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Loti - modernisation - tribune 15 SEPTEMBRE 2016 - NUMÉRO 90 Web journal indÊpendant et gratuit. Disponible sur abonnement tous les 1ers et 15 de chaque mois

édito Les petites phrases

Publication : Lempickom sarl Rédactrice en chef : Hélène Manceron Secrétaire de rédaction : Laurent Thelliez Conception maquette : Stanislas Marçais Crédit photo : LNM Contact : helene.manceron@gmail.com

Par médias interposés, les candidats en lice pour la prochaine élection présidentielle ont entamé leur bataille de communication. Les mots comptant autant que l’argent, chacun aiguise ses « petites phrases » pour marquer les esprits. Quelles soient volontaires ou non, publiques ou confidentielles, elles sont souvent assassines et l’histoire témoigne de leur influence. Pouvant infléchir les résultats d’un vote ou motiver un mouvement social, elles deviennent l’objet d’une véritable expertise. Certains se souviennent peut-être du « dégraisser le mammouth » du ministre de l’Éducation nationale Claude Allègre dans les colonnes du Monde. Cette expression deviendra en 1997 l’emblème du conflit avec les enseignants. Aux USA, en juillet 2015, Donald Trump, alors candidat aux primaires républicaines américaines, déclarait quant à lui : « Je connais bien le monde ouvrier : j’en ai licencié des milliers. » N’oublions pas le célèbre « vous n’avez pas le monopole du cœur » de Valéry Giscard d’Estaing face à François Mitterrand en 1974, ni le « président du passif » que lui rétorquait ce dernier à l’élection suivante. Particulièrement appréciées des professionnels de la politique, de la communication et des médias, le poids des petites phrases s’accroît avec celui des techniques de communication et la peopolisation de la fonction politique. Grâce au numérique, leur notoriété devient exponentielle. Deux auteurs viennent d’en publier une compilation intitulée « Élysée Circus » et, annuellement, un prix est décerné par des journalistes aux plus appréciées d’entre elles. Mais la majorité de ces petites phrases est oubliée. C’est sans doute sur cette amnésie que comptait Travis Kalanick, le fougueux patron d’Uber, qui prétend conduire la communication de son entreprise comme une campagne électorale. En 2014, il déclarait : « Nous sommes engagés dans une bataille politique. Notre adversaire est un connard, qui s’appelle Taxi. » Deux ans plus tard, la multinationale cherche désormais à enrôler les « connards » ! Souhaitons-lui que les taxis aient la mémoire courte…

Hélène Manceron

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NUMÉRO 90 /// 15 SEPTEMBRE 2016 ers

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Directrice de Publication : Hélène Manceron

actu

Taxis/VTC/Loti : dans les starting-blocks

T

ronc commun de formation taxis-VTC, dépôt des contributions sur la création d’un fonds de garantie des taxis, développement du registre national des taxis, gouvernance … , plusieurs dispositions réglementaires concernant l’activité de transport public particulier de personnes devraient incessamment se mettre en place. En attendant l’examen de la proposition de loi relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification du secteur par le Sénat, taxis, VTC, Loti et plates-formes restent >>> suite de l’article page 4 sous tension.

réglementation

Loti, c’est du lourd !

tribune libre Uber à la ramasse sur les prix !

A

uteur du livre « Uber, la prédation en bande organisée », Laurent Lasne dénonce l’imposture de la multinationale. Attentif au développement du secteur, il décrypte et analyse en client averti la stratégie déployée par la plate-forme. Il partage l’anecdote d’une course taxi riche en enseignements.

