INTERNATIONAL LE RÉVEIL violents pour les rendre pacifiques, et nous avons clairement échoué en Afghanistan. »
Un essor de la corruption : Les États-Unis ont tenté de mettre en place en Afghanistan une structure étatique calquée sur le modèle occidental. Mais ils n’ont pas pris en compte l’histoire du pays, marquée par le tribalisme, le monarchisme, le communisme et la loi islamique. « Notre politique était de créer un gouvernement central fort. Mais c’était idiot parce que l’Afghanistan n’a pas d’antécédents de gouvernement de ce type », explique un ancien responsable du département d’État en 2015. « Le délai pour créer un gouvernement central fort est d’un siècle. Nous n’avions pas ce temps-là. » Résultat, avec l’afflux d’argent américain, la corruption s’est développée à tous les niveaux... Et c’est ce qui s’est passé avec l’administration du président Hamid Karzai. »
Une guerre de l’information Pour ne pas révéler tous les dysfonctionnements à l’opinion américaine, il a fallu mener des opérations de propagande efficaces. « Chaque donnée était transformée pour dépeindre le meilleur tableau possible », affirme le colonel Bob Crowley, haut conseiller de la coalition internationale en 20132014. « Les sondages, par exemple, n’étaient pas du tout fiables mais renforçaient l’idée que tout ce que nous faisions était bien », détaille-t-il en 2016. « Le peuple américain a constamment été berné », estime John Sopko, chef de l’agence fédérale qui a mené les entretiens. « Les mauvaises nouvelles étaient souvent étouffées. (…) Cette guerre de l’information explique sans doute le décalage entre les déclarations des politiques et le ressenti des acteurs sur place, comme le résume en 2015 le général Michael Flynn, qui a effectué plusieurs missions de ren-
seignement dans le pays. « [Ils disent tous que] nous faisons du super boulot. Vraiment ? Parce que si nous faisons du super boulot, pourquoi a-t-on l’impression de perdre ?»
Afghanistan
Chaos à Kaboul
Les terroristes afghans se sont emparés de la capitale. Un vent de panique souffle dans la population après le « lâchage » de Washington Après des années de guerre et d’occupation, les Américains ont, une fois de plus lâché leurs alliés. Les images de la prise de Kaboul par les talibans rappellent avec force la débâcle d’avril 1975 à Saigon… Le fulgurant triomphe final des insurgés dimanche 15 août a déclenché des scènes de panique monstre à l’aéroport de la capitale afghane. Une marée humaine s’est précipitée vers ce qui est la seule porte de sortie de l’Afghanistan, pour tenter d’échapper au nouveau régime que le mouvement islamiste, de retour au pouvoir après 20 ans de guerre, promet de mettre en place. Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux ont montré des scènes de totale anarchie,
comme ces centaines de personnes courant près d’un avion de transport militaire américain qui roule pour aller se mettre en position de décollage, pendant que certaines tentent follement de s’accrocher à ses flancs ou à ses roues D’autres font apparaître des milliers de personnes attendant sur le tarmac même et des grappes de jeunes hommes, surtout, s’accrochant aux passerelles pour tenter de monter dans un avion. Des films amateurs témoignent de ce qui semble être des corps tombant d’un avion militaire américain ayant pris son envol. La Maison Blanche a menacé les talibans d’une réponse militaire « rapide
et puissante » si ces derniers venaient à perturber les opérations d’évacuation en cours. Depuis, les vols civils et militaires suspendus ont repris. Le désormais ex-président Ashraf Ghani a reconnu que les talibans avaient « gagné ». Le Conseil de sécurité des Nations unies a, lui, mis en garde les talibans contre toute volonté de faire du pays une base pour de futures attaques terroristes. Il a demandé aux maîtres de l’Afghanistan de mettre en place un nouveau gouvernement représentatif incluant notamment une « participation pleine, entière et significative des femmes ». LE RÉVEIL - N° 874 - SEPTEMBRE 2021 - 11