15 février 2014 - numéro 28
Concurrence Mobilisation VTC/TAP Véhicules électriques
Web journal indépendant et gratuit. Disponible par mail tous les 1ers et 15 de chaque mois
édito Le
taxi fait vendre ! Des communications téléphoniques, des déplacements en moto, en avion, en bateau… jusqu’aux services d’hôtesses et d’hôtes spécialisés. Comme si, accolé à un autre, le simple mot « taxi » suffisait pour en accroître comme par magie la valeur marketing. Pourtant, l’activité est strictement définie par une réglementation qui, certes, reste à parfaire, mais qui garantit d’ores et déjà aux consommateurs, grâce à la tutelle du ministère de l’Intérieur, un service identifiable et un recours efficace en cas d’insatisfaction. Juridiquement, l’utilisation inappropriée du terme peut être qualifiée par les tribunaux de publicité mensongère, mais cela n’empêche pas d’instrumentaliser leur fonction sociale. Dénigrer le service taxi est un sport dans lequel les start-up d’applications smartphones pour VTC sont devenues championnes à force de stratégie et coups médiatiques. Et si l’on demandait chauffeurs de VTC ce qu’ils pensent de la situation ? Quelles sont les conditions de travail de ces « heureux » membres de l’économie participative ? Les médias, pour le coup, se gardent bien d’apporter de l’objectivité au débat. Certains d’entre eux n’hésitent pas à s’emparer des perturbations de la circulation engendrées par les manifestations des taxis pour faire de l’audience, sans se soucier du désarroi des chauffeurs face à leur avenir. « Taxi » semble faire grimper les taux d’audience comme les bulletins météo fidélisent les téléspectateurs. Dans les salons parisiens, on s’échange des anecdotes de courses en taxi comme l’on croque une chips à l’apéritif, un moyen facile de briller à peu de frais, en oubliant les quelque 50 millions de courses sans histoire effectuées par les chauffeurs parisiens et au mépris du travail de chefs d’entreprise de proximité. Le fossé entre communication et réalité peut parfois sembler vertigineux. S’il faut se méfier désormais des médias, des blogueurs, des éditorialistes ou des économistes, il ne nous restera bientôt que l’ésotérisme… Pour honorer le Nouvel an chinois qui vient à peine de débuter, Alion Yeo, célèbre maître feng shui de Hong Kong, qui déclarait à l’AFP : « Cette année est celle du cheval de bois, et le bois est très combustible. Il y aura profusion de scandales, conflits, explosions et violentes disputes. » Devrons-nous nous résoudre à faire confiance aux horoscopes ? Hélène Manceron
Publication : LNM Communication Rédactrice en chef : Hélène Manceron Secrétaire de rédaction : Laurent Thelliez Graphisme : Stanislas Marçais
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numéro 28 /// 15 février 2014
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Directrice de Publication : Hélène Manceron
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Frondeurs pour rétablir l'équilibre L
Crédit : Lempickom
Le paradoxe électrique M
algré une belle progression ( + 55 % l’an dernier en France ), la voiture 100 % électrique a du mal à émerger : seulement 0,5 % des ventes en 2013. Les espoirs de Renault qui misait naguère sur 10 % de parts de marché en 2020 semblent irréalistes. Pourtant, avec l’épuisement avéré des énergies fossiles et des pays développés dont les trois quarts des habitants vivent désormais dans les villes, la part de l’électrique est vouée à grandir rapidement dans les transports urbains. S’il en est un que ce paradoxe n’effraie pas, c’est bien Vincent Bolloré, qui courtise depuis bientôt 15 ans la fée électricité. >>> suite de l’article page 6
e bras de fer entre taxis et sociétés d’applications smartphones a connu un nouveau temps fort ces quinze derniers jours. Interpellé par l’ampleur de la mobilisation des taxis parisiens et par la détermination des chauffeurs à obtenir une réponse concrète et immédiate à la situation, Jean-Marc Ayrault a décidé une suspension des immatriculations de VTC et confié à un député « la mission de concertation visant à définir les conditions durables d’une concurrence équilibrée entre les taxis et les VTC ». Le point sur la situation. >>> suite de l’article page 4
interview
Être sur tous les fronts Yann Ricordel, directeur général des Taxis Bleus
Crédit : Taxis Bleus
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endant que les chauffeurs étaient dans la rue à défendre leur profession, centraux radio et plates-formes d’applications smartphones pour taxis ont montré leur solidarité et leur implication pour la pérennité du secteur d’activité. Au standard avec les clients comme sur le terrain ou face aux médias, les partenaires des taxis sont montés au créneau, participant à défendre un métier de taxi souvent victime d’incompréhension.
