NO 1041 FÉVRIER 2020 WWW.LOFFICIEL.COM
Lou Lampros
ISSN 0030.0403
Camille Rowe, Soko, Camille Jansen, Guillaume Henry, Louise Trotter Daniel Lee, Stella McCartney, Sébastien Meyer & Arnaud Vaillant
Lou Lampros en Celine par Hedi Slimane et Cartier.
NO 1041 FÉVRIER 2020 WWW.LOFFICIEL.COM
Camille Rowe Camille Rowe en Alaïa et Cartier.
ISSN 0030.0403
Lou Lampros, Soko, Camille Jansen, Guillaume Henry, Louise Trotter Daniel Lee, Stella McCartney, Sébastien Meyer & Arnaud Vaillant
NO 1041 FÉVRIER 2020 WWW.LOFFICIEL.COM
Soko et Indigo Blue
ISSN 0030.0403
Camile Rowe, Lou Lampros, Camille Jansen, Guillaume Henry, Daniel Lee, Louise Trotter, Stella McCartney, Sébastien Meyer & Arnaud Vaillant Soko en Dior.
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© 2019 Harry Winston SA. HARRY WINSTON EMERALD
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NO 1041 – FÉVRIER 2020
Édito page 26 Contributeurs page 28
Musique : le cow-boy de l’espace Honey Harper page 38 Un Jour Ailleurs se réinvente page 40
Anatomie d’un sac : Le 1955 Horsebit de Gucci page 30
News bijoux page 41
Tendance : Daguerréotypes page 31
Tendance bijoux page 42
Vanessa Seward & La Redoute page 32
Anatomie d’un bijou : La ligne Atelier Swarovski Fine Jewelry page 43
Cinéma : la révélation Thomasin McKenzie page 34 Expo : les dieux et déesses de Pierre & Gilles page 36 Cinéma : Renée Zellweger dans Judy page 37
PAGE 31
Tendance montres page 44 Anatomie d’une montre : La RM 037 Ladies de Richard Mille page 45 Joaillerie : les lumières de la ville selon Harry Winston page 46
PAGE 33
Photos Danyiel Lowden, Guen Fiore, Marili Andre, Lanvin, DR
Lanvin voyage dans le temps page 33
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NO 1041 – FÉVRIER 2020
MODE
MAGAZINE
Indigo mood page 48
Créateurs : les cinq fantastiques page 126
Rowe power page 60 Camille Jansen page 72 Lou Lampros page 84 Flamme de Pigalle page 100 Ski is the limit page 108
Tendance : le gaming inspire la mode page 138 Cinéma : Queen & Slim page 144 Décryptage : les weirdos page 150 Les céramiques Zanellazine page 156
BE WELL Le kit du Dr. Barbara Sturm page 161 Shopping : avis de grand froid page 162 Le Labo lance Baie 19 page 164 Lifestyle : l’hôtel Coucou à Méribel page 166 Horoscope page 175
PAGE 58
Photos Danyiel Lowden, LV x Lol
Dernières volontés page 176
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N° 1041 – FÉVRIER 2020
Directrice de la publication et de la rédaction Marie-José Susskind-Jalou Rédactrice en chef mode Vanessa Bellugeon
Directeur de création Jean-Marie Delbès
Rédactrice en chef magazine Adrienne Ribes
MODE
DÉPARTEMENT ARTISTIQUE
MAGAZINE
Market editor Laure Ambroise l.ambroise@jaloumediagroup.com Responsable shopping Samia Kisri s.kisri@jaloumediagroup.com Tél. 01 53 01 10 30
Consultante à la création Jennifer Eymère Graphistes Hortense Proust Louis Ziéglé Iconographe Irène Karabayinga
Rédactrice en chef adjointe Léa Trichter-Pariente lea@jaloumediagroup.com Editor-at-large Delphine Valloire d.valloire@jaloumediagroup.com
JOAILLERIE/HORLOGERIE
PRODUCTION
Emily Minchella emilyminchella@gmail.com Hervé Dewintre hervedewintre@hotmail.com
Joshua Glasgow j.glasgow@jaloumediagroup.com
SECRÉTARIAT DE RÉDACTION Secrétaire générale de la rédaction Jeanne Propeck j.propeck@jaloumediagroup.com Secrétaire de rédaction Françoise Emsalem
Mélanie Mendelewitsch melanie.mendelewitsch@gmail.com Rédactrice parfum Antigone Schilling aantigone3@aol.com
Photographes Marili Andre Sergio Corvacho Guen Fiore Daniyel Lowden Cécilia Poupon Rédacteurs et collaborateurs Sophie Abriat Virginie Beaulieu Mathilde Berthier Pauline Borgogno Chrystèle Dessoy Célestine Fanguin Simon Liberati Thibault de Montaigu Manon Renault Julien Welter Styliste Irene Barra
CASTING BEAUTÉ
CONTRIBUTEURS
CORRESPONDANTS
Jennifer Eymère j.eymere@jaloumediagroup.com Joshua Glasgow j.glasgow@jaloumediagroup.com
Editor-at-large Los Angeles Erica Pelosini Correspondante Rome Allegra Forneris Correspondant New York Jean-Claude Huon
LOFFICIEL.COM Rédactrice en chef Karen Rouach k.rouach@jaloumediagroup.com Community manager Caroline Mas c.mas@jaloumediagroup.com
LES PUBLICATIONS DES ÉDITIONS JALOU L’Officiel de la Mode, L’Officiel Hommes, Jalouse, La Revue des Montres, L’Officiel Voyage, L’Officiel Fashion Week, L’Officiel Art, L’Officiel Chirurgie Esthétique, L’Officiel Allemagne, L’Officiel Hommes Allemagne, L’Officiel Argentine, L’Officiel Autriche, L’Officiel Belgique, L’Officiel Art Belgique, L’Officiel Brésil, L’Officiel Hommes Brésil, L’Officiel Chine, L’Officiel Hommes Chine, Jalouse Chine, L’Officiel Corée, L’Officiel Hommes Corée, La Revue des Montres Corée, L’Officiel Inde, L’Officiel Indonésie, L’Officiel Italie, L’Officiel Hommes Italie, L’Officiel Kazakhstan, L’Officiel Hommes Kazakhstan, L’Officiel Lettonie, L’Officiel Liban, L’Officiel Hommes Liban, L’Officiel Lituanie, L’Officiel Malaisie, L’Officiel Maroc, L’Officiel Hommes Maroc, L’Officiel Mexique, L’Officiel Moyen-Orient, L’Officiel Hommes Moyen-Orient, L’Officiel Art Moyen-Orient, L’Officiel Pays-Bas, L’Officiel Hommes Pays-Bas, L’Officiel Pologne, L’Officiel Hommes Pologne, L’Officiel Russie, L’Officiel Singapour, L’Officiel Hommes Singapour, L’Officiel St Barth, L’Officiel Suisse, L’Officiel Hommes Suisse, L’Officiel Thaïlande, L’Officiel Hommes Thaïlande, L’Officiel Turquie, L’Officiel Hommes Turquie, L’Officiel Ukraine, L’Officiel Hommes Ukraine, L’Officiel USA, L’Officiel Hommes USA, L’Officiel Vietnam Lofficiel.com
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DIRECTION Gérants Coprésidents des boards exécutif et administratif Marie-José Susskind-Jalou Maxime Jalou Directeur général Directeur des boards exécutif et administratif Benjamin Eymère b.eymere@jaloumediagroup.com Directrice générale adjointe Membre des boards exécutif et administratif Maria Cecilia Andretta mc.andretta@jaloumediagroup.com Éditeur délégué Membre du board exécutif Emmanuel Rubin e.rubin@jaloumediagroup.com Assistante de direction Céline Donker Van Heel c.donkervanheel@ jaloumediagroup.com
PRODUCTION Directeur de la production Joshua Glasgow j.glasgow@jaloumediagroup.com
PUBLICITÉ Directeur commercial France Laurent Cantin l.cantin@jaloumediagroup.com Directrice commerciale L’Officiel Anne-Marie Disegni a.mdisegni@jaloumediagroup.com Directeurs de publicité Christelle Mention (joaillerie, beauté) c.mention@jaloumediagroup.com Marina de Diesbach (horlogerie) m.diesbach@jaloumediagroup.com Stéphane Moussin (opérations spéciales) s.moussin@jaloumediagroup.com Directrice commerciale - marché italien Carlotta Tomasoni c.tomasoni@jaloumediagroup.com Régie externe Mediaobs Sandrine Kirchthaler skirchthaler@mediaobs.com Traffic manager Adama Tounkara a.tounkara@jaloumediagroup.com
INTERNATIONAL ET MARKETING Management international et marketing Flavia Benda f.benda@jaloumediagroup.com International editorial et archive manager Nathalie Ifrah n.ifrah@jaloumediagroup.com Chef de produit diffusion Jean-François Charlier jf.charlier@jaloumediagroup.com Creative & Global Media Strategist Louis du Sartel l.dusartel@jaloumediagroup.com Assistant marketing Antoine Diot a.diot@jaloumediagroup.com Project Manager Sarah Hissine s.hissine@jaloumediagroup.com Ventes directes diffusion Samia Kisri s.kisri@jaloumediagroup.com
ADMINISTRATION ET FINANCES Tél. 01 53 01 10 30 Fax 01 53 01 10 40 Directeur administratif et financier Membre du board administratif Thierry Leroy t.leroy@jaloumediagroup.com Secrétaire général Membre du board administratif Frédéric Lesiourd f.lesiourd@jaloumediagroup.com Directrice des ressources humaines Émilia Étienne e.etienne@jaloumediagroup.com Responsable comptable & fabrication Éric Bessenian e.bessenian@jaloumediagroup.com Diffusion Lahcene Mezouar l.mezouar@jaloumediagroup.com Trésorerie Nadia Haouas n.haouas@jaloumediagroup.com
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FABRICATION Impression, suivi de fabrication et papier par Valpaco, 3, rue du Pont-des-Halles, 94150 Rungis Imprimé sur des papiers produits en Italie et Finlande à partir de 0 % de fibres recyclées, certifiés 100 % PEFC Eutrophisation : papiers intérieurs Ptot 0,006 kg/tonne et Ptot 0,003 kg/tonne ; papier couverture Ptot 0,006 kg/tonne PHOTOGRAVURE Cymagina DISTRIBUTION MLP ÉDITÉ PAR LES ÉDITIONS JALOU SARL au capital de 606 000 € représentée par Marie-José Susskind-Jalou et Maxime Jalou, co-gérants, filiale à 100 % de la société L’Officiel Inc. S.A.S. Siret 331 532 176 00095 Siège social : 128, quai de Jemmapes, 75010 Paris Tél. 01 53 01 10 30 – Fax 01 53 01 10 40 Dépôt légal janvier 2020 N° de commission paritaire 0323 K 80434 ISSN 0030.0403 Printed in EU/Imprimé en UE FONDATEURS Georges, Laurent et Ully Jalou (†) DIRECTRICE DE LA PUBLICATION Marie-José Susskind-Jalou
ÉDITO PAR ADRIENNE RIBES
Il est amusant de tomber sur une phrase et que, tout à coup, elle devienne l’objet d’une réflexion. Pourquoi celle-là plutôt qu’une autre ? Pourquoi choisir d’en parler dans un édito ? Simplement parce que sa pertinence fait écho en nous. C’est ce qui s’est passé un dimanche matin de janvier. Lorsque la citation du poète allemand Goethe s’est imposée comme une évidence. Évidence pour ce numéro de février qui ouvre une nouvelle saison, et fait la jonction entre avant et après. Face à ces moments de transition, il est capital de faire des choix. Comme une forme de courage : affirmer ses opinions est un besoin vital. La phrase de Goethe “si je t’aime en quoi cela te regarde-t-il” est donc plus que jamais d’actualité. Oser dire tout haut ce que l’on souhaite, au risque d’être critiqué. Agir par subjectivité et l’assumer. Voilà ce que nous mettons dans ce numéro, lorsque nous demandons à l’écrivain Simon Liberati d’écrire le portrait de notre cover girl Camille Rowe. Mannequin devenue comédienne, la jolie Frenchie, parfaite ambassadrice de l’élégante modernité de la maison Cartier, s’impose comme un talent à suivre. On aime cette fille, on aime la plume de cet écrivain, tout comme les cinq fantastiques directeurs artistiques de maisons de mode que nous décidons, de façon totalement subjective encore, de mettre en lumière. Il faut aimer et s’engager, et peu importe le reste.
Contributeurs
GUENDALINA FIORE Photographe Collaboratrice régulière d’i-D, Metal, Jalouse, sujet d’exposition à la Somerset House et au BASE Milano, Guen Fiore s’est d’abord formée à l’ingénierie à Rome, avant de se lancer, en direct de Londres, dans la photographie. Autodidacte, elle cultive depuis son enfance italienne à Pescara un goût prononcé pour le portrait.
