Céline Sciamma

7.

L’Éxercice de l’État de Pierre Schoeller Habemus Papam de Nanni Moretti Une séparation de Asghar Farhadi

10. Le Havre de Aki Kaurismäki

Puis... : 11. Essential Killing de Jerzy Skolimowski / The Artist de Michel Hazanavicius 13. La Guerre est déclarée de Valérie Donzelli / Winter’s Bone de Debra Granik / Il était une fois en Anatolie de Nuri Bilge Ceylan 16. The Tree of Life de Terrence Malick 17. Black Swan de Darren Aronofsky / Animal Kingdom de David Michôd 19/ We Need to Talk About Kevin de Lynne Ramsay / La Dernière piste de Kelly Reichardt Les Neiges du Kilimandjaro de Robert Guédiguian.

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n 2011

Outsiders

Au-delà des films autour desquels se font le consensus et le Top collectif, chaque année recèle des œuvres moins exposées, moins vues, moins fédératrices, moins propices à la reconnaissance collective qu’au coup de cœur individuel. Nous sommes donc allés prélever un de ceux-là dans les Top personnels (consultables dans leur intégralité sur notre site Internet) de chacun des membres de l’équipe. Manière de donner une photo de l’année un peu plus contrastée et de rendre davantage justice à l’hétérogénéité des goûts qui fait la spécificité de notre rédaction. Sélim Ammouche : Balada Triste de Alex de la Iglesia François Barge-Prieur : Detective Dee de Tsui Hark Georges Barret : La Pecora nera de Ascanio Celestini Christian Berger : Lourdes de Jessica Hausner Anne Berjon : J’ai rencontré le diable de Kim Jee-woon Jean-Christophe Berjon : Santiago 73, Post Mortem de Pablo Larrain Michel Berjon : Angèle et Tony de Alix Delaporte Géraldine Borrely : Ceci n’est pas un film de Jafar Panahi et Mojtaba Mirtahmasb Olivier Bouchard : Hors Satan de Bruno Dumont Iris Brey : Another Earth de Mike Cahill Delphine Cazus : Never Let Me Go de Mark Romanek Comment savoir

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Jef Costello : Super 8 de J.J. Abrams Marguerite Debiesse : Sweet Grass de Lucie Castaing-Taylor et Illisa Barbash Patrick Flouriot : L’Étrange affaire Angelica de Manoel de Oliveira Thomas Fouet : Le Cheval de Turin de Bela Tarr Leïla Gharbi : La BM du Seigneur de Jean-Charles Hue Michael Ghennam : Hanna de Joe Wright Pierre-Simon Gutman : Road to Nowhere de Monte Hellman Roland Hélié : Jeanne Captive de Philippe Ramos Marine Héligon : Le Gruffalo de Jakob Schuh et Max Lang Rocco Labbé : Very Cold Trip de Dome Karukoski Cyrille Latour : I Wish I Knew de Jia Zhang-ke

Camille Lebert-Loiret : Mes meilleures amies de Paul Feig Gérard Lenne : Malveillance de Jaume Balagueró Cédric Lépine : Carancho de Pablo Trapero Nicolas Marcadé : I’m Still Here de Casey Affleck Gael Martin : Comment savoir de James L. Brooks Julien Nève : The Murderer de Hong-jin Na Marie Plantin : Un amour de jeunesse de Mia Hansen-Løve Marine Quinchon : Qu’ils reposent en révolte de Sylvain George Chloé Rolland : L’Autobiographie de Nicolae Ceausescu de Andrei Ujica Claude Rotschild : Minuit à Paris de Woody Allen Benjamin Untereiner : Attenberg de Athina Rachel Tsangari Nathalie Zimra : Incendies de Denis Villeneuve Hors Satan

© les Fiches du Cinéma 2012 - N°2019


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Les Acacias (Las Acacias) de Pablo Giorgelli Sur la route qui relie le Paraguay à Buenos Aires, un camionneur doit cohabiter avec une femme et son bébé, qu’il ne connaît pas. Les Acacias est un premier film touchant grâce à sa sincérité et à sa tendresse, qui dépassent son apparente radicalité.

© Bodega Films

HHH Récompensé de la Caméra d’Or au dernier Festival de Cannes, Les Acacias est le premier long métrage de Pablo Giorgelli, auparavant monteur pour le cinéma et réalisateur de documentaires pour la télévision. Les partis pris du cinéaste semblent d’abord assez radicaux : son intrigue est minimaliste (la cohabitation, dans un camion, entre un homme, une femme et son bébé, contraints de faire 1500 km ensemble), il filme les longs silences d’un voyage (les personnages parlent très peu et il n’y a aucune musique, seuls les pleurs du bébé rythment la bande son), utilise un décor quasiment unique et pourtant changeant (signant une sorte de huis clos mobile) et ne donne que très peu d’informations sur ses personnages. Mais Les Acacias se révèle être tout autre chose qu’un exercice de style : les longueurs ne sont pas de nature à exclure ou ennuyer le spectateur, elles sont au contraire une invitation à participer au voyage. Et le film se révèle alors empreint d’une humanité et d’une douceur qui peuvent toucher chacun. Derrière l’apparente simplicité du récit, Pablo Giorgelli fait preuve d’une précision remarquable dans son écriture et dans sa mise en scène. La rencontre entre ces personnages est ainsi décrite avec justesse, et leur évolution, si elle est subtile, est bien réelle : peu à peu, l’homme solitaire et endurci par la vie recommence à s’ouvrir aux autres, tandis que la mère célibataire prend espoir de voir sa vie changer. Le bébé est aussi important que les deux adultes, et Pablo Giorgelli l’utilise particulièrement bien : moins timide qu’eux, il “dialogue” beaucoup avec chacun et suscite les interactions. _An.B

ROAD MOVIE Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Alors qu’il transporte du bois de Asunción vers Buenos Aires, Rubén, un camionneur argentin solitaire, doit emmener une Paraguayenne, Jacinta, et son bébé, Anahí. Il les accueille froidement, son patron ne lui ayant pas mentionné l’enfant. Sans un mot, ils arrivent à la douane, où Jacinta est interrogée : elle va visiter son cousin à Buenos Aires, et sa fille n’a pas de père. Ils reprennent la route. Rubén se retient de fumer. Anahí pleure : ils s’arrêtent pour réchauffer le biberon. Rubén se renseigne discrètement sur les bus pour Buenos Aires. Dans le camion, Rubén se laisse un peu attendrir par Anahí. Il offre du maté à Jacinta et ils échangent quelques mots. SUITE... Anahí pleure et le gobelet de Rubén la calme. Rubén dit à Jacinta qu’il a un fils. Ils s’arrêtent chez la sœur de Rubén et l’attendent au bord de l’eau. Sur la route, la nuit tombe. Tandis que Jacinta dort, Rubén donne la main à Anahí. Quand il commence à s’endormir, Jacinta lui demande de s’arrêter. Elle lui confie Anahí pour aller téléphoner. Le matin, ils se lavent et repartent. Jacinta parle en guarani et ils plaisantent. Rubén lui avoue ne pas avoir vu son fils depuis huit ans. Ils déjeunent avec des routiers et Rubén est jaloux d’un Paraguayen. À Buenos Aires, Rubén dépose Jacinta chez son cousin. Il offre son gobelet à Anahí. Rubén et Jacinta ont du mal à se quitter. Ému, il lui propose de l’emmener à Catamarca la semaine suivante. 85 minutes. Argentine - Espagne, 2011 Sortie France : 4 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Germán de Silva (Rubén), Hebe Duarte (Jacinta), Nayra Calle Mamani (Anahí). Scénario : Pablo Giorgelli et Salvador Roselli Images : Diego Poleri Montage : María Astrauskas 1er assistant réal. : Mariano Biasín Son : Martín Litmanovich Décors : Yamila Fontán Costumes : Violeta Gauvry et Laura Donari Production : Airecine, Utópica Cine et Proyecto Experience Coproduction : Armónika Entertainment, Tarea Fina, Hibou Producciones et Travesía Producciones Producteurs : Ariel Rotter, Verónica Cura, Alex Zito et Pablo Giorgelli Coproducteurs : Eduardo Carneros et Esteban & Javier Ibarretxe Producteurs exécutifs : Verónica Cura et Ariel Rotter Dir. de production : Juan Pablo Miller Distributeur : Bodega Films.

Visa d’exploitation : en cours. . Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD.

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Anonymous (Anonymous) de Roland Emmerich Roland Emmerich s’attaque à Shakespeare, à travers un récit complexe où se mêlent complot et interrogations sur l’identité du barde. Le résultat est une sorte de thriller politique shakespearien, plus réussi que prévu et étonnant de la part de son auteur.

© Sony

HH Avant toute chose, Anonymous est un défi inattendu au concept même de politique des auteurs. En effet, il s’agit du nouveau film de Roland Emmerich, le légendaire cinéaste allemand, auteur, aux États-Unis, d’œuvres aussi subtiles que Universal Soldier, Godzilla ou Independence Day. Le voilà ici très loin des films d’action ou à grand spectacle qui ont fait sa réputation de cinéaste explosif. En effet, Anonymous prend pour point de départ le mystère qui a toujours entouré la question de l’identité réelle de Shakespeare, et développe à partir de là un récit foisonnant, où le destin de l’écrivain se mêle à une sombre histoire de pouvoir et de complot, au cœur de l’Angleterre élisabéthaine. Le scénario, d’une étonnante richesse et d’une efficacité indéniable, multiplie les enjeux narratifs, mais cela ne crée pas d’effet de confusion, et apparaît au contraire comme une judicieuse façon de rendre hommage à la démesure baroque du théâtre élisabéthain. Côté réalisation, très étonnamment, Emmerich se révèle être bien l’homme de la situation : précisément parce que son légendaire manque de légèreté confère au film un ton direct, souvent grossier, parfois même vulgaire, qui correspond finalement bien plus à ce qu’est l’art shakespearien que les hommages empesés qu’ont pu livrer certains cinéastes anglais, comme John Madden avec son Shakespeare in Love. Servi par une distribution impeccable, avec en tête le formidable Rhys Ifans (Good Morning England et Coup de foudre à Notting Hill), Anonymous pourrait bien être, contre toute attente, le meilleur film d’Emmerich (ce qui ne veut pas dire grand-chose…). En tout cas, c’est un bon film, ce qui est déjà pas mal. _S.G

FANTAISIE HISTORIQUE Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Fin du XVIe siècle. Edward de Vere, comte d’Oxford, assiste à une pièce de théâtre dans un quartier populaire. Repérant l’auteur, Ben Jonson, il le charge de monter, sous son nom, une pièce qu’il a écrite et que son rang ne lui permet pas d’assumer. Jonson refuse, mais Shakespeare, l’un de ses médiocres comédiens, décide de la monter : la pièce, qui est un chef-d’œuvre d’écriture, obtient un triomphe public. Mais elle affirme aussi une opposition évidente au secrétaire d’État de la reine Elizabeth, le vieux William Cecil. SUITE... Des années plus tôt. William devient le tuteur du jeune Edward. Par passion, ce dernier écrit des pièces, tout en se préparant à devenir un conseiller de la reine. Or, quelque temps plus tard, Edward a une liaison avec Elizabeth, qui tombe enceinte. William fait placer l’enfant. Après avoir accepté un mariage arrangé avec la fille de William, Edward se brouille avec son futur beau-père, ainsi que Robert, le fils de ce dernier, et Elizabeth. Il est banni de la cour. Le succès des pièces de Shakespeare ne cesse de grandir. À la mort de son père, Robert suit ses conseils et laisse faire. Edward signe alors une attaque directe contre Robert, Richard III, pour provoquer une émeute et le contraindre à céder son poste. Mais ses projets sont neutralisés par l’habile Robert, qui lui révèle la vérité : Edward est le bâtard d’Elizabeth, que William voulait faire accéder au trône... avant que sa passion pour le théâtre et son inceste ne détruisent ces ambitions. Edward meurt de chagrin. Ses pièces vivent... 138 minutes. États-Unis - Allemagne, 2011 Sortie France : 4 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Rhys Ifans (Edward de Vere, comte d’Oxford), Vanessa Redgrave (la reine Elizabeth), Sebastian Armesto (Ben Jonson), Rafe Spall (William Shakespeare), David Thewlis (William Cecil), Edward Hogg (Robert Cecil), Xavier Samuel (le comte de Southampton), Jamie Campbell Bower (Edward, jeune), Joely Richardson (Elizabeth, jeune), Paolo De Vita (Francesco), Trystan Gravelle (Christopher Marlowe), Robert Emms (Thomas Dekker), Tony Way (Thomas Nashe), Julian Bleach (le capitaine Richard Pole), Derek Jacobi (le comédien du prologue), Alex Hassell, James Garnon, Mark Rylance, Jasper Britton, Michael Brown, Ned Dennehy, John Keogh, Lloyd Hutchinson, Vicky Krieps, Helen Baxendale, Paula Schramm. Scénario : John Orloff Images : Anna J. Foerster Montage : Peter R. Adam Scripte : Gabriella Gobber 1er assistant réal. : Christopher Doll Musique : Thomas Wander et Harald Kloser Son : Manfred Banach, Paul N.J. Ottosson et Hubert Bartholomae Décors : Sebastian T. Krawinkel Costumes : Lisy Christl Production : Centropolis Ent. pour Columbia Pictures Production déléguée : Anonymous Pictures Production associée : Relativity Media et Studio Babelsberg Producteurs : Roland Emmerich, Larry Franco et Robert Léger Producteurs exécutifs : Volker Engel, Marc Weigert et John Orloff Distributeur : Sony Pictures.

Visa d’exploitation : 131693. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SR SRD DTS. 120 copies (vo / vf).

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Goodbye Mister Christie (Goodbye Mr. Christie) de Phil Mulloy Un marin séduit un à un les membres d’une famille moyenne et provoque ni plus ni moins que la fin du monde. Graphisme minimaliste et pulsions en tous genres : Phil Mulloy, éternel enfant terrible du cinéma d’animation, signe un conte noir et nihiliste.

© Spectre Films

HH Qu’on ne s’y trompe pas au vu de l’interminable et improbable générique qui clôt ce film, premier volet d’une trilogie iconoclaste : Goodbye Mister Christie est l’œuvre d’un unique artiste qui, jusqu’à la toute fin, se joue des codes de l’animation et des grosses productions du genre. Aucun nom crédité ne renvoie à une personne existante. C’est bel et bien Phil Mulloy, et lui seul, qui fait tout, y compris les voix de ses multiples personnages qu’il génère et modifie par ordinateur. Éternel enfant terrible du cinéma animé (Mondo Mulloy, la trilogie Intolérance), Phil Mulloy est souvent comparé à Bill Plympton. Il partage, certes, avec lui un goût potache pour la provocation, tant visuelle que thématique, mais se distingue par la radicalité de son approche. Minimalistes voire austères, les images de Goodbye Mister Christie égrènent de grossiers visages en ombre chinoise, alternativement de face ou de profil, avec de simples ronds transparents pour figurer les yeux et la bouche. La technique volontairement basique, les voix métalliques et la musique synthétique rappellent au mieux l’art numérique expérimental des années 1980, au pire les premiers clips de MTV. Phil Mulloy ne crée pas un univers dans lequel il ferait bon se plonger, mais malmène en permanence le regard et l’imagination du spectateur. Et ce qu’il montre est moins dérangeant que ce qu’il suggère à force de répéter des motifs relativement semblables. Goodbye Mister Christie apparaît ainsi comme un conte noir et nihiliste, d’une rare férocité, gorgé de pulsions sexuelles et meurtrières et caractérisé par l’hypocrisie et l’égoïsme de ses personnages. _C.L

ANIMATION Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Ramon, un marin français, débarque à Wellington Green où il fait la rencontre de Mrs. Christie. Il lui parle du vaet-vient de la mer, semblable à celui du sexe et lui fait écouter une musique envoûtante. Mrs. Christie couche avec lui. Elle se confesse à son prêtre – jaloux et secrètement amoureux d’elle. Mr. Christie rencontre Ramon et se laisse lui aussi envoûter par sa musique. Il couche avec lui, devant la caméra de Tina, une journaliste qui faisait un reportage sur le chien parlant des Christie. Scandale. Mr. Christie part creuser un trou, en espérant atteindre l’Australie. Tina le suit pour le filmer. Ramon séduit Terry, le fils des Christie. SUITE... Le prêtre tue Ramon pour s’emparer de sa musique ainsi que le chien qui menace de révéler son crime. Il accuse Terry, condamné à mort. Sous terre, Mr. Christie rencontre Hitler, Dracula et un Japonais fanatique. Il écrase une araignée, qui n’est autre que Dieu. Tout disparaît. Le prêtre viole Mrs. Christie sur la musique de Ramon. Une mouche parlante autorise Mr. Christie, Tina et le Japonais à assister à la scène. La mouche prophétise la fin de ce monde à condition que Mrs. Christie tue le prêtre avec le couteau que lui donne son mari. Le monde à venir sera constitué du sang du prêtre. Chacun disparaît peu à peu. Mrs. Christie entaille le doigt de son mari : son sang se mêle à celui du prêtre et corrompt le monde prochain. 77 minutes. Royaume-Uni, 2010 Sortie France : 4 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec les voix de : David McFadden, Catherine Spielman, Colin Berry, Veronica Speight, Lin Chi. Scénario : Phil Mulloy Images : Sid Beetles Montage : Sui Devan Animation : Phil Mulloy, Rodney Lafleur et Hubert Schubert Son : Tony Nesbit Dir. artistique : Phil Mulloy et Dan Carter Production : Spectre Films Producteurs : Phil Mulloy Distributeur : ED Distribution.

