Lesedi #23

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Le contexte performatif de l’art rupestre San

David Witelson David Witelson est doctorant au Rock Art Research Institute. Ses recherches se concentrent sur la théorie de l’archéologie et le Later Stone Age d’Afrique australe.

La prise en compte de la dimension religieuse et le recours aux témoignages ethnographiques et ethnohistoriques sont sans doute les traits les plus saillants de la recherche sud-africaine sur l’art rupestre. Dans ce court article, je discute brièvement de ces deux questions scientifiques et en présente une troisième, moins connue, qui porte sur le contexte performatif de l’art rupestre San. Pour cela, je m’appuie sur des exemples pris dans le Maclear District, dans la province du Cap Oriental en Afrique du Sud.

Art rupestre et ethnographie En Afrique du Sud et au Lesotho, la tradition des peintures rupestres associées aux chasseurs-cueilleurs « San », ainsi que ses développements plus tardifs, sont généralement étudiés à travers le prisme des documents ethnographiques et ethno-historiques sur les San. Dans cet article, « San » est bien sûr utilisé sans connotation péjorative, dans un sens large, sans limite chronologique, historique ou économique. Pourquoi l’art rupestre San a-t-il été étudié à travers l’ethnographie ? Les premiers Européens avaient connaissance du fait que les populations de chasseurscueilleurs rencontrées en Afrique australe produisaient de l’art rupestre. Pendant des décennies, ce fait historique a guidé les recherches (Orpen, 1874 ; Stow, 1905). À l’époque, et pour de nombreuses années encore, il était supposé que les peintures rupestres ne pouvaient pas

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Lesedi #23 | Field notes | IFAS-Research | November 2020

remonter à plus de quelques siècles. Aujourd’hui, nous savons que certaines d’entre elles, dans le MalotiDrakensberg, datent d’il y a 3000 ans (Bonneau et al., 2017). Comme les populations San d’Afrique du Sud et du Lesotho furent décimées pendant la période coloniale (Adhikari, 2010), les chercheurs ont supposé que les connaissances sur leur art rupestre avaient également disparu. C’est pourquoi les premières interprétations de l’art ont été imprégnées soit d’une vision que l’on peut qualifier d’« art pour l’art », soit de représentations associées à des de la vie quotidienne, ou encore imputées à des rituels magiques de chasse. Ces interprétations ont été critiquées et rejetées dans les années 1970 par un groupe de chercheurs qui a examiné cet art de façon systématique (Pager, 1971 ; Vinnicombe, 1976 ; Lewis-Williams, 1981). Dans leurs efforts pour adopter une approche plus scientifique, ils ont enregistré, de manière la plus exhaustive possible, les caractéristiques des corpus d’images au sein de zones circonscrites. Cette collecte des données a permis de réaliser des analyses statistiques et de mettre en avant certaines tendances au sein de l’art pariétal.Toutefois, les chercheurs ont pris conscience que les analyses statistiques étaient utiles pour détailler certaines caractéristiques mais ne les expliquaient pas. L’analyse de chaque motif individuel laissait quant à lui de côté les associations contextuelles, et les critères choisis restreignaient les interprétations.


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