juridiques Les Cahiers
Numéro
240 • Octobre 2021
ISSN : 2260-068X - prix au n° : 18 €
de La Gazette
Chaque mois, l’essentiel du droit des collectivités
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Politique européenne des données
Quelle place pour les collectivités ? GOUVERNANCE NUMÉRIQUE
Garantir la souveraineté de la collectivité sur ses données p. 16
MODES DE GESTION La société d’économie mixte locale p. 29
Journées d’étude
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Acteurs de la vie scolaire
JOURNÉE D’ÉTUDE ALIMENTATION ET RESTAURATION TERRITORIALES JEUDI 9 DÉCEMBRE 2021 - PARIS
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Les Cahiers
Éditorial
Serpent de mer
Numéro 240 • Octobre 2021 4 Actus
Veille
Par Brigitte Menguy
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Textes officiels 8 Jurisprudence 10 Réponses ministérielles
L
Dossier
Questions/Réponses Cahiers thématiques
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Gouvernance numérique
•G arantir la transparence et
•
•
•
15
•G arantir la souveraineté
de la collectivité sur ses données l’ouverture des données publiques C ontrôler l’hébergement et les conditions de stockage des données F avoriser de nouveaux usages des données P rotéger les données à caractère personnel
29 Modes de gestion
• L a société d’économie
• L a société d’économie
• L a société publique locale
mixte locale
mixte à opération unique
et la société publique locale d’aménagement
Mensuel édité par TERRITORIAL - SAS au capital de 1 259 907 euros Siège social : Antony Parc 2, 10 place du Général de Gaulle, La Croix de Berny, BP 20156, 92186 Antony Cedex, Bureaux : Le Cube rouge, 140 rue René Rambaud, Parc d’activités Le Parvis 2, CS 70215, 38501 Voiron Cedex RCS Nanterre 404 926 958 - N° SIRET : 404 926 958 00053 N°TVA intracommunautaire FR 28 404 926 958 - Code APE : 5813Z RIB : CIC Crédit Industriel et Commercial - Code banque : 30066 Code guichet : 10949 - N° compte : 00020062001 - Clé RIB : 26 - IBAN : FR76 3006 6109 4900 0200 6200 126 BIC (Bank Identifier Code) : CMCIFRPP N° de commission paritaire : 0525T87207 • ISSN : 2260-068X Dépôt légal : à parution Principal actionnaire : Info Services Holding Présidente et directrice de publication : Isabelle André Directeur des rédactions : Guillaume Doyen Rédaction Rédactrice en chef : Brigitte Menguy. Ont participé à ce numéro : Léna Jabre, Lucien Moti, Isabelle Verbaere
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12 Politique européenne des données : quelle place pour les collectivités ?
ongtemps promis puis reporté, le code de la fonction publique semble devenir réalité depuis mai dernier puisqu’un projet de plan a été présenté aux organisations syndicales. Une période estivale plus tard, ce fut au tour du Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) d’émettre, le 9 septembre, un avis favorable sur le projet d’ordonnance du gouvernement « portant codification de la partie législative du code général de la fonction publique ». Enfin, plus récemment, le 30 septembre, le Conseil commun de la fonction publique a, lui aussi, été invité à examiner le texte.
Droit constant Il faut le rappeler : cette codification se fait à droit constant. Il ne s’agit pas de transformer les lois ni de les interpréter, mais de réunir tous les textes législatifs qui régissent toute la fonction publique dans un même code. Ainsi, tous les principes, tous les droits et devoirs des agents, toutes les dispositions législatives qui régissent le dialogue social, toutes les spécificités de l’ensemble des agents publics, fonctionnaires comme contractuels sont rassemblés dans un même corpus juridique. Pour l’heure, le projet de code ne comporte pas de partie réglementaire. « Au plus tard à la fin du premier semestre 2023 » promet la Direction générale de l’Administration et de la Fonction publique (DGAFP). Pour rappel, la loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019 fixe au 7 décembre 2021 la date butoir pour adopter l’ordonnance de codification de la partie législative. On chuchote même qu’elle serait présentée en conseil des ministres le 24 novembre afin de tenir les délais. Le serpent de mer sortiraitil enfin la tête de l’eau ?
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En bref
Actualités
Agents publics
Décentralisation
Administrateurs territoriaux Les administrateurs territoriaux vont, comme en 2017, constituer une plateforme de propositions pour les candidats à l’élection présidentielle. Réunis à l’occasion du 31e congrès de l’AATF, ils ont profité de la venue des ministres Amélie de Montchalin (Fonction publique) et Élisabeth Moreno (Égalité femmeshommes) pour commencer à distiller leurs réflexions. Différents dossiers, portés de longue date par l’association, ont pu être abordés, à commencer par les mobilités et l’attractivité de leur cadre d’emplois. Sécurité
Amendes forfaitaires délictuelles Le troisième comité de suivi de la mise en œuvre des 3,3 milliards d’euros promis aux banlieues en janvier et organisé le 1er octobre à Rennes a surtout donné l’occasion au Premier ministre de défendre la politique de sécurité du gouvernement. Au menu : le développement des amendes forfaitaires délictuelles et les contrats de sécurité intégrée. S’agissant de l’éducation ou du renouvellement urbain, les maires de banlieue, qui se disent plutôt satisfaits, demandent que la logique de « coconstruction » de la politique de la ville soit poussée encore plus loin. Économie
Ubérisation Après trois mois de travail, la mission d’information du Sénat sur l’ubérisation de la société a remis son rapport ce 30 septembre. Elle appelle à un meilleur encadrement de ce secteur via dix-huit propositions dont certaines pourraient aider les acteurs locaux à agir. L’une d’elles est de pousser les plateformes à rendre transparents leurs algorithmes. Aménagement du territoire
Ruralité Le troisième comité interministériel aux ruralités du quinquennat, présidé par Jean Castex, s’est tenu le 24 septembre à Joigny (Yonne), juste avant l’ouverture du 50e congrès de l’Association des maires ruraux de France. L’occasion de dresser un bilan des 181 mesures de l’agenda rural. Le Premier ministre a par ailleurs annoncé l’augmentation des volontaires territoriaux en administration en 2022.
Des juristes tentent de définir la collectivité territoriale Peut-on encore définir la collectivité territoriale ? C’était le sujet d’un colloque organisé les 16 et 17 septembre par l’Association française du droit des collectivités locales et l’Institut de recherche Carré de Malberg à Strasbourg, sous la direction scientifique d’Arnaud Duranthon, maître de conférences à l’université de Strasbourg. Pour Mathieu Doat, professeur à l’université de Perpignan, « cette question est essentielle pour l’avenir de la décentralisation, car cette institution est une clé de la manière dont l’État organise son pouvoir sur son territoire. Plus largement, la collectivité sert de pivot à notre vie économique, sociale, et culturelle ». Et de rappeler que la notion de collectivité territoriale sera différente pour le juriste, le juge, l’élu local ou le fonctionnaire territorial. Pour autant, cette notion est difficile à se définir du fait de l’absence dans les thématiques qui leur ont été confiées, des spécificités qui seraient propres aux collectivités. Maylis Douence, maître de conférences à l’université de Pau et des pays de l’Adour, relève par exemple « la faible spécificité du service public local par rapport au service public national ». Il y a bien une différence dans la nature des activités, puisque l’État a la charge des activités régaliennes, tan-
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Léna Jabre
Sécurité civile
Le Sénat vote la généralisation des plans communaux de sauvegarde Après deux jours de débat, la proposition de loi Matras, visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels, a été adoptée le 23 septembre par le Sénat. L’article 6 de la proposition de loi Matras, dans sa version votée par le Sénat, prévoit d’étendre l’obligation de réalisation d’un plan communal de sauvegarde (PCS) à d’autres risques naturels « dont l’intensité ou la soudaineté le rendent nécessaire ». Cette mesure découle de l’amendement 133 déposé par le gouvernement. « Seules les communes dotées d’un plan de prévention des risques naturels (PPRN) ou comprises dans le champ d’application d’un plan particulier d’intervention (risque technologique) ont l’obligation de réaliser un plan communal de sauvegarde – dispositifs qui ont fait leurs preuves. Or, les départements des Landes, les arrières pays varois ou maralpin ne sont pas dotés de PPRN ; en cas d’incendie de forêt, disposer d’un PCS serait précieux pour mettre en place rapidement des mesures de sauvegarde et de protection », a souligné Marlène Schiappa. Un article additionnel à l’article 6 envisage d’améliorer l’information des populations en étendant l’obligation de communiquer à toutes les communes concernées par un risque majeur. Isabelle Verbaere
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dis que celles des collectivités répondent à des besoins de la vie quotidienne (déchets, eau, transports, etc.). Mais « le critère de la nature de l’activité n’est pas très pertinent, puisque l’État a eu tendance à reprendre certains de ces services publics ». Arnaud Duranthon constate pour sa part une érosion manifeste du rôle du local dans la police administrative, avec l’essor des pouvoirs de police spéciale qui paralyse celui du maire. Pour Étienne Muller, professeur à l’université de Strasbourg, « le droit de la commande publique des collectivités territoriales n’a pas de spécificités suffisamment significatives pour reconstruire la définition des collectivités ». Mais en se basant sur les données du recensement annuel de l’Observatoire économique de la commande publique, il souligne quelques spécificités qui apparaissent tout de même, notamment le fait que les collectivités sont les acheteurs qui insèrent le plus fréquemment des clauses sociales dans leurs marchés. « Sans extrapoler, ces données semblent suggérer que les collectivités pourraient être plus sensibles que l’État à l’impact socio- économique de leur commande publique dans leur territoire ».
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En bref Langues régionales
Future circulaire
Justice
L’avertissement pénal probatoire remplace le rappel à la loi Souvent présenté comme la première réponse pénale à un acte de délinquance de faible intensité, le rappel à la loi, jugé inefficace, va disparaître du code de procédure pénale. Sa suppression a d’ores et déjà été entérinée par l’Assemblée nationale, lors de l’adoption en première lecture, le 25 mai 2021, du projet de loi pour la confiance dans l’institution judiciaire. Pour remplacer cette sanction, le Sénat a créé « l’avertissement pénal probatoire », lors de l’examen de ce texte adopté en première lecture, le 29 septembre. Cette nouvelle mesure alternative aux poursuites entrera progressivement en vigueur d’ici le 1er janvier 2023. 272 000 rappels à la loi avaient été prononcés en 2019, selon le ministère de la Justice, dont les deux tiers par des officiers de police judiciaire (OPJ) de la police et de la gendarmerie nationales, qui avaient manifesté le souhait d’être déchargés de la mise en œuvre de cette disposition. Désormais, le texte prévoit que seuls les procureurs de la République ou leurs délégués pourront prononcer cette mesure contre l’auteur de l’infraction, à la double condition que ce dernier ne devra pas avoir déjà été condamné et qu’il devra avoir reconnu sa culpabilité pour les faits commis. En outre, l’avertissement pénal probatoire ne pourra intervenir en cas de délits de violences ou de délits commis contre une personne investie d’un mandat électif ou dépositaire de l’autorité publique. D’ici janvier 2023 et son entrée en vigueur, les rappels à la loi ne seront plus prononcés en cas de délits commis contre les élus et les personnes dépositaires de l’autorité publique, ont prévu les sénateurs. De plus, à compter du 1er juin 2022, les rappels à la loi ne seront plus possibles en cas de délits de violences. Enfin, le texte prévoit que la commission d’une nouvelle infraction dans une période probatoire de trois ans entraînera une révision de la décision de recourir à l’avertissement pénal. Lucien Moti
Démocratie locale
Changement de règles pour les organes délibérants Le 13 septembre, la Direction générale des collectivités locales (DGCL) a mis à jour sa Foire aux questions (FAQ) intitulée « Continuité institutionnelle et dispositions dérogatoires pour les collectivités territoriales pendant l’état d’urgence sanitaire ». Cette FAQ est essentiellement consacrée aux modalités de réunion des organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs groupements. Depuis le 1er octobre, les règles dérogatoires issues de l’état d’urgence sanitaire ont cessé de s’appliquer. Les règles suivantes ne sont plus applicables : possibilité de réunion de l’organe délibérant en tout lieu ; possibilité de réunion de l’organe délibérant sans public ou avec un nombre limité de personnes présentes ; possibilité de réunion par téléconférence ; fixation du quorum au tiers des membres présents ; possibilité pour un membre de disposer de deux pouvoirs. La DGCL rappelle les règles de droit commun que les collectivités devront de nouveau appliquer. Les conseils municipaux auront beaucoup moins de liberté quant au choix du lieu de réunion. Le conseil municipal se réunit et délibère à la mairie de la commune.
Il peut se réunir et délibérer, mais à titre définitif, dans un autre lieu situé sur le territoire de la commune, si ce lieu ne contrevient pas au principe de neutralité, qu’il offre les conditions d’accessibilité et de sécurité nécessaires et qu’il permet d’assurer la publicité des séances. De même, l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunal (EPCI) se réunit à son siège ou dans un lieu choisi par l’organe délibérant dans l’une des communes membres. Cela s’applique aussi aux syndicats mixtes fermés. Pour les syndicats mixtes ouverts, les statuts prévoient le lieu de réunion. Les conseils départementaux et régionaux se réunissent à l’initiative de leur président, au moins une fois par trimestre, dans un lieu du département ou de la région choisi par la commission permanente. Depuis le 1er octobre, seuls les conseils communautaires des EPCI à fiscalité propre pourront tenir des réunions par téléconférence. Les modalités à respecter sont précisées aux articles R.5211-2 et suivants du code général des collectivités territoriales.
Jean Castex a rencontré élus locaux et représentants des écoles en langues régionales, le 15 septembre. Il a décidé de les associer à la rédaction de la future circulaire, censée les légitimer, après la remise en cause de la méthode immersive, par une décision du Conseil constitutionnel. La concertation devrait avoir lieu au sein du conseil supérieur des langues, annoncé à la rentrée par le ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer. Mobilité
Ouverture à la concurrence La victoire de Transdev pour exploiter une ligne TER en région Paca et le développement d’une concurrence internationale sur les trains à grande vitesse occulte une autre conséquence de la libéralisation du rail : la réouverture de lignes secondaires abandonnées par la SNCF. Une vingtaine de projets sont sur la table, créant des liaisons entre villes grandes ou moyennes (ToulouseBrest, Annecy-Marseille, etc.). Elles sont portées par des petits opérateurs mais aussi par la SNCF. Restauration scolaire
Impayés de cantine Que faire quand une famille ne paie pas ses factures de cantine depuis deux ans ? La maire de Saint-Médard-de-Guizières (Gironde) a jugé que la méthode « la plus soft » était de faire raccompagner l’élève par le policier municipal, « que l’enfant connaît » plutôt que par des professionnels sociaux. La Défenseure des droits, Claire Hedon, s’est saisie d’office de l’enquête. Dans son rapport de 2019, l’institution avait appelé à laisser les enfants en dehors de la gestion de ce type de conflits. Urbanisme
Permis de construire « La croissance empêchée », c’est ainsi que la Fédération des promoteurs immobiliers résume la conjoncture de la construction neuve de logements pour le second semestre de cette année. Sous-entendu, elle est empêchée notamment par les élus locaux qui, dans un certain nombre de territoires, refuseraient d’accorder des permis de construire. Selon les chiffres de son observatoire, les ventes de logements neufs rebondissent au deuxième trimestre 2021 par rapport au deuxième trimestre 2020, mais leur niveau était particulièrement bas. « Il faut que les maires reprennent les stylos et signent les permis de construire ! », a indiqué Pascal Boulanger, le président de la fédération.
Léna Jabre
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Veille Sélection des
textes officiels Salaires
Alignement de l’indice minimum sur le Smic
Élections
Représentants des régions et départements au CSFPT
L’indice minimum de traitement des agents des trois versants de la fonction publique est relevé à hauteur du Smic. Depuis le 1er octobre, le minimum de traitement est passé à l’indice majoré 340, correspondant à l’indice brut 367. Cela correspond à 1 593,25 euros bruts mensuels et représente une augmentation de 10 %.
Le vote pour le renouvellement des représentants des régions et des représentants des départements au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) interviendra au plus tard le lundi 20 décembre. Les listes de candidats sont établies par les soins des candidats têtes de liste. Les listes de candidats sont adressées, sous pli recommandé avec accusé de réception, ou déposées par le candidat tête de liste ou son mandataire dûment désigné à la Direction générale des collectivités locales (DGCL) le 8 novembre au plus tard. Le dépôt donne lieu à un récépissé. Ensuite, les listes de candidats sont adressées aux préfectures par la DGCL au plus tard le mercredi 17 novembre. Les listes de candidats font l’objet d’une publicité par voie d’affichage dans les préfectures et sous-préfectures le mardi 23 novembre au plus tard. Les bulletins de vote sont fournis et imprimés par les candidats. Ils peuvent parvenir à la DGCL jusqu’au lundi 8 novembre 2021. Les candidats têtes de liste peuvent aussi, dans le même délai, faire parvenir des exemplaires d’un feuillet de propagande. Les bulletins de vote doivent ensuite parvenir au président de la Commission nationale de recensement et de dépouillement des votes le lundi 20 décembre au plus tard. Le recensement et le dépouillement des bulletins de vote aura lieu le mardi 21 décembre 2021, et seront effectués par une commission nationale. Celle-ci proclame les résultats dès l’achèvement des opérations de dépouillement des bulletins de vote.
Décret n° 2021-1270 du 29 septembre 2021, JO du 30 septembre.
Aide aux victimes
Gouvernance sur les violences conjugales Le gouvernement souhaite le renforcement de la gouvernance locale et la déclinaison opérationnelle des 53 mesures de la feuille de route du Grenelle de la lutte contre les violences conjugales. Les préfets doivent désigner une instance départementale de gouvernance unique. Circulaire NOR JUSD2126952C du 7 septembre, publiée au Bulletin officiel du ministère de la Justice du 16 septembre.
Arrêté NOR : TERB2128192A du 28 septembre 2021, JO du 5 octobre.
