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évasion : royau M es d’aujourd’hui
Evasion
P ar antoine bertra M
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d’aujourd’hui
d es royau M es, des terres sans fins, des e MP ires bâtis P ar un seu L ho MM e et défendus P ar tous. Le roi de ceci, L e P résident de ce L a, L a rockstar, L e génia L inventeur… n ous so MM es tous P artie P renante d’une P yra M ide au so MM et de L aque LL e nous PL açons que L qu’un ou que L que chose. c haque L ieu doit re P résenter une s P é cia L ité, une s P écificité géogra P hique ou cu Lture LL e. d e ce besoin de hiérarchisation socia L e naissent des e MP ires ou des civi L isations. Mais ces royau M es d’aujourd’hui, où L e roi est P arfois re MPL acé P ar L e chef d’entre P rise, ne sont P as toujours à L a hauteur de L eur M ythe. v oici que L ques hauts L ieux de L ’argent, de L a techno L ogie ou du bonheur qui inf L uencent L es nouve LL es frontières du M onde.
r oyaume du j eu
L’ancienne colonie portugaise, rattachée à la Chine en 1999, est l’empire du jeu, loin devant Las Vegas. Le chiffre d’affaires cumulé de ses casinos a été multiplié par six en dix ans pour atteindre les 45 milliards de dollars (sept fois plus que Las Vegas). Certes, la campagne anti-corruption du gouvernement de Pékin et le ralentissement économique chinois ont rendu les gros joueurs plus discrets ces derniers mois. Il n’empêche, Macao reste la cité du vice. Elle sert de lessiveuse à l’argent noir des élites corrompues de l’empire du Milieu, regorge de prostituées et reste sous l’influence des triades, les gangs mafieux chinois. Dernier casino inimaginable sorti de terre : Le Venetian, réplique géante d’un de ses casinos américains. Il a coûté 2,4 milliards de dollars. La construction de ce monument de 39 étages a même exigé de combler un bras de mer entre deux îles. Des opérateurs véreux, les « junkets », rabattent les gros joueurs venus de Chine et de toute l’Asie. Ils ouvrent aux parieurs des lignes de crédit. Les cibles prioritaires de ce juteux commerce sont les citoyens de Chine populaire, les plus nombreux dans les salles VIP. Ils peuvent ainsi contourner la réglementation qui interdit de sortir en cash plus de 3 300 dollars par voyage et 50 000 dol-
lars par an. Ce système est par ailleurs très utile pour ceux qui cherchent à exfiltrer de grosses quantités d’argent liquide de Chine, patrons fraudeurs ou responsables politiques corrompus. Ils confient leur argent au représentant d’un « junket » avant d’entrer à Macao et le récupèrent sous forme de jetons de casinos qui peuvent ensuite être joués et reconvertis en devises, puis transférées vers l’étranger. Un rapport de 2013 du Congrès américain estime que ces discrètes transactions participent au blanchiment de sommes colossales à Macao, au minimum 100 milliards de dollars par an. Les casinos ont des liens avec le crime organisé, des groupes liés aux triades y opèrent. Ils prélèvent 5 à 10% sur chaque mise. Ils fournissent aussi le personnel de sécurité et des services annexes comme de la drogue, des prostituées et des prêts à des taux usuraires. Quand on gratte un peu la peinture, on trouve des personnages flamboyants ayant des liens avec les gangs, le parti communiste chinois et des intérêts dans des groupes américains… l’un des derniers réseaux de prostitution démantelé comsi vous décidez de quitter portait 2400 prostituées pour le panama pour blanchir une valeur de 50 millions de dollars. Aujourd’hui Macao la ailleurs, allez voir les sulfureuse reçoit 30 millions de tatoués de macao dans visiteurs par an, 32 casinos sont en activité et 8 en chantier. la baie d’hong-Kong et profitez-en pour draguer avec un billet.