Témoignage. >>> suite de l’article page 6

Laurent Lasne

S

ubdivision du Transport public particulier de personnes, les véhicules de transport léger dits « Loti » se sont multipliés dans les centres urbains à l’incitation des plates-formes de mise en relation et font désormais une concurrence violente aux taxis comme aux VTC. Leur nombre est difficilement chiffrable mais leur recadrage annoncé par la proposition de loi en cours devrait permettre de les conforter dans leur mission originelle. Détails. >>> suite de l’article page 5

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100% NEWS numéro 90 /// 15 septembre 2016

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interview

Taxis/VTC/Loti : dans les starting-blocks T fois de leur histoire, chauffeurs et repréandis qu’au Québec, pour la première

sentants de l’industrie du taxi font front commun afin de dénoncer le projet municipal de collaboration avec les applications de transport type Uber, qu’à Londres, le maire vient de présenter son nouveau plan pour le cadrage du transport de personnes dans la capitale britannique, le secrétariat d’État français aux Transports poursuit la feuille de route qu’il s’est fixée. Avant le passage en octobre au Sénat de la proposition de loi relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification du secteur, certaines mesures en passe d’être mises en œuvre ravivent les tensions.

Fonds de garantie Devant les réticences soulevées par la mise en place d’un fonds de garantie pour les taxis lors des échanges du groupe de travail dédié, Alain Vidalies avait invité en juillet dernier les différents acteurs à transmettre leurs propositions par écrit.

Ainsi, représentants des organisations de taxis, de VTC et des plates-formes avaient jusqu’au 15 septembre pour remettre leur copie au secrétaire d’État aux Transports.

Dénonçant unanimement le préjudice économique subi par les taxis à cause de la concurrence déloyale et refusant de financer eux-mêmes le rachat de leur licence, la majorité des organisations professionnelles ont communiqué leurs contributions notamment la CSAT, la FNDT, la FNTI, la CGT, LTDT, l’UNIT et l’UNT. « Dans une démarche de transparence » soulignée par Alain Vidalies, ces contributions devraient être prochainement mises en ligne sur le site du ministère chargé des Transports.

Formation Très attendus par les centres de formation et les candidats, les référentiels de formation pour les métiers des transports publics particuliers de personnes devraient être publiés d’ici la fin du mois.

Pour l’heure, formateurs et organisations professionnelles potassent les propositions déjà émises par le groupe de travail prévu dans la feuille de route gouvernementale.

Afin d’éviter toute tentative d’infléchir ces dispositions et accorder les délais nécessaires à leur mise en place, Alain Vidalies a exceptionnellement suspendu les examens VTC et taxis jusqu’à début novembre. En attendant que la proposition de loi Grand-

Janvier 2016. Les taxis manifestent et demandent au gouvernement d’être indemnisés afin de compenser l’inapplication des lois en vigueur.

guillaume visant à confier « l’organisa- Après sa rencontre début septembre avec tion de l’examen d’accès aux professions de Nicolas Rousselet, président de l’UNIT, taxis et VTC à l’Assemblée permanente des Union Nationale de l’Industrie du Taxi, chambres des métiers et de l’artisanat » passe la Commissaire européenne Violeta Bulc devant le Sénat, le nouveau semble décidée à travailler Afin de "garantir au secteur l'organidispositif affiche le souci de en transparence. Affichant sation d'examens fiables et sécurisés", « garantir au secteur l’orgaun goût prononcé pour les candidats devront attendre nisation d’examens fiables l’économie numérique, novembre 2016 avant de se présenter. et sécurisés » de manière elle souhaite prendre en nationale en s’appuyant sur compte les aspects sociaux des structures ayant la capacité d’accueil et fiscaux de la filière. Espérons que son des candidats de la filière. Une manière de engagement permettra d’empêcher l’émercalmer les ardeurs des plates-formes en mal gence de monopoles mondiaux qui, après de chair fraîche et prêtes à recruter coûte avoir éliminé toute concurrence à coups de que coûte pour enrayer leur turn-over. milliards, pourront saigner sans scrupule Europe clients et chauffeurs.

