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Quand la ville des Lumières s’éteint

Dans le cadre du plan de sobriété énergétique mise en place par la Ville de Lyon, plusieurs mesures ont été établies. Parmi elles, l’extinction de certains bâtiments publics mais aussi de l’éclairage des rues. S’il s’agit pour l’instant d’une simple expérimentation qui devrait prendre fin au début du mois de janvier, cette mesure pourrait rester en vigueur bien plus longtemps. Une décision qui alarme certains élus d’opposition concernant l’aspect sécurité.

Réduire sa consommation énergétique d’au moins 10 % d’ici un an : c’est l’objectif que s’est donnée la municipalité écologiste de Lyon. Le maire, Grégory Doucet, avait annoncé vouloir faire « drastiquement » baisser les dépenses d’énergie. Pour cela, l’une des principales mesures qui a été mise en œuvre concerne la réduction de l’éclairage public. En effet, l’éclairage urbain constitue le 2e plus gros poste de dépense de la ville de Lyon. Ainsi, depuis le 1er novembre dernier, la ville a d’abord commencé par éteindre 370 sites du plan lumière, tels que la basilique de Fourvière, la statue de la Vierge Marie, ou encore la Maison Carrée. Des bâtiments patrimoniaux qui sont désormais illuminés uniquement les samedis soir jusqu’à 23 h (hors évènements exceptionnels comme la fête des lumières). Mais la mesure la plus controversée concerne l’éclairage urbain. Jusqu’à début janvier 2023, les éclairages publics sont éteints quatre soirs par semaine, du dimanche au mercredi, de 2 h à 4 h 30 du matin. Dans un premier temps, seuls les quartiers de Bellecour, de la CroixRousse, une partie de la Presqu’île et du Vieux-Lyon, le plateau de Saint-Rambert (9e) et certaines parties du 3e, 6e, 7e du 8e arrondissement sont concernés pour des « raisons techniques liées au réseau de distribution d’électricité », a expliqué la mairie.

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Lyon est la ville la plus dangereuse de France aujourd’hui

La décision aurait été prise en prenant en compte les horaires de circulation des transports en commun, mais aussi les jours de la semaine qui sont généralement les plus festifs, à savoir les jeudis, les vendredis et les samedis soir. Cette mesure a inquiété certains décisionnaires, notament d’opposition qui alertent sur des questions de sécurité. En effet selon un sondage Ipsos réalisé en 2015, 91 % des Français considèrent que l’éclairage public joue un rôle important « pour renforcer les conditions de sécurité le soir et la nuit ».

Pierre Oliver, maire LR du 2e arrondissement de Lyon s’est toujours dit contre l’application de cette mesure. « Pour le plan de sobriété, il faut savoir que le maire de Lyon a réuni l’ensemble des membres des groupes politiques, une initiative qui est d’ailleurs plutôt à saluer. Dans ce plan global constitué d’un peu moins d’une vingtaine de mesures, il a été proposé l’extinction de l’éclairage public sur certains secteurs. «Nous là-dessus, c’était une des mesures sur laquelle on était en total désaccord. Notre crainte c’est d’avoir sur certaines zones éteintes, de gros problèmes de sécurité, notamment liés à des gens qui pourraient rester là, que ce soit sur du trafic, ou alors des gens qui attendent des jeunes qui pourraient passer à cette heure-là. Et je pense que la Ville de Lyon a aussi cette crainte car elle a elle-même réduit l’amplitude, à savoir uniquement du dimanche soir au mercredi soir et uniquement sur certains secteurs, ce qui montre quand même une certaine fébrilité de leur part. »

En désaccord sur la mesure d’extinction des bâtiments emblématiques de Lyon mais aussi des rues, Pierre Oliver considère que la justification qui a été donnée n’est pas suffisante.

« À mon sens, cette idée pose de vrais problèmes de sécurité. Les exemples qui nous ont été donnés en justifiant par «il y a d’autres villes qui le font», c’est essentiellement dans des territoires ruraux, plus reculés, qui n’ont pas les problèmes de sécurité que nous avons à Lyon, parce que Lyon est la ville la plus dangereuse de France aujourd’hui. Concernant l’extinction des bâtiments patrimoniaux, je trouve ça regrettable, d’autant que l’économie engendrée par ça est assez infime. Il y a un troisième sujet sur lequel nous étions en désaccord, c’est leur volonté de recruter des nouveaux chargés de mission qui ont vocation à travailler les questions de sobriété. Cela va porter à six le nombre de personnes sur la question, là où aujourd’hui on sait déjà les diagnostics et ce qu’il faut faire. Nous dénonçons aussi cette mesure car elle va engendrer un surcoût supplémentaire, là où on a pour objectif de réduire la charge finale de l’opération. La crise énergétique va engendrer un surcoût financier de près de 25 millions d’euros pour la ville, donc on ne comprend pas comment on peut recruter des postes supplémentaires, c’est-à-dire dépenser plus, dans le but de générer des économies, c’est un discours qui ne s’entend pas. Aujourd’hui la réalité est avant tout économique. Autrement dit, comment on trouve ces 25 millions d’euros sur le budget pour l’année prochaine, sans augmenter les impôts, une idée à laquelle nous on s’oppose, contrairement au maire de Lyon. »

L’élu d’opposition a confié que ces recrutements vont venir effacer « l’ensemble des efforts qui sont faits sur les illuminations la nuit ». Selon lui, les 20 mesures de sobriété qui ont été prises vont générer une économie d’environ 1 million d’euros, là où le recrutement de ces postes sur l’issue du mandat coûtera quasiment la même chose. Pour lui, cela va créer un montant qu’il faudra supporter « alors même que l’enjeu n’est pas là », a poursuivi le maire LR.

« Il pourrait aussi y avoir des initiatives, comme ce qui a été fait à la Région Auvergne-Rhône Alpes, qui, elle, est bien gérée. La Région a décidé d’investir, c’est-à-dire que plutôt d’éteindre, elle va remplacer l’ensemble des lumières de nos lycées et passer en LED partout, ce qui, sur le long terme, va générer une économie substantielle à la fois de consommation et des factures. Donc je pense que ce qui est vraiment important c’est l’investissement sur de l’équipement plutôt que sur du personnel. Si j’en avais eu le pouvoir, j’aurais investi sur des éclairages publics qui consomment moins. Une idée qui n’a pas été mise en place par la Ville de Lyon car elle n’en a pas les moyens. J’aurais aussi investi sur une meilleure isolation de nos bâtiments, qui n’est pas faite aujourd’hui. Les politiques de rénovation thermique n’ont jamais été aussi lentes à la Ville de Lyon depuis que nous avons les écologistes. »

Julia NOGIER

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