Finances
Le montant définitif, attribué aux autorités organisatrices de la mobilité, de la compensation pour l’exercice 2020 s’élève à 48 020 650 euros. Il s’agit d’un prélèvement sur recettes de l’État destiné à compenser les pertes de recettes résultant de la réduction du champ des employeurs assujettis au versement transport. Arrêté NOR : ECOS2118340A du 17 septembre 2021, JO du 26 septembre.
Crise sanitaire
Une aide pour le spectacle vivant Une aide est instituée pour le paiement de toutes ou d’une partie des cotisations et contributions dues au guichet unique pour le spectacle vivant. Les collectivités territoriales de moins de 3 500 habitants font partie des bénéficiaires possibles. Cette aide est mise en place lorsque les cotisations et contributions sont dues au titre des déclarations uniques simplifiées portant sur des contrats de travail dont l’exécution a débuté au plus tôt le 1er juillet 2021 et s’achève au plus tard le 31 décembre 2021. Décret n° 2021-1178 du 13 septembre 2021, JO du 14 septembre.
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Petite enfance
Modes d’accueil : suite de la réforme Avec la parution de deux décrets au Journal officiel du 31 août, la réforme des services aux familles, qui concerne particulièrement les établissements d’accueil du jeune enfant, se poursuit. Le premier décret simplifie la réglementation relative aux établissements d’accueil du jeune enfant. Il précise les conditions dans lesquelles les assistants maternels agréés autorisent la publication de leur identité, coordonnées et disponibilités pour accueillir des enfants, nécessaires à la connaissance par les familles de leur localisation et à leur mise en relation. Le second complète les mentions figurant sur la décision d’agrément des assistants maternels agréés et le contenu du dossier de première demande de renouvellement d’agrément. Les assistants maternels agréés doivent s’inscrire sur le site internet de la Caisse nationale des allocations familiales. Ils doivent aussi y inscrire leurs disponibilités d’accueil. Le décret modifie également le régime applicable aux demandes d’autorisation et d’avis auxquelles sont soumis les établissements accueillant des enfants de moins de 6 ans. Il est notamment indiqué que, dès réception de la demande d’autorisation, le président du conseil départemental sollicite l’avis du maire de la commune d’implantation ou bien (c’est un ajout) du président de l’établissement public de coopération intercommunale dont est membre la commune d’implantation, en lui adressant une copie de la demande d’autorisation. Décrets nos 2021-1131 et 1132 du 30 août 2021, JO du 31 août
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Montants pour les autorités organisatrices de la mobilité
Textes officiels www.territorial.fr/2772-juridique.htm
Service national universel
Assainissement
Compostage des boues d’épuration
Les congés des agents encadrant les jeunes volontaires
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Une ordonnance du 8 septembre présente les conditions dans lesquelles un agent public peut bénéficier de jours de congé pour encadrer un jeune volontaire du service national universel (SNU) durant sa période d’engagement. Le gouvernement souhaite généraliser le SNU lancé en juin 2019 dans treize départements préfigurateurs. Mais la crise sanitaire a bouleversé cette réforme, en entraînant l’annulation du séjour de cohésion de 2020. Ce dispositif relève des accueils collectifs de mineurs avec hébergement ; dans ce cadre, les personnels encadrants ont été recrutés avec un contrat d’engagement éducatif, un contrat de droit privé, qui, pour le gouvernement, en fait un outil peu adapté. Ainsi, les fonctionnaires territoriaux ont droit à un congé avec traitement pour accomplir une période d’activité afin d’exercer des fonctions de préparation et d’encadrement des séjours de cohésion du SNU. Ce congé est accordé, sous réserve des nécessités de service, pour une durée inférieure ou égale à soixante jours sur une période de douze mois consécutifs. L’ordonnance pose également une condition d’honorabilité à remplir par chaque encadrant.
Un décret détermine les conditions dans lesquelles les boues d’épuration et leurs digestats peuvent être traités par compostage, conjointement avec d’autres matières utilisées comme structurants et issues de matières végétales. À compter du 1er janvier 2022, la masse de déchets verts utilisés comme structurants n’excèdera pas 100 % de la masse de boues d’épuration et de digestats utilisés dans le mélange. Décret n° 2021-1179 du 14 septembre 2021, JO du 15 septembre.
Jeunesse
Création du « Pass’Sport » Une aide forfaitaire, « Pass’Sport », est créée pour inciter certains jeunes de 6 à 17 ans à adhérer à une association sportive et aider financièrement le mouvement sportif amateur. Il s’agit d’un remboursement par l’État de la réduction de 50 euros pratiquée par les structures et associations sportives sur le tarif de l’adhésion ou de la prise de la licence jusqu’au 30 novembre 2021. Décret n° 2021-1171 du 10 septembre 2021, JO du 11 septembre.
Propreté
Dépôt des déchets des navires Une ordonnance du 8 septembre a pour objet la lutte contre le rejet illégal des déchets en mer en incitant les navires à déposer leurs déchets lors de leurs escales portuaires. Cela implique que les ports doivent assurer la disponibilité d’installations de réception des déchets. Les autorités portuaires doivent élaborer un plan de réception et de traitement des déchets des navires en consultant les parties concernées.
Ordonnance n° 2021-1159 du 8 septembre 2021, JO du 9 septembre.
Commande publique
Correction des cahiers des clauses administratives générales Quelques corrections ont été apportées aux nouveaux cahiers des clauses administratives générales (CCAG) des marchés publics. Il s’agit essentiellement, mais pas uniquement, de coquilles dans les références aux articles, et de réorganisations des dispositions pour plus de cohérence. Notamment, dans le CCAG des marchés publics de travaux, le second alinéa de l’article 3.8.1 est remplacé pour rajouter des précisions : les ordres de service émis par le maître d’œuvre entraînant une modification du marché en termes de délai d’exécution, de durée ou de montant font l’objet d’une validation préalable par le maître d’ouvrage. La justification de la validation est jointe à l’ordre de service notifié par le maître d’œuvre. À défaut, le titulaire n’est pas tenu de l’exécuter. Dans le CCAG de maîtrise d’œuvre, les dispositions relatives à la notification du projet de décompte final au maître d’ouvrage. Les dispositions de cet arrêté sont applicables aux marchés pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel à la concurrence est envoyé à la publication à compter du 8 octobre.
Ordonnance n° 2021-1165 et décret n° 2021-1166 du 8 septembre 2021, JO du 9 septembre.
Arrêté NOR : ECOM2127614A du 30 septembre 2021, JO du 7 octobre.
Arrêté NOR : TREP2121246A du 23 septembre 2021, JO du 6 octobre.
Risques
Travaux éligibles au fonds Barnier Un arrêté du 23 septembre donne la nouvelle liste des types de travaux éligibles au fonds de prévention des risques naturels majeurs, dans le cadre d’un programme d’action de prévention des inondations. Ces travaux doivent participer à la sécurité des personnes ou permettent de réduire les dommages ou de faciliter le retour à la normale.
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Veille Sélection de la
jurisprudence Santé
Maladie imputable au service
Contentieux
Une décision illégale n’ouvre pas toujours droit à une indemnisation
Une maladie contractée par un agent peut être regardée comme imputable au service sans qu’il soit nécessaire d’établir l’existence d’un incident survenu dans le cadre du service. Dans cette affaire, un climat conflictuel régnait au sein d’une école. Même si l’intéressée ne présentait aucun antécédent psychiatrique, ses conditions de travail ont provoqué sa dépression.
Le juge rappelle sous quelle condition des requérants peuvent demander à être indemnisés de l’illégalité d’une décision administrative. Ils avaient obtenu un permis de construire pour aménager six logements dans un bâtiment existant, mais le maire leur a refusé le permis de construire modificatif sollicité et leur a ordonné de cesser immédiatement les travaux. Finalement, il a enjoint à la société concessionnaire du réseau de distribution d’électricité de cesser tout raccordement électrique de leur immeuble. Cette dernière décision a été annulée par le juge, et les requérants demandent la réparation du préjudice qu’ils estiment avoir subi. En principe, toute illégalité commise par l’administration constitue une faute qui engage sa responsabilité, s’il en résulte un préjudice direct et certain. Mais une décision illégale n’ouvre pas droit à réparation si les dommages ne trouvent pas leur cause dans cette illégalité, mais découlent exclusivement de la situation irrégulière dans laquelle la victime s’est elle-même placée, indépendamment des faits commis par la puissance publique, et à laquelle l’administration aurait pu légalement mettre fin à tout moment ou si une décision d’effet équivalent aurait dû légalement être prise. Ici, le juge relève que les requérants demandent l’indemnisation pour les pertes de loyers de logements qu’ils ont créées en violation du permis de construire. Leur demande est donc rejetée.
CAA de Marseille, 1er avril 2021, req. n° 19MA04324.
Arrêté de péril
Travaux prescrits et exécutés d’office En présence d’un péril grave et imminent concernant un immeuble, un maire a fait exécuter d’office, et mis à la charge du requérant, des travaux qui ne correspondent pas, même en partie, aux travaux prescrits dans le rapport d’expertise, ni à ceux que l’arrêté municipal avait mis en demeure le requérant d’entreprendre. La commune ne pouvait donc pas demander le remboursement des frais engagés.
CAA de Nancy, 23 février 2021, req. n° 19NC01170.
CAA de Marseille, 15 février 2021, req. n° 19MA00827.
Marché à prix forfaitaire Le titulaire d’un marché à prix forfaitaire a droit au paiement des travaux supplémentaires qui, même réalisés sans ordre de service du maître d’ouvrage, ont été indispensables à la réalisation de l’ouvrage selon les règles de l’art, sans qu’il soit besoin de rechercher si ces travaux supplémentaires ont bouleversé l’économie du contrat.
Urbanisme
La régularisation d’une construction réalisée sans permis
Une commune peut instituer une taxe annuelle sur les friches commerciales situées sur son territoire. Un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ayant une compétence d’aménagement des zones d’activités commerciales le peut également en lieu et place de la commune. L’existence d’une communauté d’agglomération exerçant cette compétence, mais ne l’ayant pas instaurée, ne prive pas la commune de la possibilité de l’instituer.
Lorsqu’une construction a fait l’objet de transformations sans les autorisations d’urbanisme requises, le juge rappelle que le propriétaire envisageant d’y faire de nouveaux travaux doit déposer une déclaration ou présenter une demande de permis portant sur l’ensemble des éléments de la construction qui ont eu ou auront pour effet de modifier le bâtiment tel qu’il avait été initialement approuvé ou de changer sa destination. L’autorité administrative doit, quant à elle, tenir compte de l’application des dispositions de l’article L.421-9 du code de l’urbanisme. Cet article prévoit la régularisation des travaux réalisés depuis plus de dix ans à l’occasion de la construction primitive ou des modifications apportées à celle-ci. Mais, pour cela, il faut que les travaux n’aient pas été réalisés sans permis de construire en méconnaissance des prescriptions légales alors applicables. Mais si l’ensemble des éléments de la construction existante ne peuvent être autorisés au regard des règles d’urbanisme en vigueur à la date de sa décision, l’autorité administrative peut autoriser, parmi les travaux demandés, ceux nécessaires à la préservation de la construction et au respect des normes.
CAA de Bordeaux, 8 février 2021, req. n° 18BX03715.
CAA de Marseille, 21 janvier 2021, req. n° 19MA01187.
CAA de Marseille, 8 février 2021, req. n° 17MA04536.
Fiscalité
Taxe annuelle sur les friches commerciales
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N° 240 • Octobre 2021
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Commande publique
Jurisprudence www.territorial.fr/2772-juridique.htm
Démocratie locale
Finances
Plusieurs délibérations mais un seul vote
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Recouvrement d’une créance et signature du bordereau Une commune a émis des titres exécutoires à l’encontre d’une société avec laquelle elle avait conclu un marché. Celle-ci en demande l’annulation. Le juge rappelle que l’autorité administrative doit justifier, en cas de contestation, que le bordereau de titres de recettes comporte la signature de son auteur. Lorsque le bordereau est signé non par l’ordonnateur lui-même, mais par une personne ayant reçu de sa part une délégation de compétence ou de signature, ce sont, dès lors, les nom, prénom et qualité de cette personne qui doivent être mentionnés sur le titre de recettes individuel ou l’extrait du titre de recettes collectif. Ici, la commune a produit les bordereaux des titres de recette signés pour l’adjoint au maire compétent par la directrice générale des services, dont les nom, prénom et qualité sont mentionnés sur ces bordereaux. Par ailleurs, la société se borne à invoquer « l’absence de signature », alors que celle-ci figure sur les bordereaux. De plus, le troisième alinéa du 4° de l’article L.1617-5 du code général des collectivités territoriales prévoit que seul le bordereau doit être effectivement signé. Le vice de forme tiré du défaut de signature des titres doit être écarté. CAA de Nantes, 5 février 2021, req. n° 20NT00139.
Un conseil municipal doit, en principe, se prononcer par un vote formel ou donner son assentiment sur chaque projet de délibération. Toutefois, des délibérations ayant un objet commun, si aucun conseiller municipal ne demande que le conseil municipal se prononce séparément sur chaque projet de délibération, peuvent être régulièrement adoptées au terme d’un vote unique du conseil municipal. Conseil d’État, 5 juillet 2021, req. n° 433537.
Statut
Décharge de services par le centre de gestion Les centres de gestion (CDG) calculent le contingent des décharges d’activité de service accordées aux responsables des organisations syndicales représentatives pour les seules collectivités et établissements obligatoirement affiliés, et non pour ceux affiliés à titre volontaire aux CDG. CAA de Nancy, 16 mars 2021, req. n° 19NC01092.
Contentieux
Pas de délai pour abroger un arrêté du maire En raison de la permanence de l’acte réglementaire, la légalité des règles qu’un arrêté fixe, la compétence de son auteur et l’existence d’un détournement de pouvoir doivent pouvoir être mises en cause à tout moment. Ainsi, peuvent toujours être sanctionnées les atteintes illégales qu’un arrêté municipal est susceptible de porter à l’ordre juridique.
Organisation territoriale
Changement d’intercommunalité sous conditions Dans cette affaire, une commune cherche à quitter une communauté de communes pour en intégrer une autre. Mais certaines conditions doivent être remplies. L’article L.5214-26 du code général des collectivités territoriales dispose que, par dérogation à l’article L.5211-19, une commune peut être autorisée, par le représentant de l’État dans le département après avis de la commission départementale de la coopération intercommunale, à se retirer d’une communauté de communes pour adhérer à un autre établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP) dont le conseil communautaire a accepté la demande d’adhésion. Le juge souligne que cette possibilité n’est admise que si la commune a obtenu l’accord du conseil communautaire de l’EPCI-FP qu’elle souhaite rejoindre. De plus, l’article L.5214-1 du même code dispose que le territoire d’une communauté de communes est d’un seul tenant et sans enclave. Sauf exception prévue par la loi, cette disposition doit être regardée comme ayant une portée générale. Cela doit être respecté non seulement lors de la création d’un tel EPCI, mais aussi lors d’évolutions ultérieures du territoire de cet établissement. Cela signifie que si une commune veut se retirer d’une communauté de communes pour adhérer à un autre EPCI, la règle de continuité territoriale doit être respectée. Dans cette affaire, aucune de ces deux conditions n’était remplie. La requête de la commune est rejetée.
CAA de Nancy, 26 janvier 2021, req. n° 19NC02499.
Modes de gestion
Renoncer à une délégation de service public Une collectivité qui a engagé une procédure de passation en vue de l’attribution d’une délégation de service public peut décider, sous le contrôle du juge, de renoncer à conclure le contrat pour un motif d’intérêt général. Aucun principe ni aucune disposition ne faisaient obligation au conseil municipal de motiver une telle délibération déclarant sans suite la procédure de DSP relative à la gestion de sa salle municipale. CAA de Versailles, 21 janvier 2021, req. n° 18VE01958.
CAA de Douai, 16 février 2021, req. n° 19DA01211.
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Veille Sélection des
réponses ministérielles
Relance
Soutien aux associations culturelles
Risques
La crise sanitaire sera-t-elle l’occasion d’améliorer les outils d’anticipation à la disposition des collectivités locales ?
Les directions régionales des affaires culturelles consacrent une part significative de leurs crédits en faveur des territoires ruraux : en 2020, elles ont apporté 21,8 millions d’euros aux actions culturelles en milieu rural. S’agissant du soutien aux associations locales, il relève de la compétence des collectivités et de la direction de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative, notamment à travers le fonds pour le développement de la vie associative.
Les plans communaux et intercommunaux de sauvegarde (PCS/PICS) sont les premiers outils d’anticipation à disposition des collectivités dans le cadre de leur stratégie de maîtrise des risques. Maillons locaux de l’organisation de la sécurité civile, ils apportent régulièrement la preuve d’une meilleure réactivité des autorités et des populations dans les communes ayant procédé à leur mise en œuvre. Si l’élaboration d’un PCS est obligatoire uniquement dans les communes concernées par un plan de prévention des risques naturels ou par un plan particulier d’intervention, elle ne doit pas se limiter à ces seuls risques. Sur le sujet particulier du retour d’expérience de la crise sanitaire que le pays endure depuis début 2020, la gestion d’une pandémie grippale est un volet intégré à certains PCS, dont la mise à disposition et la distribution d’équipements de protection individuelle font nécessairement partie. Cette démarche est très encouragée. Les plans de continuité d’activité et les PCS participent aussi à une même approche en termes de préparation et de réponse à la crise. Cependant, l’existence de ces documents de planification ne saurait remplacer la nécessité d’entraînements et d’exercices réguliers, ainsi que le travail de mise à jour des documents opérationnels.
Question écrite de Séverine Gipson, n° 34633, JO de l’Assemblée nationale du 27 avril.
Finances locales
Dotation globale de fonctionnement Le conseil communautaire peut proposer aux communes membres une répartition dérogatoire d’une partie de la dotation globale de fonctionnement communale, en fonction de critères de ressources et de charges définis localement. Cette répartition, qui est soumise à des conditions de majorité renforcées, est facultative et n’est en rien attentatoire à la liberté ou à l’autonomie des communes, quelle que soit leur taille ou leur population. En effet, la mise en place de ces dispositions est soumise à l’ensemble des conseils municipaux de l’intercommunalité. Question écrite de Cathy Apourceau-Poly, n° 23846, JO du Sénat du 5 août.
