Fiches du Cinéma n°2059

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Bird People de Pascale Ferran n°2059 La Chambre bleue de Mathieu Amalric Deux jours, une nuit de Jean-Pierre & Luc Dardenne Tristesse Club de Vincent Mariette

Rencontre avec Jaime Rosales

N°2059 • 7 MAI 2014 • SORTIES DES 7 / 14 / 21 / 28 MAI / 4 JUIN 2014 • 6,00 €


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H Ali a les yeux bleus (n°2058)

autres c otes du comit é de réda ction

Michael Ghenna m Nicolas Marcadé Marine Quincho n Marie To utée

Thomas Fouet

Margue rite Deb iesse Angèle Essahli

Delphin e Cazu

Michel B erjon

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Les Étoiles de la Rédaction

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L’Armée du salut (n°2059) Au nom du fils (n°2059)

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Barbecue (n°2058)

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Bird People (n°2059)

Dans la cour (n°2058) De guerre lasse (n°2059)

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Les Drôles de poissons-chats (n°2059)

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L’Été des poissons volants (n°2058)

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Être et devenir (n°2059) Les Femmes de Visegrad (n°2058)

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La Frappe (n°2059)

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Gaudí (n°2059)

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Joe (n°2058)

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Man of Tai Chi (n°2058)

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Night Moves (n°2058)

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Les Poings contre les murs (n°2059) HH

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Ugly (n°2059)

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les films préférés de la rédaction

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We Are the Best ! (n°2059)

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24 jours (n°2058) La Voie de l’ennemi (n°2059)

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Tristesse Club (n°2059) Les Trois sœurs du Yunnan (n°2058)

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3x3D (n°2058)

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Tom à la ferme (n°2058)

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Sous les jupes des filles (n°2059) States of Grace (n°2058)

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Sarah préfère la course (n°2059)

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Pas son genre (n°2058) Le Promeneur d’oiseau (n°2059)

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Michael Haneke (n°2059) Noor (n°2058)

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Last Days of Summer (n°2058) May in the Summer (n°2059)

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Dom Hemingway (n°2059) HH

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Deux jours, une nuit (n°2059)

D’une vie à l’autre (n°2059)

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Le Dernier diamant (n°2058)

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Charlie Countryman (n°2059) Conversation animée avec Noam Chomsky (n°2058)

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HHH un bon film

HHHH un excellent film

§ le coup de cœur


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édito

La voix des petits oiseaux LES FICHES DU CINÉMA 69, rue du Faubourg Saint Martin 75010 Paris Administration : 01.42.36.20.70 Rédaction : 01.42.36.10.65 Fax : 09.55.63.49.46 .............................................................. RÉDACTEUR EN CHEF Nicolas Marcadé RÉDACTEUR EN CHEF ADJOINT SECRÉTAIRE DE RÉDACTION Michael Ghennam redaction@fichesducinema.com .............................................................. ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO Grégory Auzou, Anne Berjon, Michel Berjon, Isabelle Boudet, Delphine Cazus, Jef Costello, Isabelle Danel, Marguerite Debiesse, Thomas Fouet, Michael Ghennam, Roland Hélié, Cyrille Latour, Nicolas Marcadé, Pierre-Julien Marest, David Nathanson, Marine Quinchon, Gaël Reyre, Chloé Rolland, Angélique Saget, Ghislaine Tabareau(-Desseux), Marie Toutée, Nathalie Zimra. Les commentaires des «Fiches» reflètent l’avis général du comité ..............................................................

PRÉSIDENT Cyrille Latour ADMINISTRATRICE Chloé Rolland administration@fichesducinema.com TRÉSORIER Guillaume de Lagasnerie CONCEPTION GRAPHIQUE 5h55 www.5h55.net IMPRESSION Compédit Beauregard 61600 La Ferté-Macé Tél : 02.33.37.08.33 .............................................................. DÉPÔT LÉGAL Mai 2014 COMMISSION PARITAIRE 0315 G 86313 - ISSN 0336-9331 «Les Fiches du Cinéma». Tous droits réservés. Toute reproduction même partielle des textes est soumise à autorisation. Photo de couverture : Bird People (Diaphana) © Carole Bethuel WWW.FICHESDUCINEMA.COM

À force de se plaindre de ne plus jamais trouver ce qu'on cherche au cinéma, on peut finir par se demander ce qu'on attend des films. Et puis parfois on en voit un - ça peut s'appeler De la guerre si on est en 2008, Holy Motors si on est en 2012, Bird People si on est aujourd'hui - et on se dit voilà : par exemple ça. Pas “seulement” ça. Pas “idéalement” ça. Mais quelque chose comme ça. Tout d'un coup on se rappelle. Le cinéma c'était vraiment bien quand un film c'était un peu comme ça : quelque chose d'authentique et perfectible, avec des yeux qui regardent et une bouche qui parle ; et puis avec une manière de marcher particulière, un drôle d'accent, des empreintes digitales dans chaque photogramme. C'était bien quand on recevait les films comme des messages, dont on sentait qu'ils ne flottaient pas dans l'air, mais qu'ils étaient émis depuis quelque part, et plus précisément depuis quelqu'un. Je ne sais pas si Bird People est un grand, ou même juste un bon, film. Et je ne sais pas non plus si c'est très important. On en voit presque toutes les semaines des longs métrages qui sont des bons films, comme il y a des bons élèves, des bons Français, des bons amis, des bons chiens. On les regarde passer, on leur donne une bonne note, et puis on les oublie. Ici il y a des erreurs, des longueurs, des coups de poker pas toujours réussis, mais ce qui compte bien davantage que tout le reste, c'est qu'il y a “ça” : un petit filet de voix intime, qui tout d'un coup se retrouve branché sur des haut-parleurs. Ce qui est précieux, c'est qu'en voyant Bird People, on sait un peu à quoi pense Pascale Ferran quand elle fume une cigarette sur le trottoir, devant un restaurant. Comment elle regarde la rue, les gens qui passent, les moineaux. Quel genre de rêves elle broie la nuit, quand elle ne dort pas. Le type d'images qui lui passent en tête quand elle ferme les yeux, le front contre la vitre dans un autobus... Aujourd'hui, quand on voit un film, le plus souvent, tout ce que l'on sait de son réalisateur, c'est quel genre de films il aime bien et dans quelle peau de cinéaste il se rêve en se rasant. C'est pour ça que le petit filet de voix, quand il se fait entendre, c'est comme un filet d'eau fraîche. Et alors après, toutes les questions semblent un peu subsidiaires... Dans quel genre s'inscrit ce film exactement ? Chronique ? Fantaisie ? Fantastique ? Conte ? Cinéma social ou même politique ? Film intello-chiant ou bien film de genre ? Allez savoir... Au fond, vous, dans quel genre pensez-vous vous inscrire exactement ? Rigolo ? Intellectuel ? Mélancolique ? Rêveur ? Cartésien ? Plus probablement, ça dépend des jours, des heures, des moments. Et si les films sont comme ça aussi, avec leurs humeurs et leurs variations climatiques, c'est très bien. C'est sans doute que c'est le signe distinctif des entités vivantes... Étant un film à part, Bird People n'a trouvé sa place au festival de Cannes que dans une sélection dite parallèle. C'est sans doute dommage. Et c'est peut-être tant mieux. Car on peut parier que ce sera gai d'entendre, quelque part au milieu du tohu-bohu, voletant au-dessus de l'éternelle parade des animaux du grand cirque cannois - vieux éléphants placides, jeunes fauves aux dents longues... -, le pépiement libre et joyeux de ce singulier petit oiseau. NICOLAS MARCADÉ


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Rencontre avec Jaime Rosales À l’occasion de l’événement Wang Bing / Jaime Rosales Cinéastes en correspondance au Centre Georges Pompidou

“Une éthique de la résistance” Notre première rencontre avec Jaime Rosales, à l'occasion de la sélection cannoise, en 2012, de son quatrième long métrage, le splendide Rêve et silence, nous avait laissé le souvenir d'un auteur affable et modeste. Le Centre Pompidou présentant en ce moment-même la "correspondance filmée" du cinéaste avec Wang Bing, et lui consacrant dans le même temps sa toute première rétrospective, il nous a semblé tout naturel de poursuivre la conversation entamée deux ans plus tôt, autour notamment des trois courts métrages composant ladite correspondance. Dans le premier d'entre eux, T4 - Barajas Puerta J50, Rosales braque son téléobjectif – auquel il avait déjà eu recours dans son troisième long métrage, le radical Un tir dans la tête – sur les passagers d'un aéroport, le deuxième (Happy Valley) voyant Wang Bing réaliser ce qui s'avérera être une introduction aux Trois sœurs du Yunnan, sorti ce mercredi dans les salles françaises. Dans Red Land, enfin, Rosales emboîte le pas de l'auteur d'À l'ouest des rails et se penche sur l'histoire de l'industrie de son pays, en filmant une mine désaffectée transformée en attraction touristique. Bel échange que celui noué par les deux cinéastes – par ailleurs amis –, et sur lequel revient avec nous Rosales. Signalons que, par un heureux hasard du calendrier, l'auteur sera présent à Cannes cette année encore, dans le cadre de la sélection Un Certain Regard, avec son cinquième long métrage, La Belle jeunesse.

Vous avez rencontré Wang Bing en 2004 à la Cinéfondation du festival de Cannes. Puisqu'aucun des deux ne parle la langue de l'autre, le cinéma est-il devenu votre langage commun ? À la Cinéfondation, nos conversations se limitaient à "good" ou "no good". Tel film : "good". Tel autre : "no good". Mais au fond, c'est bien cela parler de cinéma : j'aime ou je n'aime pas. Que dire de plus ? Depuis lors, Wang Bing est devenu un ami. Il connaît ma femme et mes enfants, mais notre relation se recentre en effet quasi exclusivement sur le cinéma, y compris désormais avec l'aide d'un interprète. À première vue, vos films sont différents. En quoi vous sentez-vous proche de lui ?

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Je crois que nous partageons la même éthique de la résistance. Une éthique qui peut prendre des formes différentes : lui le documentaire, moi la fiction ; lui le numérique, moi l'argentique. Pour autant, nos préoccupations sont les mêmes. En jouant sur la durée, il casse le formatage à l'œuvre dans le cinéma. À ma manière, j'essaie de le faire en travaillant sur des formes filmiques spécifiques. Nous travaillons dans deux univers extrêmes, certes - il tourne, par exemple, beaucoup beaucoup plus que moi ! -, mais ces extrêmes finissent par se rejoindre.

L'éthique de la résistance dont vous parlez, correspondelle également à une forme d'engagement politique, ou disons un engagement face au réel ?

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Oui. Parce que finalement, chacun réagit à ce qu'il voit. Nos films sont des témoignages, un état des lieux. Je ne sais plus qui a donné cette définition : l'art consiste soit à dire comment sont les choses, soit comment elles peuvent être, soit comment elles doivent être. Personnellement, je suis incapable de dire comment doivent être les choses. Je n'adhère pas à cette forme de cinéma d'intellectuels engagés qui, en dehors de leurs films, portent une parole médiatique, un discours politique, militant. Je n'ai pas ces certitudes. Par contre, je porte un regard sur la société, sur les pouvoirs, sur la façon dont les choses sont organisées. Un regard critique. Mes films s'attachent à montrer le plus précisément possible comment les choses sont.

D'où la question de la distance et de la durée, deux éléments très importants dans vos films comme dans ceux de Wang Bing... Ce sont les deux questions clé du cinéma, pour moi. À quelle distance regarde-t-on ? Quelle durée donne-t-on à un plan, pendant combien de temps conserve-t-on ce regard ? Je peux choisir un plan rapproché, un plan général, ou opter pour un plan rapproché de loin, comme je l'ai fait

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“ Trouver la bonne distance, c’est trouver le bon regard. Autrement dit : montrer en portant un regard critique. ” en utilisant le téléobjectif dans Un tir dans la tête notamment. Trouver la bonne distance, c'est trouver le bon regard, à mon avis. Autrement dit : montrer en portant un regard critique.

Wang Bing estime que l'on ne parle jamais mieux du monde que depuis l'endroit où l'on se trouve. En l'occurrence, en temps que cinéaste chinois, son sujet est obligatoirement la Chine et il se verrait mal se dé-territorialiser. Pour avoir réalisé vos premiers courts métrages (diffusés à l'occasion de la manifestation "Cinéastes en correspondance") à Cuba et en Australie avant de tourner en Espagne, comment considérez-vous cette réflexion ? Quand j'ai tourné à Cuba, où j'étudiais alors, j'avais à cœur de comprendre le mieux possible les habitants et leurs rapports avec la réalité du pays. En Australie également. Si Rêve et silence a été tourné en partie en France, c'est parce qu'il y était question d'un couple d'Espagnols travaillant à

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forcément plus construit, plus rationnel, quand nos films ressemblent davantage à des essais poétiques -, qui s'intitule T4 - Barajas Puerta J 50. Wang Bing a réalisé, lui, au même moment, Happy Valley. L'échange aurait pu s'arrêter là, mais j'ai choisi de le prolonger en tournant Red Land en 2011 qui, pour le coup, répond directement à son film.

De fait, ce film, tourné dans l'ancienne mine du Rio Tinto, rappelle plus clairement le cinéma de Wang Bing... Oui, je l'ai consciemment fait "à la manière de", en tournant comme Wang Bing, seul, avec une caméra, dans un lieu qui évoque son cinéma. Cette "correspondance" était pour moi l'occasion de tenter ce type d'expérimentation.

“ En tournant, je me demandais : est-ce que la Chine que filme Wang Bing ne va pas devenir, comme ces mines espagnoles, une sorte de parc d’attraction ?. ”

Paris. Je partage donc totalement la réflexion de Wang Bing. Il faut essayer de filmer ce que l'on connaît, sinon on risque d'être superficiel. Cela dit, le monde actuel est devenu beaucoup plus petit et la question se pose peut-être différemment...

Comment est née votre correspondance filmique avec Wang Bing, que présente actuellement le Centre Pompidou ? Au départ, il s'agit d'un projet du CCCB, le Centre Culturel Contemporain de Barcelone, qui propose des rencontres entre un cinéaste espagnol et un cinéaste étranger, à travers un échange de lettres filmées. J'ai tout naturellement choisi de le faire avec Wang Bing. En 2009, j'ai écrit la première "lettre" - ou plutôt la première "pièce", car je ne suis pas sûr que l'on puisse transposer tels quels, au cinéma, les principes d'un échange épistolaire,

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Et, du fait certainement de cette expérimentation, la question politique, qui traverse votre cinéma depuis La Horas del dia, n'a jamais été aussi frontalement abordée. Quand, dans À l'ouest des rails, Wang Bing décrivait la fin d'une industrie déclinante, vous montrez, avec Red Land, ce qui pourrait être l'étape d'après : une sorte de muséification désincarnée... En tournant, je me demandais en effet : est-ce que la Chine que filme Wang Bing ne va pas devenir à son tour, comme ces mines espagnoles, une sorte de parc d'attraction ? Je ne sais pas s'il vaut mieux vivre l'étape précédente ou l'étape actuelle. Nous vivons tout de même dans un confort matériel qui a du bon. Mais peut-être que dans cette recherche de confort et de sécurité, certaines valeurs humaines importantes se sont dissoutes... Les enfants qui visitent aujourd'hui les mines de Rio Tinto sont certainement des descendants de mineurs et ils ne semblent pas s'en souvenir, s'en soucier, s'y intéresser... Il y a là l'idée d'un monde qui disparaît et il est forcément un peu triste de le constater. Quelle conséquence cette correspondance filmée peutelle avoir pour la suite ? Happy Valley annonce Les Trois sœurs de Yunnan, le dernier film de Wang Bing, et T4 Barajas Puerta J 50 rappelle votre propre long métrage Un tir dans la tête par son utilisation du téléobjectif. Est-ce que, de la même manière, Red Land pourrait être, pour vous, un nouveau point de départ ? J'y ai pensé pendant un temps. Ces mines abandonnées m'ont tellement fasciné que j'ai commencé à y imaginer une fiction. Et puis, finalement, j'ai abandonné l'idée. Ou plutôt, l'idée n'a pas tenu face aux autres films que j'avais en tête. Je dis souvent que, pour me lancer dans un nouveau projet, il faut que je puisse penser clairement l'articulation de trois données-clés : l'histoire, la forme du film et son économie. Ce n'est que quand ces trois éléments-là s'assemblent que je peux vraiment démarrer. Les films que vous avez réalisés pour cette correspondance offrent un bon aperçu de ce qu'est votre cinéma, et notamment votre rapport à cette question de la forme. T4... est tourné en un plan séquence au téléobjectif, dissociant prise de son et prise de vue, et Red Land est composé de cadres fixes d'où, éventuellement, sortent les protagonistes...

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“ Si le cinéma veut être une analogie ou un portrait de la vie, il faut laisser une place pour que le hasard se présente. ”

Tout cela est très réfléchi, en amont. Il y a ce que je m'autorise et ce que je ne m'autorise pas. Mes films sont très différents les uns des autres, mais ils ont en commun d'être pensés avec des règles précises. Des règles que je m'impose et que je respecte scrupuleusement, qui donnent au film un sens et une unité. Le cinéma, c'est cela : une praxis, une pratique, en relation avec un budget. L'utilisation du téléobjectif est, pour le coup, une pratique assez radicale. Depuis, j'en reviens davantage à un cinéma, disons, moderne, avec toujours une forme forte et des cassures, mais tout de même plus hospitalier pour un spectateur normal, ou "presque" normal.

Une fois fixées ces règles, quelle est la part d'improvisation, de liberté, que vous vous autorisez ? T4..., par exemple, témoigne aussi des "accidents" de la prise de vue... J'essaie de maîtriser pas mal de facteurs, mais il est tout autant fondamental pour moi de laisser de l'espace pour la surprise. Sans imprévu, le résultat est forcément mauvais, parce que la vie, elle, est faite de surprises. Et, si le cinéma veut être une analogie ou un portrait de la vie, il faut laisser une place pour que le hasard se présente. Par exemple, au départ, le pivot de T4... était une affiche sur la violence conjugale que j'avais repérée depuis six mois dans l'aéroport. Manque de chance, la veille du tournage, l'affiche a été enlevée ! Ma première réaction a été la panique : impossible de faire le film sans cet élément-là ! Et c'est là qu'intervient la question de l'argent : ma productrice me rappelle que nous n'avons l'autorisation de tourner que pour une heure, que nous avons le matériel, que les techniciens attendent, etc., bref, qu'il faut tourner coûte que coûte. Alors, nous nous sommes adaptés. Nous avons composé avec l'imprévu. Dans Red Land, vous assurez vous-même la prise de vue et le montage. Au moment de la sortie de Rêve et silence, votre long métrage suivant, vous nous aviez expliqué que vous aviez justement laissé toute la question du cadrage et du montage à vos chef opérateur et monteur. Est-ce parce que vous maîtrisez suffisamment votre cinéma que vous pouvez ainsi vous en remettre à d'autres ? Ce serait plutôt l'inverse : si je prends un bon chef opérateur et un bon monteur, c'est qu'ils vont faire bien mieux que je ne saurais le faire ! De plus en plus, je me rends compte que je peux profiter du talent des autres. La meilleure vertu que je possède, en tant que réalisateur, est, je crois, de savoir choisir mes collaborateurs.

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De quoi casser l'image habituelle du réalisateur tyrannique et autoritaire... Mais je renforce celle du cinéaste angoissé, insécure, pétri de doute... Disons, en effet, que je n'aime pas du tout l'image romantique du réalisateur omniscient qui contrôle tout. Une question un peu plus générale. La société de production espagnole Alta Films a déposé le bilan il y a quelques mois, et l'on a pu notamment entendre des réactions enfiévrées de Pedro Almodovar pour interroger les pouvoirs publics quant aux capacités de financement, de production du cinéma espagnol. À l'heure où ces questions agitent aussi la France, comment est-ce que vous vous positionnez ? Là encore, je n'ai pas de certitudes, de leçons à donner... Mon prochain film, La Belle jeunesse, que j'ai dû financer d'une façon très particulière, traite de cette question. Mais, au-delà du film, je n'ai pas de "discours"...

Propos recueillis à Paris par Thomas Fouet et Cyrille Latour Wang Bing / Jaime Rosales Cinéastes en correspondance (Exposition et rétrospective) Au Centre Pompidou jusqu’au 26 mai 2014

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Brick Mansions de Camille Delamarre Motivé par la vengeance, un policier entre dans un ghetto pour désamorcer une bombe à neutrons. Ne se prenant pas trop au sérieux, ce film d’action efficace et schématique est vendu comme le dernier rôle interprété par Paul Walker (Fast & Furious).

© Philippe Bossé - Sébastien Raymond / EuropaCorp - Brick Mansions Prod.

H Damien devient shérif à Brick Mansions. On ne va pas se lamenter parce que les décors de Detroit, pourtant impressionnants, ne sont pas aussi beaux que ceux d’Only Lovers Left Alive, ni parce que la dénonciation du capitalisme ne dépasse pas le stade du “tous pourris”. Ce n’est pas la peine, on est dans un film d’action pur jus, la subtilité n’est pas au programme. La première séquence est une enfilade de cascades époustouflantes réalisées à un rythme d’enfer dans un immeuble. Ensuite, cela se calme un peu, mais il y a très régulièrement des bagarres, des fusillades et des poursuites en voitures. Ce remake de Banlieue 13, est de nouveau écrit et produit par Luc Besson. C’est transposé cette fois à Detroit et tourné à Montréal par un monteur, avec un nouveau titre (car 2013 est dernière nous) et de nouveaux acteurs. En fait c’est encore David Belle qui interprète Leïto ou plutôt Lino, un délinquant franco-antillais. Son partenaire Damien est incarné par Paul Walker, le beau gosse (Skip Martin dans Pleasantville) attiré par le film noir (Une virée en enfer) et devenu célèbre en interprétant Brian O’Conner (dans les Fast & Furious) à sept reprises, la dernière grâce au renfort de ses frères après son décès consécutif à un accident de voiture. On retrouve aussi le bûcheron canadien déjà aperçu comme géant dans 300 et comme Hobo dans T.S. Spivet. Loin de la caricature, le chef de gang n’est autre que le rappeur RZA, ancien collaborateur de Jarmusch ou de Tarantino (qui l’a aussi aidé à produire sa première réalisation sortie en 2013, L’Homme aux poings de fer) : il s’avère in fine plus intelligent et humain que ses hommes, mais cela ne suffit pas à transcender le divertissement. _M.B.

ACTION Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Paul Walker (Damien Collier), David Belle (Lino), Goûchy Boy (K2), Catalina Denis (Lola), Robert Fitzgerald Diggs [RZA] (Tremaine Alexander), Ayisha Issa (Rayzah), Carlo Rota (George le Grec), Andreas Apergis (Berringer), Richard Zeman (le major Reno), Robert Maillet (le Yéti), Bruce Ramsay (le maire), Frank Fontaine (le grand-père Collier), Chimwemwe Dave Miller (le comptable), Bradshaw Anderson (Roy), Ryan Trudeau (Floyd), Ron Lea (le lieutenant), Carolina Bartczak (Clara, l’infirmière), Danny Blanco-Hall (Bill, l’homme d’affaires), Jade Hassouné (Peter), Anatoly Zinoviev (le Muet), Marc-André Boulanger (T-Rex), Kwasi Songui (Big Cecil). Scénario : Luc Besson D’après : le film Banlieue 13 de Pierre Morel (2004) Images : Christophe Collette Montage : Carlo Rizzo et Arthur Tarnowski 1ers assistants réal. : Sean Dwyer et Stéphane Moreno Carpio Scripte : Elizabeth Tremblay Musique : Marc Bell Son : Donald Cohen, Marie-Claude Gagne, Frédéric Dubois, Dominic Despins et Didier Lozahic Décors : Jean A. Carrière Effets spéciaux : Ryal Cosgrove Effets visuels : Martin Lipmann, Raphaël Kourilsky et Kevin Berger Maquillage : Joan Patricia Parris Casting : Andrea Kenyon et Randi Wells Production : EuropaCorp et Transfilm International Producteurs : Luc Besson, Claude Léger et Jonathan Vanger Distributeur : EuropaCorp.

98 minutes. France - Canada, 2014 Sortie France : 23 avril 2014

u RÉSUMÉ Le maire de Detroit veut un grand projet immobilier à la place de Brick Mansions, ghetto qu’il veut raser. Or Tremaine, le trafiquant qui en a pris le contrôle, a volé une bombe à neutrons. Il est décidé d’infiltrer un policier, Damien Collier, qui dispose de 3 heures pour désamorcer l’engin. Damien accepte cette mission suicide pour venger son père, tué par Tremaine. Déguisé en prisonnier, Damien aide Lino (l’ennemi intime de Tremaine, qui lui a ravi son ex-femme, Lola) à s’évader lors d’un transfert. Lino comprend qu’il est flic. Les bagarres ne les départageant pas, ils font alliance et pénètrent, en se constituant prisonniers, dans l’antre de Tremaine qui, en homme d’affaires avisé, demande 30 millions de dollars pour désamorcer la bombe... fixée sur un missile pointé sur le centre-ville. Le maire prétend ne pas avoir l’argent, argent que Damien cache pour gagner du temps. SUITE... Damien et Lino parviennent à s’évader pour libérer Lola - attachée au missile... Alors que le gang est à leurs trousses, ils arrivent jusqu’à la bombe. Or, Tremaine vient de renoncer à en déclencher la mise à feu, préférant le business au génocide. Trouvant le code pour la désamorcer, Lino flaire le piège et se bat avec Damien jusqu’à l’expiration du compte à rebours. Avec ce code, la bombe aurait explosé ! Damien apprend que Tremaine avait été témoin de l’assassinat de son père... par ses collègues véreux. Ils partent tous à la mairie pour piéger le maire.

Visa d’exploitation : 136762. Format : n.c. - Couleur - Son : Dolby SRD. 329 copies (vo / vf).

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2059 - 09- jemappellehmmm_Mise en page 1 30/04/14 16:59 Page1

Je m’appelle Hmmm... de Agnès Troublé dite agnès b. Road-movie arty et complaisant, le premier film d’agnès b. déconcerte. Si la sincérité de la démarche ne fait aucun doute, le regard porté sur les couches populaires laisse songeur. Reste la présence étonnante, dans son premier rôle, de l’artiste Douglas Gordon.

© Love Streams agnès b. Prod.

m Étrange film à vrai dire que celui d’agnès b., signé de son vrai nom, Agnès Troublé, créatrice de prêt-àporter au renom international et soutien financier d’une pléiade de cinéastes. Je m’appelle Hmmm... navigue à vue entre facture amateuriste, pose arty et naturalisme sordide, redoublant de procédés chichiteux (arrêts sur image dont on peine à deviner le sens), fausses bonnes idées (“Aujourd’hui, je vois tout en noir”, lance le personnage de Bonnaffé lorsque l’image vire au Noir & Blanc) et répliques verbalisant littéralement l’humeur des personnages. “Je ne vais pas bien”, dira ainsi celui qui, plan après plan, traîne effectivement son mal-être. “Je n’ai pas assez confiance en moi”, renchérira celle dont le moindre geste trahissait jusque-là le manque d’assurance. Si le récit gagne un peu à s’aérer en prenant la route, il se distingue surtout par sa perception, plutôt embarrassante, des couches populaires, piliers de comptoir n’ayant jamais vu la mer, si l’on en croit le film. Restent la présence de Douglas Gordon, artiste connu notamment pour son 24 Hour Psycho (ralentissement, sur une durée de 24 heures, du Psychose d’Alfred Hitchcock), dont c’est le tout premier rôle au cinéma, et l’ambition, louable quoique improductive, de s’en tenir au seul fil de ses envies. Du récit buissonnier - la moindre des choses pour un road-movie - qui en résulte, ressort hélas le sentiment que les acteurs sont livrés à eux-mêmes (voir ainsi se débattre, dans un rôle certes délicat de père incestueux, l’excellent Jacques Bonnaffé, a de quoi déconcerter). Et que, du philosophe Toni Negri à Grégoire Colin, les seconds rôles sont ici convoqués en tant que simples “guests”. _T.F.

ROAD-MOVIE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Lou-Lélia Demerliac (Céline), Sylvie Testud (la mère), Jacques Bonnaffé (le père), Douglas Gordon (le camionneur), Noémie Ducourau (la sœur), Émile Gautier (le frère), MarieChristine Barrault (la grand-mère), Jonathan Waite, Benn Northover et Peter Rawes (les routiers britanniques), Christian Granger (le patron du restaurant), Hadrien Bouvier (le garçon qui fume), Franck Beckmann (Michel), Jean-François Garreaud (le délateur), Hugo Cechura (le garçon moqueur), Max Hayter, Gaël Foucher, François Briault, Frans Boyer, Julie Meunier, Isabelle Leprince, Rose Chasseriau, Maxime Mikolajczak, Pierre Renverseau, Aya, Dakei, Antonio Negri, Jean-Pierre Kalfon, Grégoire Colin, Georges-Henri Guedj, Anne-Gaëlle McNab, Jen-Cri, les voix de Philippe Peythieu et Ersin Leibowitch. Scénario : Agnès Troublé, avec la collaboration de Jean-Pol Fargeau Images : Jean-Philippe Bouyer Montage : Jeff Nicorosi 1er assistant réal. : Michaël Weill Scripte : Francine Cathelain Musique : David Daniels et Sonic Youth Son : Yves Osmu Décors : Agnès Troublé, Thomas Kertudo et Clément Colin Costumes : François Jugé Effets spéciaux : Charlotte Bayle Maquillage : Stéphanie Guillon Production : Love Streams agnès b. Productions Producteur délégué : Christophe Audeguis Distributeur : A3 Distribution.

121 minutes. France, 2013 Sortie France : 23 avril 2014

u RÉSUMÉ Céline, 12 ans, est abusée par son père, Daniel. Sa mère Estelle finissant généralement tard le soir sa journée de serveuse de bistrot, elle prend soin de ses deux jeunes sœurs. Lors d’un dîner, la grand-mère de Céline remarque son comportement taciturne. Rongé par le remords, Daniel n’entretient plus que des rapports distants avec Estelle. Céline profite d’un voyage scolaire pour grimper dans le camion d’un routier écossais, Peter. Dans la nuit, il découvre sa présence, et l’invite à s’asseoir à l’avant. Alertée par l’école, la police prévient les parents de la fillette de sa disparition. Céline et Peter, dont la femme et l’enfant sont décédés, sympathisent. Dans un supermarché, Peter voit, sur des écrans de télé, le visage de Céline, pour laquelle un avis de recherche a été lancé. Au cours d’un banal contrôle de police, l’enfant manque d’être vue dans le camion. SUITE... Peter comprend que Céline a été abusée par son père. Il abandonne sa cargaison et, le soir-même, tous deux dorment à la belle étoile, bientôt rejoints par quelques marginaux. Le lendemain, ils prennent en stop un jeune homme, le temps d’un court trajet. Dans un hall de gare, un passager reconnaît la fillette et prévient la police. Céline est retrouvée, et Peter interpellé. La fillette n’étant plus vierge, Peter est accusé de viol. Lors d’une audience chez le juge, il se suicide. Daniel promet à Céline de ne plus jamais la toucher. Quelques années plus tard, Céline, désormais adulte, est devenue mère.

Visa d’exploitation : 119630. Format : 1,77 - Couleur - Son : Dolby SR SRD. 10 copies.

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2059 - 10- questcequonafaitau_Mise en page 1 30/04/14 17:00 Page1

Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ? de Philippe de Chauveron Des parents réacs parviendront-ils à avoir enfin un quatrième gendre, cette fois franco-français et catholique ? Sorte d’hymne au creuset français, cette comédie efficace promeut la tolérance multiculturelle sur le ton d’une autodérision contenue et convenue.

© Arnaud Borrel

HH Si l’on veut bien se remémorer la bande-annonce du film, qui laissait présager une comédie caricaturale et vulgaire, Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ? se révèle être une bonne surprise. Le scénario réussit à bien combiner les péripéties des différents personnages, sans baisse de régime. Si nous avons certes à faire face à un codex de clichés comme à un suspense convenu - la mariée arrivera-telle à l’église à temps ? – une certaine forme de trivialité grasse et satisfaite nous est épargnée. La caricature, plutôt bienveillante, et les points de vue que produisent les différences ethniques, religieuses et générationnelles de chacun, finissent par se fondre dans une œuvre consensuelle et positive dont l’humour, à défaut d’être inédit, ne méprise personne. Humour qui, pour s’être affranchi de cynisme et de méchanceté gratuite, tient lieu de programme de salubrité publique pour une société déglinguée par d’innombrables discordes. À l’instar des quatre gendres, chacun comprend qu’en prenant sur soi, on fait la paix, et qu’ainsi la vie est bien plus agréable. Le film démontre, dès lors, que la France pourrait se régénérer dans un creuset multiculturel et s’exempter de ce fait de la guerre civile. La société libérale y gagnerait, tant économiquement que socialement. Ainsi, est-il significatif que les gendres chantent la Marseillaise et finissent par monter un business commun. Ce n’est pas non plus un hasard si le notaire raciste finit par se lier d’amitié avec le patriarche ivoirien, ex-adjudant du RIMA, tous deux ayant été gaullistes. Après Les Profs, Christian Clavier raffermit ici sa dimension de parrain des jeunes comiques de l’écurie Jamel. _M.B.