Par Célestine Fanguin
MARILI ANDRE Photographe Énergie vitale, second degré… Bienvenue dans le monde de Marili Andre qui immortalise dans ce numéro les cool girls Lou Lampros et Soko. Collaboratrice de CR Fashion Book et Interview Magazine, la Londonienne oscille entre scènes de mode, scènes de la vie quotidienne et portraits. Elle aime les origamis, le dessin et, par-dessus tout, son saxophone argent.
PhotoS DR
PAULINE BORGOGNO Après des études en design de mode, Pauline se lance dans l’écriture, sa vocation. Ayant fait ses armes auprès de Carine Roitfeld ainsi qu’au magazine Mastermind, elle cultive son goût pour l’art, la mode et la danse. Son expérience de designer l’amène à comprendre le vêtement de manière sensible comme technique. Aujourd’hui, son double cursus lui permet d’allier ses passions, l’écriture et le stylisme pour les magazines L’Officiel et Jalouse.
IRENE BARRA Styliste Irene débute sa carrière de styliste à Milan, au sein de la rédaction de Elle Italie. Puis elle part à Londres, du côté de North East, où elle cultive comme free-lance son esprit d’équipe : “J’aime rencontrer des photographes, dénicher de nouveaux talents, des jeunes designers, caster des gens dans la rue…” À ses heures pas si perdues, elle fréquente les marchés italiens locaux et les boutiques de charité anglaises.
02 05 Avril Grand Palais 2020 www.artparis.com Un regard sur la scène française : histoires communes et peu communes
Étoiles du Sud :
une exploration de la péninsule ibérique
Art moderne + Contemporain
193 Gallery (Paris) | 31 Project (Paris) | 313 Art Project (Paris/Séoul) | Galerie 8+4 – Paris
(Paris) | A. Galerie (Paris) | A&R Fleury (Paris) | A2Z Art Gallery (Paris/Hong Kong) | AD Galerie (Montpellier) | Aedaen Gallery (Strasbourg) | Galería Albarrán Bourdais (Madrid) | Alzueta Gallery (Barcelone) | Galerie Andres Thalmann (Zurich) | Ana Mas Projects (Barcelone) | Galerie Ariane C-Y (Paris) | Artco Gallery (Aachen/Le Cap) | Artkelch (Fribourg-en-Brisgau) | Art Sablon (Bruxelles) | Galerie Arts d’Australie – Stéphane Jacob (Paris) | Art to Be Gallery (Lille) | La Patinoire Royale – Galerie Valérie Bach (Bruxelles) | Galerie Cédric Bacqueville (Lille) | Galerie Ange Basso (Paris) | Galerie Belem/Albert Benamou, Barbara Lagié, Véronique Maxé (Paris) | Galerie Renate Bender (Munich) | Galerie Berès (Paris) | Galerie Claude Bernard (Paris) | Galerie Thomas Bernard – Cortex Athletico (Paris) | Galerie Bert (Paris) | Galerie Bessières (Chatou) | Galerie Binome (Paris) | Bogéna Galerie (Saint-Paul-de-Vence) | Ségolène Brossette Galerie (Paris) | Pierre-Yves Caër Gallery (Paris) | Galerie Capazza (Nançay) | Galerie Chauvy (Paris) | Galerie Chevalier (Paris) | Christopher Cutts Gallery (Toronto) | Creative Growth (Oakland) | David Pluskwa Art Contemporain (Marseille) | Galerie Michel Descours (Lyon/Paris) | Dilecta (Paris) | Galería Marc Domènech (Barcelone) | Galerie Dominique Fiat (Paris) | Double V Gallery (Marseille) | Galerie Dutko (Paris) | Galerie Jacques Elbaz (Paris) | Galerie Eric Mouchet (Paris) | Espace Meyer Zafra (Paris) | Galerie ETC (Paris) | Galerie Valérie Eymeric (Lyon) | Lukas Feichtner Galerie (Vienne) | Flatland (Amsterdam) | Galeria Foco (Lisbonne) | Francesca Antonini Arte Contemporanea (Rome) | Freijo Gallery (Madrid) | Galerie Pascal Gabert (Paris) | Galerie Claire Gastaud (Clermont-Ferrand/Paris) | Galerie Louis Gendre (Paris/Chamalières) | Gimpel & Müller (Paris) | Galerie Michel Giraud (Paris/Luxembourg) | Gowen Contemporary (Genève) | Galerie Philippe Gravier (Paris/Saint-Cyr-en-Arthies) | H Gallery (Paris) | H.A.N. Gallery (Séoul) | Galerie Ernst Hilger (Vienne) | Galerie Eva Hober (Paris) | Huberty & Breyne Gallery (Bruxelles/Paris) | Galerie Hurtebize (Cannes) | Galerie Jeanne Bucher Jaeger (Paris) | Galerie Koralewski (Paris) | Espace L & Brisa Galeria (Genève/Lisbonne) | Galerie La Forest Divonne (Paris/Bruxelles) | Galerie Lahumière (Paris) | Galerie La Ligne (Zurich) | Lancz Gallery (Bruxelles) | Alexis Lartigue Fine Art (Paris) | Anna Laudel (Istanbul/Düsseldorf) | Galerie Jean-Marc Lelouch (Paris) | Galerie Françoise Livinec (Paris/Huelgoat) | Galerie Loft (Paris) | Victor Lope Arte Contemporáneo (Barcelone) | Galerie Daniel Maghen (Paris) | Kálmán Makláry Fine Arts (Budapest) | Galerie Mark Hachem (Paris) | Galleria Anna Marra (Rome) | Maurice Verbaet Gallery (Knokke Le Zoute/Berchem) | Galerie Minsky (Paris) | Galerie Modulab (Hagondange/Metz) | Galerie Frédéric Moisan (Paris) | Mo J Gallery (Séoul/Busan) | Galerie Lélia Mordoch (Paris/Miami) | Galeria MPA (Madrid) | Galerie Najuma Fabrice Miliani (Marseille) | Galerie Nec Nilsson et Chiglien (Paris) | Niki Cryan Gallery (Lagos) | Galerie Nathalie Obadia (Paris/Bruxelles) | Galerie Oniris – Florent Paumelle (Rennes) | Opera Gallery (Paris) | Orbis Pictus (Paris) | P gallery sculpture (Athènes) | Galerie Paris-Beijing (Paris) | Galerie Perahia (Paris) | Pigment Gallery (Barcelone) | Galerie Polaris (Paris) | Galerie Provost–Hacker (Lille) | Galerie Rabouan Moussion (Paris) | Raibaudi Wang Gallery (Paris) | Rebecca (Paris/Abidjan) | J.-P. Ritsch-Fisch Galerie (Strasbourg) | Galeria São Mamede (Lisbonne) | Galerie Sator (Paris) | Galerie Brigitte Schenk (Cologne) | School Gallery/Olivier Castaing (Paris) | Septieme Gallery (Paris) | Gallery Simon (Séoul) | SIRIN Copenhagen Gallery (Frederiksberg) | Galerie Slotine (Paris) | Galerie Véronique Smagghe (Paris) | Caroline Smulders & Galerie Karsten Greve (Paris) | Michel Soskine Inc. (Madrid/New York) | Gallery SoSo (Heyri) | Space 776 (Brooklyn) | SPARC* Spazio Arte Contemporanea (Venise) | Structura Gallery (Sofia) | Galerie Taménaga (Paris/Tokyo/Osaka) | Templon (Paris/Bruxelles) | Luca Tommasi Arte Contemporanea (Milan) | Galerie Traits Noirs (Paris) | Galerie Patrice Trigano (Paris) | Galerie Univer/Colette Colla (Paris) | Un-Spaced (Paris) | Galerie Vallois (Paris) | Galerie Vazieux (Paris) | Viltin Gallery (Budapest) | Galerie Wagner (Le Touquet-Paris-Plage/Paris) | Galerie Olivier Waltman (Paris/Miami) | Galerie Esther Woerdehoff (Paris) | Wunderkammern (Rome/Milan) | Galerie XII (Paris/Los Angeles/Shanghai) | Galerie Younique (Lima/Paris) | Galerie Géraldine Zberro (Paris) | Galerie Zink Waldkirchen (Waldkirchen).
Liste des galeries au 9/01/2020
Hossack Art Gallery (Londres) | Red Zone Arts (Francfort-sur-le-Main) | Galerie Richard (Paris/New York) | Galerie Véronique Rieffel
ANATOMIE D’UN SAC
Le 1955 Horsebit de Gucci À travers ce nouveau modèle, Alessandro Michele revisite les codes esthétiques de la maison italienne.
Beau comme l’Antique C’est à l’occasion de sa collection croisière dévoilée dans la Ville éternelle, au sein du Tabularium, siège des archives de la Rome antique, que la presse a pu découvrir le sac Gucci 1955 Horsebit. Le lieu n’a bien sûr par été choisi par hasard par Alessandro Michele. Amoureux de l’Antiquité et d’archéologie depuis sa plus tendre enfance, il se rendait régulièrement dans les plus beaux musées de Rome avec son père. Philosophie créative Depuis sa nomination en janvier 2015 en tant que directeur artistique de la maison Gucci, Alessandro Michele ne cesse de revisiter le passé. Il appelle cela la “reconception”, notion chère à l’historien de l’art Johann Joachim Winckelmann, qui consiste à imiter intentionnellement une chose du passé. On doit à ce
personnage d’avoir référencé la Villa Albani, demeure du cardinal du même nom, comme l’édifice marquant la transition entre le baroque et le néoclassicisme ; celui-ci accueille des parterres à la française, plusieurs temples et un simulacre de ruine. C’est ici, dans la galerie Léda, qu’a été shooté le look-book de la collection Gucci par le réalisateur et photographe grec Yorgos Lanthimos. Tous les codes du it-bag Le sac Gucci 1955 Horsebit reprend les codes d’inspiration
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équestre de la marque, avec un mors composé de deux anneaux et d’une barre, ainsi que le format du modèle à bandoulière (réglable) lancé il y a plus de soixante ans. Dans la collection 1955 Horsebit, on retrouve également un sac seau et une sacoche souple inspirée du modèle des années 50, déclinés dans quatre couleurs de cuir, en toile Original GG, et également en peaux exotiques (serpent, autruche et crocodile). Par Laure Ambroise Photo Cécilia Poupon
TENDANCE
Daguerréotypes À l’opposé du maniérisme, piochant son génie dans la rue, ce printemps-été surfe sur la (Nouvelle) Vague Varda-Demy.
Photo DR
Si l’on pouvait vivre comme Agnès, chante aujourd’hui Vincent Delerm. Courir à plat de la rue Daguerre au boulevard Raspail. Bâtir des châteaux sur la plage de Monsieur Hulot, à Pornichet. Chantonner Michel Legrand en robe trapèze sous un soleil jaune citron. “Je n’ai jamais eu de problème d’inspiration. Dès que je n’avais pas d’idée, je descendais dans la rue, j’allais vers les autres”, racontait la réalisatrice Agnès Varda dans une interview à Libération. À l’époque, la jeune génération abat les murs des studios de cinéma pour battre le pavé. Elle reconnecte la mode avec le quotidien, prône le plaisir simple de s’habiller. Le vêtement comme un jeu ? La rumeur court encore, tant les créateurs du printemps-été 2020 invoquent la Nouvelle Vague. Chez Chanel, Virginie Viard s’en réclame ouvertement : “Je voyais des silhouettes marchant sur les toits. J’ai pensé à Kristen Stewart jouant Jean Seberg et à toutes les actrices que Gabrielle Chanel habillait à l’époque.” Parmi elles ? Feue Anna Karina, que Coco Chanel aura baptisée pour le septième art, et qu’Agnès Varda aura filmée dans Cléo de 5 à 7. La frange folle, la jupe au-dessus du genou, le cardigan nonchalant et la Mary-Jane vernie… Sous des dehors Paris “Campagne Première”, ce tableau couve une débauche d’idées nouvelles, une soif de vivre, un optimisme. Entre chasuble bonbon sous un imper’ de prof, jupe tartan pré-punk et chemisier bénitier, il y a du Demy chez le Miu Miu d’aujourd’hui. Par Mathilde Berthier
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Silhouette Chanel printemps-été 2020.
Redoutablement chic Avec sa deuxième collection pour La Redoute, Vanessa Seward imagine une série de standards ultra-désirables et faciles à porter. Élégants, tout simplement.
