| Février / Mars / Avril 2018 N° 34
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Le journal du Cercle du Grand Théâtre et du Grand Théâtre de Genève
VOCES
Sara Baras affirme son flamenco SONYA YONCHEVA
Le retour à Genève de la diva
CAVALLERIA RUSTICANA I PAGLIACCI
Deux femmes lumineuses mettent en scène deux sombres drames
Faust
DU 1 ER AU 18 FÉVRIER 2018
L’opéra de Gounod embrase l'Opéra des Nations GTG1718_ACTO34_couv_Feuilles.indd 1
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Le thème de la saison 17-18
L'art est une nécessité
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Faust
La beauté du diable
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Voces
Les voix de la danse de Sara Baras
Cher Public, En ce mois de janvier 2018 et au moment où nous abordons notre dernière année civile à l’Opéra des Nations, devenu un lieu incontournable, il nous tient à cœur de vous adresser nos vœux les plus chaleureux, et de vous remercier de votre fidélité. Parfois sceptiques sur cette aventure de l’Opéra des Nations, vous nous avez suivis et soutenus. Avec vous et grâce à vous, nous avons pu vous faire rêver et donner un sens au mot passion. Réjouissances, mais aussi désillusions parfois… nous avons souhaité, grâce à nos vaillantes et valeureuses équipes, vous faire partager nos choix, nos coups de cœur et nos passions. Après la Trilogie de Figaro, en ouverture de saison, filmée pour la RTS et ARTE, nous vous avons proposé un regard sur l’opéra comique avec deux compositeurs incontournables qui ont marqué le XIXème siècle, Jacques Offenbach et Johann Strauss fils. Mais Figaro est toujours avec nous pour réjouir tous les publics. Figaro-ci, Figaro-là poursuit son aventure les 20 et 22 mars 2018. Petits et grands sont déjà venus nombreux applaudir ce personnage protéiforme qui évolue aussi bien dans la scénographie de Fantasio que dans celle du Baron Tzigane. Gageons qu’il saura également s’adapter à l’univers de Cavalleria rusticana et de I Pagliacci. À présent, place à l’un des mythes qui domine l’histoire de l’opéra, mais pas seulement. Crainte et tremblement, religiosité et érotisme, celui que Goethe a sublimé, Faust, va occuper l’Opéra des Nations, grâce à Charles Gounod, dont on célèbre le bicentenaire de sa naissance. Le personnage prendra aussi possession du Victoria Hall, avec Les scènes du Faust de Goethe de Robert Schumann, une nouvelle coréalisation à ne pas manquer, avec l’Orchestre de la Suisse Romande, notre partenaire artistique principal. Plus tard, des hommes de chair et de sang vont investir la scène de l’Opéra des Nations grâce à l’un des diptyques les plus appréciés du lyrique. Deux femmes emblématiques du monde théâtral italien actuel, Emma Dante et Serena Sinigaglia, revisitent ces drames méditerranéens qui ont inauguré le vérisme en musique. Le Ballet du Grand Théâtre, toujours extrêmement sollicité pour des tournées, laissera sa place à Sara Baras, une des grandes reines du flamenco, et à sa compagnie, avec Voces, un spectacle qui triomphe sur toutes les grandes scènes internationales. Une heure trente de pure poésie et d’enchantement. Personne ne peut résister à Sara Baras, une femme à la trempe d’acier, qui lorsqu’elle danse une farruca, fait jaillir des étincelles. Nous sommes certains que vous ne voudrez pas manquer le retour de Sonya Yoncheva, qui à l’occasion de la sortie de son Album Verdi, démarre son « Verdi Tour » sur notre scène, accompagnée par Marin Yonchev et L’Orchestre de Chambre de Genève, dirigé par Diego Matheuz. Mais ne l’oubliez pas, l’Opéra des Nations n’a que 1 100 places… Il se passe toujours quelque chose à l’Opéra des Nations… Grâce à vous, nous restons optimistes et réalistes, ce malgré quelques tracas financiers causés par des décisions, ou un manque de décisions politiques. Songez-y, les mois passent et les occasions de venir nous rencontrer du côté de la Place des Nations vont se raréfier, car le retour à la Place de Neuve est à présent programmé. Tobias Richter Directeur général
10 Cavalleria Rusticana I Pagliacci
Deux femmes Deux passions
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Sonya Yoncheva
La diva assoluta !
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CP 5126 - CH-1211 Genève 11 T +41 22 322 50 00 F +41 22 322 50 01 grandtheatre@geneveopera.ch www.geneveopera.ch
Emanuela Notaro
Donner forme à la création
La couverture librement inspirée de la production de Faust Direction artistique Aimery Chaigne Photographe Nicolas Schopfer Maquillage Vera Pimentão Mannequin Fanny Beladona
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Directeur de la publication Responsable éditorial Responsable graphique & artistique Ont collaboré à ce numéro Impression
Tobias Richter Alain Duchêne Aimery Chaigne Renate Cornu, Daniel Dollé, Camille Guignet, Olivier Gurtner, Isabelle Jornod, Jean Liermier, Florence Mollet, Tania Rutigliani, Charles Sigel FOT SA
Parution 4 éditions par année ; achevé d’imprimer en janvier 2018. 5 000 exemplaires. Il a été tiré 42 000 exemplaires de ce numéro encartés dans le quotidien Le Temps.
Prochainement dans le n°35
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King Arthur 26.04 > 09/05/2018 Riccardo Muti 27/05/2018 Don Giovanni 01 > 17/06/2018 Mikhail Petrenko 06/06/2018 Coup de Chœur ! 07/06/2018 Vertige romantique 28.06 > 04/07/2018
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Les abonnés du Grand Théâtre bénéficient de la libre circulation en transports publics dans le périmètre d’unireso Tout Genève, 2h avant et 2h après le spectacle. Pour l’Opéra des Nations Arrêt Nations / Sismondi : Tram 15
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L’art est une nécessité S eriez-vous prêts à vous livrer à une expérience ? Alors rendez-vous sur la page <youtube.com/ watch?v=bky5FHEKZjk>. Si vous n’utilisez pas d’ordinateur, commandez dans la collection Great conductors, le DVD consacré à Ferenc Fricsay qui répète la Moldau de Smetana avec le Südfunk-Sinfonieorchester. Attention, pour l’expérience, ne regardez surtout pas les deux premières minutes du film et passez s’il vous plaît directement à 2 mn 40, quand Fricsay arrive et débute sa répétition avec l’orchestre. Maintenant prenez le temps et écoutez-le ! Précis, bienveillant, le maestro nourrit l’orchestre en racontant des histoires aux musiciens, en leur décrivant des images, des sensations. Patiemment, s’adressant différemment à chacun, avec science et humanité, il leur transmet son regard, une vision. Observez comment il les fédère, comme il les fait se déplacer, alors qu’ils sont immobiles sur leur chaise, au point que chaque artiste derrière l’instrument, avec sa personnalité, son talent, ne joue plus des notes, mais offre de lui dans la musique. La technique au service d’une interprétation. Quand vous aurez terminé la répétition, alors regardez les 160 premières secondes du documentaire. Et si vous le pouvez, réécouter la répétition ! À la lumière de ce que vous aurez appris, votre perception ne pourra plus être tout à fait la même… À quoi bon cette expérience ? Pour le plaisir de partager d’abord. Également pour rappeler quelques lapalissades. Dans la musique comme au théâtre, presque tout n’est que travail. De recherche, d’approfondissement, de doute, de tâtonnements, de quête… Dans la musique, comme au théâtre, il est question d’interprétation, de visions. Par l’éclairage de sa vie, un artiste voit des choses que les autres ne voient pas encore : son travail les révèle.
C’est au tour du metteur en scène Jean Liermier, actuel directeur du Théâtre de Carouge, d’accompagner à sa manière le motto de notre nouvelle saison [L’espace d’une saison] et d’évoquer ici la vision d'un artiste sur les espaces de création absolument nécessaires.
J’ai la chance de diriger depuis 2008 une des institutions théâtrales phares de Suisse Romande, en m’inscrivant dans le sillage de fondateurs tels que François Simon ou Philippe Mentha, qui revisitaient dès 1958 –avec une impertinence respectueuse – les textes du répertoire dans l’authenticité du dévouement, du désir d’être au service des poètes et du public. Carouge, en investissant dans une reconstruction, vient de donner un avenir à son Théâtre-chéri ! D’ici cinq années –à l’exception d’une maison de la Danse– Genève sera dotée d’outils performants pour les arts de la scène : le Grand Théâtre rénové, la Cité de la musique, la Nouvelle Comédie. Vernier et Meyrin travaillent également au développement d’infrastructures culturelles d’envergure. L’opportunité pour les directions en place d’affirmer des identités fortes, de travailler dans la complémentarité en créant des synergies. Les défis qui nous attendent sont stimulants, principalement ceux liés à la relève des artistes de demain, des publics et des mécènes. Mais le plus grand de tous restera que les pouvoirs publics prennent intimement conscience qu’à notre époque en recherche de sens et d’horizons, l’art n’est pas une obligation, mais une nécessité : écoutons Fricsay !...
© MARIO DEL CURTO
par le metteur en scène Jean Liermier
Directeur du Théâtre de Carouge depuis 2008, Jean Liermier, promeut le répertoire classique (Marivaux, Molière, Beaumarchais, Feydeau) revisité, pour le rendre accessible au plus grand nombre. Il a travaillé notamment aux côtés de grandes figures romandes et francophones : Richard Vachoux et Claude Stratz.
[en-haut]
L'emblématique chef d'orchestre hongrois Ferenc Fricsay lors de la fameuse répétition de la Moldau de Smetana avec l'Orchestre symphonique de la radio de Stuttgart, dont parle Jean Liermier.