r oyaume de l’innovation
Silicon Valley désigne le pôle des industries de pointe situé dans la partie sud de la région de la baie de San Francisco en Californie, aux États-Unis. Cette région comporte environ 2,6 millions d’habitants et 39% d’entre eux ont entre 20 et 44 ans. Il y existe environ 11 500 entreprises high-tech qui emploient 420 000 personnes et réalisent environ 100 milliards de dollars de chiffre d’affaires. D’ailleurs, si la Silicon Valley devait être un territoire indépendant, elle serait la 12ème puissance économique mondiale. Cette région est l’épicentre technologique principal de la Californie, offrant les plus hauts salaires et employant le plus de salariés et de « cerveaux » du secteur. Toutes les plus incroyables innovations sorties ces 10 dernières années viennent de là-bas. Facebook, Google, HP, Apple, Intel, Netflix, des sociétés qui ont parfois à peine 10 ans et sont au sommet de la bourse. Ici s’écrit le futur de la technologie mais aussi des modèles sociaux… pour le meilleur ou le pire. Cette méritocratie à outrance et cette frénésie d’inventions laissent sur le bord de la route une partie de la population. Chez les adolescents, le taux de suicide 5 fois supérieur à la moyenne américaine. À San Francisco seul 26% des gens sont propriétaires, l’immobilier a explosé. Les grandes entreprises agissent comme si tout leur était permis, elles contournent les réglementa-
notre territoire (…) tions locales dans le cadre de leur expansion au sein s’est déjà fait doubler à des villes des quatre coins du globe (Google ne paye 400 km/h par des types de quasiment pas d’impôts en Europe). Les scandales sont désormais légion. L’application Uber, service 20 ans qui écrivent le futur d’auto-partage a été interdite en Espagne, aux Paysde vos petits-enfants. Bas, en Thaïlande, ainsi que dans deux villes indiennes à ce jour, parmi lesquelles New Delhi. La Silicon Valley risque aujourd’hui de soulever de violentes réactions, que nul n’a intérêt à voir se produire. Les acteurs de la technopole s’inscrivent de plus en plus en décalage avec les attentes de l’opinion publique en termes d’éthique et de comportements responsables. Pourtant tout le monde sur terre utilise leurs produits et personne n’a envie d’en changer… Quant à l’espoir de leurs innovations, il est presque infini : dans la robotique, les nano-technologies, la santé, l’énergie, l’internet des objets, l’argent virtuel, l’intelligence artificielle, chaque secteur des vieilles industries est dépoussiéré et réinventé pour offrir de nouvelles solutions et de nouvelles applications. Vous n’y croyez pas ? Voyez les drones, les smartphones, les services comme Uber ou le dieu Google : notre territoire végétatif et gérontocrate, qu’il soit lié à la France ou pas, s’est déjà fait doubler à 400 km/h par des types de 20 ans qui écrivent le futur de vos petits-enfants.
AGRÉÉ TOUTES MUTUELLES
r oyaume du B onheur
Abrité entre l’Inde et le Tibet, dans l’Himalaya oriental, le petit royaume de Bhoutan s’est taillé une réputation mondiale de petit paradis à cause de son attraction touristique bien sûr, mais aussi en raison du souci de ses souverains d’assurer le bonheur de leurs sujets... plutôt que leur richesse. Une approche socio-économique originale dans notre modernité qui fait de la croissance économique un dogme absolu. Il y a le PNB, « produit national brut », que tout le monde connaît. Et puis, il y a le BNB, « Bonheur national brut », inventé dans les années 70 par l’ancien roi du Bhoutan (Jigme Singye wangchuck). Le bonheur national brut est une tentative de définition du niveau de vie en des termes plus psychologiques et globaux que le produit national brut. En 1987, interrogé sur le produit national brut du pays, le roi Jigme Singye wangchuck, répondit qu’il s’intéressait plus au « bonheur national brut » de son peuple, il en fit un principe de gouvernance, puis un indice très sérieux. Aujourd’hui, le BNB irrigue toute la vie du pays, entraînant de profonds bouleversements dans l’agriculture (100% biologique en 2020), l’éducation nationale (où l’on prépare les élèves à devenir des « ambassadeurs du changement »), la gestion des ressources naturelles (réglementation stricte de l’abattage des arbres et de l’exploitation minière), la santé (gratuite pour tous), le tourisme (haut de gamme et durable), ou le commerce (non adhésion à l’OMC). Les rivières et les arbres sont sacrés, de même que les montagnes (l’alpinisme est interdit) et dieu est omniprésent sur les sommets, dans les foyers et la vie des Bhoutanais. L’esprit divin se cache dans les sourires et la voix douce des Bhoutanais. Cependant derrière cette image idyllique relayé par les autorités, se cache une réalité bien plus terre à terre. L’insistance du Bouthan à jouer la carte du bonheur national brut n’est que du vent destiné à attirer l’attention de la communauté internationale. Le discours sur le Bonheur national brut est remis en cause par le Premier ministre nommé en juillet 2013, Tshering Tobgay, qui explique que le gouvernement précédent a passé beaucoup plus de temps à en parler qu’à agir, et relève que le pays est confronté à quatre grands défis : l’endettement, la monnaie, le chômage, dont celui des jeunes, et la perception d’une corruption croissante. La drogue, l’alcool et le chômage sont de véritables fléaux chez les jeunes. L’exode rural montre aussi à quel point l’image idyllique et bucolique du Bhoutan est surfaite, la famine guette. Toute une partie de la population d’origine népalaise de 5e génération à du fuir le pays, la monarchie a persécuté les 24 autres cultures linguistiques et religieuses présentes sur son territoire. Le véritable trésor de ce royaume du bonheur : son étincelante nature préservée, pour le reste fais semblant de sourire, tiens-toi droit et ferme-la.
r oyaume des clu B s et de la j et- s et
Située dans l’archipel méditerranéen des Baléares, à 150 km de Valence, l’île d’Ibiza est devenue depuis les années 1970 une sorte de mythe contemporain. L’île des plaisirs, du refuge et de l’excès, telle est son image dans notre imaginaire collectif. À partir des années 1980, cette province espagnole est surtout devenue l’une des capitales du tourisme estival et du clubbing à grande échelle. Mais, au-delà de l’image un peu caricaturale qu’elle véhicule aujourd’hui, entre paillettes et DJs vedettes, Ibiza reste encore et toujours, l’un des hauts lieux de la musique électronique. Depuis la naissance de la house et sa popularisation en Angleterre, Ibiza apparaît comme la destination initiatique de la DJ culture. À partir de 1995, les superclubs anglais comme Ministry Of Sound, Cream ou renaissance, importent à leur tour la fête britannique, dans toute sa démesure, sur l’île des Baléares. Le clubbing de masse est alors né. Passée par une phase commerciale au début des années 2000 elle renoue ensuite avec la musique de pointe grâce aux influences allemandes. Toujours en train de se renouveler, elle a séduit les artistes dans les années 60, puis les beatniks, les hippies, les clubbeurs, et maintenant la Jet-Set. Avec ses hôtels, ses restaurants luxueux, ses endroits à la mode et ses constructions déjantées, elle séduit toute une faune en quête de hype et de mix electro non-stop. On croise à l’envie des milliardaires russes, Qatari, des stars mondiales, des sportifs et des top models. Tout ce beau monde se mélange dans des des soirées arrosées, matinées de drogues et d’histoires salaces, de frasques people, comme l’altercation d’Orlando Bloom et Justin Bieber en 2014. Dernièrement le succès du tube «I took a pill in Ibiza» (J’ai avalé une pilule à Ibiza) de Mike Posner, un hit en Europe et aux États-Unis, a désolé les autorités de cette île espagnole… Sur des air festifs, ses paroles évoquent la tristesse de Mike après avoir consommé de la drogue au cours d’une fête. Dans le clip, on voit un jeune homme à la tête devenue un immense masque en carton-pâte évoluant au milieu de clubbeurs qui se déhanchent, se droguent, vomissent et ont des rapports sexuels dans des toilettes de discothèque. Ce qui est assez proche de la vérité. En 2015, plus de 2,5 millions de personnes (dont un tiers de Britanniques) ont visité Ibiza, et les britanniques à Ibiza, c’est des poken en pire. Malgré ces excès, la belle Ibiza continue de séduire les touristes et les fortunés partagés entre détente et fête. Elle mérite son titre de royaume des clubs, avec ses propres lois, ses quartiers lumineux et ses enfers. Ibiza n’est pas qu’une île mais un véritable mode de vie, elle influence encore le reste du monde sur la façon dont on doit faire la fête.