Sur le volet européen, le lobbying d’Uber HM reste quant à lui très actif et c’est avec Plus d'info : impatience que la multinationale attend "Feuille de route pour l'avenir du secteur du transport les retours des institutions communau- public particulier de personnes" - Point étape du taires sur les plaintes qu’elle a déposées. 07/07/2016

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réglementation

Loti, c’est du lourd ! « C

apacitaires », « VLTP», « TPRCP » chauffeur… Ils doivent détenir ou encore « Loti » – en référence à bord une copie conforme de à la Loi d’Orientation des Trans- la licence de transport intérieur ports Intérieurs de 1982 –, ces appellations dont ils bénéficient, pouvoir prédésignent le même régime juridique de senter le billet de groupe attestant transporteur. Créé à l’origine afin d’organi- des conditions de prise en charge ser le transport pour le compte des collec- des clients qu’ils transportent tivités et de l’État, il est aujourd’hui utilisé ainsi que souscrire une assurance pour exercer, en toute illégalité, une activité spécifique pour le transport de similaire à celle des VTC. Un dévoiement personnes à titre onéreux. réglementaire qui aiguise les tensions sur la Évolution réglementaire Bénéficiant de conditions d’accès voie publique. allégées par rapport à celles de Définition Le nombre de "Loti" aurait augmenté de 50 000 Sous la tutelle du ministère des Transports, taxi et même des VTC, les Loti véhicules entre 2009 et 2015 les « Loti » sont des véhicules légers de sont devenus les chouchous des transport occasionnel. Identifiables grâce applications numériques. Uber et consorts ont les chauffeurs Loti devront s’enregistrer comme à leur macaron – actuelBénéficiant de conditions d’accès donc incité leurs VTC. lement aisément falsiallégées , les "Loti" sont devenus les postulants à user Deux véhicules fiable –, ces transporteurs chouchous des applications numériques de ce régime Sans numerus clausus de véhicules affrétés ni respublics routiers collectifs de transport. juridique quitte triction géographique, la capacité Loti est également de personnes au sens des articles L. 3112-1 et suivants du code des à le détourner en pratique ! À compatible avec les cartes professionnelles de taxi et transports peuvent proposer une offre de défaut d’un recensement officiel, de VTC. Une faculté qui n’a pas échappé à Uber ! services « occasionnels » comme à l’occa- les estimations disponibles sont Soucieux de maintenir une flotte de chauffeurs qui sion d’une manifestation publique sportive vertigineuses : 70 000 véhicules ne cesse de s’effriter, la multinationale déploie de ou culturelle ainsi qu’organiser un service en 2015 avec une augmentation nombreux efforts pour inviter les taxis parisiens, régulier de transport de personnes répon- majoritairement concentrée en après les avoir dénigrés, à devenir ses partenaires. dant à un itinéraire et des horaires fixés à milieu urbain de 50 000 véhicules Une alternance des statuts difficile à mettre en pral’avance, tel le ramassage scolaire. Effec- entre 2009 et 2015 ! Concurrence tique car aux termes de l’article R 3122-7 du code des tuant leur service avec des véhicules de déloyale et risques de trouble transports, l’utilisation d’une voiture de transport moins de dix places, ils ont pour vocation à l’ordre public ont donc incité « munie de tout ou partie des équipements spéciaux gouverneà transporter des groupes constitués d’au le […] de nature à créer une confusion Interdits en milieu urbains, les chaufmoins deux personnes, à l’exclusion du ment à recadrer avec un véhicule de taxi » est interfeurs pourront poursuivre leur carrière cette activité. En dite. Alors, plutôt que de demancomme VTC ou taxi. attente d’examen der à ses chauffeurs multicartes de Les Loti sont reconnaissables à leur macaron par le Sénat, la proposition de loi s’équiper d’un second véhicule, Uber semble se satisobligatoire apposé sur le pare-brise. relative à la régulation, à la res- faire d’une simple dissimulation des équipements. ponsabilisation et à la simplifica- Une interprétation des textes qui risque de donner tion du secteur dissocie l’offre de lieu à de nouvelles batailles juridiques ! mobilité en milieu urbain et rural.