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› Faust Opéra en 5 actes de Charles Gounod
Mise en scène
Georges Lavaudant
Décors & Costumes
Jean-Pierre Vergier Conseiller artistique et dramaturgique Jean-Romain Vesperini Collaborateur aux mouvements Giuseppe Bucci Faust
John Osborn Méphistophélès
Adam Palka Marguerite
Ruzan Mantashyan
Valentin
Jean-François Lapointe
Wagner
Shea Owens
Siebel
Samantha Hankey Marthe Marina Viotti*
Chœur du Grand Théâtre de Genève Direction Alan Woodbridge Orchestre de la Suisse Romande *Membre de la Troupe des Jeunes solistes en résidence
À l’Opéra des Nations du 1er au 18 février 2018
« Il faut trouver une distance qui ne salisse pas la m Un entretien avec Georges Lavaudant, le metteur en scène de Faust par Charles Siegel
Charles Sigel En somme, c’est un retour à Gounod que vous opérez… Georges Lavaudant Oui, puisque ma première mise en scène d’opéra c’était Roméo et Juliette, à l’Opéra de Paris, avec Barbara Hendricks et Neil Schikoff, et c’est un souvenir très beau, mais c’était il y a trente ans ! Là, c’est Faust que le GTG m’a proposé et j’en suis très heureux, même si c’est une sorte de gageure… C’est une œuvre archi-connue, dont maints passages font partie de notre mémoire partagée, du moins pour nos générations… On croit la connaître, mais peut-être qu’on n’en connaît que des moments, les cinq, six, sept airs qu’on peut chanter dans sa salle de bain… Ce qu’il faut retrouver, c’est la ligne générale. CS Or c’est une œuvre composite, ce qui doit d’ailleurs plutôt vous intéresser, il me semble… GL Oui, j’aime assez le mélange des genres, mais il faut se pencher sur elle avec loyauté. La dérision, c’est trop facile et c’est devenu un cliché, il y a de la dérision partout aujourd’hui. Là, il y a une balance à trouver, un équilibre entre une certaine distance ironique qu’on peut glisser ici ou là, et la sincérité de l’œuvre. Et la sincérité de Gounod que je ne mets aucunement en doute.
© VICTOR TONELLI / ARTCOM
CS Il y a un côté vieux-théâtre, qui ne doit pas vous déplaire… Avec ce personnage de Méphisto, qui me fait un peu penser à Frédéric Lemaître, à Pierre Brasseur dans Les Enfants du Paradis ? GL Oui, c’est tout-à-fait cela : Méphisto se met en scène lui-même, il se compose un rôle, il prend distance, il dit « Je ferai de mon mieux pour n’ennuyer personne » avant de chanter la Ronde du veau d’or, il dit à Dame Marthe : « Votre mari est mort et vous salue », et il entreprend séance tenante de la séduire, et d’ailleurs elle se laisse faire… C’est une scène de vaudeville et il faut la prendre comme telle. Méphisto, on peut se servir de son côté Monsieur
Loyal et de ses claquements de doigts pour emmener Faust d’un univers à l’autre. D’ailleurs c’est là qu’on voit que faire référence à Gœthe comme on essaie parfois de le faire, eh bien ça ne tient pas du tout la route. À l’origine, c’est une pièce de Michel Carré jouée en 1850 sur un théâtre du boulevard, intitulée Faust et Marguerite, qui développe les personnages de Valentin et de Marthe, mais supprime l’infanticide. Il y a des passages bouffe, que Jules Barbier garde dans son adaptation, tout en ajoutant des moments tragiques, le dernier acte notamment. Cela donne un mélange d’opéra-comique et de grand opéra, mais il faut assumer ce manque d’homogénéité. CS Vous évoquez Valentin, qui endosse vaillamment toutes les valeurs bourgeoises, toute l’idéologie du Second Empire… GL Oui, la valeur militaire, le patriotisme, la famille, la piété, la panoplie complète ! Il chante « J’irai combattre pour mon pays, et si, vers Lui, Dieu me rappelle, je veillerai sur toi, ô Marguerite », mais quand il meurt, tué en duel par Faust, il la maudit en lui chantant : « Meurs ! Et si Dieu te pardonne, sois maudite ici-bas ! » Il faut endosser le fait que c’est une œuvre créée en 1859 qui reflète à la fois son époque et les conditions de sa création, et encore une fois, la dérision est trop facile. Même chose pour Faust : évidemment qu’on pourrait ironiser sur ce philosophe, recru de science, à deux doigts du suicide, qui, puisque Dieu ne répond pas à son appel, en appelle à Satan, pour qu’il lui redonne la jeunesse, et aussitôt le voilà qui chante « À moi les plaisirs, à moi les ivresses, à moi l’énergie des instincts puissants ! » La présence de Méphisto aide à estomper cette bouffée de grivoiserie. Marguerite elle-même n’est pas toute de pureté, qui, après sa très belle « Ballade du Roi de Thulé », a son moment de coquetterie face au miroir en se parant des bijoux de Méphisto… Il faut se dire qu’on est à l’opéra et qu’il y a là une logique autre, qui n’est pas psychologique, qui est proprement musicale. Et qu’il faut se laisser porter par elle.
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OPÉR ATION FAUS T
La beauté du diable Charles Gounod est né en 1818. Le Grand Théâtre de Genève célèbre ce bicentenaire en ouvrant
son année 2018 avec une nouvelle production de son opéra le plus fameux, Faust, dans une mise
© NICOLAS SCHOPFER / AIMERY CHAIGNE
en scène de Georges Lavaudant. Rencontres avec ce dernier qui marqua le Festival d'Avignon ces trente dernières années, avec Richard III et Le Roi Lear. Deux des rôles-titres de cette nouvelle production de Faust, Ruzan Mantashyan (Marguerite) et John Osborn (Faust) nous éclairent sur leur manière d'aborder leurs prises de rôles.
a musique, ni l’esprit de l’œuvre. » CS Mais l’évolution de Marguerite, sa transfiguration, c’est le cœur même de cet opéra. GL Et on l’a bien compris en Allemagne, où on l’a rebaptisé Margherete. C’est pour mettre l’accent sur le destin tragique de l’héroïne que nous nous sommes permis de supprimer le ballet, qui, aussi belle soit la musique, coupe le mouvement fatal. Marguerite, « ni demoiselle, ni belle », est séduite, puis abandonnée, elle met au monde un enfant, Méphisto la voue aux enfers, elle est maudite par son frère, elle tue son enfant, on la jette au cachot, elle devient folle, Faust survient, il s’est ravisé, il l’aime toujours, mais elle est appelée par une réalité supérieure, et quand se fait entendre le cantique de Pâques, elle meurt, mais son âme est sauvée. Le moment essentiel, c’est le duo du jardin, où l’action semble s’arrêter, moment difficile à mettre en scène d’ailleurs, où s’installe une émotion vraie, profonde, qu’on ne trouve pas ailleurs dans l’œuvre. Emotion portée par la musique. CS Gounod avait songé un temps à entrer dans les ordres, il était inscrit au Séminaire de Saint-Sulpice, comme Des Grieux… Comment vous débrouillez-vous de la religiosité de Faust ? GL Il y a ses convictions d’homme, convictions religieuses, qui sont réelles et que personne ne peut mettre en doute. Après, ce qui est toujours très beau chez les artistes, c’est qu’il y a un inconscient qui s’exprime, et peut-être Gounod se permettait-il des choses, des effusions moins en accord avec son catholicisme… Il y a un moment où le poète prend le dessus.
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Croquis du décorateur Jean-Pierre Vergier pour l'Acte V.
CS À quoi ressemblera votre mise en scène ? GL Justement, il y a un moment capital au théâtre, c’est celui où, après avoir réfléchi, rêvé, sur le texte, on se retrouve face aux acteurs-chanteurs, à leur corps, et c’est bien à partir d’eux qu’on vérifie si ses intuitions, ce que je disais à l’instant sur le musi[suite]
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FAUS T OPÉR ATION
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Croquis du décorateur Jean-Pierre Vergier pour l'Acte IV.
cien-poète, si tout cela prend forme vivante. Je leur propose des choses et je suis tellement heureux quand les comédiens me font des suggestions. Un geste, une surprise, l’inattendu, un trouble, c’est cela le plus précieux. CS Et quant à l’aspect visuel ? GL Il y a la contrainte merveilleuse de cette scène de l’ODN, sans cintres, ni dessous, ni dégagements, alors avec Jean-Pierre Vergier, mon complice de longue date, nous avons pensé à un décor qui sera le laboratoire de Faust, un peu dans l’esprit de l’architecture métallique, décor qui permettra à Méphisto de faire surgir les lieux successifs de l’action. Les costumes suggèreront une époque disons contemporaine, mais stylisée. C’est toujours cette idée de légère mise à distance, parce qu’on ne peut pas adhérer aujourd’hui aux valeurs du XIXème siècle qu’exprime Faust en restant au premier degré, il faut trouver une distance qui ne salisse pas la musique, ni l’esprit de l’œuvre.
© GTG / MAGALI DOUGADOS/
[ci-contre, à droite]
John Osborn (Faust), Ruzan Mantashyan (Marguerite), Marina Viotti (Marthe) et Adam Palka (Méphistophélès) lors des premières répétitions en janvier 2018 au Studio de Meyrin.
CS Il y a, en simplifiant, deux lignes dans votre travail : d’un côté la ligne Tchekhov-Shakespeare-Koltès-Genêt-Pirandello-Brecht, et puis une ligne plus légère : Labiche-Cyrano-Feydeau, et à l’opéra vous avez mis en scène Tristan et Isolde, ou La Tragédie florentine de Zemlinsky… GL En effet, cela fait des choses très différentes, mais d’une part, j’ai commencé il y a longtemps… et puis d’autre part je suis attentif à ce que chaque spectacle ait son climat propre, son autonomie, son authenticité, en somme sa vérité. Je suis parfois agacé de voir des metteurs en scène emmener des œuvres tellement loin de leur univers d’origine, comme pour se montrer beaucoup plus malins que leurs auteurs… Prendre un certain recul, avec élégance, oui, mais laisser aux œuvres leur sève et leur profondeur d’écriture ! ■
FESTIVAL D’ÉVÉNEMENTS EXCEPTIONNELS AUTOUR DE FAUST DU 17 JANVIER AU 18 FÉVRIER 2018 17 janvier à 19 h Conférence Gounod, Faust et les musiciens romantiques. Emmanuel Reibel Théâtre Les Salons Entrée libre sur inscription 21 janvier à 10 h Les matins de l’Opéra Brunch sur réservation à 10h Présentation en entrée libre à 11h Opéra des Nations 31 janvier à 18h15 Conférence Faust en musique Christophe Imperiali avec l’Association genevoise des Amis de l'Opéra et du Ballet Théâtre de l’Espérance 6 février à 19h30 La Beauté du Diable Projection du film de René Clair Les Cinémas du Grütli Tarifs de Fr. 5.- à 14.-
16 février à 18 h Soirée des bijoux Buffet familial des bijoux à 18h Représentation spéciale à 19 h 30 Tarifs Fr. 50.- et 30.Tirage au sort de bijoux à l'entracte en partenariat avec Swarovski 1>18 février Expositions Les costumes iconiques Foyer de l’Opéra des Nations Les ateliers pédagogiques autour de Faust Mezzanine du foyer Exposition virtuelle geneveopera.ch/faust-expo 25 février au 3 mars à 19h30 Szenen aus Goethes Faust Oratorio de Robert Schumman au Victoria Hall
8 février à 19h30 Les pactes avec le diable Dialogue de haute voltige entre Marc Bonnant et Alain Carré Opéra des Nations Entrée libre
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Ruzan Mantashyan dans les bras du metteur en scène Georges Lavaudant lors des premières répétitions en janvier 2018 au Studio de Meyrin. [en-bas]
Croquis du décorateur et costumier Jean-Pierre Vergier pour les différents costumes de Marguerite. [page suivante , en haut]
John Osborn (Faust) et Ruzan Mantashyan (Marguerite), lors des premières répétitions en janvier 2018 au Studio de Meyrin. [page suivante , en bas]
© GTG / MAGALI DOUGADOS/
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Croquis du décorateur Jean-Pierre Vergier pour l'Acte II.