COMÉDIE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Christian Clavier (Claude Verneuil), Chantal Lauby (Marie Verneuil), Ary Abittan (David Benichou), Medi Sadoun (Rachid Benassem), Frédéric Chau (Chao Ling), Noom Diawara (Charles Koffi), Frédérique Bel (Isabelle Verneuil), Julia Piaton (Odile Verneuil), Émilie Caen (Ségolène Verneuil), Élodie Fontan (Laure Verneuil), Pascal Nzonzi (André Koffi), Salimata Kamate (Madeleine Koffi), Tatiana Rojo (Viviane Koffi), Élie Semoun (le psychologue), Yvonne Gradelet (la touriste), Axel Boute (la racaille des campagnes), Nicolas Wanczycki (le banquier), Loïc Legendre (le curé de Chinon), Jassem Mougari (le lascar du Palais de justice), Audrey Quoturi (la touriste à l’aéroport d’Abidjan), Nicolas Mouen (le professeur de zumba). Scénario : Philippe de Chauveron et Guy Laurent Images : Vincent Mathias Montage : Sandro Lavezzi 1er assistant réal. : Luc Bricault Scripte : Marie Ducret Musique : Marc Chouarain Son : Michel Kharat, Serge Rouquairol et Éric Tisserand Décors : François Emmanuelli Costumes : Eve-Marie Arnault Casting : Marie-France Michel Production : Les Films du 24 Pour : UGC Coproduction : TF1 Droits Audiovisuels et TF1 Films Production Producteur : Romain Rojtman Dir. de production : Nathalie Duran Distributeur : UGC.

97 minutes. France, 2013 Sortie France : 16 avril 2014

u RÉSUMÉ Après avoir marié leurs filles - Isabelle avec Rachid, Odile avec David et Ségolène avec Chao Ling - Claude et Marie aimeraient bien marier Laure, la dernière, avec un vrai français catholique, Claude, gaulliste et notaire, se montrant “limite raciste”. Pour épargner à la famille un clash toujours imminent, Marie et ses filles demandent à leur conjoint respectif de prendre sur eux et de faire la paix, chose faite lors d’un repas de Noël dans la grande propriété de Chinon. Les trois gendres étonnent Claude en chantant, d’abord la Marseillaise, puis à la messe de minuit. Le lendemain, Laure leur annonce qu’elle va se marier avec Charles, un comédien... catholique. Quand elle le leur présente, Claude et Marie déchantent : c’est un Africain ! Pour préserver la paix familiale, les gendres essaient de disqualifier le nouveau-venu. En vain. SUITE... Les premiers contacts avec les Koffi, la future belle-famille, sont désastreux. Ivoirien, André, le père de Charles, veut se venger des années coloniales. Claude et Marie se brouillent. Marie et Madeleine, l’épouse d’André, sympathisent alors que les deux chefs de famille, furieux, s’apprêtent à torpiller le mariage. Réconciliés après une partie de pêche suivie d’une cuite et d’une nuit au poste, ils se lancent à la poursuite de Laure - qui a pris la fuite - pour la conduire à l’autel. La fête est une réussite. Claude et Marie partiront en “voyage de noces” jusqu’en Chine, en passant par Alger, Tel Aviv et Abidjan...

Visa d’exploitation : 136861. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 621 copies.

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2059 - 11- armeedusalut_Mise en page 1 30/04/14 17:02 Page1

L’Armée du Salut de Abdellah Taïa Adapté de son roman autobiographique, L’Armée du Salut revient sur l’enfance de A. Taïa, écrivain marocain francophone, l’un des premiers en terre d’Islam à parler de son homosexualité. Un travail un peu brouillon au militantisme inutilement surligné.

© Les Films de Pierre

H L’Armée du Salut, à n’en pas douter, fait preuve d’un ton, d’une audace et d’une intention. Parler sans détours de l’homosexualité - et plus particulièrement de la sienne - quand on est marocain suppose, on l’imagine, du cran et de la conviction. Trop assujetti peut-être à la dimension autobiographique de son sujet, Abdellah Taïa ne parvient jamais cependant à trouver la bonne distance, ni le bon tempo. Ainsi le film s’articule-t-il autour d’une césure, un trou temporel que rien ne justifie, et dans lequel dix années passent à la trappe. On aurait pourtant aimé suivre plus avant la construction de ce jeune garçon dont le désir pour les hommes relève d’une évidence et l’observer sauver sa peau dans un pays où l’hypocrisie sociale est reine, l’homosexualité perçue comme littéralement innommable, les mœurs libres jugées déviantes. Comment se structurer dans une famille où, à l’image du pays tout entier, règnent sur le sujet violence et silence ? Si la volonté de lever le pied en matière d’approche psychologique est manifeste, celle-ci n’en finit pas moins par faire défaut. Mais on sait gré à ce travail d’être dénué de tout misérabilisme, de s’être affranchi de moralisme et de ne jamais se montrer inutilement bavard. Les dialogues sont effectivement réduits à leur plus simple expression et les choses suggérées, (pas toujours finement, comme en témoignent des scènes de sexe paradoxalement crues et embarrassées). La dernière partie à Genève, sans doute la plus forte, ajoute au film un délicat glacis de mélancolie, illustrant l’idée qu’il n’est pas facile de devenir un jour soi-même. C’est là une ambition dont on ne guérit jamais tout à fait. _N.Z.

RÉCIT BIOGRAPHIQUE Adultes / Grands Adolescents, des idées peuvent heurter

u GÉNÉRIQUE Avec : Saïd Mrini (Abdellah, jeune), Karim Ait M’Hand (Abdellah, adulte), Amine Ennaji (Slimane), Frédéric Landenberg (Jean), Hamza Slaoui (Mustapha), Malika El Hamaoui (la mère), Abdellahk Swilah (le père), Youness Chara (le fumeur de joint), Oumaima Miftah (la première sœur), Souhaila Achike (la deuxième sœur), Houda Mokad (la troisième sœur), Ibtissam Es Shaimi (la quatrième sœur), Hasna Boulahana (la cinquième sœur), Amal Maarouf (la serveuse du restaurant), Amin Labsal (le pêcheur), Abdelwahad Badri (l’homme de la rue), Hamid Elouajdi Mouladi (le marchand de pastèques), Imad Benhima, Youness Doumi, Khalid Beckoury, Saïd Anzadi, Mouad Agarrab, Jamal Meziane, Soufiane Saddar, Guillaume Bonnier, Thierry Jorand, Zakaria Saadoune, Sandra Korol, Felipe Castro, Viviana Aliberti, Patrick Féry. Scénario : Abdellah Taïa D’après : le roman d’Abdellah Taïa (2006) Images : Agnès Godard Montage : Françoise Tourmen 1er assistant réal. : Guillaume Bonnier Son : Henri Maïkoff, Fanny Martin et Christophe Vingtrinier Production : Les Films de Pierre et Les Films Pelléas Coproduction : Rita Productions, RTS et SRG SSR Production exécutive : Ali n’Films Producteurs : Hugues Charbonneau, Marie-Ange Luciani et Philippe Martin Producteurs exécutifs : Frantz Richard et Nabil Ayouch Coproducteurs : Pauline Gygax et Max Karli Distributeur : Rezo Films.

84 minutes. France - Suisse - Maroc, 2013 Sortie France : 7 mai 2014

u RÉSUMÉ 1999. Dans un quartier populaire de Casablanca, Abdellah, 14 ans, vit avec ses parents, ses cinq sœurs, avec lesquelles il dort, et Slimane, son frère ainé qu’il idolâtre. Empreint de violence et de non-dits, le climat familial est oppressant. Lorsque son père maltraite sa femme, ce qui se produit fréquemment, Abdellah en appelle à Slimane. Parfois, il se glisse en cachette dans la chambre de ce dernier pour humer amoureusement ses draps ou feuilleter ses livres. De temps à autre, objet du désir d’hommes plus âgés qui ne s’y trompent pas, il se laisse furtivement étreindre derrière des palissades ou des étals de marché. Un jour, Slimane annonce à la famille qu’il part quelques jours à Tanger. La mère enjoint Abdellah de l’accompagner pour le chaperonner. Bien qu’entre eux la complicité soit grande, quand Slimane rencontre une serveuse avec laquelle il a une aventure, Abdellah, se sentant abandonné, téléphone à sa mère pour la supplier de jeter un sort à Slimane. SUITE... 2009. Abdellah vit toujours au Maroc où il a rencontré Jean, universitaire suisse d’une quarantaine d’années. À l’issue d’une promenade en barque, au cours de laquelle Jean a exigé de l’argent en échange du silence à propos de ses préférences sexuelles, Abdellah décide de quitter le Maroc. Quelques mois après avoir rompu avec Jean, titulaire d’une bourse d’études, il se retrouve à Genève. Seul dans les rues de cette ville inconnue, il n’a d’autres recours que de demander asile à... l’Armée du Salut.

Visa d’exploitation : 127187. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 12- arthurnewman_Mise en page 1 30/04/14 17:05 Page1

Arthur Newman (Arthur Newman) de Dante Ariola Dans l’espoir de repartir à zéro, un homme insatisfait de son existence change d’identité et rencontre une jeune femme, elle-même en crise. Malgré de talentueux comédiens, ce premier film ne parvient pas à donner de l’intérêt à une histoire d’ennui.

© Cross Creek Pictures

H Distribué en France un an après son échec commercial et critique aux États-Unis, Arthur Newman se retrouve par le hasard du calendrier de sorties à talonner Dans la cour, son pendant français qui lui aussi aborde le thème de la dépression à travers la rencontre entre deux personnages aussi fragiles qu’opposés, en crise l’un et l’autre et souffrant tous les deux d’une profonde solitude. La comparaison s’arrête là malheureusement, tant il manque à Arthur Newman - qui adopte un traitement nettement plus romancé et optimiste, en s’interrogeant sur la possibilité de disposer d’une deuxième chance pour commencer une vie nouvelle - la finesse, le regard personnel et la singularité qui caractérisent le film de Salvadori. Réalisateur de spots publicitaires, Dante Ariola, dont Arthur Newman est le premier long métrage, signe une mise en scène discrète, voire effacée, aux antipodes de l’esthétique publicitaire, pour filmer, à travers un road-movie de forme très classique, une Amérique banale, morose et peu glamour. En dépit d’une distribution prestigieuse, du talent et de la subtilité de ce remarquable duo de comédiens que forment Colin Firth et Emily Blunt, les personnages manquent de profondeur pour être véritablement attachants. Le premier campe un homme creux, ennuyeux et ennuyé, que le film ne parvient pas à rendre intéressant. Quant à la seconde, l’instabilité psychologique de son personnage semble à la longue trop artificielle (kleptomanie, drogues, antécédents familiaux de schizophrénie) pour convaincre et émouvoir. Si leur rencontre est parfois touchante, et parfois drôle, le film, faute de rythme et d’enjeux, finit par lasser à son tour. _An.B.

CHRONIQUE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Colin Firth (Wallace Avery / Arthur Newman), Emily Blunt (Mike Fitzgerald), Lucas Hedges (Kevin Avery), Anne Heche (Mina Crawley), M. Emmet Walsh (Zazek), Kristin Lehman (Marie Alice Wells), Steve Coulter (Owen Hadley), Devon Woods (Janie Wells), Sterling Beaumon (Grant Wells), Natalia Volkodaeva (Ludmila Hadley), Autumn Dial (Charyl), Anthony Reynolds (le garde forestier), Holden Hansen (l’homme qui meurt), Nicole LaLiberte (Sarah), David Andrews (Chuck Willoughby), Peter Jurasik, Sharon Morris, Phillip Troy Linger, L. Warren Young, Dean Chekvala, Jack Landry, Jason Benjamin, Ron Pratner, Michael Beasley, Bonnie Johnson, Rachael Moser, Sol Miranda, Daniel Jones, Tammy Christine Arnold, Estes Tarver, Gray Hawk, Matt Warzel. Scénario : Becky Johnston Images : Eduard Grau Montage : Olivier Bugge Coutté 1er assistant réal. : Jason Blumenfeld Scripte : Trudy Ramirez Musique : Nick Urata Son : Jeffree Bloomer Décors : Christopher Glass Costumes : Nancy Steiner Effets visuels : Sean Faden Dir. artistique : Quito Cooksey Maquillage : Erin Keith Casting : Francine Maisler et Kathy Driscoll-Mohler Production : Cross Creek Pictures Pour : Vertebra Films Production associée : Monarch Bay Productions Producteurs : Alisa Tager, Becky Johnston, Mac Cappuccino et Brian Oliver Distributeur : Mars Distribution.

101 minutes. États-Unis, 2012 Sortie France : 7 mai 2014

u RÉSUMÉ Las d’une vie monotone, Wallace démissionne, s’achète une fausse identité et, abandonnant Mina, sa petite amie, et Kevin, son propre fils - lequel vit avec sa mère - met en scène sa propre mort. Sous le nom d’Arthur Newman, il prend la route et quitte la Floride pour une nouvelle vie. Après avoir sauvé une jeune femme, Mike (pour Michaela), d’une overdose médicamenteuse, il lui propose de l’accompagner à Terre Haute, dans l’Indiana, où il veut devenir golfeur professionnel. Quand elle découvre son vrai nom, il tente de s’en débarrasser. Mais la mort subite d’un inconnu les rapproche. Il lui raconte sa vie banale, son talent pour le golf, sa rencontre avec le propriétaire d’un club... SUITE... Mike avoue s’appeler Charlotte et avoir usurpé l’identité de sa sœur, internée dans un asile. À l’initiative de Mike, ils pénètrent dans des demeures, s’imaginent dans la peau des résidents et ainsi, deviennent amants. Kevin et Mina qui, entretemps, ont appris la disparition de Wallace, tentent de comprendre. Mike fait part de ses craintes de devenir schizophrène comme sa sœur et sa mère. À Terre Haute, Arthur se fait éconduire par le patron du club. Après s’être enfuit avec l’argent de celui-ci, Mike est arrêtée. Wallace paie la caution et réalise qu’elle avait volé les papiers du mort, compromettant ainsi son identification. Ils rendent visite à sa veuve. Puis, pour la première fois, ils font l’amour sans artifice. Wallace conduit Charlotte auprès de sa sœur et rentre auprès de Kevin.

Visa d’exploitation : 139061. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 13- aunomdufils_Mise en page 1 30/04/14 17:05 Page1

Au nom du fils de Vincent Lannoo Suite de la mort suspecte de son mari puis au suicide de son fils, victime d’un prêtre, Élisabeth, fervente catholique, voit sa vie basculer et décide de se venger. Entre drame et parodie, le film ne trouve pas le ton juste et enchaîne les invraisemblances.

FILM DE VENGEANCE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Astrid Whettnall (Élisabeth), Achille Ridolfi (le Père Achille), Philippe Nahon (le Père Taon), Zacharie Chasseriaud (Jean-Charles), Albert Chassagne-Baradat (Albert, l’évêque), Marie-Jeanne Maldague (la mère de Marc), Lionel Bourget, Jacky Nercessian. Scénario : Vincent Lannoo, Philippe Falardeau et Albert Charles Images : Vincent van Gelder Montage : Frédérique Broos 1er assistant réal. : Bernard Garant Musique : Michelino Busceglia Son : Guilhem Donzel, Matthieu Michaux et Philippe Charbonnel Décors : Vivian Sassen Costumes : Christophe Pidre et Florence Scholtès Casting : Michaël Bier Production : Yoni Production Coproduction : Hands Up Productions Producteur : Lionel Jadot Distributeur : Eurozoom.

© Yoni Prod.

m Entre un sujet ambitieux - la politique d’indulgence, de dissimulation, ou de déni, de l’Église catholique et de sa hiérarchie vis-à-vis des crimes sexuels commis par son personnel - et un traitement provocateur - revenge movie sans pathos - Au nom du fils est un film qu’on aimerait... aimer, un défouloir anticlérical, hybride de dénonciation justifiée et de flingages sanglants dont on voudrait pouvoir jubiler. Hélas, rien ne fonctionne. Dès les premières scènes, les dialogues et le jeu des comédiens se révèlent bien trop outrés et stéréotypés pour prétendre à un quelconque réalisme. Les Croisés de Pie XII, groupe de paramilitaires fanatiques fréquenté par le mari et le fils de l’héroïne, sont si caricaturaux qu’ils en perdent toute force subversive. Totalement invraisemblable, on ne croit pas davantage à la réaction de l’évêque, lequel, face à une mère dont le fils, mineur de surcroît, s’est suicidé à la suite du comportement coupable d’un prêtre, la provoque, l’accuse, insulte le défunt avec une grossièreté tout simplement extravagante. Comportement du prélat d’autant plus aberrant qu’il justifie l’argument du film : l’héroïne, bouleversée par les paroles ignobles d’un homme censé incarner les valeurs chrétiennes auxquelles elle a voué sa vie, lui fracasse la tête et s’empare du dossier des plaintes, restées sans suite, contre des religieux du diocèse. Alors qu’on est prié de croire au drame de cette femme, les scènes de meurtre qui s’ensuivent sont clairement parodiques, avec baston et hémoglobine sur fond de musique enjouée. Ni réaliste, ni comique, le film ne va nulle part, et ne traite en rien son sujet. Dommage. _G.R.

80 minutes. Belgique - France, 2013 Sortie France : 7 mai 2014

u RÉSUMÉ Élisabeth, fervente catholique, anime, pour une station de radio chrétienne, une émission de dialogue pour auditeurs désorientés. À la demande du diocèse, elle accepte d’héberger un prêtre chez elle, le Père Achille. Un jour, son mari et Jean-Charles, son fils aîné, lui font croire qu’ils partent faire en retraite spirituelle alors qu’en réalité, ils vont suivre un stage dans le camp paramilitaire des Croisés de Pie XII où, accidentellement, son mari se tue. A son retour, son fils prétend qu’il s’agit d’un accident de chasse. Le Père Achille finit par quitter la maison. Jean-Charles profite d’une émission de sa mère pour lui avouer être épris de celui-ci. Elle se précipite chez elle, où elle n’a que le temps de le voir se suicider. Puis elle visionne la vidéo d’un entraînement des deux défunts. SUITE... Reçue par l’évêque, celui-ci l’accuse de calomnie, lui montre l’épais dossier des plaintes qu’il laisse sans suite et finit par insulter Jean-Charles. Elisabeth craque, lui défonce le crâne et s’empare du dossier. Après avoir trouvé le camp des Croisés, où l’arme de son mari lui est restituée, elle se met à tuer, un à un, les prêtres incriminés avant d’apprendre à la radio qu’en réponse à ces meurtres, les Croisés ont plastiqué une mosquée. Avec son fils, elle part à la recherche d’Achille en Italie mais Albert la dissuade de le tuer. En montagne, face à un ciel incroyablement nuageux, Albert lui demande si Dieu est en colère. “C’est juste la nature”, lui répond-elle.

Visa d’exploitation : en cours. Format : n.c. - Couleur - Son : Dolby SRD.

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The Baby (Devil’s Due) de Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett Un couple heureux, un bébé en route... Et le Diable, avec antichrist à la clé, qui s’en mêle. Sous ses airs de Rosemary’s Baby du “found footage”, The Baby ne laisse malheureusement planer aucune ambiguïté : un film d’horreur raté de bout en bout.

© 20th Century Fox

m Avec son économie restreinte, le found footage est une aubaine pour tourner des films à petit budget, qui compensent leur manque de moyens par une une certaine inventivité visuelle ou une originalité scénaristique. Or, avec The Baby, le filon, révélé par le succès mondial de Paranormal Activity, tend à s’épuiser dangereusement. Avant tout parce qu’ici, le procédé n’est qu’un argument économique, qui n’est jamais justifié par l’intrigue. Il s’agit, ni plus ni moins, de recycler une intrigue solide (une grossesse démoniaque - voir Rosemary’s Baby) en prétendant faire du neuf avec un filmage “à l’arrache”... soit l’antithèse absolue de films comme [REC] ou Cloverfield, où la question du regard et de la mise en scène est prépondérante. Sûr de lui, The Baby enchaîne les poncifs - la future mère, végétarienne branchée bio, devient sévèrement carnivore et a de douteuses absences et s’acharne à ne laisser planer aucun mystère. Sans le moindre soupçon d’ambiguïté à se mettre sous la dent, le spectateur, qu’il soit féru ou non du genre, s’ennuie bien vite... Et, au lieu de redonner du rythme à un scénario ronflant, l’atmosphère de paranoïa grandissante de la seconde partie fait basculer le film dans le ridicule, avec sa secte de pacotille. Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett, auteurs de l’efficace dernier segment de l’anthologie horrifique V/H/S (2012), n’ont pas révisé leurs classiques et se fourvoient ici : incapables de transcender un scénario confondant d’inanité, ils laissent leurs acteurs livrés à eux-mêmes, et ne parviennent à générer aucune tension. C’est dire si The Baby est un échec à oublier au plus vite... _Mi.G.

HORREUR Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Allison Miller (Samantha McCall), Zach Gilford (Zach McCall), Sam Anderson (le Père Thomas), Roger Payano (le chauffeur de taxi), Vanessa Ray (Suzie), Bill Martin Williams (Ken), Geraldine Singer (Sally), Julia Denton (Natalie), Colin Walker (Stanley), Madison Wolfe (Brittany), Joshua Shane Brooks (Braedon), Aimee Carrero (Emily), Robert Belushi (Mason), DeMaris Gordon (la voyante), Donna Duplantier (le docteur Ludka), Robert Aberdeen (le docteur Dylan), Catherine Kresge (Tina), Kurt Krause (Jay), Tyler Forrest (Steve), Sloane Coe (Ashley), Michael Papajohn (l’agent Miska), Douglas M. Griffin (l’inspecteur Zeman), Nicole Stuart (l’instructrice Lamaze), Yohance Myles (Jim), Stacie Davis (Karen), Annie Gaia, Sylvia Grace Crim, Jennifer Schemke, Hunter Lobre, Candi Brooks, Derek Hall, Katherine Yeaton, Justyna Kelley, Shane Woodward. Scénario : Lindsey Devlin Images : Justin Martinez Montage : Rod Dean 1er assistant réal. : Stephen LoNano Scripte : Sam Sullivan Son : Michael B. Koff Décors : Anthony Medina Costumes : Ann Walters Effets visuels : Justin Martinez et Matthew Bramante Maquillage : Stacey Herbert Casting : Terri Taylor Production : Davis Entertainment Company Production associée : TSG Entertainment Producteur : John Davis Producteurs exécutifs : Chad Villella, Justin Martinez, James Dodson et Brittany Morrissey Distributeur : 20th Century Fox.

89 minutes. États-Unis, 2013 Sortie France : 7 mai 2014

u RÉSUMÉ À l’approche de son mariage avec Samantha, Zach a décidé de filmer leur quotidien. Après les noces, ils partent en voyage en République Dominicaine. La veille de leur départ, un chauffeur de taxi leur propose de les emmener dans une fête, loin des lieux touristiques. Pendant la soirée, ils sont drogués. Lors d’une cérémonie occulte, un événement surnaturel survient. Le lendemain matin, Zach et Samantha ne se souviennent de rien. De retour aux États-Unis, le couple s’installe dans sa nouvelle maison. Quelques semaines plus tard, Samantha découvre qu’elle est enceinte, alors qu’elle prend la pilule. SUITE... La gynécologue de Samantha, le docteur Ludka, rassure la future mère. Pendant leur absence, des inconnus mettent la maison sous surveillance. Puis le docteur Dylan remplace Ludka. La nuit, Samantha est prise de crises de somnambulisme. Au supermarché, elle dévore de la viande crue. Au huitième mois, ils assistent à la première communion de la nièce de Zach : Samantha provoque le malaise du Père Thomas. Après avoir reconnu le chauffeur de taxi dans l’église, Zach visionne ses vidéos. Il se rend au chevet du Père Thomas, qui lui révèle la signification satanique d’un symbole vu dans les vidéos... En menant son enquête, Zach pénètre dans une maison abandonnée et découvre que Samantha est surveillée par une secte. Il s’échappe et retourne auprès d’elle : en trance, elle s’ouvre le ventre. Dylan surgit, accompagné du chauffeur de taxi. Ils s’emparent du bébé. Zach est arrêté...

Visa d’exploitation : 139318. Interdit aux moins de 12 ans. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 10 copies (vo / vf).

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2059 - 15- chappari_Mise en page 1 30/04/14 17:08 Page1

Chaparri Les Sept ours de la montagne sacrée de Nathalie Granger-Charles-Dominique et André Charles-Dominique D’anciens chasseurs se sont constitués en “communauté écologique”. Un documentaire inspirant, qui témoigne avec sensibilité de la puissance d’une utopie en marche : en se réconciliant avec la nature, l’homme se réconcilie avec lui-même.

DOCUMENTAIRE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Images : Nathalie Granger-Charles-Dominique Montage : Nathalie Granger-Charles-Dominique et André Charles-Dominique Son : André Charles-Dominique Production : Hévadis Films Producteurs : Nathalie Granger-Charles-Dominique et André Charles-Dominique Distributeur : Hévadis Films.

© Hévadis Films

HHH Dans le nord du Pérou, la forêt sèche de Chaparri, territoire austère dévasté par vingt ans de chasse, de déboisement intensif et d’exploitation minière, abrite maintenant une réserve naturelle, peuplée d’animaux en voie de disparition (dont le fameux et charmant “ours à lunettes”) et gérée par des “comuneros” locaux. Avec ce film, André Charles-Dominique, ancien ingénieur agronome, et Nathalie Granger-Charles-Dominique, chorégraphe reconvertie dans le documentaire, témoignent de cette double renaissance : celle d’une nature désormais luxuriante et celle d’anciens paysans sans terre, qui ont su aussi bien s’approprier leur environnement que s’emparer de leur destin - ou plutôt, lier vertueusement leur destin à leur environnement. Car ces quelque cinq cent familles ont décidé de lutter en se constituant en “communauté écologique”. Leur pari : un animal vivant vaut plus qu’un animal mort (de quoi bouleverser durablement les us et coutumes de tous ces villages de chasseurs). Autrement dit, pratiquement, un animal “rapporte” plus, puisque la réserve génère un tourisme qui finance le développement des écoles et des services de santé locaux. Et, symboliquement, sa valeur rejaillit sur l’ensemble du groupe, qui reconquiert ainsi, dans cet accomplissement autonome et collectif, une fierté et une dignité perdues. En immersion, filmé à hauteur d’hommes et émaillé d’interviews des différents “comuneros”, le documentaire a la force d’un constat. Loin d’asséner un discours idéologique ou militant, il donne à voir humblement la puissance d’une utopie en marche, qui, en réconciliant les hommes avec la nature, les réconcilie surtout avec eux-mêmes et, partant, avec leurs croyances (puisque

113 minutes. France, 2013 Sortie France : 7 mai 2014

la forêt, longtemps considérée comme maudite, revêt désormais un caractère sacré). De grands concepts écrasants ou abstraits (l’écologie, l’harmonie avec la nature, la générosité, le partage, l’engagement communautaire) prennent ici un sens concret et sensible. Chaparri ne tombe pourtant pas dans l’angélisme et n’élude rien des difficultés d’une telle entreprise : braconnage, risque de récupération du projet, dépossession des terres au profit de la culture intensive d’agrocarburants, etc. Le film témoigne même du patient travail de pédagogie auquel se livrent quotidiennement les gardes-parc. Scène-clé du documentaire : ces derniers partent, des jours durant, en expédition jusqu’aux Andes amazoniennes pour récupérer un ours capturé par un braconnier peu conciliant. Le palabre qui s’ensuit, devant tout le village rassemblé sous la surveillance de la police locale, est un modèle de négociation, traduisant l’incessant et nécessaire jeu d’argumentation et de contreargumentation qui conduit l’interlocuteur récalcitrant à reconsidérer doucement sa position, et même son point de vue sur le monde dans lequel il vit. À défaut de recevoir l’argent qu’il réclamait pour la remise de l’ours, le braconnier se voit offrir un séjour à Chaparri pour qu’il puisse s’en inspirer et, à son tour, modifier tout l’écosystème de sa communauté. Et le spectateur de se retrouver, au terme de son propre séjour à Chaparri, séduit et convaincu lui aussi... _C.L.

Visa d’exploitation : 126624. Format : 1,77 - Couleur - Son : Dolby SR. 2 copies.

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2059 - 16- deguerrelasse_Mise en page 1 30/04/14 17:09 Page1

De guerre lasse de Olivier Panchot Retour controversé d’un ancien petit caïd à Marseille, après quatre ans de Légion. Un premier long métrage ambitieux, entre film noir et tragédie antique, malheureusement saturé d’intentions politiques, sociologiques et psychologiques.

FILM NOIR Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Jalil Lespert (Alex), Tchéky Karyo (Armand), Hiam Abbass (Raïssa), Mhamed Arezki (Rachid), Sabrina Ouazani (Katia), Jean-Marie Winling (Titoune), Olivier Rabourdin (Marchiani), Abraham Belaga (Fabrice), Dimitri Storoge (Mateo), Fayçal Safi (Ahmed), Jean-Michel Correia (Barouhane). Scénario : Olivier Panchot et Cédric Anger Images : Thomas Hardmeier Montage : Barbara Bascou 1er assistant réal. : Jérôme Raffaelli Musique : Éric Neveux Son : Erwan Kerzanet, Séverin Favriau et Stéphane Thiébaut Décors : Mathieu Menut Costumes : Emmanuelle Pertus Production : Elzévir Films Coproduction : SND Producteurs : Marie Masmonteil et Denis Carot Dir. de production : Philippe Roux Distributeur : SND.

© Elzévir Films

H Traumatisé par quatre ans de Légion étrangère, un jeune homme regagne incognito Marseille, qu’il avait dû fuir après avoir tué le frère du parrain local. Son retour agit comme un révélateur explosif, faisant voler en éclats tous les équilibres qui s’étaient instaurés (en affaires, en famille) pendant son absence... Premier long métrage d’un réalisateur qui officiait jusque-là à la télévision (notamment sur M6), De guerre lasse ne manque pas d’ambition, empruntant tout autant à la mythologie du film noir qu’à la tradition de la tragédie antique. Pris au piège de leurs propres agissements, les personnages sont ainsi contraints à une catharsis qui, à défaut d’être totalement libératrice, s’avère d’une violence sans concession. Malheureusement, confondant suspense et précipitation, le scénario est des plus mal taillés. Ses épaisses coutures craquent de toutes parts sous la pression d’un trop-plein d’intentions sociologiques (le microcosme des Pieds-noirs de Marseille), politiques (le refoulé de la guerre d’Algérie) et psychologiques (inceste frère/sœur, crise identitaire, complexe d’Œdipe mal digéré). Visiblement plus à l’aise dans l’action que dans le portrait, dans le silence que dans la parole, le réalisateur Olivier Panchot échoue à donner chair à ses personnages, les acteurs devant enchaîner, à coups de dialogues lourdement explicatifs, les scènes de révélations (“Je suis ton père”, “Tu m’as trahi”), comme autant de climax improbables dont l’impact retombe aussitôt. Restent une percutante vision de Marseille, oppressant terrain de jeu pour caïds, et l’étonnante prestation physique de Jalil Lespert, tout de muscles et de tensions. _C.L.

94 minutes. France, 2013 Sortie France : 7 mai 2014

u RÉSUMÉ Désertant la Légion étrangère, Alex rentre à Marseille incognito, quatre ans après son départ. Il contacte Titoune, un ami de son père, pour avoir un faux passeport, et retrouve son ami d’enfance Rachid, à qui il demande des nouvelles de sa sœur Katia. Rachid prévient Armand, le père d’Alex, qui vit avec Raïssa, sa propre mère. Armand prend rendez-vous avec le parrain corse Marchiani, pour lui rappeler leur deal : quatre ans auparavant, Armand lui avait cédé tout son business à condition qu’il épargne Alex, responsable du meurtre de son frère. En se rendant dans le bar de Titoune, désormais bras droit de Marchiani, Alex échappe à un règlement de compte. SUITE... Alex, retrouvant Katia, essaie de l’embrasser. Le neveu de Marchiani le suit et tente de l’abattre. Alex le tue. Les frères Barouhane, pour qui Rachid travaille en secret, fournissent des papiers à Alex. Katia et Alex font l’amour. Il lui demande de le suivre à Oran, où Armand et Raïssa vivaient avant de fuir la guerre. Démasqué par Titoune pour ses activités avec les Barouhane, Rachid est contraint de lui donner l’adresse d’Alex. Armand avoue à Alex être le père naturel de Rachid et Katia. Alex retrouve Katia et la ramène chez elle. Ils sont attaqués sur la route. Katia est gravement blessée et Alex tue ses assaillants, dont Titoune. Il s’en prend ensuite à Rachid, mais décide de l’épargner. Armand tue Marchiani, avant d’être abattu à son tour. Plus tard, Katia sort du coma. Alex vit à Oran.