Visa d’exploitation : en cours. Format : 1,85 - Couleur - Son : Stéréo.

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Take Shelter (Take Shelter) de Jeff Nichols Après Shotgun Stories, Jeff Nichols signe un retour magistral et décroche pour cet opus familial, le Grand Prix de la Semaine de la Critique au Festival de Cannes en 2011. Le film est porté par les prestations habitées de Jessica Chastain et Michael Shannon.

© Grove Hill Prod.

HHH Après s’être, avec Shotgun Stories, colleté à une fratrie déchirée par une vendetta meurtrière, Jeff Nichols propose dans ce second opus de s’immiscer au cœur d’une famille nucléaire. À la manière d’un scientifique, Nichols se livre à une expérience minutieuse et plonge le personnage principal du film, Curtis, parfaitement interprété par Michael Shannon, dans des affres d’angoisse insondables. Le réalisateur scrute alors les effets de cette angoisse, tout d’abord sur Curtis lui-même. Il parvient alors magistralement à montrer comment la vie intérieure du sujet peut altérer sa vie sociale et affective et ce notamment en rapprochant inexorablement la caméra de Curtis. Ce que le film dissèque ensuite, se sont les réactions de l’entourage de Curtis : son employeur qui le licencie, ses amis qui finissent par le délaisser, les médecins qui finalement conseillent de l’écarter de sa famille. Mais le personnage auquel s’attache plus précisément Nichols est l’épouse de Curtis, incarnée par Jessica Chastain (révélée au grand public dans The Tree of Life de Terence Malick). Car ce que le film scrute, ce n’est pas tant la résolution d’une énigme qui traitée à la manière d’un thriller (Curtis est-il un visionnaire ou un fou ?), mais bien plus la loyauté de son épouse qui, après s’être logiquement interrogée sur la santé mentale de son compagnon épouse pleinement sa cause. La dernière séquence atteste de cette loyauté irréductible. Mais elle peut aussi altérer la puissance de ce beau film sur la folie, dans la mesure où elle prend la forme d’une pirouette scénaristique et crée une ambiguïté inutile en laissant la porte ouverte à une interprétation mystique. _G.Bo

DRAME PSYCHOLOGIQUE Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Curtis LaForche mène une vie paisible auprès de sa femme et de leur petite fille. Cette tranquillité est bouleversée par les cauchemars de plus en plus récurrents de Curtis. Ces rêves apocalyptiques sont pour lui les signes annonciateurs d’une tornade dévastatrice ou les premiers symptômes d’un événement qu’il a redouté toute sa vie. Ne parvenant plus à trouver le repos, Curtis va consulter son médecin, qui ne décèle aucun trouble majeur. Les somnifères qu’il lui prescrit l’apaisent quelques temps mais le mal est lancinant et Curtis adopte un comportement de plus en plus étrange. SUITE... Sa mère, schizophrène, ayant fini internée, Curtis lutte contre l’angoisse de répéter l’histoire. Afin de protéger sa famille de l’arrivée prochaine d’une tornade, Curtis prévoit d’agrandir l’abri sous-terrain situé dans leur jardin. Renvoyé de son emploi pour avoir emprunté le matériel nécessaire à la construction de son abri, le comportement de Curtis provoque l’incompréhension de ses amis et de son épouse. Mais une tornade éclate et Curtis peut fièrement conduire sa famille dans son abri dont il parvient difficilement à s’extraire. Le couple décide alors d’aller consulter un psychiatre qui leur indique que Curtis devrait intégrer une structure de soins. Le couple part en vacances au bord de la mer. Une tornade immense, semblable à celle de ses rêves, apparaît au loin. Et cette fois, sa fille et sa femme la voient aussi. 116 minutes. États-Unis, 2010 Sortie France : 4 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Michael Shannon (Curtis LaForche), Jessica Chastain (Samantha), Tova Stewart (Hannah), Shea Whigham (Dewart), Katy Mixon (Nat), Natasha Randall (Cammie), Ron Kennard (Russell), Scott Knisley (Lewis), Robert Longstreet (Jim), Pete Ferry (Melvin), Milly McGinnis (Janine), Angie Marino-Smith (Kathryn), Isabelle Smith (Sue), Ken Strunk (le docteur Shannan), Kathy Baker (Sarah), Guy Van Swearingen (Myers), Lisa Gay Hamilton (Kendra), Ray McKinnon (Kyle), Stuart Greer (Dave), Jake Lockwood (Andy), Bart Flynn (Dave), Nick Koesters, Bob Maines, Heather Caldwell, Sheila Hullihen, John Kloock, Marianna Alacchi, Jacque Jovic, Charles Moore, Maryanne Nagel, Hailee Dickens, William Alexander, Joanna Tyler, Kim Hendricksona. Scénario : Jeff Nichols Images : Adam Stone Montage : Parke Gregg 1er assistant réal. : Timothy Johnson Musique : David Wingo Son : Will Files, Lyman Hardy et Joshua Chase Décors : Chad Keith Costumes : Karen Malecki Effets visuels : Chris Wells Dir. artistique : Jennifer Klide Maquillage : Julia Lallas Casting : Lillian Pyles Production : Grove Hill Prod. Coprod. : Hydraulx Ent., REI Capital et Strange Matter Films Producteurs : Tyler Davidson et Sophia Lin Producteurs exécutifs : Colin & Greg Strause, Sarah Green, Richard Rothfeld, Brian Kavanaugh-Jones et Christos V. Konstantakopoulos Distributeur : Ad Vitam.

Visa d’exploitation : 120958. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SR SRD.

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2019 - 10- unenuit_Mise en page 1 27/12/11 16:37 Page1

Une nuit de Philippe Lefebvre Un flic de la Mondaine est pris en tenaille entre l’IGS et des voyous. Une Nuit est un polar qui mélange avec une certaine grâce le film de genre et le constat social. On peut penser à Corneau et même à Michael Mann devant ce road-movie nocture dans les rues parisiennes.

© Eddy Brière

HH Philippe Lefebvre, qui avait réalisé, dans les années 1980, deux polars nerveux salués par la critique (Le Juge et Le Transfuge), revient aujourd’hui derrière la caméra avec un nouveau polar. Cette fois-ci, il s’agit d’explorer l’une des plus belles nuits urbaines : celle de Paris. Lefebvre nous présente les figures emblématiques du Paris mythique, celui des cercles de jeux et du libertinage. On fait la connaissance d’une belle humanité, faite d’amitié et de coups tordus. Si ce polar est un objet singulier, ce n’est pas tant du fait de son histoire que du regard qu’il porte sur les sans-grades, qu’ils soient flics ou voyous. Loin de résumer l’intrigue à une confrontation entre flics et bandits, Lefebvre fixe sa caméra sur les travailleurs de la nuit : dealers, flics, videurs, barmen, chauffeurs de taxi ou prostituées, qui, tous, semblent avoir sa sympathie. Chacun d’eux est au service de puissants : célébrités, politiques ou caïds du grand banditisme. Autrement dit, tous ceux qui gèrent la ville et profitent de son économie souterraine, mais hors-champ. “C’est toujours les bourgeois qui posent problème” fait remarquer Josy, la confidente de Weiss. Mais ce sont toujours les petites mains qui en subissent les conséquences. Cependant, audelà de la peinture sociale, c’est la façon dont Lefebvre rend la ville littéralement vivante, qui rend ce film attachant. Paris, à l’instar du Los Angeles de Michael Mann, apparaît comme un corps humain : les rues sont des veines, l’argent et la drogue sont le sang qui fait battre son cœur. Et l’on se dit qu’il n’y avait pas mieux pour conclure cette œuvre que d’offrir à Richard Bohringer un caméo d’anthologie. C’est beau, non, une ville la nuit ? _G.M

POLICIER Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Weiss est un flic ripoux surveillé par l’IGS. Cette nuit, son chauffeur est une jeune policière : Laurence Deray. Dans un salon chic, ils rejoignent Garcia, un gérant de boîtes de nuit et son avocat : Paul Gorsky. Weiss a sauvé le fils de Garcia des griffes des Stups. Garcia soupçonne un ami de son fils, Arnaud, d’avoir fourni la drogue. En sortant, Weiss rencontre Jo Linder, avec qui il entretient des rapports houleux. Weiss et Deray interrogent Arnaud, qui les aiguille vers Abdel. Ils interceptent ce dernier, qui leur explique que c’est Jo qui lui a fourni la drogue et que c’est le fils de Garcia qui l’a vendue. SUITE... Weiss met le fils au pied du mur, puis va voir Jo et lui demande de ne pas tenter de nuire au fils, sinon il refusera l’ouverture de sa boîte. Jo lui laisse entendre que son avocat connaît du monde. Weiss se débarrasse des cadeaux de Garcia, se rend chez la maîtresse de Gorsky et le menace. Il ordonne au fils de partir chez sa mère. Il prévient Garcia qu’il est menacé par le grand banditisme. Après avoir demandé à sa femme de fuir, il revoit Garcia, qui lui avoue l’avoir trahi. Il se confronte alors à Jo et son père. Il leur demande de ne pas tuer les Garcia : en échange, il soutiendra l’ouverture de la boîte. Il balance la relation de l’avocat. Gorsky se fait tuer. Weiss est arrêté par l’IGS. En garde à vue, il rencontre la responsable de service : Laurence Deray. Garcia s’est rétracté et, faute d’aveux, elle relâche Weiss. 100 minutes. France, 2011 Sortie France : 4 janvier 2011

u GÉNÉRIQUE Avec : Roschdy Zem (Simon Weiss), Sara Forestier (Laurence Deray), Samuel Le Bihan (Tony Garcia), Grégory Fitoussi (Paul Gorsky), Jean-Pierre Martins (Jo Linder), Jean-Paul Muel (La Baronne), Sophie Broustal (Josy), Gérald Laroche (Alex), Hélène Seuzaret (Danièle Weiss), Kamel Labroudi (Abdel), Richard Bohringer. Scénario : Simon Michaël, Philippe Isard et Philippe Lefebvre, d’après une idée de Philippe Isard Images : Jérôme Almeras 1er assistant réal. : Denis Blanc Musique : Olivier Florio Son : Pierre Gamet, Hervé Guyader et Hervé Buirette Costumes : Anne David Casting : Pascale Beraud Production : Les Films Manuel Munz, Tout Sur L’Écran Cinéma, TF1 Droits Audiovisuels, UGC, France 2 Cinéma et Hole In One Producteur : Manuel Munz Dir. de production : Gilles Loufti Distributeur : UGC.

Visa d’exploitation : 127892. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SR SRD DTS.

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2019 - 11- uneviemeilleure_Mise en page 1 27/12/11 16:42 Page1

Une vie meilleure de Cédric Kahn À l’image de son personnage - porté par un convaincant G. Canet -, C. Kahn fait du déplacement son principe directeur et, en creux, dresse le procès d’un système économique aussi biaisé que brutal. Une œuvre maîtrisée, qui se joue habilement des registres.

© Les Films du Lendemain

HH Cédric Kahn ne tient pas en place. Perceptible dans son oeuvre - voilà bientôt vingt ans qu’il passe du polar au conte, du thriller au drame passionnel -, cette bougeotte l’est aussi au sein même de son nouveau film. Collant aux basques de son personnage, Une vie meilleure cavale d’un plan à l’autre et, de ce déplacement, fait son principe directeur. Significativement, la détermination de Yann (Guillaume Canet) change d’objet comme l’auteur de registre ou de territoire : de la poursuite d’un idéal au simple souci de survie, seuls importent, en définitive, le mouvement, l’énergie déployés. Se signalant par l’aisance de son trait, Kahn figure, en une poignée de plans, la rencontre amoureuse, le déclassement social, la naissance d’un lien filial. Signe des temps, son film suit de peu, sur le thème du surendettement, celui de Philippe Lioret, Toutes nos envies. Si le portrait qu’il esquisse des exclus du capitalisme, nourri d’accents documentaires - une plongée probante dans un squat de Saint-Denis -, ne prête jamais le flanc au pathos, c’est que Kahn a pour principe de ne pas s’apesantir. Une vie meilleure semble ainsi le produit d’une tension permanente entre l’énergie de son personnage et l’engrenage d’un système, entre un discours prônant l’entreprenariat et une réalité biaisée, brutale, gangrenée par les économies parallèles. Dommage que la fin, redondante, en affaiblisse un peu la portée, les personnages semblant alors lutter moins contre un certain état du monde que contre l’acharnement du scénario. Jusque-là, Kahn avait plaidé, avec une belle cohérence, pour une éthique - et une esthétique du mouvement. _T.F

DRAME SOCIAL Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Yann, cuisinier, tombe sous le charme de Nadia, une serveuse élevant seule son fils, Slimane. Un jour, au bord d’un lac, ils découvrent une bâtisse à l’abandon. Yann, y voyant l’occasion de monter sa propre affaire, l’achète avec Nadia. Faute d’un apport suffisant, ils contractent plusieurs crédits et entament les travaux de rénovation. Ils s’endettent d’autant plus que, pour des raisons de sécurité, le permis d’ouvrir leur est refusé. Près du chantier, dans la caravane qu’ils occupent désormais, ils ont une violente dispute, la jeune femme songeant à accepter une proposition d’emploi au Canada. En quittant la France, elle confie, pour un temps, son fils à Yann. Bientôt, elle ne donne plus de nouvelles. SUITE... Yann se résout à céder la gérance de son restaurant et loue, à Saint-Denis, une chambre miteuse à un marchand de sommeil. Acculé, il perd son restaurant et s’enfonce dans la précarité. Avec Slimane, les relations deviennent conflictuelles. Sur la côte vendéenne, Yann cherche, en vain, l’aide d’un restaurateur de sa connaissance. Mais ce voyage est l’occasion d’une complicité nouvelle entre Slimane et lui. Yann extorque au marchand de sommeil sa recette du jour. Grâce à celle-ci, Slimane et lui s’envolent pour le Canada. Yann retrouve la trace de Nadia, qui purge une longue peine de prison. Piégée par des employeurs véreux, elle s’est vue accusée, à tort, de trafic de stupéfiants. Yann jure de la faire libérer. 110 minutes. France, 2011 Sortie France : 4 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Guillaume Canet (Yann), Leïla Bekhti (Nadia), Slimane Khettabi (Slimane), Abraham Belaga (le marchand de sommeil), Nicolas Abraham (l’entrepreneur), François Favrat (le banquier), Brigitte Sy (le femme bénévole au surendettement), Fayçal Safi (l’acolyte du marchand de sommeil), Annabelle Lengronne (la voisine de Yann), Valérie Even (la femme du restaurant en Vendée), Daria Kapralska (la fille du bar en Vendée), Yann Andrieu (le copain en Vendée), Atika Taoualit (l’assistante sociale du collège), Paul Finnigan (l’avocat), Dan Demarbre (le gardien de prison), Claudia Jurt (la gardienne de prison), Line Boutin (la passagère dans l’autobus [non créditée]). Scénario : Cédric Kahn et Catherine Paillé D’après : le roman Pour une vie plus douce de Philippe Routier (2009) Images : Pascal Marti Montage : Simon Jacquet Musique : Akido Son : Olivier Mauvezin, Marie-Claude Gagné, Sylvain Bellemare et Olivier Dô Hùu Décors : François Abélanet et Emmanuel Fréchette Costumes : Nathalie Raoul Effets spéciaux : François Philippi Production : Les Films du Lendemain Coproduction : Maïa Cinéma, Cinémaginaire, Mars Films et France 2 Cinéma Productrice : Kristina Larsen Coproducteurs : Gilles Sandoz, Denise Robert et Daniel Louis Distributeur : Mars Distribution.

Visa d’exploitation : 127074. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2019 - 13- Notules1_Mise en page 1 27/12/11 16:44 Page1

En bref... À l’âge d’Ellen (Im alter von Ellen) de Pia Marais

Bawedin Mus. : CVantez Dist. : Kanibal Films. Avec : Daniel Duval (Michel Matarasso), Chiara Caselli (Sandra Bandini), Françoise Arnoul, Catherine Rouvel, Nanou Garcia.

Un flic au bout du rouleau se réfugie dans une passion dévorante. L’objet de son sentiment : une séduisante inconnue, dont il vient de découvrir le cadavre...

Scén. : Pia Marais et Hortst Markgraf Im. : Hélène Louvart Mont. : Mona Bräuner Mus. : Horst Markgraf et Yoyo Röhm Dist. : Films sans Frontières. Avec : Jeanne Balibar (Ellen), Stefan Stern (Karl), Georg Friedrich (Florian), Julia Hummer (Rebecca), Alexander Scheer (Bennett), Eva Löbau, Clare Mortimer.