L’allure de “la fille Vanessa Seward” n’est plus à présenter. Saine, belle, sophistiquée mais juste ce qu’il faut. Un peu rétro aussi. Avec ce je-ne-sais-quoi qui fait la réputation de la French girl dans le monde. Des modèles “pour la vie quotidienne” comme aime dire la créatrice. Et c’est tout ce qu’on retrouve dans cette deuxième collection cosignée avec La Redoute. Si l’association peut sembler étonnante, elle révèle en réalité une parfaite harmonie, une complémentarité, bénéfique pour les deux protagonistes. Composée en trois chapitres, cette nouvelle ligne (celle de l’automne-hiver avait remporté un succès fou), très complète (souliers, sacs et ceintures sont aussi de la partie), livre, au fil de la saison, une série d’incontournables à prix doux. Dévoilée dès le 28 janvier, la première partie, teintée de soleil et de lumière, met en scène les standards de la créatrice : petit blouson en jean lavé fourré de laine blanche, chemise bleue à col et poignets blancs (sa signature), combinaison en velours milleraies bleu dragée. Viennent aussi les robes, blouses et jupes aux imprimés blé imaginés par l’artiste Jason Glasser. Costume blanc en coton simple ou poncho frangé pour les grands soirs d’été sont autant d’options élégantes et cool. Et pour parfaire ces silhouettes efficaces, une paire de sandales bleu, blanc, rouge, à la semelle immaculée. On pense alors à Anna Karina ou Bianca Jagger. Et on n’oublie jamais ce que nous dit Vanessa Seward : “Je veux que ce soit sans fioritures mais sans banalité… Je veux que ce soit juste.” Et ça l’est ! Par Adrienne Ribes
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Photo Quentin de Briey
STYLE
STYLE
Voyage dans le temps
Photo Lanvin
À l’occasion du 130e anniversaire de Lanvin, qui sera célébré lors d’une exposition à Shanghai, Bruno Sialelli, le directeur artistique de la célèbre maison, imagine une collection capsule.
Quelle meilleure occasion pour rendre hommage à la créativité de Jeanne Lanvin… Bruno Sialelli, nommé directeur artistique de la marque en janvier 2019 (après avoir été en charge des lignes masculines de Loewe) fête en beauté l’anniversaire de la plus ancienne maison de couture française avec la capsule 130th Anniversary. Celle-ci est composée d’une minicollection baptisée Réédition et composée de trois pièces d’exception signées Jeanne Lanvin : l’ensemble jour Guilhem d’inspiration Art déco (daté hiver 1920, réédité en 18 exemplaires),
la blouse en crêpe de soie et sequins dorés (datée été 1927, rééditée en 18 exemplaires) et le manteau Minuit en broderies de Bakélite (daté été 1936, réédité en 13 exemplaires). Certainement l’un des plus beaux hommages que pouvait rendre Bruno Sialelli, puisqu’aucun de ces modèles n’a été modifié – du jamais vu dans le monde de la mode. Chaque pièce sera proposée avec sa carte numérotée, ainsi que la photographie des modèles et des dessins d’origine. En parallèle, Bruno Sialelli a choisi avec soin quelques
détails exhumés des archives de la marque, comme un imprimé d’inspiration asiatique des années 20, le dessin de “l’Ange” de la fin des années 30, le bouchon doré du parfum Arpège, le logo originel “Jeanne Lanvin”, et bien d’autres choses encore. Ils ornent de longues robes en jersey, des T-shirts, des jeans… Au total, 1 000 pièces de mode et 800 accessoires sont à découvrir sans plus attendre sur le site de la marque. Par Laure Ambroise
Photo 20 th Century Fox/Walt Disney Studios Motion Pictures 2019
CINÉMA
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CINÉMA
La révélation McKenzie Elle apporte un supplément d’âme aux gags provocateurs de Jojo Rabbit, la comédie dont tout le monde parle. Portrait de Thomasin McKenzie, une jeune surdouée en pleine ascension.
Imaginez une farce entre Chaplin et Mel Brooks dans laquelle un gamin de 10 ans, Jojo Rabbit, est un membre zélé des jeunesses hitlériennes dont l’ami imaginaire n’est autre que le Führer. Jojo va pourtant se lier d’amitié avec Elsa, une juive cachée dans son grenier, à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Contre toute attente, Jojo Rabbit est une réussite. Cette satire du NéoZélandais Taika Waititi allie l’humour, l’élégance et le cœur, notamment grâce au jeu de sa compatriote, Thomasin McKenzie, dont le personnage d’Elsa rend un hommage direct à Anne Frank : “Taika et moi, nous voulions qu’elle soit une victime qui, dans l’adversité, montre son courage et sa force. Je ne l’ai pas jouée de manière comique, tant son histoire est grave, mais le film cherche effectivement à ridiculiser le fascisme. En plus, on l’a tourné à Prague, dans des studios bâtis à l’origine pour servir de décors aux films de propagande nazie. La boucle est bouclée.” À 19 ans, Thomasin McKenzie possède à l’évidence une maturité qui s’explique par son appartenance à une dynastie de
comédiens qui lui ont appris à ne pas se faire trop d’illusions sur leur métier. Elle habite avec eux dans la grande demeure familiale de Wellington : “Au début, ce métier m’effrayait. Imaginez qu’à 91 ans, ma grand-mère avec qui je partage une aile de la maison continue de jouer !” De sa voix timide, Thomasin laisse pourtant filtrer une certaine force de caractère et un goût pour l’endurance. La preuve : la jeune comédienne qui, comme tous les acteurs dans son pays, a fait une apparition dans la trilogie du Hobbit, de Peter Jackson, et qui admire Jane Campion (elle a même tourné un court-métrage avec la fille de la cinéaste, Alice Englert), a enchaîné pas moins de quatre films très attendus cette année. Elle le doit à la réalisatrice Debra Granik, qui l’a révélée en 2018 dans Leave No Trace, où elle incarnait la fille d’un vétéran traumatisé d’Irak. La dernière fois que cette cinéaste américaine a déniché une inconnue, c’était Jennifer Lawrence dans Winter’s Bone (2010). Le parallèle semble inévitable : “Sans Leave No Trace, je ne serais pas là devant vous. C’est d’autant plus gratifiant
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que c’est un film très calme, sans personnages antagonistes ni effets spéciaux, où chacun essaie juste de faire de son mieux.” Après The King pour Netflix, une adaptation shakespearienne avec Timothée Chalamet, Robert Pattinson et Lily-Rose Depp, on reverra Thomasin dans True History of the Kelly Gang, avec Nicholas Hoult, un western dédié au Jesse James australien Ned Kelly, auparavant incarné par Mick Jagger et Heath Ledger. Enfin, elle vient de terminer Last Night in Soho, un croisement entre Répulsion, de Roman Polanski, et Ne vous retournez pas, de Nicolas Roeg, avec Matt Smith et Anya Taylor-Joy. C’est le moment ou jamais de faire un break pour cette fan de Miyazaki : “Je n’ai qu’un souhait maintenant, retourner dans le bush me promener avec mon caniche. Il s’appelle Totoro.” Par Julien Welter Jojo Rabbit, de Taika Waititi, avec Roman Griffin Davis, Thomasin McKenzie, Scarlett Johansson… Sortie le 29 janvier 2020.
EXPOS
Dieux et déesses Ce printemps, deux belles expositions sont consacrées aux passions fertiles du duo d’artistes Pierre et Gilles : l’une sur leurs collaborations avec le monde de la musique et l’autre sur leur amour infini du cinéma.
noms unis d’un petit cœur naïf. À la Philharmonie de Paris, l’exposition “La fabrique des idoles” explore leur amour pour la musique pop (de “populaire”). On y croise Nina Hagen en Betty Page, Clara Luciani, Madonna, Kylie Minogue ou Iggy Pop. Dans un cadre bijou, Lio (en photo ci-dessus) tient un cœur ardent et pleure des larmes de cristal dans La Madone au cœur blessé (1991) qui fait partie de la collection François Pinault. Une pièce entière est consacrée à une des “idoles” préférées, Sylvie Vartan : une installation
intitulée La Chambre de Sylvie, avec objets, posters, coussins à effigie et néons roses. Une autre installation recrée leur fameux studio, mi-autel mi-cabinet de curiosités fou, encombré de fleurs en plastique, de guirlandes électriques, de gris-gris, de jouets ou de Polaroid de leurs années Palace. À Cannes, l’exposition “Le goût du cinéma” présente 40 œuvres de ces deux artistes cinéphiles, avec, cette fois, des acteurs ou des références à des films cultes comme le Pink Narcissus, de James Bidgood. Catherine
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Deneuve y côtoie un faux Depardieu en Solex époque Les Valseuses ou Béatrice Dalle en sorcière entourée d’une giclée de sang sculpturale. Car il ne faut jamais oublier la part d’ombre derrière le sourire, le strass et les paillettes. Par Virginie Beaulieu Expositions “La Fabrique des idoles” à la Philharmonie de Paris, Cité de la Musique, jusqu’au 23 février 2020, et “Le Goût du cinéma”, au centre d’art La Malmaison à Cannes jusqu’au 26 avril 2020.
Photo Collection François Pinault
C’est au milieu d’une fête, inoubliable bien sûr, pour l’ouverture de la boutique Kenzo place des Victoires en 1976, qu’ils ont eu le coup de foudre l’un pour l’autre. Depuis, Pierre Commoy, photographe, et Gilles Blanchard, aux pinceaux ou à l’aérographe, ont créé un univers à part entière, au kitsch revendiqué, au romantisme assumé, où ils célèbrent avec amour des icônes pop cosmiques par des photographies grandeur nature inspirées des images pieuses de tous pays, signées de leurs
CINÉMA
Supernova
Photo Pathe UK/Twentieth Century Fox/BBC Films 2019
Justement récompensée d’un golden globe en janvier, Renée Zellweger incarne avec intensité une des plus grandes stars de Hollywood, Judy Garland, qui brille de ces derniers feux en 1969…
trente ans plus tard, Le Magicien d’Oz, son oscar et son arc-en-ciel sont bien loin et Judy paie très cher l’addition d’une vie partie en lambeaux devant les projecteurs. Renée Zellweger campe cette Judy usée sous son maquillage, alcoolique, souvent boudeuse et les bras ballants comme une gamine, une ex-diva qui ressuscite – parfois – en montant sur scène pour chanter comme si sa vie en dépendait. En 1961, son album live sidérant Live At Carnegie Hall lui a valu un grammy award et a donné à son large public la preuve de son génie de la scène. Car ce qui a toujours fait la différence, c’est sa voix, avec son vibrato chaud, unique et ses basses profondes, une voix rare de contralto (comme aujourd’hui celles d’Adele ou de Lady Gaga) qui fait pleurer les foules. Là, Renée Zellweger, même si
Biopic crépusculaire, Judy montre l’explosion, très brillante, d’une étoile immense : les derniers mois de la vie d’une légende hollywoodienne, Judy Garland. Enfant de la balle, elle est signée par la MGM à 13 ans. Là, elle est “inventée” par l’ogre Louis B. Mayer qui la choisit en 1938 pour incarner, à 16 ans, Dorothy, l’héroïne aux escarpins rouges à paillettes du Magicien d’Oz. “La petite bossue” comme la surnommait impitoyablement le producteur, doit travailler sans relâche, est bourrée d’amphétamines et de barbituriques pour rester efficace, subit une diète drastique pour ne pas grossir. À 17 ans, elle décroche son premier oscar. Mais elle ne se remettra jamais vraiment de ce contrat faustien qui a fait basculer sa vie sur la route en briques jaunes de la gloire. Quand l’histoire commence,
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elle chante bien (voir Chicago) et même si elle joue une Judy en toute fin de vie pendant l’hiver 1968, ne peut encaisser la comparaison avec l’originale. Pour le reste, l’actrice se fond dans ce personnage qui lutte en permanence pour survivre à ses doutes, ses mariages et ses addictions, pour voir ses enfants, pour avoir le droit à un peu de répit et surtout pour garder ce public qui la fait exister “en grand”, exister tout court. Ce chant du cygne devient là émouvant, écho tragique à ces mots poignants que Judy Garland avait un jour lancés : “Je peux vivre sans argent mais je ne peux pas vivre sans amour.” Judy, de Rupert Goold, avec Renée Zellweger, Jessie Buckley, Finn Wittrock… Sortie le 26 février 2020. Par Virginie Beaulieu
MUSIQUE
Psychédélique western Avec son premier album Starmaker, le cow-boy de l’espace Honey Harper réussit l’exploit de fusionner la country des seventies telle que la chantait Willie Nelson et l’ambient expérimentale chère à Brian Eno.