Visa d’exploitation : 132290. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 17- duneviealautre_Mise en page 1 30/04/14 17:13 Page1

D’une vie à l’autre (Zwei Leben) de Georg Maas Près de Bergen, après la chute du mur, une femme est confrontée à son passé. Deux pays, deux vies, font par conséquent deux films : un drame familial peu banal et un film d’espionnage efficace. Mais la réalisation ne tire pas parti de cette potentielle schizophrénie.

© Sophie Dulac Dist.

HH Si l’affiche prétend que D’une vie à l’autre est “le croisement réussi entre La Vie des autres et Borgen”, peut-être aurait-il fallu dire “La Vie des autres dans les environs de Bergen”, environs au demeurant magnifiques et trop rares au cinéma... En tout état de cause, Il ne s’agit pas d’un film sur les arcanes de la politique mais sur un destin particulier lié à la géopolitique européenne de l’après-guerre (on y parle allemand, norvégien, anglais). Et si cette double vie est intéressante, ce n’est pas tant en vertu de son style, celui du thriller standardisé, que de sa dimension romanesque, passionnante et originale, appuyée sur deux ressorts : le Lebensborn et la réunification de l’Allemagne à partir de 1989, plusieurs fois évoquée depuis Goodbye Lenin !. Le Lebensborn est ici le vecteur d’un drame familial. Une dizaine de centres a effectivement existé en Norvège, établissements où les Nazis entendaient conserver le fruit - d’une grande “pureté aryenne” des amours de leurs soldats avec la blondeur locale. Emmenés de force en Allemagne, ces enfants ont pu se retrouver par la suite confinés dans des orphelinats de l’Est, avant que ceux-ci ne deviennent des sources de recrutement pour la Stasi (pour l’occasion, Rainer Bock reprend du service, après Barbara). Cet arrière-fond allemand nourrit donc le film d’espionnage pendant la guerre froide. On imagine alors les soubresauts provoqués par la chute du mur et, malgré les enquêtes diligentées par la cour européenne, les secrets gardés coûte-quecoûte. Entre le drame familial et le thriller d’espionnage, les procédures citoyennes européennes permettent aux deux films de se télescoper, mais platement. _M.B.

DRAME FAMILIAL Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Juiane Köhler (Katrine Evensen Myrdal), Liv Ullmann (Ase Evensen), Sven Nordin (Bjarte Myrdal), Ken Duken (Sven Solbach), Julia Bache-Wiig (Anne Myrdal), Rainer Bock (Hugo), Thomas Lawincky (Kahlmann), Klara Manzel (Katrine Evensen, jeune), Vicky Krieps (Kathrin Lehnaber), Dennis Storhøi (l’avocat Hogseth), Ursula Werner (Hiltrud Schlömer), Jürgen Rissmann (l’inspecteur Lattoch), Ralf Dittrich (l’employé à Sonnenwiese), Christian Steyer (l’archiviste), Mathias Harrebye-Brandt (l’interrogateur danois), Holger Handtke (l’interrogateur allemand), Daniel Krauss (le journaliste TV allemand), Ellen Brigitte Winthe (Marit), Thorbjørn Harr (Bjarte Myrdal, jeune). Scénario : Georg Maas, Christoph Tolle, Ståle Stein Berg et Judith Kaufmann Images : Judith Kaufmann Montage : Hansjörg Weissbrich 1er assistant réal. : Peter Bækkel Musique : Christoph M. Kaiser et Julian Maas Son : Thomas Angell Endresen Décors : Bader El Hindi Costumes : Ute Paffendorf Dir. artistique : Tamara Marini Maquillage : Susana Sánchez Casting : Simone Bar, Kjersti Paulsen et Karoline Oppedal Production : Zinnober Film, Helgeland Film et B&T Film Coproduction : ApolloMedia et ARD Degeto Film Producteurs : Dieter Zeppenfeld, Axel Helgeland et Rudi Teichmann Coproducteur : Jörg Westerkamp Distributeur : Sophie Dulac Distribution.

97 minutes. Allemagne - Norvège, 2012 Sortie France : 7 mai 2014

u RÉSUMÉ Après avoir fui la RDA pour la Norvège en 1969, Katrine, fille d’une Norvégienne et d’un soldat d’occupation allemand, vit à Bergen avec Bjarte, son mari, et leur fille Anne, toute jeune maman. Après avoir été identifiée par l’infirmière d’un ancien Lebensborn comme l’un des rares enfants à avoir retrouvé sa mère après son enlèvement par le IIIe Reich, elle est contactée par un avocat, Solbach, qui la pousse à témoigner, au nom des “enfants de la honte”, dans un procès contre l’État norvégien. Katrine refuse, puis, déguisée, part aussitôt en Allemagne où elle retourne dans l’établissement et détruit son dossier. SUITE... À son retour, elle tente maladroitement d’expliquer sa disparition soudaine à son mari. Obsédée par ce passé d’agent au service d’Hugo, son mentor à la Stasi, elle se revoit lui livrer les secrets de la base sous-marine où elle a rencontré Bjarte. Le jour de l’audition, Solbach la plonge dans la confusion tant elle se perd entre ses mensonges, les détails de son arrivée à l’Ouest et de son interrogatoire, trente ans plus tôt. Solbach lui remet une K7 prouvant qu’elle n’est pas Katrine. Blessés par cette mystification de toute une vie, Bjarte, Anne et sa “mère“ la rejettent. Hugo lui ordonne de partir immédiatement à Cuba, mais elle rentre chez elle pour tout avouer aux siens : la vraie Katrine a été tuée et incinérée sous ses yeux par la Stasi. Après avoir exprimé ses profonds regrets, elle part se livrer à la police… Sa voiture ayant été sabotée, elle meurt.

Visa d’exploitation : 139208. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 100 copies (vo).

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2059 - 18- frappe_Mise en page 1 30/04/14 17:14 Page1

La Frappe (Pasookkoon) de Yoon Sung-hyun Afin de découvrir qui il était, et ce qui l’a conduit à la mort, un homme rencontre les anciens amis de lycée de son fils décédé. Adossé à un traitement déroutant, ce premier film de Yoon Sung-hyun donne, des jeunes Coréens, une image à fleur de peau.

DRAME Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Lee Je-hoon (Ki-tae), Seo Jun-young (Dong-yoon), Park Jung-min (Hee-jun / Becky), Cho Sung-ha (le père). Scénario : Yoon Sung-hyun Images : Byun Bong-sun Montage : Yoon Sung-hyun Musique : Park Min-june Son : Kim Soo-hyun Décors : Kang Young-soo Maquillage : Song A-mi Production : KAFA Films Producteur : Kim Seung-june Dir. de production : Lee Yeon-jung Distributeur : Dissidenz Films.

© Dissidenz Films

HH Film de fin d’études à la Korean Academy of Film Arts (KAPA), réalisé avec un petit budget, La Frappe forme un puzzle étourdissant, Yoon Sung-hyun, le réalisateur ayant choisi, pour ce premier film, de pousser à l’extrême le recours aux flash-back, lesquels mettent peu à peu en lumière l’histoire, pleine de bruit et de fureur, de trois lycéens dont l’horizon se borne aux barres d’immeubles de Séoul. Ce n’est qu’à la toute fin que l’on prend conscience du genre d’ado qu’était Ki-tae et des raisons de sa mort. C’est ainsi qu’à travers le personnage du père lancé dans une sorte d’enquête sur son fils, nous suivons, pendant deux heures éprouvantes - ce style de mise en scène exigeant une attention soutenue - des garçons normaux, émotifs, et parfois idiots, jouer les petites frappes pour prouver qu’ils sont les plus forts. Yoon Sung-hyun sait les rendre tour à tour touchants et effrayants. Touchants quand ils jouent sur la voie ferrée par exemple, mais effrayants quand ils se battent. La Frappe, comme Suneung, témoigne des problèmes qui pèsent sur la jeunesse coréenne, des dérives dont ils sont à l’origine. Tandis que Suneung insistait sur le rude esprit de compétition entretenu entre les lycéens, La Frappe s’attache davantage à leur solitude, au désarroi dans lequel peut les plonger l’absence de parents totalement accaparés par leur travail. Constat inquiétant sur la vie des lycéens en Corée qui, toutefois, n’égale pas la cruauté magistralement orchestrée dans Leçons d’harmonie d’Emir Baigazin, autre film, sorti il y a quelques semaines, qui évoque la violence physique et psychologique en milieu scolaire, au Kazakhstan en l’occurrence. _G.T.

116 minutes. Corée du Sud, 2010 Sortie France : 7 mai 2014

u RÉSUMÉ Le père de Ki-tae furète dans la chambre de son fils décédé. Après y avoir trouvé un lot de photos, il prend contact avec les anciens amis de celui-ci. Tenant à en savoir un peu plus sur sa mort, il rencontre l’un d’eux, Becky, lui demande pourquoi Dong-yoon, qui apparaît sur toutes les photos de son fils, n’y était pas présent. Au lycée, avant la mort de Ki-tae, des amis plaisantent et, juste avant qu’ils ne se disputent, l’un d’entre eux part seul de son côté. Sur le chemin, deux garçons lui barrent la route, s’emparent de son sac, l’obligent à venir le récupérer le lendemain. Le jour dit, Ki-tae et ses amis brûlent le contenu du sac de Becky. Puis le frappent. SUITE... À un autre moment, Ki-tae, Dong-yoon et Becky jouent au baseball sur une voie ferrée. La balle égarée, tous se mettent à la chercher : pour être un souvenir d’enfance, Ki-tae y tient beaucoup. Sa mère partie depuis longtemps, il souffre d’être seul chez lui. Le père de Ki-tae poursuit son enquête : il veut joindre Dong-yoon, qui ne va plus au lycée. Avant la mort de Ki-tae, les trois amis sortent avec des filles. La petite amie de Dong-yoon fait une déclaration à Ki-tae, mais celui-ci la repousse. Le père de Ki-tae demande à Becky de retrouver Dong-yoon, ce qu’il fait. Les deux anciens amis discutent. En fait, Becky a quitté le lycée pour échapper à la cruauté de Ki-tae. Également victime de sa violence, Dong-yoon s’est défendu en brisant leur amitié. Ki-tae s’est défenestré.

Visa d’exploitation : 139203. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 19- libreetassoupi_Mise en page 1 30/04/14 17:15 Page1

Libre et assoupi de Benjamin Guedj En adaptant l’histoire d’un jeune qui assume de rester au lit quand le monde s’agite autour de lui, B. Guedj offre un rôle en or à B. Lecaplain, idéalement épaulé, dans cette comédie mélancolique sur l’entrée dans l’âge adulte, par C. Lebon et F. Moati.

COMÉDIE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Baptiste Lecaplain (Sébastien), Charlotte Le Bon (Anna), Félix Moati (Bruno), Denis Podalydès (Richard), Isabelle Candelier-Parnes (la mère de Sébastien), Jean-Yves Berteloot (le père de Sébastien), Suliane Brahim (Valentine Caillou), David Baïot (Stéphane), Lou Chauvain (Delphine), Benjamin Lavernhe (Alexandre), Richard Guedj (Patrick), Jean-Michel Lahmi (le directeur de Numéripro), Bernard Menez (Monsieur Lochu), Élisabeth Vitali (la veuve). Scénario : Benjamin Guedj D’après : le roman Libre, seul et assoupi de Romain Monnery (2010) Images : George Lechaptois Montage : Yann Malcor 1er assistant réal. : Léonard Vindry Scripte : Lisa-Nina Rives Musique : Matthieu Lamboley Son : Rémi Daru, Jon Goc et Alexandre Widmer Décors : Antoine Platteau Costumes : Muriel Legrand Effets visuels : Aurélie Lajoux Maquillage : Michèle Constantinides Casting : Pierre-Jacques Bénichou Production : Les Films du Cap et Gaumont Coproduction : M6 Films Producteur : Jean Cottin Distributeur : Gaumont.

© Gaumont

HH C’est un personnage qu’on imagine volontiers taillé sur mesure pour Baptiste Lecaplain, nouvelle star du stand-up également aperçue dans le phénomène Bref, où il incarnait précisément le colocataire fainéant du héros. Ici, le nouveau trublion de la scène parisienne se voit offrir rien moins que le premier rôle de l’adaptation du livre de Romain Monnery, Libre, seul et assoupi, dans lequel le jeune auteur dressait le portrait d’une génération, celle de ces jeunes en âge de travailler et qui, blindés de diplômes, enchaînent stages et petits boulots sous-qualifiés. Sébastien, 29 ans, a décidé, lui, de prendre la tangente, travailler, très peu pour lui. Être traité d’assisté ne le dérange (a priori) pas plus que cela. Il aime dormir, lire dans le parc en avalant des Pepito, faire des glissades dans les couloirs et se lancer avec Bruno, son coloc (Felix Moati, récompensé à l’Alpe d’Huez), dans d’interminables parties de jeux vidéos. Après des comédies parfois pesantes, Benjamin Guedj (Cyprien, Il reste du jambon ?) a trouvé le ton juste pour détailler les aventures de son sympathique trio de colocataires. Ici, pas de délires hilarants - comme dans le récent Babysitting, autre comédie “générationnelle” - ni de rires gras. Il s’agit davantage de sourire des incidents qui rythment le quotidien de Sébastien (comme les effets du faux journal intime d’Anna). De telle sorte qu’il est loisible de s’attacher à ces personnages, tous justes. En adoptant, à l’image de son héros, le rythme indolent d’une promenade, le film n’en devient que plus crédible. Il est regrettable en revanche que cette errance décalée prenne fin sur un dénouement si conventionnel. _M.Q.

93 minutes. France, 2013 Sortie France : 7 mai 2014

u RÉSUMÉ À 29 ans, Sébastien, bac + 10, aspire à ne rien faire. Quand ses parents lui imposent de quitter la maison, il s’installe en colocation avec Bruno, qui enchaîne les petits boulots, et Anna, copine de fac devenue stagiaire dans l’édition dont Bruno est secrètement amoureux. Pour obtenir le RSA, Sébastien doit constituer un dossier attestant qu’il cherche bien un emploi. Ainsi copie-t-il les nombreuses lettres de refus de Bruno. Inutilement, car son nouveau conseiller, Richard, accepte de le “couvrir”. SUITE... Engagé comme gardien dans un musée, Bruno se fait rapidement licencier pour s’être promené, avec Sébastien, en sous-vêtements dans les galeries. Des amis de fac qu’Anna a invités à dîner reprochent à Sébastien son oisiveté, alors que Bruno travaille désormais comme Père Noël. Quand il se fait disputer par des passants parce qu’il ne fait rien, Sébastien se décide à travailler et trouve un stage dans l’audiovisuel. Poste dont il est renvoyé après s’être masturbé devant un écran. Il convainc Bruno de quitter son travail de vélo taxi. Anna leur présente son nouveau copain, Marco. Bruno trouve enfin un emploi qui lui plait et déménage. Anna avoue à Sébastien qu’elle était amoureuse de lui mais déplorant son comportement, lui demande de partir. Après un séjour chez ses parents, Sébastien trouve un job dans la literie, où il excelle. Il y rencontre Valentine Caillou, qu’il avait vue à la télé et dont il était tombé amoureux. Plus tard, ils filent le parfait amour et ont un enfant.

Visa d’exploitation : 129189. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 20- mayinthesummer_Mise en page 1 30/04/14 17:17 Page1

May in the Summer (May in the Summer) de Cherien Dabis May vient passer l’été en Jordanie, retrouver sa famille et, surtout, organiser son très prochain mariage. Malgré quelques moments touchants où l’on retrouve la patte de la prometteuse Cherien Dabis, on sort un peu déçu de ce deuxième long métrage.

© May In The Summer LLC

HH Après un très prometteur Amerrika, présenté à la Quinzaine des Réalisateurs en 2009, Cherien Dabis revient avec May in the Summer, deuxième long métrage où elle tient un double rôle, à la fois devant et derrière la caméra. Pari peut-être un peu risqué à en juger par les nombreux bémols que met le film à notre enthousiasme. À commencer par les multiples ressemblances avec Amerrika. À trop vouloir défendre ses personnages féminins, elle en vient à remettre sur le métier le cliché de la femme délaissée par le mari pour une femme plus jeune et plus belle. Deux fois de suite, et déjà un effet de répétition ! Dabis aurait-elle une dent contre les figures du père ? De plus, un certain paradoxe résulte de la construction du personnage : May, l’héroïne, est bien trop passive, voire ramollie, et par voie de conséquence émolliente, pour impulser au film son rythme de comédie. Malgré tout, on retrouve dans certaines séquences la finesse de la direction d’acteurs de la cinéaste, en particulier dans la mise en scène des rôles secondaires. Le trio des sœurs fonctionne bien et Hiam Abbass se montre très juste dans l’interprétation de la mère. On en prendra pour exemple la scène, touchante, où les trois sœurs décident de se confier les unes aux autres, instant d’intimité qui prend fin avec la filature, assez burlesque, de leur mère. L’arrivée de Ziad encalmine un peu la dynamique à la fois légère et grave des quatre femmes, son absence ayant finalement beaucoup plus d’impact et de poids que n’en a son apparition. Cherien Dabis signe donc un deuxième long métrage nettement moins réussi que le premier. Même si la justesse de nombreux moments le rendent très agréable. _D.C.

COMÉDIE DOUCE-AMÈRE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Cherien Dabis (May), Alia Shawkat (Dalia), Nadine Malouf (Yasmine), Hiam Abbass (Nadine), Bill Pullman (Edward Brennan), Ritu Singh Pande (Anu Brennan), Alexander Siddig (Ziad), Nasri Sayegh (Tamer), Elie Mitri (Karim), Alaadin Khasawneh (l’agent des services d’immigration), James Garson Chick et Laith Soudani (les fêtards). Scénario : Cherien Dabis Images : Brian Rigney Hubbard Montage : Sabine Hoffman 1er assistant réal. : Scott Larkin Scripte : Colette Abboud Scatton Musique : Kareem Roustom Son : Emanuel Zouki et Tom Efinger Décors : Ola Maslik Costumes : Beatrice Harb Dir. artistique : Rand Abdel Nour Maquillage : Farah Jadaane Casting : Cindy Tolan Production : Displaced Pictures Coproduction : Anonymous Content et Durga Entertainment Producteurs : Cherien Dabis, Alix MadiganYorkin et Christopher Tricarico Producteurs délégués : Ritu Singh Pande, Rick Rosenthal et Nicholas Morton Coproducteurs : Sabine Sidawi Hamdam, Alexandre Mallet-Guy, Joy Goodwin et Beau J. Genot Producteurs associés : Tara Moss, Michael J. Urann et Kishori Rajan Distributeur : Memento Films.

99 minutes. Jordanie - Qatar - États-Unis, 2013 Sortie France : 7 mai 2014

u RÉSUMÉ Amman, Jordanie. À l’occasion de son mariage, May a quitté New-York pour passer l’été en famille. Alors qu’elle devait arriver avec son futur mari, Ziad, elle est seule. Retenu par son travail, celui-ci ne viendra que plus tard. Dalia et Yasmine, ses deux sœurs, accompagnent May dans les préparatifs de la cérémonie alors que Nadine, sa mère s’y refuse obstinément. Catholique pratiquante, elle désapprouve totalement le mariage de sa fille avec un musulman. Le père - qui lui a refait sa vie avec la jeune femme à l’origine de la séparation du couple qu’il formait avec Nadine - tente de renouer des liens avec ses filles, avec May en particulier. Celle-ci fait des efforts, mais se montre vite déçue en comprenant qu’il tente à nouveau de l’impliquer dans ses problèmes de couple. SUITE... Tandis que se préparent les noces, May reste passive, laissant sa belle-mère tout gérer. Avec Ziad, la communication s’avère difficile : messages vocaux interposés, tensions diverses… May ayant exprimé quelques doutes au sujet de leur mariage. Un soir, les trois sœurs suivent leur mère, sortie de nuit, en catimini, toute pomponnée, pour découvrir qu’elle entretient une liaison avec leur propre père. Scandalisée, May s’enfuit pour une nuit aux côtés de Karim, un séduisant jeune homme. Elle prend alors conscience de ses doutes et lorsque Ziad arrive, lui annonce leur rupture. Réconciliée avec sa mère, May décide de passer quelques jours de plus avec elle avant de reprendre sa vie new-yorkaise.

Visa d’exploitation : 139254. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

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© les Fiches du Cinéma 2014 - N°2059


2059 - 21- nepassavouervaincu_Mise en page 1 30/04/14 17:19 Page1

Ne pas s’avouer vaincu de Susana Arbizu et Henri Belin Un documentaire sobre et émouvant sur l’Espagne d’aujourd’hui et sur les ambiguïtés qu’elle entretient avec sa propre histoire à travers le combat d’un vieil homme pour honorer la mémoire de son frère, Républicain assassiné par les phalangistes en 1941.

DOCUMENTAIRE POLITIQUE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Daniel Serrano Recio, Emilio Silva, Emilio Sales Almazán, Ludivina García Arias, Julia Serrano, Acacia Condés, Eladio Martin, Claudia Pinero, Patricia García Cuerra. Et la voix de : Javier Alonso Alvarado. Images : Susana Arbizu et Henri Belin Montage : Mauricio Hernández Musique : Mikel Lauki Son : Susana Arbizu et Henri Belin Production : La Chambre Noire Distributeur : La Chambre Noire.

© La Chambre Noire

HHH Daniel Serrano, 94 ans, vit en France, à Bobigny, d’où il tente de faire reconnaître la figure de son frère, Eusébio, mort en 1941 dans son village de La Torre en Espagne, assassiné par les phalangistes pour ses positions républicaines. Daniel Serrano est un vieil homme qui se soucie peu de son âge. Qui dit qu’il luttera jusqu’à sa mort pour faire honorer son frère et toutes les personnes qui, en 1936, ont défendu la légalité d’un gouvernement démocratiquement élu. Alors Daniel Serrano écrit inlassablement aux autorités de son village natal, au maire et à son conseil municipal, pour demander que soient retirées les plaques portant les noms de membres de la Phalange, comme cette rue José Antonio, qui, 80 ans après, perpétue la mémoire du fondateur du groupe d’extrême-droite, comme ce collège Juan Aguado, autre phalangiste et franquiste notoire. Mais si Daniel Serrano est bien la figure centrale de Ne pas s’avouer vaincu, ce n’est pas seulement la formidable combativité de ce vieil homme que les deux réalisateurs, Susana Arbizu et Henri Belin, mettent en avant, c’est aussi l’impérieuse nécessité de la mémoire : celle que réclament toutes les victimes de toutes les guerres. Or, ce qui apparaît dans ce documentaire, c’est que l’Espagne d’aujourd’hui est très loin d’avoir fait son travail de mémoire. Jusqu’en 2007, elle préfère même ignorer son passé, une tentative d’enfouissement qui ne prend fin qu’avec une loi a minima, votée par le gouvernement Zapatero mais qui, aux yeux des descendants des républicains, apparaît presque comme contraire à ses intentions, tant elle dédouane l’État espagnol de ses responsabilités. On pense évidemment à la France, qui ne reconnaît qu’en 1995 avec Jacques Chirac

90 minutes. France - Espagne, 2011 Sortie France : 7 mai 2014

la responsabilité de l’État français dans l’instauration du régime de Vichy. On pense à l’Afrique du Sud et à sa commission de vérité et réconciliation, deux mots associés qui disent bien que le second n’est possible qu’accompagné du premier. Or la vérité en Espagne n’est toujours pas dite. Pire, d’après les témoignages recueillis par les réalisateurs, la peur est encore présente dans beaucoup de villages. Comme si la jeune démocratie n’avait, pour l’instant, pas réussi à effacer le climat instauré par la dictature. Comment expliquer sinon l’ignorance de ces adolescents qui semblent ne rien savoir de leur propre histoire, non pas par désintérêt, mais parce qu’elle ne leur est tout simplement pas enseignée. Le documentaire vient pointer du doigt les manquements inexcusables d’un pays pourtant démocratique. Il trouve son efficacité grâce à la figure ultra attachante de son héros. En cela, ce film politique est réussi, mais il ne doit pas nous dédouaner de nos propres errements. Il doit nous faire réfléchir sur notre rapport à notre propre histoire (la guerre d’Algérie est un exemple) et sur la capacité de n’importe quel pays à vivre apaisé parce qu’il a fait disparaître ses propres fantômes. Ce que nous dit Ne pas s’avouer vaincu, c’est que cette réussite est au prix d’un acharnement perpétuel, et qu’il faut, à l’instar de Daniel, toujours renoncer au renoncement. _D.N.

Visa d’exploitation : 138979. Format : 1,77 - Couleur - Son : Stéréo.

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2059 - 22- promeneurdoiseau_Mise en page 1 30/04/14 17:20 Page1

Le Promeneur d’oiseau de Philippe Muyl Balade intergénérationnelle dans les paysages d’une Chine ancestrale, le nouveau film de P. Muyl renoue avec la veine de son succès de 2002, Le Papillon. Faible dans la forme, généreux en clichés et bons sentiments, le film n’est pas désagréable pour autant.

CHRONIQUE INITIATIQUE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Li Bao Tian (Zhigen, le grand-père), Yang Xin Yi (Renxin, la fille), Li Xiao Ran (Qianing, la mère), Qin Hao (Chongyi, le père). Scénario : Philippe Muyl Images : Sun Ming Montage : Kako Kelber et Manu de Sousa 1er assistant réal. : Ken Siu Musique : Armand Amar Chanson : Snahg Wenjie Son : Yves Osmu Décors : Li Wen Bo et Nikos Meletopoulos Maquillage : Danièle Vuarin Production : Pan Eurasia Films et Envision Films Coproduction : Guangxi Film Group et Stellar Mega Films Producteurs délégués : Paul Delbecq, Ning Ning et Steve René Dir. de production : Wang Jian Qiang Distributeur : UGC.

© Envision Films - Stellar Mega Films - Pan Eurasia Films

HH Dans un entretien, Philippe Muyl insiste sur le fait que la Chine qu’il dépeint dans Le Promeneur d’oiseau, existe tout autant que celle de Jia Zhang-ke. S’il serait évidemment malvenu de lui reprocher de ne pas partager les intentions, éminemment critiques, de l’auteur de A Touch of Sin, on n’en reste pas moins circonspect face à un cinéma qui, pour vanter les vertus du voyage, ne l’envisage ici que sous la forme d’une succession d’images d’Épinal. Le plus frappant revient à voir Muyl retourner, suite à l’échec de son précédent film, Magique, à la recette de son succès de 2002, Le Papillon, qu’il se contente ici, à quelques ajustements scénaristiques près, de déterritorialiser. Soit une balade en forme de retour aux racines, dans les paysages pittoresque d’une Chine idyllique, nourrie de leçons de choses et dont le consensus semble être le souci premier. Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil en somme, citadines sophistiquées et paysans édentés : réconciliées la campagne et la ville, la Chine ancestrale des rizières et celle, ultra-moderne, des grands ensembles, papa et maman, les générations successives réunies dans un bain de bons sentiments. Malgré les métaphores éculées filées de bout en bout (la petite fille qui prétend avoir, tel l’oiseau du titre, “pris son envol”), le film s’avère régulièrement plaisant néanmoins, tant s’y révèle un authentique savoir-faire dans l’application de son programme. Le goût des sentiers balisés, de la familiarité qu’ils dégagent, et la satisfaction gratifiante d’avoir toujours un temps d’avance sur le récit - comme un enfant regardant, pour la énième fois, son DVD favori - n’y sont sans doute pas étrangers. _T.F.

100 minutes. France - Chine, 2012 Sortie France : 7 mai 2014

u RÉSUMÉ Retraité, Zhigen s’est juré de retourner dans son village natal afin de libérer son oiseau fétiche sur la tombe de sa femme. Son fils, Chongyi, un architecte fortuné avec lequel il est brouillé depuis des années, vit à Pékin avec Qianing, son épouse, et sa fille, Chongyi. Tous les deux tenus de s’absenter quelques jours, Qianing confie Renxin à son grand-père. Celle-ci, capricieuse enfant gâtée, part avec son grand-père à regret et commence à mener une vie d’enfer à celui-ci, pourtant de bonne volonté. Après un trajet en train, puis en bus, ils s’égarent dans la forêt et passent la nuit dans une grotte. Peu à peu, la petite fille noue une relation de complicité avec son aïeul. SUITE... Zhigen s’étant foulé la cheville, ils sont obligés de séjourner plusieurs jours dans un village, dont les habitants les ont chaleureusement accueillis. Apprenant que Qianing a confié Renxin à son père, Chongyi se fâche et lui annonce son intention de divorcer. Zhigen et Renxin atteignent enfin leur destination où Chongyi les rejoint bientôt. Entretemps, Renxin, qui a découvert que l’oiseau était mort, file dans une boutique où elle échange son iPad contre un oiseau identique. N’y voyant que du feu, Zhigen relâche l’animal sur la tombe de sa femme. Après s’être réconcilié avec son père, Chongyi lui offre la maison où celui-ci vivait avec sa femme. Renxin orchestre une rencontre entre Qianing et Chongyi qui, s’aimant toujours, décident de s’accorder une seconde chance.

Visa d’exploitation : 132315. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 80 copies (vo [mandarin]).

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2059 - 23- sabotage_Mise en page 1 30/04/14 18:16 Page1

Sabotage (Sabotage) de David Ayer Une brigade d’intervention aux méthodes peu orthodoxes est prise pour cible par un cartel. À moins que la menace ne vienne de l’intérieur ? D. Ayer signe un thriller musclé, qui peine à trouver un ton juste en se perdant dans sa galerie de personnages.

© Metropolitan

H Auréolé du succès d’estime de End of Watch, qui était allé jusqu’à remporter l’adhésion du grand William Friedkin, le scénariste et réalisateur David Ayer (Bad Times) frappe un grand coup avec Sabotage : plus qu’un simple film d’action avec l’ancienne gloire Schwarzenegger, un thriller choral musclé, versant progressivement dans la paranoïa. On retrouve ici le goût du cinéaste pour les personnages à la morale relative, représentants de la loi et, en même temps, trempant dans l’illégalité par intérêt personnel. Or, à trop frayer avec les cartels, Breacher et sa troupe ont pris quelques mauvaises habitudes et se sont attiré les foudres de leur hiérarchie. Menacé, le groupe fait bloc, comme une famille de substitution (et dysfonctionnelle), avec Schwarzy en papa poule à sa tête. Ce thème des relations familiales dénaturées atteint son paroxysme dans la représentation du couple Monster/Lizzy, mais reste finalement sousexploité. Car avec un tel casting de gros bras, Ayer se devait de livrer un minimum de scènes explosives : il le fait avec efficacité, mais sans envie. Le réalisateur sait qu’en empiétant sur son intrigue policière, l’action réduit la visibilité de ses personnages. Et c’est le défaut qui finit par le rattraper : fondé sur une structure chorale, Sabotage ne définit pas suffisamment ses “héros”. À l’exception de l’impérial Schwarzy (qui accuse vraiment son âge) et de Mireille Enos - qui s’amuse à voler toutes les scènes où elle apparaît -, l’équipe de Breacher n’est finalement que de la chair à canon dénuée d’identité, des Expendables du pauvre. Dommage : en offrant à Schwarzenegger un vrai rôle de mentor usé par son passé, Ayer tenait sans doute un sujet inattendu et puissant. _Mi.G.

THRILLER Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Arnold Schwarzenegger (John “Breacher” Wharton), Sam Worthington (James “Monster” Murray), Olivia Williams (Caroline), Terrence Howard (Julius “Sugar” Edmonds), Joe Manganiello (Joe “Grinder” Phillips), Harold Perrineau (Jackson), Max Martini (Tom “Pyro” Roberts), Josh Holloway (Eddie “Neck” Jordan), Mireille Enos (Lizzy Murray), Martin Donovan (Floyd Demel), Kevin Vance (Bryce “Tripod” McNeely), Mark Schlegel (“Smoke” Jennings), Tim Ware (Stan Morris), Gary Grubbs (Lou Cantrell), Troy Garity (l’agent Spolcheck), Maurice Compte (Sapo), Jaime FitzSimons, Everton Lawrence, Marty Neko Parham, Catherine Dyer, Patrick Johnson, Michael Monks. Scénario : Skip Woods et David Ayer Images : Bruce McCleery Montage : Dody Dorn Réal. 2e équipe : Mike Gunther 1er assistant réal. : Jason Blumenfeld Scripte : Babette Smith Musique : David Sardy Son : Piero Mura Décors : Devorah Herbert Costumes : Mary Claire Hannan Effets spéciaux : David Fletcher Dir. artistique : Kevin Constant Maquillage : Tina Roesler Kerwin Casting : Mary Vernieu et Lindsay Graham Production : QED International, Crave Films et 5150 Action Coproduction : Albert S. Ruddy Productions et DEA Productions Production exécutive : Roth Films Producteurs : Bill Block, David Ayer, Ethan Smith, Paul Hanson et Palak Patel Distributeur : Metropolitan Filmexport.