Ellen, hôtesse de l’air, vit en Allemagne avec Florian, son compagnon. Un jour, il lui annonce que sa maîtresse est enceinte de trois mois. Cette nouvelle, ainsi que des résultats médicaux, la bouleversent. Peu après, elle fait une crise de panique et s’enfuit en plein service. Errant, elle croise un groupe d’altermondialistes, avec lequel elle participe à un happening pour la protection des animaux. Pia Marais (Trop libre, 2008) signe ici son deuxième long métrage : un film lent, relativement dénué d’intrigue, auquel Jeanne Balibar, sylphide, apporte sa présence mystérieuse et un visage magnétique où se lit le chamboulement d’Ellen. Cependant, ce personnage en pleine crise existentielle se perd dans un discours sur la cause animale, que la réalisatrice aborde d’une manière qui n’est ni politique ni didactique, et semble plaqué comme un arrière plan encombrant le portrait. Les rapports entre Ellen et les hommes sont peu développés. Sa relation avec Karl, peu plausible, ajoute une dose d’incohérence au film. Ellen a clairement du mal à trouver sa place dans le monde, et le spectateur, dubitatif, a, lui, du mal à se positionner face à elle. _Ir.B.

Beau rivage de Julien Donada

Scén. : Julien Donada et Christian Paigneau Im. : Nicolas Guicheteau Mont. : Laurence

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À titre d’influence, J. Donada, qui signe là son premier long métrage, évoque le photographe William Egglestone, sa faculté à saisir l’ordinaire tout en suggérant son étrangeté latente. Noble ambition, que l’auteur échoue à traduire en geste de cinéma. Beau Rivage n’excède jamais son programme, alternance routinière de séquences naturalistes et fantasmatiques, continuellement plombée par le poids de ses influences. On reconnaîtra ainsi, chez Matarasso, quelque chose du Julien Davenne de La Chambre verte, dont l’esprit glaçant semble planer sur le film. Manque ici l’ampleur formelle et romanesque, la puissance d’évocation, crêve-coeur autant que morbide, de l’œuvre de Truffaut. Manque surtout, à ce récit opaque et finalement peu amène, une conviction, un engagement semblables à ceux de son personnage qui, sur ses seules épaules, porte le film. _T.F.

Freakonomics (Freakonomics)

l’impression que les réalisateurs enfoncent des portes ouvertes. Les techniques de la communication audiovisuelle réduisent les propos à n’être que des slogans. Le style léché des images, les acteurs qui jouent de façon empruntée, le montage castrateur à force de vouloir stimuler l’attention du spectateur provoquent le naufrage d’un travail sociologique qui attend un vrai documentariste pour le mettre en valeur. _P.F.

Le Pacte (Seeking Justice) de Roger Donaldson

Scén. : Robert Tannen, d’après une histoire de Todd Hickey et Robert Tannen Im. : David Tattersall Mont. : Jay Cassidy Mus. : J. Peter Robinson Dist. : SND. Avec : Nicolas Cage (Will Gerard), January Jones (Laura Gerard), Guy Pearce (Simon), Jennifer Carpenter, Harold Perrineau.

Collectif

Scén. & Réal. : Heidi Ewing, Alex Gibney, Seth Gordon, Rachel Grady, Eugene Jarecki et Morgan Spurlock, d’après l’essai de Steven Levitt et Stephen Dubner (2005) Dist. : Eurozoom.

Freakonomics cherche à démontrer que les êtres humains, considérés par nombre d’économistes comme des sujets rationnels, se comportent en réalité de façon impulsive, ne faisant qu’obéir aux incitations. Pour cela, le film tente de répondre à des questions en apparence saugrenues. Les choix des parents ont-ils vraiment une incidence sur l’avenir de leurs enfants ? Le film aborde aussi la problématique de l’avortement, car il existe une corrélation entre la légalisation de l’avortement et la baisse de la criminalité. Les saynètes qui composent le film illustrent tant bien que mal les thèses de l’essai. Mais, avec leurs personnages lisses et leur ton naïf, elles ne font que renforcer

Nouvelle-Orléans. Will se rend à l’hôpital, après avoir appris que sa femme, Laura, a été sauvagement agressée. Là bas, il est approché par un homme, Simon, qui dit être membre d’une organisation secrète de “justiciers”. Il se propose de tuer l’agresseur de Laura en échange d’un futur service. N. Cage continue sa descente vers les enfers de la série B. Au menu, une sorte de variation sur le genre du “vigilante movie”, mâtinée de complot. Dans la lignée des thrillers paranoïaques, Le Pacte déploie son intrigue sans anicroches... ni véritable intérêt, car dénué à la fois d’ambitions et de la folie “bis” qui donnait du goût aux improbables Hell Driver ou Le Dernier des Templiers. Mis en scène par un Roger Donaldson en pré-retraite, le film sera vite oublié, malgré les présences notables de Guy Pearce, toujours charismatique, dans le rôle du méchant, et de la belle January Jones (Mad Men). _S.G.

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2019 - 13- collineauxcoq_Mise en page 1 27/12/11 16:46 Page1

La Colline aux coquelicots (Kokuriko-zaka kara) de Goro Miyazaki Ce deuxième long métrage du fils Miyazaki s’ancre dans un réalisme historique, inhabituel pour les studios Ghibli. L’histoire de deux orphelins de la guerre de Corée touche par sa sensibilité et des détails savoureux, mais manque un peu d’ampleur.

© Walt Disney

HH Il est des successions plus délicates que d’autres. Pas facile en effet pour la frêle Umi de prendre la relève d’héroïnes aussi combattantes ou espiègles que Princesse Mononoke et Chihiro. Pas facile non plus de succéder à l’éminent Hayao Miyazaki, pourrait dire son fils Goro, qui signe la réalisation de ce nouveau dessin, des studios Ghibli. Pour éviter (peut-être) les comparaisons, Goro se place ici aux antipodes de l’univers onirique et magique de son père, et ancre son deuxième long métrage (après Les Contes de Terremer, 2006) dans le réalisme historique. Il le fait avec sincérité et humilité, comme un hommage à la figure tutélaire d’Hayao. “Vous n’aurez pas d’avenir si vous reniez le passé”, fait-il d’ailleurs dire à l’un de ses héros. Goro adapte un manga des années 1980 de Chizuru Takahashi et Tetsurô Sayama, qui s’attache au destin de deux orphelins de la guerre de Corée, Umi et Shun. Sans rivaliser avec les joyaux Ghibli, Goro invite à un voyage nostalgique dans le Japon des années 1960, qu’il nourrit de souvenirs d’enfance et de détails savoureux : la préparation du bento, la vapeur qui s’échappe du riz, le journal imprimé en polycopié... Au centre de cette évocation brille un joyau : la fabuleuse bâtisse du Quartier Latin, cité magnifique et poussiéreuse aux mille ramifications, qui n’est pas sans rappeler un certain Château ambulant. Hélas, les détails, aussi jolis soient-ils, ne font pas un film. Et le récit, construit autour de deux trames narratives parallèles (sauver le Quartier Latin et l’histoire d’amour des deux héros) qui ne font que s’amoindrir l’une l’autre, manque d’ampleur et de souffle. Le charme opère, mais on ne peut s’empêcher d’être un peu déçu. _I.B

ANIMATION Famille

u RÉSUMÉ Port de Yokohama, 1963. Comme chaque matin, Umi hisse des pavillons maritimes en souvenir de son père mort pendant la guerre de Corée. Elle prépare ensuite le déjeuner pour toutes les pensionnaires qui logent chez sa grand-mère, en haut de la colline. Au lycée, elle tombe sous le charme de l’intrépide Shun, qui mène le mouvement de protestation contre la destruction programmée du Quartier Latin, le vieux foyer lycéen, qui abrite les clubs et beaucoup de poussière. Umi se rend au Quartier latin et aide Shun dans la fabrication du journal du campus. Umi suggère de dépoussiérer le QL. Invité à déjeuner à la pension, Shun s’assombrit en voyant une photo du père d’Umi. SUITE... Adopté par un marin et sa femme, il serait en fait le fils du père d’Umi. Shun prend ses distances avec Umi. Un bataillon de lycéennes vient aider les garçons pour le grand nettoyage. Umi, Shun et un ami se rendent à Tokyo pour plaider la cause du foyer auprès du président de l’université. La mère d’Umi, rentrée de voyage, lui raconte le fin mot de l’histoire : Shun est le fils d’un camarade d’armée de son père, mort à la guerre. Son père a adopté le bébé puis l’a confié au marin. Impressionné par l’engagement des élèves, le président décide de sauver le foyer. Un capitaine, de passage à Yokohama, ancien camarade d’armée de leurs pères, confirme à Shun et Umi la version de la mère. Les deux amoureux peuvent s’aimer en toute quiétude. 91 minutes. Japon, 2011 Sortie France : 11 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec les voix originales de : Masami Nagasawa (Umi Matsuzaki), Jun’ichi Okada (Shun Kazama), Keiko Takeshita (Hana Matsuzaki), Yuriko Ishida (Miki Hokuto), Rumi Hiiragi (Sachiko Hirokôji), Jun Fubuki (Yoshiko Matsuzaki), Takashi Naitô (Yoshio Onodera), Shunsuke Kazama (Shirô Mizunuma), Nao Ômori (Akio Kazama), Teruyuki Kagawa (le président Tokumaru), Tsubasa Kobayashi (Riku Matsuzaki), Haruka Shiraishi (Sora Matsuzaki). Scénario : Hayao Miyazaki et Keiko Niwa D’après : le manga de Chizuru Takahashi et Tetsurô Sayama (1980) Images : Atsushi Okui Animation : Akihiko Yamashita, Kitaro Kousaka et Atsushi Yamagata Musique : Satoshi Takebe Chanson : Aoi Teshima et Kyu Sakamoto Son : Kôji Kasamatsu Production : Studio Ghibli, NTV, Hakuhôdô DYMP, Tôhô, Disney et Mitsubishi Corp. Producteurs : Toshio Suzuki, Chizuru Takahashi et Tetsuro Sayama Producteur exécutif : Koji Hoshino Distributeur : The Walt Disney Company.

Visa d’exploitation : 131922. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SR SRD DTS.

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2019 - 14- danslatourmente_Mise en page 1 27/12/11 16:47 Page1

Dans la tourmente de Christophe Ruggia Une usine délocalisée, un patron voyou et deux ouvriers contraints de commettre l’irréparable. Un film d’action qui avance en terrain balisé pour mieux prendre les chemins de traverse. Christophe Ruggia apporte sa touche personnelle au genre.

© Chantal Thomine

HH Attention, ne pas se fier à la première moitié de Dans la tourmente, qui annonce un énième film d’action avec Clovis Cornillac qui-serre-les-lèvres-et-gonfle-lespectoraux (un genre en soi : Scorpion, Les Chevaliers du ciel, Le Serpent, 600 kilos d’or pur et beaucoup d’autres...). En fait, si tout le début avance en terrain balisé (un braquage qui tourne mal, avec toutes les étapes attendues, plus ou moins crédibles, comme autant de passages obligés), c’est pour mieux s’en détourner et prendre les chemins de traverse. Ou plutôt, à force de faire clignoter ses balises, Dans la tourmente trouve une pulsation qui lui est propre. Christophe Ruggia (Le Gone du Chaaba, Les Diables) s’empare de ce film de genre en véritable auteur. Son approche personnelle et réaliste des scènes d’action (à la fois ample et proche des corps, des visages, de la sueur) ne tombe jamais dans le spectaculaire ni le démonstratif. Des grandes tours d’une raffinerie plongée dans l’obscurité jusqu’aux calanques marseillaises baignées de soleil, en passant par une imposante décharge à ciel ouvert, il impose un sens du décor et des déplacements qui tient du western autant que d’Antonioni. Les espaces traversés évoquent toujours quelque chose de la ruine et de l’immensité. Ce sont des lieux qui favorisent la fuite mais dont on ne peut s’échapper : une juste métaphore du dilemme intérieur auquel sont confrontés les personnages, hommes et femmes ordinaires pris / surpris dans les conséquences inévitables de leurs actions. Sous les traits d’un polar social, Dans la tourmente renouvelle efficacement le film d’action à la française. _C.L

POLAR SOCIAL Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Dans la raffinerie où il travaille, Franck surprend une conversation entre les deux dirigeants : ce soir, des camions vont venir démanteler l’usine et son chef partira avec une caisse noire de 2 millions d’euros. Franck en parle à ses collègues et à Max, son ami, licencié de la même usine trois ans plus tôt. Max propose de voler l’argent des mains de leur chef. Les autres se dégonflent. Le soir, Franck et Max se rendent à la raffinerie. Au cours du vol, Max tire sur son ancien chef et le tue. Les deux amis se partagent l’argent et jettent à la décharge des dossiers contenus dans les sacs volés. Franck rejoint Hélène, sa femme, sans parvenir à s’endormir. SUITE... Incapable de lui avouer son forfait, il se débrouille pour qu’elle découvre l’argent dans un terrain voisin. Max rend visite à Hélène et lui dit d’où vient l’argent. Interrogée par la police, elle couvre son mari et son ami. Rattrapé par les RG, Max comprend que, plus que l’argent, ce sont les dossiers volés qui les intéressent. Il s’échappe, demande à Franck de récupérer les dossiers et lui donne rendez-vous dans les calanques. Fouillant la décharge, Franck et Hélène récupèrent un DVD qui établit le lien, via l’usine, entre un ministre et un marchand d’armes. Dans les calanques, Max est abattu au moment où il rejoint Franck, aussitôt arrêté. Menaçant de dévoiler le contenu du DVD, Hélène négocie la libération de son mari. 107 minutes. France, 2011 Sortie France : 11 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Clovis Cornillac (Franck), Mathilde Seigner (Hélène), Yvan Attal (Max), Céline Sallette (Laure), Marc Brunet (l’homme des RG), Abel Jafri (Farid), Jean-Philippe Meyer (Henri), Nelly Antignac (la femme des RG), Gilles Masson (Charlier), Azouz Begag (Azouz), Jean-Baptiste Fonck (Kevin), Garance Heinry (Sophie), Gabin Lefebvre (Vincent), Fadila Belkebla (Yasmine), Béatrice Michel (Jeannette), Martine Vandeville (Jacqueline. Scénario : Christophe Ruggia Images : Éric Guichard Montage : Tina Baz 1er assistant réal. : Frédéric Goupil Scripte : Lara Rastelli Musique : Michael Stevens Son : Frédéric de Ravignan Décors : Jean-Miche Simmonet Costumes : Marine Chauveau Casting : Christel Baras Production : Le Bureau Producteur délégué : Bertrand Faivre Dir. de production : Philippe Hagège Distributeur : Wild Bunch.

Visa d’exploitation : 111012. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD DTS.

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2019 - 15- dixjoursenor_Mise en page 1 27/12/11 16:48 Page1

10 jours en or de Nicolas Brossette Représentant de commerce vivant sur la route, Marc est solitaire… jusqu’au jour où il est contraint d’emmener un enfant avec lui. Road-movie sympathique et empli de bonnes intentions, ce premier film, manquant de force et d’originalité, peine à s’affirmer.