« Je l’admire, je la comprends, je crois que le livret et la musique de Gounod s’unissent pour construire son parcours spirituel… »
Un entretien avec Ruzan Mantashyan, l'interprète de Marguerite par Charles Siegel
Charles Sigel On vous a découverte l’an dernier dans La Bohème et on va vous entendre dans un rôle tout nouveau pour vous… Ruzan Mantashyan Oui, ce sont mes débuts dans Marguerite que je vais faire à l’Opéra des Nations et c’est très important pour moi, aussi important que ma prise de rôle dans Mimì. Dès que j’ai su que j’étais engagée, j’ai acheté la partition et surligné la partie de Marguerite au marqueur violet (il me semble que c’est sa couleur !) Et, comme toujours, j’ai essayé de lire le maximum de choses à propos de Faust, de rechercher ce qui avait inspiré les librettistes, d’écouter le maximum d’enregistrements, d’étudier tous les rôles, pas seulement le mien. C’est comme cela que commence l’aventure. Et puis il faut chanter son rôle, c’est ce que j‘appelle « poser le rôle sur ma voix ». Certains phrasés viennent naturellement, d’autres moins, il faut alors les travailler et si on ne prend pas un bon départ, ce sera difficile à corriger dans le temps très court des répétitions. On construit un rôle à partir de la musique et à partir du livret, de ce qu’on pressent du personnage et chaque rôle, non seulement vous fait voyager dans le temps, mais aussi à l’intérieur de vous-même. CS Quelle image vous faites-vous de ce personnage, assez complexe finalement, et qui évolue au fil de l’opéra ? RM Je la ressens comme une jeune fille sincère, qui reste solitaire, son frère part pour la guerre, elle a perdu sa sœur, et comme Faust elle est victime de la chasse aux âmes que mène le Diable… Méphisto la prend dans ses filets, mais, du début à la fin, elle reste une âme pure. Elle est sincère dans sa foi. Selon moi, elle n’est pas naïve, elle est toute simple… On la voit un peu romanesque quand elle chante « la Ballade du Roi de Thulé », et puis elle s’exalte en ouvrant la cassette. Ensuite vient la scène du jardin, le duo avec Faust, qui est écrit par Gounod d’une manière tellement différente qu’il suffit de se laisser porter par la musique pour trouver la bonne couleur. Après cela, le drame tourne à la tragédie. Son enfant est né, elle est seule et abandonnée, maudite par son frère, elle sombre dans la folie. Mais elle reste un personnage fort, constante dans sa foi, ce qui sauvera son âme de la mort. Je l’admire, je la comprends, je crois que le livret et la musique de Gounod s’unissent pour construire son parcours spirituel… CS Pour évoquer l’évolution d’un personnage, vous avez à votre disposition les différentes couleurs de votre voix…
RM Je crois que, dès qu’on a le sentiment d’avoir compris son personnage, les couleurs vocales arrivent assez naturellement. Pour Marguerite, il y a évidemment ce grand air d’agilité qu’est l’Air des Bijoux, mais par chance il est au début ! Ensuite, on peut se détendre et montrer d’autres aspects de Marguerite, qui est un personnage plus dramatique que Mimì. Il faut doser son énergie, et savoir en garder pour l’essentiel, c’est-à-dire le final, et surtout la fin du trio. Ce n’est pas du tout comme la mort douce de Mimì, qui évolue par paliers et reste dans la zone confortable de la voix. Il faut construire cette progression. Alors évidemment, vous ne pouvez pas utiliser la même couleur de la voix pour exprimer l’amour et la haine, la tristesse et le bonheur… Mais j’ai le sentiment que les bonnes couleurs ne prennent vie qu’à la fin, lorsque vous avez réalisé qui est votre personnage et l’avez accepté. CS Il faut consentir à son personnage, le défendre en somme… RM Si vous croyez en lui, si vous le comprenez intérieurement, alors tout le monde sera également convaincu. Cela doit venir naturellement et ne pas sembler artificiel, exagéré. Vous devez le laisser entrer en vous. Parfois, c’est en répétant que vous découvrez de nouvelles couleurs musicales, avec le chef d’orchestre ou le metteur en scène. Vous vous mettez dans la situation proposée par la mise en scène, et vous découvrez soudain quelque chose de nouveau en accord avec cette situation. Peut-être que vous ne ferez pas la même chose dans d’autres productions. Mais il faut être ouvert au risque sur la scène et se laisser porter par la magie du jeu. Mais c’est vrai, si je sens que je ne peux pas accepter un personnage, il me sera difficile de l’interpréter. Il n’y aura pas de joie. CS Vous utilisez les mots magie, jeu, joie… RM Oui ! Evidemment j’essaie de faire évoluer ma voix de façon naturelle et saine, de la protéger et de la développer en même temps, avec l’idée de chanter aussi longtemps que possible ! Mais j’aime essayer de nouvelles choses, découvrir de nouvelles couleurs dans ma voix, jouer différentes femmes sur scène. C’est ce qui rend la vie d’un chanteur encore plus intéressante. J’aime créer un rôle à partir de presque rien, comme si personne ne l’avait jamais interprété avant moi. J’écoute de nombreux enregistrements, et puis je les oublie. Il faut essayer de commencer à partir de zéro. J’aime ce processus. ■ ACT- O | 34 . 7
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« … Une certaine lumière, la poésie, la beauté mélodique et harmonique, et aussi une expressivité très humaine. J’aime beaucoup chanter en français. »
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Un entretien avec John Osborn, l'interprète de Faust par Charles Siegel
Charles Sigel Comme pour Ruzan Mantashyan, ce Faust genevois sera pour vous une première fois, une étape nouvelle dans votre parcours vocal qui vous a conduit des rôles de ténor « di grazia », Almaviva et Elvino, de vos débuts jusqu’aux rôles de ténor lyrico-dramatique comme Pollione ou Arnold. Est-ce que Hoffmann, Des Grieux et Werther étaient des préparations à Faust ?
Szenen aus Goethes Faust
De quoi s’agit-il ? On retrouve dans cette œuvre de Robert Schumann un peu de lied, un peu de grand opéra, un peu de musique sacrée et les éléments d’un poème symphonique. C’est un pot-pourri de genres racontant une histoire. Une fusion entre sacré et profane, avec un accent marqué pour les aspects dramatiques et théâtraux. Le tout servi sur une musique intense qui joue sur la texture des timbres et sur l’harmonie. On y retrouve des éléments tels qu’un interlude instrumental représentant un coucher de soleil, une « scène du jardin » typique de l’opéra, un cantus firmus rappelant la musique de la Renaissance et tant d’autres éléments hétéroclites. L’œuvre est composée d’une ouverture et trois sections : la tragédie de Gretchen (Marguerite), la mort de Faust et la rédemption. La composition de l’œuvre est laborieuse et se fait au gré de l’état de santé de Schumann. L’idée d’un opéra sur le thème de Faust émerge en 1844. C’est surtout grâce à l’aide de Clara Schumann que toute la seconde section de l’œuvre voit le jour. Finalement, Schumann se fera interner peu après avoir composé l’ouverture (en 1853) et ce n’est qu’en 1862 que le public pourra découvrir l’intégralité de cette pièce. Au Victoria Hall 25 | 27. 02 & 03.03.2018
John Osborn Il y a si longtemps que je désirais chanter Faust ! Le Grand Théâtre de Genève m’offre la possibilité de le faire devant un public chaleureux et j’en suis enchanté. Et de le faire avec Maestro Lopez-Cobos, l’un des chefs les plus élégants et charismatiquement merveilleux avec lesquels j’ai jamais collaboré dans toute ma carrière. Mais, vous savez, quand on aborde un nouveau rôle, c’est comme un nouveau début : il faut apprendre méthodiquement toutes les notes en s’aidant d’un piano, étudier le texte, être attentif à tout ce que le compositeur a pris la peine de préciser, puis travailler tous ces éléments avec un pianiste et un coach pour être parfaitement prêt à commencer les répétitions dès le premier jour de votre arrivée. On peut écouter des enregistrements, lire des livres, mais l’essentiel, c’est encore et toujours la partition : il faut aborder une partition du répertoire comme si elle était nouvelle et inédite. Et puis viennent les idées du metteur en scène. Par la suite, si vous avez la chance de chanter à nouveau le rôle, alors c’est le bonheur : l’expérience, la mémoire, et tout simplement le passage du temps, viennent enrichir votre approche. Mais comme vous le dites, Faust est dans le droit fil des Hoffmann, Werther, Des Grieux ou Roméo que j’ai chantés à plusieurs reprises. Tous incroyablement français ! CS Incroyablement français… C’est-à-dire ? JO C’est-à-dire tragiquement romantiques ! Et offrant la même alliance entre la musique et la langue, en s’appuyant sur le pouvoir d’évocation des mots, une certaine lumière, la poésie, la beauté mélodique et harmonique, et aussi une expressivité très humaine, très exigeante pour les interprètes, qui arrivent, et les spectateurs aussi, à des degrés d’émotion qu’ils ne connaitraient jamais dans la vraie vie. J’aime beaucoup chanter en français. CS Vous êtes de ces chanteurs américains qui chantent merveilleusement en français, cette langue dont on dit qu’elle est difficile parce que peu accentuée, peu sonore, avec des diphtongues partout, des nasales, beaucoup de « e »… JO Je suis un américain ayant étudié dans un système catholique… Donc peu ouvert aux langues étrangères. On nous a proposé de choisir entre l’espagnol, le latin ou le français, j’ai choisi le français,
que j’ai tout de suite beaucoup aimé. Je crois que j’ai bien assimilé sa grammaire et ses sonorités. Au fil des années, je crois que je l’ai parlé de mieux en mieux et aimé de plus en plus. Qu’est-ce que c’est que chanter, particulièrement en français ? C’est apprendre à se servir du texte pour être expressif, apprendre à s’inspirer sincèrement sur le plan émotionnel du sens, du poids, de la couleur des mots, de l’inflexion de la langue, à phraser en même temps les mots et la musique. Si vous ignorez tout cela et que vous chantez platement votre partie, sans vous exprimer sincèrement, ou sans utiliser tous ces moyens d’expression pour raconter une histoire, alors ce n’est vraiment pas la peine ! Vous savez, il y a pour nous une première étape essentielle : nous devons ressentir intérieurement, profondément, l’émotion poétique, l’émotion musicale, pour pouvoir les transmettre aux auditeurs. CS Est-ce que je me trompe si je dis qu’il y a plusieurs rôles (ou plusieurs voix) dans ce personnage de Faust ? Des passages héroïques, des passages élégiaques ? Certains moments évoquent le grand opéra français (« Mon cœur est pénétré d’épouvante… »), d’autres sont dans l’esprit de l’opéra-comique (« À moi les plaisirs… ») JO Je crois que l’on retrouve plus ou moins tout cela, ces passages, ces caractérisations, dans tous les opéras français, c’est ce qui fait leur particularité et leur charme. Un peu plus de dialogue et c’est un opéra-comique, davantage de grandes scènes et un ballet et c’est le « Grand Opéra » du XIXème siècle. Il faut une grande flexibilité et une certaine légèreté pour gérer les phrases les plus agiles, contrôler le volume et l’intensité nécessaires dans les passages les plus héroïques, et ensuite, savoir réduire progressivement une phrase avec cette