>>> suite de l’article page 5
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Frondeurs pour rétablir l'équilibre «
Un dispositif transitoire est mis en place. Les prochaines réunions de la Commission d’immatriculation des exploitants de VTC sont en conséquence reportées. Les contrôles, en particulier ceux opérés par les services du ministère de l’Intérieur, sont immédiatement renforcés. Ils portent notamment sur l’utilisation des couloirs de bus à Paris, sur le non-stationnement des VTC aux abords des gares et des aéroports, et sur le respect du principe de la réservation préalable par les VTC. Le Gouvernement souhaite ainsi créer les conditions d’un dialogue réunissant tous les acteurs, afin de permettre à la mission conduite par M. Thomas Thévenoud de déboucher sur des propositions d’évolutions durables et partagées par tous, pour un meilleur service des usagers et le développement de l’emploi. » C’est par ce communiqué que, le jeudi 13 février, le Premier ministre est intervenu, imposant ainsi un retour au calme au secteur du transport de moins de dix places. Le feu aux poudres Il y a quinze jours, taxis et VTC étaient dans l’attente de l’avis du Conseil d’État sur le décret obligeant les VTC à respecter un délai minimum de réservation préalable. La pression sur les taxis d’agglomération était déjà au maximum et lorsque l’institution a annoncé son avis de suspension, c’est près d’un an de dialogue et de travail réglementaire qui ont été réduits à néant. « Décret ou pas décret, les VTC ne respectent pas la loi ! », nous ont résumé de nombreux chauffeurs lors de la manifestation de
À Paris, en un mois, l'École militaire et les Invalides sont devenus le point de rendez-vous de chauffeurs.
Crédit : Lempickom
lundi dernier. Racolage, maraude, planque… Les témoignages foisonnent. À cette situation explosive, le lancement par Uber, la célèbre plate-forme américaine de VTC, de son appliLundi 10 février, base arrière taxis, Roissy CDG. cation permettant dorénavant aux particuliers L'opération escargot aurait mobilisé près de 5000 de pouvoir vendre des kilomètres avec leurs chauffeurs. véhicules et l’annonce médiatique du groupe Transdev de développer une activité VTC ont mis le feu aux poudres ! Une mobilisation déterminée Organisée à l’initiative des syndicats CFDT, CGT, CST, FO, FTI75, STM et SDCTP, la mobilisation des taxis parisiens a regroupé près de 5000 chauffeurs soutenus par l’ensemble de la profession. Même si leurs représentants ont été reçu par Matignon à l’arrivée des cortèges provenant des aéroports, les chauffeurs étaient déterminés à obtenir du gouvernent des actions concrètes. Ravivant la solidarité de la profession, plusieurs groupes de chauffeurs ont organisé, après la dispersion de la manifestation, des mouvements spontanés ayant entraîné des conflits avec les forces de l’ordre et l’interpellation temporaire de certains manifestants. Crédit : H Yousfi Gestion de crise Face à la polémique, la Direction générale de vigilants et nous avons fait des propola concurrence, de la consommation et de la sitions, telles que la mise en place d’une répression des fraudes (DGCCRF) a rappelé, course minimum à 90 € pour les VTC, dans un communiqué l’alignement de "Le combat pour nos taxis n'est pas gagné. leur réglemendu 7 février 2014, que « le covoiturage est licite à Nous maintenons la manifestation nationale" tation sur celle (D. Hogrel) condition qu’il soit gratuit des LOTI, l’imou que l’argent versé par les personnes transpor- possibilité de cumuler les activités VTC tées corresponde à un partage des frais générés et taxis, etc. » « Le combat pour nos par l’utilisation du véhicule » et « recommande taxis n’est pas gagné. Nous maintenons aux utilisateurs de sites de covoiturage sur inter- la manifestation nationale organisée le net à être vigilants ». De son côté, le gouverne- 27 février prochain », renchérit Didier ment a confié à Thomas Thévenoud, député Hogrel, président de la FNDT. En effet, de Saône-et-Loire, la mission de mener une