© Nathalie Eno / Loin Derrière L’Oural - F Comme Film

HH Pour son premier long métrage après deux courts, Nicolas Brossette propose une comédie dramatique en forme de road-movie, où un homme solitaire voit sa vie changer grâce à un voyage peu ordinaire au cours duquel il se retrouve encombré d’un enfant de sans-papiers, d’un vieillard fantaisiste et d’une jeune paumée assez insolente. Cet étonnant quatuor se révèle parfois drôle et touchant, même si les ressorts dramatiques sont un peu trop visibles, voire prévisibles. Nicolas Brossette a construit ses personnages avec sensibilité, hormis peut-être celui de la jeune femme, un peu trop excessif pour convaincre, et a judicieusement fait appel à Franck Dubosc, dans un contre emploi, pour le rôle principal. En incarnant un homme qui (re)découvre peu à peu son humanité, l’acteur se révèle sobre et émouvant. Véritable ode à la famille, au sens large du terme, 10 jours en or montre comment cet homme évolue en se trouvant une famille de substitution : un fils, un père, une petite sœur. Malheureusement, la sincérité et l’optimisme certains du récit ne suffisent pas à élever 10 jours en or au-dessus du niveau d’un téléfilm sympathique mais vite oublié. Le rythme est inégal, la mise en scène effacée et la direction d’acteurs quelquefois maladroite (il est dommage que l’enfant ne soit pas toujours convaincant). Quant aux invraisemblances du récit (à commencer par celle qui donne son point de départ à l’intrigue : une mère confiant son fils à un inconnu), même si elles peuvent être justifiées par le fait que le film s’apparente à un conte, elles ressemblent tout de même surtout à des erreurs de scénario. _An.B

COMÉDIE DRAMATIQUE Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Marc est représentant et passe sa vie sur la route. Un jour, dans un supermarché de la région parisienne, il rend service à une jeune Africaine, Marie, et lui propose de passer la nuit ensemble avant qu’il parte vers le Sud. À son réveil, elle est partie mais lui a laissé une surprise : son fils Lucas, 6 ans, qu’il doit emmener dans le Sud chez “Papa Clément”. Marc ramène Lucas à une adresse à Ivry où il comprend que Marie est sans-papiers. Ils échappent à la police et Marc se résout à emmener Lucas avec lui. Sur la route, la cohabitation est difficile. Le soir, à l’hôtel, Marc rencontre Julie, une jeune fille moqueuse. Le lendemain, au centre commercial, Lucas rencontre Pierre, un vieillard pour qui il a une immédiate affection. SUITE... Pierre tentant de se suicider, Marc est forcé par Lucas d’annuler un rendez-vous pour aller à l’hôpital. Puis ils prennent Julie en stop et Marc finit par accepter d’emmener Pierre également. Sur une petite route, ils ont un accident et sont recueillis par des agriculteurs qui fêtent un anniversaire. Julie confie à Marc qu’elle a fuit sa famille après avoir été licenciée. Le lendemain, Julie rentre chez elle tandis que Pierre va jeter les cendres de sa femme dans la mer. Marc et Lucas arrivent chez le Père Clément, qui avait recueilli Marie enceinte. Le journal mentionnant une Africaine décédée à Calais, Marc annonce à Lucas que sa mère ne reviendra pas. Il repart finalement en emmenant Lucas... 95 minutes. France, 2011 Sortie France : 11 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Franck Dubosc (Marc Bajau), Claude Rich (Pierre), Marie Kremer (Julie), Mathis Touré (Lucas), Rufus (Clément Rozière), Stéphanie Pillonca (Nadine), Olivier Claverie (Perez), Éric Godon (le marchand de sommeil), Tatiana Rojo (Marie), Grégoire Oestermann (le patron de l’hôtel à Paris), Marie-Julie Baup (la vendeuse de la boutique Man), Vincent Demoury (l’interne à l’hôpital de Dijon), Sébastien Autret (un policier), Jérémie Steib (un policier). Scénario : Nicolas Brossette Images : Benoît Chamaillard Montage : Jean-François Élie 1er assistant réal. : Jérémie Steib Scripte : Marine Billet Musique : Alain Pewzner Son : Sophie Laloy Décors : Angelo Zamparutti Costumes : Virgine Alba Maquillage : Émilie Bourdet Casting : Dorothée Chesnot Production : Loin Derrière L’Oural et F Comme Film Producteurs : Jean-Louis Livi et Xavier Delmas Coproducteurs : Samuel & Victor Hadida Dir. de production : Sébastien Autret Distributeur : Metropolitan Filmexport.

Visa d’exploitation : 127885. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SR SRD.

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2019 - 16- ilnyapasderap_Mise en page 1 27/12/11 18:00 Page1

Il n’y a pas de rapport sexuel de Raphaël Siboni À partir de centaines d’heures d’images prises par une caméra témoin sur les tournages des films X de HPG, R Siboni fabrique un objet atypique et dérangeant, qui nous balade entre le malaise et le rire, le dégoût et l’attendrissement, l’ennui et la stupeur.

MAKING-OF PORNOGRAPHIQUE Adultes, des idées et des images peuvent heurter

u GÉNÉRIQUE Avec : HPG, Cindy Dollar, Michael Cherrito, Stracy Stone, Phil Holliday, Ariana Agia, Darlyne, Marco, Dolce Elektra, Supersex, William Lebris, Leona Fell, Nymphy, Sexy Black, Pom-Pom Girl, Puceau, Sophia, Anna Polina, Aron, Eric, Joe, Super Pussy, Zitoune, Djai. Montage : Raphaël Siboni Production : Capricci Films et HPG Production Distributeur : Capricci Films.

© Capricci

HH HPG, acteur porno fanfaron et exhibitionniste au sens le plus large du terme, avait déjà surpris en 2006, en réalisant pour le cinéma traditionnel un film en forme d’autoportrait à charge : On ne devrait pas exister. Contre toute attente, ce qui ressemblait assurément à une entreprise suicidaire et vouée à l’échec, s’était révélé un film totalement libre, surprenant, et finalement plutôt très réussi. HPG a depuis tourné un second long métrage qui sortira cette année (Les Mouvements du bassin, avec É. Cantona et R. Brakni), mais entre-temps il n’a jamais quitté l’univers du X. Car, si sa volonté de faire de l’entrisme dans le cinéma “mainstream” est évidente, il est clair aussi qu’HPG veut entrer avec tout son bagage porno. Nouveau chapitre dans cette démarche : Il n’y a pas de rapport sexuel, objet atypique, issu d’une collaboration entre lui et un jeune artiste vidéaste : Raphaël Siboni. Même si plutôt que d’une collaboration au sens littéral, il faudrait parler de passage de relais. En effet, il s’agit d’un montage effectué par Siboni à partir des centaines d’heures de rushs qu’HPG a enregistrées avec une caméra fixe, posée sur pied dans un coin du plateau, pour alimenter les making-of de chacun de ses films porno. Il s’agit donc d’une expérience où quelqu’un pose un regard sur des images tournées par personne et, en quelque sorte, sans les yeux. Cette collusion entre l’univers ultra intellectuel, arty et sophistiqué de Siboni, et l’univers crade, premier degré, bas du front et rentrededans de HPG, ressemble fort à un mariage de raison qui n’inspire pas, a priori, la plus grande sympathie. Pourtant, si le mélange fonctionne, c’est que chacun y tient bien son rôle. Siboni s’efface derrière le sujet, et se contente de composer une sélection d’images nous baladant entre des

78 minutes. France, 2011 Sortie France : 11 janvier 2012

états et des sentiments différents, contradictoires, déroutants. De son côté, HPG ne donne pas l’impression d’instrumentaliser le projet et, comme dans On ne devrait pas exister, impose ici un personnage qui dépasse, toujours de justesse, la caricature du clown provocateur, par une sorte de sincérité authentiquement enfantine ou folle. Au-delà de lui, le film montre le monde de la pornographie. On voit une production pauvre, où les décors sont toujours sommaires, les tournages rapides, les embryons de scénarios improvisés – tant bien que mal ! – sur le plateau. On voit une industrie soumise à une politique de rentabilité maximale, où chaque scène tournée doit se décliner en plusieurs versions, amenant chacune ses contraintes : version hard (cadrages acrobatiques), version soft (simulations) et version photographique (arrêts dans le mouvement et immobilisation à chaque changement de figure). On voit aussi à l’œuvre une pornographie 2.0 mettant en scène des amateurs, à la fois totalement consentants et très dépassés par ce qui leur arrive, avec toute l’ambiguïté que cela induit, et tout le malaise que cela peut susciter. On voit, en bout de course, quelque chose qui est tout sauf sexy (et même où la question du plaisir est presque absente), mais qui, au-delà du bon et du mauvais goût, s’impose comme frontal, inassimilable, évident, trouble, drôle, pathétique, dégueulasse, dérisoire, violent, étonnant, à l’image de la réalité. _N.M

Visa d’exploitation : 130587. Interdit aux moins de 18 ans. Format : 1,77 - Couleur - Son : n.c.

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2019 - 17- intruders_Mise en page 1 27/12/11 16:49 Page1

Intruders (Intruders) de Juan Carlos Fresnadillo Deux enfants, Juan en Espagne et Mia en Angleterre, sont terrorisés dans leur chambre par un mystérieux homme sans visage. Juan Carlos Fresnadillo (Intacto) apporte son expertise à ce thriller fantastique sans originalité et si sérieux qu’il en devient appliqué.

© Universal

HH Révélé au grand public dès son premier film, Intacto, en 2001, le réalisateur Juan Carlos Fresnadillo est de ceux qui prennent leur temps. Conteur talentueux autant que technicien virtuose, capable de dépasser les carences d’un scénario limité (28 semaines plus tard, 2007), l’Espagnol livre avec Intruders un thriller fantastique qui emploie sans vergogne des figures éprouvées : jeunes enfants victimes d’un monstre sans identité, parents impuissants et à la personnalité trouble. Sur ces bases, Fresnadillo brode un récit relativement fluide - malgré un montage acrobatique, faisant alterner les points de vue de deux enfants dans deux pays différents, mais sans originalité ni véritable tension. Intruders s’articule, en effet, sur un “twist” conventionnel qui met en évidence le manque d’émotion de l’ensemble. Ainsi, le personnage incarné avec abnégation par Clive Owen (également à l’affiche de Trust [v.p. 29]) ne se montre jamais réellement attachant, sa part d’ombre finissant toujours par avoir le dernier mot. Si le film tient dans sa globalité, c’est parce qu’il s’apparente davantage à une expérimentation théorique : un film “sur” le genre plutôt que “de” genre. Catalogué “maître de l’horreur espagnole”, Fresnadillo en est peut-être arrivé au point où l’étiquette lui pèse - voire l’effraie : pour un Amenábar ou un Balagueró aux carrières florissantes, combien de réalisateurs sont tombés dans l’oubli ? Dès lors, Intruders peut apparaître comme le film d’un auteur qui est prêt à prendre des risques en se frottant allègrement aux clichés, mais qui tient à faire ressentir au spectateur qu’il n’est pas dupe et aspire à autre chose. _Mi.G

THRILLER FANTASTIQUE Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Espagne. Une nuit, Juan voit une créature pénétrer dans sa chambre, puis agresser sa mère, Luisa. Angleterre. Mia s’apprête à fêter ses 12 ans. Passant la journée avec sa mère, Susanna, chez ses grands-parents, elle trouve, cachée dans un arbre, une boîte contenant une feuille de papier où est racontée l’histoire d’un petit garçon traqué par “Sans-Visage”. Mia utilise cette histoire en classe, mais est incapable de lui trouver une fin satisfaisante. Très vite, elle pense être observée dans sa chambre. SUITE... Elle parle de ses cauchemars à son père, John. Une nuit, Sans-Visage apparaît à Mia dans sa chambre. John intervient à temps pour le faire fuir. La police se montre incapable d’identifier l’intrus. Juan ne peut plus fermer l’œil. À la messe, le Père Antonio tente d’aider Luisa. John et Susanna font installer des caméras dans la maison. Le soir même, Sans-Visage réapparaît. John se bat avec lui, mais ne peut l’empêcher de fuir. Les vidéos sont formelles : Mia et John étaient seuls dans la chambre... Susanna demande à John de déménager quelques jours. Il se rend chez ses parents. Sa mère, Luisa, lui avoue alors le secret qu’il a oublié : lorsqu’il s’appelait encore Juan, son père biologique, tout juste sorti de prison, était venu le voir pour l’emmener. Luisa l’avait fait tomber de l’échafaudage et il avait sombré dans le ciment... John se rend au chevet de Mia, qui ne se réveille plus. Il lui raconte son histoire : l’antre de Sans-Visage disparaît, et Mia se réveille. 101 minutes. Royaume-Uni - Espagne, 2011 Sortie France : 11 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Clive Owen (John Farrow), Carice van Houten (Susanna Farrow), Daniel Brühl (le Père Antonio), Pilar López de Ayala (Luisa), Ella Purnell (Mia), Izán Corchero (Juan), Kerry Fox (le docteur Rachel), Héctor Alterio (le vieux prêtre), Adrian Rawlins (l’inspecteur de police), Michael Nardone (Frank), Mark Wingett (Dave, le grand-père), Peter McNeil O’Connor (David Wareton), Mary Woodwine (l’enseignante), Lolita Chakrabarti (la docteur des urgences), Ralph Ineson (l’installeur d’alarmes), Adam Leese et Raymond Wearing (les policiers), Ella Hunt (Ella Foster), Imogen Gray (Lilly), Natalia Rodríguez, Natasha Dosanjh, Matthew Hodgkin, Christian Meinhardt. Scénario : Nico Casariego et Jaime Marques, d’après un sujet de Juan Carlos Fresnadillo, Enrique López-Lavigne et Belén Atienza Images : Enrique Chediak Montage : Nacho Ruiz Capillas 1er assistant réal. : Juan Jiménez Musique : Roque Baños Son : Aitor Berenguer et James Muñoz Décors : Alain Bainèe Costumes : Tatiana Hernández Effets visuels : David Heras Dir. artistique : Íñigo Navarro Maquillage : Cecilia Escot Production : Apaches Entertainment et Antena 3 Films Producteurs : Enrique López-Lavigne, Belén Atienza et Mercedes Gamero Producteurs délégués : Jesús de la Vega et Ricardo G. Arrojo Distributeur : Universal Pictures.

Visa d’exploitation : 131728. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 80 copies (vo / vf).

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2019 - 18- jedgar_Mise en page 1 27/12/11 16:50 Page1

J. Edgar (J. Edgar) de Clint Eastwood Avec ce portrait de Hoover en ancien bègue, fils à maman et homosexuel refoulé, Eastwood soigne (plus qu’il ne signe) un film paradoxalement terne et conventionnel. Son sens du mélo atténue toutefois - sur le fil - la psychologie pesante de son script.

© Warner

HH Biopic tiré à quatre épingles, J. Edgar se soucie moins de plonger au cœur du FBI que dans la psyché névrotique de son dirigeant historique. Si Hoover, en patriote peu soucieux des libertés individuelles, voyait une affaire d’État dans les secrets de chacun, c’est d’autant plus, nous explique-t-on ici, qu’il se défiait de sa propre “part d’ombre”. Mais le projet, louable en soi, de dévoiler la mécanique intime d’un personnage public, procède ici d’une psychologie au grain épais. Une façon, en somme, de le réduire à une grille de lecture restrictive. Chaque trait de caractère (son aversion pour les communistes, son dégoût de l’intimité des femmes) semble trouver sa source dans un épisode précis, découler d’un trauma irrésolu. D.L. Black avance la même thèse que dans son précédent script, Harvey Milk - à travers la figure de son assassin -, faisant du refoulement sexuel la clef de tout, et néglige la leçon de Citizen Kane : en chaque homme, réside une part d’inconnu, irréductible à l’analyse. En passant, J. Edgar interroge également le cas de son interprète (DiCaprio, résolument Actor’s Studio), dont la carrière semble s’envisager sous l’angle de la performance, quitte à ce que celle-ci soit plus mémorable que l’œuvre elle-même... C’est lorsqu’il se fait, une fois de plus, chroniqueur du vieillissement, et qu’il embrasse son horizon crépusculaire - et qu’il assume, tardivement, sa dimension de mélo gay -, qu’Eastwood nous est enfin rendu. Là, tout au bout de cette œuvre terne, et sous les masques et postiches grossiers, deux vieillards prennent la mesure du temps perdu à ne pas vivre leur amour. Au forceps, et comme malgré lui, J. Edgar finit par toucher. _T.F

BIOPIC Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Edgar J. Hoover, à la tête du FBI depuis bientôt 35 ans, fait appel aux services d’un biographe. Il se souvient... Dans les années 1920, poussé par une mère sèche et envahissante, et marqué par la montée du bolchevisme, il fait carrière au Bureau d’Investigation. En 1935, le procureur général des États-Unis le nomme à la tête d’un nouvel organe : le FBI. Après avoir tenté, en vain, de la séduire, il fait de Helen Gandy sa secrétaire personnelle, et développe les méthodes d’investigation scientifique. L’élégant Clyde Tolson devient son plus proche collaborateur, puis son ami intime. SUITE... Le bébé de l’aviateur Charles Lindbergh est enlevé. Après que son cadavre a été retrouvé, le FBI accroît son prestige en arrêtant l’assassin. Pour faire taire les critiques, Hoover veille à participer, sur le terrain, à l’arrestation des plus fameux gangsters. Tolson avoue son amour à Hoover, et l’embrasse. Celui-ci, refoulant sa propre attirance, le rejette violemment. Lorsque sa mère s’éteint, Hoover est effondré. Sous les présidences successives, il assure son pouvoir en accumulant, sur chacun, des dossiers compromettants, et fait de la “menace communiste” son obsession. Dans les années 1960, Hoover sous-estime la portée du mouvement des droits civiques. Une attaque laisse Tolson partiellement handicapé. Hoover décède en 1972. Nixon ordonne la saisie de ses dossiers secrets, mais Helen s’est déjà attelée à leur destruction. Au domicile de Hoover, Tolson, bouleversé, étreint son cadavre. 135 minutes. États-Unis, 2011 Sortie France : 11 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Leonardo DiCaprio (J. Edgar Hoover), Naomi Watts (Helen Gandy), Armie Hammer (Clyde Tolson), Josh Lucas (Charles Lindbergh), Judi Dench (Anna Marie “Annie” Hoover), Geoff Pierson (Mitchell Palmer), Gunner Wright (Dwight Eisenhower), Jeffrey Donovan (Robert Kennedy), Geoff Stults (Raymond Caffrey), David A. Cooper (Franklin Roosevelt), Dermot Mulroney (le colonel Schwarzkopf), Jessica Hecht (Emma Goldman), Josh Hamilton (Robert Irwin), Stephen Root (Arthur Koehler), Michael Rady (l’agent Jones), Scot Carlisle (l’agent Williams), Josh Stamberg (l’agent Stokes), Ed Westwick (l’agent Smith), Ken Howard (Harlan Fiske Stone), Christian Clemenson, Jack Axelrod, Dylan Burns, William Bebow, Zach Grenier, Denis O’Hare. Scénario : Dustin Lance Black Images : Tom Stern Montage : Joel Cox et Gary D. Roach 1er assistant réal. : David M. Berstein Scripte : Mable Lawson McCrary Musique : Clint Eastwood Son : José Antonio Garcia Décors : James J. Murakami Costumes : Deborah Hopper Effets spéciaux : Steven Riley Effets visuels : Michael Owens Dir. artistique : Patrick M. Sullivan Jr. Maquillage : Tania McComas Casting : Fiona Weir Production : Imagine Entertainment et Malpaso Producteurs : Brian Grazer, Robert Lorenz et Clint Eastwood Producteurs exécutifs : Tim Moore et Erica Huggins Distributeur : Warner Bros.