élégance pure que réclame la langue française. La plupart du temps, ces notations dynamiques, crescendos, ritenutos et col canto sont clairement marquées dans la partition, avec leur début et leur fin comme le désire le compositeur. C’est vraiment dommage quand ces raffinements sont ignorés par certains chanteurs par négligence ou faute de technique. Ou par les chefs… CS Vous avez consacré votre premier CD solo à Gilbert Duprez, « l’inventeur » de l’Ut « di petto » ? Certains chanteurs et non des moindres (Caruso, Thill, Lemeshev) chantent le contre-Ut de la Cavatine de Faust en falsetto. Qu’en pensez-vous ? J’imagine que vous choisirez l’Ut de poitrine (comme d’autres excellents chanteurs, Björling, Gedda, Kraus, Di Stefano… pour rester du côté des chanteurs du passé) Que pensez-vous de ces questions de style ? JO Duprez ne fut pas réellement l’inventeur de l’Ut de poitrine, mais le premier à en maîtriser la technique, l’objectif de la plupart des ténors étant d’essayer d’obtenir le Do supérieur en pleine « voix mixte », avec le plus beau mélange possible de la voix de tête et de la voix de poitrine. Mais il est vrai que certains enregistrements tentent d’être seulement en voix de tête, avec pas ou peu de voix de la poitrine. Selon moi, il n’y a là rien d’incorrect, car même aujourd’hui cohabitent des goûts différents pour ces notes élevées. Et si on pense à la plupart des opéras de Rossini, écrits dans les décennies précédant la période romantique française, tous les tenori di grazia chantaient toutes les notes élevées dans un registre très haut et lumineux, et c’est aujourd’hui considéré à juste titre comme la façon la plus idiomatique de le faire. Mais, pour mon goût personnel, les notes aiguës de Gounod et Massenet doivent être chantées dans un beau mélange, d’autant plus quand ces notes apparaissent plusieurs fois avec différents notations dynamiques. Bien sûr, cela nécessite beaucoup de contrôle technique, beaucoup d’expérience, et peut-être plus encore, beaucoup de confiance ! Mais c’est, je crois, le meilleur choix, qui suggère une certaine masculinité, et aussi plus de passion romantique. Et puis le public l’attend. Il ne faut pas lui refuser ce plaisir ! ■
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› Cavalleria Rusticana Opéra en un acte de Pietro Mascagni Direction musicale
Alexander Joel
Rendre le lyrique réel, ainsi travaille le courant vériste sur les consciences. Loin des grands mythes, des grandes
Mise en scène
figures historiques, il rapproche chanteur
Décors
et spectateur, dans une communion
Emma Dante
Carmine Maringola Costumes Vanessa Sannino Lumières Cristian Zucaro Alfio
Roman Burdenko
Lola Melody Louledjian*
intellectuelle et émotionnelle. Parmi les œuvres emblématiques qui l’incarnent, deux
Santuzza
viendront à l’Opéra des Nations : I Pagliacci
› IDrame Pagliacci en un prologue et 2 actes de
Rusticana de Pietro Mascagni.
Oksana Volkova
Ruggero Leoncavallo
de Ruggero Leoncavallo et Cavalleria
Direction musicale
Alexander Joel
Mise en scène
Serena Sinigaglia
Décors
Maria Spazzi Costumes Carla Teti Lumières Claudio De Pace Canio, alias Pagliaccio
Diego Torre Nedda, alias Colombina Nino Machaidze Tonio, alias Taddeo
Roman Burdenko
Beppo, alias Arlecchino
Migran Agadzhanyan*
Silvio
Andrè Schuen
Chœur du Grand Théâtre de Genève Direction Alan Woodbridge Maîtrise du Conservatoire populaire de musique, danse et théâtre Direction M. Dami & F. Szuromi Orchestre de la Suisse Romande *Membre de la Troupe des Jeunes solistes en résidence
À l’Opéra des Nations du 17 au 29 mars 2018
Deux femmes Deux passions D par Olivier Gurtner
eux figures italiennes du théâtre donnent corps à ces œuvres véristes: Emma Dante et Serena Sinigaglia. La première vient avec une reprise de Cavalleria Rusticana, présentée au Teatro communale di Bologna, la seconde propose une nouvelle production d’I Pagliacci, après avoir mis en scène Il Giasone de Francesco Cavalli. Elle est née à Palerme, elle a mis en scène des pièces en dialecte palermitain : Emma Dante aurait pu être une dramaturge vériste, puisqu’elle affirme « mon théâtre traite de la barbarie du monde ». Venue du théâtre, notamment avec sa compagnie Sud Costa Occidentale fondée en 1999 – Emma Dante fréquente aussi les plateaux d’opéra, comme La Scala en 2015 avec Carmen et plus récemment Macbeth au Teatro Regio de Turin. À Genève, elle a présenté à La Comédie Le sorelle Macaluso, une chronique douceamère qui dénonce la domination sur les femmes en Sicile. Fondatrice, présidente et directrice de l’association pour la recherche en théâtre indépendant (ATIR), Serena Sinigaglia collabore avec de nombreuses scènes italiennes comme La Fenice où elle a mis en scène Tosca en 2014. Elle est également connue du
public romand, puisqu’elle a mis en scène Il Giasone de Francesco Cavalli, donné pour la première fois au Grand Théâtre de Genève, puis repris à l’Opéra Royal de Versailles. Née à Milan, la metteure en scène défend également un art engagé et impliqué, véhiculant de fortes valeurs.
Cav/Pag, entre naturalisme et vérisme Cav/Pag, c’est l’ambition de faire entrer la vraie vie dans une salle aux fauteuils de velours. Le vérisme tire ses inspirations du naturalisme français initié par Balzac et magnifié par la somme de Zola, les Rougon-Macquart, une « Histoire naturelle et sociale d’une famille sous le Second Empire ». Initié par Giovanni Verga, le vérisme italien qui veut présenter la vie quotidienne, parfois violente, sans fard, notamment avec un regard appuyé sur les vinti dalla vita (« les vaincus de la vie »). À l’opéra, Cavalleria Rusticana et I Pagliacci incarnent fortement le vérisme. Le premier a été composé par Pietro Mascagni (18631945), devenu mondialement célèbre à seulement 27 ans, grâce à la compétition lancée par l’éditeur Sonzogno pour un opéra court. Ses autres œuvres, parmi elles Amico Fritz (1891), Le Maschere
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« Mon théâtre est là pour dénoncer les barbaries du monde » Un portrait d’Emma Dante, la metteure en scène de Cavalleria Rusticana par Tania Rutigliani
© ANDREA RANZI
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La cinquième scène de Cavalleria Rusticana lors de la générale au Teatro communale di Bologna en avril 2017
(1901), Lodoletta (1917), Nerone (1935), tomberont dans l’oubli. Cavalleria Rusticana est une histoire d’amour, de jalousie et de vengeance mortelle conçue d’après Verga (qui a également inspiré Visconti) avec de grandes mélodies, comme l’Intermezzo. Il sera plus tard fasciste italien en chemise noire, célébré par Mussolini et décrié par l’humaniste Toscanini, celui-là même qui refusa Bayreuth sous le Nazisme. Cavalleria Rusticana et I Pagliacci présente un même contexte : l’Italie du Sud, en Sicile pour le premier en Calabre, pour le second ; une forte présence religieuse, avec les fêtes de Pâques chez Mascagni et l’Assomption chez Ruggero Leoncavallo (1850-1919). Également édité par Sonzogno, le grand rival de Ricordi (éditeur de Verdi), M. Leoncavallo a composé une Bohème ignorée, mais aura le privilège de voir son Pagliacci être le premier opéra italien jamais enregistré dans son intégralité. Par un étrange paradoxe, on le présente comme une figure du vérisme alors qu’il a voulu faire entrer les mythologiques œuvres de Wagner en Italie, avec un succès relatif. Avec son « Vesti la giubba », entre clown triste et show must go on, son bref opéra marque la musique mais aussi le cinéma, notamment Les Incorruptibles de Brian De Palma. ■
alermitaine née à la fin des années 60, Emma Dante a un premier contact avec le théâtre par le Gruppo 63 – groupe néo-avant-gardiste très critique, qui tente un renouvellement du panorama littéraire italien. Elle se détache rapidement de ce groupe, qui prône une œuvre d’une absolue liberté et sans trame, car la démarche ne suscite que peu d’émotions d’après Emma Dante. Elle entreprend finalement une formation théâtrale à l’Accademia d’Arte Drammatica de Rome. Elle y découvre les « classiques » de la littérature (italienne et étrangère) qui la marqueront tout au long de sa carrière de metteure en scène et comédienne. Au sortir de l’académie, elle se lie à différentes troupes du théâtre d’avantgarde. Après plusieurs années de rencontres et d’expériences accumulées, Emma Dante abandonne la vie nomade de comédienne pour se consacrer à la mise en scène. En 1999, suite à une longue réflexion sur les enjeux du théâtre, elle fonde sa propre compagnie Sud Costa Occidentale. Elle la compose d’acteurs ayant une formation théâtrale classique, un élément qu’elle juge indispensable. Dans ses mises en scène, on retrouve certains éléments récurrents, comme l’utilisation de termes en dialecte sicilien et l’importance accordée aux thèmes de société. Emma Dante instille un rythme et une couleur particulière à ses œuvres, en y insérant ces termes siciliens. Intraduisibles en italien, ces mots se comprennent par leur sonorité crue – voire gutturale – et le langage corporel des acteurs. Emma Dante crée un théâtre social pour « dénoncer les barbaries du monde », en parlant de la famille, de la vie quotidienne, de la violence et la douleur qui y règnent. Depuis le début des années 2000, les prix et récompenses s’accumulent, notamment pour ses projets de Palermu, Carnezzeria ou encore Le sorelle Macaluso. Rapidement, sa renommée au théâtre la mène à la mise en scène d’opéra – en 2009 à La Scala de Milan avec Carmen puis Feuersnot de Strauss à Palerme, La Cenerentola de Rossini à Rome ou encore Macbeth de Verdi au Teatro Massimo. Cavalleria Rusticana est un opéra qui englobe les thèmes de prédilection de cette metteure en scène : l’attrait pour les régionalismes ou la thématique sociale. Dans sa version de Cavalleria Rusticana, Emma Dante veut se « libérer de tous les liens iconographiques préexistants très liés au réalisme ». Elle raconte également sa vision du « sentiment sicilien » et aborde la question de l’appartenance à une région, mais en mettant l’accent sur le fait qu’ « une grande œuvre d’art n’a pas d’attache géographique précise ». Bien entendu, l’aspect central de la femme au cœur du récit touche également cette metteure en scène. Elle rappelle qu’il y a un aspect « gioccoso » (joueur) dans cette tragédie, Cavalleria Rusticana ne racontant pas uniquement la mort, mais aussi la vie. Elle précise d’ailleurs que « la mort n’est pas un problème pour les morts, seulement pour les vivants ». Son décor n’est pas imposant, la scène est presque vide, animée par trois éléments modulables. Ce « vide » permet de se perdre et d’agir dans l’histoire, de se laisser emporter dans un « squarcio di vità » (une tranche de vie). ■ ACT- O | 34 . 11
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CAVALLERIA RUSTICANA / I PAGLIACCI OPÉRATION
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« “Une œuvre d’art est bonne quand elle est née d’une nécessité” disait Rainer Maria Rilke. Cela résume parfaitement ma manière de voir l’art. » Un entretien avec Serena Sinigaglia, la metteure en scène d’I Pagliacci par Tania Rutigliani [en-haut]
Croquis de la scénographe Maria Spazzi pour les décors d'I Pagliacci.