la bande originale d’un documentaire d’avant-garde sur les missions sur la Lune). On retrouve donc dans la musique de Honey Harper ces deux éléments presque magiques : la fameuse pedal steel guitar et le synthétiseur Yamaha DX7 des années 80. Son meilleur instrument n’en reste pas moins sa voix, rauque et caressante à la fois, dont il fait jouer les falsettos en acrobaties délicates à la manière du Brian Wilson de l’époque Beach Boys. Mais c’est évidemment à l’icône de la cosmic country Gram Parsons, aussi poète que rock star à la classe sidérante, qu’on pense surtout en écoutant Honey Harper. Comme Parsons, il épure ses textes pour les rendre universels, croise les genres avec bonheur et embrasse un psychédélisme onirique pour arriver à faire aimer la country à ceux qui ne sont pas fanatiques du genre. Lui-même décrit sa musique comme de la “glam country”, mais plus qu’à Ziggy Stardust ou à T-Rex, ces ballades, véritables trips à la belle étoile sur la Route 66, mériteraient l’étiquette plus stellaire de “space country”. Album Starmaker de Honey Harper, sortie le 6 mars 2020 (PIAS). Par Virginie Beaulieu
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Photo © Tonje Thilesen
Après le cow-boy masqué queer Orville Peck et ses ballades sensuelles en 2019, voici un nouveau venu qui prêche pour une country tout aussi décalée : Honey Harper. De son vrai nom William Fussell, ce blond platine porte le make-up à strass et le Stetson comme personne. Né en Géorgie dans le sud des États-Unis, il grandit entre la Floride et Atlanta avant d’atterrir à Londres. Ses influences remontent à son enfance où il écoute la musique qu’aime son père, fan de country et imitateur d’Elvis, sa mère qui préfère le disco et ses paillettes et les chœurs de l’église baptiste locale. Après avoir versé dans un premier temps dans la musique expérimentale pop, il opère en 2017 un retour aux sources en écrivant des chansons qui ne pouvaient être que country, avec sa femme, Alana Pagnutti, une curatrice et spécialiste de John Cage qu’il surnomme Bambi. Parmi les collaborateurs sur cet album, la crème de la pop électro inspirée avec Sébastien Tellier, Austra et John Kirby. Mais sa plus grande influence pour Starmaker est une chanson de Brian Eno, Weightless, une ballade instrumentale en apesanteur enregistrée au Canada en 1982 sur l’album Apollo (à l’origine conçu comme
STYLE
Envie d’ailleurs La marque Un Jour Ailleurs évolue, repense son image, s’attachant à séduire des femmes multiples et toujours en mouvement, au sein de boutiques à l’esprit très couture.
Un luxe discret Les nouvelles boutiques de la marque ont d’abord été dévoilées au Luxembourg, puis à Paris, rue Tronchet et avenue Victor-Hugo, entre autres. Plus que des boutiques, ces nouveaux écrins sont une invitation à la déconnexion, le temps d’un achat personnalisé. Modernes et chaleureux, ils associent parquet en chêne et portants de style industriel. Ici et là sont présentés des livres de voyages, des photos vintage… Quant aux cabines d’essayage, elles arborent un style très couture.
Un twist mode La mode Un Jour Ailleurs s’articule autour des indispensables du vestiaire féminin, à travers des collections élégantes et faciles à vivre, mais elle cherche également à séduire une clientèle millennial avec de nouvelles associations de couleurs et des looks forts. Un twist créatif, inattendu, pour mieux coller aux envies de modernité des femmes d’aujourd’hui. Par Laure Ambroise
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Photo Un Jour Ailleurs 2019
Une femme plurielle Libres, féminines, indépendantes, business woman, mères de famille : les femmes Un Jour Ailleurs sont des personnalités “plurielles”, qui aiment la mode sans pour autant la suivre aveuglément. C’est à travers ce prisme que la marque s’adresse à elles avec de nouvelles campagnes publicitaires mettant en scène des femmes complices.
BIJOUX
Histoires et symboles
1. À la lettre Imaginée en 2014 par Francesca Amfitheatrof, la collection T s’articule autour d’une lettre majuscule dont les traits servent de détonateur à une joaillerie de caractère, d’une grande beauté formelle. Cette année, la maison new-yorkaise réinterprète ce motif par le biais de couleurs et de pierres inédites. Nouveaux pendentifs, bracelets et bagues disponibles en or jaune et en or rose sertis de nacre blanche, de turquoise, d’opale rose et d’onyx noir.
Variations précieuses autour d’une lettre, de motifs animaliers, de signes codés… Les joailliers ne tarissent pas d’imagination quand il s’agit de faire rêver.
Photos © Francesca Amphitheatrof © Hint © Harumi x Goossens. Goossens Paris
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2. Trait d’union Virginie Parent, créatrice de Hint, a eu la merveilleuse idée de s’approprier le langage des signaux intermittents qui caractérisent le code Morse International pour composer des
bijoux à messages, dignes et modernes descendants des acrostiches du xixe siecle. Le tiret est figuré par un diamant baguette, le point par un brillant. C’est personnalisable à l’infini, les finitions sont parfaites… un vrai coup de cœur ! 3. Le dernier cri Goossens, le bijoutier fétiche de Coco Chanel, et Harumi Klossowska de Rola, la fille de Balthus, renouvellent leur fructueuse collaboration et délivrent un deuxième acte qui met en lumière le lion et le serpent. Douze bijoux en laiton doré 24 carats, sculpturaux et baroques, bruts et précieux, qui réenchantent avec bonheur l’art du bestiaire. Par Hervé Dewintre
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BIJOUX
Précieux pendentifs Jouant la monochromie, ils n’en sont pas moins éclatants. De quoi pavoiser tout l’hiver.
1. Chaumet Pendentif Laurier en or blanc pavé de diamants taille brillant. 2. Graff Pendentif Solar en or blanc et diamants blancs.
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3. David Morris Pendentif en or blanc et diamants blancs, collection Rose Cut Forever. 4. Cartier Collier Panthère de Cartier en or gris, laque noire, émeraudes, onyx et diamants. 5. Boucheron Pendentif Honu la Tortue en or rose serti d’un quartz rose sculpté et de diamants. 6. Buccellati Pendentif Cnosso en or blanc et or jaune gravés, diamants blancs et un diamant blanc Buccellati cut. 7. Van Cleef & Arpels Pendentif Magic Alhambra en or blanc et diamants.
Par Emily Minchella
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Photos DR
8. Harry Winston Pendentif Secret Wonder en platine serti de diamants tailles marquise, poire et brillant.
A N A T O MT IÉET IDÈ’ RU EN B I J O U
La ligne Atelier Swarovski Fine Jewelry
Le mythe Fondée dans une vallée du Tyrol autrichien par un fils de lapidaire passionné de technologie, la maison Swarovski est devenue un empire dont l’essence repose non pas seulement sur un matériau de prédilection ou un savoir-faire spécifique, encore moins sur une catégorie de produits, mais sur une philosophie de l’éclat qui illumine depuis 125 ans les cristaux prodigués par la manufacture de Wattens.
La grande maison autrichienne distille son art de l’éclat dans une collection de joaillerie qui explore les nombreuses facettes du diamant de laboratoire. Une démarche assumée, placée sous le sceau de la transparence et de la responsabilité éthique.
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Le déclic Incarnée par Nadja Swarovski, qui semble avoir hérité de son arrière-arrière-grand-père le goût de l’innovation, l’esprit de créativité et le sens de l’engagement social, la firme propose désormais ses propres diamants de laboratoire qui brillent au cœur d’une ligne de joaillerie éthique. Une démarche longuement réfléchie et pleinement assumée : “Les diamants cultivés en laboratoire sont un choix conscient qui respecte le bien-être des personnes et de la planète.” Le savoir-faire Lancée en 2017, la ligne Atelier Swarovski Fine Jewelry est composée de collections imaginées par des personnalités de premier plan, telles que Penélope Cruz, Stephen Webster ou encore Paige Novick. Sculpturaux, les bijoux sont sertis de diamants, mais aussi de saphirs, de rubis et parfois de spinelles créées en laboratoire. Les pierres sont enchâssées dans l’or fairtrade qui provient de la coopérative minière Limata Limitada au Pérou, ou dans de l’or recyclé. Pour davantage de transparence, Swarovski a créé pour les diamants de plus de 0,10 carat une inscription au laser, visible seulement au microscope, les identifiant clairement comme artificiels. Par Hervé Dewintre Photo Cécilia Poupon
HORLOGERIE
Au sommet du chic : le blanc immaculé. Animé par quelques éclats d’or ou de diamants…
1. Chanel Horlogerie Montre J12 Phantom en céramique, mouvement manufacture à remontage automatique.
4. Louis Vuitton Montre Tambour Moon Star Chronographe en acier, bracelet interchangeable en caoutchouc Monogram, mouvement à quartz.
7. Omega Montre Seasmaster Planet Ocean en acier, bracelet en cuir, mouvement à remontage automatique co-axial.
2. Bulgari Montre Serpenti Spiga en céramique, or rose et diamants, mouvement à quartz.
5. Breguet Montre Marine Dame en acier, diamants et nacre, bracelet en caoutchouc, mouvement automatique.
8. Rado Montre True Thinline en céramique haute technologie, mouvement à quartz.
3. Richard Mille Montre RM 07-01 Ladies en céramique et or rouge, mouvement squeletté à remontage automatique avec heures, minutes et rotor à géométrie variable.
Par Emily Minchella
6. Patek Philippe Montre Aquanaut en acier et diamants, bracelet en caoutchouc, mouvement à quartz.
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Blanc sur blanc
ANATOMIE D’UNE MONTRE
La RM 037 Ladies de Richard Mille
Le mythe Richard Mille, avant d’être un magicien du calibre, est avant tout un amoureux des prouesses et des défis. Sa conception, totalement neuve, de l’horlogerie a pris tout le monde par surprise lorsqu’il présenta au début du millénaire son premier modèle – le tourbillon RM 001 –, d’une légèreté infinie et d’une technicité hors norme, le tout combiné
Ce garde-temps ultra-technique, parfaitement reconnaissable avec son calibre squeletté, autorise toutes les démonstrations d’élégance grâce à son boîtier allongé qui se pare des sertissages les plus délicats.
dans un boîtier nervuré de forme tonneau qui mettait en évidence le mécanisme. La surprise a vite fait place au succès, ininterrompu depuis 2001. Le déclic Peu féru des recettes faciles, Richard Mille s’approprie l’horlogerie féminine sans renoncer aux fondamentaux de sa philosophie : une technicité inégalée, des dispositifs mécaniques travaillés comme des moteurs de F1. Cette vision radicale a présidé la naissance de la RM 037, totalement mixte, présentée au SIHH en 2012, puis de la RM 037 Ladies deux ans plus tard. La caractéristique de cette montre : un boîtier allongé capable d’accueillir une grande diversité de sertissages. Le savoir-faire Entre le rotor à géométrie variable, le balancier à inertie variable, il faudrait des pages pour décliner les prodiges développés par les ingénieurs des mouvements Richard Mille pour ce garde-temps pourtant très simple d’utilisation grâce à ses deux poussoirs, dont l’un permet de sélectionner le remontage ou la mise à l’heure, et l’autre la date. Il n’est pas inutile de noter que la montre, divine avec son serti neige, peut accueillir une vaste gamme de cadrans dans des matériaux précieux ou semi-précieux comme le diamant, l’onyx, la nacre et le jaspe. Par Hervé Dewintre Photo Cécilia Poupon Montre RM 037 en or gris, sertissage neige. Mouvement squeletté à remontage automatique avec heures, minutes, rotor à géométrie variable, date surdimensionnée et sélecteur de fonctions. Réserve de marche : environ 50 heures.
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JOAILLERIE
Les lumières de la ville
Si la Maison est synonyme de glamour hollywoodien, c’est à New York qu’il faut chercher les racines profondes de la magie Harry Winston. Le joaillier, qu’on surnomme le “King of Diamonds”, vouait une admiration sans bornes à la Big Apple. C’est ici, alors qu’il avait interrompu ses études à l’âge de 15 ans pour travailler dans la bijouterie de son père (un émigrant ukrainien auquel les États-Unis avaient ouvert les bras au début du xxe siècle), qu’il vint s’installer pour fonder son propre empire. Il n’eut pas à le regretter. Il s’enivra du flot constant qui animait la métropole, se grisa de cette architecture verticale qui dialoguait si ouvertement avec le ciel. Spontanément, le jeune joaillier adopta ce manifeste d’énergie et en vivifia ses créations. Cet intérêt, il faut le préciser, fut réciproque, car la ville montra très vite sa prédilection pour ce nouveau prodige qui proposait des pierres précieuses d’une qualité inouïe, montées et serties sur des parures attrayantes, dont la rigidité était totalement exclue. On voua même une sorte de reconnaissance à ce maestro du carat qui tenait la dragée haute aux maisons européennes en injectant une notion de dynamisme et de souplesse dans la haute joaillerie.