Visa d’exploitation : 131542. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SR SRD DTS.

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2019 - 19- louisewimmer_Mise en page 1 27/12/11 16:51 Page1

Louise Wimmer de Cyril Mennegun Le premier long métrage de Cyril Mennegun est porté par une actrice d’exception et quelques trouvailles (le Sinnerman de Nina Simone), qui ne suffisent pourtant pas à l’élever au niveau de ses modèles, la faute à une mise en scène trop modeste.

© Zadig Prod.

HH Louise Wimmer s’inscrit dans la lignée des portraits à dominante sociale, un genre exploré aussi bien par Ken Loach que par les frères Dardenne. Comme chez eux, c’est avant tout la volonté du personnage qui porte le récit, et non une construction romanesque toute-puissante. Comme chez les Dardenne également (Rosetta), le personnage est une guerrière, une femme au caractère bien trempé, pas forcément sympathique, qui lutte pour reconquérir indépendance et dignité. Corinne Masiero est parfaite dans le rôle, lui insufflant une personnalité, une voix et un regard. Le spectateur la suit dans ses débrouilles quotidiennes, où la solitude qu’implique la survie peut faire naître le suspense à chaque instant (comme lorsqu’elle invente une astuce pour manger gratuitement dans une cafétéria ). Par ailleurs, tous les comédiens qui lui donnent la réplique sont justes et parviennent à donner vie à un univers provincial et modeste, souvent oublié du cinéma grand public. Cependant, ces qualités sont aussi la limite du film. En effet, le minimalisme de l’enjeu (retrouver un appartement est un enjeu de taille pour un être humain ; c’est peu de choses pour un personnage de cinéma) n’est jamais transcendé par une mise en scène qui, si elle ne manque pas de justesse, se résume trop souvent à des plans moyens sans grande personnalité. Ainsi, lorsque des hommes rôdent la nuit autour de la voiture de Louise, on repense immédiatement au Wendy & Lucy de Kelly Reichardt, qui, sur une trame similaire, parvenait à atteindre l’universel. Et cela, parce que la mise en scène était à la hauteur de l’actrice principale. _B.U

DRAME Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Louise Wimmer, 50 ans, est femme de ménage dans un petit hôtel de Belfort. Séparée de son mari, elle vit dans sa voiture depuis plusieurs semaines. Elle dort dans les parkings, se lave dans les toilettes d’une station-service avant de récupérer son courrier dans un bistrot de quartier. Son dossier de demande de logement social met du temps à aboutir. Elle a un amant, qu’elle rejoint le soir avant de s’éclipser lorsqu’il pose trop de questions. Louise est une femme indépendante au caractère bien trempé. Sa fille, qu’elle voit rarement, lui demande de récupérer un chiot chez son ex-mari. Elle s’y rend à reculons, croisant la nouvelle (et jeune) petite amie de son mari ; celui-ci lui transmet de l’argent pour sa fille. Elle rencontre sa fille dans un café, lui remet le chien et l’argent. Elle reprend sa vie solitaire. SUITE... Un jour, la voiture de Louise tombe en panne. Une de ses connaissances du bistrot l’aide à la réparer, et tente, en vain, de flirter avec elle. Elle plaide à nouveau son cas auprès de la nouvelle employée de l’organisme qui doit lui attribuer un appartement. Lors d’une soirée karaoké organisée au bistrot, elle boit trop et s’effondre. Plus tard, sur les hauteurs de Belfort, elle danse sur la seule chanson que joue son autoradio : Sinnerman de Nina Simone. Elle finit par fracasser l’autoradio. Enfin, un appartement lui est attribué. Soulagée, elle s’y rend. Elle a enfin le sourire aux lèvres. 80 minutes. France, 2011 Sortie France : 11 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Corinne Masiero (Louise Wimmer), Jérôme Kircher (Didier), Anne Benoît (Nicole), Marie Kremer (Séverine), JeanMarc Roulot (Paul), Frédéric Gorny (le manager de l’hôtel), Cécile Rebboah (Mademoiselle Rebihi), Annie-France Poli (Madame Charrière), Maud Wyler (Jessica), Nicolas Woirion (Éric Wimmer), Julien Alluguette (le vendeur du Worldcash). Scénario : Cyril Mennegun Images : Thomas Letellier Montage : Valérie Brégaint 1re assistante réal. : Eva Denis Son : Martin Boisseau Casting : Richard Rousseau Production : Zadig Productions Producteur : Bruno Nahon Distributeur : Haut et Court.

Visa d’exploitation : 125866. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2019 - 20- nouveauxchiensdegarde_Mise en page 1 27/12/11 16:52 Page1

Les Nouveaux chiens de garde de Gilles Balbastre et Yannick Kergoat Archives à l’appui, un journaliste critique et un monteur émérite mettent les pieds dans le PAF. En démontrant la connivence entre marché, politique et médias, le spectacle, jubilatoire, donne froid dans le dos. Un film de salubrité démocratique.

DOCUMENTAIRE POLITIQUE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Scénario : Serge Halimi, Pierre Rimbert, Renaud Lambert, Gilles Balbastre et Yannick Kergoat Images : Laurent Fenart, Alberto Marquardt et Guillaume Deffontaines Montage : Yannick Kergoat et Marie-Pierre Camus Archives : Valérie Massignon Musique : Fred Pallem Son : Laurent Malan, Philippe Fabbri, Romain Degueltz, Olivier Walczak et Julien Cloquet Dir. artistique : Joris Clerté Production : Jem Productions Producteurs : Jacques Kirsner et Anne-Marie Marsaquet Distributeur : Épicentre Films.

© Jem Prod.

HHH À l’époque où il n’y avait que deux chaines en Noir & Blanc, Pierre Desgraupes conseille (en prime time !) de lire Les Chiens de garde de Paul Nizan (1932), l’essai dans lequel il accusait les philosophes établis de dispenser les valeurs de la bourgeoisie. En 1997, Serge Halimi dénonce dans ses Nouveaux chiens de garde la collusion entre les journalistes établis et les pouvoirs politique et économique. La multitude de chaînes télévisées donne aujourd’hui l’impression d’une liberté d’information et il semble loin ce 24 avril 1963 où Alain Peyrefitte (ministre de l’Information) avait expliqué en direct aux Français les changements du journal télévisé de la chaîne unique, promettant indépendance et pluralisme. Cependant, lors de la remise du Prix du livre politique, la complicité entre politiciens et journalistes saute aux yeux. Ils font partie de la même famille Sciences-Po (certains vivent même en couple) ; ils ont le même mode de vie et dînent au Siècle avec les grands patrons. Pas étonnant qu’ils se renvoient l’ascenseur et que Laurent Joffrin s’écrase face à Chirac. En voyant Julliard & Ferry débattre, ou Field & Val se faire récupérer, on ne voit ni pluralisme ni indépendance... Chez Drucker, d’ailleurs, Elkabbach lèche son patron Arnaud Lagardère, une véritable scène d’anthologie ! Car les médias sont aux ordres de leurs patrons (par exemple à TF1, silence-télé sur les ennuis de Bouygues à Flamanville). Giesbert justifie ce pouvoir éditorial. Du coup, Bayrou (face à Chazal en 2006) fait figure d’exception. Les journalistes multi-médiatisés cumulent les “ménages” rémunérés dans les entreprises, tout comme les “experts” économiques cumulent université, médias et administration

104 minutes. France, 2011 Sortie France : 11 janvier 2012

(dans les groupes). Ce sont toujours les mêmes qui sont invités pour marteler la pensée unique du capitalisme dominant, comme Godet, Cohen, de Boissieu, Attali ou Minc. Et pourquoi restent-ils en place alors qu’ils n’ont rien vu venir en 2008 ? Les médias (y compris Le Monde depuis 1995) fustigent quotidiennement “la peur du changement” des couches populaires, tout en les incitant à avoir peur des grévistes et des “quartiers sensibles” (jusqu’à la caricature pour BHL, face à Barbier !). Aidés par l’inventivité plastique de Joris Clerté, et par les interventions de Jean Gadrey (Attac), Michel Naudy (FR3), François Denord & Frédéric Lordon (CNRS), Henri Maler (Acrimed), tous lucides (à la façon de Pierre Carles, de Bourdieu ou du Monde diplomatique), Gilles Balbastre (du Plan B et documentariste pour France 5) et Yannick Kergoat (l’un de nos meilleurs monteurs) nous livrent ici une critique en règle de la presse des grands groupes d’affaires. Les philosophes des années 1930 sont maintenant remplacés par ces “experts” et ces journalistes interchangeables d’un média à l’autre, et force est de constater que leur pensée unique menace plus encore la démocratie. Le soi-disant contre-pouvoir médiatique est bien une fumisterie. Il suffit de voir Sarkozy se marrer face à Joffrin ! Le spectateur aussi s’amuse beaucoup pendant la projection, tout en aiguisant son esprit critique. _M.B

Visa d'exploitation : 119070. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SR.

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2019 - 21- parlezmoidevous_Mise en page 1 27/12/11 16:53 Page1

Parlez-moi de vous de Pierre Pinaud Une animatrice de radio part à la rencontre de sa mère qui l’a abandonnée dans sa petite enfance. Porté par Karin Viard, ce premier long métrage de Pierre Pinaud évite les pièges de son sujet et trouve un joli équilibre, avec juste assez d’émotion et de drôlerie.

© Estrella Prod.

HH Après Les Miettes, court métrage “social” autour d’une ouvrière, pour lequel il reçut un César en 2009, Pierre Pinaud change complètement de registre et s’empare d’un autre destin de femme. Mélina, son héroïne, interprétée par une Karin Viard impeccable, est une femme à deux visages. Drôle et impertinente sur les ondes radio, elle se révèle totalement rigide et névrosée dans l’intimité froide et solitaire de son appartement de l’ouest parisien. De ce personnage double, Pinaud tire un vrai ressort comique, qui donne lieu à des scènes franchement drôles (celle du restaurant japonais entre Karin Viard et Nicolas Duvauchelle est une réussite). Il évite ainsi de basculer dans le pathos mais parvient malgré tout à décrire en creux et avec sensibilité le cheminement intérieur d’une femme seule qui ne s’est jamais remise de son abandon. De même, la confrontation entre cette bourgeoise ultra coincée du 16e et sa mère, de milieu beaucoup plus modeste et grande fan de Michèle Torr devant l’éternel, aurait pu verser franchement dans la caricature. Mais là encore, Pinaud tire son épingle du jeu. Les acteurs et les situations sonnent juste, même si le personnage de Lucas , le “pont” entre le monde de Mélina et le monde de la mère, est peut-être un peu moins convaincant. Mais à l’arrivée, le réalisateur parvient à ne tomber dans presque aucun des pièges que comportait son sujet (par exemple, il n’y aura ni grande scène de pardon ni love story, sans que cela empêche le happy-end). Le résultat est donc un film plaisant mais sans grande surprise, un peu trop lisse. Heureusement, il peut compter sur le talent et la présence de Karin Viard pour nous le faire oublier. _M.H

COMÉDIE DRAMATIQUE Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Mélina est une célèbre animatrice de radio, dont personne ne connaît le visage. En privé, elle vit recluse dans les beaux quartiers sous son vrai nom : Claire Martin. Sa seule préoccupation semble être de retrouver Joëlle, sa mère, qui l’a abandonnée petite. Quand l’agence de détective qu’elle a engagée la localise en banlieue, Mélina s’y rend. Pour entrer en contact avec sa mère, elle se fait engager au Secours Populaire, où elle est bénévole. C’est là qu’elle rencontre Lucas, petit-fils par alliance de Joëlle, qui l’invite à son anniversaire. À la fête, Claire parle pour la première fois à Joëlle. En partant, elle perd son badge de Radio France. Lucas, qui est tombé sous son charme, vient le lui rapporter à Paris. Claire se montre méfiante. Ils parlent tout de même. Lucas est apprenti photographe. Il montre son travail à Claire, qui l’encourage à persévérer. SUITE... En l’emmenant à un rendez-vous médical, Claire fait comprendre à Joëlle qui elle est, et lui donne rendez-vous le lendemain dans un café. Joëlle accepte, mais ne vient pas. Claire est furieuse. Lucas se fait plus pressant, et elle l’éconduit. Il décide alors précipitamment de partir en voyage. Dans le même temps, un tabloïd révèle le visage de Mélina. Claire apprend que Joëlle a fait une crise cardiaque. Elle se rend à l’hôpital et lui soutire un “je t’aime” par la force. Un an plus tard, Mélina exerce toujours son métier d’animatrice mais désormais au grand jour. Elle semble apaisée et beaucoup plus apte à aller vers les autres. 89 minutes. France, 2011 Sortie France : 11 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Karin Viard (Claire Martin / Mélina), Nicolas Duvauchelle (Lucas), Nadia Barentin (Joëlle Goulain), Patrick Fierry (André), Catherine Hosmalin (Ingrid Goulain), Jean-Noël Brouté (Bertrand), Dani (Barka), François Bureloup (Bernard Goulain), Élise Otzenberger (Julie Goulain), Adèle Bonduelle (Amélie Goulain), Ariane Pirie (Ania). Scénario : Pierre Pinaud Images : Guillaume Deffontaines Montage : Valérie Deseine et Nathalie Hubert 1er assistant réal. : Léonard Vindry Scripte : Véronique Heuchenne Musique : Maidi Roth Son : Lucien Balibar Décors : Marie Cheminal Costumes : Élisabeth Tavernier Maquillage : Silvia Carissoli Casting : Pierre-Jacques Bénichou Production : Estrella Productions Coproduction : Bonne Pioche Cinéma et Les Productions en Cabine Productrice : Stéphanie Carreras Coproducteurs : Yves Darondeau, Christophe Lioud et Emmanuel Priou Dir. de production : Albert Blasius Distributeur : Diaphana.

Visa d’exploitation : 115789. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2019 - 22- portraitaucrepusc_Mise en page 1 27/12/11 16:55 Page1

Portrait au crépuscule (Portret v summer kakh) de Anguelina Nikonova À travers cet étonnant film de vengeance, Anguelina Nikonova et son actrice et coscénariste Olga Dykhovichnaya donnent une vision profondément inhumaine de la Russie après une décennie sous le règne du système Poutine et des ses oligarques.

© Baraban Films

HH Les douze années du règne de Vladimir Poutine ont été, si l’on en croit Portrait au crépuscule, particulièrement destructrices. Le système Poutine a réussi l’exploit de conserver les pires travers des institutions bolcheviques (la corruption et l’impunité de ses fonctionnaires) en leur ajoutant les maux les plus sévères du système capitaliste. Dès le début du film, Anguelina Nikonova et son actrice et scénariste Olga Dykhovitchnaia plantent le décor à travers deux scènes. D’abord le viol d’une prostituée, non loin d’un village. Puis une autre, plus anodine à première vue : Marina se foule une cheville et doit continuer son chemin avec une chaussure en moins, sans que personne ne lui vienne en aide. La Russie d’aujourd’hui c’est donc le chacun pour soi, et les femmes en sont les premières victimes. Mais les auteurs dépassent le simple constat pour tenter d’aller au-delà de l’oppression de l’État et du capitalisme. À ces violences, les deux femmes opposent l’acte le plus subversif : aimer. Par petites touches, la scénariste et la réalisatrice vont donner corps à cette idée qui aurait pu, traitée par d’autres, sombrer dans une pathétique naïveté. Pour cela les deux femmes vont détacher l’héroïne de son entourage et la rapprocher de l’homme qui l’a violée : un policier, dont elle découvre la vie misérable. Doucement, elle va apprendre à le connaître, à l’aimer et à s’en faire aimer, pour finalement s’en détacher. Une vengeance particulièrement cruelle, qui a le mérite d’être bien amenée et qui met en avant la force créatrice de l’amour. Modeste dans sa forme, Portrait au crépuscule n’en demeure pas moins revigorant. _G.M

DRAME SOCIAL Adultes / Grands Adolescents

u RÉSUMÉ Des policiers violent une prostituée. Les cris réveillent Marina. Après avoir fait l’amour sans passion avec son amant, ce dernier refuse de la déposer au travail. Elle marche dans la cité et se blesse. Elle boite jusqu’à un restaurant ou elle demande un taxi. Ils refusent. Elle tente de faire du stop. Personne ne veut la prendre. À la nuit tombée, une voiture de police s’arrête. Elle se fait violer puis jeter dans un terrain vague. Un joggueur vient à son aide. Son mari ne remarque rien. À son travail, elle tente d’écouter les enfants victimes de mauvais traitements. Elle pense se coucher chez elle mais ses amis lui ont préparés un anniversaire. Après quelques verres elle les met face à leurs mensonges. SUITE... Le lendemain, son mari lui laisse un mot : “Il faut que tu te reposes” et part. Au restaurant, elle tombe sur les policiers. Leur chef sort, elle le suit. Au lieu de l’agresser, elle lui fait une fellation. Le policier rentre chez lui. Le lendemain, elle se rend avec ses valises à son domicile. Leurs rapports changent. Le policier tente de lui faire comprendre ses sentiments, n’y arrive pas et la bat lorsqu’elle arrive à les exprimer. Elle lui demande de l’aider à faire peur au père d’une adolescente dont elle s’occupe. Cela dégénère, elle prend peur et decide de rentrer chez son mari. Le policier l’accompagne à l’aéroport. Au lieu de retrouver son mari, Marina part avec ses valises. Le policier la suit. 105 minutes. Russie, 2011 Sortie France : 11 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Olga Dykhovitchnaia (Marina), Sergueï Borissov (Andrey), Roman Merinov (Ilusha), Sergueï Golioudov (Valera), Anna Ageeva (Tania). Scénario : Olga Dykhovitchnaia et Anguelina Nikonova Images : Eben Bull Montage : Elena Afanasyeva Son : Andrea Bella Décors : Oleg Fedikhin Production : Baraban Films Producteurs : Leonid Ogaryov, Anguelina Nikonova et Olga Dykhovitchnaia Distributeur : Rezo Films.