Budget communal
Accès aux annexes explicatives Le code général des collectivités territoriales permet l’accès aux informations financières et budgétaires pour l’ensemble des collectivités, y compris les communes de moins de 3 500 habitants. L’article L.2313-1 dispose que, pour toutes les communes, les documents budgétaires sont assortis d’états portant sur la situation patrimoniale et financière de la collectivité ainsi que sur les différents engagements. De plus, l’article L.2121-26 prévoit le droit pour toute personne physique ou morale de demander communication des procès-verbaux, budgets, comptes et arrêtés municipaux. Question écrite de Monique Limon, n° 22238, JO de l’Assemblée nationale du 20 avril.
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Question écrite de Michèle Tabarot, n° 34357, JO de l’Assemblée nationale du 6 avril.
Déconcentration
Quel bilan peut-on tirer un an après la généralisation du droit de dérogation des préfets ? À la date du 25 mai 2021, la généralisation du droit de dérogation reconnu au préfet par le décret du 8 avril 2020 a donné lieu à la prise de 88 arrêtés préfectoraux. Sur ces 88 arrêtés, 62 ont été pris par des préfets de département, 6 par des préfets d’outre-mer et 20 par des préfets de région. La très grande majorité des arrêtés de dérogation concerne les subventions, concours financiers et dispositifs de soutien en faveur des acteurs économiques, des associations et des collectivités territoriales, puis l’emploi et l’activité économique, l’environnement, l’agriculture et les forêts et la construction, le logement et l’urbanisme. La prévalence des arrêtés de dérogation concernant les questions de subventions et de dotations s’explique par le fait que c’est l’un des domaines où le pouvoir réglementaire est le moins encadré par le pouvoir législatif. Il est donc plus aisé de déroger aux normes réglementaires. S’agissant des bénéficiaires, 51 sont des communes (soit plus de 58 %). La procédure prévue dans la circulaire du Premier ministre du 6 août 2020 relative à la dévolution au préfet d’un droit de dérogation aux normes réglementaires est globalement bien respectée. Enfin, le champ des matières concernées fixées par le décret n’a pas vocation à s’élargir à court terme. Question écrite d’Hervé Maurey, n° 23854, JO du Sénat du 22 juillet.
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Éducation
Ressources humaines
Missions relatives à la propreté de l’enfant
Dans le cadre de la mise en place des lignes directrices de gestion, les collectivités peuvent-elles créer des commissions internes ad hoc ? Les commissions administratives paritaires (CAP) ne sont plus consultées sur les décisions relatives à l’avancement de grade et à la promotion interne, depuis le 1er janvier 2021. Les représentants du personnel interviennent dans la définition de la politique de ressources humaines à travers la consultation des comités sociaux territoriaux sur les projets de lignes directrices de gestion (LDG). Ces LDG fixent, entre autres, les critères généraux à prendre en compte pour les promotions au choix dans les grades et cadres d’emplois. Elles doivent ainsi être prises en compte par l’autorité territoriale ou le président du centre de gestion, pour l’élaboration des listes d’aptitude et des tableaux d’avancement. L’objectif poursuivi est la simplification des procédures de gestion des RH, notamment en concentrant les compétences des CAP sur les décisions individuelles défavorables. La création de commissions ad hoc, intervenant en substitution des CAP, en amont de l’établissement du tableau d’avancement de grade annuel ou de la liste d’aptitude, serait contraire à l’esprit de la loi. La compétence de l’autorité territoriale en matière d’avancement de grade et de promotion interne ne saurait être déléguée à une instance hors de tout cadre législatif ou réglementaire. Question écrite de Stéphane Sautarel, n° 22234, JO du Sénat du 10 juin.
Aménagement rural
Depuis la rentrée scolaire 2019, tout enfant de plus de 3 ans doit pouvoir être inscrit dans une école maternelle, sans exception. Aucune autre disposition législative ne conditionne l’accès à l’école à la maturité physiologique des enfants. La loi ne prévoit pas de modification du statut particulier du cadre d’emplois des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles. Ils sont chargés de l’assistance au personnel enseignant pour l’accueil et l’hygiène des enfants. Question écrite de Catherine Belrhiti, n° 23147, JO du Sénat du 22 juillet.
Pouvoirs de police
Législation relative aux épaves Les maires peuvent intervenir si un véhicule est abandonné sur le domaine public, et si un véhicule, également dégradé, est stocké dans une propriété privée, à condition qu’il présente un risque pour la santé publique ou d’atteinte grave à l’environnement. Ce droit ne peut être étendu aux cas où un véhicule semblant hors d’état de circuler présent sur un terrain privé ne serait qu’une source de simples nuisances. Question écrite d’Antoine Herth, n° 35576, JO de l’Assemblée nationale du 6 avril.
La règle d’éloignement de 100 mètres entre les bâtiments à usage agricole et les habitations est-elle obligatoire ?
Éthique
Subvention à une association Les conseillers municipaux doivent s’abstenir de participer à l’examen de l’affaire à laquelle ils sont intéressés. Le Conseil d’État précise que la participation du conseiller municipal intéressé, pour vicier la délibération, doit être de nature à exercer une influence décisive sur le résultat du vote. La participation au vote permettant l’adoption d’une délibération par une personne intéressée à l’affaire est à elle seule de nature à entraîner l’illégalité de cette délibération. Ainsi, un conseiller municipal, même simple adhérent à une association, peut être considéré comme intéressé à l’affaire s’il participe à une délibération allouant une subvention de la commune à ladite association. Il convient donc que les conseillers intéressés ne participent pas au vote.
L’article L.111-3 du code rural et de la pêche maritime pose le principe de règles d’éloignement par rapport aux constructions agricoles, pour la construction d’habitations devant être occupées par des tiers. Ces règles, appliquées lors de l’instruction des permis de construire, ont pour objectif de prévenir les conflits de voisinage, et les risques de remise en cause des activités agricoles, en raison de nuisances sonores, olfactives ou de prospect qui peuvent leur être imputées. Dans sa décision n° 380556 du 24 février 2016, le Conseil d’État confirme le principe de réciprocité, qui veut que les règles de distances imposées aux constructions agricoles par rapport aux habitations occupées par des tiers s’appliquent également pour l’implantation d’habitations projetées à proximité d’exploitations agricoles existantes. Il est à noter que l’article L.111-3 ne définit aucune distance d’éloignement devant être respectée, par principe, partout en France. Au contraire, il ouvre, à l’autorité qui délivre l’autorisation de construire, la possibilité de dispositions dérogatoires après avis de la chambre d’agriculture, pour tenir compte des spécificités locales, et rend possibles les accords entre les parties concernées. Question écrite de Marie Tamarelle-Verhaeghe, n° 37090, JO de l’Assemblée nationale du 4 mai.
Question écrite de Jean-Louis Masson, n° 23076, JO du Sénat du 10 juin.
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Dossier
Politique européenne des données : quelle place pour les collectivités ? Par Antoine Petel, doctorant à l’université Jean-Moulin Lyon 3
La politique européenne des données peut paraître éloignée des intérêts locaux. Pourtant, les collectivités territoriales sont directement ou indirectement impactées. La compréhension de l’action européenne est donc un préalable pour l’anticiper et s’y adapter, voire enrichir des initiatives locales.
L
e rapport de l’Institut Montaigne, « Villes, à vos données », publié en juillet 2021 apporte un nouvel éclairage sur l’exploitation des données au niveau local à travers l’exemple de onze villes françaises. D’un côté, il souligne le potentiel d’une politique locale des données pour répondre aux enjeux économiques, sociaux et écologiques. De l’autre, il met en lumière la difficulté des collectivités territoriales pour exploiter les données, principalement en raison d’un manque de ressources humaines, d’infrastructures techniques ou de budgets suffisants. Cette problématique se retrouve également au niveau européen et interroge désormais la capacité des collectivités territoriales à participer à l’économie européenne des données en cours de construction. Dans sa dernière stratégie sur les données publiée en 2020 (1), la Commission européenne entend faire de l’Union européenne le chef de file international de l’exploitation des données industrielles, c’est-à-dire les données à caractère personnel et non personnel détenues par l’industrie. Toute-
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fois, cette stratégie affecte l’ensemble des acteurs européens, indifféremment de leur taille ou de leur appartenance au secteur public ou privé. Concrètement, un marché unique des données est développé pour favoriser la circulation de tous les types de données, quelle que soit leur sensibilité, par exemple les données protégées par des droits de propriété intellectuelle. En outre, cette action se matérialise par la publication de nombreux textes, dont beaucoup sont des règlements européens qui, une fois adoptés, seront directement applicables aux acteurs français. Bien que cette action apparaisse éloignée des intérêts locaux, les collectivités territoriales sont directement ou indirectement impactées. Par exemple, dans la gestion des services publics de transport, la question des données est centrale pour développer des services multimodaux à l’échelle locale. La compréhension de l’action européenne est donc un préalable pour l’anticiper et s’y adapter, voire enrichir des initiatives comme le projet RUDI (2) porté par la métropole de Rennes (et soutenu financièrement
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par l’Union européenne). Il est possible de présenter la stratégie européenne sur les données selon une dimension horizontale et sectorielle.
Action horizontale européenne Refonte de la directive (UE) n° 2019/1024 sur les « données ouvertes et la réutilisation des informations du secteur public », dite « directive ISP » Bien qu’elle ne soit pas nouvelle, cette directive est incontournable dans la politique européenne des données. Ce texte fixe le régime européen du droit de la réutilisation des données du secteur public librement accessibles, c’est-à-dire les données dont l’accès est un droit pour tous, comme les « documents administratifs » (3) ou les « informations relatives à l’environnement » (4) librement communicables. L’évolution de cette directive depuis 2003 (5) met en lumière le constat suivant : d’une part, ce texte s’applique à un nombre
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croissant de données et de détenteurs publics ; et d’autre part, ce texte impose des contraintes croissantes aux détenteurs publics pour faciliter la réutilisation de leurs données. Concernant son champ d’application, la directive ISP a par exemple intégré successivement certaines données du secteur culturel (les données détenues par les bibliothèques, y compris celles universitaires, des musées et des archives), les données de recherche, ou encore les données détenues par certaines entreprises publiques. Par ailleurs, depuis 2019, la directive ISP prévoit six catégories de « données de forte valeur » (6), c’est-à-dire des données dotées d’une valeur particulièrement élevée pour l’économie et la société, dont la réutilisation est facilitée. Ce concept est similaire à celui des « données de référence » prévu par le droit français (7). Le contenu des catégories de « données de forte valeur » doit être précisé avec l’adoption à venir d’un règlement d’exécution européen. Concernant son régime, et contrairement à sa version initiale de 2003, la directive ISP garantit désormais un droit de la réutilisation s’imposant aux détenteurs publics. De même, un principe de tarification au coût marginal a été instauré, puis renforcé, pour les redevances de réutilisation. Il ressort donc de l’évolution de la directive ISP une dynamique d’extension de son
application et un renforcement des règles de la réutilisation qu’elle impose aux détenteurs publics. Toutefois, cette dynamique européenne est largement masquée par l’avance du droit français en la matière, et dont le cadre juridique sert, en partie, de modèle pour l’évolution de la directive ISP. Par exemple, telle que transposée en France, la directive ISP s’applique déjà depuis 2016 à l’ensemble des collectivités territoriales (les régions, les départements, les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale), à leurs établissements publics industriels et commerciaux, et aux différentes sociétés dans lesquelles une collectivité territoriale est susceptible d’exercer une influence dominante (société d’économie mixte locale, société publique locale, société publique locale d’aménagement). Un droit de la réutilisation est également garanti depuis 2005 par le droit français.
Négociation du « Data Governance Act » Le « Data Governance Act » est une proposition législative de règlement publié le 25 novembre 2020 (8) actuellement négocié au niveau européen, dont certaines de ses dispositions sont susceptibles d’impacter les collectivités territoriales. Premièrement, il prévoit d’harmoniser les conditions de réutilisation des données
« protégées » du secteur public, c’est-àdire les données dont l’accès n’est pas un droit pour tous, ce qui complète le champ d’application de la directive ISP. Le « Data Governance Act » s’applique aux données confidentielles (les « informations commerciales » et les « données statistiques »), aux données à caractère personnel et aux données protégées sur lesquelles des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle. Organiquement, seules les administrations sont concernées par ce texte, mais le Conseil de l’Union européenne souhaite permettre aux États membres d’étendre son application aux entreprises publiques ou privées chargées d’une mission de service public ou d’intérêt général. Concernant son régime, le « Data Governance Act » ne garantit aucun droit de la réutilisation des données « protégées » du secteur public. C’est seulement si le détenteur public souhaite permettre leur réutilisation qu’il doit se conformer aux conditions et modalités prévues. Parmi les nombreuses exigences imposées par le « Data Governance Act », le détenteur public doit garantir un « environnement de traitement sécurisé ». Cette exigence est particulièrement problématique pour les acteurs locaux, car elle implique des investissements préalables très importants pour acquérir les infrastructures techniques et les compétences humaines nécessaires. Or, c’est justement une des difficultés des collectivités territoriales dans la mise à disposition de leurs données. Un soutien étroit de l’État dans la mise en œuvre du « Data Governance Act » à l’échelle locale apparaît dès lors indispensable, tout en permettant de limiter les déséquilibres entre les différents territoires. Deuxièmement, le « Data Governance Act » propose un mécanisme de donation de données, appelé également « data altruism » (9), qui peut être relié avec le concept du « self data territorial ». Ce concept a été introduit par le groupe de réflexion Fondation internet nouvelle génération et se définit comme la production, l’exploitation et le partage de données personnelles par les individus, sous leur contrôle et pour leurs propres fins (10). Ces deux initiatives concourent donc à l’objectif commun d’exploiter les données personnelles des individus, avec leur accord, et pour des finalités d’intérêt général. Cela constitue pour les territoires une opportunité d’affiner les besoins de la population pour adapter et améliorer les services publics locaux, et ainsi mieux répondre aux enjeux économiques, sociaux, écologiques, tels que la mobilité ou la gestion de l’énergie. Dernièrement, le « Data Governance Act » fixe un cadre européen de gouvernance des …/…
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Dossier
…/… données reposant sur la distinction entre les activités de production, d’intermédiation, et d’exploitation des données. Au centre de cette gouvernance, l’intermédiaire de données – c’est-à-dire un prestataire de services – a pour fonction de faciliter la relation technique et juridique entre les détenteurs de données et leurs utilisateurs. Cela implique que ces intermédiaires présentent des garanties de neutralité et d’indépendance vis-à-vis des producteurs et des utilisateurs de données. Ces intermédiaires constituent dès lors un moyen intéressant pour permettre aux collectivités territoriales de s’insérer pleinement dans l’économie des données.
Publication à venir du « Data Act » Le « Data Act » est un texte annoncé par la stratégie européenne sur les données de 2020 dont la publication est attendue dans les prochains mois. Un des objectifs de ce texte est de faciliter l’exploitation des données du secteur privé par la puissance publique, et pour des finalités d’intérêt général ou de bien commun, telles que la gestion de situation d’urgence ou la lutte contre le réchauffement climatique. Cet objectif se rattache directement aux difficultés que rencontrent les collectivités territoriales pour exploiter les données du secteur privé, notamment en raison de l’absence d’un cadre juridique adapté et d’un manque de confiance des acteurs privés. Pourtant, l’exploitation des données du secteur privé est un levier d’amélioration des services publics qui est très recherché par les collectivités territoriales. La négociation de ce texte s’annonce difficile au regard des problématiques qu’il soulève, comme la définition des motifs publics pouvant justifier l’accès aux données du secteur privé, au niveau des vingtsept États membres. De même, la contrepartie à accorder aux entreprises en échange
de leurs données soulève des oppositions évidentes dans le contexte de tension des budgets publics. Par ailleurs, la question des garanties techniques et juridiques à assurer pour exploiter les données du secteur privé trouve une complexité particulière à l’échelon local. Par exemple, si l’exploitation des données des entreprises est conditionnée à leur anonymisation préalable, la problématique déjà évoquée du manque de ressources techniques, humaines et financières des collectivités territoriales émergera de nouveau.
Action sectorielle européenne La Commission européenne prévoit de mettre en place des espaces sectoriels de données dans neuf domaines stratégiques ou d’intérêt public : l’industrie, le pacte vert, la mobilité, la santé, la finance, l’énergie, l’agriculture, l’administration publique, et les compétences numériques. Ces espaces visent à faciliter le partage des données en adaptant le cadre technique et juridique applicable aux contraintes de chaque secteur. Chaque espace sectoriel européen de données implique la mise en place d’outils et de plateformes d’échange de données ; des règles particulières d’accès, de qualité et d’interopérabilité des données ; et le cas échéant, des cadres spécifiques de gouvernance. Un grand nombre d’initiatives sectorielles sont ainsi envisagées par la Commission européenne. Dans le domaine des marchés publics, une initiative dédiée et un cadre de gouvernance de ces données sont par exemple annoncés. Dans le domaine des transports, la Commission européenne évalue le besoin de réviser la directive (UE) n° 2010/40 relative aux systèmes de transports intelligents et ses règlements délégués (11) pour améliorer la disponibilité, la réutilisation et l’interopérabilité des don-
(1) Commission européenne, communication « Une stratégie européenne pour les données », 19 février 2020, COM (2020) 66 final. (2) Le projet Rudi vise à coconstruire un portail de partage et d’accès des données territoriales pour l’ensemble des acteurs locaux (citoyens, entreprises, associations, etc.). (3) Code des relations entre le public et l’administration, articles L.311-1 et suivants. (4) Code de l’environnement, articles L.124-1 et suivants. (5) Directive (CE) n° 2003/98 du Parlement européen et du Conseil du 17 novembre 2003 concernant la réutilisation des informations du secteur public ; directive (UE) n° 2013/37 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 modifiant la directive 2003/98/CE concernant la réutilisation des informations du secteur public. (6) Ces six catégories sont : « Géospatiales », « Observation de la terre et environnement », « Météorologiques », « Statistiques », « Entreprises et propriété d’entreprises » et « Mobilité ». (7) Code des relations entre le public et l’administration, articles L.321-4 et suivants. (8) Commission européenne, proposition de règlement « Acte sur la gouvernance européenne des données », 25 novembre 2020, COM (2020) 767 final.
