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15 MARS 2014 - NUMÉRO 30

Justice Heures de pointe Taxis des Campagnes

Web journal indépendant et gratuit. Disponible par mail tous les 1ers et 15 de chaque mois


édito

Éditeur n’est pas chauffeur

Le 13 mars dernier, les organisations professionnelles du taxi avaient programmé une manifestation nationale pour dénoncer la concurrence déloyale des VTC mais également l’organisation du transport de malades dans les départements. Souvent oubliée, la question de l’organisation des transports de malades en taxi met aujourd’hui en péril près de 20 000 taxis et les emplois qu’ils génèrent. Suspendant le mouvement à la dernière minute pour témoigner de leur bonne volonté dans la concertation avec le médiateur, les taxis attendent en retour une prise en compte honnête et concrète de la situation actuelle de leur activité. À mi-parcours de sa mission confiée par le Premier ministre, le député de Saône-et-Loire, Thomas Thévenoud, a conduit une première série de 37 auditions. Aux représentants des taxis, des VTC et des gestionnaires d’applications smartphone, le député a annoncé lors d’une réunion plénière à l’Assemblée nationale sa méthode et un calendrier de travail autour de quatre thèmes : les règles du jeu au niveau national ; les innovations et la modernisation du transport léger de personnes ; les spécificités du Grand Paris ainsi que le transport de malades assis en taxi. Et même si le député se félicite dans son communiqué de presse « de la publication par le gouvernement d’une circulaire interministérielle à destination de tous les préfets qui les invitent à renforcer les contrôles sur l’activité des VTC, notamment sur les questions de sécurité et de transparence tarifaire », les taxis ont d’ores et déjà déposé plainte contre X auprès du procureur de la République pour dénoncer les pratiques déloyales de certains de leurs concurrents. « Qui saura réformer les taxis saura réformer la France ! » défient médias et éditorialistes. Avec une mission de concertation se déroulant pendant les élections municipales, le débat semble biaisé. La polémique alimentée par les start-up d’applications smartphone est instrumentalisée et galvaudée à des fins électorales et commerciales. À défaut de réformer la France, le médiateur parviendra-t-il à rétablir l’équité dans la jungle du transport de moins de dix places ? Rien n’est moins sûr sauf à faire la distinction entre distributeurs et transporteurs, la différence entre éditeurs d’applications pour smartphones et chauffeurs qu’ils soient de taxi, d’ex-grande remise, de Véhicules Légers de Transport Public – VLTP comme de VTC. Hélène Manceron

Publication : Lempickom sarl Rédactrice en chef : Hélène Manceron Secrétaire de rédaction : Laurent Thelliez Graphisme : Stanislas Marçais

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NUMÉRO 30 /// 15 mars 2014

Web journal indépendant et gratuit. Disponible par mail tous les 1 et 15 de chaque mois ers

terrain

Directrice de Publication : Hélène Manceron

Ruraux,

nous ne sommes pas

ceux que vous croyez !

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axis de grandes agglomérations, et parisiens en particulier, attirent les projecteurs des médias. Pourtant, ils ne représentent qu’une des facettes du métier, estimée à un tiers des taxis dans l'Hexagone mais qui cache souvent les deux autres tiers des chauffeurs de taxi en exercice. Des taxis sans stations, artisans d'un travail d'araignée qui avalent les kilomètres pour desservir des territoires que l'on a souvent tendance à oublier... Des chauffeurs qui refusent que l’on casse leur travail et sont prêts à se mobiliser pour le défendre. Rencontre. >>> suite de l’article page 4

Crédit : Lempickom

Dans de nombreux départements les courses de rue n'existent pas et le transport de malades en taxi est une activité primordiale.

monde Applis taxi interdites à Shanghai En Chine, la multiplication des applications est telle que les autorités ont dû intervenir pour sauver le service immédiat.

interview

Que la justice se mette en route !