Tania Rutigliani Cavalleria Rusticana et I Pagliacci au Grand Théâtre de Genève ; que pouvez-vous nous dire de ce projet ? Serena Sinigaglia En raison de leur rôle commun dans le vérisme italien du XIXème siècle, ces deux opéras sont souvent représentés ensemble. Il y a une profusion d’éléments similaires dans ces deux œuvres. Les deux histoires se déroulent dans le sud de l’Italie – Cavalleria Rusticana en Sicile et I Pagliacci en Calabre dans des villes campagnardes à la mentalité patriarcale. L’origine des livrets est également semblable, tous deux s’inspirant des chroniques de faits divers sanglants. Emma Dante a déjà créé Cavalleria Rusticana au Teatro communale di Bologna. Ma mise en scène de I Pagliacci, en nouvelle production, se joindra à la sienne à Genève. TR Durant la saison 16-17, le Grand Théâtre vous accueillait pour la mise en scène de Il Giasone. 500 ans le séparent d’I Pagliacci ; l’un traite d’un sujet mythologique l’autre d’un sujet de société. Comment prépare-t-on deux pièces aussi différentes ? SS Chaque spectacle, chaque texte, chaque opéra est un voyage au cœur d’un monde et d’un imaginaire différent ; mais je reste la même d’une pièce à l’autre. I Pagliacci sera le même voyage que j’ai entrepris avec Il Giasone et, en même temps, son parfait opposé. TR Vous avez travaillé aux côtés d’Emma Dante : comment se déroule votre collaboration sur ce décor unique ? SS Le décor d’Emma me sert de fondement. Cependant, je le ferai évoluer sans volonté de continuité, mais de complémentarité – comme si les deux décors, et les deux œuvres, étaient les deux faces d’une même pièce. Cavalleria Rusticana et I Pagliacci s’enchaîneront et, durant le Prologue d’I Pagliacci, le décor sera démonté à la vue du public. Les artistes se mêleront peu à peu aux machinistes et accessoiristes finissant de préparer la scène. L’un deux, Tonio
(Roman Burdenko), prendra alors la parole avant de chanter son manifeste vériste. Ce prologue marquera le passage graduel entre les deux œuvres et rappellera au spectateur que même si le théâtre n’est que fiction, ces deux opéras relatent des faits réels publiés régulièrement dans les chroniques de faits divers. TR Dans l’histoire, Colombine et Santuzza ; sur scène, Emma Dante et vous. Serait-ce une ode aux femmes ? SS « Evviva ! » Dans les deux histoires, une figure féminine centrale affronte un contexte passionné et brutal – situation quotidienne pour beaucoup de femmes encore aujourd’hui. Emma Dante et moi-même sommes deux des rares femmes metteures en scène en Italie… ou du moins les rares qui jouissent de reconnaissance. Nous permettre de travailler côte à côte dans un projet similaire est une opportunité incroyable. TR I Pagliacci se déroule en Sicile, Cavalleria Rusticana en Calabre. Pour Emma Dante cela représente une occasion de parler d’appartenance, d’origines, même si pour elle une grande œuvre d’art n’est pas liée à un lieu en particulier. Qu’en est-il pour vous ? SS « Une œuvre d’art est bonne quand elle est née d’une nécessité » disait Rainer Maria Rilke. Cela résume parfaitement ma manière de voir l’art. TR Travailler dans un décor abstrait dans le cadre d’un opéra vériste, cela laisse-t-il plus de place à la mise en scène et au jeu d’acteurs ? SS Un environnement abstrait, si le concept a été soigneusement étudié, offre l’espace nécessaire à la tragédie pour se déployer. Le réalisme n’est bon que pour les drames bourgeois. La tragédie aspire à l’universalité, sans temps ni lieu précis, où le plus important c’est l’humain. ■
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EN BALLET VOCES
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Les voix de la danse « Voces ce n’est pas uniquement la voix de mes maîtres, mais aussi la mienne. »
› Voces Ballet de flamenco Sara Baras
Direction artistique, mise en scène & chorégraphie
Sara Baras
Direction & composition musicale
Keko Baldomero
Décors
Ras Artesanos Costumes Torres-Cosano Lumières Oscar Gómez de Los Reyes Avec la collaboration de
Carlos Herrera, J. Jiménez « Chaboli », Sergio Monroy, José Serrano
À l’Opéra des Nations du 21 au 25 février 2018
Un entretien avec Sara Baras, la chorégraphe de Voces par Tania Rutigliani
Tania Rutigliani Le flamenco est un art présent de manière internationale mais profondément ancré dans la tradition espagnole. Comment encourageriez-vous un spectateur, novice dans cet art, à venir découvrir Voces ? Sara Baras Même si cette danse présente de nombreuses difficultés techniques, dues à la richesse musicale et la variété qui la compose, c’est avant tout un art qui parle de passion. Le flamenco est sans frontières, qu’elles soient géographiques, linguisitiques ou d’âge. Cette fusion entre les émotions et la passion permet de s’immerger dans ce spectacle, peu importe qui l’on est ni d’où l’on vient. TR Voces emporte le spectateur à travers les différents styles de flamenco et les danseurs qui ont marqué cet art. Est-ce uniquement un hommage ? SB D’une part, Voces est un hommage aux maîtres qui ont marqué l’histoire de cette danse. Leur influence est immense. L’un de leurs plus précieux conseils étant de découvrir notre propre « voix », en explorant la leur. Voces raconte le respect et l’admiration que je ressens, comme tant d’autres danseurs, pour Paco de Lucía, Camarón, Antonio Gades, Enrique Morente, Moraíto et Carmen Amaya ces maîtres qui ont fait découvrir le flamenco au monde entier. D’autre part, tout en nous enseignant le respect des traditions, ces figures nous ont fait prendre conscience que notre propre personnalité et notre expérience personnelle nourrissent cette danse et la rendent différente. Voces ce n’est pas uniquement la voix de mes maîtres, mais aussi la mienne.
SB Le flamenco est une grande part de ma vie, cependant j’aime l’art sous toutes ses formes et je me consacre également à d’autres activités. L’un de mes projets phare est le soutien que je porte à l’association « Mi princesa Rett ». Celle-ci se consacre à la recherche concernant les enfants atteints du syndrome de Rett (une maladie génétique touchant essentiellement des jeunes filles et provoquant un polyhandicap sévère). J’essaie d’aider l’association à sensibiliser le public à cette maladie et à trouver des fonds pour la recherche d’une thérapie. ■
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TR Le flamenco, toute votre vie ?
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Le rayonnement du Grand Théâtre est
une affaire d’amis fidèles L par R enate C ornu
’indéfectible engagement des membres du Cercle est l’un des précieux garants de la bonne marche de notre théâtre d’opéra. Quand il s’est agi de se montrer solidaire pour accompagner la tenue de trois saisons à l’Opéra des Nations, tous les membres ont généreusement souscrit à l’opération d’achat d’un, voire plusieurs fauteuils ; ce qui a permis d’assurer significativement l’équilibre financier de la première institution culturelle de Suisse romande.
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C'est un moment important pour les membres du Cercle de se retrouver chaque année sur la scène du Grand Théâtre de Genève pour un dîner mémorable.
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Mais il y a aussi la tradition. Depuis plus de trente ans, le Cercle du Grand Théâtre se réunit dès l’annonce du programme de saison pour sélectionner un ou plusieurs spectacles qui l’inspirent et auxquels ses membres souhaitent apporter un soutien manifeste. Ce geste, hautement apprécié, se traduit à la fois par un appui pécunier, mais surtout il exprime le gage d’une étroite complicité avec la direction générale de l’Opéra, ses équipes artistiques et techniques. Il y a davantage : grâce au Cercle, chaque œuvre lyrique est précédée d’une conférence d’introduction par un spécialiste, souvent le conseiller artistique et dramaturge Daniel Dollé, permettant au public de se familiariser avec son livret, son histoire et l’interprétation qui en sera donnée par le metteur en scène et son équipe.