Cette relation d’amitié fut fructueuse : à lui seul, Harry Winston maintint à flot l’industrie du diamant à New York durant la Grande Dépression. Encore aujourd’hui, l’impact du joaillier est tel dans l’imaginaire américain que son nom, qui émaille par ailleurs un nombre considérable d’œuvres de fiction, est devenu une expression courante pour désigner une ambiance luxueuse et sophistiquée. C’est bien à cette histoire d’amour entre un homme et une cité que les designers de la Maison ont souhaité rendre hommage au sein d’une nouvelle collection de haute joaillerie. Pour rendre encore plus saisissante cette relation, les designers se sont focalisés sur la Cinquième Avenue. Chaque pièce cultive sur ses lignes le caractère d’un lieu, l’élégance d’un gratte-ciel, le charme d’un hôtel particulier, le prestige d’un musée participant à l’éclat si singulier du quartier. Avec en filigrane, racontée au fil des parures, l’histoire personnelle du joaillier. Une étincelante parure composée d’un collier, d’un bracelet et de boucles d’oreilles célèbre l’arc de triomphe de Greenwich Village et sa structure si appréciée des New-Yorkais. La parure Draperies, en perles et diamants, semble avoir extrait sa cinématique des intersections
qui animent le bouillonnant Flatiron District. Une autre parure constituée d’incroyables boules en saphirs et diamants évoque une vue aérienne du Rockefeller Center où Harry Winston avait implanté ses premiers bureaux. Une autre encore, en saphirs et diamants, fait écho au motif floral à multiples pétales qui orne les moulures du salon où le joaillier déménagea en 1960, au niveau de la 56e rue, dans un imposant hôtel particulier en travertin imaginé dans un style fin xviiie siècle. La parure Crossover, constellée de diamants tailles brillant, marquise et baguette, déployant un éventail de formes géométriques, rappelle quant à elle la magistrale entrée du Metropolitan Museum of Art. Enfin, un collier et des boucles d’oreilles traduisent en rubis et diamants l’architecture spectaculaire du Millionaire’s Row, ce fameux quartier composé de bâtisses aux frontons triangulaires et aux immenses fenêtres donnant sur Central Park. Une lumineuse démonstration de savoir-faire où la science du sertissage pratiquée au sein de l’atelier Harry Winston sur la Cinquième Avenue transcende, en les conjuguant, énergie collective et épopée individuelle.
Collier New York en platine serti de 26 saphirs et de 184 diamants taille poire,
Par Hervé Dewintre
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Harry Winston.
Collection Fifth Avenue by Harry Winston
La célèbre maison américaine puise dans l’effervescence et l’architecture de la Cinquième Avenue l’essence d’une nouvelle collection de haute joaillerie qui rend hommage à l’épopée new-yorkaise de Harry Winston.
Robe longue en voilette brodée Jardin Graphique, jupe en tulle et bottines Diorcamp en cuir et gomme, double laçage, DIOR. Collier Rose céleste en or jaune, or blanc, diamant, nacre blanche et onyx, DIOR JOAILLERIE. Indigo Blue : Chemise en popeline de coton avec plastron plissé, short de costume en toile de coton stretch et chaussons en cuir, BABY DIOR.
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Indigo C’est avec poussette et enfant que Soko est arrivée au shooting de L’Officiel. Car loin d’elle l’idée de s’éloigner d’Indigo Blue, à qui elle consacre le plus clair de son temps. Un bonheur n’arrivant jamais seul, l’artiste sortira, au printemps, un troisième album rempli de ballades légères, parfois sensuelles, portant unanimement les couleurs de l’acceptation.
PHOTOGRAPHIE MARILI ANDRE STYLISME JENNIFER EYMÈRE TEXTE MANON RENAULT
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COVER GIRL
Dans le ciel bleu océan, une silhouette au visage ombré d’un masque vert se hisse : nous sommes en 2011, et Soko chante I thought I was an Alien. Elle déambule dans les rues de Los Angeles, préfigurant toute la mélodie d’une génération pour qui l’altérité ne sera plus un stigmate, mais une force avec les mouvements LGBTQI+, la vague MeToo et aujourd’hui une jeunesse se battant pour l’environnement. Soko semble donc avoir ouvert la voie à Billie Eilish et à toute une scène indépendante féminine. L’alien, le weirdo fascine, et n’est plus seulement l’apanage de la pop culture, c’est un être qui gagne en droits et en visibilité. Presque dix ans plus tard, la protéiforme Soko trimbale toujours sa frimousse de Lolita new wave entre les plateaux de cinéma et les studios d’enregistrement. Bouleversante dans La Danseuse ou Voir du pays en 2016, la voici rayonnante sur le set du shooting, ne laissant pas feindre un air de fatigue (elle revient de deux mois de tournage). La raison ? Un petit être aux boucles brunes et yeux lagon, prénommé Indigo Blue. “Je ne me suis jamais sentie autant remplie d’amour que depuis que je suis maman. Cela a apaisé mes peurs, je suis recentrée et concentrée”, explique celle qui a fini par embrasser son alien intérieur. Portrait d’une fille intemporelle dans un monde en mutation.
de normaliser mon couple. Je me bats encore contre l’homophobie qui est chaque jour présente. L’autre jour à l’aéroport, en remarquant le nom de mon bébé, quelqu’un me dit, ‘Vous êtes un peu hippie, un peu arc-en-ciel’… J’ai rétorqué ‘Oui !’ tout en présentant ma meuf. On en rigole, mais le malaise des gens est révélateur”, raconte Soko. Looking for Love, Oh to Be a Rainbow, et le sensuel Let me Adore you sont autant de titres célébrant l’amour quel qu’il soit. “On cherche tous l’amour, sous toutes ses formes : que ce soit la personne qui pourra nous compléter ou l’amour-propre.” Après la pluie… À mi-écoute retentit Quiet Storm, une chanson enregistrée il y a deux ans, un écho troublant à l’actualité : “C’est à propos des violences conjugales. Je l’ai écrite pour une amie, mais en l’enregistrant, j’ai compris que je l’avais écrite pour moi. En voyant cette fille, un œil au beurre noir, je me suis vue à 18 ans, prise dans une relation toxique. Cette chanson, c’est ce que la Soko de 18 ans aurait aimé entendre. Une fois, une voisine hurlait dans mon quartier. J’étais avec Indigo, terrifié. J’ai appelé le 911. J’en ai fait mon problème, car c’est tout simplement un acte intolérable.” Ces moments sombres donnent du relief aux couleurs de la vie pour celle qui compare son album à en arc-en-ciel : “C’est magique, ça vient de la pluie et du soleil. Si l’un des deux éléments manque, alors pas d’arc-en-ciel. Il faut raconter les moments tristes comme les moments de joie : la vie est faite de mille émotions toutes aussi belles qui chaque jour nous subliment.”
Un voyage introspectif à New-York Retour en 2017. Après ses succès au cinéma, Soko s’enferme pour se projeter dans ses propres histoires, “digérer et régurgiter”, comme elle le résume. Pas de date, pas de romance : une période d’un an où elle travaille entourée des musiciens James Richardson de MGMT, James Righton (ex-Klaxons) ou encore Drew McConnell des Babyshambles sur ce qui sera son prochain album, Feel Feelings, dont la sortie est prévue au printemps 2020. “C’était la première fois qu’on me donnait autant de liberté. Je fais de la musique depuis quinze ans et, enfin, je ne ressentais plus le syndrome de l’imposteur. Travailler entre potes… C’est l’album que j’ai le plus aimé enregistrer. Untel passait jouer quelques accords puis un autre ajoutait sa touche à la batterie. J’écrivais les paroles en studio, une première ! J’avais juste envie de rester là, dans ma bulle.” La qualité de Feel Feelings est dans la continuité des deux albums précédents, mais signe une émancipation : “Avant, j’avais l’impression de devoir dealer avec mes traumas d’enfance. Ici, je voulais conserver la vulnérabilité, mais aussi que l’album soit léger, que ça somme heureux. The Cure décrivaient ainsi leur musique : happy sad.”
Working Mom “J’avais peur qu’aujourd’hui cet album n’ait plus aucun sens. Finalement, il en a encore plus”, s’exclame Soko. Depuis l’enregistrement, sa vie a complètement changé : elle est aujourd’hui en couple et élève son fils à L.A. “L’album n’était pas tout à fait fini quand j’ai passé ma première échographie : le son des battements de son petit cœur… Leur écho clôturent la chanson Hurt Me With Your Ego.” Fin de l’album, nouveau chapitre dont le leitmotiv est l’acceptation des sentiments : une philosophie qu’elle s’emploie à transmettre à Indigo Blue. “J’utilise la méthode RIE qui encourage les enfants à avoir confiance en eux, soutient leurs sentiments, rappelant qu’ils sont tous valides. Moi, j’ai grandi avec des ‘non’, et sans réponses à mes ‘pourquoi ?’. J’explique les choses à Indigo et je l’encourage, qu’il soit triste ou heureux, à ressentir ses sentiments.” Feel Feelings : le titre de l’album semble limpide. Depuis un an, Indigo Blue suit sa mère sur les tournages, “ça me fend le cœur de le laisser quand je vais travailler. Je suis privilégiée : parfois je peux l’emmener, sinon Stella est aussi là pour prendre soin de lui. Mais beaucoup de femmes n’ont pas ces possibilités. Des progrès restent à faire…”
Hymne à l’amour Entre ballades mélancoliques, shoegaze et plaidoyers puissants célébrant la non-conformité, Soko raconte ici l’histoire universelle d’un amour inclusif : “Je suis dans un couple lesbien, j’ai un bébé : oui, c’est possible ! C’était important de parler de visibilité, il est important
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Pull en cachemire rayé Dior Riviera, jupe en tulle et bottines Diorcamp en cuir et gomme, double laçage, DIOR.
Pull en cachemire rayé Dior Riviera et jupe en tulle, DIOR. Collier Astro Dior Scorpion en or jaune, diamants et nacre, collier Rose des vents en or rose, diamant, laque et céramique rouge, bague Rose Dior Pré Catelan en or jaune, diamants et corail rouge, bague et boucles d’oreilles Rose Dior Pré Catelan en or jaune, diamants, saphirs jaunes et onyx, DIOR JOAILLERIE. Indigo Blue : Vêtements personnels.
COVER GIRL
“Je ne me suis jamais sentie autant remplie d’amour que depuis que je suis maman. Cela a apaisé mes peurs, je suis recentrée et concentrée” Soko
Un monde trop lisse Elle rebondit sur l’époque qu’elle décrit comme une période étrange, évoluant dans deux sens opposés : “D’un côté, les mentalités s’ouvrent, évoluent… les publicités de mode sont plus inclusives, mais en même temps nous sommes toujours dans un monde qui continue à chercher l’extrême perfection photoshopée. Le monde idéal ‘six packs abs et sourire Colgate’ qui efface les failles. Quand j’ai commencé, les mannequins et les musiciens étaient dissociés, et je ne me sentais pas ‘mannequin’. J’ai dû me dire que si je ne le faisais pas, ce serait hypocrite. Si des gens comme moi, qui ne font pas une taille zéro, qui ne véhiculent pas l’image standardisée de la beauté, refusent de se laisser représenter, alors le serpent se mord la queue.”
en accord avec ses aspirations. “L’ambiance est plus progressiste qu’à Paris, que l’on parle réchauffement climatique ou violences animales. En France, il faut répondre à un véritable interrogatoire quand on est végan. À L.A. je ne me sens pas juste une fille bizarre mais au contraire une fille qui fait avancer les choses.” Elle revient sur l’importance des petits gestes qui sauvent la planète et des questions d’éducation et de communication. “L.A. est un lieu clé, des célébrités, comme Natalie Portman, y ont utilisé leur visibilité pour parler de véganisme et ont permis de créer l’idée du végan cool.” Now what ? “L’instant présent !”, s’exclame Soko, soit accepter le passé, ne plus avoir peur du futur et conserver les fissures qui nous caractérisent. Comme l’éclair marquait le visage de l’insaisissable Bowie, Soko, extraterrestre messianique, promet de rester pleine de surprises et de contradictions. “Je porte mes tripes sur moi, elles sont là, toujours à l’air.” Après trois heures de shooting elle embrasse l’équipe, trouve un mot pour chacun tandis que Stella installe Indigo Blue dans sa poussette. Le cliché est parfait, même les appareils éteints.