outre l’impératif recadrage des VTC concertation pour « formuler sur deux mois des dans les grandes villes, la situation du propositions au gouvernement visant à instau- transport de malades menace graverer un dispositif équilibré et durable au bénéfice ment la pérennité de nombreuses entrede chacun de ses acteurs, en prenant en compte prises, notamment en milieu rural. la satisfaction des différents besoins de trans- Dans les départements, la majorité des port individuels ». Depuis sa prise de fonction, conventions CPAM semblent avoir été mardi 11 février, le nouvel interlocuteur du sec- signées par des taxis contraints et forcés. teur reçoit les représentants des taxis comme FNDT et FNTI, comme l’ensemble des des VTC. organisations professionnelles repréApaisement de façade sentant les taxis, demandent, sans avoir « Cette décision du Premier ministre est un signe encore été entendues, une concertation face au désarroi et à la révolte des chauffeurs. nationale et la contribution de la proMais ce que nous avons obtenu est seulement un fession à la rédaction des décrets d’apgel provisoire des créations et un interlocuteur », plication des dispositions de la loi de rappelle Ahmed Senbel, président de la FTI75 financement de la Sécurité sociale en la et vice-président FNTI. « Nous restons très matière. À suivre. HM
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interview
Être sur tous les fronts Yann Ricordel, DG des Taxis Bleus
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ris à partie par la clientèle, notamment lors des journées de mobilisation des chauffeurs, les centraux radio et les interfaces de mise en relation des taxis et de leurs clients ont dû monter au créneau pour défendre le secteur. Impliqués depuis de nombreuses années dans le développement et la pérennité de l'activité taxi et auprès des chauffeurs affiliés à leur réseau, les Taxis Bleus, particulièrement Yann Ricordel, leur directeur général, n’ont pas hésité à mettre en avant leur popularité et leur expertise afin de contrer les provocations médiatiques de certaines sociétés d'applications smartphones de VTC. Commentaires à chaud !
Yann Ricordel, directeur général des Taxis Bleus, dénonce, avec les chauffeurs, les sociétés d'applications smartphones qui déstabilisent le secteur.
La bataille médiatique paraissait aussi intense que la mobilisation des chauffeurs lors de l’opération escargot du 10 février dernier. À quelle revendication feriez-vous écho prioritairement ?
Le gel des créations de VTC était absolument nécessaire. Il y a eu plus de 600 immatriculations d’entreprises VTC pour ce seul mois de janvier ! Cette mesure était décisive pour une concertation sereine. Néanmoins, ce n’est qu’un report. Il faut donc en urgence renforcer le contrôle exercé sur les VTC. Les pouvoirs publics semblent partager cet objectif mais leurs intentions manquent de planning et de moyens. Enfin, il faut travailler concrètement sur un rééquilibrage des charges sociales et des contraintes.
Le lancement d’UberPop, qui permet la vente de déplacements par des particuliers, n’est-il pas la goutte d’eau qui a fait déborder le vase ?
Après la suspension du décret imposant un délai minimum de réservation préalable aux VTC par le Conseil d'État, il est certain que cette nouvelle application n’a rien fait pour apaiser le climat ! En pratique, la suspension ne change pas grand-chose sur le terrain car les VTC ne respectent pas la réglementation. Toutefois, UberPop révèle l'absence flagrante d'éthique des sociétés d'applications smartphones de VTC qui, après seulement un an d'exploitation, trahissent leurs partenaires chauffeurs et
Crédits - Fanny Bonjean
mettent en danger leurs propres clients. Que deviendra notre secteur d’activité si nous laissons s’installer de tels prédateurs ? La situation que nous connaissons illustre parfaitement que le laisser-faire réglementaire ne tardera pas à transformer le transport de personnes en véritable Far West !
partenaire
Que faire pour sortir de l’impasse ?