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epuis le 1er mars 2014, les 43 000 taxis de Shanghai ne peuvent plus utiliser les applis de réservation aux heures de pointe. Face au boom des systèmes de mise en relation chauffeur-client, la municipalité de la seconde ville de Chine a en effet décidé d’interdire purement et simplement leur utilisation entre 7 h 30 et 9 h 30 et entre 16 h 30 et 18 h 30. L’objectif avoué des autorités shanghaiennes est d’abord de renforcer la disponibilité des chauffeurs, mais également d’éviter l’installation d’un système parallèle de mise aux enchères des courses pour contourner la tarification imposée. >>> suite de l’article page 6

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Questions à Gilles Boulin, Gescop

arallèlement à la médiation en cours, l’Intersyndicale nationale représentant l’ensemble des acteurs de la profession a déposé une plainte contre X auprès du procureur de la République. Les taxis obligent ainsi l’ouverture d’une enquête judiciaire contre les pratiques déloyales de nombreuses start-up de mise en relation ainsi que de chauffeurs VTC. Détails et précisions de Gilles Boulin, administrateur et codirecteur de la Gescop, porteur de l’initiative. >>> suite de l’article page 5


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terrain

Ruraux, nous ne sommes pas ceux que vous croyez !

L

a prise en compte par Thomas Thévenoud de l'organisation du transport de malades par taxis a suspendu in extremis la manifestation nationale prévue pour dénoncer la politique de transport des CPAM dans de nombreux départements. Menaces de déconventionnement, réductions drastiques des prises en charge... près de 20 000 taxis sont menacés. Dans l’attente du rapport de la mission, entreprises et chauffeurs de taxi des campagnes subissent un fort ralentissement de leur activité. Sans être l’enjeu des VTC, ils se sentent aussi vulnérables que leurs collègues d’agglomérations. Salariée d'une entreprise de neuf autorisations à Verdun, dans la Meuse, Laëtitia témoigne témoigne de la contribution quotidienne des taxis des campagnes à la mobilité. L’esprit taxi « J’adore rouler et rencontrer les gens ! », nous confie-t-elle. Cette Meusienne de pure souche s'est reconvertie dans le taxi il y a 6 ans pour échapper au chômage. Reçue au CCPCT en candidat libre, Laëtitia aime son métier. « L’appellation rural est souvent péjorative », déplore-t-elle. « Nous devons être d’excellents conducteurs car il s’agit d’assurer le service quelles que soient les conditions météo ou les amplitudes de travail. Nous accompagnons de nombreuses personnes hospitalisées à leur domicile en nous adaptant à chaque individu et chaque pathologie». Au quotidien, le coordinateur des courses en base dans les locaux de l’entreprise est essentiel. « La communication directe par téléphone portable nous permet d’avoir des informations précises pour prendre en charge nos passagers. Les patients sont mobiles mais généralement en état de fragilité. Sans qu'ils aient besoin d’une prise en charge médicalisée qu’apportent les ambulanciers, nous devons aller les aider à sortir de chez eux, les accompagner pour satisfaire aux formalités administratives hospitalière jusqu’à leur fauteuil de la salle d’attente où nous irons les rechercher ».

À chaque territoire son activité. Laëtitia et ses collègues optimisent eux aussi les innovations des technologies de communication. Grâce au kit Bluetooth, ils peuvent échanger en restant disponibles à leur conduite et à leur clientèle. En outre, tous les véhicules sont géolocalisés par le coordinateur, la facturation est automatisée, les courses sont affectées en fonction des véhicules et des clients et les journées sont établies entre les exigences du transport des malades mais aussi en fonction des tourLaëtitia, chauffeur depuis 6 ans, salariée, nées d’accompagnement adore "rouler et rencontrer les gens !". d’enfants scolarisés dans des classes spécialisées. Enfin, ils sont épargnés par les embouteillages. Et les courses de taxi Crédit : lempickom classique ? De très rares demandes et la seule perspective de diversification de l’activité mule des droits sociaux de retraite et d'assude son entreprise semble être le développe- rance chômage ainsi que de la disponibilité ment touristique dans le cadre des commé- pour ma famille. » Un équilibre rare en morations de la Première Guerre mondiale. ces temps de crise… Depuis de nombreux Un équilibre précaire mois, Laëtitia s’inquiète : « J’aimerais cesser En Meuse, les quelque 200 autorisations de de craindre de perdre mon travail entre stationnement exploideux lois ! ». tées par des chauffeurs "J'aimerais cesser de craindre de perdre mon Outre cette prétravail entre deux lois !" appartiennent à une cincarité, le premier quantaine d’entreprises. trimestre 2014 De nombreux artisans taxi collaborent avec enregistre un fort creux d’activité. « Nous des chauffeurs salariés. Dans l’entreprise espérons une reprise de l’activité dès la fin de notre chauffeur, le salaire moyen est des vacances scolaires d’hiver », nous confie de 1 700 € net. Souhaite-t-elle posséder sa le patron de Laëtitia, « Mais, la non-prise en propre licence ? La réponse est claire : « Cela charge de nombreux transports de patients a ne m’intéresse pas. C’est trop de contraintes. déjà impacté une baisse non rattrapable. Ne En étant salarié, j'ai revenu régulier, j'accu- pouvant payer les heures supplémentaires ni les RTT de leurs personnels, nos centres médicaux ont suspendu les soins de leurs patients, faute de moyens ». Le médiateur Thomas Thévenoud et Laëtitia n’auront sûrement pas l'occasion de se rencontrer Web journal gratuit et indépendant, mais si elle pouvait donner un conseil ce ers 100% NEWS est disponible tous les 1 et 15 de chaque mois. serait : « Venez nous voir et rencontrer nos patients avant de vous prononcer ! ». HM Recevez directement le prochain numéro en vous abonnant au lien suivant : http://bit.ly/newstaxi