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nées de transport. Dans le domaine environnemental, il est possible de souligner l’initiative « GreenData4All » qui consiste à évaluer et, éventuellement, réviser deux directives. D’une part, la directive (CE) n° 2007/2 « établissant une infrastructure d’information géographique dans l’UE » (12) qui prévoit l’échange entre les autorités publiques européennes des données et des services de données géographiques en rapport avec l’environnement développés dans l’exercice de leurs missions de service public. D’autre part, la directive (CE) n° 2003/4 « sur l’accès à l’information en matière d’environnement » qui garantit un droit d’accès du public aux données environnementales. L’enjeu de cette évaluation est d’identifier le besoin d’actualiser les directives aux nouvelles technologies ; d’améliorer la mise à disposition des données du secteur public pour soutenir les objectifs du pacte vert européen (13) ; et de promouvoir l’interopérabilité de ces données. Le mouvement enclenché par l’Union européenne impacte en profondeur les conditions et les modalités de gestion par les collectivités territoriales de leurs données, ou de celles de leur écosystème. D’un côté, un renforcement des obligations de mise à disposition et de réutilisation des données est perceptible. De l’autre, de nouvelles opportunités sont créées par l’exploitation facilitée d’un plus grand volume de données. Cependant, la politique européenne des données n’apporte pas encore de réponse réellement proportionnée aux difficultés des collectivités territoriales, qui restent trop souvent en marge de l’économie des données. La prochaine présidence française du Conseil de l’Union européenne à compter de janvier 2022 ou la négociation en cours des différents textes européens sont autant d’occasions pour les collectivités territoriales de porter ce message auprès des institutions européennes.
(9) La « data altruism » consiste à obtenir l’accord de personnes physiques ou morales au traitement de leurs données à caractère personnel ou non personnel, sans contrepartie et à des fins d’intérêt général, par exemple pour la recherche scientifique ou l’amélioration des services publics. (10) La métropole de Lyon travaille par exemple à l’élaboration d’une feuille de route pour mettre en œuvre ce concept à un niveau européen. (11) Directive n° 2010/40/UE du Parlement européen et du Conseil du 7 juillet 2010 concernant le cadre pour le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport. (12) Directive (CE) n° 2007/2 du Parlement européen et du Conseil du 14 mars 2007 établissant une infrastructure d’information géographique dans la Communauté européenne (Inspire). (13) Le pacte vert pour l’Europe est une stratégie pour adapter la société et l’économie de l’Union européenne aux enjeux climatiques, cf. Commission européenne, communication « Le pacte vert pour l’Europe », 11 décembre 2019, COM/2019/640 final.
Questions/réponses
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Crédits d’heures « Adjoint au maire, je dois célébrer un mariage. Mon employeur refuse de me payer la journée que j’ai dû poser. En a-t-il le droit ? » OUI, il en a le droit. Certes, la loi accorde des crédits d’heures à certains élus municipaux, dont les adjoints au maire, pour leur permettre de concilier leur activité professionnelle et l’exercice de leur mandat. Votre employeur est tenu d’accorder l’autorisation d’utiliser le crédit d’heures prévu par la loi et la Cour de cassation considère qu’il ne peut pas contrôler l’usage qui en est fait dès lors que le forfait d’heures n’est pas dépassé. Par conséquent, pour bénéficier de ses crédits d’heures, l’élu doit seulement en faire la demande à son employeur, par écrit, au moins trois jours à l’avance, en précisant la date et la durée de l’absence envisagée ainsi que la durée du crédit d’heures à laquelle il a encore droit au titre du trimestre en cours. Certes, également, le temps d’absence accordé au titre du crédit d’heures est assimilé à du travail effectif en entreprise pour le calcul de l’ancienneté, des droits à congés payés et des droits aux prestations sociales. En revanche, aucune disposition légale ou réglementaire n’oblige l’employeur à rémunérer ce temps d’absence. L’élu qui subit une perte de revenu en conséquence de cette absence peut néanmoins obtenir une compensation financière de la part de la commune ou de l’organisme qu’il représente, mais celle-ci n’est ouverte qu’aux élus qui ne perçoivent pas d’indemnités de fonction et elle est limitée à 72 heures annuelles, auxquelles s’applique un plafond de 1,5 fois le Smic horaire. Philippe Bluteau, avocat, cabinet Oppidum avocats
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N° 240 • Octobre 2021
Les cahiers juridiques de La Gazette 15
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juridiques Les Cahiers
Gouvernance numérique
Garantir la souveraineté de la collectivité sur ses données Par Schéhérazade Abboub, avocate, cabinet Parme avocats
Sujet transversal Toutes les compétences exercées par les collectivités sont concernées par le sujet des données : de l’éclairage public à l’arrosage automatique, des services scolaires à l’eau potable, etc.
Enjeu essentiel Le pouvoir d’action sur le territoire passe par une meilleure maîtrise des données, qui devient un enjeu essentiel pour le pilotage des politiques publiques.
Implication La souveraineté de la collectivité sur ses données implique une définition du statut des données, la garantie de leur propriété et une redéfinition de la notion de donnée d’intérêt général.
E
n matière numérique, la question de la souveraineté est souvent mise en avant. Comme le relève Jacques Priol dans le guide à destination des décideurs locaux (1), issu de la boîte à outils de la Banque des territoires pour la gestion des données territoriales (2), il y a plusieurs manières de comprendre cet enjeu. Au niveau stratégique, l’enjeu de souveraineté publique repose sur le choix des outils qui garantissent à la collectivité qu’elle conserve la maîtrise de son territoire à travers le contrôle de ses propres données et de celles que les acteurs privés (prestataires ou non) génèrent sur ce même territoire. Elle doit garantir que les prestataires (éditeurs de logiciels ou délégataires de service public par exemple) ne s’approprient pas les données publiques et donc la connaissance des territoires. Elle doit permettre à la collectivité de discuter d’égal à égal avec l’ensemble des acteurs du territoire. Si aucune collectivité n’a un d ispositif « complet » et une stratégie complète de souveraineté sur ses propres données, plusieurs initiatives lancées ces dernières années concernent le sujet de la s ouveraineté. D’un point de vue juridique, la souveraineté de la collectivité sur ses données peut être décomposée de la manière suivante : la définition du statut des données publiques ; la garantie de la propriété des données et la redéfinition de la notion de donnée d’intérêt général.
Définition du statut des données publiques Aux termes de la circulaire modifiée du 26 mai 2011 relative à la création du portail unique des informations publiques de l’État « data.gouv.fr » par la mission Etalab et l’application des dispositions régissant le droit de réutilisation des informations publiques, les informations publiques ou données publiques correspondent aux informations contenues dans les documents produits ou reçus dans le cadre de la mission de service public des administrations de l’État, des collectivités territoriales et des personnes publiques ou privées chargées d’une mission de service public.
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En outre, l’article L.300-2 du code des relations entre le public et l’administration définit la notion de document administratif des données publiques de la manière suivante : « Sont considérés comme documents administratifs, au sens des titres I, III et IV du présent livre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission. Constituent de tels documents notamment les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions, codes sources et décisions ».
À noter Tous les services publics y compris ceux exploités par des opérateurs privés constituent des documents administratifs, des informations ou des données publiques.
Aux termes de ces deux textes, il est expressément indiqué que les données de l’ensemble des services publics des administrations, en ce compris ceux qui seraient exploités par des opérateurs privés, constituent des documents administratifs, des informations publiques ou des données publiques. Ainsi, et contrairement à ce qui a pu être soutenu par certains opérateurs privés, il ne fait pas de doute pour le législateur que les données publiques incluent les données de l’ensemble des services publics, y compris ceux qui seraient exploités par des opérateurs privés. Dès lors, les données des contrats de concession ou des marchés publics sont bien des données publiques, dans la mesure où elles ont été produites dans le cadre d’une mission de service public. Bien que ce principe n’ait pas encore été acté au sein de tous les contrats des col
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lectivités, une majorité de métropoles, à l’instar de celles de Dijon, de Nantes ou de Lyon ont mis en place des clauses s’inspirant du modèle présenté ci-avant.
Proposition de clause type afin de définir le statut des données publiques (3) « Les données produites, collectées, traitées ou gérées par la collectivité ou par le concessionnaire/titulaire du marché pour son compte, dans le cadre de ses activités de service public et en lien avec ses compé tences, ont le statut de “données publiques“ au sens du code des relations entre le public et l’administration. »
Garantie de la propriété des données Les textes susvisés définissant la catégorie des documents administratifs/informations publiques/données publiques, ne précisent pas le régime de propriété des données lorsqu’elles sont gérées par les prestataires de l’administration chargés de l’exploitation d’un service public. Aussi, afin de rendre juridiquement plus robuste le régime de propriété des données au sein d’un contrat de concession, il est recommandé non seulement de qualifier lesdites données de données publiques comme exposé ci-avant, mais également de s’inspirer de la théorie des biens de retour
applicable en matière de concession de service public. Cette théorie trouve son origine dans les principes régissant les concessions de service public, lesquelles ont globalement pour objet de confier la gestion d’un service public à un opérateur sans que la collectivité ne s’en dessaisisse pour autant. En application de cette théorie, les biens de retour sont considérés comme les « biens nécessaires au fonctionnement du service public » réputés appartenir à la personne publique dès leur réalisation ou leur acquisition. Toujours selon cette théorie, au terme du contrat, les biens de retour reviennent gratuitement à l’autorité concédante. Cette théorie a été transposée par notre cabinet aux données dans plusieurs contrats de collectivités territoriales et notamment des contrats de smart city tels que ceux de Dijon métropole, de la communauté de communes du pays haut val d’Alzette ou de la métropole d’Angers. Pour les marchés publics, il est recommandé d’indiquer expressément dans les contrats que l’ensemble des données collectées par des opérateurs privés chargés d’un service public constituent des « biens nécessaires au fonctionnement du service public » réputés appartenir à la personne publique dès leur collecte. En outre, il pourrait être également précisé que la collectivité territoriale dispose d’un
droit d’accès auxdites données tout au long de l’exécution du contrat et qu’au terme de ce dernier, lesdites données reviennent gratuitement à la personne publique et doivent être détruites par l’exploitant.
À noter En créant la notion de « données d’intérêt métropolitain » et donc en se réappropriant la notion de données d’intérêt général, Nantes métropole a ainsi institué un cadre de dialogue innovant pour engager des discussions avec les acteurs concernés.
Proposition de clause type afin de garantir la propriété de la collectivité sur les données de ses services publics (4) Pour les concessions « Les données produites, collectées, traitées ou gérées par l’autorité concédante ou par le concessionnaire pour son compte, dans le cadre de ses activités de service public et en lien avec ses compétences, en ce qu’elles sont nécessaires au fonction nement du service public, constituent des biens de retour et sont réputées appartenir à l’autorité concédante dès l’origine. Le concessionnaire s’engage à permettre à l’autorité concédante d’accéder librement à
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Gouvernance numérique
…/… ces données à tout moment de l’exécution du contrat. À l’issue de la concession, le concessionnaire s’engage à remettre gratuitement à l’autorité concédante toutes les données visées au premier alinéa du présent article et à apporter la preuve de leur destruction. » Pour les marchés publics « Les données produites, collectées, traitées ou gérées par l’acheteur public ou par le titulaire du marché pour son compte, dans le cadre de ses activités de service public et en lien avec ses compétences, en ce qu’elles sont nécessaires au fonctionnement du service public, sont réputées appartenir à l’acheteur public dès l’origine. Le titulaire du marché s’engage à permettre à l’acheteur public d’accéder librement à ces données à tout moment de l’exécution du marché public. À l’issue du marché public, le titulaire du marché s’engage à remettre gratuitement à l’acheteur public toutes les données visées au premier alinéa du présent article et à apporter la preuve de leur destruction. »
Définition des données d’intérêt général Initialement proposée dans le rapport n° 3399, déposé le 15 janvier 2016 par le député Luc Belot, la notion de donnée d’intérêt général était plus large que celle actuellement en vigueur dans la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique. Comme le rappelait le rapporteur du projet de loi, le député Luc Belot : « Nous créons également une nouvelle catégorie juridique, les “données d’intérêt général”. En effet, certains jeux de données ne sont ni purement publics, au sens où ils seraient produits par des administrations, ni complètement personnels, rattachés à des individus, ni entièrement privés ou commerciaux, même s’ils le sont peut-être au départ. Il est pourtant de l’intérêt de tous que ces jeux de données soient partagés avec la puissance publique, dans la mesure où leur contrôle par les seules entreprises privées qui ont signé des contrats avec l’État – sous forme de convention ou de délégation de service public… – ne permet pas qu’ils soient utilisés de façon optimale ». Ainsi, à l’origine, la notion de donnée d’intérêt général ne visait pas que les données des contrats de concession. Elle couvrait l’ensemble des données d’origine publique ou privée pour lesquelles il est de « l’intérêt de tous qu’elles soient partagées avec la puissance publique ». Or, dans la version en vigueur du texte de
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la loi pour une R épublique numérique, la notion de données d’intérêt général fait l’objet d’une section dédiée (la section 2 du chapitre 1 « Économie de la donnée »), comprenant huit articles. Sur ces huit articles, un seul traite des contrats de l’administration, et plus précisément des seuls contrats de concession. Ainsi, l’article 17 de la loi pour une République numérique a modifié l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession en la complétant par un article 53-1 ainsi rédigé : « Art. 53-1. - Lorsque la gestion d’un service public est déléguée, le concessionnaire fournit à l’autorité concédante, sous format électronique, dans un standard ouvert librement réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé, les données et les bases de données collectées ou produites à l’occasion de l’exploitation du service public faisant l’objet du contrat et qui sont indispensables à son exécution. L’autorité concédante, ou un tiers désigné par celle-ci, peut extraire et exploiter librement tout ou partie de ces données et bases de données, notamment en vue de leur mise à disposition à titre gratuit à des fins de réutilisation à titre gratuit ou o néreux. La mise à disposition ou la publication des données et bases de données fournies par le concessionnaire se fait dans le respect des articles L.311-5 à L.311-7 du code des relations entre le public et l’administration. L’autorité concédante peut, dès la conclusion du contrat ou au cours de son exécution, exempter le concessionnaire de tout ou partie des obligations prévues au présent article par une décision motivée fondée sur des motifs d’intérêt général et rendue publique. » En outre, l’article 78 de l’ordonnance est complété par un alinéa ainsi rédigé : « L’article 53-1 s’applique aux contrats de concession déléguant un service public pour lesquels une consultation est engagée ou un avis de concession est envoyé à la publication à compter de la date d’entrée en vigueur de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique. Pour les contrats de concession déléguant un service public pour lesquels une consultation a été engagée ou un avis de concession a été envoyé à la publication avant la date d’entrée en vigueur de cette même loi, les autorités concédantes ne peuvent exiger du concessionnaire la transmission des données et des bases de données qu’à la seule fin de préparer le renouvellement du contrat. » Certaines collectivités territoriales ont décidé de revenir à cet esprit initial. À l’instar de Nantes métropole qui, au principe
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n° 4 de sa charte métropolitaine de la donnée, a créé la notion de « données d’intérêt métropolitain » afin de pouvoir accéder aux données utiles au territoire, et notamment à celles des nouveaux acteurs de la ville (Waze, Uber, etc.). En se réappropriant la notion de données d’intérêt général, Nantes métropole a ainsi institué un cadre de dialogue innovant pour engager des discussions avec les acteurs concernés. Étant précisé que le principe de données d’intérêt général devra être décliné le moment venu dans les contrats de la métropole, ce que cette dernière est en train de mettre en œuvre. En tout état de cause, pour l’heure et à notre connaissance, il n’existe pas, à ce jour, de contrat déclinant ce nouveau concept de données d’intérêt général ou d’intérêt « territorial » en dehors de la charte métropolitaine de la donnée p récitée.
Proposition de clause issue de la charte de la donnée métropolitaine de Nantes (5) Principe 4 – Données d’intérêt métropolitain « Des acteurs divers interviennent dans la vie du territoire métropolitain et sont susceptibles de produire des données qui revêtent un caractère d’intérêt général. Certaines sont produites par des acteurs publics [services de l’État, collectivités territoriales, entreprises publiques ou concessionnaires de l’État…]. D’autres sont produites par des acteurs privés. Lorsqu’il est de l’intérêt de tous qu’elles soient partagées avec la puissance publique parce qu’elles peuvent contribuer à la mise en œuvre des politiques publiques du territoire, la collectivité propose un cadre de dialogue avec les acteurs concernés pour créer les conditions d’un accès à ces données respectueux des droits de tous. Ces données sont d’intérêt métropolitain. » Cette analyse est parue dans La Gazette des communes n° 2572. (1) À lire sur : bit.ly/3iuOgFQ. (2) À retrouver sur bit.ly/355hKlI. (3) Ces clauses viennent préciser un principe fixé par la loi. (4) Ces clauses prennent des partis pris en faveur d’une meilleure maîtrise des données qui, s’ils ne sont pas nécessairement prévus par la loi, pourront constituer une prochaine étape pour le législateur. (5) Idem.
Références • Loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique.
Gouvernance numérique
Garantir la transparence et l’ouverture des données publiques Par Schéhérazade Abboub, a vocate, cabinet Parme avocats
Obligation La loi pour une République numérique du 7 octobre 2016 oblige les communes de plus de 3 500 habitants et d’au moins 50 agents à publier leurs données sous un format ouvert.
Licences Des licences peuvent être utilisées par les administrations pour la réutilisation à titre gratuit de leurs informations publiques, et ce, afin d’éviter la prolifération des licences.