Comment s’opère alors le choix entre les différents opéras au programme d’une saison ? Il peut être guidé par l’originalité d’un titre, un ouvrage rarement produit, une distribution de très haut niveau ou un projet exigeant, sortant du répertoire. C’est cette dernière option qui a motivé les membres du Cercle à
apporter un large soutien à la Trilogie de Figaro. L’histoire du facétieux barbier – ou de l’ingénieux valet, un peu révolutionnaire pour son époque – traverse trois œuvres d’une ambitieuse trilogie : Il Barbiere di Siviglia, Le Nozze di Figaro et Figaro Gets a Divorce. Sur cette trilogie singulière, entre séduction, mariage et divorce, s’est greffée une autre production destinée au jeune public, Figaro-ci, Figaro-là ! Le joyeux portrait à rebondissements d’un Figaro multifacettes traversant tous les écrits autour du personnage qui ont inspiré Mozart et Rossini. À l’instar des productions spécialement dédiées aux plus jeunes spectateurs, certains membres du Cercle ont tenu à apporter un appui complémentaire bienvenu à ce spectacle mis en espace par Joan Mompart. Il faut relever que le choix d’un généreux soutien à la Trilogie de Figaro était récompensé par l’accueil enthousiaste du public et des médias, avec notamment une retransmission intégrale sur ARTE et RTS TV. Comme cette saison en particulier est traversée par des personnages qui ont donné lieu à de nombreuses interprétations et créations musicales, c’est tout naturellement Faust qui fait l’objet d’une remarquable attention de l’ensemble du Cercle. Le personnage mythique et mystérieux de Goethe sera décliné entre l’œuvre lyrique de Charles Gounod afin de rendre hommage au compositeur pour le centenaire de sa naissance, un festival d’événements et les Scènes du Faust de Goethe, l’oratorio de Robert Schumann. Dans le but de continuer et élargir ses actions, les membres du Cercle n’ont qu’un souhait pour cette nouvelle année, accueillir de nouveaux adhérents pour favoriser le rayonnement du Grand Théâtre auquel ils sont attachés. ■
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LE CARNET DU CERCLE
Fondé en 1986, le Cercle du Grand Théâtre s’est donné pour objectif de réunir toutes les personnes et entreprises qui tiennent à manifester leur intérêt aux arts lyrique, chorégraphique et dramatique. Son but est d’apporter son soutien financier aux activités du Grand Théâtre et
Rejoignez-nous !
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Joan Mompart et Shea Owens lors de la création à l'Opéra des Nations de Figaro-ci, Figaro-là ! en novembre 2017.
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ainsi, de participer à son rayonnement.
Nous serions heureux de vous compter parmi les passionnés d’ arts lyrique, chorégraphique et dramatique qui s’engagent pour que le Grand Théâtre de Genève conserve et renforce sa place parmi les plus grandes scènes européennes. Adhérer au Cercle du Grand Théâtre, c’est aussi l’assurance de bénéficier d'une priorité de placement, d'un vestiaire privé, d'un service de billetterie personnalisé et de pouvoir changer de billets sans frais. Vous participerez chaque année au dîner de gala à l’issue de l’Assemblée générale et profiterez des cocktails d’entracte réservés aux membres. De nombreux voyages lyriques, des conférences thématiques « Les Métiers de l’Opéra », des visites des coulisses et des ateliers du Grand Théâtre et des rencontres avec les artistes vous seront proposés tout au long de la saison. Vous pourrez assister aux répétitions générales et bénéficierez d'un abonnement gratuit à ce magazine. Vous recevrez également tous les programmes de salle chez vous.
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(du lundi au vendredi de 8 h à 12 h) T + 41 22 321 85 77 F + 41 22 321 85 79 cercle@geneveopera.ch Cercle du Grand Théâtre de Genève CP 5126 1211 Genève 11
Nos membres Bureau M. Jean Bonna, président M. Rémy Best, vice-président* Mme Brigitte Vielle, secrétaire Mme Françoise de Mestral
Mme Diane Etter-Soutter Mme Catherine Fauchier-Magnan Mme Clarina Firmenich M. et Mme Eric Freymond Mme Elka Gouzer-Waechter * également trésorier Mme Claudia Groothaert M. et Mme Philippe Gudin de La Sablonnière Autres membres du Comité Mme Christine Batruch Mme Bernard Haccius Mme Claudia Groothaert M. Alex Hoffmann Mme Coraline Mouravieff-Apostol M. et Mme Philippe Jabre Mme Beatrice Rötheli M. et Mme Éric Jacquet M. Rolin Wavre M. Romain Jordan Mme Madeleine Kogevinas Membres bienfaiteurs M. et Mme Jean Kohler M. et Mme Luc Argand M. Marko Lacin Mme René Augereau Mme Brigitte Lacroix Fondation de bienfaisance M. et Mme Pierre Lardy de la banque Pictet M. Christoph La Roche Fondation Hans Wilsdorf Mme Éric Lescure M. et Mme Pierre Keller Mme Eva Lundin Banque Lombard Odier & Cie SA M. Bernard Mach M. et Mme Yves Oltramare M. et Mme Colin Maltby M. et Mme Adam Saïd Mme Catherine de Marignac Union Bancaire Privée – UBP SA M. Thierry de Marignac M. Pierre-Alain Wavre Mme Mark Mathysen-Gerst M. et Mme Gérard Wertheimer M. Bertrand Maus M. et Mme Olivier Maus Membres individuels Mme Béatrice Mermod S. A. Prince Amyn Aga Khan M. et Mme Charles de Mestral Mme Diane d’Arcis Mme Jacqueline Missoffe S. A. S. La Princesse Étienne d’Arenberg M. et Mme Christopher Mouravieff-Apostol M. Ronald Asmar Mme Christine Batruch-Hawrylyshyn Mme Pierre-Yves Mourgue d’Algue Mme Maria Pilar de la Béraudière M. et Mme Philippe Nordmann M. et Mme Philippe Bertherat M. Yaron Ophir Mme Antoine Best M. et Mme Alan Parker M. et Mme Rémy Best M. Shelby du Pasquier Mme Saskia van Beuningen Mme Sibylle Pastré Mme Françoise Bodmer M. Jacques Perrot M. Jean Bonna M. et Mme Wolfgang Peter Valaizon Prof. Julien Bogousslavsky M. et Mme Gilles Petitpierre Mme Christiane Boulanger M. et Mme Charles Pictet Mme Clotilde de Bourqueney Harari M. et Mme Guillaume Pictet Comtesse Brandolini d’Adda M. et Mme Ivan Pictet M. et Mme Robert Briner M. et Mme Jean-François Pissettaz M. et Mme Yves Burrus Mme Françoise Propper Mme Caroline Caffin Comte de Proyart Mme Maria Livanos Cattaui Mme Adeline Quast Mme Muriel Chaponnière-Rochat Mme Ruth Rappaport M. et Mme Claude Demole M. et Mme François Reyl M. et Mme Guy Demole M. et Mme Andreas Rötheli M. et Mme Olivier Dunant M. et Mme Gabriel Safdié Marquis et Marquise de Saint Pierre Mme Denise Elfen-Laniado
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Pour recevoir de plus amples informations sur les conditions d’adhésion au Cercle, veuillez contacter directement : Madame Gwénola Trutat
M. Vincenzo Salina Amorini M. Julien Schoenlaub Baron et Baronne Seillière Mme Christiane Steck M. et Mme Riccardo Tattoni M. et Mme Kamen Troller M. et Mme Gérard Turpin M. et Mme Jean-Luc Vermeulen M. et Mme Julien Vielle M. et Mme Olivier Vodoz Mme Bérénice Waechter M. Gerson Waechter M. et Mme Stanley Walter M. et Mme Rolin Wavre M. et Mme Lionel de Weck
Membres institutionnels 1875 Finance SA Banque Pâris Bertrand Sturdza SA Credit Suisse (Suisse) SA FBT Avocats SA Fondation Bru JT International SA Lenz & Staehelin Schroder & Co banque SA SGS SA
Organe de révision : Plafida SA Compte bancaire N° 530 290 MM. Pictet & Cie
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SONYA YONCHEVA ON STAGE
Yoncheva è Mimì : « Adoro le storie dove mi innamoro e muoio in scena » La Repubblica
Yoncheva
Soprano
Direction musicale
Diego Matheuz Ténor Marin Yonchev L’Orchestre de Chambre de Genève À l’Opéra des Nations le 4 février 2018
E
par D aniel D ollé
Son programme Verdi I Vespri siciliani Ouverture Il Trovatore « Tacea la notte placida… di tale amor… » I Lombardi alla prima crociata « La mia letizia infondere » Luisa Miller Ouverture « Tu puniscimi, Oh Signore… » La Forza del destino Ouverture « Pace mio Dio » Don Carlo « Tu che le vanità » La Traviata « Lunge da lei…Oh mio rimorso » Prélude du troisième acte « Oh mia Violetta… Parigi, o cara… Gran Dio! Morir sì giovine » Attila « Oh, nel fungente nuvolo »
Son dernier CD
The Verdi Album Munich Radio Orchestra DM : Massimo Zanetti Sony Classical
la diva
ntre sa prise de rôle de Tosca au Metropolitan Opera et son concert de gala « Verdi », Sonya Yoncheva retourne à Genève et s’arrête à l’Opéra des Nations pour nous présenter un concert consacré à Verdi – à l’aube de la sortie de son Verdi Album. Une soirée à ne manquer sous aucun prétexte ! Partout, le public la réclame et l’acclame. Elle offre un somptueux présent au public du Grand Théâtre de Genève, une ville où elle a cultivé son immense talent. Le public parisien du Théâtre des ChampsÉlysées devra patienter le mois de juin pour écouter ce même concert, car son Verdi Tour débute au bout du lac Léman. Ce 4 février, elle chantera aux côtés de Marin Yonchev, sous la direction de Diego Matheuz qui donnera sa battue à L’Orchestre de Chambre de Genève.