Paris-L.A. Dans l’album se glisse le titre Blasphémie, écrit en français : “C’est sorti comme ça. Un hoquet français, mais ça ne m’a pas repris.” Si le cinéma français l’a adoubée jeune première, Soko inspire et expire la musique en anglais. Depuis douze ans, c’est en Californie qu’elle construit sa vie “d’adulte” dans un environnement plus
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Tricot rayé Dior Riviera, pantalon en denim délavé et tennis en toile, DIOR. Bracelets Rose des vents en or jaune, diamant, nacre blanche et malachite, DIOR JOAILLERIE. Indigo Blue : Vêtements personnels.
Ci-contre : Tricot rayé Dior Riviera, pantalon en denim délavé et sac Dior Book Tote en toile brodée Dior Oblique, DIOR. Collier Astro Dior Scorpion en or jaune, diamants et nacre, bracelets Rose des vents en or jaune, diamant, nacre blanche et malachite, collier et bracelet Rose des vents en or rose, diamant, laque et céramique rouge, DIOR JOAILLERIE. Indigo Blue : Vêtements personnels. Page de droite : Robe longue en voilette brodée Jardin Graphique et jupe en tulle, DIOR.
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“Avant, j’avais l’impression de devoir dealer avec mes traumas d’enfance. Ici, je voulais conserver la vulnérabilité, mais aussi que l’album soit léger, que ça somme heureux. The Cure décrivaient ainsi leur musique : happy sad.” Soko
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Pull en cachemire rayé Dior Riviera, jupe en tulle et bottines Diorcamp en cuir et gomme, double laçage, DIOR. Indigo Blue : Vêtements personnels. Coiffure : Pierre Saint Sever Maquillage : Virginie Hullaert Assistant photo : Jeremy Konko Assistants stylisme : Kenzia Bengel et Pauline Borgogno Merci à Daniela Suarez et Florent Farinelli, ainsi qu’au label Because.
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Rowe PHOTOGRAPHIE DANYIEL LOWDEN STYLISME JENNIFER EYMÈRE TEXTE SIMON LIBERATI
Pour annoncer la nouvelle vie de comédienne de Camille Rowe, l’écrivain Simon Liberati nous offre sa plume vive et franche. Et nous livre un portrait sans fard d’une jeune fille pleine de promesse.
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Manteau en fausse fourrure, MARC JACOBS. Bague Panthère de Cartier en or jaune, laque, péridots et onyx et montre La Panthère en or jaune, diamants, émeraudes et laque noire, CARTIER.
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T-shirt à manches longues et jupe en jersey, MARCIA. Bague Panthère de Cartier en or jaune, émeraudes, onyx et diamants, et bague Panthère de Cartier en or jaune, grenats tsavorites et onyx, CARTIER.
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“Quand j’ai été chercher ses photos sur Internet je me suis dit que je connaissais son visage. Magnifiques yeux bleus écartés, bouche énorme, curieux nez un peu trop gros, un peu humide, un peu charmant (du genre Anatole France) qui lui donne du chien, seins sublimes, les cuisses minces anitapallenbergiennes… Le style Californienne en bottes molles. Cheveux beach blond surf et sable chaud…” Simon Liberati
sur Saône (elle aime photographier les gens difformes), le tout à Dijon. Après, Rouve meurt d’amour pour Elsa Zylberstein (son Ophélie de jeunesse, une actrice touchée par le cancer). Et Camille se retrouve à pleurer pendant une bonne quarantaine de minutes avec le reste de la famille (chorale). Lorsque j’ai pu joindre Camille Rowe sur son portable en shooting avec Jen Eymère pour la cover de L’Officiel, la première question que je brûlais de lui poser, c’était : “À quoi pensiez-vous de tellement triste pour arriver à pleurer pendant 40 minutes la mort de Jean-Paul Rouve ?” Moi qui adore Les Tuche j’admire cette performance et je suis curieux de connaître votre secret. “Comme c’est un… mélo, on gardait souvent les premières prises. Donc c’était pas non plus des heures de larmes par jour. Je pensais à un événement traumatique qui m’est arrivé à moi, du coup j’ai gardé des séquelles bien après les trois semaines de tournage (rire sinistre). Je me suis promis de jamais recommencer. Le pire, c’est que dans la vie je suis plutôt du genre à pleurer facilement…” Pourtant Camille Chrystal Pourcheresse, plus connue sous le nom de Camille Rowe, est une mannequin et actrice franco-américaine née le 7 janvier 1990. Elle a donc 30 ans. Le bel âge… Fille d’un restaurateur prospère, elle a eu, d’après Wikipedia, une enfance heureuse “dans un quartier favorisé de la capitale”. Quand j’ai été chercher ses photos sur Internet je me suis dit que je connaissais son visage. Magnifiques yeux bleus écartés, bouche énorme, curieux nez un peu trop gros, un peu humide, un peu charmant (du genre Anatole France) qui lui donne du chien, seins sublimes, les cuisses minces anitapallenbergiennes… Le style Californienne en bottes molles. Cheveux beach blond surf et sable chaud… Je connais cette tête peut-être du Baron ou du Montana, d’un dîner Purple ou de la cafétéria Cora de Soissons (où je réside), je n’ai pas osé lui demander… Quand L’Officiel m’a commandé le portrait que je suis en train d’essayer d’écrire, je n’en avais pas trop envie, j’étais d’une humeur déplorable, en train de retaper un livre déjà plus ou moins raté, Prières
Clara Bow… Pourquoi ai-je le nom de Clara Bow en tête quand je pense à Camille… Camille Rowe ? Parce que je suis devenu un vieil homme et qu’avec l’âge on mélange les actrices d’avant-guerre et les filles d’aujourd’hui. Il suffit d’une rime ou d’un éternuement pour passer de 2020 aux années 1920. Cent ans après, presque aucune lectrice évidemment ne connaît le nom de Clara Bow… Première it-girl (le nom a été inventé pour elle) blonde aux yeux gros comme des billes, elle fut la reine de Hollywood, elle partageait des amants avec son ennemie Marion Davies, l’autre blonde aux yeux ronds comme des billes, maîtresse de Randolph Hearst, et un château du côté de Lower Topanga, The Spiral Staircase, où vécut la famille Manson. Je pense à eux parce que Camille Rowe me fait penser à Tarantino. Elle devrait tourner avec lui ça lui irait bien. En attendant Camille Rowe vient de jouer un rôle dans un film choral inspiré par l’œuvre d’Anna Gavalda : Je voudrais bien que quelqu’un m’attende quelque part. Un film d’Arnaud Viard avec Jean-Paul Rouve et Alice Taglioni. Un film long métrage d’une heure et demie, un film très émouvant où on la voit beaucoup avec un bonnet, un nez rouge et des yeux humides parce qu’elle y pleure… Vraiment il y a une coquetterie chez certains réalisateurs à faire jouer des rôles de filles moroses, pas vraiment chiantes mais annagavaldiennes, c’est-à-dire pas super drôles, à des mannequins et des filles à la mode. Je me rappelle The Blackout d’Abel Ferrara où cette pauvre Claudia Schiffer donnait la réplique à Béatrice Dalle en version psychorigide vegan nez rouge et eau plate… Il y avait eu un article de France Dimanche ou d’Ici Paris assez cruel où le reporter racontait les déboires de Claudia avec Abel. Je ne pense pas que le tournage d’Arnaud Viard ait été aussi chaotique. Rien ne transparait en tout cas. Camille Rowe y joue le rôle de la petite sœur de Jean-Paul Rouve, acteur de théâtre contrarié devenu commercial en vin et bientôt suicidé, qui lui paye, avant de commettre l’irréparable, ses fantasmes de photographie d’art. Il lui prête 10 000 euros pour qu’elle puisse accomplir sa vocation de Diane Arbus
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Body en maille viscose et ceinture en cuir, ALAÏA. Pantalon en coton imprimé, MARC JACOBS. Collier Panthère de Cartier en or jaune, grenats tsavorites et onyx, montre La Panthère en or jaune, diamants, grenats tsavorites et laque noire, bracelet Panthère de Cartier en or jaune, grenats tsavorites et onyx et bague Panthère de Cartier en or jaune, grenats tsavorites et onyx, CARTIER.
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“Les voix, j’en ai entendu beaucoup en soixante ans, peu d’aussi ouvertes… Rien à voir avec l’idée que je m’en faisais, issue d’un mélange de Wikipedia, d’articles de Elle.fr et de photographies de Terry Richardson où elle tirait la langue toute nue dans un vieux Purple d’il y a dix ans.” Simon Liberati
comme Romy Schneider. La comparaison n’est pas infâme. Clara Bow non plus ne crachait pas sur un drink… La question stupide maintenant que j’ai volée à un vieux numéro de Mademoiselle Âge tendre… – Camille, dans l’idéal, quel rôle auriez-vous voulu jouer au cinéma ? – Le film dans lequel j’aurais vraiment aimé jouer c’est Kill Bill. J’avais raison de penser à Tarantino, il y a chez Camille Rowe un côté Margot Robbie dans le rôle de Sharon Tate… Un truc joyeux, californien, pas compliqué et un peu attiré par le mal en même temps… – Dans le film vous photographiez des gens difformes. Dans la vie êtes-vous fan de Diane Arbus ? – Question art je préfère la peinture. Je ne suis pas fan de photographie. Par contre j’aime bien les films d’horreur… Sinon je suis assez intéressée par les serial killers… Une ouverture ? J’y crois pas. J’ai lu (sur Wikipedia ?) qu’elle aime bien les vieux David Cronenberg… Alors nous citons quelques films… Si j’avais fait le déplacement au lieu de lui téléphoner, j’aurais pu lui raconter que j’ai passé plusieurs soirées avec Cronenberg à Genève en novembre (il y avait sa fille aussi qui est photographe) et qu’il a un super sonotone branché sur son iPhone qui lui permet d’écouter ou de zapper les gens selon qu’ils sont assis en face de lui, à gauche ou à droite… – Vous ne devinerez jamais ce qu’ils me font au maquillage pendant que je vous parle… Ils sont en train de gratter des croûtes sur mon nez. Cette fille est vraiment charmante… Rowe power… Il y a que des gens beaux pour parler de ce genre de choses. – Vous avez des projets ? – Oui, un film canadien de science-fiction… Et un film anglais… – Votre premier rôle ? – À 12 ans à l’école dans Chantecler d’Edmond Rostand, je jouais une poule… Une poule méchante j’aimais bien ça (rire sinistre). Rowepower got a magic touch
exaucées, dont j’ai volé le titre à Truman Capote qui en échange m’a envoyé un sort, mais je me dis toujours que les choses viennent des rencontres, mêmes furtives, commandées cadrées… Une interview de dix minutes au téléphone peuvent me sortir du marasme. Je l’appelle à 13 h. La voix est vraiment charmante. Pas trop charmeuse, pas maniérée, pas traînante, genre molasse, pas grunge molosse, mais ouverte… Elle me dit qu’elle marche dans la rue pour aller au shooting et je regrette déjà d’avoir eu la flemme de faire cent kilomètres de bouchon pour la rencontrer. Les voix, j’en ai entendu beaucoup en soixante ans, peu d’aussi ouvertes… Rien à voir avec l’idée que je m’en faisais, issue d’un mélange de Wikipedia, d’articles de Elle.fr et de photographies de Terry Richardson où elle tirait la langue toute nue dans un vieux Purple d’il y a dix ans. J’ai aussi un coffret des César 2018 avec Rock’n’roll de Guillaume Canet mais je dois avouer que j’ai oublié le contenu de ce film sinon que Marion Cotillard essaye d’apprendre l’accent canadien. D’où justement ma seconde question… J’ai lu (dans Glamour ? dans Elle.fr ? dans le dossier de presse d’UGC ?) que Camille Rowe a eu beaucoup de mal à perdre son accent franco-américain pour jouer un film choral au bord de la Saône. C’est vrai qu’on n’imagine pas la sœur de Jean-Paul Rouve parlant avec l’accent de Laurel Canyon et Linda Hardy. – Ce n’est pas une question d’accent mais d’intonation. Ça ressort quand je parle en groupe, quand j’exprime des émotions… Au début ça ne collait pas vraiment avec Dijon. – Je vous assure qu’on n’entend rien… – Merci (rire joyeux), ça veut dire que j’ai bien travaillé donc. – Dijon vous a plu ? – Oui, j’ai adoré. Il y a plein d’exploitations de vin. Avec mon mec on a été faire un tour et goûté des bons crus. C’est vrai qu’à bien y regarder elle n’a pas l’air de sucer de la glace. Pas ivrogne, non… mais bonne vivante comme on dit dans la presse. Le flou dans les yeux, la truffe humide le rire communicatif peuvent laisser penser que… Un peu
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Body en maille viscose, ALA�A. Collier Panthère de Cartier en or jaune, laque, diamants, grenats tsavorites et onyx, CARTIER.
Body en maille viscose, ALAÏA. Collier Panthère de Cartier en or gris rhodié, grenats tsavorites et onyx, CARTIER.