Algorithme La transparence algorithmique a été introduite dans le code des relations entre le public et l’administration par la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique.
C
omme le relève Joël Gombin, cofondateur du cabinet Datactivist dans le guide à destination des décideurs locaux issu de la boîte à outils de la Banque des territoires pour la gestion des données territoriales (1) : « L’ouverture des données publiques, c’est d’abord un principe et une obligation légale justifiée par la nécessaire transparence de l’action publique. Mais c’est aussi une méthode et un apprentissage de la gestion des données. Le travail mené par les administrations publiques pour publier des données en open data est souvent la première étape d’une stratégie plus globale, notamment au service des territoires intelligents. » À cet égard, une cartographie des ensembles de données dans les territoires a également été réalisée dans le cadre de l’étude précitée. Cette cartographie est un inventaire des jeux de données disponibles pour les collectivités, classés selon les verticales métier (2). Plus précisément, elle a pour objectif de : fournir un horizon des données existantes dans les territoires ; qualifier la disponibilité générale de ces données ; recenser des enjeux communs liés aux thématiques de ces données (propriété, dispersion de la production, existence ou non de standards, enjeux de plateformes et de souveraineté, usages). Ceci étant rappelé, il convient d’exposer dans quelle mesure certaines collectivités ont souhaité garantir la transparence et l’ouverture des données en mettant en œuvre l’open data de leurs données mais également de leurs algorithmes.
Mettre en œuvre l’open data des données publiques S’agissant des conditions d’accès aux documents administratifs, il est prévu, aux termes de l’article L.311-1 que « les administrations mentionnées à l’article L.300-2 [c’est-à-dire l’État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission] sont tenues de publier en ligne ou de communiquer les documents administratifs qu’elles détiennent aux personnes
qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent livre ». S’agissant des conditions de réutilisation, il est prévu, aux termes de l’article L.321-1 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA) : « Les informations publiques figurant dans des documents communiqués ou publiés par les administrations mentionnées au premier alinéa de l’article L.300-2 peuvent être utilisées par toute personne qui le souhaite à d’autres fins que celles de la mission de service public pour les besoins de laquelle les documents ont été produits ou reçus ».
À noter Afin d’éviter la prolifération des licences, la loi a prévu la création d’une liste de licences qui peuvent être utilisées par les administrations pour la réutilisation à titre gratuit de leurs informations publiques.
En outre, aux termes de l’article L.324-1 du CRPA : « La réutilisation d’informations publiques est gratuite ». Étant précisé que : - les données mises à la disposition du public excluent les données protégées par la loi (données personnelles, données d’entreprises relevant du secret industriel ou commercial, données couvertes par des droits d’auteur) ; - e t que par décret n° 2018-1117 du 10 décembre 2018 relatif aux catégories de documents administratifs pouvant être rendus publics sans faire l’objet d’un processus d’anonymisation, le gouvernement est venu lister des catégories de documents pouvant être publiés sans faire l’objet d’une anonymisation préalable (3). Par ailleurs, s’agissant des conditions de réutilisation desdites données, la collectivité peut privilégier l’utilisation d’une licence d’utilisation des données qui permet l’usage le plus large des données ouvertes tout en se réservant le droit d’appliquer des restrictions pour protéger l’intérêt général et limiter des utilisations de données qui iraient à l’encontre des politiques publiques du territoire. Plus précisément, il sera rappelé …/…
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Gouvernance numérique
…/… qu’afin d’éviter la prolifération des licences, la loi pour une République numérique précitée a prévu la création d’une liste, fixée par décret (4), de licences qui peuvent être utilisées par les administrations pour la réutilisation à titre gratuit de leurs informations publiques. Deux types de licences peuvent être utilisés par les administrations : - celles qui sont prévues à l’article D.323-1 du CRPA, à savoir, la licence ouverte d’Etalab, dite licence « libre » ou licence « française » qui permet la réutilisation la plus large des données publiques et la licence « Open DataBase License (ODBL) » qui fixe des critères de réutilisation plus restrictifs ; - celles qui n’y sont pas prévues et qui devront faire l’objet d’une homologation (5). Enfin, si le principe d’une clause relative à l’open data ne figure pas toujours dans les contrats des collectivités, force est de constater qu’à ce jour de nombreuses collectivités et la quasi-totalité des métropoles disposent d’une plateforme d’open data. Étant précisé que des clauses relatives à l’open data figuraient parfois déjà dans des
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contrats de collectivités pionnières, c’est-àdire qui s’étaient spontanément soumises à des obligations d’open data avant la loi pour une République numérique (tel était le cas de Nantes, Rennes et Lyon, notamment), afin que les données soient mises en ligne dans le cadre de l’exécution du contrat.
Proposition de clause type pour l’ouverture des données « L’acheteur public/autorité concédante s’est engagé(e) dans une politique pour l’innovation et le développement numérique faisant une place prioritaire à la réutilisation des données publiques conformément au code des relations entre le public et l’administration concernant la réutilisation des informations du secteur public. Pour cela, l’acheteur public/autorité concédante permet aujourd’hui à des tiers de réutiliser librement les données publiques diffusées sur sa plateforme accessible à l’adresse suivante : [à compléter]. Sont expressément exclues de cette démarche les données à caractère personnel ainsi que celles sur lesquelles des tiers détiendraient des droits de propriété intellectuelle. L’acheteur public/autorité
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oncédante se réserve la possibilité de c publier sous une licence de réutilisation publique, qui précise les droits et les obligations rattachés aux données, les données issues de l’exécution de la présente convention. À cette fin, le délégataire/titulaire met à disposition gratuitement sous format ouvert (c’est-à-dire, tout protocole de communication, d’interconnexion ou d’échange et tout format de données interopérable et dont les spécifications techniques sont publiques et sans restriction d’accès ni de mise en œuvre) toutes les données non couvertes par des droits de propriété intellectuelle et relative à l’exécution de la convention. À défaut, en vue de la mise à disposition à titre gratuit des informations publiques, le délégataire fournira les outils permettant d’extraire et d’exploiter librement tout ou partie des données et bases de données. Le délégataire/titulaire apporte une attention particulière à documenter les opérations d’accès. Il accorde également les autorisations afin que les services de l’acheteur public/autorité concédante puissent exploiter les données à la fréquence de leur production. Le délégataire/titulaire précise dans la description des données mises à disposition,
le contenu des évolutions et corrections et le rythme de production des mises à jour. Le délégataire/titulaire doit assurer une ressource support pour répondre aux questions des réutilisateurs de données, que l’espace d’échanges soit mis en place par l’acheteur public/l’autorité concédante ou le délégataire/titulaire » (6).
Développer l’open data des algorithmes La transparence algorithmique a été introduite dans le CRPA par la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique. L’article L.311-3-1 oblige toute administration – et par conséquent tout partenaire de l’administration (7) – ayant recours à un procédé algorithmique pour des décisions individuelles à en faire explicitement mention. En outre, si une p ersonne intéressée en fait la demande, l’administration est tenue de lui communiquer « les règles de mise en œuvre définissant ce traitement ainsi que les principales caractéristiques de sa mise en œuvre ». L’article L.311-3-1-2 précise la nature des éléments qui doivent être communiqués à la demande d’une personne intéressée « sous une forme intelligible et sous réserve de ne pas porter atteinte à des secrets protégés par la loi, les informations suivantes : 1° le degré et le mode de contribution du traitement algorithmique à la prise de décision ; 2° les données traitées et leurs sources ; 3° les paramètres de traitement et, le cas échéant, leur pondération, appliqués à la situation de l’intéressé ; 4° les opérations effectuées par le traitement. » En complément et y compris en l’absence de demande individuelle, l’article L.3121-3 précise que toutes les administrations concernées par les obligations d’open data (plus de 3 500 hab et 50 agents équivalents temps plein, ETP) : « publient en ligne les règles définissant les principaux traitements algorithmiques utilisés dans l’accomplissement de leurs missions lorsqu’ils fondent des décisions individuelles ». Il est à noter que la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles a introduit dans l’article 10 de la loi Informatique et libertés une obligation supplémentaire concernant les traitements automatisés (c’est-à-dire sans intervention humaine). Depuis le 1er juillet 2020, tout traitement automatisé doit comporter, à peine de nullité, l’obligation de mention explicite. Par ailleurs le même article 10 précise que « le responsable du traitement s’assure de
la maîtrise du traitement algorithmique et de ses évolutions afin de pouvoir expliquer, en détail et sous une forme intelligible, à la personne concernée, la manière dont le traitement a été mis en œuvre à son égard ». Enfin, rappelons que l’article 39 de la loi Informatique et libertés précisait déjà que « toute personne physique justifiant de son identité a le droit d’interroger le responsable d’un traitement à caractère personnel en vue d’obtenir [...] 5° les informations permettant de connaître et de contester la logique qui sous-tend le traitement automatisé en cas de décision prise sur le fondement de celui-ci et produisant des effets juridiques à l’égard de l’intéressé ». En s’inscrivant dans le principe général énoncé par l’article L.312-1-3 et en anticipant d’éventuelles demandes individuelles au titre des articles L.311-3-1 et 311-3-1-2, une collectivité pourrait faire preuve d’exemplarité en insérant la clause proposée ci-dessous. Pour l’heure, seule la charte des données de la métropole de Nantes se rapproche, à notre connaissance de la clause ci-après.
Proposition de clause type pour l’ouverture des algorithmes « Pour mettre en œuvre ses missions de service public, la collectivité utilise des traitements automatisés de données relatifs à [à compléter] que le titulaire/le délégataire met en œuvre pour le compte de la collectivité. La collectivité s’engage à publier les règles définissant les principaux traitements algorithmiques utilisés dans l’accomplissement des missions de service public. Le responsable du traitement s’assure de la maîtrise du traitement algorithmique et de ses évolutions afin de pouvoir expliquer, en détail et sous une forme intelligible, à la personne concernée, la manière dont le traitement a été mis en œuvre à son égard. Option : modèle d’information sur l’utilisation d’un traitement algorithmique devant être obligatoirement mentionné dans la décision elle-même et selon le modèle fourni par Etalab ci-après. La présente décision a été prise sur le fondement d’un traitement algorithmique. Ce traitement permet de [mentionner la finalité, par exemple : calculer le montant de l’impôt dû] et dont les règles sont définies ici [lien vers les règles définissant les principaux traitements algorithmiques utilisés dans l’accomplissement des missions de l’administration lorsqu’ils fondent des décisions individuelles, cf. CRPA, art. L.312-1-3]. En application de l’article R.311-3-1-1 et R.311-3-1-2 du CRPA, vous pouvez demander la communication des règles définissant
ce traitement et leur mise en œuvre dans votre cas auprès de [nom de l’administration, modalités de contact]. En cas d’absence de réponse dans un délai d’un mois à la suite de la réception de votre demande par nos services, vous disposez d’un délai de deux mois pour saisir la commission d’accès aux documents administratifs [Cada] selon les modalités décrites sur le site web “www. cada.fr” » (8) . Cette analyse est parue dans La Gazette des communes n° 2573. (1) À télécharger sur : bit.ly/3zmPV63 (2) Lien vers la cartographie (Airtable) : bit.ly/3iAJfvo (3) Le décret incorporé à l’article D.312-1-3 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA) précise notamment, pour les documents administratifs communicables ou accessibles à toute personne, les catégories de documents pouvant être rendus publics par les administrations sans faire l’objet d’un traitement rendant impossible l’identification des personnes. (4) Le décret a été incorporé à l’article D.323-2-1 du CRPA. (5) Les administrations souhaitant recourir à une licence ne figurant pas dans le paragraphe précédent doivent auparavant en obtenir l’homologation dans les conditions prévues à l’article D.323-2-2 du CRPA. (6) Ces clauses découlent directement du domaine de la loi et du règlement. (7) Dans l’hypothèse où la thèse précédemment exposée selon laquelle les administrations sont les seules et uniques gestionnaires des données publiques est retenue, par extension, les algorithmes ayant produit lesdites données publiques sont considérés comme des éléments composant les données publiques et soumis aux mêmes principes de transparence. (8) Ces clauses découlent directement du domaine de la loi et du règlement.
Références • Loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique. • Décret n° 2018-1117 du 10 décembre 2018 relatif aux catégories de documents administratifs pouvant être rendus publics sans faire l’objet d’un processus d’anonymisation.
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Les cahiers juridiques de La Gazette 21
Gouvernance numérique
Contrôler l’hébergement et les conditions de stockage des données Par Schéhérazade Abboub, avocate, cabinet Parme avocats
J
Environnement Produire, transférer et stocker de plus en plus de données n’est pas sans conséquences environnementales. Le sujet n’est pas simple et les décideurs locaux s’interrogent pour trouver des solutions.
Règles strictes Imposer des règles strictes pour contrôler l’hébergement et les conditions de stockage des données soulève des difficultés juridiques liées, notamment, à leur libre circulation.
Sobriété Certaines collectivités s’engagent en faveur de la sobriété numérique en ayant recours à des clauses de « sobriété dans la collecte et la conservation des données ».
acques Priol relève, dans le guide à destination des décideurs locaux issu de la boîte à outils de la Banque des territoires pour la gestion des données territoriales (1), que le volume des données produites pour la gestion des villes connaît une croissance bien supérieure, du fait, notamment, de la multiplication des capteurs pour la gestion de la mobilité, du stationnement, des bâtiments, de l’éclairage public, des déchets, de la sécurité… Produire, transférer et stocker de plus en plus de données n’est pas sans conséquences environnementales. Le sujet n’est pas simple et les décideurs locaux s’interrogent légitimement et sont parfois interpellés sur le sujet. L’enjeu est de taille, car le stockage des données est énergivore. Il représente à lui seul 19 % de la consommation énergétique globale du secteur du numérique (2). Mais les réponses aux enjeux environnementaux du numérique dépassent la question de la gestion des données. Elles impliquent une réflexion sur l’ensemble de la stratégie numérique de la collectivité : le choix des équipements et le rythme de leur renouvellement, le type de logiciels, leurs conditions de production et d’utilisation, la rationalisation des consommations. La prise en compte de ces enjeux permet de définir les contours d’un « numérique responsable ». D’un point de vue juridique, cela a amené des collectivités à se positionner sur le sujet des conditions de stockage des données publiques, quand d’autres ont souhaité aller plus loin en s’engageant en faveur de la sobriété numérique (3).
Contrôler l’hébergement et les conditions de stockage Le fait d’imposer des règles strictes obligeant le stockage des données en France répond aux enjeux de souveraineté, mais soulève deux difficultés juridiques. La question de sa compatibilité avec le règlement sur la libre circulation des données non personnelles adopté le 21 juin 2018 par le Parlement européen se pose, dans la mesure où il est entré en vigueur le 21 décembre 2018 et qu’il
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est d’effet direct dans les États membres. Ce règlement fait suite à un accord politique conclu en juin 2018 sur un nouveau principe qui supprime les exigences en matière de localisation des données tout en garantissant que les autorités compétentes puissent accéder aux données à des fins de contrôle réglementaire. Toutefois, des exceptions permettront de maintenir une localisation des données sur le territoire national. Ce sera notamment le cas pour des raisons de sécurité nationale ou s’il s’agit de données « mixtes » à caractère personnel et non personnel. Par ailleurs, ces principes pourront être contestés au regard du droit de la concurrence. En effet, imposer des règles strictes liées au stockage des données en France, voire sur le territoire métropolitain, peut être de nature à constituer une barrière à l’entrée pour certains opérateurs. Il conviendra donc d’utiliser ces critères de façon habile dans la commande publique. Le choix d’outils utilisant un stockage de type cloud ou local est légitime pour nombre d’applications. Imposer un stockage local peut être acceptable si des solutions sont offertes à tous les opérateurs sans distinction, et donc sans distorsion de concurrence (par exemple : mise à disposition d’un espace de stockage dans un data center de proximité). Tel est le cas en Bretagne, où des data centers locaux de proximité ont été implantés ou sont en cours d’implantation. En outre, de plus en plus d’opérateurs intègrent aujourd’hui le stockage en France comme une option (parfois payante).
Proposition de clause type pour contrôler l’hébergement et les conditions de stockage des données publiques « Face aux enjeux de sécurité et de souveraineté des données liées à l’objet du marché public/de la concession, l’acheteur public/l’autorité concédante fixe les règles d’hébergement de ses données. Afin de garantir la sécurité des données à caractère personnel, l’acheteur public/ l’autorité concédante impose :
- option n° 1 (4) : leur hébergement dans l’Union européenne (solution conforme au RGPD et au nouveau règlement sur la libre circulation des données non personnelles adopté le 21 juin 2018) ; - option n° 2 (5) : leur hébergement sur le territoire français (option susceptible de porter atteinte au principe de libre concurrence) ; - option n° 3 (6) : leur hébergement dans le data center local de proximité (acceptable si des solutions de stockage sont offertes à tous les opérateurs sans distinction et donc sans distorsion de concurrence). »
À noter Imposer un stockage local peut être acceptable si des solutions sont offertes à tous les opérateurs sans distinction et donc sans distorsion de concurrence.