109 minutes. États-Unis, 2014 Sortie France : 7 mai 2014

u RÉSUMÉ L’équipe d’agents de la DEA de Breacher - composée de Pyro, Grinder, Sugar, Neck, Smoke, Tripod, et de Monster et sa femme Lizzy - prend d’assaut la villa d’un narcotrafiquant. Alors qu’ils volent et dissimulent 10 millions de dollars, Smoke est tué. Puis l’argent se révèle introuvable. Le FBI diligente une enquête. Six mois plus tard, Floyd Demel, le supérieur de Breacher, clôt l’enquête. Breacher peut retrouver ses hommes, en sévère manque d’entraînement. SUITE... La troupe sort faire la fête après un exercice réussi. La nuit, Pyro meurt, percuté par un train. Les inspecteurs Caroline Brentwood et Darius Jackson mènent l’enquête. Puis Neck est exécuté selon une méthode typique des cartels mexicains. Caroline apprend que Breacher a été sous le coup d’une enquête interne. Tripod, qui avait démissionné, est tué par des mercenaires. Breacher et Caroline trouvent le cadavre de l’un d’eux. Monster révèle à Caroline que la famille de Breacher a été enlevée et torturée par les cartels. Breacher couche avec Caroline et se sert d’elle pour se tenir informé de l’enquête. Or, la piste du cartel est fausse : le coupable fait partie de l’équipe. Breacher confronte les siens : Lizzy avoue qu’elle trompe Monster avec Sugar. Grinder confie à Caroline qu’ils avaient dérobé l’argent. Mais il est abattu par Lizzy, qui a tout manigancé avec Sugar. Elle tue Monster puis tend un piège à Breacher. Aidé de Caroline, ce dernier l’élimine, ainsi que Sugar. Plus tard, au Mexique, il abat l’assassin de sa famille avant d’être grièvement blessé...

Visa d’exploitation : en cours. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 24- sarahpreferelacourse_Mise en page 1 30/04/14 17:22 Page1

Sarah préfère la course de Chloé Robichaud Sarah fuit la vie au pas de course. Cet intéressant premier film tente de cerner un mystère sans chercher à le comprendre. Il y parvient grâce à une scénographie très précise, et l’interprétation remarquable de la jeune Sophie Desmarais.

© La Boîte à Fanny

HH Qu’est-ce qui fait courir Sarah ? Le film ne nous le dira pas. Ce qui est sûr, c’est qu’elle fuit quelque chose. Elle n’a pourtant pas besoin de courir pour échapper à un environnement nuisible. Sa mère, aimante, ne partage peut-être pas la passion de sa fille, mais elle l’accepte. Quand Sarah court, elle vit. Mais on s’aperçoit bientôt que Sarah ne vit “que” quand elle court. Car les copines, les petits amis, faire la fête n’intéressent pas Sarah. Elle boit de l’alcool, fait l’amour, s’essaie aux relations sociales, mais aucune de ces expériences n’égale en intensité le plaisir du pas cadencé. Le film montre une jeune femme se pétrifier dans son obsession. Encore un portrait d’ado ; mal dans sa peau, cela va sans dire. Encore une psyché opaque, rétive à l’interprétation. Certes, rien de nouveau sous le soleil, le modèle ayant déjà été décliné à de multiples occasions, dans des œuvres parfois moins talentueuses. Toutefois, on saluera ici l’interprétation de Sophie Desmarais (Le Démantèlement) qui parvient à produire un jeu neutre, constamment traversé de micro fêlures. Sarah préfère la course est tout le contraire d’un récit d’apprentissage, ou la chronique d’une mutation. Grâce à des plans très composés, des rimes visuelles illustrant l’enfermement psychique, Chloé Robichaud radiographie une résistance plutôt qu’une transition. Car ici, la course suggère le surplace existentiel. Au moment du grand saut dans la vie adulte, Sarah s’accroche à ses “running”, et court, au risque de se fracasser contre un obstacle : la réalité. C’est le cœur de Sarah qui s’insurgera contre cette vie enfermée dans les couloirs des courses de demifond. Fuir le bonheur ne la sauvera pas. _J.C.

PORTRAIT Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Sophie Desmarais (Sarah Lepage), Jean-Sébastien Courchesne (Antoine Breton), Geneviève Boivin-Roussy (Zoey Gagnon), Hélène Florent (Isabelle), Micheline Lanctôt (l’entraîneuse de McGill), Eve Duranceau (Fanny), Pierre-Luc Lafontaine (Sean), Benoît Gouin (Richard), France Pilote (la greffière), Fred-Éric Savail (le médecin), Joseph Bellerose (le cardiologue), Catherine Renaud (l’entraîneuse junior), Julianne Côté (Françoise), AlexaJeanne Dubé (Camille), Carla Turcotte (Laurence), Naomie Turcotte (Marie, la sœur d’Antoine), Artur Gorishti (le fleuriste), Louis Labarre (le type à la fête), André Beaupré (le gérant du restaurant), Dany Tremblay et France Fortin (les clients), Audrey Bellehumeur, Ginette Haché, Gabrielle Lessard, Danielle Leseaux-Farmer, Sarah Pellerin, Nadia Rochefort, Laurie Aylwin-Descôteaux, Alexandre Desmarais, Carolina Tsé, Claudelle PrévostCormier, Anne-Laure Ménard, Jessica Portofilio. Scénario : Chloé Robichaud Images : Jessica Lee Gagné Montage : Michel Arcand 1re assistante réal. : Catherine Kirouac Scripte : Patrick Aubert Son : Jean-François Sauvé et François Grenon Décors : Bruno-Pierre Houle Costumes : Noémi Poulin Effets visuels : Hugo Léveillé Maquillage : Tammy-Lou Pate Production : La Boîte à Fanny Productrice : Fanny-Laure Malo Prod. exécutifs : René Malo et Chloé Robichaud Distributeur : Aramis Films.

97 minutes. Canada [Québec], 2013 Sortie France : 7 mai 2014

u RÉSUMÉ Sarah, jeune Québécoise de 20 ans, n’aime rien tant que courir. Elle participe à des meetings d’athlétisme, et souhaite continuer à vivre de cette passion. Pour cela, elle projette de partir à Montréal afin de s’entrainer pour les prochains Jeux Olympiques. Sa mère est réticente, inquiète pour sa sécurité matérielle. Antoine, un ami, lui propose de partir avec lui et de partager un appartement à Montréal. Sa mère la laisse partir. Antoine découvre que s’ils se mariaient, ils pourraient décrocher une bourse pour payer leurs études. Après avoir hésité, Sarah accepte de se prêter au mariage blanc. Elle peine à établir le contact avec les gens de son âge, ne s’amuse pas pendant les soirées étudiantes, à l’inverse d’Antoine qui s’intègre facilement. SUITE... N’ayant pas de vie sentimentale, elle tente parfois de timides démarches de séduction. Elle repousse les avances d’Antoine, puis les accepte. Ils font l’amour. L’expérience n’est pas concluante, et Sarah ne souhaite pas la répéter. Après avoir un peu trop bu, elle fait un malaise. Un médecin décèle une anomalie cardiaque. Elle subit des examens à l’hôpital, et doit porter pendant un temps un capteur qui déterminera si elle peut continuer à courir sans danger pour sa santé. Son colocataire, amoureux éconduit de Sarah, décide de quitter Montréal. Sarah reste. Elle choisit d’ôter les capteurs et de continuer malgré tout à courir. Pendant un sprint, une douleur dans la poitrine la fait grimacer.

Visa d’exploitation : 139536. Format : 1,66 - Couleur - Son : Dolby SRD. 45 copies.

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2059 - 25- voiedelennemi_Mise en page 1 30/04/14 17:26 Page1

La Voie de l’ennemi [Enemy Way] de Rachid Bouchareb Un prisonnier fraichement libéré lutte contre son passé. Desservi par un scénario qui s’éparpille, La Voie de l’ennemi - deuxième film de la trilogie américaine de R. Bouchareb - brasse les influences sans égaler jamais la sombre alchimie des grands films noirs.

© Gregory Smith / Tessalit - Pathé

HH Bien que sans rapport avec le premier roman de Tony Hillerman, dont il emprunte le titre français, La Voie de l’ennemi partage avec celui-ci le décor très Far West du Nouveau Mexique, les meilleurs plans du film semblant d’ailleurs invoquer John Ford. Fort d’un beau casting, ce nouveau film de R. Bouchareb n’en repose pas moins sur un scénario submergé de bonnes intentions où surnagent des immigrés clandestins mexicains, l’expression d’une certaine islamophobie, les relations mère/fils, la dualité de l’homme, le destin... Cet agrégat de rouages ne prend pas, jamais ne se fait entendre le doux cliquetis d’un mécanisme bien huilé, le sens du tragique propre aux grands films noirs étant porté disparu. À l’image de Deux hommes dans la ville - réquisitoire contre la peine de mort de José Giovanni où, sous les traits d’un policier, Michel Bouquet incarnait une figure du fatum tandis que le prisonnier en conditionnelle n’était voué qu’à fauter de nouveau - auquel La Voie de l’ennemi emprunte ses personnages et quelques lignes de dialogues. Mais là où Bouquet péchait par fatalisme, Bill Agati n’obéit qu’au désir de vengeance, motif hélas plus simpliste. Reste la superbe prestation de Forest Whitaker pris dans un étau, entre la justice, l’impossible pardon du Shérif, l’espoir porté par son agent de probation, Terrence, le vil tentateur et Teresa pour laquelle il aspire à une vie meilleure, dilemmes dont le protagoniste, en lutte contre ses pulsions, son vain désir d’abolir le passé, est la proie. Il faut le voir dès lors, balloté par sa colère, lutter contre lui-même, chercher son salut dans la religion et tenter, lamentablement, de forcer son destin. _P-J.M.

FILM NOIR Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Forest Whitaker (William Garnett), Harvey Keitel (Bill Agati), Brenda Blethyn (Emily Smith), Luis Guzmán (Terence), Dolores Heredia (Teresa Flores), Ellen Burstyn (la mère de Garnett), Reg E. Cathey (le superviseur Jones), Tim Guinee (Rod), Sarah Minnich (Christina), Stan Carp (Richard Wayne), Kristin Hansen (Maria Perez), Michael Stone (l’adjoint du shérif), Robyn Reede (la conseillère à l’embauche), Matthew Page (le garde de prison), Chris Ranney (l’homme en liberté conditionnelle), Patrick Juarez, Cesar Miramontes, Aaron Alexander, Lionel Archuleta, Cheo Tapia, John F. Kollar, Paul Caster, Daniel Serrano, Greg Mascarena. Scénario : Olivier Lorelle, Yasmina Khadra et Rachid Bouchareb Images : Yves Cape Montage : Yannick Kergoat 1er assistant réal. : Mathieu Schiffman Scripte : Élodie Van Beuren Musique : Éric Neveux Son : Jean-Yves Munch, Olivier Walczak, Thomas Gauder et Sébastien Wera Décors : Yan Arlaud Costumes : Graciela Mazon Effets visuels : Hugues Namur Casting : Avy Kaufman Production : Tessalit et Pathé Coproduction : AARC, France 2 Cinéma, Cohen Media Group, Solenzara Films, Artists & Co, Tassili Films et Scope Pictures Producteurs délégués : Jean Bréhat et Jérôme Seydoux Productrice exécutive : Geneviève Lemal Coprod. : Mustapha Orif, Jonathan Blumental, Charles S. Cohen, Allen Bain et Abdelkrim Bouchareb Distributeur : Pathé.

118 minutes. France - Belgique - États-Unis, 2013 Sortie France : 7 mai 2014

u RÉSUMÉ Muni d’une pierre, un homme en tue un autre dans le désert du Nouveau Mexique. Emily Smith, contrôleur de justice, emménage dans cet État. Libéré de prison - où il a trouvé foi en Allah - après avoir purgé sa peine pour le meurtre d’un adjoint du shérif Bill Agati, Garnett, en conditionnelle, est suivi par Emily, qui lui détaille les règles très strictes auxquelles il doit se soumettre. Garnett achète une moto, savoure sa liberté recouvrée, se fait embaucher par Rod, un fermier. Pour avoir vu son collaborateur assassiné voici vingt ans, Agati est déterminé de son côté à ne pas le lâcher. En désaccord avec Agati, Emily tient à lui laisser sa chance. Garnett ouvre un compte à la banque, où il tombe sous le charme d’une jeune employée : Teresa. SUITE... Ils se retrouvent tous les deux dans un bar où Garnett croise son ancien complice, Terence, lequel lui propose d’être à nouveau partenaires, ce qu’il refuse. Harcelé par Agati, Garnett, sur les nerfs, a une altercation avec un voisin. À Emily, qui s’apprête à le réexpédier en prison, il explique les raisons du litige. Après avoir renoncé à le faire, Emily s’oppose à Bill une nouvelle fois. Ce dernier rend visite à Rod, et provoque le licenciement de Garnett. Celui-ci retrouve sa mère, lui demande pardon de ses erreurs d’autrefois. Terence se rend chez Teresa et l’agresse violemment. En représailles, Garnett prend Terrence en embuscade et le tue d’un coup de pierre.

Visa d’exploitation : 135208. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 100 copies (vo [anglaise] / vf).

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La Chambre bleue de Mathieu Amalric Récit d’une passion adultère entachée de mort, La Chambre bleue est un film d’intérieur au sens fort du terme : un véritable puzzle mental, hypnotique et nébuleux. Par touches impressionnistes, M. Amalric signe là une brillante adaptation de G. Simenon.

DRAME CRIMINEL Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Mathieu Amalric (Julien Gahyde), Léa Drucker (Delphine Gahyde), Stéphanie Cléau (Esther Despierre), Laurent Poitrenaux (le juge Diem), Mona Jaffart (Marianne Gahyde), Joseph Ancel (le juge). Scénario : Mathieu Amalric et Stéphanie Cléau D’après : le roman de Georges Simenon (1964) Images : Christophe Beaucarne Montage : François Gédigier 1re assistante réal. : Amandine Escoffier Musique : Grégoire Hetzel Son : Olivier Mauvezin et Stéphane Thiébaut Effets visuels : Damien Stumpf et JeanFrançois Michelas Production : Alfama Films Coproduction : Arte France Cinéma Producteur : Paulo Branco Dir. de production : Thierry Cretagne Distributeur : Alfama Films.

© Alfama Films

HHH Constitué exclusivement de bribes de souvenirs arrachés à un homme lors de son interrogatoire, La Chambre bleue est probablement un des plus nébuleux romans de Georges Simenon, un de ces puzzles mentaux, poisseux, intenses et hypnotiques, dont il avait le troublant secret. Autant dire : un roman inadaptable. Et pourtant, Mathieu Amalric, épaulé par l’actrice Stéphanie Cléau, relève haut la main le défi de cette adaptation. Il parvient même à trouver une forme cinématographique en totale adéquation avec le style de l’écrivain. Attentive au moindre détail, sa caméra joue sans cesse sur la profondeur de champ, accentuant certains détails pour en laisser d’autres, littéralement, dans le flou. Usant d’un montage habile, il procède ainsi par vignettes impressionnistes et mêle les époques sans jamais rompre le fil de son récit. Les scènes qui, dans la plupart des polars, ont des allures de passages obligés (arrestations, interrogatoires, procès) prennent ici un sens inédit. Car La Chambre bleue est un film d’intérieur au sens fort du terme : Amalric entraine de force le spectateur dans la tête du personnage principal - qu’il interprète avec une rare économie de moyens -, effleurant ses zones d’ombres, laissant ses silences en suspens. Il traduit alors toute la densité de l’intime, dont la complexité ne peut qu’échapper à ceux qui se placent en analystes et juges. Passée au crible du soupçon et du doute, toute histoire est condamnable et chacun d’entre nous apparaît comme un coupable en puissance. Respectant tout à la fois l’esprit et la lettre du roman, La Chambre bleue impose Amalric en digne successeur de Claude Chabrol et de son envoûtante adaptation de Betty. Brillant. _C.L.

75 minutes. France, 2014 Sortie France : 16 mai 2014

u RÉSUMÉ Julien et Esther font l’amour dans une chambre d’hôtel. Plus tard, face aux policiers qui l’ont arrêté, au juge Diem qui instruit son procès et au psychiatre chargé de l’évaluer, Julien tente de raconter ce qu’il s’est passé. Marié à Delphine, dont il a une fille, Julien entretient une liaison adultère avec Esther, amie d’enfance longtemps perdue de vue, et femme du pharmacien Nicolas Despierre. Un jour, par la fenêtre de la chambre de l’hôtel, Julien voit Nicolas s’approcher. Il prend peur et, le lendemain, emmène sa famille en week-end. Il ne reverra plus Esther. SUITE... Julien reçoit des lettres d’Esther que, devant le juge, il nie avoir jamais eues. Gravement malade, Nicolas meurt soudain. Nouvelle lettre : “À toi”. Le juge Diem organise une confrontation entre Esther et Julien, sous-entendant que les amants ont agi de concert. Julien s’en prend alors à Esther. Autre journée d’instruction : Julien se rappelle avoir récupéré à la pharmacie des pots de confiture commandés par Delphine. Le soir, il est arrêté par la police : Delphine est morte empoisonnée. Au procès, les deux amants comparaissent côte à côte. La mère de Nicolas témoigne : pour elle, l’assassinat de Delphine apporte la preuve que sa belle-fille a tué son fils. Pendant sa déposition où elle raconte avoir réceptionné les pots de confiture, Julien soupçonne qu’elle pourrait être à l’origine de l’empoisonnement. Au terme du procès, Julien et Esther sont condamnés à perpétuité.

Visa d’exploitation : 136519. Format : 1,66 - Couleur - Son : Dolby SRD.

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© les Fiches du Cinéma 2014 - N°2059


2059 - 27- charliecountryman_Mise en page 1 30/04/14 17:29 Page1

Charlie Countryman (The Necessary Death of Charlie Countryman) de Fredrik Bond À la fois thriller âpre, comédie déjantée et romance dramatique, Charlie Countryman est un trip sous acide entre Snatch et True Romance. Mais il est vite plombé par une esthétique pompeuse et un scénario qui, en dépit d’encourageantes prémices, se révèle brouillon.

© MediaPro Pictures

H Le visage ensanglanté, suspendu dans le vide par les pieds : dès la scène d’exposition il est clair que le dénommé Charlie Countryman va vivre une histoire violente et renversante. Ce loser au grand cœur, reçu à son baccalauréat poisse avec mention, se retrouve mêlé, bien malgré lui, à une sombre affaire. Rien de bien nouveau dans cette recette, certes, mais les premières minutes nous font pourtant espérer un plat moins réchauffé. Shia LaBeouf campe avec brio un personnage attachant, et la veste en jean de Charlie lui va comme un gant. De plus, comme c’est un romantique à l’imagination fertile, le film recèle une dimension surréaliste, à la fois tendre et onirique. Et comme c’est aussi un gaffeur n’ayant pas la langue dans sa poche, qui rencontre le plus souvent des personnages hors du commun, le film est également souvent drôle et délirant. Mais Charlie finit hélas par se prendre les pieds dans le tapis (quoi de plus logique pour un p’tit gars maladroit, me direzvous...). La faute à un scénario au souffle court, et surtout à une mise en scène tape-à-l’oeil. En effet, le réalisateur (son nom est Bond, Frederick Bond) vient de la pub et du clip, et il nous le fait fortement sentir. Comme on sucrerait à outrance un gâteau par peur de la fadeur, il surdose son premier long-métrage en effets de toutes sortes (ralentis, shaky-cam, lumières saturées, techno à fond). Le film est alors dans une surenchère permanente, et confond souvent rythme et hystérie. Disparate et inaboutie, cette série B, sympathique malgré tout, vaut surtout pour ses acteurs : Mads Mikkelsen, parfait en gangster jaloux, la belle Evan Rachel Wood, ou les apparitions de Vincent D’Onofrio et Melissa Leo. C’est peu, mais c’est déjà ça. _G.A.

THRILLER Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Shia LaBeouf (Charlie Countryman), Evan Rachel Wood (Gabi Ibanescu), Mads Mikkelsen (Nigel), Til Schweiger (Darko), Rupert Grint (Karl), James Buckley (Luc), Ion Caramitru (Victor Ibanescu), Vincent D’Onofrio (Bill), Melissa Leo (Kate), Andrei Finti (Bela), Vanessa Kirby (Felicity), Gabriel Spahiu (le chauffeur de taxi), Bogdan Farcas (le directeur de l’auberge), Florin Piersic Jr. (Radu), Adrian Nicolae (le type au comptoir), Claudiu Trandafir (le vieux policier), Emilian Marnea (Petru), Corneliu Ulici (Paul), Michael J. Reynolds (le docteur), Cosmin Padureanu (Bosko), Adrian Pavlovschi (Pedrag), Musat Dragos, Serbanescu Florin, Andreescu George, Ioan Ionescu, la voix de John Hurt (le narrateur). Scénario : Matt Drake Images : Roman Vasyanov Montage : Hugues Winborne Réal. 2e équipe : Hugo Stenson 1er assistant réal. : Mark Taylor Scripte : Andra Barbuica Musique : Christophe Beck et Deadmono Son : Chad J. Hughes et Aaron “Luc” Levy Décors : Joel Collins Costumes : Jennifer Johnson Effets visuels : Fredrik Nord et Oskar Larsson Dir. artistique : Adrian Curelea Maquillage : Andreea Dardea Casting : John Hubbard Production : MediaPro Pictures Coproduction : Bona Fide Productions Production exécutive : Voltage Pictures Producteurs : Albert Berger, Ron Yerxa, Craig J. Flores et William Horberg Distributeur : Marco Polo - Aventi / DistriB Films.

108 minutes. Roumanie - États-Unis, 2013 Sortie France : 14 mai 2014

u RÉSUMÉ Charlie Countryman, un jeune homme paumé, vient de perdre sa mère. Celle-ci lui apparaît et lui conseille de se rendre à Bucarest. Dans l’avion, il fait la connaissance de Victor, qui meurt pendant le vol. Une fois en Roumanie, Charlie rencontre Gabi, la fille de Victor, et tombe sous son charme. Il décide de la conduire à l’hôpital, mais, suite à un accident, elle part dans l’ambulance transportant son père, et Charlie se retrouve seul. Il se rend à l’opéra où exerce Gabi, qui est musicienne. Il y croise son ex-mari, Nigel, un dangereux mafieux... SUITE... Charlie séjourne dans une auberge de jeunesse, où il prend de la drogue avec Luc et Karl, deux touristes, puis finit la soirée avec Gabi. Suite à une altercation dans un club de strip-tease, Charlie, Karl et Luc sont convoqués dans le bureau du patron, Darko, qui accepte de les laisser partir si Charlie lui dit où se cache Nigel. Charlie retrouve Gabi à une soirée donnée en mémoire de son père. Nigel débarque et menace Charlie. Gabi, armée, le fait fuir. Charlie et Gabi couchent ensemble. Elle lui révèle que Darko et Nigel cherchent une cassette vidéo compromettant Nigel. Charlie la retrouve. Il est pris en chasse par les hommes de Darko, mais leur échappe. Pour le protéger, Gabi le quitte. Nigel attrape Charlie et le suspend dans le vide au-dessus d’un barrage pour le faire parler. Pour détourner son attention, Gabi fait mine de tirer sur Charlie. La police arrive et abat Nigel. Gabi retrouve Charlie.

Visa d’exploitation : 139400. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 100 copies (vo [anglaise]).

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2059 - 28- cristeros_Mise en page 1 30/04/14 17:30 Page1

Cristeros (For Greater Glory - The True Story of Cristiada) de Dean Wright Revenant sur un épisode tragique et méconnu de l’histoire mexicaine, Cristeros manque à la fois de souffle et d’ambition formelle pour tenir la durée d’une fresque, et peine à faire la part des choses entre plaidoyer pour la liberté et prosélytisme chrétien.

© Saje Dist.

H Fresque historique d’un classicisme compassé, Cristeros ne fait pas dans la dentelle, orchestrant avec un schématisme certain son récit autour de deux leaders Cristeros - ainsi que se faisaient appeler les catholiques mexicains luttant contre l’oppression sanglante du président Callès - que tout oppose : d’un côté, l’homme de bien épousant à regret la cause de la lutte armée (Andy Garcia), de l’autre le franc-tireur intrépide et sans pitié (Oscar “Llewyn Davis” Isaac). Dans la forme, rien que de très ordinaire (mais rien de déshonorant non plus), entre intérieurs nocturnes aux teintes bleutées, où flotte un élégant sfumato rappelant le travail de Janusz Kaminski, directeur de la photographie de Spielberg, et batailles convoquant l’imaginaire du western. En revanche, les discours du charismatique général - motivant ses lieutenants, puis ses troupes - sur la foi, l’honneur et le sens du devoir, flanqués d’une musique pontifiante, sont littéralement assommants, et l’ensemble manque de souffle pour tenir la distance (2h23 au compteur). Le film peine surtout à régler un curieux paradoxe : le récit insiste sur le fait que le combat des Cristeros, au-delà de la défense du culte catholique, est avant tout affaire de liberté (dont on nous rappelle, à toutes fins utiles, qu’elle “ne peut être qu’absolue”), mais fait de l’un de ses jeunes héros un martyr tout ce qu’il y a de chrétien, en lui infligeant un succédané de chemin de croix, stigmates et déploration compris. Et s’il met en avant un personnage de Cristero athée, c’est pour lui faire entonner, en bout de course, un vibrant “Viva Cristo Rey !” (“Vive le Christ Roi !”). Déconcertant. _T.F.

FRESQUE HISTORIQUE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Andy García (Enrique Gorostieta), Oscar Isaac (Victoriano Ramirez, dit Quatorze), Catalina Sandino Moreno (Adriana), Santiago Cabrera (le Père Vega), Rubén Blades (le Président Calles), Bruce McGill (le Président Coolidge), Adrián Alonso (Lalo), Eva Longoria (Tulita Gorostieta), Peter O’Toole (le Père Christopher), Eduardo Verástegui (Anacleto Gonzales Flores), Mauricio Kuri (José), Nestor Carbonell (le maire Picazo), Karyme Lozano (la mère de José), Bruce Greenwood (l’ambassadeur Dwight Morrow), Patricia Garza (Fernanda Gonzales Flores), Alan Ramírez, Estefania Alejandra, Raúl Adalid, Erando González, Jorge Luis Moreno, Ignacio Guadalupe, María Fernanda Urdapilleta, Martha Cecilia Flores, Carlos Alvarez, Fernando Moya, Fernando Mayo, Raúl Méndez, Ilse Zamarripa, Arturo Vázquez, Guillermo Larrea. Scénario : Michael Love Images : Eduardo Martínez Solares Montage : Richard Francis-Bruce et Mike Oden Jackson Réal. 2e équipe : Álvaro Curiel 1er assistant réal. : René Villarreal Musique : James Horner Son : Dane A. Davis Décors : Salvador Parra Costumes : María Estela Fernández Dir. artistique : Ezra Buenrosto Maquillage : Carla Tinoco Casting : Dianne Crittenden, Karen Rea et Manuel Teil Production : Dos Corazones Films et NewLand Films Producteur : Pablo José Barroso Distributeur : Saje Distribution.

143 minutes. Mexique, 2012 Sortie France : 14 mai 2014

u RÉSUMÉ Mexique, 1926. Le président Callès promulgue une loi réprimant de façon drastique les pratiques religieuses. Le père Christopher, partisan d’une résistance pacifique, prend le jeune José sous son aile. De manifestations en pétitions, les catholiques expriment leur mécontentement. En réaction, l’armée se livre à des massacres au sein même des églises, et le père Christopher est fusillé sous les yeux de José. L’opposition, qui compte dans ses rangs l’intrépide Victoriano, vire à la lutte armée. Fort du soutien de sa femme Tulita, fervente catholique, Enrique Gorostieta, industriel athée et ancien général, accepte d’en prendre le commandement. José rejoint les rangs des insurgés. Enrique se prend aussitôt d’affection pour l’enfant. SUITE... Les exactions punitives se multiplient, à la suite d’une opération des Cristeros ayant fait de nombreuses victimes civiles. Militante de la première heure, Adriana assiste à l’assassinat de son ami Anacleto. Victoriano et ses hommes tombent dans une embuscade, mais sont secourus par Enrique. Lors d’une bataille, José disparaît. Victoriano périt au combat. Pendant ce temps, l’ambassadeur des États-Unis, dont les concessions pétrolières au Mexique sont remises en cause par Callès, tente de négocier l’arrêt des combats. Capturé par l’armée, José, refusant de renier sa foi, est torturé puis abattu. Au cours d’un ultime assaut, Enrique meurt en héros. En 1929, un décret autorise à nouveau la pratique du culte catholique.

Visa d’exploitation : 139560. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 29- gaudi_Mise en page 1 30/04/14 17:31 Page1

Gaudí Le Mystère de la Sagrada Família (Sagrada - El Misteri de la creació) de Stefan Haupt Un architecte génial, une œuvre unique à l’histoire tourmentée, un chantier sans fin… La Sagrada Familia a tout pour fasciner. Le film de Stefan Haupt se résume hélas à un récit académique qui se perd dans l’anecdote et parle, au fond, peu d’architecture.

DOCUMENTAIRE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Scénario : Stefan Haupt Images : Patrick Lindenmaier Montage : Christof Schertenleib Musique : J.P. Goljadkin Son : Francesc Canals Production : Fontana Film Producteur : Stefan Haupt Distributeur : Sophie Dulac Distribution.

© Sophie Dulac Dist.

H Retraçant l’histoire du plus célèbre “work in progress” de l’histoire de l’architecture moderne, le film de Stefan Haupt s’ouvre sur un personnage androgyne apparaissant puis disparaissant devant un mur de la cathédrale. La voix off introduit avec pompe le récit, sur fond de musique sacrée et quelques plans plantent le décor : grues, interminable file d’attente de touristes, ouvriers en plein travail... De la première pierre posée le 19 mars 1882 aux plus récentes péripéties du chantier en passant par l’époque franquiste qui empêcha la poursuite des travaux, les moindres aléas du titanesque projet nous sont contés. Diverses interventions ponctuent le déroulé de l’exposé : chef de chantier, architecte en chef, sculpteur, peintre sur verre... La biographie et la personnalité de Gaudí sont également largement évoquées, de son enfance dans un décor de rochers monumentaux dont les formes l’auraient inspiré, à sa mort en 1926, alors qu’il avait élu domicile dans sa cathédrale et vivait dans les conditions les plus modestes. Formellement, on est entre le son et lumière et le dépliant d’office du tourisme. La voix off enchaîne les lieux communs impersonnels sur l’architecture et sur le génie créateur, et les propos des différents acteurs sont réduits à l’anecdote. À aucun moment on ne parle en détails d’architecture. Le spectateur est censé accepter le fait que Gaudí est génial, que son œuvre est unique, mais on n’explique jamais en quoi. Oui, bien sûr, on dit rapidement que l’artiste s’inspire des formes de la nature, mais pas précisément comment. Et comment construisait-on à l’époque de Gaudí, en Espagne et ailleurs ? À part ce qui saute aux yeux même pour le profane, en quoi cette architecture est-elle novatrice ?

89 minutes. Suisse, 2012 Sortie France : 14 mai 2014

Le film n’entre jamais dans ces considérations, ou fait semblant de le faire. L’histoire du bâtiment est-elle vraiment ce qu’il y a de plus intéressant ? C’est comme si un film sur la Joconde ne nous parlait que des péripéties qui entourèrent le tableau, comment il fut volé, comment on le retrouva, etc. L’aspect historique aurait pu tenir en dix minutes et le reste du film se concentrer sur l’essentiel. Un moment sort malgré tout du lot. Lorsque le sculpteur japonais Etsuro Sotoo parle de sa “conversation avec la pierre”, ce “maître” qui lui dit, par le son qu’il émet, si son burin frappe là où il faut ou s’il a commis une erreur, le film prend pour quelques instants une autre dimension. En optant pour une narration scolaire, des interventions brèves et en perdant du temps avec des séquences totalement inutiles (Benoît XVI consacrant la Nef...), le réalisateur nous prive d’une véritable approche du mystère de cette œuvre. On peut mettre cependant à son crédit le fait d’avoir évoqué les critiques qui entourent encore la construction, notamment la façade de la Passion, toute en angles, sculptée par Subirachs. Mais si le film n’est pas exempt de moments intéressants, on ne voit pas très bien en quoi il a sa place au cinéma. Les fans de Gaudí n’apprendront probablement rien, et les autres resteront sur leur faim tant on a le sentiment d’assister à l’illustration d’un article de Wikipédia. _G.R.

Visa d’exploitation : 139207. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 80 copies.

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2059 - 30- lignedeau_Mise en page 1 30/04/14 17:32 Page1

Ligne d’eau (Plynace wiezowce) de Tomasz Wasilewski Deuxième film de Tomasz Wasilewski, Ligne d’eau remet, à la suite de Aime, l’ouvrage sur le métier en évoquant, sans détours, l’homosexualité, l’un des écrasants tabous de la société polonaise. Interprétation élégante et mise en scène ciselée.