Visa d’exploitation : 131855. . Format : 1,77 - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2019 - 23- projetnim_Mise en page 1 27/12/11 16:56 Page1

Le Projet Nim (The Project Nim) de James Marsh Si le langage est l’un des propres de l’homme, un chimpanzé né en captivité et élevé comme un humain peut-il l’acquérir ? Tel fut le “projet Nim”, que reconstitue James Marsh. Un documentaire d’une grande richesse, admirablement mené, et captivant.

DOCUMENTAIRE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE D’après : l’ouvrage Nim Chimpsky, the Chimp Who Would Be Human d’Elizabeth Hess (2008) Images : Michael Simmonds Montage : Jinx Godfrey Archives : Prudence Arndt Musique : Dickon Hinchliffe Son : Steven Robinson Décors : Markus Kirschner Costumes : Kathryn Nixon Dir. artistique : Gonzalo Cordoba Production : Red Box Films Coproduction : HBO Documentary Films, BBC Films et UK Film Council Coproduction associée : Passion Pictures Producteur : Simon Chinn Coproducteurs : George Chignell et Maureen A. Ryan Producteurs exécutifs : John Battsek, Andrew Ruhemann, Jamie Laurenson, Nick Fraser et Hugh Grumbar Presse : Marie Queysanne Distributeur : Le Pacte.

© Susan Kuklin

HHH Il y a cinq ans, paraissait aux éditions Ellipses un intéressant petit ouvrage, La Philosophie sur grand écran. Parmi les films choisis pour les thèmes retenus par l’auteur, aucun documentaire. Si jamais Olivier Dekens pense à une réédition, nul doute que Le Projet Nim (quelques années de la vie d’un chimpanzé “dénaturé”) serait en bonne place pour les chapitres "perception", "théorie et expérience" ou, bien sûr, “langage”. James Marsh, réalisateur, s’est déjà fait connaître par deux “fictions” aussi intéressantes que déroutantes, The King [voir Annuel 2007] et le volet 1980 de la trilogie Red Riding [voir Annuel 2010], ainsi que par des documentaires remarqués, tel Le Funambule (Oscar 2009). Le Projet Nim obtint, lui, le Prix de la Mise en scène à Sundance en 2011. Un prix largement mérité. En 1973, un chimpanzé naissait en captivité. Baptisé Nim, il fut choisi par le professeur Herbert (Herb) Terrace, de l’Université de Columbia, pour une expérience qui évoque le Pierre Boulle de La Planète des singes ou le Vercors des Animaux dénaturés : élevé dans les conditions d’un jeune humain, Nim s’appropriera-t-il, par le biais de la langue des signes, ce propre de l’homme qu’est le langage ? Remarquablement construit, le film alterne de captivantes séquences d’archives (l’éducation de Nim a bien entendu été filmée), et les témoignages des acteurs de l’entreprise. Herb, tout d’abord, que l’on cerne également au fil d’évocations des autres protagonistes ou d’interviews d’époque. Subjuguant ses assistantes, peaufinant son image médiatique avant d’abandonner le projet au bout de cinq ans lorsqu’il ne l’intéressa plus, il apparaît ici comme

99 minutes. Royaume-Uni - États-Unis, 2011 Sortie France : 11 janvier 2012

un mandarin dominateur et roublard. Et Nim ne l’appréciait guère...! Parmi les autres témoins, Stéphanie Lafarge, la première “nounou” de Nim, qui devint presque sa mère (ce qui n’alla pas sans problèmes pour sa vie de couple), et sa fille Jenny Lee, qui évoque ces années d’enfances peu communes. Puis Herb décida de retirer Nim à Stéphanie pour le confier à Laura Ann Petito, devenue coordinatrice du projet et qui vécut dans une grande résidence avec le chimpanzé. Elle fut remplacée par Joyce Butler, la “troisième mère” de Nim, venue d’abord comme observatrice, avec qui il progressa étonnamment dans le langage des sourds. Pendant ces cinq années, Nim, qui adorait cependant les chats, ne vécut qu’avec des hommes (“le monde l’effrayait” déclare Joyce Butler) et devint de plus en plus fort, violent (capable d’amitié aussi avec l’étudiant Bob Ingersoll par exemple) et exigeant. Avant d’arrêter le projet, Herb, qui regrettait que Nim n’utilise la langue des signes "que pour obtenir ce qu’il veut"!, le fit mettre en rapport avec des chimpanzé(e)s : autres séquences d’archives passionnantes. Surtout, ne soyez pas inquiété par le début de cette fiche : si ce film soulève de graves questions, James Marsh a pleinement réussi son projet de les “aborder avec légèreté”. Et que les âmes sensibles soient rassurées : Nim a fini sa vie dans un bon refuge, il est mort en 2000, à près de 27 ans. _Ch.B

Visa d’exploitation : 131879. Format : 1,85 - Couleur et Noir & Blanc - Son : Dolby SRD.

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2019 - 24- Notules2_Mise en page 1 27/12/11 16:57 Page1

En bref...

Dubaï Flamingo

El Gusto

de Delphine Kreuter

(El Gusto) de Safinez Bousbia

Scén. : Delphine Kreuter Im. : David Morille Mont. : Delphine Kreuter et Carlos Madaleno Mus. : Frederick Galiay Dist. : Alfama Films. Avec : Vanessa Paradis (Jackie), Sergi López (Vincent), Florence Thomassin (Livia), Claire Nebout, la voix d’Isabelle Huppert.

Dans un hippodrome à Dubaï, Vincent et sa femme Livia se cherchent. Ils finissent par se retrouver. Le lendemain matin, Livia a disparu. Troublé, Vincent part travailler, mais il peine à trouver son bureau, et semble avoir tout oublié de sa réunion du jour. Plus tard, il rencontre Jackie, une étrange jeune femme partie enterrer son loup des steppes. Après 57 000 kilomètres entre nous (2008), Dubaï Flamingo est le deuxième long métrage de D. Kreuter. On y retrouve F. Thomassin, en compagnie de deux têtes d’affiche de taille : S. López et V. Paradis. Est-ce par amitié qu’ils ont accepté l’aventure ? On peine à voir une autre explication... Passées les dix premières minutes, assez envoûtantes, on assiste à une juxtaposition de scénettes qui se voudraient loufoques, oniriques, décalées, étranges, etc... Tous les ingrédients de ces mixtures délicieuses et non identifiées que seul David Lynch parvient à concocter. Néons, visages impénétrables, décors de carton-pâte, phrases dénuées de sens, cuts impromptus, I. Huppert parlant philosophie sous les traits d’une chèvre... Autant dire qu’on décroche très vite. À aucun moment nos sens ne prennent le pas sur notre réflexion, comme l’aurait sans doute souhaité la réalisatrice. Le film semble se résumer à montrer, de façon, on l’aura compris, surréaliste, une sorte de crise de la quarantaine d’un cadre supérieur. Il faut saluer le courage de S. López, qui parvient à garder son sérieux, dans cet indigeste enchaînement de répliques et de situations à dormir debout. _F.B-P.

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Scén. : Safinez Bousbia Im. : Heidi Egger Mont. : Nuria Roldos et Françoise Bonnot Dist. : UGC Ph.

El Gusto s’ouvre sur une scène de répétition d’apparence ordinaire, qui pourtant est le résultat d’un petit miracle, dont S. Bousbia est à l’origine. Car cette jeune femme a décidé de réunir d’anciens musiciens de musique chââbi, que l’histoire avait séparés pendant près de cinquante ans. Le documentaire revient sur chaque rencontre, chaque avancement qui a rendu possible un tel projet. Un parcours long, qui part d’un hasard : celui de la rencontre entre Bousbia et Mohamed el-Ferkioui, qui fit découvrir à la jeune femme les origines d’une des musiques populaires les plus connues d’Algérie. Le métissage de cette musique se reflète à travers les témoignages de chaque ancien musicien : musulmans, juifs, exilés. Leurs racines communes (le quartier de la casbah d’Alger) ont été détruites par le temps et la guerre. Bousbia les filme loin de la casbah des années 1950, soulignant le changement radical qui s’est opéré pendant toutes ces années. Éloignés de leurs racines, il se dégage de leurs propos une forte nostalgie. Bousbia organise la reformation d’un groupe chââbi lors d’un concert unique à Marseille : c’est la naissance d’El Gusto. Le style du documentaire s’apparente à celui d’un reportage télévisé : les nombreux plans au steadycam, les vues aériennes, les images d’archives et la voix off très descriptive laissent à penser que le film a avant tout été conçu comme un témoignage, aussi complet que possible, plutôt que comme un objet artistique. C’est d’ailleurs l’honnêteté de Bousbia dans cette démarche qui donne toute sa valeur au projet. _D.C.

L’Orpheline avec en plus un bras en moins de Jacques Richard

Scén. : Jacques Richard, d’après un scénario original de Jacques Richard et Roland Topor Im. : David Cailley, Jacques Richard et Florent Astolfi Mont. : Camille Moreau Mus. : Béatrice Thiriet Dist. : Albany Films / Aramis Films. Avec : Jean-Claude Dreyfus (Renaud Duraquet), Dominique Pinon (l’inspecteur Lamentin), Melvil Poupaud (Robinson), Noémie Merlant (Éléonore), Caroline Loeb, Pasquale d’Inca.

Enfant, Éléonore a perdu ses parents - et un bras - dans un accident. Âgée de 20 ans, elle vit dans un orphelinat. Le juge London en a fait sa protégée. Son amie, Rita, lui présente Robinson, magicien dans un cabaret tenu par Duraquet, qui trempe dans des affaires de proxénétisme. Éléonore, Rita et Robinson couchent ensemble. Duraquet filme la scène. Alliant un récit arythmique à une mise en scène amorphe, L’Orpheline... suinte l’amateurisme. L’auteur aligne les séquences sans queue ni tête, se complaît dans un érotisme rebattu et s’en remet, pour le reste, à son petit Buñuel illustré. Difficile de ne pas songer à La Vie criminelle d’Archibald de La Cruz, pour la dimension fétichiste, et à l’ensemble de son œuvre pour le brocard des figures d’autorité et le portrait d’une bourgeoisie dissimulant des trésors de perversité. De fait, le film semble tout droit surgi des années 1970. Un imaginaire usé, un iconoclasme passé l’animent. Quant aux comédiens, livrés à eux-mêmes, ils semblent jouer selon leur bon plaisir. Même le grand n’importe quoi recquiert, à défaut de génie, un minimum de méthode. On en vient à regretter que le film, plus ennuyeux que risible, manque la marche du nanar, usurpant l’épithète de surréaliste. Un film n’est pas une séance de spiritisme : il n’aura pas suffi d’invoquer l’esprit de Buñuel pour le voir se manifester. _T.F. © les Fiches du Cinéma 2012 - N°2019


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L’Amour dure trois ans de Frédéric Beigbeder Après son divorce, Marc Marronnier établit la théorie que l’amour ne dure toujours que trois ans, et en fait un livre. Mais il retombe amoureux... Une correcte comédie sentimentale à la française, pimentée d’un exercice d’autodérision à la désinvolture sympathique.

© Magali Bragard / The Film - AKN Prod. - EuropaCorp - France 2 Cinéma - Scope Pic.

HH Qu’un touche-à-tout tel que Beigbeder vienne à faire un film, comme tout le monde aujourd’hui, c’était de l’ordre de l’évidence. La vraie question était plutôt : comment ? Réponse : de façon plutôt maligne et modeste. L’écrivain n’entre pas dans le cinéma en terrain conquis, mais affiche plutôt une volonté de se rassurer, en s’appuyant sur l’un de ses livres et en s’inscrivant dans un genre très codifié : la comédie romantique. Beigbeder restructure donc son roman, y ajoute des personnage, l’adapte à la fois au format cinéma, à l’époque (en quinze ans les SMS ont remplacé les lettres d’amour) et à sa propre situation (le besoin de digérer son divorce n’est plus le moteur du projet). Puis, il s’installe sans complexe dans les poncifs de la comédie romantique : un anti-héros maladroit, une créature irrésistible, deux copains antinomiques, un coup de foudre, des brouilles, des mensonges, des retrouvailles. Les choses étant ainsi cadrées, Beigbeder peut pimenter la sauce d’une dimension autobiographique qui fait l’essentiel du charme du film, notamment quand il se dépeint lui-même en écrivain surfait (avec le précieux concours de V. Lemercier dans le rôle de son éditrice). Contrairement à 99 F (le film comme le livre), L’Amour dure trois ans a le mérite de mettre en conformité ses moyens et ses ambitions. Le film n’essaie pas de révolutionner le genre dans lequel il s’inscrit et, de fait, ne le révolutionne en rien. Il joue sur le côté sympa de son auteur et se révèle effectivement sympa. D’apparence un peu bricolé il n’a pas l’efficacité d’une machine de guerre comique, mais il est doté, en contrepartie, d’une forme de désinvolture qui le rend assez attachant. _N.M

COMÉDIE SENTIMENTALE Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Marc Marronnier, jeune critique littéraire et chroniqueur mondain, vient de divorcer d’Anne. De cet amour raté, il conçoit une grande aigreur, et une théorie : l’amour dure trois ans. Après une tentative de suicide ratée, il se lance dans l’écriture frénétique d’un livre développant cette thèse. Peu après avoir envoyé son manuscrit, il reçoit la visite d’Alice. Du temps de son mariage, Marc avait rencontré Alice - qui est la femme de son cousin, Antoine - à l’enterrement de sa grand-mère. Depuis, il n’a cessé de penser à elle et l’inonde de SMS. Elle lui demande d’arrêter. Elle accepte tout de même qu’ils se revoient, mais tente de limiter leur relation à un rapport amical. Finalement, Marc devient son amant. Pendant ce temps, le roman de Marc a été accepté par une maison d’édition. Il le fait publier sous un pseudonyme. SUITE... Devant l’insistance de Marc, Alice finit par quitter Antoine et venir s’installer chez lui. Le livre remporte un gros succès. Il décroche le Prix de Flore. L’éditrice de Marc dévoile alors son identité. En découvrant la chose, Alice, furieuse, le quitte. Marc sombre dans la déprime. Il provoque un scandale au mariage de son ami Pierre. Invité au Grand Journal, il fait une déclaration d’amour à Alice. Sans résultat. Jean-Georges, l’autre ami de Marc, ex-coureur de jupons, va se marier avec un homme. Il invite Alice en lui révélant qu’après le mariage Marc partira vivre en Australie. Elle quitte à nouveau Antoine et vient retrouver Marc. 98 minutes. France, 2011 Sortie France : 18 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Louise Bourgoin (Alice), Gaspard Proust (Marc Marronnier), JoeyStarr (Jean-Georges), Jonathan Lambert (Pierre), Frédérique Bel (Kathy), Nicolas Bedos (Antoine), Élisa Sednaoui (Anne), Bernard Menez (le père de Marc), Anny Duperey (la mère de Marc), Valérie Lemercier (Francesca Vernesi), Thomas Jouannet (le professeur de surf), Christophe Bourseiller (le curé), Michel Legrand (lui-même). Scénario : Frédéric Beigbeder, Christophe Turpin et Gilles Verdiani, avec la collaboration d'Eugénie Grandval et Gaspard Proust D'après : le roman de Frédéric Beigbeder (1997) Images : Yves Cape Montage : Stan Collet 1re assistante réal. : Émilie Cherpitel Scripte : Bérengère Saint-Bezar Musique : Martin Rappeneau Son : Pierre Mertens, Frédéric Demolder et Jean-Paul Hurier Décors : Christian Marti Costumes : Marie-Laure Lasson et Claire Lacaze Effets spéciaux : Georges Demétrau Casting : Nicolas Ronchi Production : The Film, Akn Productions, EuropaCorp, France 2 Cinéma et Scope Pictures Production exécutive : The Film Producteurs : Michael Gentile et Alain Kruger Coproductrice : Geneviève Lemal Productrice associée : Lauraine Heftler Dir. de production : Philippe Saal Distributeur : EuropaCorp.