S’engager en faveur de la sobriété Dans un souci de répondre à de nouvelles préoccupations environnementales liées à un usage de plus en plus important du numérique et de la potentielle prolifération de « big data territorial », certaines collectivités font le choix de recourir à des clauses de « sobriété dans la collecte et la conservation des données ». Il n’est en effet pas à négliger que la commande publique représente environ 200 milliards d’euros, soit un peu moins de 10 % de notre produit intérieur brut, et qu’elle constitue, par conséquent, un levier économique majeur pour accompagner la transition écologique. Si le droit de la commande publique a toujours été relativement peu contraignant quant à la mise en place de mesures en faveur de la sobriété numérique, plusieurs éléments récents tendent à préfigurer un infléchissement sur le sujet. En premier lieu, il convient de mentionner l’obligation d’adopter et de publier un schéma de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables pour les organismes acheteurs dont le montant total annuel des achats est supérieur à 100 millions d’euros HT. Ce dispositif est prévu par l’article L.2111-3 du code de la commande publique. Cette obligation concerne les grandes collectivités (environ 160) et a pour but de les inciter à mener des politiques d’achats plus responsables par des actions concrètes dans la construction et la planification de leurs marchés. On peut citer, entre autres, les schémas disponibles de la ville de Lyon et de la métropole
ice Côte d’Azur, publiés en 2016, et ceux N du conseil départemental de la G ironde et de la région G rand Est, publiés en 2017. La forme de ces documents est libre. En deuxième lieu, l’article 55 de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire prévoit notamment, au sein de son deuxième alinéa, que : « Lorsque le bien acquis est un logiciel, les administrations mentionnées au premier alinéa de l’article L.300-2 du code des relations entre le public et l’administration promeuvent le recours à des logiciels dont la conception permet de limiter la consommation énergétique associée à leur u tilisation ». En troisième lieu, plusieurs rapports ont insisté ces dernières années sur la réduction de l’empreinte environnementale du numérique en France à travers les politiques publiques (Haut Conseil pour le climat, mission sénatoriale [7], Conseil national du numérique, Autorité de régulation des communications électroniques et des postes), ainsi que nombre de recommandations issues de la Convention citoyenne pour le climat. En quatrième lieu, à la suite de l’annonce par le gouvernement, le 23 février 2021, d’une feuille de route « numérique et environnement » interministérielle, le « Guide pratique pour des achats numériques responsables » a été publié le 29 avril 2021. Il contient des fiches pratiques d’achat responsable et des modèles de clauses s’adressant en priorité aux acheteurs de l’État, tout en précisant qu’il permet à tout agent public, acheteur du secteur privé ou citoyen « de trouver des ressources pour être acteur de ce changement ». Sans prétendre à l’exhaustivité, une clause plus « généraliste » est proposée ci-dessous, afin de répondre à une demande de certains territoires souhaitant s’engager plus fortement dans la réduction des consommations d’énergie et qui anticipent les difficultés que pourraient générer, à terme, la collecte et le stockage d’un volume important de données.
concessionnaire présente chaque année un rapport public qui dresse un état des lieux de la mise en œuvre de ce principe. Ce rapport détaille notamment les modalités de conservation des données et plus particulièrement de celles à caractère personnel [étant précisé que la durée de conservation de toutes les données, personnelles ou non, devra être déterminée en fonction de leur nature et de l’objectif poursuivi (à l’exception des données conservées et archivées à des fins de recherche scientifique ou historique)]. » (8) Cette analyse est parue dans La Gazette des communes n° 2575. (1) À télécharger sur : bit.ly/3zmPV63. (2) « Rapport pour une sobriété numérique », The Shift Project, octobre 2018. (3) Idem. (4) Ces clauses découlent directement du domaine de la loi et du règlement. (5) Ces clauses viennent préciser un principe fixé par la loi. (6) Ces clauses prennent des partis pris en faveur d’une meilleure maîtrise des données qui, s’ils ne sont pas nécessairement prévus par la loi, pourront constituer une prochaine étape pour le législateur. (7) Voir, notamment, le rapport d’information de la mission d’information sur l’empreinte environnementale du numérique pour une transition numérique écologique (2020). (8) Ces clauses contiennent des partis pris en faveur d’une meilleure maîtrise des données qui, s’ils ne sont pas nécessairement prévus par la loi, pourront constituer une prochaine étape pour le législateur.
Proposition de clause type pour certains territoires souhaitant s’engager dans la sobriété « La collectivité impose à son titulaire/ concessionnaire l’application d’un principe de sobriété dans la collecte et la conservation des données. La collectivité ainsi que le titulaire/concessionnaire s’engagent à collecter les seules données nécessaires à l’accomplissement des missions de service public et en limitent le stockage. Le titulaire/concessionnaire évalue annuellement les impacts de l’application de ce principe de sobriété. À cet égard, le titulaire/
Référence • Loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire.
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Gouvernance numérique
Favoriser de nouveaux usages des données Par Schéhérazade Abboub, avocate, cabinet Parme avocats
Contenant Le droit de la propriété intellectuelle ne prévoit pas de protection spécifique des données en tant que telles. Ce droit protège plutôt tout le contenant (la base de données) que le contenu (les données).
Réversibilité Le nouveau CCAG des marchés publics de techniques de l’information et de la communication permet de garantir la réversibilité des outils techno-logiques, mais de manière insuffisante.
Clauses Des clauses de réversibilité ont notamment pu être introduites dans le cadre de contrats issus de l’expérimentation relative aux « achats innovants ».
L
e sujet de la répartition des droits de propriété intellectuelle détenus notamment sur les résultats d’un projet coconstruit entre une ou plusieurs collectivités et un ou plusieurs opérateurs privés est crucial dès lors que le projet a pour objectif la mise en place d’une innovation technologique, voire d’une plateforme « smart city ». Ce sujet de la propriété intellectuelle semble détaché de celui des données, alors qu’il lui est directement lié. Tout d’abord, parce que, de manière générale, le droit de la propriété intellectuelle ne prévoit pas de protection spécifique sur les données en tant que telles, mais surtout sur les bases de données. En d’autres termes, en droit de la propriété intellectuelle, on tend à protéger davantage le contenant (via la protection spécifique octroyée aux bases de données) que le contenu (aucune protection spécifique n’étant directement accordée aux données en tant que telles dans le code de la propriété intellectuelle). Ensuite, parce que, là encore, l’absence de clauses relatives aux droits de propriété intellectuelle p ourrait générer des difficultés en cours ou au terme normal ou anticipé du contrat lorsque la collectivité souhaitera récupérer les données qui y sont logées. De la même manière, prévoir des clauses relatives à la réversibilité permet de pallier les difficultés rencontrées par les collectivités en fin de contrat pour récupérer non seulement des informations sur le logiciel déployé par l’opérateur, mais surtout des données qui y étaient contenues. Ces prérequis en matière de droits de propriété intellectuelle et de réversibilité ont conduit certaines collectivités à considérer qu’elles étaient titulaires des droits de propriété intellectuelle sur l’ensemble des composants, des briques logicielles et des équipements sur la base desquels est déployé le projet de smart city. De cette façon, les collectivités territoriales demeurent libres, ensuite, de les mettre à disposition au profit de collectivités ou d’entités tierces. On parle alors d’« essaimage » de la smart city ou du projet de ville intelligente.
Encadrer les droits de propriété intellectuelle Pour les raisons exposées ci-avant, prévoir des clauses relatives aux droits de propriété
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intellectuelle permet à la collectivité de maîtriser davantage la gouvernance des données de ses contrats. Il apparaît donc nécessaire de fixer ces règles de répartition dans une clause dédiée afin de pallier tout risque juridique sur ce sujet. La rédaction de clauses relatives aux droits de propriété intellectuelle nécessitera néanmoins d’être adaptée selon la nature des projets. En sus desdites clauses de propriété intellectuelle, des contrats de partage desdits droits de propriété intellectuelle devraient être conclus dans les six mois précédant le terme normal du contrat. Le « rapport de force » entre les parties à la négociation ne sera pas le même selon l’outil juridique utilisé (marché public, appel à projets, accord de consortium…) ; l’échelon territorial et les possibilités d’essaimage de l’innovation technologique en question ; le cadre juridique (contrat de la commande publique, Feder, H2020, PIA…) ; le montant payé par la collectivité pour la réalisation de ladite innovation technologique, mais également le savoir-faire mis à disposition par la collectivité ou selon qu’il préexiste ou non une plateforme, un outil technologique innovant ou un projet de smart city. Étant précisé qu’il existera également des différences selon les types de contrats : dans un partenariat d’innovation, par exemple, la propriété intellectuelle est un sujet majeur et précisément régi par le code de la commande publique.
Proposition de clause type concernant les droits de propriété intellectuelle Option n° 1 : la cession de droits à titre exclusif « Les parties reconnaissent que les résultats ont été développés grâce aux efforts et investissements exclusifs de l’acheteur public/l’autorité concédante sous l’égide du présent contrat. Dès lors, les parties conviennent ce qui suit : Le titulaire/ concessionnaire entend céder à l’acheteur public/l’autorité concédante, à titre exclusif, sur l’ensemble du territoire français/le monde entier et pour une durée indéterminée, les droits de propriété intellectuelle sur les résultats. Le prix de la cession est inclus dans le prix du contrat et le titulaire/concessionnaire ne peut en aucun cas solliciter de rémunération supplémentaire. »
Option n° 2 : la cession de droits à titre non exclusif « Les parties reconnaissent que les résultats ont été développés grâce aux efforts et investissements conjoints de l’acheteur public/l’autorité concédante et du titulaire/ concessionnaire sous l’égide du présent contrat. Dès lors, les parties conviennent ce qui suit : Le titulaire/concessionnaire entend céder à l’acheteur public/l’autorité concédante, à titre non exclusif, sur l’ensemble du territoire français/le monde entier et pour une durée indéterminée, les droits de propriété intellectuelle sur les résultats. Réciproquement, l’acheteur public/le concédant accepte que les résultats soient exploités librement par le titulaire/concessionnaire, en dehors de l’ensemble du territoire français/le monde entier. [Option à négocier : en contrepartie de l’investissement humain et financier de l’acheteur public/l’autorité concédante dans la recherche et le développement des résultats, le titulaire/concessionnaire s’engage à faire bénéficier l’acheteur public/l’autorité concédante, à titre gracieux, sous la forme d’une concession non exclusive à durée indéterminée de tous perfectionnements et améliorations que le titulaire/concessionnaire aurait réalisés ou fait réaliser à partir de résultats.] Le prix de la cession est inclus dans le prix du contrat et le titulaire/concessionnaire ne peut en aucun cas solliciter de rémunération supplémentaire. » Option n° 3 : l’octroi d’une licence ou d’un droit d’usage par le titulaire ou le concessionnaire à l’acheteur public/à l’autorité concédante « Le titulaire/concessionnaire consent à faire bénéficier l’acheteur public/l’autorité concédante d’une licence d’utilisation des droits de propriété intellectuelle dont il est titulaire, cessionnaire ou licencié et sans contrepartie financière, sur les éléments issus de l’exécution du présent contrat. Le transfert ainsi consenti sur ces éléments comprend notamment, au bénéfice de l’acheteur public/l’autorité concédante : - le droit de reproduire, en tout ou partie, sur tout support, en un nombre illimité d’exemplaires par tout procédé de fixation ; - le droit de représenter, par tout procédé de communication au public ; - le droit d’adapter/modifier en vue de permettre l’exploitation des éléments transférés et leur évolution aux besoins de l’exploitation du service. L’acheteur public/l’autorité concédante se réserve la possibilité de sous-licencier ou de concéder tout ou partie des droits transférés par les titulaires au profit de tout tiers de
son choix associé – ou non – à l’exploitation du service public objet du contrat. Cette licence ne vaut que pour les besoins et la durée du présent contrat. » (1)
Garantir la réversibilité des outils technologiques Aux termes des dispositions fournies par l’article 38.4 du nouveau cahier des clauses administratives générales de techniques de l’information et de la communication (CCAG-TIC) en date du 30 mars 2021 : « La “réversibilité” désigne les opérations de retour de responsabilité par lesquelles l’acheteur ou un tiers désigné reprend les prestations qu’il avait confiées au titulaire arrivant à terme ». Les modalités organisationnelles et techniques de la réversibilité figurent dans le plan de réversibilité. De manière non limitative, la réversibilité comprendra la fourniture des logiciels exécutables, le cas échéant, les codes sources, la documentation associée, les fichiers de paramétrage, les scripts d’exploitation, la documentation technique et fonctionnelle, les éventuels supports de formation ainsi que la mise à disposition de fichiers suivant un ou plusieurs formats documentés et exploitables en dehors du service fourni par le prestataire ; la mise en place d’interfaces techniques permettant l’accès aux données suivant un schéma documenté et exploitable (API, format pivot, etc.). La « transférabilité » désigne l’opération de transfert de responsabilité par lequel l’acheteur fait reprendre par un nouveau titulaire les prestations qu’il avait confiées au titulaire arrivant à terme. La période de réversibilité ou de transférabilité est la période couvrant le retour ou le transfert de responsabilité précédemment définis. Le « plan de réversibilité » ou « de transférabilité » est le document annexé au cahier des clauses administratives particulières qui décrit la durée et les conditions de mise en œuvre de la réversibilité ou de la transférabilité. Si cette clause du CCAG-TIC définit précisément le concept de réversibilité, elle reste insuffisante pour pallier les difficultés rencontrées par les collectivités en fin de contrat pour récupérer non seulement des informations sur le logiciel déployé par l’opérateur, mais surtout des données qui y étaient contenues. De nombreuses expériences passées, notamment sur des plateformes de dématérialisation, ont démontré le réel problème de l’absence de clauses de réversibilité et, par conséquent, l’enjeu que représente une telle clause pour les données des collectivités. De telles clauses ont également vocation à
protéger les collectivités dans les contrats qu’elles pourraient être amenées à conclure avec de jeunes entreprises innovantes ou start-up dans l’hypothèse où ces dernières viendraient soit à disparaître, soit à être rachetées par un tiers. De telles clauses de réversibilité ont notamment pu être introduites dans le cadre de contrats issus de l’expérimentation relative aux « achats innovants » (tels qu’introduits par le décret n° 2018-1225 du 24 décembre 2018 portant diverses mesures relatives aux contrats de la commande publique), auxquels certaines collectivités ont pu recourir avec des start-up ou des PME locales pour le déploiement de projets innovants.
Proposition de clause type pour la réversibilité des outils technologiques « Aux termes du présent contrat, la réversibilité intervient lorsque la relation contractuelle cesse à son terme normal ou anticipé, quelle que soit la cause de ce terme. La réversibilité a pour objectif de permettre à l’acheteur public/l’autorité concédante de récupérer l’ensemble des données et informations contenues dans les solutions développées par le titulaire/concessionnaire, et ce dans les meilleures conditions, et de poursuivre, dans le respect du principe de continuité du service public, les prestations qu’il avait confiées au titulaire du marché/concessionnaire. Ainsi, en cas de cessation de la relation contractuelle, quelle qu’en soit la cause, le titulaire/ concessionnaire s’engage à restituer gratuitement, à la première demande de l’acheteur public formulée par lettre recommandée avec accusé de réception et dans un délai de quarante-huit heures à la date de réception de cette demande, l’ensemble des données visées à l’article de la présente convention sous un format aisément réutilisable dans un environnement équivalent. Le titulaire/ concessionnaire s’engage à ce que l’acheteur public puisse poursuivre l’exploitation des données visées à l’article sans rupture, directement ou avec l’assistance d’un autre prestataire selon des modalités décrites dans un plan de réversibilité (qui décrira la durée et les conditions de mise en œuvre de la réversibilité ou de la transférabilité) qui devra être fourni par le titulaire/concessionnaire à l’acheteur public/l’autorité concédante. » (2) Cette analyse est parue dans La Gazette des communes n° 2577. (1) Ces clauses découlent directement du domaine de la loi et du règlement. (2) Ces clauses viennent préciser un principe fixé par la loi.
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Gouvernance numérique
Protéger les données à caractère personnel Par Schéhérazade Abboub, avocate, cabinet Parme avocats
P
Finalité et moyens Est responsable de traitement des données personnelles la personne, l’autorité publique, le service ou l’organisme qui détermine ses finalités et ses moyens.
Responsabilité Les collectivités sont responsables du traitement des données à caractère personnel collectées dans le cadre des services publics dont elles ont la gestion.
Traitement confié Quand la collectivité confie, à travers une concession ou un marché, le traitement des données à caractère personnel des usagers de ses propres services publics, elle en demeure responsable.
our rappel, la notion de responsable de traitement des données désigne, aux termes de l’article 3 de la loi Informatique et libertés : « La personne, l’autorité publique, le service ou l’organisme qui détermine ses finalités et ses moyens ». Or, c’est bien la collectivité qui détermine les finalités et les moyens des données de ses propres services publics et, a fortiori, des données à caractère personnel, c’est-à-dire, pour la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), « l’objectif et la façon de le réaliser » (1) ou encore, pour la Commission européenne, il s’agit de déterminer « pourquoi » et « comment » les données à caractère personnel « devraient être traitées » (2) ou, enfin, selon le Conseil d’État, constitue un « faisceau d’indices » le fait, pour l’organisme, de décider de la nature des données collectées, de déterminer les droits d’accès, la durée de la conservation et d’apporter des correctifs au traitement (3). Ainsi, force est de constater que ce n’est pas parce que la collectivité a confié à travers une concession ou un marché public le traitement des données à caractère personnel des usagers de ses propres services publics qu’elle n’est plus responsable de leur traitement. Ceci s’inscrit d’ailleurs dans la logique de la Cnil qui, elle-même, a reconnu dans son guide de sensibilisation au règlement général sur la protection des données (RGPD) à destination des collectivités que ces dernières étaient responsables du traitement des données à caractère personnel collectées dans le cadre des services publics dont elles ont la gestion, sans instituer d’autres critères d’appréciation (4).
Prévoir une clause S’agissant de l’utilisation de la clause ciaprès, il convient de relever deux éléments.