Née à Plovdiv, en Bulgarie, la jeune soprano au timbre rond et capiteux, a perdu son prénom depuis quelques années : elle est devenue La Yoncheva. Sa voix s’est distinguée pour la première fois à 16 ans. Elle menait de front ses études de piano dans un établissement secondaire à option musicale, tout en chantant dans le chœur de jeunes filles de sa ville natale. Elle poursuit sa formation avec un Master de chant classique au Conservatoire de musique de Genève. Son talent est très vite repéré dans les années 2000 – d’abord dans son pays où elle remporte plusieurs concours de chant. Elle débute sa carrière à Genève, où elle incarne Isabelle dans L’Inganno felice de Rossini en 2005, le Coq et la Chouette dans Le Petite renarde rusée de Janáček ainsi que Junon dans Le retour d’Ulysse en sa patrie de Monteverdi en 2006. En 2007, Sonya Yoncheva réalise son premier coup d’éclat en remportant le Prix spécial des Amis du Festival d’Aix-en-Provence pour son interprétation de Fiordiligi dans Così fan tutte de Mozart. Cette même année, elle rencontre le chef d’orchestre William Christie qui lui propose d’intégrer l’académie de chant de ses Arts Florissants, le Jardin des Voix. Elle garde toujours une prédilection pour le répertoire baroque.
Depuis que Sonya Yoncheva a remporté en 2010 le concours Operalia organisé par Plácido Domingo, son ascension a été fulgurante. Les Français la découvrent au concert du 14 juillet 2013 sous la Tour Eiffel. Elle est maintenant courtisée par les plus grandes scènes du monde où elle enthousiasme le public par sa voix et son charisme. À 35 ans, elle frôle la perfection lorsqu’elle interprète, au Metropolitan de New York, La Traviata. Elle ne chante pas, elle ne joue pas : elle est ! Elle possède une intelligence vocale rare et précieuse, dévoile une beauté naturelle, une voix somptueuse, mais aussi d’autres éléments rares : un dosage très fin de la matière de l’émission vocale en fonction des états d’âme et de l’état physique du personnage. « C’est la plus belle Violetta depuis Maria Callas. La soprano bulgare Sonya Yoncheva est actuellement la meilleure Traviata au monde. » écrit Die Welt. Elle a récemment interprété La Bohème à La Scala de Milan, les rôles-titre de Lucia di Lammermoor et Iolanta à l’Opéra national de Paris, Marguerite au Staatsoper de Vienne, La Traviata au Staatsoper de Berlin et au Bayerische Staatsoper de Munich. Au cours de la saison 2017-2018, elle interprète Élisabeth de Valois dans la version française de Don Carlos et Mimì dans La Bohème à l’Opéra national de Paris (mise en scène Claus Guth) et elle fait ses débuts dans les rôles-titre de Tosca et Luisa Miller au Metropolitan Opera de New York et dans le rôle d’Imogene (Il Pirata) à La Scala de Milan. Malgré son agenda surchargé, Sonya Yoncheva, la diva assoluta a su préserver sa sphère privée : « Je suis heureuse dans ma vie privée, j’aime où je me trouve, c’est une boule de chaleur. Ma carrière, c’est une vie parallèle, elle n’a pas envahi ma bulle privée. » dans une interview à L’Express, en 2015. Nous serons tous présents le 4 février 2018, à l’Opéra des Nations pour écouter et applaudir une voix exceptionnelle et admirer Sonya Yoncheva au cours de sa brève escale genevoise, accompagnée par Marin Yonchev, L’Orchestre de Chambre de Genève sous la direction de Diego Matheuz. Pourvu qu’il reste encore des places… ■
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De retour sur la scène genevoise
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PEDAGO LES ATELIERS
Les métiers de l’opéra décoratrice costume
Donner forme à la création Un entretien avec Emanuela Notaro par Tania Rutigliani
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TR Et quel est votre parcours ? EN Je n’ai pas suivi un parcours « traditionnel », en passant par exemple par une école d’arts décoratifs. J’ai débuté dans le monde de la couture avant de partir à 24 ans faire un Master de stylisme à Florence. De retour en Suisse, j’ai tenté ma chance un peu partout, découvrant avec curiosité les différents métiers qui s’offraient à moi. Après quelques mois, j’ai intégré les ateliers du Grand Théâtre. Au début, je travaillais dans l’atelier de couture, mais peu de temps après, on m’a transférée temporairement à l’atelier décoration, en raison d’une production particulièrement contraignante. J’y travaille depuis 12 ans ! L’un des aspects les plus épanouissants de cet atelier c’est la diversité de personnes et de parcours. On apprend les uns des autres et, dans beaucoup de cas, nos compétences se complètent. Le Grand Théâtre de Genève m’a également permis de découvrir l’une de mes passions, les chapeaux. J’ai d’ailleurs pu me former à leur
TR Quelle pièce créée par vos soins vous a particulièrement marquée ? EN Ma toute première coiffe ! L’atelier confectionnait les différents couvre-chefs pour un ballet. Nous étions sous tension : il y avait beaucoup de travail et très peu de temps pour tout réaliser. Je débutais et le temps avait manqué pour me former. Soudain, ma collègue m’a dit : « Crée une coiffe d’aborigène pour l’un des danseurs. » C’est ce que j’ai fait. Douze ans plus tard, je serais incapable de vous donner le nom de la production, mais je me souviens encore de cette coiffe aborigène.
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Emanuela Notaro Il complète les ateliers de couture et de costumes. Une part de mon travail consiste à créer les éléments de costume qui ne sont pas des accessoires de jeu liés aux décors. D’autre part, j’assure le traitement des tissus et matériaux liés aux costumes. Les pièces reçues doivent pouvoir raconter une histoire et demeurer cohérentes entre elles. Je teins, je patine, je peux faire vieillir un tissu ou le couvrir de strass et de paillettes. Dans le cadre d’une nouvelle production au Grand Théâtre de Genève, une fois la maquette validée par le costumier, les dessins préparatoires sont transmis aux différents ateliers. Le travail débute alors par la recherche de matériaux qui peuvent répondre au mieux aux demandes du costumier et du metteur en scène. C’est la partie la plus fascinante du travail : décrypter la maquette, saisir les intentions de l’équipe de production et donner une texture, une forme, un volume, parfois même une couleur à un concept. Il faut aussi dénicher les techniques appropriées à la réalisation des objets. Pour la reprise d’une production, le travail principal consiste à retoucher, et parfois faire évoluer, les éléments reçus. Le confort de l’artiste reste un mot d’ordre dans notre atelier.
confection à l’Atelier-Musée de Chazelles-sur-Lyon.
TR Pour vous, travailler au Grand Théâtre de Genève c’est ... ? EN … faire ce que j’aime ! Être l’un des rouages qui permet au spectacle de prendre vie ; une superbe sensation. Cela consiste aussi à me réinventer chaque jour, car il n’existe pas de mode d’emploi pour ce travail : chaque journée constitue un vrai challenge. TR Vous avez participé à la conception de la robe de Marguerite pour la production de Faust : quel rôle avez-vous joué ? EN Au mois de juin 2016, les maquettes de Jean-Pierre Vergier pour Faust sont parvenues aux ateliers. Immédiatement, le dessin de la robe de Marguerite a attiré mon regard. Elle avait l’air somptueuse avec ses miroirs. Le défi a débuté : créer une robe qui donne l’impression d’être composée d’éclats de diamants. Dans l’atelier, nous avions déjà travaillé avec un plastique, qui rend un effet de miroir convaincant, à l’occasion d’une Flûte Enchantée. Il suffisait donc de trouver une technique pour assembler les éléments afin de les monter en volumes et de les disposer sur une toile. En montant les premiers volumes, j’ai essayé différentes techniques d’assemblage, puis j’ai imprimé le dessin de M. Vergier en grandeur nature pour m’en servir comme d’une grille de création. Une fois le concept validé, nous avons commencé à produire les différents volumes qui ont ensuite été cousus sur la robe. Il aura fallu deux ateliers, la couture et la décoration de costume, deux décoratrices, deux mois de travail et plus de 100 éléments géométriques cousus un à un, pour terminer cette robe ! Mais le défi méritait d’être relevé ! ■
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Tania Rutigliani Vous êtes collaboratrice à l’atelier de décoration et accessoires costumes du Grand Théâtre de Genève. En quoi consiste votre métier ?
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Emanuela Notaro dans son atelier en pleine séance de « construction » pour la confection de la robe-miroir de Marguerite.
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Ils ont rejoint l'autre rive... Bruce Rankin, Dmitri Hvorostovsky et Noemi Lapzeson ont rejoint les étoiles. Venu tout récemment interpréter Don Balisio dans Le Nozze di Figaro à l’Opéra des Nations, le ténor britannique Bruce Rankin s’est éteint à l’âge de 65 ans. Au Grand Théâtre, il est venu incarner le Peintre et le Nègre dans Lulu, le Blaireau et le Cuisinier dans Alice in Wonderland dans la saison 20092010. Avec son timbre chaleureux et son regard clair, il a également été Edouard IV dans Richard III (saison 11-12) et Achille dans la Belle Hélène mise en scène par Robert Sandoz. « Un Onéguine de légende » selon les mots du Figaro, Dmitri Hvorostovsky est décédé à l’âge de 55 ans, laissant dans les mémoires
le souvenir d’une voix de baryton profonde et douce. À Genève, cet « Elvis of Opera » dixit Classic fm était notamment venu donner un récital en novembre 2000, accompagné par Mikhail Arkadiev. Figure marquante de la danse contemporaine, co-fondatrice de l’Association pour la danse contemporaine (ADC) à Genève, Noemi Lapzeson a livré sa dernière danse. L’Argentine, diplômée de la Juilliard School, a posé ses valises à Genève. En octobre 2017, elle reçut le Grand prix suisse de la danse, en présence d’Alain Berset. Au Grand Théâtre de Genève, elle a notamment donné des cours de danse. Qu’un vibrant et chaleureux hommage soit rendu à ces artistes, leur travail et leur personnalité. ■
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e 26 janvier 2017, Jean-Claude Riber, bien connu du public du Grand Théâtre de Genève, a définitivement quitté la scène, alors qu’il jouissait d’une vie paisible dans les Vosges, loin des turbulences lyriques. Qu’il nous soit permis de lui rendre un dernier hommage, en ces jours qui marquent le premier anniversaire de son décès. Après avoir dirigé, à l’âge de 30 ans, le Théâtre de Mulhouse, sa ville natale, il est nommé directeur général du Grand Théâtre de Nancy, en 1970. En 1973, il prend les rênes du Grand Théâtre de Genève qu’il dirige jusqu’en 1980, avant de devenir le Generalintendant des Opéra et Théâtre dramatique de Bonn. Jean-Claude Riber a grandi dans le monde du spectacle et a commencé sa carrière en tant que metteur en scène. Une carrière qu’il mène
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de front avec celle de directeur. Il réalise plus de 150 mises en scène dans les théâtres et maisons d’opéra de France, d’Allemagne, d’Italie, de Suisse, de Roumanie, d’Iran, de Grèce, d’Autriche, d’Espagne, du Portugal, d’Argentine., sans oublier les grands festivals. Au Grand Théâtre de Genève, il signe 24 productions dont un Ring des Nibelungen. À la place de Neuve, il mettra en scène trois ouvrages (Otello, Der Fliegende Holländer et Elektra) au cours de sa première saison 1973-1974. Durant son mandat, le Grand Théâtre de Genève connaîtra un véritable essor et prendra une place importante sur l’échiquier international. Un grand Bravo et un immense Merci à ce personnage haut en couleurs et cette figure incontournable de la scène lyrique d’avoir été l’âme de cette institution ! ■
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In memoriam Côté shop...