Ci-dessus : Pull et pantalon en maille jacquard, ceinture en cuir et lunettes de soleil en acétate, ALAÏA. Foulard en coton, MARC JACOBS. Collier Panthère de Cartier en or jaune, grenats tsavorites et onyx, bague Panthère de Cartier en or jaune, émeraudes, onyx et diamants, bague Panthère de Cartier en or jaune, grenats tsavorites et onyx et montre La Panthère en or jaune, diamants, émeraudes et laque noire, CARTIER. Page de droite : Débardeur et short en maille jacquard, Alaïa. Bracelet Panthère de Cartier en or gris, laque, grenats tsavorites et onyx, CARTIER.
Ci-dessus : Body en maille viscose et ceinture en cuir, ALAÏA. Collier Panthère de Cartier en or jaune, grenats tsavorite et onyx, bague Panthère de Cartier en or jaune, émeraudes, onyx et diamants et bague Panthère de Cartier en or jaune, grenats tsavorites et onyx, CARTIER. Page de gauche : Body en maille viscose, ALAÏA. Montre La Panthère en or jaune, diamants, émeraudes et laque noire, bracelet Panthère de Cartier en or jaune, grenats tsavorites et onyx et collier Panthère de Cartier en or jaune, laque, diamants, grenats tsavorites et onyx, CARTIER. Coiffure : Sergio Villafane. Mise en beauté : Dior Beauté par Sophea. Assistant photo : Jeremy Konko. Assistant stylisme : Kenzia Bengel.
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Camille PHOTOGRAPHIE GUEN FIORE STYLISME IRENE BARRA
Découverte sur Instagram à 17 ans par de jeunes créateurs, Camille Jansen enchaîne les shootings mode relayés par les réseaux sociaux jusqu’à être repérée par un agent. Aujourd’hui chanteuse, artiste photographe et influenceuse, cette Franco-anglaise réussit tout ce qu’elle entreprend.
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Pull et culotte en maille de coton, SALVATORE FERRAGAMO. Boucles d’oreilles en argent sterling, BOTTEGA VENETA.
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Ci-dessus : Trench en cuir, LOUIS VUITTON. Pull en laine, COLVILLE. Bermuda en coton, MAX MARA. Boucles d’oreilles en argent sterling, BOTTEGA VENETA. Page de droite : Chemise et pantalon en cuir et boucles d’oreilles en argent sterling, BOTTEGA VENETA.
Trench en cuir et chemise en soie, PRADA. Boucles d’oreilles en argent sterling, BOTTEGA VENETA.
Pull en lin et jupe en cuir, MIU MIU. Boucles d’oreilles en argent sterling, BOTTEGA VENETA.
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Veste en daim, EMPORIO ARMANI. Chemise Marga en satin, PAUL & JOE. Boucles d’oreilles en argent sterling, BOTTEGA VENETA.
Trench en cuir, COACH 1941. Jean en denim, CELINE PAR HEDI SLIMANE. Boucles d’oreilles en argent sterling, BOTTEGA VENETA. Chaussures en cuir, LOUIS VUITTON.
Pull court en viscose, PINKO. Minijupe en organza, FENDI. Boucles d’oreilles en argent sterling, BOTTEGA VENETA. Sacs en cuir imprimé, FURLA.
Chemise en soie, UN JOUR AILLEURS. Pantalon en daim, VERSACE. Boucles d’oreilles en argent sterling, BOTTEGA VENETA.
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Ci-dessus : Chemise Marga en satin, PAUL & JOE. Boucles d’oreilles en argent sterling, BOTTEGA VENETA. Page de droite : Cardigan en viscose, ELISABETTA FRANCHI. Jupe en cuir, A.W.A.K.E. Boucles d’oreilles en argent sterling, BOTTEGA VENETA. Chaussures en cuir, LOUIS VUITTON. Coiffure : Ryo Narushima. Maquillage : Machiko Yano. Assistant photo : Francesco Zinno. Assistante stylisme : Gabriela Cambero.
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Dans PHOTOGRAPHIE MARILI ANDRE STYLISME VANESSA BELLUGEON TEXTE PAULINE BORGOGNO
les pas Une démarche assurée, un air effronté et un look typiquement parisien : voilà ce que Lou Lampros montre au premier abord. Forte de son expérience dans le mannequinat et de sa notoriété sur les réseaux sociaux, la jeune femme évolue désormais dans le cinéma. Son talent certain, non dénué d’une touche d’impertinence, réussit à tous nous subjuguer.
de Lou 85
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S’il ne fallait qu’un mot pour décrire Lou Lampros, ce serait la curiosité. Car Lou a soif de tout, excelle dans plusieurs domaines, et se prend aisément de passion pour tout ce qui l’entoure. Cet intérêt a forgé sa personnalité singulière, qui a rapidement intrigué et captivé le milieu de la mode. Des débuts précoces Lou possède un de ces regards qui ne s’oublient pas, tantôt teinté d’insolence, tantôt angélique. Ce n’est pas un hasard si la jeune fille a été repérée dès ses 13 ans. C’est la photographe italienne Alice Rosati qui l’a découverte la première. En pleine séance de jogging sur les quais de Seine, elle croise Lou, chignon en l’air, rentrant de son cours de danse classique. Six mois plus tard, l’adolescente réalise sa première série pour le magazine italien Lampoon. Commence alors pour elle une vie double, entre collège et
Son rêve d’enfant : devenir Sissi l’impératrice, telle la grande Romy Schneider. Et ce fantasme de pouvoir endosser le rôle ne l’a jamais quittée. À 15 ans, Lou commence à passer ses premiers castings et s’entoure d’intimes qui ont foi en elle. Jusqu’au jour où un agent parie sur elle, lui offrant la chance de sa vie. séances photo. Ses multiples shootings l’amènent à faire de belles rencontres, à travailler pour des titres féminins et des enseignes de prêt-à-porter. Au fil des ans, sa notoriété grandit et Lou pose pour la marque Marcia Wear avec ses tenues subtilement sexy. Une très belle expérience qu’elle partage avec une équipe bienveillante, et qui lui permet de passer sous l’objectif du photographe Pierre-Ange Carlotti. Si la jeune femme affirme être entrée dans le milieu de la mode par hasard, c’est en toute légitimité qu’elle s’y impose aujourd’hui. Une actrice née Du mannequinat à l’actorat, il n’y avait qu’un pas. Modeste, Lou avoue être arrivée dans le cinéma également par accident. Pourtant, le jeu bouillonne en elle depuis l’enfance, tout comme l’attrait pour les caméras, les transformations physiques, l’humour et l’art de se donner en spectacle. Son rêve d’enfant : devenir Sissi l’impératrice, telle la grande Romy Schneider. Et ce fantasme de pouvoir endosser le rôle ne l’a jamais quittée. À 15 ans, Lou commence à passer ses premiers castings et s’entoure d’intimes qui ont foi en elle. Jusqu’au jour où un agent parie sur elle, lui offrant la chance de sa vie. Comme dans toute histoire merveilleuse, le destin semble tracé. En 2018, elle est à l’affiche de Madre, de Rodrigo Sorogoyen, au cinéma, tandis qu’elle perce le petit écran l’année suivante dans Mortel, d’Édouard Salier. Des débuts prometteurs qui lui ouvrent de nouvelles perspectives et de grands projets à venir. À l’aube d’une belle carrière, Lou se sent désormais plus complète. Parisienne, tout simplement Malgré son ascension, celle qui fait tourner toutes les têtes à Paris réussit à garder ses valeurs et des rituels garde-fou. On pourrait la croire fière, or elle cultive une forme d’authenticité, un naturel non feint et beaucoup d’humour. Elle n’a que faire des stéréotypes. Elle ne souhaite pas se cantonner à l’image de la Parisienne, bien qu’elle aime la capitale de tout son cœur. Pour Lou, conserver sa simplicité, sa spontanéité et sa sincérité prime avant tout. Exit le superflu. Et lorsqu’elle a besoin de se recentrer sur l’essentiel, elle peut compter sur les trois piliers qui structurent sa vie : la musique, la littérature et sa mère. Un sens des réalités aigu, assez rare chez les filles du même âge. Lorsqu’on lui parle du futur, Lou cite Coluche : “Les portes de l’avenir sont ouvertes à ceux qui savent les pousser.”
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Blouse à col jabot en crêpe de soie et jupe en daim avec broderies en argent, CELINE PAR HEDI SLIMANE. Montre La Panthère de Cartier en or jaune, diamants, émeraudes et laque, CARTIER.
Gilet en velours cupro, chemise en soie mélangée lamée, pantalon cargo en soie mélangée lamée, turban noué en tissu lamé, collier talisman à pampille en métal doré, pendentif bague en métal martelé et cristal et bottes “76” en suède, SAINT LAURENT PAR ANTHONY VACCARELLO.
Robe en coton et sandales en satin et strass, CHANEL. Collant en nylon, CALZEDONIA. Boucles d’oreilles en métal argenté et verre, KARRY’O.
Robe en crêpe stretch noir, MICHAEL KORS COLLECTION. Boucles d’oreilles en métal argenté et verre, KARRY’O. Chapeau plat en mikado, SANDRA MANSOUR.
Chemise Marga en satin, PAUL & JOE. Lunettes à grosse chaîne en acétate, GUCCI.
Veste imprimée en mohair et pull en cachemire, PRADA. Boucles d’oreilles en ébène et perle, KARRY BERREBY. Collier en corail et collier triple en agate, œil de tigre, calcédoine et quartz fumé, KARRY’O. Bague Panthère de Cartier en or jaune, grenats tsavorites et onyx, CARTIER.
Robe longue en gaze de soie jacquard imprimée Jardin Sauvage, soutien-gorge et culotte en résille, DIOR. Sandales Adriana en nappa lamé, LAURENCE DACADE. Collier en résine et bois, et collier en agate, œil de tigre, calcédoine et quartz fumé, KARRY’O. Collier en vermeil, KARRY BERREBY. Foulard en soie mélangée (porté en turban), INOUITOOSH.
Combinaison en velours et mousseline de soie, SANDRA MANSOUR. Sandales Adriana en nappa lamé, LAURENCE DACADE. Boucles d’oreilles en bronze doré, KARRY’O. Sautoir Cristal Serti, réédition 50 ans, en métal doré et cristal de roche, GAS BIJOUX.
Manteau sans manches en agneau, chemise en popeline de coton et jupe en gabardine, MIU MIU. Main droite, bracelet en laiton doré et cristal de roche bleu, GOOSSENS. Main gauche, manchette en bronze doré, KARRY BERREBY.
Veste et pantalon en lurex et coton jacquard, CHLOÉ. Chemise Marga en satin, PAUL & JOE. Boucles d’oreilles Tigre, réédition 50 ans, en acétate et métal doré, GAS BIJOUX. Sandales Adriana en nappa lamé, LAURENCE DACADE.
Ci-contre : Robe en crêpe stretch, MICHAEL KORS COLLECTION. Boucles d’oreilles en métal argenté et verre, KARRY’O. Chapeau plat en mikado, SANDRA MANSOUR. Escarpins Tosca Silver en nappa lamé, LAURENCE DACADE. Page de gauche : Robe en laine et soie et legging en résille, GUCCI. Boucles d’oreilles en bronze doré, KARRY’O. Collier Ischia Charms en métal doré, bois et acétate, GAS BIJOUX. Sautoir en laiton oxydé plaqué or avec ornements en strass Swarovski, GOOSSENS. Coiffure : Walter Armanno Maquillage : Sergio Corvacho Assistant photo : Jeremy Konko Assistante stylisme : Gabriela Cambero
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Flamme de Pigalle PHOTOGRAPHIE SERGIO CORVACHO STYLISME VANESSA BELLUGEON
Un regard de braise et une crinière domptée en d’interminables tresses : telles sont les deux caractéristiques avec lesquelles Sharon Alexie s’amuse au quotidien. Plus connue sous son surnom, Flamme de Pigalle, la jeune mannequin nous envoûte avec son univers sensuel, ses courbes de rêve et sa moue boudeuse. Pour autant, Sharon ne se limite pas à sa seule image : engagée, elle encourage les femmes à révéler le meilleur d’elles-mêmes, à oser rêver, et prône l’empowerment féminin.
Ci-contre : Veste en coton, VIVIENNE WESTWOOD. Pull en maille de laine extrafine, MOLLI. Chapka en fausse fourrure, 2 MONCLER 1952. Foulard, perso. Page de gauche : Manteau en soie tissée, LANVIN. Salopette en coton, AMERICAN VINTAGE. Top à capuche en coton, KENZO. Sac ceinture en cuir et peau lainée, LOUIS VUITTON. Sneakers “Run Star Hike” en polyester, CONVERSE X J.W. ANDERSON.