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interview

Que la justice se mette en route ! Interview de Gilles Boulin, Gescop

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out en participant activement à la mission de concertation entre taxis et VTC, l’Intersyndicale nationale des organisations professionnelles représentant les taxis (FFTP, FNDT, FNTI, FNAT, GESCOP, Sud et UNIT), chauffeurs et entreprises, a décidé de porter plainte auprès du procureur de la République pour dénoncer les agissements illégaux et déloyaux de certains, qu’ils soient chauffeurs VTC ou plates-formes de mise en relation. Gilles Boulin, codirecteur et administrateur de la Gescop, nous détaille la stratégie adoptée et les attentes qu’elle suscite. Pourquoi avoir saisi la justice ? Quel est votre objectif ? C’est la Gescop qui porte la plainte mais ce travail minutieux et coûteux a été réalisé grâce à l’ensemble des acteurs de l’Intersyndicale nationale. Coopérateurs, artisans, locataires, salariés comme radio-taxis, si nous sommes concurrents sur le terrain, nous savons pourtant nous unir lorsqu’il s’agit de défendre notre profession. Notre objectif est que le secteur du taxi, quel que soit le rôle de chacun, sorte de cette crise qui menace l’ensemble de l’activité. Si les chauffeurs sauvent leur travail, tout le monde s’en sortira. Et avec les acteurs du taxi, il n’y a pas à craindre une entente illicite sur les prix au détriment des consommateurs : nos tarifs sont imposés par l’État ! Pourquoi avez-vous déposé une procédure judiciaire contre X alors que les témoignages des taxis et des ex-grands remisiers foisonnent ? Nous avons déposé notre plainte contre X car les agissements délictueux concernent l’ensemble des structures proposant du transport. La concurrence déloyale des VTC s’étend du chauffeur à la plate-forme, chacun opérant dans un registre particulier. On observe trois types d’infractions. D’abord l’utilisation abusive du terme « taxi » ou « cab », notamment dans le référencement des moteurs de recherche. Ensuite, le stationnement et la circulation des VTC dans les zones d’activités sans réservation préalable en attente de clientèle ainsi que leur utilisation des voies de bus

"Si nous ne pouvons encore nous appuyer sur aucune jurisprudence, nous refusons que la situation soit politiquement étouffée."

Crédit : Lempickom

et des stations de taxis. Enfin, nous dénonçons la tarification faite par certaines applications qui ne fixent pas le prix de la course à l’avance et utilisent des simili-compteurs disponibles sur les smartphones embarqués dans les véhicules. Notre dossier est complet, avec photos et constats d’huissiers, un véritable travail de fourmi. Et si nous ne pouvons encore nous appuyer sur aucune jurisprudence, nous refusons que la situation soit politiquement étouffée. Fort de votre expérience du plan Attali, pensez-vous que la profession pourra sortir de cette nouvelle crise ? Nous attendons que les pouvoirs publics prennent conscience du fléau et que la justice se mette en route pour arrêter le désastre. Les minima de règles décrétées ne sont même pas respectés. Nous ne pouvons plus supporter de voir les maraudes dans nos stations. Si la situation continue