l’origine du luxe
Sacré Monaco, ce petit rocher de deux kilomètres carrés pour 49 000 habitants où se pressent toutes les richesses de la planète. On ne compte plus les millions d’euros qui s’y écoulent, un vent de fric qui recouvre tout. ronaldo s’y achète un hôtel à 140 millions, on voit des supercars à 2,5 millions, des yatchs à 300 et des milliardaires à tours de bras. Mais Monaco c’est bien plus que ça : du glamour, du sang royal, des stars, du raffinement, du blanchiment d’argent, de la discrétion en toute occasion. Car on ne s’affiche pas, c’est un principe aristocrate, on s’amuse, on dépense, on boit, on mange, on joue (bref on vit) sans craindre d’être espionné ni dénoncé. Tout est fait pour protéger l’anonymat et la discrétion de ceux qui le souhaitent. Ici, les milliards peuvent se dépenser sans compter, personne n’en saura rien. Pour comprendre cela, il faut comprendre l’histoire de Monaco : la famille Grimaldi et la longue tradition de la monarchie. Les Grimaldi sont au pouvoir depuis 1297, ils obtiennent l’indépendance en 1524. En 1860, Monaco perd une partie de son terrain (Menton et roquebrune) des suites de la révolution française. Alors Charles III fait rouvrir le casino mais interdit aux sujets monégasques d’aller y jouer (loi toujours en vigueur). En 1869 la principauté peut subvenir à ses besoins, le roi Charles III supprime les impôts personnels, fonciers et mobiliers, ce qui entraîne une intense activité de construction. Dès lors, ce paradis fiscal et son climat méditerranéen attirent le gotha international dont la venue est favorisée par le développement du train, de l’hôtellerie haut de gamme et la présence de prostituées de luxe. Aujourd’hui c’est cela Monaco, un paradis fiscal histo-
rique avec du style, un centre d’affaires où de nombreuses personnes richissimes investissent des sommes faramineuses avec classe. Tout ce qui touche Monaco à trait à la démesure, c’est une longue énumération de chiffres qui dépassent l’entendement (un appartement vendu 500 millions d’euros…). Cependant rien n’est figé, des travaux gigantesques sont en train de métamorphoser le cœur de la principauté. Ainsi la cité-Etat des Grimaldi entrera réellement dans le XXIe siècle. Car la royauté à ceci d’intéressant : elle n’est pas soumise aux élections ni au temps. Le prince Albert regarde en face les décennies à venir et modernise les bâtiments. Le rocher ne cesse de capter la fine fleur des expatriés des pays riches qui paient très cher le bien-être sous le soleil, la « paix monégasque » et surtout la sécurité, l’atout incomparable pour ces résidents huppés qui roulent en rolls Apanage, accompagnés de dames bijoutées. C’est l’aspect « principauté d’opérette » qui est loin d’avoir disparu. Donc, il faut de l’espace, des lieux de vie à inventer, car l’attractivité de Monaco est devenue mondiale. C’est un refuge cosmopolite pour de nouveaux arrivants, des familles avec enfants en âge d’être scolarisés, qui occupent ces tours non plus seulement pour la belle saison, les plages, le yachting et les mondanités à l’Hôtel de Paris, mais pour y vivre à l’année. Cette minuscule principauté qui a le PNB aujourd’hui par habitant le plus élevé au monde (220 000€/hab) c’est cela monaco, a de beaux jours devant elle, elle mêle l’aristocratie aux nouveaux riches en les faisant devenir voisins de un paradis fiscal historique palier. Si certains endroits sont Jet-Set là où d’autres avec du style (…). royaumes sont traditionnels, au-dessus il y a Monaco, royaume originel du luxe. u