DRAME Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Mateusz Banasiuk (Kuba), Marta Nieradkiewicz (Sylwia), Bartosz Gelner (Michal), Katarzyna Herman (Ewa, la mère de Kuba), Izabela Kuna (Krystyna, la mère de Michal), Olga Frycz (Monika), Miroslaw Zbrojewicz (Jacek, le père de Michal), Mariusz Drezek (l’entraîneur), Katarzyna Maciag (Ania), Michal Grzybowski (Pawel), Michal Podsiadlo (Witek), Aleksandra Bednarz (Weronika), Katarzyna Roslaniec (Matylda), Orina Krajewska (la serveuse), Mateusz Lasowski (Kacper), Wojciech Sikora (Piotrek), Stanislaw Banasiuk (l’homme du restaurant), Krzysztof Makarewicz, Tomasz Chrapusta, Anna Kerth. Scénario : Tomasz Wasilewski Images : Kuba Kijowski Montage : Aleksandra Gowin Réal. 2e équipe : Natalia Siwicka Musique : Baasch Décors : Jacek Czechowski Costumes : Monika Kaleta Maquillage : Ewa Kowalewska Production : Alter Ego Pictures et Polish Film Institute Coproduction : Film Point Group, Super Krak Producteurs : Roman Jarosz et Izabela Igel Coproductrice : Natalia Siwicka Distributeur : Outplay.

© Ouptlay

HHH Après Aime - Et fais ce que tu veux de Malgorzata Szumowska, sorti en début d’année, il semble manifeste que de jeunes cinéastes polonais se sentent enclins à évoquer sans détours les questions relatives au tabou écrasant que représente l’homosexualité dans la société polonaise. Écartelé entre une mère possessive, une petite amie aimante et les performances sportives qu’il est tenu de réaliser, un jeune homme promis à un bel avenir, mais sur lequel pèsent manifestement trop d’attentes, trouve une ligne de fuite dans le désir qu’il se met à éprouver pour un étudiant à la beauté singulière. Profondément troublé par cette attirance imprévue, il n’en part pas moins à la découverte d’un corps, d’un territoire inédit, et de ses propres réserves de sensualité dont, de toute évidence, il ne soupçonnait pas l’existence. Essentiellement tourné en long plans-séquences, superbement cadré, Ligne d’eau filme, non sans pudeur, la levée de boucliers que va provoquer Kuba en s’écartant du chemin tout tracé qu’il n’avait qu’à suivre. Sans jamais prendre l’allure d’un réquisitoire contre l’homophobie, ce deuxième film de Tomasz Wasilewski n’en dépeint pas moins sans équivoques, une société fermée à l’idée même d’homosexualité comme à toutes formes probablement de sexualité “déviante”. De telle sorte qu’entre une mère qui interdit à son fils, adulte, de revoir l’homme dont il est épris et qui le rend heureux, un père, celui de Michal, qui, semble-t-il, ne sortira jamais du déni dans lequel le plonge le coming-out de son fils, et un Kuba qui finit par rentrer dans le rang, vaincu par la pression familiale et sociale comme par ses propres interdits, le bilan est sans appel. Et glaçant. _R.H.

85 minutes. Pologne, 2013 Sortie France : 14 mai 2014

u RÉSUMÉ Jeune homme athlétique, Kuba s’entraîne dans l’espoir de devenir champion de natation. Au terme d’un d’entraînement intensif, il retrouve Sylwia, sa copine, et l’accompagne à un vernissage où il fait la connaissance de Michal. Le lendemain, de retour à la piscine, il croise Michal. Mal à l’aise, il met fin à la fellation que lui fait celui-ci dans un vestiaire. Le soir venu, alors qu’il s’apprête à faire l’amour avec Sylwia, il part le rejoindre dans sa voiture où ils passent la nuit. Le jour suivant son entraîneur lui met la pression sur ses performances. Puis il part avec Michal dans une longue virée en train de marchandises tandis que Sylvia s’inquiète de le sentir s’éloigner. Un soir, tous les trois partagent un dîner dont l’atmosphère est pesante. En séance de qualification, à laquelle Sylwia est venue assister, Kuba abandonne délibérément la course qu’il dominait, ce que ne comprend pas son coach. Traité de tantouze pas un inconnu, Kuba le roue de coups. SUITE... Puis il se dispute avec sa mère, femme possessive, chez laquelle il vit avec Sylwia. Au cours d’un week-end qu’ils passent ensemble, Michal, Kuba et une inconnue font mine de faire l’amour à trois. Après les avoir surpris, Sylwia comprend que Kuba est amoureux de Michal. S’ensuit une explication entre Sylwia, Michal et sa mère où celui-ci apprend que Sylwia est enceinte. Ewa exige qu’il cesse de voir Michal qui rompt avec le jeune homme. Sauvagement agressé dans un parking, Michal meurt.

Visa d’exploitation : en cours. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 30 copies (vo).

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2059 - 31- michaelhaneke_Mise en page 1 30/04/14 17:33 Page1

Michael Haneke Profession réalisateur de Yves Montmayeur D’Amour au Septième continent : toute l’œuvre de Michael Haneke parcourue à rebours. Empruntant au registre promotionnel (making-of et interviews), un documentaire malheureusement peu analytique, qui témoigne de la jouissance d’Haneke au travail.

DOCUMENTAIRE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Michael Haneke, Jean-Louis Trintignant, Emmanuelle Riva, Josef Bierbichler, Emily Cox, Susanne Lothar, Béatrice Dalle, Isabelle Huppert, Juliette Binoche. Scénario : Yves Montmayeur Images : Yves Montmayeur, Attila Boa et Stéphane Rossi Montage : Oliver Neumann Production : Crescendo Films Coproduction : Wildart Film et Les Films du Losange Producteurs : Vincent Lucassen, Ebba Sinzinger et Serge Guez Distributeur : KMBO.

© Crescendo Films

H D’Amour en 2012 au Septième continent en 1989, Michael Haneke - Profession réalisateur parcourt à rebours la filmographie du cinéaste autrichien, à travers des extraits de ses films, des reportages sur ses tournages et une série d’interviews réalisées tout au long de sa carrière. D’emblée, dans l’entretien le plus récent qui ouvre le documentaire et fait office de fil conducteur, Michael Haneke fixe les limites de l’exercice : affable et disert, il n’en demeure pas moins rétif à toute analyse de son œuvre, se refusant à toute forme d’explication psychologique, sociologique ou surtout biographique. Chacun de ses films se suffit à lui-même, dit-il en substance, et rien ne doit venir biaiser la lecture qu’en fera le public. Par avance, Michael Haneke verrouille donc ses réponses pour que ses commentaires échappent au piège de l’intentionnalité. Cette impossibilité à faire parler Michael Haneke - et donc, dans une certaine mesure, à réaliser un film sur/avec lui -, aurait pu donner lieu à une captivante joute oratoire entre intervieweur et interviewé, dévoilant ainsi, en creux, quelque chose de la personnalité - au choix, rigide ou pudique - du cinéaste. Mais Yves Montmayeur, monteur de la plupart des making of de Michael Haneke, semble par trop fasciné - ou vampirisé - par son sujet et choisit une forme d’esquive qui finit par ressembler à un contre-sens. Il distille en effet d’autres interviews du cinéaste et de ses comédiens qui, réalisées lors de la sortie des films, pendant leur présentation au festival de Cannes ou sur les tournages, s’en tiennent au seul registre promotionnel. En guise d’analyse, Michael Haneke se résume alors à un catalogue de phrases-chocs et d’explications clés en main, pour

92 minutes. France - Autriche, 2013 Sortie France : 14 mai 2014

le moins frustrantes. Dommage... Autre parti pris aussi incompréhensible que regrettable : si le documentaire se présente comme une monographie exhaustive, il fait inexplicablement l’impasse sur Funny Games US - alors que, en pleins repérages pour Caché, Haneke ironise sur le cinéma américain et les propositions affligeantes qu’il a reçues d’Hollywood. Les passages les plus intéressants du film sont finalement ceux qui montrent les tournages d’Amour, du Ruban blanc, de Caché, de La Pianiste ou de Code inconnu. S’ils empruntent, eux aussi, au registre promotionnel, ces extraits de making-of n’en témoignent pas moins avec pertinence de l’exigence, du sens du détail, de l’autorité, et aussi d’une certaine forme de facétie et de plaisir..., en un mot de la jouissance d’Haneke au travail. Il faut voir ce dernier diriger avec gourmandise Jean-Louis Trintignant et Emmanuelle Riva ; il faut le suivre dans la préparation du long plan séquence inaugural de Code inconnu. Il s’impatiente, recommence, s’en prend à un figurant, tyrannise acteurs et techniciens, recommence encore, avant de s’avouer enfin satisfait. Ces séquences rappellent les belles heures du magazine télévisé Cinéma Cinémas de Claude Ventura, Anne Andreu et Michel Boujut. Pas de commentaire, pas d’analyse, pas d’interview : elles éclairent simplement le créateur, plutôt que de chercher à expliciter la création. _C.L.

Visa d’exploitation : 139500. Format : 1,77 - Couleur - Son : Dolby SRD. 30 copies.

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2059 - 32- misealepreuve_Mise en page 1 30/04/14 17:34 Page1

Mise à l’épreuve (Ride Along) de Tim Story Le grand flic méchant et le petit flic rigolo, association incongrue dont le meilleur n’est pas toujours celui qu’on imagine. Un film pas bien intelligent, mais assez divertissant pour peu qu’on accepte de revoir à la baisse ses ambitions intellectuelles.

© Universal

H D’un film comme Mise à l’épreuve, il vaut mieux ne pas trop attendre. Suivant la route ultra balisée du buddy movie, genre où sont réunis deux personnages qui n’ont évidemment rien pour s’entendre (les Richard/Depardieu de La Chèvre, les Gibson/Glover de L’Arme Fatale pour ne citer que deux exemples assez différents), le film de Tim Story ne surprend jamais. Pire, il est près prévisible de bout en bout. Mais sans doute est-ce là ce qui le rend totalement inoffensif et parfois presque aimable. Dès lors qu’on veut bien prêter au cinéma quelques propriétés divertissantes qui permettent de s’échapper d’un réel un peu lourd à porter, Mise à l’épreuve joue à merveille son rôle de “film-dudimanche-soir-à-regarder-entre-copains-avec-quelquesbières-sous-la-main”. Bien entendu, il faut de temps à autre remiser son intelligence au vestiaire et ne pas s’étonner de quelques incongruités scénaristiques. Ainsi en va-t-il du luxueux loft de Ben et Angela que même une star hollywoodienne aurait du mal à s’offrir mais qui semble à la portée d’un simple surveillant de lycée. Ou encore de ce chef de police, dont on croit comprendre à un moment qu’il est lui-même tout à fait corrompu, jusqu’à ce que... finalement non. Ou peut-être. Il faut également accorder un peu d’indulgence au jeu tout en finesse d’un Ice Cube écartant largement ses narines pour montrer combien il est méchant et d’un Kevin Hart qui fait beaucoup pour la réhabilitation d’Eddie Murphy. Une fois digérées ces petites faiblesses, on n’est pas à l’abri de passer un bon moment qui nous vaudra, vu le succès du film aux États-Unis, un séquel. Qu’on s’empressera d’aller voir un samedi soir, une “box” de pop-corn à la main. _D.N.

COMÉDIE POLICIÈRE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Ice Cube (James Payton), Kevin Hart (Ben Barber), John Leguizamo (Santiago), Bruce McGill (le lieutenant Brooks), Tika Sumpter (Angela Payton), Bryan Callen (Miggs), Laurence Fishburne (Omar), Dragos Bucur (Marko), Gary Owen (Crazy Cody), Jacob Latimore (Ramon), Jay Pharoah (Runflat), Benjamin “Lil’ P-Nut” Flores (Morris le gamin), Eric Benson et Greg Rementer (les flingueurs de Marko), Anna House (la dame de la cafétéria), Jasmine Burke (Gina, la standardiste), Julie Gribble, John Kap, Anona Tolar, Dwayne Brown, Louanne LaFortune, Keith Walters, David Banner, James Logan, Chase Anderson. Scénario : Greg Coolidge, Jason Mantzoukas, Phil Hay et Matt Manfredi, d’après une histoire de Greg Coolidge Images : Larry Blanford Montage : Craig Alpert 1er assistant réal. : Lee Cleary Scripte : Gail Hunter Musique : Christopher Lennertz Son : Mary H. Ellis, Jon Taylor, Pedro Jimenez et Christian P. Minkler Décors : Chris Cornwell Costumes : Sekinah Brown Effets spéciaux : Michael Lantieri Effets visuels : Scott M. Davids et A.J. Briones Dir. artistique : Rob Simons Maquillage : Debra Denson Casting : Victoria Thomas Production : CubeVision et Rainforest Films Pour : Universal Pictures Production associée : Relativity Media Producteurs : Will Packer, Ice Cube, Matt Alvarez et Larry Brezner Distributeur : Universal Pictures.

99 minutes. États-Unis, 2014 Sortie France : 14 mai 2014

u RÉSUMÉ Accro aux jeux vidéo de guerre, Ben, le fiancé d’Angela, veut devenir policier. Admis à l’académie de police, il demande à James, son futur beau-frère, lui-même policier, de lui accorder la main d’Angela. James, qui n’aime pas Ben, consent à la condition qu’il accepte d’être mis à l’épreuve pendant une journée. Ben suit donc James et deux de ses collègues dans leur enquête sur un certain Omar, dangereux gangster. Les premières missions confiées à Ben s’avèrent désastreuses pour l’aspirant policier qui se ridiculise... Jusqu’à ce qu’il comprenne que James a tout mis en scène pour le faire renoncer à être flic. Piqué dans son orgueil, Ben continue à se comporter comme si de rien n’était. Embarqué dans une véritable opération, il imagine qu’il s’agit encore d’un coup de bluff et manque être tué. SUITE... Alors que James décide de le ramener chez lui, il apprend que les lieutenants d’Omar doivent se retrouver dans un hangar où, laissant Ben dans la voiture, il se rend seul. Mais, les deux collègues de celui-ci étant des ripoux, James retenu prisonnier. Ben tente de le sauver en se faisant passer pour Omar, que personne n’a jamais vu. Tandis que la supercherie fonctionne, arrive le vrai Omar. Une fusillade s’ensuit dont Ben et James sortent vivants grâce à la connaissance des armes de Ben. Ils rentrent chez eux où Angela est prise en otage par Omar et ses complices. C’est l’héroïsme de Ben qui envoie finalement Omar en prison. Il peut enfin se marier avec Angela.

Visa d’exploitation : 139266. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 33- blackouttotal_Mise en page 1 30/04/14 17:35 Page1

Blackout total (Walk of Shame) de Steven Brill Seule dans les bas-fonds de L.A., sans papiers, argent ni portable, et en minirobe, la BCBG Meghan a 8 heures pour traverser la ville et dégoter le job de sa vie. E. Banks fait le job dans cet After Hours au féminin, loin d’être aussi troublant et acide que l’original.

© Metropolitan

HH À 51 ans, Steven Brill est passé maître dans le genre de la sous-comédie hollywoodienne. Pointent à son passif des contes lourdingues (Little Nicky), une production Apatow (Drillbit Taylor), et même le remake (massacre ?) regrettable d’un chef-d’œuvre de Franck Capra (Mister Deeds). Sa participation en tant qu’acteur à Sexe, mensonges et vidéo, où il joue un pilier de bar, n’aura pas été l’occasion d’en prendre de la graine côté subtilité. Aussi, cette comédie centrée sur une présentatrice télé perdue dans la ville, sans téléphone, argent, ni papiers, pourrait figurer comme sa réalisation la moins mauvaise (dans le genre sus-cité bien entendu). Inspiré, dit-il, par L’Odyssée d’Homère, Brill, qui en signe également le scénario, parsème d’embûches “l’odyssée” de sa blonde héroïne à travers Los Angeles downtown. Prostituées enragées, dealers bêtas, flics idiots, ado obsédé, rabbin pervers, employée bornée... les mauvaises rencontres se multiplient sur le chemin de la pauvre Meghan. Celle-ci - c’est l’atout du film - est campée par l’épatante Elizabeth Banks, dont la force comique relevait déjà le fade Ce qui vous attend si vous attendez un enfant. Échevelée, en minirobe jaune de plus en plus sale, elle porte cet After Hours au féminin. Mais n’est pas Martin Scorsese qui veut. Et ce Blackout aurait gagné à être vraiment total. Il manque ici le côté limite, dérangeant, une causticité qui donnent profondeur et humour à l’épopée nocturne de Griffin Dunne. Hormis quelques répliques et situations bien senties, la virée diurne de Banks s’en tient, elle, aux ruelles proprettes et balisées de “l“entertainment” à l’américaine. _I.B.

COMÉDIE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Elizabeth Banks (Meghan), James Marsden (Gordon), Gillian Jacobs (Rose), Sarah Wright Olsen (Denise), Ethan Suplee (l'agent Dave), Bill Burr (l'agent Walter), Ken Davitian (le chauffeur de taxi), Lawrence Gilliard Jr. (Scrilla), Alphonso McAuley (Pookie), Da'Vone McDonald (Hulk), Eric Etebari (le biker), Oliver Hudson (Kyle), Jacob Timothy Manown (le gamin au vélo), Carol Mansell (Charon), Bryan Callen (le dealer), Tig Notaro (la femme de la fourrière), Willie Garson (Dan Karlin), Erin Segal (Gwen), Chris Conner (Tommy), Liz Carey (Jordan), Brandon Scott (Josh), Ian Robert, Kevin Nealon, Dan Callahan, Jerry Minor, Niecy Nash, Eve Brenner, P.J. Byrne, Jordan Levenson, Tonja Kahlens, John Farley, Richard Cabral, Geoffrey Rivas, Cindera Che, Carolina Monte Rosa. Scénario : Steven Brill Images : Jonathan Brown Montage : Patrick J. Don Vito Réal. 2e équipe : Darrin Prescott 1er assistant réal. : Stephen E. Hagen Scripte : Wilma Garscadden-Gahret Musique : John Debney Son : Idem Kamishin, Steven Morrow et Tateum Kohut Décors : Perry Andelin Blake Costumes : Lindsay Ann McKay Dir. artistique : Alan Au Maquillage : Judy Yonemoto Casting : Tricia Wood et Jennifer L. Smith Production : Lakeshore Entertainment et Sidney Kimmel Entertainment Producteurs : Sidney Kimmel, Tom Rosenberg et Gary Lucchesi Distributeur : Metropolitan Filmexport.

94 minutes. États-Unis, 2014 Sortie France : 21 mai 2014

u RÉSUMÉ Présentatrice du journal de 17h sur une chaîne locale, Meghan est en lice pour un poste dans une grande chaîne. Rentrée chez elle, elle apprend qu’elle n’est pas retenue et que son fiancé l’a larguée. Pour lui remonter le moral, Rose et Denise, ses amies, l’entraînent en boîte. Plutôt sage d’ordinaire, Meghan en ressort éméchée, hors d’état de conduire. Aussi, le charmant Gordon la raccompagne-t-il chez lui. Après une folle nuit, Meghan apprend à son réveil que les responsables de la chaîne pencheraient en faveur de sa candidature et qu’ils viendront la voir au direct. Elle se précipite dehors, sans téléphone et dans la minirobe jaune prêtée par Denise. SUITE... Sa voiture, où se trouve son sac, étant à la fourrière, elle prend un taxi pour s’y rendre. Suite à un malentendu, le taxi la dépose dans un coin mal famé. Sans argent pour régler la course, elle prend la fuite. Menacée de prison par des policiers qui la prennent pour une prostituée, elle les sème en se cachant dans un repaire de dealers où éclate une fusillade. Elle s’échappe. La police à ses trousses, elle tente de prendre un bus sans ticket, sollicite un jeune rabbin, vole un vélo. À la fourrière, l’employée lui refuse sa voiture mais Denise, Rose et Gordon, qui l’ont localisée, l’aident à arriver à temps à la télé. Où elle avoue, en direct, être la “folle en minirobe jaune” qui a mis la ville sens dessusdessous. Soulagée, elle se console dans les bras de Gordon. Elle est engagée pour animer un reality show.

Visa d'exploitation : en cours. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 34- deuxjoursunenuit_Mise en page 1 04/05/14 22:58 Page1

Deux jours, une nuit de Jean-Pierre & Luc Dardenne Pour sauver son emploi, Sandra doit convaincre 14 collègues de refuser chacun une prime de mille euros. Pour leur neuvième long métrage, les frères Dardenne emmènent M. Cotillard, et nous à sa suite, dans leur cinéma, social, humaniste, bouleversant.

© Christine Plenus

HHH La matière et la manière des frères Dardenne est unique. Ce qu’ils éprouvent dans leurs films de la réalité du monde d’aujourd’hui, depuis La Promesse, leur troisième long métrage, en 1995, est au plus près de l’humain. Mais, alors qu’ils ont mis en scène des battants jusqu’au Gamin au vélo, Sandra est ici battue d’avance. Elle se relève d’une dépression dont on ignore la cause (elle est donc “faible” dans un monde où il faut être fort) et son plus grand tort est d’avoir été absente. Aujourd’hui, elle le dit elle même et elle le croit : elle n’est “rien”, elle “n’existe pas”. L’amour tendre et patient de son mari (“Tu existes : je t’aime”) va faire fléchir son découragement. Alors, telle une héroïne de conte de fée, la petite poule rousse qui demande de l’aide à ses amis, elle va aller frapper aux portes, appuyer sur des sonnettes, et redire la même phrase magique. Sauf que les mots - “Je viens te voir parce qu’on va refaire le vote et je voudrais savoir si tu serais d’accord pour renoncer à ta prime pour que je garde mon travail...” - tiennent du tragique. Et la situation, de l’inacceptable. Pourtant personne ne se rebiffe, pas de grève, plus de solidarité. À peine de réflexion : car seize fois mille euros égale une année de salaire au Smic. Que se passera-t-il dans un an ? En suivant pas à pas la démarche désespérée de Sandra, les réalisateurs, attentifs et subtils, ouvrent un monde qu’on découvre en même temps qu’elle : des bribes qui disent le nombre d’enfants, les passe-temps, les jobs au noir (poncer des pavés, aider à l’épicerie). Et qui créent du lien social là où il n’y en a plus. C’est un début. La victoire est ténue, le film est grand. _I.D.

DRAME SOCIAL Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Marion Cotillard (Sandra), Fabrizio Rongione (Manu), Pili Groyne (Estelle), Olivier Gourmet (Jean-Marc), Catherine Salée (Juliette), Baptiste Sornin (Monsieur Dumont), Alain Eloy (Willy), Myriem Akheddiou (Mireille), Fabienne Sciascia (Nadine), Timur Magomedgadzhiev (Timur), Hicham Slaoui (Hicham), Philippe Jeusette (Yvon), Yohan Zimmer (Jérôme), Christelle Cornil (Anne), Laurent Caron (Julien), Franck Laisné (Dominique), Serge Koto (Alphonse), Morgan Marinne (Charly), Gianni La Rocca (Robert), Ben Hamidou (Kader), Carl Jadot (Miguel), Sabine Raskin (la secrétaire), Damien Trapletti (le réceptionniste de Solwal), Lara Persain, Rania Mellouli, Christelle Delbrouck, Hassiba Halabi, Marion Lory, Donovan Deroulez, Maïdy Ankaye, Alao Kasongo. Scénario : Jean-Pierre & Luc Dardenne Images : Alain Marcoen Montage : Marie-Hélène Dozo 1re assistante réal. : Caroline Tambour Son : Jean-Pierre Duret Décors : Igor Gabriel Costumes : Maïra Ramedhan-Levi Maquillage : Natali Tabareau-Vieuille Production : Les Films du Fleuve et Archipel 35 Coproduction : BIM Distribuzione, Eyeworks, France 2 Cinéma, RTBF et Belgacom Producteurs : Jean-Pierre & Luc Dardenne et Denis Freyd Productrice exécutive : Delphine Tomson Coproducteurs : Valerio De Paolis et Peter Bouckaert Distributeur : Diaphana.

95 minutes. Belgique - France - Italie, 2014 Sortie France : 21 mai 2014

u RÉSUMÉ Vendredi. Sandra est réveillée par le téléphone. Son amie Juliette lui explique que ses collègues, sommés par le patron de choisir entre leur prime de fin d'année et le maintient du poste de Sandra, ont tous (excepté Juliette et Robert) choisit leur prime. Son mari, Manu, revient avec leurs deux enfants. Sandra, qui sort de dépression, est résignée. Mais Manu la secoue et la conduit auprès de Juliette. Elles convainquent le patron d'invalider le vote (car le contremaître, Jean-Marc, a usé d'intimidation) et de le reporter au lundi matin. Sandra dresse alors la liste des 14 salariés qui n'ont pas voté pour elle, et essaie de trouver leurs adresses. Au téléphone, Kader, accepte de renoncer à la prime. Puis Sandra essuie trois refus. SUITE... Timur avoue être soulagé de pouvoir revoter. Hicham, qui travaille au noir dans une épicerie, dit non. Jérôme se bat avec son père, Yvon, qui veut sauver l’emploi de Sandra. Timur convainc Miguel. Julien refuse. Sandra est agressée par le mari d’Anne. Abattue, elle avale un tube de somnifères. Mais Anne sonne à sa porte : elle a quitté son mari et va voter pour elle. Sandra avoue avoir prix du Xanax. À l’hôpital elle est tirée d’affaire. Il lui reste une nuit pour reprendre ses démarches. Après un nouveau refus, elle obtient un oui d'Alphonse, qui craint pourtant pour le renouvellement de son CDD. Le lendemain, au vote, il manque une voix à Sandra. Elle a perdu. Le patron propose tout de même de la réintégrer. Simplement, il ne renouvellera pas un CDD... Elle refuse, sort, appelle Manu : “On s’est bien battus”.

Visa d’exploitation : 136947. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 35- saopauloblues_Mise en page 1 30/04/14 17:37 Page1

São Paulo Blues (Cores) de Francisco García Héritier du cinéma underground brésilien pour son aspect allégorique, São Paulo Blues prend la forme d’un hommage à Stranger than Paradise en brossant le portrait instantané d’un trio désabusé qui vit à l’écart de la croissance économique.

CHRONIQUE URBAINE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Maria Célia Camargo (Dona Marlene), Graça de Andrade, Pedro di Pietro (Luca), Simone Iliesco (Luara), Guilherme Leme (Roger), Tonico Pereira (Nicolau), Acauã Sol (Luiz). Scénario : Francisco García et Gabriel Campos Montage : Francisco García et André Gevaerd Musique : Wilson Sukorski Son : Carlos Paes Décors : Monica Palazzo Production : Dezeonve Som e Imagem et Kinoosfera Filmes Producteurs : André Gevaerd, Sara Silveira, Pedro di Pietro, Simone Iliescu et Acauã Sol Distributeur : Contre-Allée Distribution.

© Contre-Allée Dist.

HH Avec São Paulo Blues, Francisco Garcia transpose Stranger than Paradise au Brésil sous Lula. Il rend clairement hommage au film de Jarmusch (et aux années 1980), d’abord par une affiche que Luca a dans son atelier, ensuite par la photographie, la relation triangulaire et de nombreuses séquences comme celle de la voiture, les images de la grand-mère ou Luara qui se met à danser et peut-être aussi le nombre de bières ingurgitées et de cigarettes fumées par les personnages, les joints en plus. Cet instantané de la vie de trois amis prend aussi une forme allégorique et étrange à la manière du cinéma Underground brésilien. Ainsi, le jeune réalisateur filme l’ennui palpable de trentenaires de Sao Paulo qui tournent en rond dans un monde clos, à l’image des poissons que Luara vend. Il n’est question de croissance économique qu’a la télévision, dans leur univers à eux, Luca, Luara et Luiz finissent par voler parce qu’ils ont besoin d’argent pour l’essence afin d’aller au bord de la mer, les bières, le Viagra, le cadeau pour la grand-mère. L’argent sert à oublier, à s’échapper un moment de leur enfermement. São Paulo Blues réserve des images cocasses, comme l’appartement de Luara qui donne sur l’aéroport d’où elle ne décollera jamais ; et des moments de grâce notamment avec le l’étrange pilote qui séduit Luara. À la fois onirique, symbolique, réaliste, absurde, ce premier long métrage récompensé à San Sebastian en 2012 par le prix Nuevos Directores, a une bande son forte. En effet, chaque personnage est accompagné d’une musique qui exprime ses émotions : métal pour Luca, violons pour Luara et techno hard core pour Luiz. _G.T.

95 minutes. Brésil, 2012 Sortie France : 21 mai 2014

u RÉSUMÉ Près de São Paulo, Luca écoute du rock en marchant dans la rue. Il rentre chez lui, chez sa grand-mère. Elle passe son temps sur son fauteuil devant la télé, où le président Lula se félicite de la croissance économique et de la reprise de l’emploi. Luara prend des photos avec un Polaroid puis va bronzer sur sa terrasse qui donne sur les pistes d’avion. Luiz, à moto, deale sous un pont. C’est le petit ami de Luara. Ils se retrouvent pour faire l’amour, le matin, elle part travailler. Elle gère un magasin qui vend des poissons exotiques. Luiz, quant à lui, est vendeur dans une pharmacie. C’est de là qu’il tient son trafique de médicaments. Mais l’autre employer, Nicolau, le menace. Il se fait renvoyer. SUITE... Luca est tatoueur. Il se rend à un concert. Un vieux groupe de métal joue devant une salle vide. Chez sa grandmère, il lui pique de l’argent avant de découvrir son arme, un 32 que Luca utilise pour menacer Nicolau qui le fait ensuite tabasser. Luara se fait draguer à la boutique par un pilote d’avion. C’est lui qui lui a offert le Polaroïd, elle accepte son invitation à dîner après avoir quitté Luca qui a du mal à payer le loyer de son appartement pourtant insalubre. Luca et Luara se remettent ensemble. Les trois amis partent en voiture à la plage avec la grand-mère mais tombent en panne d’essence au retour. La grand-mère tombe malade, une fois guérie, Luiz lui offre un robot. Les trois amis se saoulent, le matin, ils s’installent dehors sous une pluie tropicale.

Visa d'exploitation : en cours. Format : Scope - Noir & Blanc - Son : Dolby SRD. 25 copies (vo).

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2059 - 36- amoursurplaceou_Mise en page 1 30/04/14 18:50 Page1

Amour sur place ou à emporter de Amelle Chahbi Elle est arabe, il est noir. Ils s’entendent à merveille, mais leurs familles ne sont pas du même avis... Un air de déjà-vu ? Amelle Chahbi signe un premier film dynamique et drôle, mais desservi par une mise en scène banale et son manque de délicatesse.

© LGM Cinéma

H Ils avaient été adoubés sur les planches par le public et la critique avec leur spectacle mêlant stand-up et boulevard. Forts de ce succès, les deux comédiens du Jamel Comedy Club Amelle Chahbi et Noom Diawara ont logiquement choisi d’adapter Amour sur place ou à emporter pour le grand écran, avec le soutien de leur bande. Ils signent donc une énième comédie sur les couples mixtes, au moment même où Qu’est ce qu’on a fait au Bon Dieu ? (avec... Noom Diawara) cartonne en salles. La première partie, qui n’évite pas les clichés sur les jeunes trentenaires et l’intégration, est laborieuse, peu aidée par une séquence d’introduction assez ridicule (où il faudrait que l’on rit du langage fleuri de l’héroïne), une mise en scène très plate et une bande son agaçante. On s’ennuie. Et puis, peu à peu, la mayonnaise prend, grâce à l’évidente complicité entre la pétillante brunette et le jeune black très blagueur, qui forment, à l’écran comme au théâtre, un couple diablement sympathique. Quand ils se cherchent, ils se trouvent toujours. Les répliques fusent, le situations cocasses s’enchaînent en évitant le romantisme bébête qui d’ordinaire prend le pas sur la comédie. Même si (et encore heureux !) on sait que tout ça va bien finir. Bref, on marche, et heureusement, car les seconds rôles sont à la peine (notamment ceux des collègues de travail du Starbucks, stéréotypés). En résulte un film très inégal où, à quelques scènes réellement amusantes, succèdent d’autres totalement ratées, voire vulgaires, comme cette improbable cours de danse moderne, avec le guest Fabrice Eboué qui range ses élèves... par ordre de cul. On a vu plus fin. _M.Q.

COMÉDIE SENTIMENTALE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Amelle Chahbi (Amelle), Noom Diawara (Noom), Pablo Pauly (Julien), Aude Pépin (Barbara), Sébastien Castro (Jeff), Nader Boussandel (Sami le tombeur), Marie-Julie Baup (Blair Witch), Fabrice Éboué (Bernard, le professeur de danse), Stiti (le père d’Amelle), Akela Sari (la mère d’Amelle), Biyouna (la grand-mère d’Amelle), Laurentine Milebo (la première mère de Noom), Marie-Philomène Nga (la seconde mère de Noom), N’Gouamoué Diabaté (le père de Noom). Scénario : Amelle Chahbi, Noom Diawara et Matt Alexander Images : Maxime Cointe Montage : Élodie Codaccioni et Andrea Sedlackova 1er assistant réal. : Bonnie Pirès Scripte : Delina Pierre Son : Eddy Laurent, Joël Rangon et Sébastien Wera Décors : Herald Najar Costumes : Zab Ntakabanyura Effets visuels : Stephan Kot et Yoann Berger Dir. artistique : Noom Diawara Maquillage : Mathilde Josset Casting : Pierre-Jacques Bénichou Production : LGM Cinéma Coproduction : Gaumont Producteurs : Cyril Colbeau-Justin et Jean-Baptiste Dupont Producteur exécutif : David Giordano Dir. de production : Stéphane Amphoux Distributeur : Gaumont.