Les taxis doivent être présents sur tous les fronts, ceux de la mobilisation, de la concertation, de l’image, mais aussi sur le terrain, auprès de leurs clients. Nous travaillons à renforcer et à faire valoir la qualité du service taxi au sein des Taxis Bleus. Certains reportages, bien que caricaturaux, ont permis une prise de conscience de l’augmentation des exigences des clients. Nous avons reçu beaucoup de messages de clients, et certains ne comprennent pas encore les raisons de la mobilisation des chauffeurs ou se plaignent de ses incidences sur leur vie personnelle. Nombreux pourtant sont ceux qui cherchent à proposer des solutions. Ils attendent de nous que nous sortions du conflit par le haut et que nous améliorions encore la prestation de service pour le consommateur. HM
Fédération Nationale du Taxi www.fndt.fr
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Le paradoxe électrique
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e nombre d’automobilistes ayant opté pour un véhicule électrique reste marginal. Pourtant le système et le réseau de recharge de ces véhicules se développe de mois en mois. Vincent Bolloré aurait investi près de 2 milliards d’euros depuis qu’il s’est lancé dans l’aventure électrique. Batteries, véhicules en autopartage, partenariat avec Renault et, surtout, implantation et gestion des bornes de recharge à Paris, Bordeaux, Indianapolis et bientôt Londres, le groupe – qui pèse aujourd’hui 8 milliards d’euros – fait feu de tout bois et tisse sa toile à travers le monde. Le phénomène Bluecar Depuis un an, le modèle 4 places de la Bluecar est disponible pour les particuliers pour la coquette somme de 12 700 euros bonus déduit, mais elle était déjà connue des Franciliens depuis 2011 grâce au système de libre-service Autolib’ mis en place dans la capitale par le maire de Paris, Bertrand Delanoë. Le succès s’est exporté rapidement à Lyon, sous l’appellation Bluelys, et se déploie depuis janvier 2014 à Bordeaux avec BlueCub – Cub comme « communauté urbaine de Bordeaux ». En l’espace de deux ans, la drôle de petite voiture est devenue une figure familière du paysage parisien et Autolib’, qui revendique aujourd’hui 3000 véhicules disponibles et 30 000 abonnés, devrait atteindre son seuil de rentabilité en 2015. Pourtant, selon les
Grâce à Autolib', Paris s'est dotée d'un réseau de bornes de recharge qui ne cesse de s'étendre.
Crédit : Wikimédia
spécialistes, cette ascension fulgurante de lancement pour développer un « plan ne serait qu’un bonus pour Bolloré dont électrique » à l’échelle de la planète. l’objectif initial était de promouvoir une Densifier le maillage technologie exclusive de batteries… Au-delà même du prix encore prohibitif Des batteries plus fiables du véhicule et de la location de la batterie, Avec sa batterie LMP, c’est-à-dire lithium- la crainte de tout acheteur de voiture métal-polymère, fabriquée au Canada électrique est de tomber en panne de (et en Bretagne, of course…), l’industriel « carburant » au milieu de nulle part. Or revendique une fiabilité et une autonomie tous les experts s’accordent pour dire qu’à supérieures aux batteries lithium-ion qui moyen terme, on ne dépassera guère les 200 équipent la concurrence, en Le succès de l'électrique passe par un à 250 km d’autonomie dépit de ceux qui dénoncent réseau national de bornes de recharge. dans le meilleur des son fonctionnement cas. Renault avait bien énergétivore et donc peu écologique. Au pensé avoir trouvé la parade en misant point que les spécialistes n’avaient pas sur l’échange de batteries, un procédé hésité à déclarer que les Autolib’ n’étaient comparable à un plein d’essence et en tout en réalité qu’un test grandeur nature cas beaucoup plus rapide que la recharge. permettant de démontrer sa supériorité Hélas son partenaire israélien Better Place technique. Or, on s’aperçoit aujourd’hui vient juste de faire faillite… qu’il existe un troisième étage à la fusée, Encore une fois, c’est de Bolloré que vient sans doute le plus important pour Bolloré, la solution. Lorsqu’on l’interroge sur les et que ses batteries n’étaient qu’une rampe réticences des consommateurs, il répond par le développement du maillage de bornes électriques : « L'un des points pour le développer, c'est d'avoir un réseau national de bornes. » Le gouvernement l’a également compris qui envisage une proposition de Web journal gratuit et indépendant, loi pour créer un opérateur national chargé 100% NEWS est disponible tous les 1ers et 15 de chaque mois. de pourvoir la France d’un réseau dense Abonnez-vous gratuitement l'actualité taxi et efficace. EDF est sur les rangs mais le et retrouvez nos précédentes publications : groupe Bolloré possède un temps d’avance. Après avoir installé 90 % des bornes www.100pour100news.com existant actuellement à Paris, Lyon et À paraître aujourd’hui Bordeaux, il vient de décrocher 100% Actu : Quel TAP pour demain ? successivement le service d’autopartage 100% Pratique : Accueillir les touristes dès le printemps. 100 % électrique d’Indianapolis aux États100% Technique : les applications de services Unis ainsi que le marché londonien. Ironie 100% Formation : Les astuces à ne pas oublier. de l’histoire, le groupe avoue s’être inspiré Photos, infos, commentaires... Envoyez vos contributions à la rédaction : du maillage des stations-service… stations helene.manceron@gmail.com qui ont pratiquement disparu des grands centres urbains ! LT Accédez directement à notre liste de diffusion : http://bit.ly/newstaxi
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