Conserver la responsabilité du traitement D’une part, la clause permet aux collectivités de conserver la responsabilité du traitement pour deux raisons : dès lors que la
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qualité de responsable ou coresponsable de traitement sera reconnue au profit du titulaire ou du concessionnaire, il existera un risque juridique à ce que ces derniers se considèrent, au terme d’une lecture, certes extensive, comme seul propriétaire voire copropriétaire(s) des données à caractère personnel en question ; dès lors que la qualité de responsable ou de coresponsable de traitement est reconnue à un concessionnaire ou au titulaire d’un marché, il est arrivé que ces derniers refusent de transmettre à la collectivité lesdites données à caractère personnel au terme normal du contrat. S’estimant être les seuls responsables du traitement de ces données au sens de la loi « informatique et libertés » modifiée, certains opérateurs en sont même venus à conserver ces données après le terme normal du contrat, ce qui n’a pas été sans s usciter des difficultés majeures lors de la procédure de renouvellement dudit contrat…
Créer une annexe au contrat
D’autre part, il est recommandé, pour une meilleure lisibilité du contrat, de créer une annexe inspirée directement des clauses types proposées par la Cnil, et d’y renvoyer par la mention suivante : « La répartition précise des responsabilités entre le responsable de traitement et le sous-traitant est indiquée en annexe X du présent cahier des clauses administratives particulières “concession” ». Ladite annexe devra reprendre les mentions suivantes : - la description des traitements de données mis en place, de leurs finalités et des données à caractère personnel concernées ; - les mesures prises pour respecter les obligations incombant au sous-traitant au titre de la loi Informatique et libertés et du RGPD. Il s’agit de : - l’obligation du sous-traitant de respecter la finalité du traitement déterminé par la collectivité ; - le respect des droits reconnus aux personnes dont les données sont collectées. À cet égard, le sous-traitant devra, a minima, coopérer avec le responsable de traitement pour l’aider à satisfaire
aux éventuelles demandes desdites personnes. Alternativement, le sous-traitant peut être chargé de répondre au nom du responsable de traitements aux demandes desdites personnes ; - la mise en place de mesures de sécurité appropriées au regard des données collectées et de la finalité du traitement. Le RGPD dresse la liste de mesures de sécurité générales, toutefois, les mesures particulières mises en place sont listées dans ladite annexe ; - la notification sous 72 heures de toute violation de données personnelles constatée par le responsable de traitement. Étant précisé que le format de cette notification est détaillé par l’annexe afin de permettre à l’acheteur public de notifier ladite violation à la Cnil avec toutes les informations utiles ; - le respect des restrictions de tout transfert des données hors de l’Union européenne conformément au texte précité ; - l’encadrement du sort des données à la fin du traitement. Le sous-traitant détruit ou restitue les données collectées au responsable de traitement ; - la mise en place d’un droit d’audit au bénéfice du responsable de traitement afin de constater le respect, par le soustraitant, de ses obligations. Il est recommandé d’insérer une obligation générale du sous-traitant à coopérer avec le responsable de traitement pour respecter ses obligations au titre des textes précités.
Clause particulière À la différence du stockage ou de la propriété des données, les clauses relatives à la protection des données à caractère personnel ainsi que l’annexe précitée sont déjà très répandues dans les territoires. La spécificité de la clause proposée cidessus est de confier à la collectivité la responsabilité du traitement des données à caractère personnel. Si les raisons justifiant un tel choix ont été exposées ci-avant, nous ne sommes pas sans savoir qu’il peut être lourd de conséquences pour les collectivités puisqu’il nécessite de disposer de l’organisation adaptée pour pouvoir assurer la responsabilité du traitement. Néanmoins, et comme exposé par la Cnil dans les clauses types précitées, il est possible de mettre à la charge du sous-traitant davantage d’obligations dans la mesure où c’est bien lui qui est en prise directe avec la collecte et le traitement des différentes données à caractère personnel du marché ou de la concession. Étant donné que les nouveaux contrats de smart city ou projets autour des données nécessitent de prendre
en compte le sujet de la responsabilité du traitement des données à caractère personnel, les métropoles de D ijon, N antes et L yon, la communauté urbaine d’Angers, la Carène (communauté d’agglo de Saint-Nazaire) et la communauté de communes pays haut val d’Alzette (Moselle et Meurthe-et-Moselle) n’ont pas hésité à prendre la responsabilité du traitement des données à caractère personnel.
Proposition de clauses types
Gestion des données à caractère personnel « Dès lors que l’acheteur public/l’autorité concédante détermine les finalités et les moyens de mise en œuvre de traitement des données du service et notamment des données à caractère personnel des usagers dudit service, il sera considéré comme responsable du traitement correspondant et assumera à ce titre l’ensemble des obligations prescrites par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés [ci-après “loi informatique et libertés”] telle que modifiée par le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE [ci-après “RGPD”]. Dans l’hypothèse où l’acheteur public/ l’autorité concédante est considéré comme responsable du traitement, il reviendra au titulaire/concessionnaire, en qualité de sous-traitant, d’assurer la confidentialité et la sécurité des données du service pour la couverture des risques résiduels. Les deux premiers alinéas du présent article n’ont ni pour objet, ni pour effet de conférer au titulaire/concessionnaire un quelconque droit de propriété sur lesdites données à caractère personnel. Le titulaire/concessionnaire s’interdit, à l’expiration du présent contrat de conserver les données visées au présent article. Le titulaire/concessionnaire devra apporter la preuve de leur destruction à l’acheteur public/l’autorité concédante. La répartition précise des responsabilités entre le responsable de traitement et le sous-traitant est indiquée en annexe X du présent contrat. »
6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. Le titulaire/concessionnaire prend toute mesure nécessaire pour préserver et faire respecter l’intégrité et la confidentialité des données à caractère personnel. Le titulaire/concessionnaire s’engage notamment à mettre en place les mesures techniques et organisationnelles permettant d’assurer, compte tenu de l’état des règles de l’art, un niveau de sécurité et de confidentialité approprié au regard des risques présentés par le traitement et la nature des données à caractère personnel traitées pour le compte de l’acheteur public/l’autorité concédante.
À noter Il est arrivé que des concessionnaires ou titulaires d’un marché refusent de transmettre à la collectivité les données à caractère personnel traitées au terme normal du contrat.
En cas d’évolution de la législation sur la protection des données à caractère personnel en cours d ’exécution du marché/de la concession, les modifications éventuelles demandées par l’acheteur public/l’autorité concédante, afin de se conformer aux règles nouvelles, donnent lieu à un accord préalable des parties. La répartition précise des responsabilités entre le responsable de traitement et le sous-traitant est indiquée en annexe X du présent contrat. » (5) Cette analyse est parue dans La Gazette des communes n° 2579. (1) Lire sur : bit.ly/3jWWoQb (2) Définitions sur : bit.ly/3xnNXB6 (3) Conseil d’État, 12 mars 2014, req. n° 354629. (4) Lire sur : bit.ly/2VcXM6V, cf. p. 40. (5) Ces clauses viennent préciser un principe fixé par la loi.
Protection des données à caractère personnel « Chaque partie est tenue au respect des règles relatives à la protection des données à caractère personnel, auxquelles elle a accès pour les besoins de l’exécution du marché/de la concession notamment les dispositions de la loi modifiée n° 78-17 du
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Collection
LES ESSENTIELS
Legaltech et digitalisation des collectivités territoriales Conduire la transformation de l’offre numérique Sous la direction de Thomas Saint-Aubin Avec la contribution de Christophe Delaisement, Sacha Gaillard, Jean-Charles Manrique, Anaïs Person, Lazsio Van Daal, Laurent Vidal
De la (re)définition de cadres juridiques aux possibilités offertes par l’adoption de nouveaux dispositifs et outils, ce livre accompagne les acteurs de la fonction publique territoriale. Ces derniers ont aujourd’hui l’opportunité de repenser leurs pratiques. Pour accompagner au mieux les agents et élus à travers le processus de digitalisation du droit au sein des collectivités territoriales, ce guide pratique à dimension opérationnelle allie fondements théoriques et mise en œuvre de la transformation de l’offre numérique.
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Modes de gestion
La société d’économie mixte locale Par Mourad Mergui, d octeur en droit
Capitaux mixtes Les sociétés d’économie mixte locales sont des entités économiques de droit privé à capitaux mixtes, détenues par au moins une collectivité territoriale.
Deux codes Il s’agit de sociétés anonymes à la fois régies par le code général des collectivités territoriales et par le code de commerce.
Champ d’intervention Leur champ d’intervention englobe l’élaboration d’opérations d’aménagement, de construction, l’exploitation d’un service public et toute activité d’intérêt général.
L
es sociétés d’économie mixte locales (SEML) sont issues de la loi n° 83-597 du 7 juillet 1983, dont l’article 1er les définit comme des entités répondant à la forme juridique des sociétés anonymes, pouvant être créées par des communes, départements, régions, et leurs groupements. Statistiquement, si plus de 900 sociétés ont été recensées sur le territoire, le nombre de créations est en voie de diminution (1). La particularité des SEML tient dans leur aspect hybride en ce qu’elles relèvent tant des règles de droit public que de droit privé, s’agissant de leur constitution ou de leur fonctionnement. Elles permettent aux collectivités d’être actionnaires de sociétés privées et, ainsi, de recevoir des dividendes. C’est pour cela que si leur régime juridique est prévu aux articles L.1521-1 à L.1525-3 du code général des collectivités territoriales (CGCT), ces mêmes dispositions renvoient à l’application des articles L.225-1 et suivants du code de commerce (2).
Éléments constitutifs Objet social encadré
L’objet social des SEML est fixé par le CGCT (3), qui dresse une liste limitative des domaines pour lesquels celles-ci sont autorisées à créer des sociétés. Principalement, cela concerne les opérations d’aménagement, de construction (4), l’exploitation de services publics à caractère industriel et commercial (5), ou toute autre activité d’intérêt général (6). Les SEML peuvent également être créées pour accomplir des opérations de conception, réalisation, entretien ou maintenance ainsi que, le cas échéant, de financement d’équipements hospitaliers ou médicosociaux pour les besoins d’un établissement de santé, d’un établissement social ou médicosocial ou d’un groupement de coopération sanitaire. Lorsque leur objet inclut plusieurs activités, celles-ci doivent être complémentaires, donc constituer un complément à l’activité principale de la SEML, sans pour autant que cette activité soit le complément nécessaire de son activité principale (7). Cette pluri
activité est jugée à l’origine du déclin des SEML (8). Attention, lorsque l’objet social d’une SEML s’inscrit dans le cadre d’une compétence locale qui se voit transférée à l’intercommunalité à laquelle appartient la collectivité territoriale actionnaire, cette dernière devra lui céder à l’établissement public intercommunal au moins deux tiers de ses actions de la société (9).
À noter Lorsque l’objet social d’une SEML s’inscrit dans une compétence transférée à l’intercommunalité à laquelle appartient la collectivité actionnaire, alors cette dernière devra lui céder au moins deux tiers de ses actions de la société.
En 2018, le Conseil d’État (10) a interdit aux collectivités locales de prendre des participations notamment dans les sociétés, lorsque celles-ci n’exercent pas l’ensem ble des compétences sur lesquelles porte leur objet social. Toutefois, le législateur (11) est intervenu pour sécuriser l’actionnariat des sociétés en prévoyant que « la réalisation de l’objet de ces sociétés concourt à l’exercice d’au moins une compétence de chacune des collectivités t erritoriales et de chacun des groupements de collectivités territoriales qui en sont a ctionnaires ».
Composition atypique du capital social et concours financier Les actionnaires de droit privé ont au minimum 15 % (12), donc, par déduction, les collectivités locales, nécessairement majoritaires, détiennent entre 50 et 85 % du capital. Par principe, le montant minimal du capital social d’une SEML est de 37 000 euros (13). Toutefois, deux dérogations existent et concernent, d’une part, les sociétés de construction et, d’autre part, les sociétés d’aménagement, pour lesquelles les montants minimaux respectifs sont de 225 000 euros et de 150 000 euros (14). En tant qu’actionnaires, les collectivi- …/…
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Modes de gestion
…/… tés peuvent, d’une part, prendre part aux modifications de capital augmentation (15) ou réduction (16), par convention expresse, et, d’autre part, allouer des apports en compte courant d’associés (17), pour une durée maximale de deux ans, renouvelable une fois. Ces apports peuvent se traduire principalement par une avance de fonds à la société, et permettent de leur éviter le plus possible de recourir à l’emprunt. En raison de la nature juridique des SEML, les actions détenues par les collectivités relèvent de leur domaine privé (18).
Étapes de création Dans un premier temps, il incombe à la collectivité de définir un besoin dans le cadre du projet envisagé. Pour cela, il convient de mettre en place un groupe de travail au sein de la collectivité locale afin de dresser une étude préalable sur la faisabilité du projet de SEML, puis de déterminer l’objet social futur. Ensuite, le projet de SEML est soumis au vote de l’assemblée délibérante qui a la charge d’autoriser, le cas échéant, la collectivité locale à participer à son capital, et donc la créer (19). La collectivité à l’origine de la SEML procède, de manière libre, au choix des partenaires publics et privés. Le législateur ne prévoit de procédure de mise en concurrence que dans le cas des Semop (20). Chaque actionnaire devra adresser à la collectivité « originelle » une décision de son conseil d’administration d’entrer au capital de la SEML, pour les acteurs privés, ou de son assemblée délibérante, pour les autres personnes publiques. L’assemblée délibérante devra, en outre, valider les statuts, qui définissent l’objet social, la composition et la répartition du capital, la durée de vie de la société, la désignation d’un commissaire aux comptes, les éventuels apports, vérifier la limite d’âge des mandataires, et, le cas échéant, approuver un pacte d’actionnaires. Une fois cette étape franchie, il conviendra de procéder aux formalités d’enregistrement au registre du commerce et des sociétés. Pour les communes de 3 500 habitants, les comptes de la SEML devront être annexés au budget de la collectivité (21).
Gouvernance et fonctionnement Administration et contrôle
La SEML est composée d’un conseil d’administration, ainsi que d’un conseil de surveillance dans lesquels siège au moins
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un élu, et compte, comme sociétés de droit privé, un président et un directeur général. La majorité des voix est détenue par les élus y siégeant. Elle compte au minimum deux actionnaires, dont une personne privée. Elle est soumise aux règles de comptabilité privée. Le contrôle interne des SEML s’exerce par le commissaire aux comptes (22) lors de la certification des comptes, puis par les collectivités actionnaires dans le cadre de l’examen du rapport annuel (23). Au plan externe, le préfet est compétent dans le cadre du contrôle de légalité des délibérations des organes et assemblée générale des SEML (24), surtout lorsqu’elles relèvent de l’exercice de prérogatives de puissance publique (25). Enfin, la chambre régionale des comptes est compétente pour assurer les contrôles financiers et de gestion (26). Enfin, le contentieux des procédures collectives relève de la compétence du tribunal de commerce, et celui du contrat de travail de celle du conseil des prud’hommes.
Intervention
Les SEML peuvent intervenir pour leur propre compte, mais également pour celui de leurs actionnaires. Elles peuvent aussi intervenir pour le compte de tiers (nonactionnaires), qu’il s’agisse de personnes publiques ou privées (27). Les SEML peuvent être candidates à des appels d’offres en vue de l’attribution d’un marché public, ou d’une convention de délégation de service public, même auprès de l’une des collectivités publiques actionnaires. Elles peuvent également assumer des concessions d’aménagement telles que prévues aux articles L.300-4 à L.300-5-2 du code de l’urbanisme (28). En revanche, elles ont l’obligation d’observer les règles de passation prévues par le code de la commande publique. D’ailleurs, les contrats de prestation intégrée dits « in-house » semblent proscrits entre une SEML et sa collectivité actionnaire, dès lors que celle-ci compte des actionnaires privés (29).
(6) Conseil d’État, « Rapport public 1999 ». (7) « Rapport public annuel », Cour des comptes, février 2019. (8) Ibid note préc. (9) CGCT, art. L.1521-1 al. 2. (10) CE, 14 novembre 2018, req. n° 405628. (11) La loi n° 2019-463 du 17 mai 2019 ajoute le 3° de l’article L.1522-1 du CGCT et la 2e phrase de l’alinéa 3 de l’article L.327-1 du code de l’urbanisme. (12) CGCT, art. L.1522-2. (13) Code de commerce (C. com.), art. L.224-2. (14) CGCT, art. L.1522-3. (15) C. com, art. L.225-127. (16) C. com, art. L.225-204. (17) Art. L.1522-4 et L.1522-5. (18) CE, 4 juillet 2012, req. n° 356168. (19) CGCT, art. L.2253-2 : les communes et leurs groupements peuvent, par délibération de leurs organes délibérants, acquérir ou recevoir des actions des sociétés d’économie mixte locales. (20) CGCT, art. L.1541-1. (21) CGCT, art. L.2313-1. (22) C. com., art. L.225-218 s. et L.234-1. (23) CGCT, art. L.1524-5. (24) CGCT, art. L.1524-1 s. (25) CGCT, art. L.2131-2, 8°. (26) CGCT, art. L.1524-2. (27) CGCT, art. L.1523-1. (28) CGCT, art. L.1523-3. (29) « Guide des sociétés d’économie mixte locales », La Documentation française, 2007.
Cette analyse est parue dans La Gazette des communes n° 2581.
(1) « Les sociétés d’économie mixte locales », rapport de la Cour des comptes, mai 2019. (2) L’article L.1522-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) renvoie au livre II du code de commerce. (3) CGCT, art. L.1521-1 al. 1. (4) La majorité des SEML concernent les secteurs de l’aménagement et de l’environnement. (5) Principalement, les services publics en réseau (eau, assainissement, transport, énergie).
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Références • Loi n° 83-597 du 7 juillet 1983. • Code général des collectivités territoriales, art. L.1521-1 et s. • Code de commerce, art. L.225-1 et s.
Modes de gestion
La société d’économie mixte à opération unique Par Mourad Mergui, d octeur en droit
Actionnaires La société d’économie mixte à opération unique (Semop) est une société anonyme à capitaux mixtes, détenue par au moins deux actionnaires et régie, notamment, par le code de commerce.
Coopération La Semop est constituée en vue de conclure un partenariat public-privé institutionnalisé permettant une coopération entre les secteurs public et privé.
Activité exclusive La Semop assume à titre exclusif l’exécution du contrat pour lequel elle a été constituée et ne peut poursuivre une autre activité, même accessoire.
L
a société d’économie mixte à opération unique (Semop) est issue de la loi du 1er juillet 2014 et codifiée aux articles L.1541-1 à L.1541-3 du code général des collectivités territoriales (CGCT). Elle est constituée autour d’un seul projet dont l’objet porte sur la réalisation d’une opération de construction et développement, la gestion d’un service public, ou toute autre opération d’intérêt général relevant de la compétence de la commune (1). La Semop est un outil qui permet de réaliser un partenariat institutionnalisé, sécurisé, avec le secteur privé, tout en garantissant à l’actionnaire public une participation privée au capital, qui possède les compétences nécessaires à la poursuite de l’objet, et partant, à l’exécution du contrat auquel adhère la société. Le recours à la Semop est peu répandu dans l’univers des collectivités territoriales, peutêtre en raison des difficultés de compréhension de ses règles de création (2).