à se détériorer et le nombre de VTC à augmenter, chaque course risque de générer des conflits dont les répercussions seront subies directement par les clients. Les start-up d’application smartphone VTC sont des distributeurs, ce ne sont pas des transporteurs. Ils ne contrôlent pas les chauffeurs qu’ils mettent en relation avec les passagers. À l’inverse, les taxis et leurs centraux radio ajoutent au service de mise en relation 4 engagements garantis : un service de transport pour tous les publics ; des tarifs réglementés donc des prix stables ; une garantie de sécurité et une voie de recours. Enfin, véritables micro-entreprises, 100 chauffeurs de taxi font travailler 10 salariés. Pour faire valoir la qualité de notre activité, nous détaillons ces atouts de la profession dans un fascicule que les chauffeurs de notre réseau Gescop distribuent à nos clients. HM


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monde

Applis taxi interdites à Shanghai Depuis le 1er mars de cette année, les taxis de Shanghai ne peuvent plus mettre aux enchères les réservations de course et ignorer les clients qui les hèlent dans la rue.

Crédit : inconnu

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vec 23 millions d’habitants, Shanghai constitue l’une des plus importantes mégapoles du monde. Répartis principalement entre 5 sociétés qui se distinguent par la couleur de leurs véhicules, les taxis y sont un mode de transport très apprécié, à la fois des habitants et des touristes d’affaires. Mais aujourd’hui, trouver un chauffeur libre aux heures de pointe relève du miracle. Les autorités locales ont donc décidé de frapper un grand coup en bannissant l’utilisation des applications de mise en relation aux périodes critiques de la journée, et ce pour tous les transporteurs, qu’ils soient taxis ou VTC ! Taxis dans le collimateur Comme au Brésil (voir 100% News 29), les applis taxi fleurissent un peu partout en Chine et les chauffeurs, flairant l’aubaine, se sont rués sur ce moyen simple et peu coûteux d’augmenter leur clientèle et leur chiffre d’affaires. À Shanghai, il n’est pas rare de voir plus d’une dizaine de portables sur la planche de bord de votre taxi, chacun d’eux prêt à répondre aux demandes de Didi Taxi, Kuaidi Taxi, etc. Résultat : vos chances de pouvoir héler un taxi libre en début de matinée ou en fin d’après-midi sont désormais quasi nulles, et la bonne réputation des professionnels de Shanghai qui, d’après le sondage du site hotels.com, se classaient en 2013 au 4e rang des meilleurs taxis du monde derrière les intouchables black cabs londoniens, les yellow cabs new-yorkais et les taxis à gants blancs de Tokyo, risque fort de dégringoler dans les années à venir. Éteignez votre portable ! Afin de remédier à la situation, l’Administration portuaire et des transports de Shanghai n’y est pas allée par quatre chemins. Elle s’est adressée

directement aux dirigeants des nouvelles pratiques induisaient un effet deux principales sociétés de mise pervers sur la tarification… en relation taxi, qui détiennent à Courses aux enchères elles seuls près de 90 % du marché, La pénurie grandissante de « taxis de rue » pour leur demander d’appliquer et la simple application de la loi de l’offre les nouvelles règles sous peine et de la demande ont conduit les clients les d’être suspendues. Quant aux plus aisés à proposer un « bonus » pour chauffeurs, ils devraient voir leur s’assurer d’obtenir un taxi dans des délais nombre augmenter aux heures raisonnables. Un véritable système de de pointe (par une méthode mise aux enchères est alors apparu dans que ne précise pas la dépêche lequel les chauffeurs, les yeux rivés sur de l’agence Reuters qui a diffusé leurs portables, attendent l’offre la plus l’information…) et, surtout, ils ont alléchante avant de répondre à la demande. désormais l’interdiction formelle La municipalité de Shanghai n’a pas tardé d’utiliser leur(s) portable(s) à comprendre qu’en laissant se développer ou tout autre appareil mobile l’utilisation des applis taxi, c’est toute la lorsqu’ils réglementation tarifaire à La municipalité a mis un coup transportent d'arrêt à l'utilisation des applis taxi. laquelle étaient soumis les un passager, professionnels chinois, à ou de refuser un passager l’instar des français, qui risquait de voler en lorsqu’ils roulent à vide. Les éclats ! Une forme de capitalisme sauvage autorités de Shanghai se sont que le régime de Pékin n’est pas encore prêt en effet rendu compte que ces à digérer… LT

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