Visa d'exploitation : 117576. . Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 300 copies.

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2019 - 26- duchlemaitre_Mise en page 1 27/12/11 16:59 Page1

Duch, le Maître des Forges de l’Enfer de Rithy Panh Face à face avec un bourreau Khmer rouge. Mise en scène sobre, dispositif plus fin qu’il n’y paraît : le Cambodgien Rithy Panh livre ici un document précieux sur l’étude de l’inconcevable. Au-delà du génocide cambodgien, Panh touche à l’essence du mal.

DOCUMENTAIRE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Images : Prum Mésar et Rithy Panh Montage : Marie-Christine Rougerie et Rithy Panh Musique : Marc Marder Son : Sear Vissal Production : CDP, INA, France Télévisions et Bophana Production Productrice : Catherine Dussart Dir. de production : Cheap Sovichea Distributeur : Les Acacias.

© Les Acacias

HHH Rithy Panh (Les Gens de la rizière, Le Papier ne peut pas envelopper la braise) poursuit son travail, à la fois fictionnel et documentaire, sur le génocide du peuple cambodgien, son peuple (la barbarie des Khmers Rouges a fait près d’un million huit cent mille victimes, soit un quart de la population cambodgienne, en l’espace de quatre années, de 1975 à 1979). Après avoir filmé dans son documentaire S21, la machine de mort khmère rouge (2002), le terrifiant centre de détention Tuol Sleng, à Phnom Penh, le réalisateur précise son point de vue et ne se concentre, cette fois, que sur le chef de la prison, vers lequel convergeaient tous les témoignages de S21. Kaing Guek Eav, dit Duch, tenait d’une main de fer cette “machine de mort”, qui compte près de 13 000 victimes. Consciencieux, efficace, cultivé, sincère, redoutable, avide de survivre et ambitieux de grimper au sein du parti, Duch est une figure du XXe siècle. L’ancien professeur de mathématiques débuta son ascension dans les rangs des Khmers Rouges en s’occupant d’un camp de rééducation, M13, avant d’intégrer le Santebal (la police politique de l’Angkar) et de diriger le sinistre S21. Bien des aspects de sa personnalité et son mode de fonctionnement rappellent les hauts dignitaires nazis : même morgue, même précision, même absence de repentance, même banalité. À cela près que le dignitaire khmer est, au moment du tournage de ce documentaire, encore en attente de son jugement. D’où une attitude qui alterne entre une franchise glaçante, qui a trait à sa personnalité, et de surprenantes tentatives de séduction. L’homme a encore l’espoir de se voir acquitté, et pardonné (il sera finalement condamné à 35 ans de prison, jugement dont il fit appel). Le grand mérite du documentaire

103 minutes. France - Cambodge, 2011 Sortie France : 18 janvier 2012

de Panh est l’apparente simplicité de son dispositif. Duch est invité à raconter, se raconter (sur plus de 300 heures de rushes). Le réalisateur n’apparaît jamais à l’image. À aucun moment on ne sent pointer ni l’indignation, ni le jugement du cinéaste sur son interlocuteur. Et justement, grâce à cela, ce dernier se laisse aller : il vante ses mérites, fait part de ses regrets, et surtout se grise à revivre sa puissance passée : ses yeux brillent, son torse se bombe, il semble grandir et nous surplomber. Avant de se ressaisir et reprendre une posture plus neutre. Lors de ces moments précieux, le spectateur est mis à la place des victimes, face au bourreau. Rithy Panh a réussi le tour de force de piéger malgré lui cet habile personnage. Le vieux démon se remet en branle avec une étonnante facilité, malgré cet apparent contrôle sur lui-même. Le réalisateur a saisi l’homme là où il est vulnérable : sa vanité, son appétit de puissance. La banalité du mal qu’on évoque souvent perd alors de sa pertinence quand on assiste à de telles envolées : l’homme a tous les attributs de la mégalomanie meurtrière. La banalité citée semble plus un camouflage. On ressort physiquement affaibli d’un tel documentaire. D’abord sonné d’avoir été mis face à ce qu’il y a de maléfique dans l’Homme. Et triste enfin de songer que de tels comportements font et feront toujours partie de notre nature humaine. _R.L

Visa d’exploitation : en cours. . Format : 1,85 - Couleur et Noir & Blanc - Son : Dolby SR.

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2019 - 27- etsionvivaittous_Mise en page 1 27/12/11 21:52 Page1

Et si on vivait tous ensemble ? de Stéphane Robelin Arrivés à la retraite, des vieux copains décident de vivre ensemble pour affronter les années qui restent. Cette comédie gentillette est servie par des comédiens hors pair, mais desservie par un scénario laborieux et scolaire, digne d’un exposé sur les seniors.

© Huma Rosentalski

H Quel casting ! Pour son deuxième long métrage, Stéphane Robelin, auteur du confidentiel Real Movie (2004), a réuni une sacrée brochette d’acteurs. Guy Bedos, Pierre Richard, Claude Rich et Géraldine Chaplin entourent la star internationale : Jane Fonda. Comment a-t-il fait ? C’est un peu la question que l’on se pose pendant toute la durée de cette comédie gentille et aimable, mais bien fade et maladroite. Sans doute ces comédiens tous plus (pour la majorité) ou moins septuagénaires ont-ils été séduits par l’idée de départ : des seniors décident de vivre en communauté pour vieillir entre copains. Leur plaisir de jouer et de s'amuser ensemble est d’ailleurs palpable à l’écran ! Jane Fonda, très impliquée, interprète Jeanne, sage et sensuelle, qui n’hésite pas à parler sexualité. Pierre Richard, Géraldine Chaplin et surtout Claude Rich dont l’œil frise comme au premier jour, sont au diapason. Seul Guy Bedos bedonne sans inspiration. Dommage donc que cette belle énergie se retrouve au service d’un scénario laborieux. Stéphane Robelin met du temps à entrer dans son sujet : la vie en communauté. Il s’égare, en effet, en cherchant à aborder toutes les questions liées à la vie après 60 ans : sexualité, Alzheimer, solitude, maison de retraite... Les personnages, pris au piège du sujet sociétal, se trouvent alors cantonnés à leur statut de senior, au détriment de leur personnalité. Est-ce parce qu’ils sont âgés ? En tous cas, Stéphane Robelin peint ses héros comme des êtres trop gentils, à la limite du cucul. Bref, la bande d’amis s’entend trop bien ! L'ensemble manque d’une aspérité qui aurait insufflé drôlerie et dynamisme au film. _I.B

COMÉDIE DOUCE-AMÈRE Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Jean, retraité engagé, participe à une manifestation de sans-papiers avant de retrouver ses vieux copains Albert et Claude. Jeanne, la femme d’Albert, se choisit un cercueil. Atteinte d’un cancer, elle ne dit rien à Albert qui, lui, perd la mémoire. Lors d’un dîner entre copains, Jean suggère qu’ils pourraient vivre tous en communauté dans la grande maison où il vit avec Annie, sa femme, mais celle-ci s’oppose à l’idée. Claude, vieux séducteur, est resté célibataire, et fréquente les prostituées. Jeanne et Albert engagent Dirk, étudiant allemand en anthropologie, pour sortir leur chien. Claude a une attaque et son fils l’installe en maison de retraite. Venus lui rendre visite, les amis organisent son “évasion” de cet endroit sinistre. SUITE... Annie accepte alors l’idée d’une cohabitation et Claude, Jeanne et Albert emménagent chez eux. Dirk aussi, qui décide de les observer pour sa thèse sur les seniors. La vie en communauté s’organise avec l’aide de Dirk. Mais Albert oublie l’eau de son bain et crée une inondation. Il apprend que Claude a été l’amant de Jeanne et Annie, il y a longtemps. Mis au courant, Jean fait un esclandre. Puis ils se réconcilient. Jeanne est de plus en plus faible. À son enterrement, tous se recueillent sur son cercueil rose. Le lendemain, Albert, de plus en plus oublieux, cherche Jeanne. Tous ensemble, ils partent alors à sa recherche. 96 minutes. France - Allemagne, 2011. Sortie France : 18 janvier 2012.

u GÉNÉRIQUE Avec : Guy Bedos (Jean), Daniel Brühl (Dirk), Géraldine Chaplin (Annie), Jane Fonda (Jeanne), Claude Rich (Claude), Pierre Richard (Albert), Bernard Malaka (Bernard), Camino Texeira (Maria), Gwendoline Hamon (Sabine), Gustave Kervern (le vendeur des pompes funèbres), Philippe Chaine (le pompier). Scénario : Stéphane Robelin Images : Dominique Colin Montage : Patrick Wilfert 1re assistante réal. : Juliette Crété Scripte : Nancy Rivas Musique : Jean-Philippe Verdin Son : Florent Blanchard Décors : David Bersanetti Costumes : Jurgen Doering Effets visuels : Thibaut Granier Production : Les Films de la Butte, Manny Films, Rommel Film et Studio 37 Producteurs : Christophe Bruncher, Philippe Gompel et Aurélia Grossmann Coproducteurs : Peter Rommel et Frédérique Duma Producteurs associés : Nicolas Lesoult, Cédric de Saint-Jean, Roch Lener et Michel Liberman Dir. de production : Nathalie Nghet Distributeur : Bac Films.

Visa d'exploitation : 116698. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2019 - 28- millenium_Mise en page 1 27/12/11 17:00 Page1

Millénium Les Hommes qui n’aimaient pas les femmes (The Girl With the Dragon Tattoo) de David Fincher Une “hackeuse” et un journaliste tentent d’élucider une inexplicable disparition vieille de quarante ans. Fincher se frotte à la saga Millénium : il signe une variation sur la figure du serial killer qui ne manque pas de piquant, et révèle une actrice à suivre de près.

© Sony

HH Avec cette adaptation du best-seller Millénium, David Fincher pensait-il avoir quelque chose à prouver ? Encensé fin 2010 pour son brillant The Social Network, le cinéaste sait pertinemment qu’il est l’un des rares auteurs à pouvoir accepter un film de studio sans pour autant perdre sa crédibilité artistique. Et si son Millénium ne fait pas l’unanimité, il illustre pourtant la facilité qu’a le réalisateur à prendre les commandes d’un projet impersonnel pour se l’approprier et en faire un objet pop inévitable. Le film se situe dans un entre-deux surprenant : jamais vraiment Seven (atmosphère oppressante et glauque), ni Zodiac (enquête minutieuse et clinique), Millénium exploite son intrigue foisonnante pour adopter une rythmique de série TV (en donnant une belle leçon de montage) et doit s’envisager comme une variation tout sauf anodine sur la figure du serial killer, qui a toujours réussie à Fincher. Lequel parvient à ne pas se répéter, alors que les synopsis des trois films sont finalement parfaitement identiques... L’autre challenge de cette version américanisée (mais tournée en Suède, sans jamais dénaturer le contexte du roman) était de passer après une première adaptation suédoise : le défi est relevé, le film évitant les répétitions trop lourdes - les sempiternels flash-backs deviennent ici de courtes images éthérées et flottantes, proches des souvenirs - et s’accordant quelques libertés bienvenues. L’histoire commence sur Blomkvist (Daniel Craig, en forme) mais se termine sans équivoque sur le personnage emblématique de la saga, Lisbeth, incarnée par une quasi inconnue : Rooney Mara. Après Noomi Rapace, Millénium est bien parti pour faire naître une autre (et aussi talentueuse) star... _Mi.G

THRILLER Adultes / Grands Adolescents

u RÉSUMÉ Journaliste au magazine Millénium, Mikael Blomkvist est condamné pour diffamation contre le magnat Wennerström. Pour le compte de Dirch Frode, Lisbeth Salander, une hackeuse marginale, enquête sur le passé de Mikael. Sur la foi de son rapport, Frode fait une proposition à Mikael de la part du vieil industriel Henrik Vanger : Mikael devra enquêter sur la disparition, quarante ans plus tôt, d’Harriet, la nièce d’Henrik. SUITE... Mikael s’installe sur l’île de la famille Vanger. Henrik le met vite au courant des sombres querelles familiales, et seul Martin, le frère d’Harriet, se montre coopératif. Lisbeth, pupille de l’État, est violée par l’autoritaire Bjurman, son nouveau tuteur. Elle lui tend un piège pour se venger. L’enquête de Mikael piétine. Découvrant l’existence d’un rapport illégal sur lui, il demande à en rencontrer l’auteure... et persuade Lisbeth de travailler avec lui. Ils mettent en relation des citations bibliques, notées dans le journal d’Harriet, avec une série de meurtres. Pendant que Lisbeth épluche les archives de l’entreprise, et comprend que ces meurtres étaient l’œuvre de Gottfried, le père d’Harriet, Mikael, lui, soupçonne Martin : celui-ci le séquestre dans son sous-sol, où il assassine régulièrement des prostituées. Lisbeth arrive à temps pour sauver Mikael. Prenant la fuite, Martin se tue en voiture. Mikael retrouve Harriet à Londres, où elle se fait passer pour sa cousine Anita. Lisbeth utilise ses talents pour blanchir Mikael et incriminer Wennerström. 158 minutes. États-Unis - Suède - Royaume-Uni Allemagne, 2011. Sortie France : 18 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Daniel Craig (Mikael Blomkvist), Rooney Mara (Lisbeth Salander), Christopher Plummer (Henrik Vanger), Stellan Skarsgård (Martin Vanger), Steven Berkoff (Dirch Frode), Robin Wright (Erika Berger), Yorick van Wageninge (Bjurman), Joely Richardson (Anita Vanger), Geraldine James (Cecilia Vanger), Goran Visnjic (Armansky), Donald Sumpter (l’inspecteur Morell), Ulf Friberg (Wennerström), Bengt C.W. Carlsson (Palmgren), Tony Way (Plague), Per Myrbreg (Harald), Josefin Asplund (Pernilla), Eva Frtijofson (Anna), Moa Garpendal (Harriet), Maya Hansson-Bergqvist (Anna, jeune), Sarah Appelberg (Cecilia, jeune), Julian Sands (Henrik, jeune), Anna Björk, Gustaf Hammarsten, Simon Reithner. Scénario : Steven Zaillian D’après : le roman Les Hommes qui n’aimaient pas les femmes de Steig Larsson (2005) Images : Jeff Cronenweth Montage : Kirk Baxter et Angus Wall 1er assistant réal. : Bob Wagner Musique : Trent Reznor et Atticus Ross Son : Mark Weingarten Décors : Donald Graham Burt Costumes : Trush Summerville Effets visuels : Eric Barba Dir. artistique : Mikael Varhelyi Casting : Lara Mayfield Production : Scott Rudin Prod. et Yellow Bird pour Columbia Pictures et MGM Producteurs : Ole Søndberg, Søren Stærmose, Scott Rudin et Ceán Chaffin Producteurs exécutifs : Steven Zaillian, Mikael Wallem et Anni Farubye Fernandez Distributeur : Sony Pictures.

Visa d’exploitation : 131915. Interdiction en cours. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD DTS SDDS.

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2019 - 29- trust_Mise en page 1 27/12/11 17:02 Page1

Trust (Trust) de David Schwimmer Annie, 14 ans, se fait violer par un prédateur sexuel rencontré sur Internet. Sa vie et celle de sa famille ne seront jamais plus pareilles. David Schwimmer signe un film réaliste, un peu didactique et schématique, manquant parfois de finesse.