HM Soulignant la complémentarité Plus d’info : des Loti aux transports publics Code des transports /// article L. 3112-1 collectifs en ruralité, elle leur Code des transports /// article R 3122-7 interdit désormais tout activité dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants, à la grande déception des plates-formes. S’ils désirent exercer en milieu urbain,

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tribune libre

Uber à la ramasse sur les prix !

Laurent Lasne, auteur

E

n dépit d’une propagande outrancière et après De ce pas, nous nous rendons avoir enfariné les esprits sur son attractivité avenue de l’Opéra. En moins tarifaire, Uber ne tient pas les promesses claironnées d’une minute, nous hélons un depuis plusieurs années. Avec l’instauration du forfait taxi. Le chauffeur baisse la vitre « aéroport », les taxis sont désormais souvent plus passager. Je me fais confirmer le attractifs que la multinationale américaine, mais le tarif forfaitaire pour Orly : 35 € !

Mon ami s’engouffre dans le véhigrand public le sait-il ?

Le 4 septembre dernier, je buvais un verre cule. Je lui fais promettre lors de avec un ami au café Très Honoré, place du son prochain passage à Paris de Marché Saint-Honoré. À 19 h 15 vient le mieux s’informer des tarifs avant moment de nous séparer. Il lance l’appli- de choisir son mode de transport. cation Uber pour se rendre à Orly… Pre- Il vient de prendre conscience mière surprise, l’appli lui indique que son qu’entre la propagande d’Uber et la réalité commertarif est majoré « x 1,4 » et le Utilisant un coefficient multiplicateur ciale, il y a un pas, prix estimé qui apparaît sur qui évolue en fonction de la demande, voire un fossé. l’écran est de « 56 € ». L’ami les tarifs des applications numériques « OK, me dit-il. La en question est surpris car de transport apportent aux clients leur prochaine fois, je en ce dimanche après-midi, lot de surprises. serai plus attentif, tout est calme à Paris et la circulation fluide. Il jette un coup d’œil sur mais cette histoire de forfait aéroUberPool [le service de parcours partagé port, je n’étais pas au courant. » La de l’application] pour en avoir le cœur net. voiture démarre, clin d’œil appuyé Tarif affiché : « 43 € ». Je lui suggère alors du chauffeur… de laisser tomber pour prendre un taxi car On savait qu’Uber exerçait son le prix sera inférieur avec l’instauration activité à perte en la subventiondu forfait aéroport. Manifestement, à son nant pour proposer des prix inféregard, je comprends que mon ami provin- rieurs à ceux des taxis(1), mais cial ignore que les règles du jeu ont changé. l’entreprise a perdu de sa superbe.

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En tout cas, avec les forfaits vers les aéroports, les taxis redeviennent attractifs. Quels nouveaux arguments la multinationale prédatrice va-t-elle avancer pour se relancer ? Celui de proposer l’affiliation à sa plate-forme… aux taxis ? C’est du moins ce qu’Uber tente d’organiser en multipliant les initiatives ces dernières semaines pour attirer les chauffeurs de taxi. Signe sans doute qu’elle a des difficultés à recruter de nouveaux venus tout en reconnaissant implicitement le professionnalisme des taxis. Aux oublieux et aux amnésiques, on rappellera les propos de Travis Kalanick, le fondateur d’Uber, lorsque, plein de morgue, il pensait devenir l’Attila du taxi : « Nous sommes engagés dans une bataille politique.

Notre adversaire est un connard, qui s’appelle Taxi. » Un propos qui devrait refroidir les ardeurs de ceux qui seraient tentés de rejoindre la plate-forme californienne au moment où de nombreux chauffeurs VTC la quittent, lassés d’être considérés comme des « esclaves »…

(1)Selon

l’agence Bloomberg, Uber a perdu plus de 4 milliards de

dollars depuis son lancement en 2011.

"Uber, la prédation en bande organisée" Le Tiers Livre, 2015, 168p. 7€

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