85 minutes. France, 2014 Sortie France : 28 mai 2014

u RÉSUMÉ Alors que chacun vient de rompre, Noom, d’origine malienne, et Amelle, d’origine algérienne, sont décidés à réussir leur prochaine relation. Ils font connaissance au Starbucks où Amelle est manager et où Noor, pistonné, vient de se faire embaucher. Noom tombe rapidement sous le charme d’Amelle et l’invite à dîner, ce qui déplaît à Jeff, un employé amoureux de la jeune femme. Après une soirée au restaurant, puis une autre, agitée, au cinéma, ils s’embrassent. Mais Amelle refuse d’aller plus loin, au grand dam de Noom. SUITE... Tous deux dînent avec leurs amis Julien et Barbara, qui entament aussitôt une relation intense. Les quatre amis partent ensemble en week-end au Castor Village. Agacée de voir Noom craquer pour une jolie employée, Vanessa, Amelle plonge et manque de se noyer. Elle est sauvée par Vanessa. De retour à Paris, ils se réconcilient et couchent enfin ensemble. Amelle rencontre la famille de Noom, mais refuse de lui présenter ses parents. Pour se venger, Jeff provoque une rencontre à un spectacle de danse. Choqué qu’Amelle sorte avec un Noir, son père est hospitalisé. Amelle lui explique que Noom n’est qu’une passade, mais ce dernier l’entend et rompt avec elle. Quand elle vient le chercher trois semaines plus tard, elle le trouve avec Vanessa. Six mois plus tard, alors qu’il présente son premier spectacle de stand-up, ses anciens collègues obligent Noom à aller chercher Amelle. Il part pour Miami, où elle travaille, et ils se réconcilient.

Visa d’exploitation : 136396. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 37- caricaturistes_Mise en page 1 30/04/14 17:39 Page1

Caricaturistes Fantassins de la démocratie de Stéphanie Valloatto À travers les portraits croisés de douze caricaturistes, S. Valloatto se propose de rendre hommage à une profession unie par l’amour de la paix. Caricaturistes est une œuvre sans relief, qui, loin de dominer son sujet, ne semble pas s’autoriser à y réfléchir.

DOCUMENTAIRE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Plantu, Nadia Khiari, Willis from Tunis, Mikhaïl Zlatkovsky, Michel Kichka, Baha Boukhari, Rayma Suprani, Angel Boligan, Jeff Danziger, Damien Glez, Lassane Zohore, Pi San, Slim, Baki Boukhalfa, Kurt Westegaard. Scénario : Radu Mihaileanu et Stéphanie Valloatto Images : Cyrille Blanc Montage : Marie-Jo Audiard Musique : Armand Amar Son : Gilles Laurent et Aline Gavroy Production : Oï Oï Oï Productions Coproduction : Cinextra Productions, Orange Studio, France 3 Cinéma, Panache Productions, La Compagnie Cinématographique, B-Movie et Istituto Luce Producteurs : Radu Mihaileanu et Cyrille Blanc Coproducteurs : Daniel Goudineau, André Logie, Gaëtan David et Riccardo Marchegiani Distributeur : EuropaCorp / Orange Studio.

© Oï Oï Oï Prod. - EuropaCorp

HH Que peuvent bien avoir de commun un cartooniste new-yorkais et un dessinateur burkinabé ? Caricaturistes livre douze portraits de ces stars des kiosques qui, bien que dispersés à travers le monde, se rejoignent sur ces valeurs communes que sont la liberté d’expression, la lutte contre l’injustice, la paix... Déterminés à peser sur le cours des événements, ils sont fantassins de ce “combat de tous les jours” qu’est la démocratie, vague concept sur lequel on ne s’attardera pas. Ces soldats du bien sont donc en première ligne, prompts à jeter des grenades là où bon leur semble afin de révéler au grand jour les sujets qui fâchent, de projeter sur l’écran de l’actualité les injustices... Évidemment, les enjeux ne sont pas les mêmes partout. Avec la “Main Invisible” de l’économiste libéral Adam Smith devenue sous son crayon celle d’un mendiant que plus personne ne remarque, Jeff Danzinger s’attaque, aux États-Unis, aux pouvoirs financiers. Au Mexique, Angel Boligan signe contre le narcotrafic de terribles dessins où le rouge sang se mêle au vert des dollars et de la coca. Et ainsi de suite : la corruption en Côte d’Ivoire ou au Burkina Faso, Chavez puis Maduro au Venezuela, l’URSS puis Poutine, le conflit israélo-palestinien vu de chaque côté du mur... La caricature se définie comme une arme de révolte de premier choix, parfaitement universelle puisqu’elle ne nécessite pas de savoir lire. On s’attarde sur Willis From Tunis, au rôle prépondérant durant le Printemps Arabe, qui s’est imposé sur les murs de la capitale tunisienne et que l’on voit ricaner sur les décombres de la maison de Ben Ali, s’exclamant “Voler le peuple pour se payer une baraque aussi moche !” Après une brève présentation des protagonistes, le documentaire

106 minutes. France - Belgique - Italie, 2014 Sortie France : 28 mai 2014

trouve son rythme de croisière, offrant une galerie de caricatures resituées, par leurs auteurs, dans leurs contextes respectifs. Et douze auteurs, en 1h46, cela fait beaucoup. Trop ? Quelques instants émergent cependant : Kichka, dessinateur franco-israélien, se rappelle avoir ri lorsque son père, rescapé d’Auschwitz, lui dessina un soldat nazi vêtu d’un caleçon à fleur et casqué d’une casserole, belle manifestation de l’une des fonctions premières de la caricature : ridiculiser, bousculer les limites de l’inacceptable. Le documentaire, né de l’amitié entre Plantu et Radu Mihaileanu (Le Concert) dépeint donc des héros modernes et immaculés, courageux, toujours prêts à risquer leur vie au service du bien. Et si l’affaire des caricatures de Mahomet est fugacement évoquée, le film n’a pas vocation à polémiquer, à s’interroger : en heurtant les croyants, les dessins ne s’apparententils pas à des pistolets chargés ? Sujet suivant. Au Venezuela, il est nécessaire de donner son numéro de carte d’identité à chaque achat. Le montage fait preuve d’un effet zapping, se bornant à une dimension narrative. Ainsi fait-on le tour du monde sans jamais confronter les images, restant à des encablures de la poésie baroque d’un Mondo Cane (G. Jacopetti). On assiste à un documentaire amoureux et sage, assez irréfléchi au demeurant, qui, en relevant davantage du reportage TV que de l’œuvre cinématographique, fait douter de l’intérêt d’une distribution en salles. _P-J.M.

Visa d'exploitation : 136809. Format : n.c. - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 38- drolesdepoissonschats_Mise en page 1 30/04/14 17:42 Page1

Les Drôles de poissons-chats (Los Insólitos peces gatos) de Claudia Sainte-Luce Solitaire, Claudia se lie d’amitié avec Martha, voisine de lit d’hôpital atteinte du sida qui l’invite à partager sa vie familiale. Tandis que la santé de Martha décline, Claudia est adoptée par les quatre enfants. Un premier film émouvant à la fin empesée.

COMÉDIE DRAMATIQUE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Ximena Ayala (Claudia), Lisa Owen (Martha), Sonia Franco (Ale), Wendy Gillén (Wendy), Andrea Baeza (Mariana), Alejandro Ramírez-Muñoz (Armando), Vera Wilson (Alicia), Cynthia Bordes (Tania), José Manuel Orozco Angulo (le veilleur), Sara Isabel Quintero (la femme de cire), Antón Araiza (le docteur), Carlos Hoeflich (le préfet), Miriam Carsi (l’infirmière), Sofía López (la femme du bus), la voix de Rocío Montiel (la radio). Scénario : Claudia Sainte-Luce Images : Agnès Godard Montage : Santiago Ricci 1ers assistants réal. : Guillermo Canan et Stéphanie Beauchef Scripte : Marie Benito Musique : Madame Récamier Son : Vincent Arnardi Décors : Bárbara Enríquez Costumes : Gabriela Fernández Maquillage : Marco Antonio Hernández Casting : Vanessa Romo Production : Cine Canibal, Jaqueca Films et Good Lap Production Producteur : Geminiano Pineda Producteurs exécutifs : Christian Kregel, Ruby Castillo et Geminiano Pineda Distributeur : Pyramide.

© Pyramide

HH Premier long métrage de Claudia Sainte-Luce, jeune réalisatrice mexicaine, Les Drôles de poissonschats évoque le souvenir de Martha, et de sa famille, dont elle partagea la vie quotidienne les deux dernières années da sa vie. Le film oscille entre drame et comédie, les personnages riant de leurs infortunes sans avoir vraiment le choix. Le scénario commence par mettre en scène Claudia, jeune fille introvertie dont l’existence solitaire se limite à un travail routinier dans une grande surface. Une crise d’appendicite renverse la situation et 0lui donne l’occasion de trouver en Martha la mère qu’elle n’a jamais eue. Généreuse, drôle et optimiste malgré la maladie, celle-ci s’attache aussitôt à la jeune fille et, lui ouvrant sa porte, lui apprend à savourer, comme elle, l’instant présent. Si les symptômes du sida se montrent de plus en plus fréquents (allers et retours entre l’hôpital et la maison, assistance respiratoire, vomissements), la réalisatrice choisit de se concentrer, avec justesse, sur la psychologie de personnages s’efforçant de conjurer le sort en menant une vie normale. À travers le regard pudique de Claudia, le spectateur mesure que derrière la joie de vivre se cache le désarroi : les enfants sèchent l’école ; Ale pleure en cachette ; obèse, Wendy s’apprête à avaler un cocktail de médicaments mortel ; Mariana s’oublie en jouant les midinettes tandis qu’Armando souffre du manque de figure paternelle. Hélas, après une jolie scène de rémission à la plage, qui aurait pu judicieusement clore le film, le scénario s’empèse un peu, la voix off de Martha lisant à chacun ses ultimes recommandations. Final touchant mais superflu. _M.T.

89 minutes. Mexique - France, 2013 Sortie France : 28 mai 2014

u RÉSUMÉ Démonstratrice dans un supermarché mexicain, Claudia, 22 ans, rentre chez elle en se tordant de douleur dans l’autobus. Admise aux urgences pour une crise d’appendicite, elle sympathise avec sa voisine de lit, Martha - mère de famille atteinte du sida. Convalescente, Claudia est invitée par Martha à déjeuner, puis à séjourner, dans sa maison dont elle découvre l’organisation bohême et le rôle dévolu à chacun des enfants : Ale, l’aînée, qui fait le chauffeur ; Mariana, petite reine de beauté pleine de fantaisie ; Armando, le benjamin, responsable de la lessive ; la boulimique Wendy, qui assure les gardes de nuit de sa mère souvent hospitalisée. SUITE... Claudia s’intègre à la tribu, accompagne à l’école Armando et Mariana, range leurs affaires, rend visite à Martha avec laquelle les liens se renforcent, remplace parfois Wendy au chevet de celle-ci. Après avoir passé une journée à son travail avec les deux plus jeunes, elle les convie au Noël de l’entreprise où Mariana, pompette mais consciente de l’état de sa mère, se met à pleurer. À leur retour, Claudia trouve Ale en larmes sur son lit, de même que Martha, défaite par la peur de mourir. Bien qu’affaiblie, celle-ci les entraîne tous dans un week-end festif au bord de la mer, sans oublier le poisson-chat que Claudia a offert à Armando : baignade, détente, soirée joyeuse jusqu’au malaise ultime de Martha, hospitalisée d’urgence... Un peu plus tard, tous répartissent ses cendres le long des grandes artères de la ville.

Visa d’exploitation : en cours. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD.

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© les Fiches du Cinéma 2014 - N°2059


2059 - 39- etreetdevenir_Mise en page 1 30/04/14 17:43 Page1

Être et devenir de Clara Bellar Jeune mère, C. Bellar s’interroge sur l’opportunité de ne pas scolariser son enfant. Portée par les témoignages des thuriféraires et expérimentateurs de l’Instruction en Famille, cette réflexion au militantisme assumé pâtit de l’absence totale d’avis contradictoires.

DOCUMENTAIRE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Irvin Kershner, Rana Haugen Core, Naomi Aldort, Harvey Aldort, Olivier Aldort, Lennon Aldort, Yonathan Aldort, John Taylor Gatto, Nathalie Galindo, Joyce Reed, Sanni Diesner, Singa Diesner, Lumas Diesner, Manfred Köhnlein, Claudia Renau, Fredy Fadel, Auriane Fadel, Loline Fadel, Lila Fadel, Arno Stern, Michèle Stern, André Stern, Éléonore Stern, Pauline Stern, Antonin Stern, Ivana Durand Lanson, Merlin Durand Lanson, Phenix Durand Lanson, Cassidy Durand Lanson, Valérie Vincent, Bertrand Vincent, Hugo Vincent, Océane Vincent, Baptiste Vincent, Jules Vincent, Emma Vincent, Noé Vincent, Louve Vincent, Fabienne Degorce, Joséphine Aknine, Margot Aknine, Nicolas Demeerseman, Florence Tutiau, Claire Hérino Imbert, Antoine Hérino Imbert. Scénario : Clara Bellar Images : Clara Bellar et Gulu Monteiro Montage : Joële Van Effenterre et Fanny Mongrolle-Fasanino Son : Clara Bellar et Gulu Monteiro Production : Pourquoi Pas Productions Productrice : Clara Bellar Distributeur : Pourquoi Pas Productions.

© Pourquoi Pas Prod.

H S’ouvrant sur le beau ventre rond, nu et fier, de la réalisatrice, et avec lui la promesse d’une maternité heureuse et déjà hautement investie, ce documentaire pose d’emblée la force d’un questionnement sur les choix éducatifs. Or, cette (en)quête, clairement laudatrice, tourne tout de suite au catalogue raisonné des mérites - jugés innombrables - de l’instruction libre dont les bénéficiaires, respectés dans leur biorythme et leur appétit d’apprendre, seraient éminemment plus créatifs et heureux pour n’avoir jamais été contraints. Car il ne s’agit en effet pas ici de faire l’École à la Maison mais bien de pratiquer l’Instruction en Famille, sans suivre aucun programme officiel, ni cours spécifiques, pour laisser aux enfants toute latitude d’apprendre ce qu’ils veulent, quand ils le veulent, dans le cadre d’une grande confiance réciproque (certains ne lisant toujours pas à 12 ans...). Pourtant difficile de se faire un avis objectif, tant le tableau d’une scolarisation classique est à charge ! Et c’est bien là que l’enquête pèche, et ce malgré d’intéressants témoins disant leur vérité avec conviction et intelligence face à leurs rejetons vivants, joyeux, doués, concernés, réactifs, impliqués... mais n’est ce pas aussi le cas de nombre d’enfants scolarisés ? Certes, les trois frères Aldort - premiers à témoigner -, sont ce qu’il est convenu d’appeler des surdoués. Musiciens de génie, précoces compositeurs de symphonies, fratrie soudée... Mais ces talents, ici imputés aux seuls choix éducatifs de leur parent, n’auraientils pas été tout aussi nourris dans le cadre d’une instruction plus classique ? Peut-être. Or, ici, la démonstration fait peu de place à cette interrogation. Pour le reste, on observe combien ces options sont toujours le fait de familles - qu’elles

99 minutes. France, 2013 Sortie France : 28 mai 2014

soient françaises, anglaises ou allemandes - très unies et sédimentées autour d’un couple parental fort et durable (pas sûr que le modèle soit réellement adaptable aux familles monoparentales tirant le diable par la queue...). On remarque aussi, non sans ironie, que ces petits devenus adultes sont en très forte majorité musicien, danseur, metteur en scène, écrivain, luthier... des activités hautement créatives sans être à proprement parler “productives” (mot hideux, j’en conviens). Quid alors d’une société dépourvue d’ingénieurs, de médecins, d’architectes, de plombiers zingueurs ? Ces activités, qui font pourtant société, sont-elles laissées aux seuls sacrifiés du système, ceux tenus à une scolarité classique ? N’y-a-t-il donc, dans la contrainte faite à soi, que laideur et amoindrissement de l’être ? N’est-elle pas parfois le levier par lequel on ose des choix auxquels on n’aurait pas pensé et qui soudain font sens ? Le documentaire, déjà peu convainquant pour qui n’est pas convaincu, finit de s’invalider dans la parole, qui hélas le clôt, d’une mère allemande entendant nous rappeler que l’école était pour les nazis un instrument d’endoctrinement et d’asservissement et qu’elle reste l’arme de prédilection des dictatures... Devant des propos aussi peu nuancés, on se remémore avec force ce qu’un homme comme Camus, orphelin de père et élevé par une mère analphabète, doit à son instituteur, ce M. Germain tant aimé auquel il dédia son prix Nobel... _N.Z.

Visa d’exploitation : en cours. Format : 1,77 - Couleur - Son : Dolby SR.

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2059 - 40- iledegiovanni_Mise en page 1 30/04/14 17:44 Page1

L’Île de Giovanni (Giovanni no Shima) de Mizuho Nishikubo 1945. Suite à la capitulation du Japon, l’île de Sikotan se retrouve occupée par les Russes. Junpei et son petit frère Kanta voient leur monde changer, et rêvent de voyages dans les étoiles... M. Nishikubo signe un film subtil, tendre, et visuellement remarquable.

DRAME HISTORIQUE Famille

u GÉNÉRIQUE Avec les voix originales de : Kôta Yokoyama (Junpei Senô), Polina Ilyushenko (Tanya), Junya Taniai (Kanta Senô), Masachika Ichimura (Tatsuo Senô), Yukie Nakama (Sawako), Yûsuke Santamaria (Hideo), Saburo Kitajima (Genzô Senô), Kaoru Yachigusa (Sawako, âgé), Kanako Yanagihara (Micchan), Tatsuya Nakadai (Junpei Senô, âgé), Hiroshi Inuzuka (le chef). Scénario : Shigemichi Sugita et Yoshiki Sakurai, d’après une histoire de Shigemichi Sugitai Images : Yumiko Nakata Montage : Junichi Uematsu Animation : Nobutake Ito Musique : Masashi Sada Son : Fusanobu Fujiyama Décors : Santiago Montiel Effets visuels : Akira Saitou et Hisaishi Ezura Dir. artistique : Kunihiko Inaba et Kosuke Hayashi Production : Production I.G. Coproduction : JAME Distributeur : Eurozoom.

© Production I.G.

HHHH Le nom de Mizuho Nishikubo ne vous dit sans doute rien. L’Île de Giovanni démontre pourtant que ce réalisateur gagne à être connu. Produit par Production I.G., à qui l’on doit Ghost in the Shell, Jin-Roh, ou encore le récent Lettre à Momo, ce film étonnant évoque un moment inconnu, y compris des Japonais, de l’immédiate aprèsguerre. Au lendemain de la capitulation, les habitants de l’île de Shikotan attendent avec inquiétude l’arrivée des Américains. Surprise : ils voient débarquer les Soviétiques. De cette occupation va naître une camaraderie inattendue entre enfants russes et japonais. L’histoire s’attache au destin de deux frères, Junpei et Kanta, fascinés par un livre de Kenji Miyazawa : Train de nuit dans la Voie lactée. Dans leurs jeux et leurs rêves, ils sont Giovanni et Campanella, et voyagent à travers les étoiles. De magnifiques séquences oniriques ponctuent le récit. Comme dans Le Vent se lève, le dernier Hayao Miyazaki, le rêve est ici un moteur pour nos deux héros. Ils y puisent courage et espoir. Le scénario mêle habilement la vie des enfants à l’Histoire en marche. Si on ne comprend pas toujours exactement ce qu’il se passe, c’est qu’on est comme Junpei et Kanta, qui voient leur monde se défaire sans saisir vraiment pourquoi. Cette façon de raconter à hauteur d’enfants, en ne disant pas tout, donne légèreté et crédibilité au récit. Le travail sur le trait et les couleurs est par ailleurs remarquable : nuages pointus, ciels laissant apparaître le passage du pinceau, rouge orangé du crépuscule, blancheur éblouissante d’un matin de printemps... Un univers visuel qui apporte douceur et lyrisme à cette histoire tendre et poignante. _G.R.

102 minutes. Japon, 2014 Sortie France : 28 mai 2014

u RÉSUMÉ Japon, de nos jours. En bateau, Junpei aperçoit l’île de Shikotan, qu’il a quittée il y a cinquante ans. Juillet 1945. Junpei et son petit frère Kanta vivent avec leur père, Tatsuo, et leur grand-père sur l’île. Le 15 août, le Japon capitule. On craint l’arrivée des Américains : ce sont les Soviétiques qui débarquent un matin. Hideo, frère de Tatsuo, tente en vain de le convaincre de fuir l’île. Leur maison est réquisitionnée pour une famille russe. Ils doivent loger dans la grange. À l’école, les petits Japonais entendent les enfants russes chanter dans la classe à côté. Mai 1946. Enfants russes et japonais chantent et jouent ensemble. Junpei et Kanta sympathisent avec Tanya, une fillette russe. SUITE... Un jour, Tatsuo est arrêté car il fournissait clandestinement du riz à la population. 1947. Les habitants doivent quitter l’île. Sawako, l’institutrice, veille sur les deux frères. Arrivée à Kholmsk, au camp d’internement. Hideo apprend que Tatsuo serait dans un camp au nord. Les deux frères partent une nuit à sa recherche. Il neige et Kanta est malade. Hideo et Sawako les retrouvent et les accompagnent. Voyant des soldats russes, Hideo se sacrifie pour sauver Sawako et les enfants. Ils trouvent le camp et parlent avec Tatsuo. Sur le chemin du retour, Kanta, très malade, meurt. Puis c’est le retour vers le Japon en bateau. Sawako et Junpei embarquent avec Hideo, qui en fait a survécu. Cinquante ans plus tard, Junpei retrouve l’île et rencontre Nina, la petite fille de Tanya.

Visa d’exploitation : en cours. Format : n.c. - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 41- jetesurvivrai_Mise en page 1 30/04/14 17:45 Page1

Je te survivrai de Sylvestre Sbille Bloqué au fond d’un puits, Joe devra user de tous ses talents pour obtenir l’aide de sa pire ennemie. Le point de départ d’une comédie acide, qui souffre de situations trop attendues et d’une construction des personnages simpliste.

© Mars Dist.

H Voici l’histoire classique de deux personnes qui se détestent pour mieux s’insulter mais qui, réunis par le destin, vont apprendre à s’apprécier. D’un côté, Joe, la petite quarantaine, agent immobilier carriériste et sans scrupules (la première séquence le montre en passe de vendre à un jeune couple une bicoque placée en bord de voie ferrée...), de l’autre Blanche, sa “carabosse” qui, avec sa chèvre, son puits et son potager, vit en autarcie, à peu près comme au XIXe siècle. Leurs échanges sont cruels, les coups bas de mise. Rien ne les prédestinait à devoir faire équipe, jusqu’à ce que Joe, retenu au fond du puits, n’ait d’autre choix pour survivre que d’essayer d’amadouer sa pire ennemie. Cette situation donne lieu à une comédie mineure, plutôt divertissante sans être vraiment drôle et qui, en s’appuyant sur deux héros caricaturaux en diable pour les amener à une fin parfaitement prévisible, témoigne d’un patente absence de subtilité. Les personnages secondaires - les employés de l’agence immobilière ne sont pas en reste, que ce soit le second qui se plie à toutes les exigences de son employeur, le stagiaire bébête ou la secrétaire amoureuse de son patron. Le scénario fait de la recherche du bon mot, de la répartie qui fait mouche, une obsession de chaque instant y compris quand le pauvre Joe dépérit au fond de son puits, idée fixe préjudiciable au vraisemblable comme à l’émotion. Face au personnage de Jonathan Zaccaï, auquel on finit par s’attacher malgré tout, comme à un enfant capricieux qui ferait amende honorable, l’inconnue Ben Riga livre une performance si décevante que la trouver sympathique reste un objectif hors d’atteinte. _M.Q.

COMÉDIE DÉCALÉE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Jonathan Zaccaï (Joe), Ben Riga (Blanche), Laurent Capelluto (Dardan), Tania Garbarski (Mimi), David Murgia (Kevin), Benoît Bertuzzo (Jean-Bernard), Margot Ledoux (Carole), Emma Dupont (Émilie), Pierre Hendricks (l’homme du couple), Michelle Feda (Paulette), Aylin Yay (la voyante), Virginie Bustin (l’employée Paulette), Sébastien Waroquier (le policier), Manu Coeman (le cycliste). Scénario : Sylvestre Sbille, avec la collaboration de Jean-Baptiste Louis et Emmanuelle Pirotte Images : Sacha Wiernik Montage : Stephan Couturier 1er assistant réal. : Laurent Scheid Scripte : Véronique Heuchenne Musique : Stephen Warbeck Son : Quentin Collette Décors : Laurie Colson Costumes : Claudine Tychon Effets visuels : Jean-Louis Dousson Maquillage : Laetitia Bille Casting : Jacqueline Pluche Production : Panache Productions et Les Productions du Trésor Production associée : Wild Bunch, France Télévisions Distribution et Manon 3 Coproduction : Tchin Tchin Production, Mars Films, RTBGF et Belgacom Producteurs : André Logie et Alain Attal Dir. de production : Laurent Hanon Distributeur : Mars Distribution.

91 minutes. Belgique - France, 2013 Sortie France : 28 mai 2014

u RÉSUMÉ Patron d’une agence immobilière, Joe excelle dans l’exercice de son métier et espère monter prochainement un golf luxueux, projet freiné par une vieille femme qui refuse de vendre le terrain où elle vit dans une masure. Le dimanche matin, Joe, qui s’est installé dans le club house, descend dans le puits qui alimente la maison de la vieille femme pour briser la canalisation mais l’échelle de corde se rompt. Coincé, Joe essaie d’envoyer un message, sans y parvenir, faute de réseau. La journée passe, puis une autre… La vieille femme, seule à l’avoir vu, refuse de lui venir en aide. SUITE... Le mardi, les employés de l’agence s’inquiètent. La vieille femme donne de l’eau à Joe et, le lendemain, des pommes. Mais elle ment aux employés venus inspecter les lieux à la recherche de Joe. Les relations entre Joe et la vieille femme, qui se nomme Blanche, restent conflictuelles jusqu’à ce que Joe lui raconte l’intrigue de Star Wars. Le vendredi, à la demande de Joe, Blanche essaie de trouver de l’aide, en vain. Joe découvre qu’elle est en réalité une riche propriétaire. Le samedi, alors que les employés accueillent Carole, la fille du patron, et l’emmènent à déjeuner, Blanche parvient à ouvrir les vannes qui libèrent l’eau du puits. Joe parvient ainsi à en sortir. Ses employés le trouvent mal en point. Le dimanche, il quitte prestement l’hôpital pour aller sauver Blanche, évanouie dans la forêt. Deux mois plus tard, ils sont devenus amis. Blanche a pu sauver son terrain.

Visa d’exploitation : 134914. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SR SRD.

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2059 - 42- tonabsence_Mise en page 1 30/04/14 17:46 Page1

Ton absence (Anni felici) de Daniele Luchetti Sous le regard de leurs enfants, un couple se déchire, Guido, artiste transgressif, ne supportant pas le cadre bourgeois dans lequel il s’est installé avec Serena. Ce portrait intime d’une famille soulève avec délicatesse la douce contradiction d’une vie.

© Emanuela Scarpa

HHH Avec Ton absence, Daniele Luchetti clôt sa trilogie “Portraits de famille”. Après Mon frère est fils unique et La Nostra vita, le nouveau long métrage du réalisateur nous replonge en effet dans le quotidien d’une famille italienne. Dès le commencement du film, la voix off de Dario adulte en détermine le point de vue, celui donc de l’aîné des enfants. Malgré cette première précision un peu forcée, le spectateur est rapidement tenté d’oublier l’enfant, tant il est happé à son tour par les tourments passionnels du couple. Mais ce dernier observe, filme, une caméra Super 8 à la main, cette vie de famille qu’il subit pour, au final, réveiller ses parents (tout comme le spectateur), les arracher à leur enfermement, leur rappelant tout simplement qu’ils ne sont pas seuls. En parvenant à ce double effet - tant sur le spectateur que sur les personnages - Luchetti prouve à quel point ce sujet, presque autobiographique, lui tient à cœur. Il relate ainsi avec justesse cette belle et touchante contradiction d’un couple et, au-delà, d’une famille vivant tout à la fois les pires moments de sa vie et les meilleurs. Alors que certaines situations auraient pu adopter un ton dramatique, Luchetti préfère en donner une vision ironique, et parfois même comique, dont l’interprétation touchante et drôle de Kim Rossi Stuart est la clef. La triste et malheureuse traduction française du titre cache l’essence-même du film : “Erano anni felici” (littéralement : c’était des années heureuses). Une touchante réflexion sur le bonheur qui ne réside pas dans la perfection mais plutôt dans la recherche d’une liberté personnelle que chacun tente de trouver. _D.C.

COMÉDIE DRAMATIQUE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Kim Rossi Stuart (Guido), Micaela Ramazotti (Serena), Martina Friederike Gedeck (Helke), Samuel Garofalo (Dario), Niccolò Calvagna (Paolo), Benedetta Buccellato (la grand-mère Marcella), Pia Engleberth (la grand-mère Marina), Angelique Cavallari (Michelle), Ivan Castiglione (Sergio), Sylvia De Fanti (la tante Florinda), Francesca Cardinale (Melania). Scénario : Sandro Petraglia, Stefano Rulli, Caterina Venturini et Daniele Luchetti, d’après une histoire de Daniele Luchetti Images : Claudio Collepiccolo Montage : Mirco & Francesco Garrone 1ers assistants réal. : Gianni Costantino et Andrea Rebuzzi Scripte : Melissa Strizzi Musique : Franco Piersanti Son : Maurizio Argentieri Décors : Giancarlo Basili Costumes : Maria Rita Barbera Effets visuels : Paola Trisoglio et Stefano Antonio Casting : Gianni Costantino et Chiara Polizzi Production : Cattleya Coproduction : Rai Cinema Producteurs : Riccardo Tozzi, Giovanni Stabilini et Marco Chimenz Productrice déléguée : Gina Gardini Producteur exécutif : Matteo Del Laurentiis Distributeur : Bellissima Films.

106 minutes. Italie - France, 2013 Sortie France : 28 mai 2014

u RÉSUMÉ Rome, 1974. Guido est un artiste qui tient à tout prix à entrer dans le monde l’art par la voie du scandale et de la provocation. Pourtant, la petite vie bourgeoise dans laquelle il s’est coulé semble à l’opposé de ce à quoi il aspire. Serena, sa femme, se montre pour sa part plus intéressée par l’artiste que par l’art. Dario et Paolo, leurs deux enfants, sont les témoins de cette relation passionnelle, des perpétuelles querelles et réconciliations de leurs parents. Déterminé à heurter son public au cours d’une performance à Milan, Guido s’attire les foudres de la critique. Serena, chaque fois plus jalouse de tous les modèles (et accessoirement des maîtresses) de Guido, y assiste en dépit de l’interdiction de son mari. S’ensuit, pour le couple, la dispute de trop. SUITE... Serena décide d’emmener ses deux fils et de partir en vacances avec Helke, une galeriste. Ce voyage exclusivement féminin et féministe amène Serena à se redécouvrir elle-même, à se laisser séduire par Helke. De retour en Italie, elle préfère se séparer de Guido, le temps d’y voir plus clair. Complètement déboussolé, Guido donne libre cours à son inspiration en créant, dans son atelier, une statue monumentale. Ainsi, au moment où il s’y attendait le moins, la critique se met à le couvrir d’éloges. Serena revient vers lui. Pendant ce temps, au milieu de ce brouhaha, Dario observe et surtout tente de se faire remarquer de parents totalement obnubilés par leurs propres problèmes.

Visa d’exploitation : 136880. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 100 copies (vo).

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2059 - 43- ugly_Mise en page 1 30/04/14 17:48 Page1

Ugly (Ugly) de Anurag Kashyap L’enlèvement d’une petite fille en plein Bombay devient le prétexte d’un jeu de massacre familial et, davantage encore, l’occasion d’instruire le procès d’une société ayant perdu ses valeurs. Tous les coups étant permis, chacun va révéler sa face crapuleuse.

THRILLER Adultes / Grands Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Ronit Roy (Shoumik Bose), Tejaswini Kolhapure (Shalini), Rahul Bhat (Rahul Varshney / Kapoor), Anshikaa Shrivastava (Kali Varshney), Vineet Kumar Singh (Chaitanya Mishra), Girish Kulkarni (Jadhav), Surveen Chawla (Rakhi), Siddhant Kapoor (Siddhant), Madhavi Singh (Upadhyay), Murari Kumar (Shrilal), Sandesh Jadhav (Rane). Scénario : Anurag Kashyap Images : Nikos Andritsakis Montage : Aarti Bajaj Réal. 2e équipe : Neeraj Ghaywan 1er assistant réal. : Karuna Dutt Musique : Brian McComber Chansons : G.V. Prakash Kumar Décors : Mayur Sharma Costumes : Divya & Nidhi Gambhir Effets visuels : Balakrishna P. Subaiah Casting : Mukesh Chhabra Production : Phantom Films et Dar Motion Pictures Producteurs : Madhu Mantena, Vikas Bahl, Vikramaditya Motwane et Arun & Vivek Rangachari Coproducteurs : Vivek Agrawal et Shahnaab Alam Producteur associé : Aayush Maheshwari Distributeur : Happiness.