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ne bougie lyrique, un stylo bille Balmain, un carnet siglé Grand Théâtre de Genève, la boutique se renouvelle. Entre senteurs mimosa et poudre de riz, la bougie se révèle en même temps qu'elle dévoile des mots, ceux de Madama Butterfly. Des idées à garder, un cadeau à offrir, carnets et stylos marqués de la maison lyrique sont également disponibles. En cas d'averse subite, l'on pourra s'abriter sous les auspices étoilées des parapluies du Grand Théâtre ! ■
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Le folklore suisse vient au secours de la S
REDEVANCE Des yodleurs aux joueurs de cor des Alpes, les associations de culture traditionnelle donnent de la voix contre «No Billag», qui mettrait en péril leur principal canal de diffusion YAN PAUCHARD t @YanPauchard
Avez-vous entendu? On sonne le tocsin dans les campagnes. Aux quatre coins de la Suisse, yodleurs, fanfares, accordéonistes et joueurs de cor des Alpes commencent à se mettre en ordre de bataille pour contrer l’initiative «No Billag». Alors que l’on aurait pu croire qu’elles se montreraient plutôt hostiles face à une SSR jugée parfois arrogante et centralisatrice, les associations de culture dite populaire ont donc choisi de descendre dans l’arène publique pour défendre le service public, rejoignant ainsi le combat de l’ensemble des milieux artistiques du pays. «On va y aller à fond, promet Thierry Dagon, président de la Commission de musique de l’Union suisse des chorales (USC). C’est une question de survie!» En cas de oui dans les urnes, le chef de chœur fribourgeois craint en effet des coupes massives dans les émissions culturelles qui font la part belle aux musiques traditionnelles et au folklore: «Nous perdrons un moyen essentiel de transmettre ce que nous faisons. Chacune de nos sociétés va se replier sur elle-même et finir par péricliter.» L’avis de Thierry Dagon est visiblement partagé par ses collègues de l’art choral. C’est ainsi à l’unanimité de ses délégués, venus de tous les cantons, que le comité de l’USC s’est prononcé contre la suppression de la redevance lors d’une réunion le 4 novembre dernier à Martigny. Une résolution qui n’est de loin pas anodine. L’association représente 2000 chœurs et 60 000 chanteurs.
Des joueurs de hornuss aux dentellières
de leur engagement associatif, il leur faudra voter oui», poursuit le Genevois. Pour Didier Froidevaux, l’accès à de grands médias généralistes est primordial. Il n’y a pas d’alternative. «A la fanfare de Vernier, dont je suis également président, nous avons créé une page Facebook, ainsi qu’une chaîne YouTube, pour diffuser nos concerts, mais les audiences restent confidentielles. Cela n’a rien à voir avec un passage dans l’émission radio du Kiosque à musiques, par exemple, qui nous vaut à chaque fois d’importants retours, même de personnes pas forcément passionnées.»
«La population commence à comprendre qu’il ne s’agit pas seulement de se prononcer le 4 mars prochain pour savoir si l’on aime Darius Rochebin ou non»
Et l’Union des chorales n’est de loin pas seule. La puissante Interessengemeinschaft Volkskultur (IGV) a ainsi décidé de mettre son poids dans la bataille. Peu connue en Suisse romande, elle chapeaute pas moins de 33 associations. On y retrouve tout ce que l’Helvétie compte de traditions, des cercles de danses populaires aux fanfares militaires, des joueurs de hornuss aux dentellières, jusqu’au fameux Musée de Ballenberg. Au total, l’organisation compte plus de 400 000 personnes LAURENT WEHRLI, PRÉSIDENT DU COMITÉ ROMAND CONTRE «NO BILLAG» actives. Une véritable petite «armée». «Bien sûr, beaucoup de Fête populaire nos membres à titre individuel Pour tous ces groupements, l’ensont tentés de voter oui à l’initia- gagement commence véritabletive», reconnaît Didier Froide- ment avec ce début d’année. Diffé- sociations culturelles des Grisons, vaux, vice-président d’IGV. La rentes actions concrètes sont en canton où les minorités de langues facture Billag pèse lourd sur les discussion. Une grande fête popu- italienne et surtout romanche se Enrâlent vous abonnant au Temps, vousnon neànous apportezsentent pas seulement soutien budgets. Certains sur les laire «pour dire «No Billag» menacéesun en cas de dispaessentiel, aussiorganisée les fondements de vosrition libertés individuelles. contenus de la SSR. «Maisvous tousprotégez sera ainsi le samedi des médias de service public. sont conscients que, pour le bien 3 février à Coire à l’invitation d’as- Même les stars de la nouvelle géné-
NOUS NOUS ENGAGEONS, ABONNEZ-VOUS !
ration du folklore, à l’exemple de la yodleuse bernoise Melanie Oesch et de la joueuse de cor des Alpes soleuroise Lisa Stoll, ont déclaré qu’elles refuseraient l’initiative. Le conseiller national vaudois Laurent Wehrli (PLR), président du comité romand contre «No Billag», se réjouit de cette mobilisation. «Elle démontre un tournant dans la campagne. La population commence à comprendre qu’il ne s’agit pas seulement de se prononcer le 4 mars prochain pour savoir si l’on aime Darius Rochebin ou non, mais qu’un éventuel oui aura des conséquences concrètes pour de nombreux acteurs, bien au-delà de l’espace médiatique.» Auprès des organisateurs des grandes manifestations traditionnelles, on ne cache ainsi pas une certaine anxiété. Beaucoup doivent leur succès à une étroite collaboration avec la SSR. Ainsi, c’est la décision de la télévision alémanique de diffuser en direct la Fête fédérale de lutte suisse de
2004 à Lucerne qui va donner la formidable impulsion à l’événement, aboutissant au succès populaire de la fête de 2016 à Estavayerle-Lac avec 280 000 visiteurs. La crainte est également de mise en Valais, où la RTS et la chaîne locale Canal9 diffusent chaque année la Finale nationale de la race d’Hérens. «Si nous devions perdre ces appuis, il est certain que nous devrions redimensionner notre compétition, confirme Benoît Berguerand, vice-président de la fédération d’élevage. Sans cette visibilité, les sponsors vont diminuer drastiquement leur apport financier.» Sans oublier que, selon lui, la retransmission d’une des manifestations phares du canton représente une belle publicité pour le Valais, son terroir et son tourisme.
Messages contradictoires
Difficile néanmoins d’évaluer l’impact de la mobilisation des acteurs de la culture populaire
dans une campa serrée, avec d penchent po groupes sont teurs, proches – Suisse aléman analyse le polito rini. Ils vont do messages contr leur association parti, qui est l l’initiative. De pencher?» Pour le profes de Genève, ces créent néanmoi renforçant le c sonnable face induites par un tout, ces person des sociétés loc être davantage peuvent servir d communauté. dans la catégor silencieuse, les m listes ont donc c donner de la vo
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Le canton de Vaud dépourvu de stratégie bitcoin commerce de la monnaie virtuelle, l’informaticien de formation déplore le manque de vision des autorités. «Le détail de la réponse fournie par le Conseil d’Etat montre qu’un www.letemps.chvéritable travail a été fait», salue Le bitcoin s’invite au Grand Julien Sansonnens. Il reproche Conseil vaudois. Sans beaucoup cependant au gouvernement de de succès toutefois, selon Julien manquer d’ambition et de déléSansonnens, ancien député POP guer la question au niveau fédéral. à l’origine de l’interpellation Dans sa réponse, le Conseil d’Etat – «Quelle politique du bitcoin indique en effet ne pas s’être doté pour notre canton?» – à laquelle d’une stratégie bitcoin, arguant répond le Conseil d’Etat ce mardi. que «les conditions-cadres à Si le gouvernement rend efficacemême de régir ce domaine et ses GTG1718_ACTO34_couv_Feuilles.indd 3 17:05 CRYPTOMONNAIE A la suite d’une interpellation, le Conseil d’Etat vaudois se penche ce mardi sur le bitcoin. Une stratégie vaudoise en la matière manque encore à l’appel
internationaux». Or un positionnement local est possible, selon le dépositaire de l’interpellation.
Le modèle zougois
«Regardez Zoug, ils l’ont bien compris! Ils ont été plus malins et plus rapides que Vaud dans le domaine.» La petite ville suisse alémanique favorise en effet le secteur. Les paiements à l’administration peuvent ainsi être faits en bitcoins et le canton a acquis une renommée internationale pour ses colossales levées de fonds en cryptomonnaies. Et leur
l’équivalent de 15 millions de francs en trente minutes. Le phénomène est «très important pour Zoug, parce qu’il amène beaucoup d’innovation, des places de travail
«Le Conseil d’Etat vaudois ne comprend malheureusement pas la révolution en cours»
intéressantes et contribue à la renommée de la région», déclarait en août dernier le président de la ville au Temps. Le modèle zougois inspire Julien Sansonnens, qui aimerait bien voir le gouvernement vaudois prendre exemple sur ce canton: «La Suisse réunit un énorme savoir-faire dans le domaine de la finance et des hautes technologies, c’est une opportunité pour se positionner dans le secteur des cryptomonnaies. Le Conseil d’Etat vaudois ne comprend malheureusement pas la révolution en cours.»
1250 francs), l’ Julien Sansonn réponse en mai Ce n’est toutefoi tard (alors que maintenant le l’unité) que cett sentée oralemen tés. «Il est intére son éjection suc du jour jusqu dénonce l’info montre bien l’i présidence du accorde au suje 16.01.18 17:42
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