Capital social et gouvernance La forme juridique de la Semop est celle des sociétés anonymes, et son existence est limitée dans le temps. À cet égard, le CGCT renvoie aux dispositions issues des articles L.225-1 et suivants du code de commerce (3). Son objet social ne peut être modifié en cours de contrat. La collectivité locale ou le groupement de collectivités détient entre 34 % et 85 % du capital de la société et 34 % au moins des voix dans les organes délibérants. La part de capital de l’ensemble des actionnaires opérateurs économiques ne peut être inférieure à 15 % (4). Par principe, le montant minimal du capital social d’une Semop est de 37 000 euros (5). Toutefois, deux dérogations existent et concernent, d’une part, les sociétés de construction et, d’autre part, les sociétés d’aménagement, pour lesquelles les montants minimaux respectifs sont de 225 000 euros et de 150 000 euros (6). Elle est composée d’un conseil d’administration, ainsi que d’un conseil de surveil-
lance et compte, à l’instar des sociétés de droit privé, un président et un directeur général. Ces organes de direction sont présidés par un élu (7). La Semop est soumise aux règles de comptabilité privée, ainsi qu’au même mode de contrôle que les sociétés d’économie mixte locales (8), à savoir un contrôle interne exercé par le commissaire aux comptes et les actionnaires, et un contrôle externe exercé par le préfet dans le cadre de son contrôle de légalité des actes, et par la chambre régionale des comptes c oncernant les contrôles financiers et de gestion.
À noter La décision de créer une Semop est prise en assemblée délibérante de la collectivité à l’origine du projet. La collectivité doit pour cela évaluer le besoin et déterminer l’activité qu’elle envisage de confier à la Semop.
Elles n’ont pas vocation à prendre des participations dans le capital de sociétés commerciales, en vertu de l’article L.1541-1 du CGCT. En raison de la nature juridique des Semop, les actions détenues par les collectivités territoriales relèvent de leur domaine privé (9).
Création Détermination du besoin de la collectivité La décision de créer une Semop est prise en assemblée délibérante de la collectivité territoriale à l’origine du projet. La collectivité doit pour cela évaluer le besoin et déterminer l’activité qu’elle envisage de confier à la Semop. Elle devra d’abord rechercher le périmètre de l’opération envisagée, son contenu, ainsi que le type d’investisseur qu’elle souhaite accueillir au titre de ses associés (établissements industriels, financiers). Ces informations sont contenues dans un document de préfiguration (10) établi par la collectivité. Le document de préfiguration a pour objet …/…
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…/… de préciser la volonté de la collectivité territoriale de confier l’opération projetée à une Semop constituée avec le candidat retenu (11). Ce document prend la forme d’un cahier des clauses techniques particulières (CCTP) très détaillé, et fait partie du dossier d’appel public à la concurrence. Il ne saurait être dévoilé après la phase de sélection des candidatures.
Choix du cocontractant
L’article L.1541-2 du CGCT prévoit que la sélection des futurs actionnaires de la Semop, ainsi que l’attribution du contrat à cette dernière sont effectuées par un unique appel public à la concurrence respectant les procédures applicables aux délégations de service public, aux concessions de travaux, aux concessions d’aménagement ou, le cas échéant, aux marchés publics, selon la nature de l’opération envisagée. Le choix de la procédure applicable varie selon la nature du contrat destiné à être conclu entre la collectivité locale (ou l’intercommunalité) et la Semop. Il peut s’agir de procédures applicables soit aux marchés publics, soit aux délégations de service public (concession ou affermage), soit aux concessions d’aménagement prévues au code de l’urbanisme (12). La mise en place d’une procédure unique de mise en concurrence pour le choix des actionnaires et l’attribution du contrat à la société résulte de l’intention stratégique du législateur de simplifier les procédures et ainsi permettre un gain de temps important au plan procédural.
Élaboration des statuts de la Semop Les V et VI de l’article L.1541-2 du CGCT prévoient notamment qu’à l’issue de la mise en concurrence et de la sélection du candidat, sont arrêtés et publiés les statuts de la Semop ainsi que le pacte d’actionnaires, si conclu. Les projets de statuts et le cas échéant, de pacte d’actionnaires, sont à prendre sur le modèle de la société anonyme. L’éventuel projet de pacte d’actionnaires énonce les règles de gouvernance et les modalités de contrôle offertes au candidat à sélectionner sur l’activité de la Semop. Le projet de statuts précise les règles de dévolution des actif et passif de la Semop dans l’hypothèse de sa dissolution. Le Conseil d’État a précisé que les dispositions du CGCT « n’imposent pas à la personne publique qui entreprend de constituer une Semop de fixer par avance de manière intangible dès le stade de la mise en concurrence tous les éléments des statuts de la Semop et du pacte d’actionnaires », dans la
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mesure où ces dispositions « ne concernent pas l’offre elle-même de l’actionnaire opérateur économique candidat à la passation du contrat » (13).
Signature du contrat
Une fois la Semop créée, la collectivité locale et la Semop consentent à signer le contrat (délégation de service public, marché) relatif à l’opération envisagée. Le passage en commission consultative locale est un préalable à ne pas manquer. À compter de cette signature, la Semop est substituée au candidat sélectionné pour l’application des modalités de passation prévues selon la nature du contrat, et son exécution. La signature de celui-ci devra faire l’objet d’une autorisation prise en assemblée délibérante de la collectivité territoriale actionnaire, qui n’omettra pas, en outre, de mettre en place les différents organes nécessaires au fonctionnement de la Semop (instances consultatives, commissions, assemblée générale constitutive).
Conseil d’État dans le « Guide des outils d’action économique », v ersion décembre 2018. (9) CE, 4 juillet 2012, req. n° 356168. (10) CGCT, III de l’art. L.1541-2. (11) Conformément au III de l’article L.1541-2 du CGCT, il indique la part que la collectivité souhaite détenir au sein du capital de la Semop. Il prévoit en outre les principales c aractéristiques de la Semop envisagée, le niveau de capitalisation, les règles de gouvernance (applicables aux actionnaires quant à la prise de décision, vote, rachat d’actions, sortie du capital) et modalités de contrôle de la société, la présence d’un pacte d’actionnaires (le cas échéant), les règles de répartition de la trésorerie, des comptes de réserve, les règles de dévolution de l’actif et du passif de la Semop, le financement, les sanctions, le coût prévisionnel de l’opération pour la collectivité territoriale, la faisabilité économique et financière du projet et prévisions d e rentabilité future, le périmètre et le niveau d’activités adaptés au projet (construction seule, construction/conception/exploitation, etc.). (12) Code de l’urbanisme, art L.300-4 et s. (13) CE, 8 février 2019, req. n° 420296. (14) Code de la commande publique, art. L.1211-1.
Passation de contrats Si, contrairement aux sociétés d’économie mixte locales, le CGCT ne prévoit aucune disposition relative à la passation des contrats par les Semop, le code de la commande publique (14) définit notamment comme pouvoirs adjudicateurs les personnes morales de droit privé qui ont été créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général ayant un caractère autre qu’industriel ou commercial, dont la gestion est soumise à un contrôle par un pouvoir adjudicateur, ou l’organe d’administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié est désignée par un pouvoir adjudicateur. Ce texte prévoit également que les organismes de droit privé dotés de la personnalité juridique constitués par des pouvoirs adjudicateurs en vue de réaliser certaines activités en commun, peuvent être des pouvoirs adjudicateurs. Cette analyse est parue dans La Gazette des communes n° 2582. (1) Code général des collectivités territoriales (CGCT), I de l’art. L.1541-1. (2) « Une Semop multiservice fait baisser le prix de l’eau », « La Gazette », 21 juin 2021, p. 47. (3) CGCT, I de l’art. L.1541-1. (4) Ibid note préc. (5) Code des communes, art. L.224-4. (6) CGCT, art. L.1522-3. (7) CGCT, III de l’art. L.1541-1. (8) « Sociétés locales à statut spécifique », fiche du
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Références • Loi n° 2014-744 du 1er juillet 2014. • Code des communes, art. L.225-1 et s. •C ode général des collectivités territoriales, art. L.1541-1 et s.
Modes de gestion
La société publique locale et la société publique locale d’aménagement Par Mourad Mergui, d octeur en droit
Définition Les sociétés publiques locales sont des entités économiques de droit privé à capitaux publics, détenues par les collectivités territoriales et leurs groupements.
Régime Ce sont des sociétés anonymes, régies par le code général des collectivités territoriales ainsi que par le code de commerce.
Champ d’intervention Sont concernées les opérations d’aménagement, de construction, l’exploitation d’un service public à caractère industriel et commercial et toute activité d’intérêt général.
C’
est à titre expérimental que, dans un premier temps, les sociétés publiques locales d’aménagement (SPLA) ont été créées par la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, pour une durée de cinq ans (1). Devant son succès, le dispositif a été pérennisé par la loi n° 2010-559 du 28 mai 2010 et généralisé à travers la création des sociétés publiques locales (SPL) régies par l’article L.1531-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT). Le régime juridique des SPL et des SPLA, sauf dispo sitions contraires, est identique à celui des sociétés d’économie mixte locales (SEML). Elles sont alors soumises, d’une part, aux articles L.1521-1 et suivants du CGCT, et, d’autre part, au code de commerce (2).
Éléments constitutifs Objet social spécifique
L’objet social des SPLA est fixé par le code de l’urbanisme et celui des SPL par le CGCT, qui dressent respectivement une liste limitative des domaines pour lesquels les collectivités territoriales sont autorisées à créer ces sociétés. Ainsi, les SPLA sont, de manière spécifique, compétentes pour la réalisation de toute opération d’aménagement ayant pour objets de mettre en œuvre un projet urbain, une politique locale de l’habitat, d’organiser le maintien, l’extension ou l’accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d’enseignement supérieur, de lutter contre l’insalubrité et l’habitat indigne ou d angereux, de permettre le renouvel lement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels (3). Plus larges, les SPL servent à la réalisation d’opérations d’aménagement, à l’instar des SPLA, mais elles ont également toute compétence pour réaliser des opérations de construction, exploiter une activité de service public à caractère industriel et commercial ou toute autre activité d’intérêt
général (4). Comme les SEML, l’objet social des SPL leur permet de poursuivre plusieurs activités, à condition que celles-ci soient complémentaires à leur activité principale, sans pour autant que cette activité soit le complément nécessaire de cette activité principale (5). Selon le Conseil d’État (6), les collectivités locales ne peuvent prendre de participations dans les SPL lorsque celles-ci n’exercent pas l’ensemble des compétences sur lesquelles porte leur objet social. Par la suite, le législateur (7) a ajouté aux textes en vigueur que « la réalisation de l’objet de ces sociétés concourt à l’exercice d’au moins une compétence de chacune des collectivités territoriales et de chacun des groupements de collectivités territoriales qui en sont actionnaires », dans le but de sécuriser l’actionnariat des sociétés locales. Notons que lorsque l’objet social d’une société s’inscrit dans le cadre d’une compé tence locale qui se voit transférée à l’intercommunalité à laquelle appartient la collectivité territoriale actionnaire, alors celle-ci ne pourra plus l’exercer et devra ainsi céder à l’établissement public intercommunal ses actions de la SPL (8). Naturellement, le champ d’intervention des SPL est limité à la territorialité des collectivités et des groupements actionnaires.
À noter Lorsque l’objet social d’une SPL s’inscrit dans le cadre d’une compétence transférée à l’intercommunalité, alors celle-ci ne pourra plus l’exercer et devra ainsi céder ses actions de la SPL à ladite interco.
Composition du capital social et concours financier L’actionnariat de droit privé n’est pas possible, le capital est exclusivement détenu par des actionnaires publics. Conformément à l’article L.225-1 du code de commerce (9), en tant que société anonyme, les SPL et les SPLA sont constituées entre deux associés ou plus. Le montant minimal …/…
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Modes de gestion
…/… du capital social des SPL et des SPLA est de 37 000 euros (10). Toutefois, deux dérogations existent. Elles concernent, d’une part, les sociétés de construction et, d’autre part, les sociétés d’aménagement, pour lesquelles les montants minimaux respectifs sont de 225 000 euros et de 150 000 euros (11). Les actions détenues par les collectivités territoriales relèvent de leur domaine privé (12). En tant qu’actionnaires, elles peuvent prendre part aux modifications de capital, que ce soit en augmentation (13) ou en réduction (14), et détenir des obligations des sociétés chargées d’exploiter des services publics communaux à caractère industriel et commercial (15). Tout comme les SEML, les SPL peuvent recevoir des apports en compte courant de la part de leurs actionnaires (16), ce qui permet d’éviter, dans une certaine mesure, le recours à l’emprunt.
Création Au préalable de la création, il convient de mettre en place un groupe de travail au sein de la collectivité locale « originaire », afin de dresser une étude sur la faisabilité du projet de société. Une fois cette étape franchie, chaque collectivité locale souhaitant participer au capital d’une SPL ou d’une SPLA devra soumettre le projet au vote de son assemblée délibérante, qui statuera, par ailleurs, sur l’objet social de la future société. Le législateur ne prévoit pas de procédure de mise en concurrence pour le choix des actionnaires. Le choix est libre et la décision d’entrer au capital d’une société se fait par délibération prise en assemblée délibérante transmise à la collectivité initiatrice du projet. L’assemblée délibérante devra ensuite valider les statuts, le montant et la répartition du capital, et, le cas échéant, un pacte d’actionnaires. Ensuite, il s’agira de procéder aux formalités d’enregistrement au registre du commerce et des sociétés et auprès de l’administration fiscale. Une fois la société constituée, chaque collectivité actionnaire signera une convention d’exploitation avec la société publique, sans mise en concurrence.
Gouvernance Administration
Intervention
Par délégation de leurs actionnaires, elles sont à même de pratiquer les droits de préemption et d’expropriation. Elles peuvent également exercer une activité économique car, d’une part, elles répondent à la définition de sociétés commerciales et, d’autre part, elles sont autorisées à prendre en charge une activité de service public industriel et commercial. Toutefois, la poursuite d’une telle activité ne pourra être envisagée qu’en cas de carence de l’initiative privée (23). Contrairement aux SEML, les SPL et les SPLA ne peuvent intervenir pour le compte de personnes publiques non actionnaires et répondre à des appels d’offres. En revanche, leur intérêt est qu’elles interviennent dans le cadre de contrats de prestation intégrée « in-house » (ou quasirégie) pour le compte de leurs actionnaires, à condition que ces derniers exercent sur celles-ci un contrôle analogue à celui qu’elles pratiquent sur leurs propres services, et que les sociétés réalisent l’essentiel de leur activité avec leurs collectivités actionnaires (24). Afin de déterminer si les SPL et les SPLA sont aptes à passer des contrats dans le cadre de leurs achats, il convient de vérifier, au cas par cas, si celles-ci peuvent être regardées comme entités adjudicatrices au sens de l’article L.1210-1 du code de la commande publique. Cette analyse est parue dans La Gazette des communes n° 2583.
En tant que société anonyme, la société publique est composée d’un conseil d’admi nistration ainsi que d’un conseil de surveillance (17). Le nombre de sièges de chaque actionnaire est proportionnel à sa participation au capital.
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Le contrôle interne des SPL s’exerce par le commissaire aux comptes (18) lors de la certification des comptes, puis par les collectivités actionnaires, dans le cadre de l’examen du rapport annuel (19). Sur le plan externe, le préfet est compétent lors du contrôle de légalité des délibérations des organes et assemblée générale des SPL (20), surtout lorsqu’elles relèvent de l’exercice de prérogatives de puissance publique (21). Enfin, la chambre régionale des comptes est compétente pour assurer les contrôles financiers et de g estion (22). Les SPL peuvent faire l’objet de procédures de redressement et de liquidation judiciaire. Dans ce cas, le contentieux des procédures collectives relève de la compétence du tribunal de commerce.
(1) Code de l’urbanisme, art. L.327-1 et L.327-2. (2) L’alinéa 4 de l’art. L.1531-1 du CGCT renvoie au livre II du code de commerce. (3) Code de l’urbanisme, art. L.300-1. (4) Code général des collectivités territoriales (CGCT),
N° 240 • Octobre 2021
art. L.1531-1. (5) Étude du Conseil d’État - fiche n° 16, version décembre 2018. (6) CE, 14 novembre 2018, req. n° 405628. (7) Loi n° 2019-463 du 17 mai 2019 - ajoute le 3° de l’art. L.1522-1 du CGCT et la deuxième phrase de l’alinéa 3 de l’art. L.327-1 du code de l’urbanisme. (8) CGCT, art. L.1521-1, al. 2. (9) Issu de l’ordonnance 2020-1142 du 16 septembre 2020. (10) Code de commerce, art. L.224-2. (11) CGCT, art. L.1522-3. (12) CE, 4 juillet 2012, req. n° 356168. (13) Code de commerce, art. L.225-127. (14) Code de commerce, art. L.225-204. (15) CGCT, art. L.2253-2, al. 2. (16) En vertu de l’art. L.1531-1 du CGCT, les articles L.1522-4 et L.1522-5 du CGCT relatifs aux apports en comptes courants au sein des SEM s’appliquent aux SPL. (17) Code de commerce, art. L.225-17 s. et L.225-57 et s. (18) Code de commerce, art. L.225-218 s. et L.234-1. (19) CGCT, art. L.1524-5. (20) CGCT, art. L.1524-1 et s. (21) CGCT, art. L.2131-2, 8°. (22) CGCT, art. L.1524-2. (23) CE, 30 mai 1930, « chambre syndicale du commerce de détail de Nevers ». (24) CJCE, 18 novembre 1999, « Teckal ».
Références • Loi n° 2010-559 du 25 mai 2010. • Circulaire COT/B/11/08052/C du 29 avril 2011. • Code général des collectivités territoriales, art. L.1531-1.
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