© Dar Motion Picture

HHH En raison du nombre élevé de personnages, de la variété des situations et d’une abondante suite de rebondissements, Ugly fait partie de ces films impossibles à résumer en quelques lignes. Rendre fidèlement compte du ton général nécessiterait de ricocher d’un humour à la Tarantino (dans les hilarantes scènes de commissariat notamment) au pessimisme façon Haneke, sans oublier les scènes d’action adossées à un important dispositif policier. À défaut de retrouver la petite fille soit dit en passant, l’enquête permet de récupérer huit des gamins kidnappés, détail susceptible de montrer à quel point le trafic d’enfants s’est banalisé en Inde. Inspirée d’un fait réel, ce drame s’apparente à une désespérante fresque sociale filmée dans un naturalisme adaptant Zola à l’âge d’Internet. À en juger par Ugly (que l’on peut traduire par laid, sale, exécrable...), la population de Bombay, totalement corrompue, a perdu toute décence ordinaire et n’est plus motivée que par l’appât du gain. Après Gangs of Wasseypur, Anurag Kashyap brosse un portrait de groupe d’une noirceur absolue où sont dépeints, outre une mère alcoolique séquestrée par son époux, un père irresponsable prompt à sacrifier sa famille aux chimères d’une gloire improbable, un beaupère sadique qui abuse de sa position de policier gradé afin de contrôler ses proches. Pour ruminer une humiliation, une honte, un rêve brisé, chacun - dans ce monde du bling-bling - s’estimant désargenté, leur entourage n’est pas en reste et cherche à tirer profit du drame. Il en résulte un festival de trahisons et de coups fourrés conduit avec énergie et brio où, on l’aura compris, aucun happyend n’était envisageable. _M.B.

126 minutes. Inde, 2013 Sortie France : 28 mai 2014

u RÉSUMÉ Cloîtrée par Shoumik Bose, son nouveau mari, Shalini, au bord du suicide, confie sa fille Kali à son père, Rahul, son ex, acteur débutant, dont le samedi est le jour du droit de visite. Pour récupérer un scénario chez Mishra, son agent, Rahul laisse Kali seule dans la voiture. À son retour, elle a disparu. Rahul et Mishra interrogent les marchands de rue, finissent par retrouver l’iPhone de la petite dans l’une des poches de Shrilal, un vendeur de masques qui, en tentant de leur échapper, est renversé et tué par un van. Au poste, personne ne les prend au sérieux. Jusqu’à ce que le commissaire découvre que Bose, son commandant, est partie prenante de l’affaire. Alors que les flics interrogent les trafiquants d’enfants, Bose arrête Rahul - pour rapt dont, avant le divorce, il avait enregistré les menaces. Après avoir été tabassé, Rahul continue de clamer son innocence. SUITE... Le dimanche, Rahul est libéré. Le mardi, dans l’espoir de retrouver la fillette, la police demande l’aide de la pègre. Sans plus de succès. En maquillant sa voix, Mishra demande une rançon. Bose l’arrête. Le mercredi, Rahul essaie de cambrioler une bijouterie. Une demande de rançon, est adressée cette fois par Raki, sa petite amie. Shalini demande à son père 6,5 millions de roupies et, après en avoir prélevé une partie, remet la rançon à Siddhant, son frère, avant de blesser Bose qui l’a démasquée. Le jeudi, Rahul disparaît avec la rançon. Le samedi, la police découvre, dans la rue où elle avait disparu, le cadavre de Kali, un masque à la main.

Visa d’exploitation : en cours. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 50 copies (vo).

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2059 - 44- vieuxquinevoulaitpasfeter_Mise en page 1 30/04/14 18:37 Page1

Le Vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire de Felix Herngren

(Hundraåringen som klev ut genom fönstret och försvann)

Tiré du livre éponyme et carton planétaire, ce travail joliment fantaisiste surmonte les écueils de ce type d’adaptation et retrace, avec brio et légèreté, le parcours déjanté d’un enfant du siècle, jeune centenaire travaillé par la fureur de vivre. Revigorant.

© StudioCanal

HH Comme le souligne très justement le réalisateur Felix Herngren, adapter un roman au cinéma - qui plus est un succès - n’est jamais chose facile. Force est de constater ici que c’est sans déshonneur, mais bien porté par un réel sens du tempo, de l’extravagance et de la fantaisie, qu’il se tire de ce pari. On suit donc, amusé et haletant, curieux et séduit, cet hybride suédois et halluciné de professeur Nimbus et de Forrest Gump qui traverse en innocent les grandes heures du XXe siècle, et ce au plus près de ses géants, dont notamment (excusez du peu) Franco, Truman et Staline. Fin observateur des ironies du temps, quoique semblant ne jamais bien saisir les enjeux posés devant lui par l’Histoire, il reste soucieux d’être à chaque instant dans l’hubris (en l’espèce alcoolique), la vie et la force de ses hasards. Devenu centenaire, il est toujours dans ce même désir et s’avère bien plus porté vers demain et ses possibles qu’englué dans la nostalgie qui n’est vraiment pas son genre. Car la force d’inertie qui est la sienne s’affirme comme une extraordinaire capacité de résistance aux épreuves (le Goulag) ou à la folie des hommes (la Bombe A) et le rend éminemment touchant. Refuser en l’espèce de fêter son anniversaire dans l’espace rance d’une maison de retraite, c’est, pour lui, choisir en conscience de s’inscrire dans l’ici et maintenant et d’en ouvrir une fois encore les possibles. Les personnages qui s’agrègent à lui et lui font famille - et dont les acteurs prennent tous un gourmand et visible plaisir à jouer - sont aussi, peut-être de même que le spectateur, emportés par son goût simple de vivre et d’aimer. Un goût de cinéma. _N.Z.

COMÉDIE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Robert Gustafsson (Allan Karlsson), Iwar Wiklander (Jonsson), David Wiberg (Benny), Mia Skäringer (Gunilla), Jens Hultén (le boss), Alan Ford (Pim), Ralph Carlsson (le commissaire de police Aronsson), Bianca Cruzeiro (Caracas), Sven Lönn (Bucket), Simon Seppänen (Bolt), Gustav Deinoff (Ricky), David Schackleton (Herbert Einstein), Koldo Losada (le général Franco), Algirdas Romualdas (Joseph Staline), Johan Rheborg (Tage Erlander), Kerry Shale (Harry S. Truman), Sigitas Rackys (Mikhaïl Gorbatchev), Keith Chanter (Ronald Reagan), Philip Rosch (Robert Oppenheimer), Georg Nikoloff, Manuel Dubra, Patrick Karlson, Guhn Andersson. Scénario : Felix Herngren et Hans Ingemansson D’après : le roman de Jonas Jonasson (2009) Images : Göran Hallberg Montage : Henrik Källberg 1er assistant réal. : Joakim Höglund Musique : Matti Bye Son : Mattias Eklund Décors : Mikael Varhelyi Costumes : Madeleine Kihlbom Thor Effets spéciaux : Róbert Feltner Dir. artistique : Christian Olander et Piroska Szabady Maquillage : Eva von Bahr et Love Larson Casting : Claes Stenmark Production : NICE FLX Pictures et Nice Drama Coproduction : FLX Comedy AB, Buena Vista International, Film i Väst, Nordsvensk Filmunderhallning et TV4 Sweden Producteurs : Malte Forssell, Felix Herngren, Henrik JanssonSchweizer et Patrick Nebout Distributeur : StudioCanal.

114 minutes. Suède, 2013 Sortie France : 28 mai 2014

u RÉSUMÉ Après une facétie vengeresse et explosive contre un renard, Allan se retrouve en maison de retraite à l’aube de ses 100 ans. Alors que se prépare sa fête anniversaire, il s’enfuit par la fenêtre de sa chambre. Arrivé à la gare, il prend le seul billet qu’il peut s’offrir et grimpe dans le car avec la valise que lui a confié un jeune skinhead pressé d’aller aux toilettes. SUITE... Arrivé à destination et alors que la police, alertée, le cherche, il fait la connaissance du vieux Julius, qui le convie à partager sa table et quelques verres d’aquavit. Rattrapé par le skinhead, furieux, Allan l’assomme alors qu’il violente Julius. Les deux hommes l’enferment dans la chambre froide avant d’ouvrir, intrigués, ladite valise qui contient 50 millions de couronnes. Au matin, après s’être débarrassés du corps du jeune homme mort de froid, ils taillent la route avec la valise. Ils rencontrent Benny, éternel étudiant qui tient la buvette locale. Celui-ci les prend en stop. À l’occasion d’un plein, alors que Benny croit qu’Allan à été kidnappé, celui-ci lui raconte leurs mésaventures. C’est désormais à trois qu’ils cherchent refuge dans une maison en travaux qu’occupent la jolie Gunilla et son éléphante. Mais un homme de main au service d’un parrain mafieux, soucieux de remettre la main sur son magot, surgit armé. Il est écrasé par le pachyderme, et c’est désormais à quatre qu’ils fuient avec l’argent. Le parrain les retrouve mais il perd la mémoire après un accident. C’est donc à cinq qu’ils décident de s’envoler vers Bali.

Visa d’exploitation : en cours. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 45- birdpeople_Mise en page 1 04/05/14 23:00 Page1

Bird People de Pascale Ferran Deux personnages reconquièrent leur part d’humanité dans le contexte oppressant de modernité d’un aéroport. Un film en même temps conceptuel et fantaisiste, bourré tout à la fois de connexion intelligentes et d’imprévisibles élans humains.

© Carole Bethuel

HHHH Huit ans après Lady Chatterley, Pascale Ferran revient avec un film cette fois éminemment contemporain. Partant d’un constat très basique, voir simpliste (en gros : on n’a jamais été si seuls que dans un monde où tout est techniquement fait pour nous connecter les uns aux autres), Bird People se déploie en rimes et en variations libres. Dans le décor unique d’un aéroport tout aussi métaphorique que le paquebot du Film Socialisme de Godard, on voit se multiplier des situations où la communication entre les gens est entravée par quelque chose (la distance, la position hiérarchique, la langue...) et oblige à recourir à une interface de transmission (interprète, écran, téléphone, avatar...). Le film inventorie ainsi tous les moyens par lesquels se relaient les information et les sentiments, des plus high-tech (Skype) aux plus primitifs (le langage animal ou la somatisation). Mais à travers tout cela il ne développe jamais un propos théorique. Au contraire, le film semble vagabonder en sautillant d’une idée à l’autre et d’une image à l’autre, flânant librement sans s’interdire aucune voie, que ce soit celle du réalisme ou de la fantaisie, de la contemplation ou du romanesque. Le parcours n’est alors pas exempt de longueurs ou de temps morts, mais le plus important reste sa capacité à nous surprendre et à véhiculer un regard dense et personnel, qui sait s’arrêter sur les plus petites choses du quotidien (une panne de métro, un moineau, une chambre d’hôtel...) pour en percevoir l’étrangeté, la drôlerie ou la beauté. En fin de compte, on pourrait dire que Bird People est le contraire d’un divertissement : il ne propose pas d’oublier la vie pendant deux heures, mais de continuer à vivre, penser, regarder, ressentir, rêver, en un peu plus fort. _N.M.

CHRONIQUE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Anaïs Demoustier (Audrey), Josh Charles (Gary), Roschdy Zem (Simon), Camélia Jordana (Leila), Geoffrey Cantor (Allan), Taklyt Vongdara (Akira), Radha Mitchell (Elisabeth), Akela Sari (Madame Baccar), Anne Azoulay (Mademoiselle Lhomond), Manuel Vallade (Boris), Hippolyte Girardot (Vengers), Genevieve Adams (Katlyn), Clark Johnson (McCullan), Catherine Ferran (Nuala). Et les voix de : Mathieu Amalric (le narrateur), Philippe Duclos (le père d'Audrey), Kate Moran (la sœur de Gary). Scénario : Pascale Ferran et Guillaume Bréaud Images : Julien Hirsch Montage : Mathilde Muyard 1ers assistants réal. : Simon Rooke et Guillaume Plumejean Scripte : Agathe Grau et Charles Sire Musique : Béatrice Thiriet Son : Jean-Jacques Ferran Décors : Thierry François Costumes : Anaïs Romand Effets visuels : Geoffrey Niquet Maquillage : Natali Tabareau-Vieuille Casting : Richard Rousseau, Sarah Teper et Avy Kaufman Production : Archipel 35 Coproduction : France 2 Cinéma et Titre et Structure Production Producteur délégué : Denis Freyd Dir. de production : Aude Cathelin Distributeur : Diaphana.

128 minutes. France, 2014 Sortie France : 4 juin 2014

u RÉSUMÉ Audrey se rend à Roissy pour prendre son service à l’hôtel Hilton, où elle est femme de chambre. Gary, un ingénieur informaticien américain qui vient à peine d’atterrir arrive à son tour au Hilton, où il a une chambre réservée. Puis il se rend aussitôt à une réunion. Il supervise pour un groupe français un projet de construction à Dubaï, où il est attendu le lendemain. Durant la nuit, Gary est réveillé par une crise d’angoisse. Il descend prendre l’air et fume une cigarette avec Simon, le gardien de nuit. Il prend alors la décision de ne pas repartir. Il envoie un message à son associé, pour lui annoncer qu’il se retire de leur société commune. Puis il organise avec son avocat la vente de ses actions. Enfin il joint sa femme, Elisabeth, et lui annonce qu’il la quitte. SUITE... De retour à l’hôtel après une journée de congé, Audrey, en faisant les chambres, découvre un accès à la terrasse. Elle y monte et, soudainement, se transforme en moineau. Elle s’introduit dans la chambre de Gary, puis elle le suit un moment, l’écoute téléphoner à sa sœur... Après avoir été poursuivie par un chat, affamée, elle entre dans la chambre d’un peintre japonais, Akira, qui lui donne à manger avant de la peindre. Enfin le moineau Audrey suit Simon après son service et découvre que, sans logement, il dort dans sa voiture. Au matin, sur la terrasse, Akira trouve Audrey évanouie. Audrey le suit jusqu’à sa chambre, où une assiette atteste qu’elle n’a pas rêvé... Gary et Audrey prennent l’ascenseur ensemble, puis se serrent la main.

Visa d'exploitation : en cours. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 46- domhemingway_Mise en page 1 30/04/14 17:51 Page1

Dom Hemingway (Dom Hemingway) de Richard Shepard Dom Hemingway a gardé le silence durant douze ans en prison, et entend bien se faire dédommager… Porté par un Jude Law survolté, Dom Hemingway est un film de gangsters réjouissant, alternant séquences drôles, voire hilarantes et moments plus touchants.

© 20th Century Fox

HH Richard Shepard (The Matador) nous revient avec une nouvelle comédie, pour le moins déjantée. Accompagné par une BO très rock et servi par des dialogues enlevés et délirants et une photographie on ne peut plus colorée, Dom Hemingway oscille entre comédie endiablée et quête initiatique. Dans le rôle-titre, on retrouve un Jude Law en grande forme, véritable fauve sorti de sa cage. Affublé de rouflaquettes, bedonnant, il compose un personnage unique, loser à la fois pathétique et terriblement touchant, naviguant entre mégalomanie et mélancolie, tour à tour obscène et pitoyable. Sorti de prison, il retrouve son ancien complice, l’improbable Dickie (Richard E. Grant), sapé comme un truand de Las Vegas, amputé d’une main (s’il porte un gant noir, ce n’est pas par effet de mode !) sorte de Sancho Pansa pour cet antihéros au verbe haut, qui enchaine les dialogues emphatiques, mais néanmoins percutants, comme on déclamerait du Shakespeare. Le drame de Don Hemingway, c’est que la loyauté dont-il a témoigné envers le milieu, en gardant le silence, l’a privé de sa liberté et donc de s’occuper de sa femme, malade, qui en est morte. Son salut ne viendra pas donc pas d’un dédommagement financier, mais du fait de renouer avec sa fille, et d’occuper enfin sa place de père. Le film distille d’ailleurs une certaine mélancolie, notamment lors des séquences entre Dom et sa fille Evelyn (la touchante Emilia Clarke, bien connue des amateurs de la série Game of Thrones). À l’instar de son héros, Dom Hemingway peine parfois à trouver l’équilibre et souffre un peu de son grand-écart tragi-comique, mais reste un divertissement tout à fait honorable. _P-J.M.

COMÉDIE POLICIÈRE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Jude Law (Dom Hemingway), Richard E. Grand (Dickie Black), Demián Bichir (Mr. Ivan Fontaine), Emilia Clarke (Evelyn), Kerry Condon (Melody), Jumayn Hunter (Lestor), Madalina Ghenea (Paolina), Nathan Stewart-Jarrett (Hugh), Jordan Nash (Jawara), Philippe Pierrard (Lardo), Nick Raggett (Sandy Butterfield), Simeon Moore (Andrew), Brahim Shala et Earnesto Guthrie (les hommes de main de Lestor), Samio Olowu (la petite amie de Lestor), Grant Russell (le rendez-vous de Paolina), Claire Viville, Richard Graham, Glenn Hirst, Kaitana Taylor, Colette Morrow, Jeanie Gold, Brenda Palmer, David Baukham, George Sweeney, Mark Wingett, Scott Goodall, Ray Sloane, Hayley-Marie Coppin, Fams Camara, Omar Jallow, Aileen McNally, Moses Elliott, Robb Skipper, Joel Hodge. Scénario : Richard Shepard Images : Gilles Nuttgens Montage : Dana Congdon 1er assistant réal. : Neil Wallace Scripte : Beverley Winston Musique : Rolfe Kent Son : Paul Carter Décors : Laurence Dorman Costumes : Julian Day Effets spéciaux : Mark Holt Effets visuels : Dominic Parker et Tom Debenham Dir. artistique : Bill Crutcher Maquillage : Kathryn Fa Casting : Nina Gold Production : RPC Coproduction : BBC Films, Isle of Man Film et Pinewood Studios Producteur : Jeremy Thomas Producteurs exécutifs : Steve Norris, Peter Watson, Zygi Kamasa et Ivan Dunleavy Distributeur : 20th century Fox.

93 minutes. Royaume-Uni, 2013 Sortie France : 4 juin 2014

u RÉSUMÉ Dom Hemingway sort de prison. Il retrouve Dickie Black, son ancien acolyte. Ils gagnent le sud de la France pour y retrouver Mr. Fontaine, leur ancien patron, redevable envers Dom d’avoir gardé le silence en prison. Fontaine lui propose de le dédommager, mais Dom, ivre, ne veut rien entendre et l’insulte copieusement. Lorsqu’il dégrise, il réalise qu’il vient d’insulter un homme extrêmement dangereux et se confond en excuses au diner. Fontaine lui pardonne, et lui remet 500 000 pounds. Les trois hommes, accompagnés de Paolina et de deux filles de joies, ont un accident de voiture. Fontaine décède, et alors que Dom ranime une des filles, Melody, Paolina retourne à la villa. Dom la voit s’enfuir avec son argent. SUITE... Il rentre en Angleterre, et se rend chez sa fille Evelyn, qui ne veut pas le voir, lui reprochant d’avoir été un horrible père. Elle a eu un enfant, Jawara. En quête de travail, Dom contacte Lestor, le fils d’un de ses anciens rivaux, qui lui demande de passer un test : ouvrir en moins de 10 minutes un coffre-fort. Dom y parvient, mais Lestor refuse de reconnaitre sa victoire et tente de le mutiler. Dom et Dickie parviennent à s’enfuir. Dom n’a plus rien. Il croise Melody, qui lui ouvre les yeux sur son envie de renouer avec sa fille. Il va se recueillir sur la tombe de sa femme, où il retrouve Jawara et Evelyn, qui lui propose d’accompagner son petit-fils à l’école. Plus tard, il tombe par hasard sur Paolina et récupère une partie de son butin.

Visa d’exploitation : en cours. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 10 copies (vo / vf).

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2059 - 47- jenesuispaslui_Mise en page 1 04/05/14 23:02 Page1

Je ne suis pas lui (Ben o degilim) de Tayfun Pirselimoglu A la lisière du fantastique, ce film raconte l’histoire d’un homme d’âge mûr qui se glisse progressivement dans la vie d’un autre et s’inscrit dans une histoire circulaire. Un scénario original et intrigant, servi par des plans lents, à la composition soignée.

© Zuzi Films

HH Avec Je ne suis pas lui, le réalisateur turc Tayfun Pirselimoglu, qui est également romancier et peintre, signe son cinquième film. Le scénario surprend par son originalité et par le suspense qu’il parvient à installer progressivement. Partant du quotidien ennuyeux d’un homme, le cinéaste construit un récit complexe et assez atypique, allant jusqu’à frôler le fantastique. L’acteur principal apparaît comme une sorte de mannequin de cire, prêt à être modelé par le désir de l’autre. La jeune femme avec qui il va vivre une brève histoire d’amour va l’inciter à entrer dans la peau de son mari, actuellement en prison. Une véritable métamorphose va alors s’opérer sous les yeux du spectateur, transformant le héros en un autre, et lui offrant la possibilité de vivre une vie parallèle. Avec une grande économie de dialogues, les deux acteurs parviennent à montrer ce glissement subtil dans le changement d’identité. Pris dans le fil d’un récit circulaire, où étrangement des situations semblables se reproduisent, le héros apparaît prisonnier d’un destin où le mensonge l’entraîne dans un jeu de rôle de plus en plus répétitif et absurde. Derrière ce récit d’un changement d’identité, le réalisateur évoque le problème que pose, dans la société turque, le poids du regard des autres. Pirselimoglu filme les scènes comme des tableaux à la composition et à la lumière soigneusement étudiés. Les scènes d’action alternent avec des séquences plus méditatives, où le temps s’écoule avec lenteur. On pourra, pour cette raison, trouver que le film met du temps à se mettre en route, mais, une fois que la mécanique du suspense est enclenchée, elle reste en tension jusqu’à la fin. _A.S.

FILM NOIR Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Ercan Kesal (Nihat), Maryam Zaree (Ayse), Riza Akin, Mehmet Avci, Nihat Alptekin, Hakan Karsak, Nikoas Moustakas, Okan Saglam, Mirza Metin, Sencer Sagdiç, Muharrem Bayrak, Mehmet Serif Tozlu, Mithat Alam, Murat Özben, Erdogan Karatas, Eren Vurmaz, Resad Baser, Sait Tasçi, Yusuf Acer, Ugur Dag, Elif Bilici, Müyesser Özay, Alaattin Cengiz, Hüseyin Yüce, Sati Yörük, Tuncay Toprak, Mehmet Güngör, Erol Dirier, Ali Dikici, Atilla Yazuv, Mustafa Tutal, Onur Kumçay, Ibrahim Keles. Scénario : Tayfun Pirselimoglu Images : Andreas Simanos Montage : Ali Aga 1er assistant réal. : Engin Emre Deger Musique : Giorgos Koumendakis Son : Fatih Aydogdu et Frédéric Théry Décors : Natai Yeres Dir. artistique : Çagatay Kaya Production : Zuzi Films Production déléguée : Demirkol, Bad Crowd, Graal, Arizona Productions et Bredok Producteurs : Veysal Ipek et Nikos Moustakas Coproducteurs : Guillaume de Seille, Irfan & Inci Dermikol, Mustafa Dok et Konstantina Stavrianou Distributeur : Arizona Films.

124 minutes. Turquie - Grèce - France - Allemagne, 2013 Sortie France : 4 juin 2014

u RÉSUMÉ En Turquie, Nihat, la cinquantaine, se voit extirpé de sa vie d’aide-cuisinier célibataire par un jeu de circonstances extérieures. Une femme, dont le mari est en prison, s’intéresse à lui et l’invite à manger chez elle. Il découvre grâce à une photo qu’il ressemble beaucoup au mari de la femme et qu’elle le projette en lui. Progressivement, il se glisse dans la peau de cet époux absent, met ses chaussons, accepte sa voiture, et conduit la femme, avec qui il entretient désormais une relation, pour voir le mari en prison. Alors qu’elle lui demande de l’emmener nager - ce que son mari a toujours refusé de faire - ils se rendent au bord de la mer. Là, la jeune femme disparaît mystérieusement. Elle est retrouvée morte sur la plage. SUITE... Une nouvelle vie commence pour Nihat, qui prend complètement l’apparence physique et l’identité du mari. Il change de lieu de vie, retrouve du travail comme serveur sur un bateau, et rencontre le sosie de son examie. L’histoire semble se répéter, d’autant plus qu’il croise plus tard le mari dans la peau duquel il s’’est glissé. Ironie du sort, il est pris pour l’ancien prisonnier, qui vient de s’évader, et il se fait arrêter par la police. Il se retrouve en prison en compagnie d’un homme, plongé dans une situation qui ressemble à une scène qu’il lui semble avoir déjà vécu avant le début de ses aventures. L’histoire de cet homme victime d’un changement d’identité semble étrangement se répéter...

Visa d'exploitation : en cours. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 15 copies (vo).

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2059 - 48- poingscontrelesmurs_Mise en page 1 30/04/14 17:53 Page1

Les Poings contre les murs (Starred Up) de David Mackenzie Plongé dans l’univers impitoyable d’une prison anglaise pour adultes, Eric, jeune délinquant ultra violent, doit apprendre à vaincre sa rage pour survivre et se mesurer à son propre père. Un portrait réaliste du monde carcéral, brossé sur un rythme d’enfer.

© Starred Up Films Ltd - Channel 4

HHH Avec Les Poings contre les murs, David Mackenzie, réalisateur multi-récompensé de My Name is Hallam Foe, explore le film de prison et s’impose les limites d’un environnement clos où, faute d’espace et de profondeur de champ, le regard est borné, et répétitif le comportement des protagonistes. Délinquant aussi jeune que violent, Eric est transféré dans une prison pour adultes. Dès son arrivée, le spectateur mesure à ses côtés la tension qui règne dans cet univers métallique peuplé de gladiateurs, l’action se déroulant essentiellement dans une prison bien réelle. Grâce à ses partis-pris - caméra portée, plans resserrés, dialogues parcimonieux le réalisateur capte les regards de fauves du personnel et des détenus tout en insistant sur la nécessité de les esquiver pour s’épargner une rixe ou une brimade (Oliver en séance de thérapie). L’autorité, dont le regard des gardiens à travers le judas ou le passe-plat est la matérialisation, proscrit, de fait, toute intimité. La justice, symbolisée avec ironie par une statue amputée aperçue derrière le carreau brisé d’une fenêtre, est incarnée par la directrice qui autorise, avant d’y mettre bientôt fin, les séances de thérapie d’Eric, ultime possibilité de communiquer sans violence. Cette micro-société hiérarchisée et corrompue, dont gardiens et détenus sont responsables à parité, génère une sauvagerie extrême qu’illustre notamment la scène glaçante de la pendaison d’Eric. À la manière de Don Siegel, (L’Évadé d’Alcatraz) ou de Steve McQueen (Hunger), Mackenzie parvient à provoquer un choc visuel sans fioritures, servi par la performance étonnante de Jack O’Connell. Efficace et terrifiant. _M.T.

DRAME CARCÉRAL Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Jack O’Connell (Eric), Ben Mendelsohn (Nev), Rupert Friend (Oliver), Sam Spruell (Hayes), Anthony Welsh (Hassan), Peter Ferdinando (Spencer), Gershwyn Eustache Jr. (Des), Ashley Chin (Ryan), Raphael Sowole (Jago), David Ajala (Tyrone), Tommy McDonnell (Self), Frederick Schmidt (l’officier Gentry), Sian Breckin (Cardew), David Avery (Ashley), Ryan McKenna (O’Sullivan), James Doran (l’officier Ahern), Gilly Gilchrist (l’officier en chef Scott), Mark Asante (Denton), Matt Faris (l’officier Eronowitz), Shane McCaffrey (Mitchell), Neil Brownlee (Gilliland), Duncan Airlie James (l’officier Bandano), Darren Hart (MacDonald), Paddy Rocks (l’officier Henry), Edna Caskey, Colin Grainger. Scénario : Jonathan Asser Images : Michael McDonough Montage : Jake Roberts et Nick Emerson Réal. 2e équipe : Colin Kennedy 1er assistant réal. : Neil Wallace Son : Ronan Hill Décors : Tom McCullagh Costumes : Susan Scott Dir. artistique : Gillian Devenney Maquillage : Nicole Stafford Casting : Shaheen Baig Production : Sigma Films Pour : Film4 Production associée : Creative Scotland, Quickfire Films, Lipsync Productions et Northern Ireland Screen Productrice : Gillian Berrie Producteurs délégués : Katherine Butler, Sam Lavender, David Mackenzie, James Atherton, Jan Pace, Norman Merry et Peter Hampden Producteur exécutif : Alex O’Neil Distributeur : Wild Side Films / Le Pacte.

105 minutes. Royaume-Uni, 2013 Sortie France : 4 juin 2014

u RÉSUMÉ Transféré prématurément dans une prison pour adultes, Eric, délinquant violent de 19 ans, est fouillé à corps avant d’être placé dans une cellule individuelle du quartier D, réservés aux détenus “à haut risque”. Après voir caché la lame de son rasoir jetable, il gagne le réfectoire où il est verbalement pris à parti par Jago, un caïd. En promenade, il retrouve Nev, son père, condamné - alors qu’Eric était encore en bas-âge - à la perpétuité. Sans raison, Eric passe un détenu à tabac. Maîtrisé par les gardiens, il est confiné en isolement. Mais Oliver, qui anime un groupe de thérapie, persuade Cardew, la directrice, d’y intégrer Eric. Spencer, un détenu influent, ordonne à Nev d’être le mentor d’Eric. Pour le protéger d’une pendaison maquillée en suicide, pratique qu’il arrive aux gardiens de mettre en œuvre, Nev réprimande son fils. SUITE... Cagoulés, les sbires de Jago corrigent Eric dans sa cellule avant qu’Hassan ne s’interpose. Eric manque, de peu, de se faire étrangler sous la douche. Après avoir sympathisé en thérapie, Hassan, Tyrone et Eric partagent leurs activités sportives, mais Nev, dont les provocations sont incessantes, sème la pagaille. Poussé à bout par Haynes, Oliver démissionne. Chacun de son côté, père et fils se retrouvent en cellule d’isolement. Avec l’aval de Spencer, Haynes et ses hommes rossent Eric et le pendent. Après avoir tué Spencer, Nev lui sauve la vie in extremis. Puis il est transféré. Eric l’étreint avant son départ.

Visa d’exploitation : en cours. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

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2059 - 49- soeursquispe_Mise en page 1 30/04/14 18:07 Page1

Les Sœurs Quispe (Las Niñas Quispe) de Sebastián Sepúlveda Inspiré d’un fait divers survenu dans les montagnes chiliennes sous la dictature de Pinochet, Les Sœurs Quispe est un film d’une rigueur quasi documentaire. Superbement filmé, ce drame intimiste et minimaliste, aux accents beckettiens, est trop souvent ennuyeux.

DRAME Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Dina Quispe (Justa Quispe), Catalina Saavedra (Lucía Quispe), Francisca Gavilán (Luciana Quispe), Alfredo Castro (Fernando), Segundo Araya (Juan Sicardini). Scénario : Sebastián Sepúlveda D’après : la pièce Las Brutas de Juan Radrigán (1980) Images : Inti Briones Montage : Santiago Otheguy 1er assistant réal. : Oscar Godoy Son : Felipe Zabala Décors : Christian Mayorga Costumes : Muriel Parra Production : Fabula Coproduction : Dolce Vita Films et Cinema Uno Producteurs : Juan de Dios & Pablo Larraín Producteurs délégués : Juan Ignacio Correa, Mariane Hartard, Rocio Jadue, Andrea Carracasco Stuven et Clara Swarc Producteur exécutif : Ruth Orellana Coproducteurs : Marc Irmer, Diego UrgoitiMoinot et Fernando Sokolowicz Distributeur : Nour Films.

© Fabula

H Monteur et scénariste (il a d’ailleurs, lors de ses études à Paris, fait la FEMIS en section scénario), le Chilien Sebastián Sepúlveda était passé à la réalisation en 2008 avec un documentaire, El Arenal. Pour son premier long métrage de fiction, il ne s’éloigne pas trop de ce format, tant cette adaptation d’une histoire vraie est traitée avec réalisme et authenticité. Tourné à l’endroit exact où s’est déroulée, voici quarante ans, l’odyssée de ces trois femmes, et avec une de leurs nièces dans le rôle de sa propre tante, cette chronique décrits les effets néfastes de la politique de Pinochet sur les bergers et leur mode de vie ancestral, alors voué à disparaître. Perdues, ces trois sœurs semblent errer entre ciel et terre, comme des âmes en peine, entre vie et mort. Elles semblent effrayées, comme poursuivies par un danger extérieur et invisible. Elles marchent avec leurs chèvres, discutent entre elles de tout et de rien, de choses futiles comme de faits plus graves, croisent quelques personnes, s’installent dans des “rucas” (petites grottes servant de couchettes aux bergers) pour la nuit, puis reprennent la route. Leur quotidien et leurs doutes nous sont ainsi exposés durant 1h20... Et c’est souvent long ! Car, il faut bien l’admettre, il ne se passe pas grand chose dans ce film d’une absolue platitude, essentiellement fondé sur des dialogues sans grand intérêt. La mise en scène est, elle aussi, d’une extrême fixité : très contemplative, avec peu (voire pas) de mouvements de caméra, et aucune musique additionnelle. Rien que le bruit du vent. Saluons tout de même une très belle photographie, qui saisit à merveille l’essence des époustouflants paysages des Andes. _G.A.