© Metropolitan

HH David Schwimmer est plus connu pour le rôle de Ross dans Friends qu’en tant que réalisateur. Il est aussi membre du conseil d’administration de la Rape Foundation depuis dix ans et dit s’être inspiré du témoignage d’un père pour le scénario de son deuxième long métrage (après Cours toujours Dennis en 2007), qu’il a développé pendant sept ans. Ce long travail ne se ressent malheureusement pas assez. La première partie du film montre assez bien la façon dont Charlie réussit à s’immiscer dans la vie de sa jeune victime, et à la convaincre qu’il est amoureux d’elle. Leurs échanges sont retranscrits en langage SMS sur l’écran, ce qui peut être assez désagréable visuellement, mais permet de nous montrer en détail le travail de manipulation psychologique que Charlie met en place. Cependant, la seconde partie - qui se concentre sur la réaction du père face au viol de sa fille, et sur les différentes phases de réaction d’Annie après le trauma - manque de subtilité. Les évolutions des deux personnages n’entrent pas suffisamment en résonance l’une avec l’autre, et l’émotion a du mal à passer. Les épreuves que traverse Annie s’enchaînent de façon presque mécanique, sans fluidité et sans toucher une véritable justesse. Schwimmer a le mérite de ne pas basculer dans le registre tragique en racontant une histoire malheureusement très réaliste. Adopter le point de vue du père, confronté à la douleur et à la culpabilité de ne pas avoir pu protéger son enfant, est un axe original. Mais le réalisateur s’efforce peut-être trop de démontrer les dangers d’Internet et reste trop basique dans son étude psychologique. _Ir.B

DRAME Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Annie fête ses 14 ans en famille et reçoit comme cadeau un ordinateur portable. Elle commence à chatter avec Charlie, un jeune adolescent qui partage sa passion pour le volley. Au fil des mois, les échanges s’intensifient et deviennent de plus en plus sexuels. Alors que les parents d’Annie sont absents, ils se rencontrent dans un centre commercial : c’est un homme d’une quarantaine d’années. Annie est prise de panique, mais il réussit à la calmer. Après lui avoir répété de nombreuses fois qu’il était fou amoureux d’elle et qu’ils avaient un lien plus fort que la différence d’âge, il entraîne Annie dans une chambre d’hôtel. Il la déshabille malgré ses résistances et la viole. SUITE... La meilleure amie d’Annie alerte une conseillère du lycée du comportement trouble de sa copine. Annie est emmenée à l’hôpital par la police, pendant que ses parents, bouleversés, arrivent. Annie se mure dans le silence et répète que Charlie l’aime. Sa mère est désemparée et son père perd pied, devenant obsédé par l’idée de tuer cet homme. L’enquête du FBI avance grâce à l’ADN récolté. Quatre filles âgées de 12 à 14 ans ont subi le même sort qu’Annie, mais l’identité de l’homme reste inconnue. En voyant leurs photos, Annie comprend enfin qu’elle aussi est une victime. Elle fait une tentative de suicide. Puis, son père et elle renouent leurs rapports. De son côté, Charlie fait le marché avec sa femme et son fils. Il semble mener une vie normale… 106 minutes. États-Unis, 2010 Sortie France : 18 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Clive Owen (Will), Catherine Keener (Lynn), Liana Liberato (Annie), Jason Clarke (Doug Tate), Noah Emmerich (Al Hart), Viola Davis (Gail Friedman), Chris Henry Coffey (Graham Weston), Spencer Curnutt (Peter), Aislinn Debutch (Katie), Olivia Wickline (Louise), Zoe Levin (Brittany), Zanny Laird (Serena Edmonds), Yolanda Mendoza (Tanya), Shenell Randall (Alexa), Jordan Trovillion (la serveuse), Brandon Molale (l’entraîneur de volley-ball), Tristan Peach (Charlie), Ruth Crawford (Grand-mère Susan), Marty Bufalini (Grand-père Cal), Inga Wilson (Tante Nicole), Jennifer Kincer (la mère de Charlie), Mary Murphy, Sandro Carotti, Milica Govich, Sarab Kamoo, Joe Sikora, Julia Glander, Lauren Hirte, Robert Axelrod, Cassi Fitch, Laura Niemi, Garrett Ryan. Scénario : Andy Bellin et Robert Festlinger Images : Andrzej Sekula Montage : Douglas Crise 1er assistant réal. : Glen Trotiner Scripte : Mary Murphy Musique : Nathan Larson Son : David Obermeyer Décors : Michael Shaw Costumes : Ellen Lutter Dir. artistique : Kerry Sanders Maquillage : Elizabeth Colburn Casting : Lindsay Graham et Mary Vernieu Production : Nu Image et Trust Productions pour Millenium Films Prod. associée : Dark Harbor Stories Producteurs : David Schwimmer, Tom Hodges, Ed Cathell, Robert Greenhut, Heidi Jo Markel et Avi Lerner Distributeur : Metropolitan Filmexport.

Visa d’exploitation : 131691. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SR SRD.

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2019 - 30- turnmeon_Mise en page 1 27/12/11 17:32 Page1

Turn Me Øn !

( Få meg på, for faen) de Jannicke Systad Jacobsen Carton de l’année en Norvège, cette adaptation réussie et pleine de charme d’un succès de librairie aborde avec un humour très libre, parfois iconoclaste, et une insouciante légèreté, la sexualité adolescente, entre fantasmes, désir et pulsions.

© Motlys

HH Adaptation d’un roman à succès d’Olaug Nilssen et premier long métrage de la réalisatrice norvégienne Jannicke Systad Jacobsen (après quelques documentaires télévisés), Turn Me Øn ! (traduction possible : “allume-moi !”) est un film aussi frais que craquant, qui dépoussière allégrement les codes propres aux films sur l’adolescence. À la fois romantique et trash, iconoclaste et convenue, mariant, non sans grâce, des thèmes et des ambiances parfois contradictoires, cette réflexion tendre et joliment décalée sur une jeunesse qui s’ennuie mais espère, mélange comédiens professionnels et amateurs, tous parfaits. Le roman dont est adapté ce film a fait scandale, tout en étant un bestseller dans un pays, la Norvège, qui, contrairement à la Suède voisine, est des plus puritains. L’ensemble pourrait revendiquer l’élégance du Virgin Suicides de Sofia Coppola (réalisatrice que Jannicke Systad Jacobsen déclare beaucoup admirer) mais sans ce désespoir latent et poisseux dont, ici, les jeunes protagonistes, plus transgressifs, plus audacieux, plus avertis, semblent affranchis. La crudité revendiquée du film est enrobée dans une forme de douceur et de délicatesse que vient nimber la belle lumière naturelle nordique et ses paysages somptueux et sauvages, qui rendent arides les chagrins, douces les passions et mélancoliques les joies. Bref, Turn Me Øn ! constitue une gracieuse audace de cinéma, et l’on aura plaisir à la soutenir. Toutefois, au vu du relatif manque d’originalité de l’œuvre, on avouera ne pas tout à fait bien comprendre ce qui a pu en faire, en Norvège, le succès absolu de l’année... _N.Z

COMÉDIE ADOLESCENTE Adultes / Adolescents

u RÉSUMÉ Alma,15 ans, vit seule avec sa mère et s’ennuie ferme à Skoomeheiden, bourgade rurale, paumée quelque part à l’Ouest de la Norvège. Travaillée par une libido déjà très exigeante, elle a parfois recourt au téléphone rose, ce dont sa mère se formalise, notamment à la vue d’une note de téléphone astronomique. Au lycée, Alma en pince pour Artur, le joli guitariste de la chorale. Un soir, lors d’une fête, elle sort prendre l’air et croit, lorqu’Artur la rejoint, qu’il lui montre son sexe. Alma fait l’erreur de le raconter aussitôt à ses amies qui, ne la croyant pas (et appuyées en cela par les dénégations d’Artur), vont désormais la traiter en paria et l’affubler d’un surnom peu flatteur. SUITE... En quelques jours, elle devient pestiférée, on ne lui parle plus, on ne l’invite plus aux anniversaires, on refuse de s’asseoir à ses côtés dans le bus. C’est Ingrid qui, parce qu’aussi amoureuse d’Artur, est à la manœuvre alors que sa sœur Sara se laisse attendrir par le désarroi d’Alma. Celle-ci n’en pouvant plus fugue vers Oslo. Elle y retrouve Maria, sœur aînée d’Ingrid et Sara qui y est étudiante ; elle la recueille et la réconforte puis Alma retourne à Skoomeheide. Artur fait alors une tentative pour revenir vers elle, mais Alma échaudée se dérobe. Au matin arrivant au lycée, Alma voit déployée sur sa façade une grande banderole sur laquelle Artur a écrit : “J’ai montré ma bite à Alma”. 76 minutes. Norvège, 2011 Sortie France : 18 janvier 2012

u GÉNÉRIQUE Avec : Helene Bergsholm (Alma), Malin Bjørhovde (Sara), Beate Støfring (Ingrid), Matias Myren (Artur), Lars Nordtveit Listau (Kjartan), Henriette Steenstrup (la mère d’Alma), Jon Bleiklie Devik (Sebjørn), Julia Bache-Wiig (Maria), Per Kjerstad (la voix du téléphone rose), Julia Schacht (Elisabeth), Arthur Berning (Terje), Arve Guggedal (Einar), Thomas Opheim (Børre), Hildegunn Ommedal (Magda), Ronny Brede Aase (le pilote de la remorque), Finn Tokvam (lui-même), Ole Johan Skjelbred-Knutsen, Yngve Hustad Reite. Scénario : Jannicke Systad Jacobsen D’après : le roman Få meg på, for faen d’Olaug Nilssen (2007) Images : Marianne Bakke Montage : Zaklina Stojcevska 1er assistant réal. : Daniel Malmén Musique : Ginge Anvik Son : Hugo Ekornes Costumes : Sabina Cavenius Dir. artistique : Sunniva Rostad Maquillage : Janne Røhmen Casting : Ellen Michelsen Production : Motlys Producteurs : Brede Hovland, Sigve Endresen et Frida Ohrvik Distributeur : Zootrope Films.

Visa d’exploitation : 131877. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2019 - 31- Notules3-1_Mise en page 1 27/12/11 21:35 Page1

En bref... À travers les branches d’un arbre de Daniel Duqué

Scén. : Daniel Duqué, Amina Mehiri et Sybille Jusnee Im. : Luc Walpoth Mont. : Daniel Duqué et Amina Mehiri Mus. : Jean-François Albelda et Mohamed el Mougi Dist. : Merlin Films. Avec : Philippe Le Gall (Pierre), Laetitia Spigarelli (Sofia), Claude Thébert (Alphonse), la voix de Dominique Favre-Bulle.

Pierre et Sofia, habitent en bordure de la campagne. Leur père est mort récemment. Traumatisé, Pierre essaie de se souvenir de leur enfance, interpellant sa sœur. Le premier long métrage du cinéaste suisse D. Duqué nous entraîne dans une errance à la recherche des multiples manifestations du souvenir : les photos d’abord, la voix ensuite. Il n’y a pas que ses personnages que Duqué fait voyager dans un terrain vague. Le scénario est mince et c’est l’ennui qui rôde. On peine à s’intéresser au vague à l’âme de Pierre, comme on s’interroge sur le comportement de sa sœur. Ils devraient nous toucher, mais ils agacent surtout. Sans ressort dramatique, le film est un objet sensoriel, où chaque parole, chaque image doit faire sens. Mais quel sens leur donner ? La fragilité du propos, qui constitue la singularité du film, son charme aussi, risque donc de laisser une partie du public un peu désemparée. _M.Q.

Ici-bas de Jean-Pierre Denis

Scén. : Jean-Pierre Denis, Yvon Rouve et Richard Boidin Im. : Claude Garnier Mont. : Laurence Badewin Mus. : Michel Portal Dist. : Pyramide. Avec : Céline Sallette (Sœur Luce), Éric Caravaca (Martial), François Loriquet (Victor), Maud Rayer (la Mère Supérieure).

Périgord, 1916. Luce, une petite fille fascinée par une source, discute avec le curé du village. 1943. Devenue Sœur Luce, elle soigne les blessés dans un dispensaire. Un jour, elle est appelée au chevet de Martial, un résistant blessé. Troublée, elle confie le lendemain à la Mère Supérieure avoir vue une image pieuse dans le visage de cet homme. Martial, en convalescence, quitte le refuge des maquisards pour s'installer au village. C'était en fait l'aumônier du

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village, chez qui l'action l'a emporté sur la foi. Sœur Luce semble de plus en plus attirée par lui. Après Les Blessures assassines (qui avait révélé Sylvie Testud en 2000), Ici-bas est son quatrième long métrage, qui s'appuie sur un fait divers datant de 1943. Cette histoire mêle, de façon assez troublante, les thèmes de la foi, de la confiance et de l'amour. La situation historique en renforce bien sûr les enjeux, puisqu'il s'agit de définir quelle forme donner à sa croyance en des jours meilleurs : celle qui passe par la prière, ou celle qui passe par l'action “terroriste”. Ce terreau narratif et psychologique était peut-être trop riche, trop pesant, trop théorique : le film semble ne jamais prendre vie. Sa lenteur, ses cadrages presqu'éculés à force d'être sobres et sa musique aux timbres froids et austères le ramènent sans cesse à son simple sujet : les doutes de l'héroïne, dont le cheminement mental constitue, par son côté mystérieux et inexplicable, la clé de voûte de l'histoire. Ici, passion charnelle et passion religieuse sont opposés de manière schématique, dans une alternance de scènes où le personnage assume puis regrette ses sentiments de manière cyclique. Le blanc (prières, confessions) et le noir (désir physique, assimilé à des images du diable) sont trop prononcés; et, l'alternance ne faisant pas le mélange, ce sont toutes les tonalités mystiques de gris qui nous échappent. _F.B-P.

En 1979, les forces islamistes qui s'étaient distinguées lors de la révolution iranienne, aux côtés des forces ouvrières, se sont attirées les faveurs des grands partis politiques à l'intérieur, et des services secrets anglo-saxons à l'extérieur. C'est ainsi que leur accession au pouvoir fut facilitée. Après un dégel à la fin des années 1980, le régime iranien s’est durci en 2005 avec l’élection d’Ahmadinejad. Grâce aux nouvelles technologies, les jeunes vont faire trembler le pouvoir le 12 juin 2009. C’est ce que met en avant le film de A.S. Ahadi. L’intérêt, ici, réside dans sa volonté de traduire une révolte qui a bénéficié des outils numériques par les moyens de l’art numérique. Il en va ainsi de l’animation (qui se réfère à Valse avec Bachir), ainsi que l’utilisation de vidéos qui furent échangées sur les réseaux sociaux. Des images a priori antinomiques, qui trouvent une certaine alchimie grâce au rendu impressionniste des vidéos pixélisées. Malgré une approche non manichéenne, le documentaire pèche dans sa simplification de la violence d’État, ici primitive. L’on sait pourtant que ce dernier est à l’image de sa population : moderne, organisé et très au fait des outils numériques... _G.M.

Le Printemps de Téhéran (The Green Wave) de Al Samadi Ahadi

Scén. : Ali Samadi Ahadi et Oliver Stoltz Im. : Ali Samadi Ahadi et Peter Jeschke Mont. : Andreas Menn et Barbara Toennieshen Mus. : Ali N. Askin Dist. : DistriB Films.

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2019 - 32- 4e couv_Mise en page 1 27/12/11 18:22 Page1

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SORTIES DU 4 JANVIER

Les Acacias de Pablo Giorgelli .............................................................................. HHH Anonymous de Roland Emmerich ............................................................................ HH Goobye Mister Christie de Phil Mulloy .................................................................... HH Take Shelter de Jeff Nichols ................................................................................. HHH Une nuit de Philippe Lefebvre ................................................................................... HH Une vie meilleure de Cédric Kahn ........................................................................... HH En bref... À l’âge d’Ellen de Pia Marais ...................................................................................... H Beau rivage de Julien Donada ..................................................................................... H Freakonomics (Collectif) ............................................................................................. H Le Pacte de Roger Donaldson ...................................................................................... H SORTIES DU 11 JANVIER

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La Colline aux coquelicots de Goro Miyazaki .......................................................... HH Dans la tourmente de Christophe Ruggia ................................................................ HH 10 jours en or de Nicolas Brossette ......................................................................... HH Il n’y a pas de rapport sexuel de Raphaël Siboni ................................................. HHH Intruders de Juan Carlos Fresnadillo ........................................................................ HH J. Edgar de Clint Eastwood ....................................................................................... HH Louise Wimmer de Cyril Mennegun ......................................................................... HH Les Nouveaux chiens de garde de Gilles Balbastre et Yannick Kergoat ................. HHH Parlez-moi de vous de Pierre Pinaud ...................................................................... HH Portrait au crépuscule de Anguelina Nikonova ........................................................ HH Le Projet Nim de James Marsh ............................................................................. HHH En bref... Dubaï Flamingo de Delphine Kreuter .......................................................................... m El Gusto de Safinez Bousbia ..................................................................................... HH L’Orpheline avec en plus un bras en moins de Jacques Richard ............................... H SORTIES DU 18 JANVIER

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L’Amour dure trois ans de Frédéric Beigbeder ........................................................ HH Duch, le Maître des Forges de l’Enfer de Rithy Panh .......................................... HHH Et si on vivait tous ensemble ? de Stéphane Robelin ................................................. H Millénium de David Fincher ..................................................................................... HH Trust de David Schwimmer ....................................................................................... HH Turn Me Øn ! de Jannicke Systad Jacobsen ............................................................... HH En bref... À travers les branches d’un arbre de Daniel Duqué .................................................. H Ici-bas de Jean-Pierre Denis ........................................................................................ H Le Printemps de Téhéran de Ali Samadi Ahadi ........................................................HH

AUTRES FILMS... 4 janvier 2012 11 janvier 2012 18 janvier 2012

Africa > Visa : 131758 - 1,77 - Son : n.c. - Dist. : Damned Distribution Un jour mon père viendra > Visa : 122072 - Scope - Dolby SR SRD - Dist. : Gaumont The Darkest Hour > Visa : 131501 - Scope (2D / 3D) - Dolby SR SRD DTS - Dist. : 20th Century Fox Ma première fois > Visa : 127074 - Scope - Dolby SRD - Dist. : Mars Distribution

PROCHAIN NUMÉRO LE 25 JANVIER


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