83 minutes. Chili - France - Argentine, 2013 Sortie France : 4 juin 2014

u RÉSUMÉ 1974. Justa, Lucia et Luciana, trois bergères, mènent une vie calme et retirée en plein cœur de la cordillère des Andes. Depuis l’arrivée de Pinochet au pouvoir, leur mode de vie est complètement remis en question. Les trois sœurs ne savent pas ce qu’elles vont devenir, et traversent une période de doute. Lors de la transhumance avec leur troupeau de chèvres, elles parlent des autres bergers qu’elles connaissent et qui se sont vus contraints de revendre leur bétail pour une bouchée de pain et de changer de vie, ce qui les inquiète. SUITE... Dans une ruca, elles retrouvent Juan Cicardini, un vieil homme qui leur vend des vêtements contre des chèvres. Il leur dit que la situation devient très compliquée et qu’elles feraient mieux de quitter les montagnes pour se marier. Plus tard, Luciana, la benjamine, se demande si suivre ces conseils ne serait pas plus sage. Justa, l’aînée, lui raconte ce qu’elle pense des hommes : plus jeune, elle a été violée et leur père, au courant, n’a jamais rien dit. Elles croisent un homme, Fernando, qui cherche à fuir le Chili et rejoindre l’Argentine. Lucia et Luciana lui indiquent le chemin et il leur raconte qu’il a assisté à l’exécution des siens par la police. Les sœurs reprennent leur périple, et Luciana, habillée d’une robe, part seule dormir près d’une rivière. À son retour au campement, elle est malade et Lucia craint pour sa vie. Mais elle finit par guérir. Les sœurs égorgent plusieurs de leurs bêtes, et se pendent toutes les trois à un rocher.

Visa d’exploitation : 132034. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SR SRD.

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2059 - 50- souslesjupesdesfilles_Mise en page 1 05/05/14 00:50 Page1

Sous les jupes des filles de Audrey Dana Audrey Dana livre onze portraits de femmes dans un premier long métrage à l’énergie bien maîtrisée. Modeste dans sa forme et joyeux dans le fond, c’est aussi bête et méchant qu’au masculin, et finalement plutôt agréable.

© Luc Roux / Fidélité Films - Wild Bunch

HH Une actrice derrière la caméra. Une pléiade de stars devant l’objectif. Et un propos gentiment féministe en toile de fond. Le Bal des actrices a fait des émules, et l’on se dit tout d’abord que ce n’est franchement pas une bonne idée. Ton provoc’, jeu poussif, situations grotesques, ça démarre mal. Et puis, passé les présentations avec les onze actrices qui campent onze facettes féminines, chacune (ou presque) peut prendre le temps de défendre son personnage, qui apparaît alors plus subtil que de prime abord. La peur de vieillir, le burn-out qui guette la jeune mère de famille, l’ambition vs l’amitié, l’adultère sont autant de thèmes joyeusement abordés dans ce film, où s’entremêlent des névroses toutes féminines. C’est le pari plutôt bien relevé par Audrey Dana pour ce premier long métrage : raconter ce qui se passe sous les jupes (et donc dans la tête) des filles. C’est sans prétention, et c’est avec beaucoup de bonne humeur qu’elle emporte le morceau au final. L’esprit compte beaucoup dans ce genre de comédies, et il est ici de bonne composition. La structure tient également plutôt bien l’épreuve du film choral, en assurant encore un développement modeste mais sûr, jusqu’à la réunion inévitable de tout ce beau monde. Les hommes ne sont pas en reste, tour à tour goujat ou prince charmant, fils à maman ou jeune star nid à fantasmes, très bien défendus notamment par Gouix, Elbé et Lutz. Ce qui finit de charmer est l’œil volontairement non sociologique de Dana. S’il avait fallu cocher l’exhaustivité des comportements humains, ç’aurait été nettement moins sympathique. _Ch.R.

COMÉDIE DE MŒURS Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Isabelle Adjani (Lili), Alice Belaïdi (Adeline), Laetitia Casta (Agathe), Audrey Dana (Jo), Julie Ferrier (Fanny), Audrey Fleurot (Sophie), Marina Hands (Inès), Géraldine Nakache (Ysis), Vanessa Paradis (Rose), Alice Taglioni (Marie), Sylvie Testud (Sam), Guillaume Gouix, Alex Lutz, Pascal Elbé, Stanley Weber, Nicolas Briançon, Marc Lavoine, Yvonne Gradelet, Laure Calamy, Rodolphe Dana, Fabrice Abraham, Karine Valmer, Noah Toledano, Blandine Ruiz, Tania Drouginska, Clara Joly, Samuel Aouizerate, Raphaël Aouizerate, Lior Benayoun. Scénario : Audrey Dana, Murielle Magellan et Raphaëlle Desplechin Images : Giovanni Fiore Coltellacci Montage : Julien Leloup et Hervé De Luze Réal. 2e équipe : Maurice Hermet 1er assistant réal. : Maurice Hermet Scripte : Isabelle Querrioux Musique : Imany Son : Nicolas Provost Décors : Bertrand Seitz Costumes : Charlotte Betaillole Effets spéciaux : Julien Poncet de la Grave Effets visuels : Alain Carsoux et Joël Pinto Maquillage : Françoise Quilichini Casting : Anne Barbier Production : Fidélité Films Coproduction : Wild Bunch et M6 Films Producteurs : Olivier Delbosc et Marc Missonnier Productrice exécutive : Christine de Jekel Dir. de production : Samuel Amar Distributeur : Wild Bunch.

118 minutes. France, 2014 Sortie France : 4 juin 2014

u RÉSUMÉ Jo est Robert quand elle s’adresse par sms à son amant, le mari d’Inès, mère de famille dévouée, qui ignore les sousentendus d’adultère de sa sulfureuse collègue (mais en réalité frigide), Sophie. Elle prodigue ses conseils à Agathe, paniquée face à un charmant confrère avocat. Rose, quant à elle, est soupçonnée d’être une redoutable mais solitaire femme d’affaires. Elle confie alors à Adeline, son assistante, le soin de retrouver des amies d’école. Celle-ci vient en aide, dans la rue, à Fanny, une conductrice de bus qu’un choc frontal conduit chez la psychologue, Jo : elle a besoin de libérer sa libido. À bientôt 27 ans (l’âge de la mort de sa mère), Ysis se sent peu soutenue par son mari : elle entame une liaison avec la baby-sitter de ses quatre fils, Marie. Lily, la patronne de son mari (et de Sophie et Inès), se plaint auprès de sa sœur Sam, hypocondriaque qui se découvrira un cancer, de voir sa fille adolescente grandir trop vite. SUITE... Adeline trouve une seule amie qui accepte de revoir Rose, et c’est un fiasco. Agathe se laisse séduire par l’avocat. Inès découvre les messages de “Robert” et met son mari à la porte. D’abord folle de joie, Jo déchante vite et rompt. Après avoir témoigné en faveur de sa mère (défendue par Agathe), dans le meurtre de son père, Adeline convie Rose au vide-dressing organisé par Lily, et demande à Fanny, en pleine idylle avec un jeune acteur star, de jouer son amie. Marie préfère ne pas s’engager avec Ysis, qui découvre alors la belle surprise concoctée par son mari.

Visa d’exploitation : en cours. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

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Swim Little Fish Swim de Lola Bessis et Ruben Amar Dans le milieu arty new-yorkais, Leeward, un musicien expérimental, rencontre Lilas, une jeune vidéaste française. Les Français Lola Bessis et Ruben Amar signent un premier film joyeux, une ode légère à la création indépendante et à l’anticapitalisme.

© Les Films de la Fusée

HH Inspirés par l’effervescence du milieu artistique contemporain indépendant new-yorkais, Lola Bessis et Ruben Amar, deux jeunes réalisateurs français, ont commencé par organiser des ateliers avec des acteurs afin de s’inspirer de leur personnalité pour écrire les dialogues et construire leur récit, une jolie histoire d’amitié et d’amour familial, un brin anticapitaliste, dans laquelle priment les rapports humains. Conçu avec des artistes convaincants, un vidéaste, des musiciens, Swim Little Fish Swim est empli de l’ingénuité de son personnage principal Dustin Guy Defa qui incarne à merveille son rôle de musicien excentrique dont la “psychopop” indie donne au film une ambiance à la Devendra Banhart tandis que le côté new-yorkais spontané de la réalisation inspire la sympathie comme le 2 Days in Paris de Julie Delpy. Avec un petit budget, une image numérique à l’aspect années 1970, une pop sixties composée pour le film, les réalisateurs français s’inscrivent dans la lignée du cinéma indépendant newyorkais sans pour autant le révolutionner. Il y a dans cette histoire un souffle de légèreté et une pointe d’ironie bienvenue qui s’amuse du milieu de l’art contemporain avec l’image de l’atelier expérimental notamment où les peintres peignent nus, ou encore l’œuvre du serpent installé dans un labyrinthe avec des souris qui meurent d’avoir ingurgité une souris malade. Et même si le rôle de la mère artiste française arrogante sonne faux, Bessis et Amar réussissent un beau portrait de famille, intergénérationnel (quatre générations), illuminé par une grand-mère aussi arty que son petit-fils et une petite-fille aussi espiègle que son père. _G.T.

COMÉDIE SENTIMENTALE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Dustin Guy Defa (Leeward), Lola Bessis (Lilas), Brooke Bloom (Mary), Anne Consigny (Françoise de Castillon), Olivia Costello (Rainbow / Maggie), Myriam Ajar (Annabelle), Alec Betterley (Gus), Richard Buonagurio (Adam), Makeda Declet (Shiraz), Janice Hall (Ruth), Paul Manza (Leo), Brian McCarthy (George), Joy Seligsohn (Guitel), Colin Summers (Colin), Carl Titolo (Jacob), Bruno Valayer (Stéphane), Ruy André, Elisa Castro, Louise Denyer, Jane Grey, Solveig Haugen et Nicolas Winocur (les journalistes), Fay Leshner (la serveuse), Eileen Kearney (la fonctionnaire du consulat), Admiral Grey (la fille punk), Chris Duffy, Calvin LeCompte, Jocelyn Spaar, Hadi Ghandour, Tony Mann, Wendy Tonken, Allen Szeto. Scénario : Ruben Amar et Lola Bessis Montage : Thomas Marchand 1re assistante réal. : Louise Baum Musique : The Toys and Tiny Instruments Son : Arnaud Marten Décors : Yvette Granata et Audrey Bensoussan Dir. artistique : Jared Martin Casting : Lindsay Burdge, Zan Ludlum et Tiffany Frances Production : Les Films de la Fusée Coproduction : Dr. Zepp Pictures et Degel Productions Producteurs délégués : Ruben Amar et Lola Bessis Distributeur : Jour2Fête.

95 minutes. France - États-Unis, 2013 Sortie France : 4 juin 2014

u RÉSUMÉ Pendant que sa copine Mary travaille à l’hôpital, Leeward s’occupe de sa fille Maggie tout en jouant de la musique avec ses amis dans son appartement new-yorkais. Rentrée tard de l’hôpital, Mary met tout le monde dehors à l’exception de Lilas, une Française que Leeward a accepté d’héberger. Mary tient à ce que Leeward compose la mélodie d’une pub car ils ont besoin d’argent. Chacun a un rêve secret : Mary veut une maison et Leeward enregistrer un disque. Un soir, il fait un deal avec Lilas : il enregistrera et elle présentera un projet abouti de ses vidéos à un galeriste. Contre l’avis de sa mère, artiste qui prépare une rétrospective au MoMA, Lilas reste à New-York, aide Leeward à garder Maggie et continue ses vidéos. SUITE... Leeward trouve un studio d’enregistrement qu’il peut payer car, un soir de fête chez ses parents, sa grand-mère l’a dissuadé de céder au capitalisme en lui donnant de l’argent en cachette pour qu’il ne fasse pas de pub. Il peut enregistrer son disque avec la complicité de Lilas et Maggie, alors que Mary s’apprête à lui faire la surprise de l’achat de la maison pour laquelle elle verse un acompte. Mary, qui comprend que Leeward a menti, le quitte. Alors que les vidéos de Lilas sont refusées, elle essaie de coucher avec Leeward, ce qu’il refuse gentiment. À l’hôtel, Maggie écoute le disque de son père, Mary découvre une chanson d’amour composée pour elle. Quant à Lilas, elle projette ses vidéos au MoMA sous le regard complice de sa mère.

Visa d’exploitation : en cours. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 50 copies (vo [anglaise]).

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2059 - 52- tristesseclub_Mise en page 1 05/05/14 01:01 Page1

Tristesse Club de Vincent Mariette Deux frères et une demi-sœur se lancent sur les traces d’un père disparu. Précédé d’une excellente réputation obtenue dans le court métrage, Vincent Mariette signe un premier long au minimalisme assumé et bourré de charme.

COMÉDIE DRAMATIQUE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Ludivine Sagnier (Chloé), Laurent Lafitte (Léon), Vincent Macaigne (Bruno), Noémie Lvovsky (Rebecca), Dominique Reymond (Claude), Anne Azoulay (Florence), Philippe Rebbot (Yvan), Délia Espinat-Dief (Lola), Émile Baujard (Jérôme), Lock Mosoner (le caissier), Thomas de Pourquery (le gardien d’hôtel), Théo Cholbi (Guillaume). Scénario : Vincent Mariette, avec la participation de Vincent Poymiro Images : Julien Roux Montage : Nicolas Desmaison 1er assistant réal. : Simon Grass Musique : Rob Son : Nicolas Waschkowski Décors : Sidney Dubois Costumes : Carole Gérard Maquillage : Lucky Nguyen Casting : Youna de Peretti-Arda Production : Kazak Productions Producteurs : Amaury Ovise et Jean-Christophe Reymond Dir. de production : Thomas Paturel Distributeur : Haut et Court.

© Kazak Prod.

HHH Passé par la Fémis et remarqué dans le monde du court métrage (Le Meilleur ami de l’homme, Double mixte, Les Lézards), Vincent Mariette passe au long avec un film dont le casting dans le vent et l’ironie dépressive pourraient faire craindre un pur produit de l’air du temps. Mais on a vite la bonne surprise de découvrir une œuvre personnelle, modeste et tenue. Tristesse Club met en scène un trio “deux garçons-une fille” qui peut rappeler ceux de Blier et semble souvent prêt à partir sur leurs traces (la scène avec N. Lvovsky sonne clairement comme une référence à Tenue de soirée), mais qui revient régulièrement dans l’axe - plus soft - d’une mélancolie élégante à la Wes Anderson (auquel la figure du père indigne renvoie également). Rigoureux et ne cherchant pas à faire le malin, Mariette assume le minimalisme de son propos et le côté très premier degré de son approche : les enjeux sont simples, exposés frontalement, et ce qui compte ici, ce n’est pas qu’il y ait quelque chose à lire entre les lignes, mais que les mots sonnent justes, que les personnages existent. Et ils existent. D’abord grâce aux acteurs (et en premier lieu à V. Macaigne, imparable et désarmant dans un rôle de gentil proche de celui qu’il tenait dans Un monde sans femmes), mais pas uniquement. Car Mariette ne se contente pas de se reposer sur eux et sait régulièrement trouver des idées de mise en scène pour faire vivre ses dialogues et donner du tempo au récit. Certes, la limite du projet est de ne viser que des émotions mesurées (on ne hurle pas de rire, on n’est jamais totalement bouleversé), mais en tenant ses objectifs avec classe et justesse, Tristesse Club réussit à diffuser un charme constant et s’impose comme un coup d’essai maîtrisé et prometteur. _N.M.

90 minutes. France, 2014 Sortie France : 4 juin 2014

u RÉSUMÉ Fauché, Léon appelle sa femme, Florence, dont il est séparé depuis peu, à la rescousse. Il vient d’apprendre la mort de son père, Arthur, avec lequel il était en froid, et prévient Bruno, son frère à la tête d’un site de rencontres mais incapable de séduire une fille. Les deux hommes ne trouvent au crématorium qu’une jeune femme, Chloé, qui se prétend leur sœur, mais point de corps du père. Chloé avoue à Bruno que leur père a en fait seulement disparu. Tous trois se rendent dans sa maison, où ils trouvent son téléphone portable. Ils décident d’aller chez Rebecca, la femme à l’origine du divorce du père, mais ça tourne mal : Chloé assomme Rebecca et Léon embarque son pistolet. Sur le retour, ils ont une panne d’essence. La nuit, Léon vole l’essence d’une moto et protège Bruno, lorsqu’ils sont découverts. SUITE... Puis, Léon confond Chloé : elle est Marie, l’une des maîtresses de son père. Elle lui demande de ne rien dire à Bruno et passe le lendemain avec lui, tandis que Léon retrouve un ancien camarade de classe, à qui Arthur doit de l’argent. Bruno et Chloé jouent à un jeu d’alcool et les avances de sa “sœur” choquent Bruno. Celui-ci se dispute avec Léon, le traitant de mauvais père. Léon appelle Florence, qui lui lit une lettre qu’il a reçue. Bruno découvre qui est Chloé. En colère, il fonce en voiture dans un arbre et s’évanouit. Léon ramène Marie à la gare. Bruno les rappelle : un corps refait surface dans le lac. C’est Arthur, qui s’est suicidé après avoir envoyé une lettre d’excuses à Léon. Tous trois attendent sa crémation.

Visa d’exploitation : 125512. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD.

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Vincent La Vie et la mort de Vincent Van Gogh (Vincent) de Paul Cox Illustré de nombreuses œuvres, ce portrait - inédit en France - de Vincent Van Gogh s’appuie exclusivement sur ses lettres à Théo, son frère. Pour se passer de tout commentaire érudit, ce dispositif original offre un regard neuf et profond sur le génial Vincent.

DOCUMENTAIRE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec la voix de : John Hurt. Scénario : Paul Cox D’après : l’ouvrage Lettres de Vincent Van Gogh à son frère Théo (1972) Images : Paul Cox Montage : Paul Cox Musique : Norman Kaye Son : James Currie Décors : Richard Stinger et Neil Angwin Production : Daska Films et Illumination Films Producteur : Tony Llewellyn-Jones Producteur exécutif : Klaus Selinger Dir. de production : Brendan Lavelle Distributeur : Films Sans Frontières.

© Films Sans Frontières

HHH Sur fond de plat pays brumeux, que traverse un troupeau de brebis conduit par un pasteur, une voix, gravillonneuse et fébrile, lit une lettre de Vincent à Théo, son frère. Il s’agit du premier sermon prononcé par Vincent alors qu’il envisageait de devenir pasteur. Ainsi débute cet étonnant portrait de Vincent Van Gogh, génie novateur - et quasiment autodidacte - de la peinture du XIXe siècle qui naît en 1853 et se suicide en 1890, à l’âge de 37 ans, laissant au monde une œuvre immense, totalement ignorée, ou presque, de ses contemporains. Des huit cents toiles qu’il peignit, une seule, La Vigne rouge, fut vendue de son vivant, l’année de sa mort. D’origine néerlandaise, le réalisateur australien Paul Cox, auteur singulier, influencé, entre autres, par Bergman, Buñuel et Tarkovski, propose, dans ce film restauré de 1987, inédit en France, une plongée dans l’univers intime et tourmenté de Vincent. Fondé uniquement sur la lecture de lettres du peintre à son frère Théo, de 4 ans son cadet, avec qui il entretint une correspondance constante de 1872 à sa mort, ce parcours intérieur, où ne résonnent que les propos du peintre, confiés au timbre rocailleux, presque agressif, du grand John Hurt, semble déconcertant de prime abord. Peu de dates et de lieux cités, aucun discours extérieur ni photos… Seuls les mots de Vincent, ses croquis, ses esquisses, ses toiles et quelques séquences reconstituées de ce qui l’entourait, accordées à ses œuvres, composent ce paysage mental d’un homme habité tout à la fois par le génie et la folie. Bien loin d’une biographie classique, austère dans son principe et sa forme, le film réussit pourtant, en raison même de son postulat, à captiver.

99 minutes. Australie, 1987 Sortie France : 4 juin 2014

Une fois comprise l’intention, le spectateur se laisse envahir par la psyché de Vincent, par cette sensibilité exacerbée doublée d’une faculté sur-aiguisée d’auto-analyse. Du service de Dieu à celui de son art, de ses prêches dans le misérable Borinage - qui provoquèrent son exclusion - à Arles, où sa peinture explosa de couleurs tandis que son esprit sombrait, jusqu’à Auvers-sur-Oise où il fut enfin aimé par le docteur Gachet, la vie de Vincent fut une longue suite d’exaltations et de déceptions. La force des images de Paul Cox, soutenues par la voix de John Hurt, les musiques de Vivaldi et Rossini, tient à cette attention nouvelle accordée à une œuvre, aujourd’hui universellement appréciée et parfois galvaudée. La mise sous tension entre les propos de Vincent et ses œuvres donne ici profondeur et ampleur au tragique d’une vie vécue comme une mission toute entière consacrée à l’art, au détriment du confort. À travers le prisme d’un artiste dont la souffrance existentielle et la dépendance financière à son frère n’empêchent jamais la lucidité sur lui-même et sur son travail, qu’il commente avec une redoutable précision, nos sens redécouvrent ces toiles, que l’on pensait connaître par cœur. Qu’importe alors la modestie des moyens... Vincent et son œuvre trouvent dans ce Tombeau, à la construction peu banale, la compréhension et la sincère reconnaissance qui leur fit bien souvent défaut. _M.D.

Visa d’exploitation : en cours. Format : n.c. - Couleur - Son : Dolby SR.

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We Are the Best ! (Vi är bäst !) de Lukas Moodysson Bobo et Klara, deux adolescentes punk, décident envers et contre tous de créer leur propre groupe de musique et vont rapidement former, avec l’inattendue Hedvig, un trio inséparable. We Are the Best ! donne une bonne bouffée d’air frais au cinéma d’ados.

© P-A. Jörgensen / Memfis Film

HHH De retour sur nos écrans, le Suédois Lukas Moodysson (Fucking Åmål, 1998) propose un septième long métrage d’une légèreté délectable en s’attachant, le temps d’un hiver, au parcours de trois adolescentes un peu perdues mais surtout heureuses de vivre et de faire ce que bon leur semble. Libre adaptation de la bande dessinée de son épouse, Coco, qui s’est elle-même inspirée de sa propre jeunesse, We Are the Best ! relate, avec simplicité et justesse, le choix courageux et nécessaire, que font ces trois adolescentes de ne pas répondre aux critères de beauté des filles de l’époque et d’exprimer ce refus à travers l’esthétique punk. Unies par ce rejet commun, elles vont se serrer les coudes avec pour objectif, ou mot d’ordre, d’être heureuses. Filmés par le réalisateur comme à la sauvette, ces petits moments, dont il ressort une douce nostalgie, semblent relever de l’universel : les coups de téléphone à la meilleure amie enfermées à double tour dans la chambre, les tentatives capillaires désastreuses ou encore les premières cuites... Alors que le film aurait pu s’attarder sur la situation un peu difficile de Bobo, laquelle voit sa mère enchaîner les petits amis, il n’en est rien, la caméra préférant se concentrer sur les petits détails de la vie de ces personnes en devenir qui apprennent à se connaître l’une l’autre et davantage encore à se découvrir elles-mêmes. Contrairement à de nombreux “teen movies”, We Are the Best ! ne prétend administrer aucune leçon particulière. Sans prétention, le film répond parfaitement aux intentions de son auteur : attraper ces petits moments d’élan et de liberté qui, somme toute, ne sont rien d’autre que la fragrance d’une enfance heureuse. _D.C.

COMÉDIE INITIATIQUE Adultes / Adolescents

u GÉNÉRIQUE Avec : Mira Barkhammar (Bobo), Mira Grosin (Klara), Liv LeMoyne (Hedvig), Johan Liljemark (Kenneth), Mattias Wiberg (Roger), Jonathan Salomonsson (Elis), Alvin Strollo (Mackan), Anna Rydgren (la mère de Bobo), Peter Eriksson (le père de Bobo), Charlie Falk (Linus), Lena Carlsson (la mère de Klara), David Dencik (le père de Klara), Emrik Ekholm (le petit frère de Klara), Ann-Sofie Rase (la mère d’Hedvig), Lily Moodysson (la petite sœur d’Hedvig), Nick Kankaanpää, Edvin Ottoson, Karl Felix Klaesson et Victor Norlin Ericsson (les membres d’Iron Fist), Viveca Dahlén (Gunnel), Clara Christiansson (Louise), Samuel Lazar Eriksson (Trollkarl), Felix Sandman, Vanja Engström, Linnea Thörnvall, Steve Kratz, Sebastian Mira, Livia Rembe Nylander, Peter Andersson, Danilo Bejarano, Henrik Dahl, Daniel Goldman, Sofi Ahlström Helleday. Scénario : Lukas Moodysson D’après : la bande dessinée Aldrig godnatt de Coco Moodysson (2008) Images : Ulf Brantås Montage : Michal Leszczylowski Son : Hans Møller Décors : Paola Hölmer Costumes : Moa Li Lemhagen Schalin Effets visuels : Martin Madsen Maquillage : Lisa Mustafa Casting : Imor Hermann et Maggie Widstrand Production : Memfis Film Coproduction : Film i Väst Producteur : Lars Jönsson Coproducteurs : Christian Wikander, Marie-Cécile Gade et Jessica Ask Distributeur : MK2 Diffusion.

102 minutes. Suède, 2013 Sortie France : 4 juin 2014

u RÉSUMÉ Stockholm, 1982. Alors que la musique disco bat son plein, Bobo, une adolescente de 13 ans, vient de se faire couper les cheveux presque aussi courts que sa copine Klara qui arbore fièrement une crête sur la tête, ces gentilles partageant un credo : “Punk is not dead !” Elles décident de monter un groupe punk où Bobo tiendra la batterie et Klara, la basse. Ne sachant ni l’une ni l’autre jouer d’un instrument, le résultat s’avère assez désastreux. Elles proposent alors à Hedvig, une virtuose de la guitare, de se joindre au groupe. D’abord réticente à cette idée pour être très croyante, Hedvig finit par se laisser convaincre. Le trio compose une première chanson, Je déteste le sport, et commence à progresser. SUITE... Motivées par Klara, devenue leader du groupe, elles se proposent de rencontrer un autre groupe punk. Le jour de la confrontation cependant, se produit un couac : alors qu’elles pensaient qu’il s’agissait également d’un trio, elles découvrent qu’ils ne sont que deux. Ce qui provoque - pour que les groupes soient à égalité - la mise à l’écart de Bobo et, par conséquent, une crise de jalousie entre Klara et Bobo. Leurs querelles réglées, elles se mettent à répéter et partent jouer dans le festival d’une petite ville voisine. C’est un énorme fiasco. Mais, sûres de leur talent face au public, elles ne se démontent pas, jouent et se moquent des spectateurs. Et démontrent ainsi que l’esprit punk n’est pas mort : elles en sont la plus belle représentation.

Visa d’exploitation : en cours. Format : n.c. - Couleur - Son : Dolby SRD.

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N°2059

4 Rencontre avec Jaime Rosales

RETARDS Mansions de Camille Delamarre ........................................................................................ Brick H 8 9 Je m’appelle Hmmm... de Agnès Troublé dite agnès b. ...............................................................m 10 Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ? de Philippe de Chauveron ..............................................HH

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SORTIES DU 7 MAI L’Armée du salut de Abdellah Taïa ..............................................................................................H Arthur Newman de Dante Ariola .................................................................................................H Au nom du fils de Vincent Lannoo .............................................................................................. m The Baby de Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett .......................................................................... m Chappari de Nathalie Granger-Charles-Dominique et André Charles-Dominique ......................HHH De guerre lasse de Olivier Panchot .............................................................................................H D’une vie à l’autre de Georg Maas ...........................................................................................HH La Frappe de Yoon Sung-hyun ..................................................................................................HH Libre et assoupi de Benjamin Guedj ........................................................................................HH May in the Summer de Cherien Dabis .....................................................................................HH Ne pas s’avouer vaincu de Susana Arbizu et Henri Belin ......................................................HHH Le Promeneur d’oiseau de Philippe Muyl ................................................................................HH Sabotage de David Ayer ...............................................................................................................H Sarah préfère la course de Chloé Robichaud ..........................................................................HH La Voie de l’ennemi de Rachid Bouchareb ...............................................................................HH

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SORTIES DU 14 MAI La Chambre bleue de Mathieu Amalric .................................................................................HHH Charlie Countryman de Fredrik Bond .........................................................................................H Cristeros de Dean Wright ............................................................................................................H Gaudí de Stefan Haupt ..................................................................................................................H Ligne d’eau de Tomasz Wasilewski ........................................................................................HHH Michael Haneke de Yves Montmayeur .........................................................................................H Mise à l’épreuve de Tim Story .....................................................................................................H SORTIES DU 21 MAI

33 Blackout total de Steven Brill ..................................................................................................HH 34 Deux jours, une nuit de Jean-Pierre & Luc Dardenne ...........................................................HHH 35 São Paulo Blues de Francisco Garcia .......................................................................................HH 36 37 38 39 40 41 42 43 44

SORTIES DU 28 MAI Amour sur place ou à emporter de Amelle Chahbi ....................................................................H Caricaturistes de Stéphanie Valloatto .......................................................................................HH Les Drôles de poissons-chats de Claudia Sainte-Luce ............................................................HH Être et devenir de Clara Bellar ...................................................................................................H L’Île de Giovanni de Mizuho Nishikubo ...............................................................................HHHH Je te survivrai de Sylvestre Sbille ................................................................................................H Ton absence de Daniele Luchetti ...........................................................................................HHH Ugly de Anurag Kashyap ........................................................................................................HHH Le Vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire de Felix Herngren ..................................HH

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SORTIES DU 4 JUIN Bird People de Pascale Ferran ..........................................................................................HHHH Dom Hemingway de Richard Shepard ......................................................................................HH Je ne suis pas lui de Tayfun Pirselimoglu ........................................................................ HH Les Poings contre les murs de David Mackenzie .................................................................HHH Les Sœurs Quispe de Sebastián Sepúlveda ..................................................................................H Sous les jupes des filles de Audrey Dana ................................................................................HH Swim Little Fish Swim de Lola Bessis et Ruben Amar .............................................................HH Tristesse Club de Vincent Mariette .......................................................................................HHH Vincent de Paul Cox ..............................................................................................................HHH We Are the Best ! de Lukas Moodysson ................................................................................HHH

AUTRES FILMS... 7 mai 2014 Jeune > Visa : 131770 - Scope - Dolby SRD - Dist. : A-Parts Distribution // 14 mai 2014 Godzilla > Visa : en cours - Scope (2D / 3D) - Dolby SRD Atmos Dist. : Warner Bros. // Grace de Monaco > Visa : 134829 - Scope - Dolby SRD - Dist. : Gaumont // The Homesman > Visa : en cours - Scope - Dolby SRD - Dist. : EuropaCorp // Il a plu sur le grand paysage > Visa : en cours - 1,85 - Dolby SR - Dist. : Shellac // J’ai pas changé de bord > Visa : 135618 - 1,77 - Dolby SRD - Dist. : Les Films de la Contrebande // Kidon > Visa : 132827 - Scope - Dolby SRD - Dist. : Mars Distribution // 21 mai 2014 Maïdan > Visa : en cours - 1,77 - Dolby SR - Dist. : ARP Sélection // Maps to the Stars > Visa : 136865 - Image - Son - Dist. : Le Pacte // X-Men : Days of Future Past > Visa : 139319 - Scope (2D / 3D) - Dolby SRD Atmos - Dist. : 20th Century Fox // 28 mai 2014 Circles > Visa : 129134 - 1,85 - Dolby SR - Dist. : Zootrope Films // La Liste de mes envies > Visa : 136447 - 1,85 - Dolby SRD - Dist. : Pathé // Maléfique > Visa : en cours - Scope (2D / 3D) - Dolby SRD Atmos - Dist. : The Walt Disney Company // 4 juin 2014 Edge of Tomorrow > Visa : en cours - Scope - Dolby SRD Atmos - Dist. : Warner Bros. // La Mante religieuse > Visa : 130154 - Image : n.c. - Son : n.c. - Dist. : Kanibal Films // The Rover > Visa : en cours - Image : n.c. - Dolby SRD - Dist. : Metropolitan Filmexport

PROCHAIN NUMÉRO LE 11 JUIN


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