Trench en cuir et chemise en soie, PRADA. Boucles d’oreilles en argent sterling, BOTTEGA VENETA.
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Ci-dessus : Cardigan et pull-over en cachemire et bermuda en tweed, CHANEL. Bottines derbies lacées en cuir, J.M. WESTON. Page de gauche : Manteau en soie tissée, LANVIN. Salopette en coton, AMERICAN VINTAGE. Top à capuche en coton, KENZO. Sac ceinture en cuir et peau lainée, LOUIS VUITTON. Sneakers “Run Star 1Hike” 0 3 en polyester, CONVERSE X J.W. ANDERSON.
Chemise en soie, SALVATORE FERRAGAMO. Chapka en fausse fourrure, 2 MONCKER 1952. Chaussettes en laine, CALZEDONIA.
Veste et pantalon en tissu technique avec effet hologramme, FENDI.
MODE
Ci-dessus : Manteau en soie tissée, LANVIN. Salopette en coton, AMERICAN VINTAGE. Top à capuche en coton, KENZO. Cache-oreilles en fourrure Leogram, LOUIS VUITTON. Après-ski lacés imprimés logo FF, FENDI. Page de droite : Veste et pantalon en coton, VIVIENNE WESTWOOD. Pull en maille de laine extra-fine, MOLLI. Chapka en fausse fourrure, 2 MONCLER 1952. Gants et lunettes, perso.
Ci-contre : Doudoune en nylon et duvet, TATRAS. Gilet en laine, MAISON KITSUNÉ. Body en jersey, COPERNI. Body à col roulé en modal et élasthanne, WOLFORD. Chaussettes en laine et bottes en cuir, ACNE STUDIOS. Page de droite : Combinaison en néoprene et sous-pull en jersey, ASOS. Pull en coton, AIGLE. Masque de ski en acétate, OAKLEY.
Ski PHOTOGRAPHIE MARILI ANDRE STYLISME JENNIFER EYMÈRE TEXTE THIBAULT DE MONTAIGU
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Ouvert en 2019, le Refuge de Solaise, à Val d’Isère, est l’hôtel le plus haut des Alpes. On y accède par télécabine avant de se retrouver isolé le soir à 2 550 mètres d’altitude. Une expérience unique au monde partagée avec les mannequins-influenceurs Luka Sabbat, Adèle Farine et Camille Jansen.
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Luka Sabbat
Impossible de ne pas être fasciné par Luka Sabbat avec ses free locks et sa fine moustache. Si le jeune Américain est déjà sur tous les fronts, c’est grâce à une attitude détachée et un sens du style singulier qu’il s’amuse à cultiver. À mi-chemin entre Jimi Hendrix, The Weeknd et Jean-Michel Basquiat, son image attire tous les regards sur la scène mode. À tel point que, du haut de ses 21 ans, Luka est suivi par 2 millions de fidèles followers sur les réseaux sociaux. Grâce à cet engouement, l’influenceur est sollicité par les plus grandes marques et créateurs de luxe, sans avoir recours à aucun casting. Une prouesse pour le jeune homme qui crée ainsi sa propre légende, s’érigeant lui-même en marque, allant jusqu’à développer son label multimédia, Hot Mess. Tout lui réussit. Ce succès fulgurant lui vaut bien son surnom de “cool kid”.
Adèle Farine
Avec son visage candide et son élégance naturelle, Adèle Farine est la Parisienne par excellence. Ce n’est pas pour rien que la jeune femme a prêté son image à Jalouse et au magazine londonien Schön!, ou qu’elle a été choisie pour incarner la campagne de la griffe de sousvêtements Breakfast Club Paris. Également égérie pour les très tendance marques Rouje et Yasmine Eslami, son style Lolita sans artifice séduit le monde de la mode. D’ailleurs, beaucoup s’accordent à dire que le charme authentique d’Adèle aurait fait d’elle un parfait premier rôle dans un film de Godard. Depuis son enfance, elle baigne dans le milieu de l’art : avec un père photographe, une grand-mère peintre et une mère architecte, Adèle a appris à développer de multiples talents. Tantôt dessinatrice, mannequin, actrice, et toujours profondément esthète, elle aime s’accomplir dans tous les domaines.
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Crédits photo
Camille Jansen
Camille Jansen est la nouvelle coqueluche à suivre avec ses quelque 201 000 abonnés et sa carrière florissante. Découverte sur Instagram à 16 ans, la jeune fille incarne la French liberté avec sa beauté naturelle et sa personnalité sans filtre. S’ennuyant au fond de son lit, grimaçant face à l’objectif ou s’affichant en train de laisser poser son masque facial : ses selfies et moments de vie sont empreints d’une simplicité déconcertante. Des images auxquelles chacun peut s’identifier, loin des habituels clichés trompeurs ou retouchés. Camille apporte ainsi un vent de fraîcheur et une vision contemporaine des réseaux sociaux qui fait du bien. Pas étonnant que son style effortless et son image d’ingénue aient rapidement fait mouche. La jolie Camille s’impose comme la prochaine grande influenceuse de sa génération.
De haut en bas : Luka : Doudoune en nylon et duvet, TATRAS. Combinaison en nylon, K-WAY. Adèle : Doudoune en nylon et duvet, TATRAS. Veste en néoprene et pantalon en jersey, KENZO. Camille : Trench en nylon, K-WAY. Combinaison en coton, GALERIES LAFAYETTE.
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Jusque-là tout allait bien. Réveillé à l’heure, cinq heures de train, les deux vans à notre arrivée à BourgSaint-Maurice, et puis soudain, alors que nous grimpons la route en lacet qui mène à Val d’Isère, coup de fil de Marie, en charge du Refuge de Solaise : “Dépêchezvous ! Les télécabines vont fermer. Il y a trop de vent. On annonce une tempête !” Panique à bord. Où va-t-on dormir ? Et le shooting de mode prévu ? Tu crois qu’on va réussir à acheter des clopes là-haut ? Arrivés sur le rond-point des pistes, bonne nouvelle : Marie a convaincu les remontées mécaniques de nous laisser monter à titre exceptionnel. Mais il faut faire vite. Les skieurs ont déjà déserté les pistes. Les cimes enneigées des sapins ploient sous les bourrasques. Deux employés de l’hôtel hissent notre cargaison de valises sur une palette de bois posée sur deux snowboards, et fouette cocher… Au moment de m’engouffrer dans la télécabine, le perchiste me lance : “Eh, pensez à faire le signe de croix”, joignant le geste à la parole. Puis les portent se referment et l’engin se lance dans le vide.
Les branchés font du ski Contraste saisissant : alors que le vent continue à s’époumoner dehors, nous pénétrons une bulle géante de calme et de chaleur. Six mètres de hauteur sous plafond, moquette à motif écossais, boiseries alpines, interminables canapés club, bar à l’américaine, fauteuils à dossier de laine ou tissus dépareillés, baies vitrées panoramiques… J’imagine à peine ce qu’il a dû en coûter de construire un tel palais à ces vertigineuses altitudes. Lorsque l’ancienne gare du Téléphérique de Solaise a fermé en 2016, ce refuge de luxe n’était encore qu’un rêve. En à peine deux étés, Jean-Charles Covarel et Jean-Luc Borel lui ont donné chair. Le restaurant, avec sa terrasse comble les jours de grand soleil dont je m’étais inspiré dans mon premier roman, a été remodelé de fond en comble. L’ancienne arrivée des télécabines reconvertie en chambres ultra-spacieuses. Certains matériaux ou pièces d’ameublement ont dû être hélitreuillés. Quant aux provisions, elles arrivent ici chaque matin par télécabine. Une soudaine angoisse m’envahit : et si celles-ci restaient
À l’extérieur, c’est un véritable maelström de neige. J’aperçois dans le lointain quatre pisteurs suivis par un chien qui dévalent la pente. Puis rien. Le désert. Les silhouettes brouillées des pylônes. Le cortège funèbre des télésièges à l’arrêt. Dernier signe de vie terrestre : deux ombres errantes chaussées de skis bravant la tourmente avant de disparaître dans le néant. Puis la cabine s’enfonce à travers une vaste étendue blanche et cotonneuse. Alors me revient en mémoire le générique de Shining avec la voiture vue de haut qui progresse au milieu des montagnes sur une musique menaçante avant de déboucher sur l’hôtel perdu au milieu de nulle part… Heureusement, pas de Jack Nicholson parmi nous. Mais le mannequin star Luka Sabbat qui vient de faire une découverte fondamentale : la wifi est disponible dans l’habitacle. Il va pouvoir filmer une story pour ses deux millions de followers sur Instagram. Val d’Isère est sans doute la station la plus high-tech au monde. Même en plein blizzard, le monde entier continue à suivre vos moindres faits et gestes et vous liker. Enfin, il like surtout Luka Sabbat. À défaut d’avoir les pieds gelés, on se réchauffe l’égo comme on peut. À l’arrivée des télécabines, des rafales de neige durcie nous giflent le visage. J’ai l’impression d’être dans un vieux vidéo clip de U2. L’hôtel n’est qu’à une centaine de mètres mais le tapis neigeux est si profond qu’on risque à chaque pas de s’enfoncer. Un buggy à chenilles surgit alors de nulle part pour nous sauver d’une mort certaine. Notre petit groupe se précipite dessus et nous gagnons enfin, sains et saufs, notre camp de base.
fermées en raison du mauvais temps ? Aucun souci, me rétorque le jeune page blond qui vient de nous accueillir, nous disposons d’une chambre froide et d’un espace de stockage. C’est une chance : à 2 500 mètres d’altitude, il est rare qu’on tombe sur une épicerie ouverte passé 22 heures. Nous prenons nos quartiers dans le penthouse situé au-dessus, 380 mètres carrés pouvant accueillir jusqu’à dix-huit personnes. Au premier étage, plusieurs chambres dans leur jus, avec baignoire à sabot et carrelage italien, et au second, un vaste espace type chalet rassemblant une cuisine ouverte, un living, une table de salle à manger de dix mètres de long et une terrasse avec une vue à couper le souffle. Enfin, les jours où on y voit quelque chose… À l’extérieur, c’est un véritable maelström de neige. J’aperçois dans le lointain quatre pisteurs suivis par un chien qui dévalent la pente. Puis rien. Le désert. Les silhouettes brouillées des pylônes. Le cortège funèbre des télésièges à l’arrêt. Plus aucun mouvement à l’horizon. Impression étrange d’être revenu aux premiers temps de la Terre quand l’homme n’existait pas encore. Hélas, c’est une espèce qui n’a cessé de se reproduire depuis : mes compagnons de voyage sont assez pour me le rappeler, qui s’agitent dans tous les sens pour préparer le shooting. Déballage de matériel, éruption de vêtements de marques, commentaires d’un snobisme
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mauvais temps, et, last but not least, le spa et sa piscine de vingt-cinq mètres de long dont la vaste baie vitrée donnera sur le soleil couchant… Le soir venu, les dameurs de la station viennent casser la croûte au restaurant. L’un d’eux accepte de m’emmener faire un tour dans sa bécane de douze tonnes. Sensation déroutante de se retrouver seuls dans la nuit au milieu de ce désert de dunes blanches. Je lui demande s’il n’a pas peur de croiser des fantômes ou le yeti. Non, mais il aperçoit parfois des randonneurs perdus ou des renards pâles. Le seul véritable danger ici, ce sont les avalanches. Il s’est retrouvé englouti sous une un soir, et s’en est sorti de justesse en creusant centimètres par centimètres avec sa lame et sa fraise arrière. À mes côtés, Luka Sabbat n’a pas l’air rassuré. Surtout lorsque notre conducteur fait halte au milieu de nulle part pour déboucher le filtre à eau. Je l’observe dehors, en train de braver la tempête de neige. Son visage creusé de rides et ses longs cheveux blancs. Et si c’était lui, le Jack Nicholson de Solaise ?
achevé – “le fond de teint, c’est plouc ; ça arnaque la beauté des femmes”, dixit Sergio, notre make-up artiste péruvien. C’est “Les Branchés font du ski”. Où sont passées Camille et Adèle, nos deux mannequins ? Elles sont ensemble en train de prendre un bain moussant. Tu veux dire ensemble, dans la même baignoire ? Et comment tu peux savoir ça, toi ? Tu étais avec elles ? On finit par rameuter tout ce monde pour le dîner servi au restaurant. Au menu, tartiflette arrosée d’un excellent blanc de Savoie. Nous sommes seuls dans la salle mais j’imagine déjà l’ambiance quand toutes les chambres de l’hôtel seront ouvertes : la private party la plus secrète des Alpes. Tout le monde rigole de cette tempête digne de l’Apocalypse. Notre productrice a essayé d’aller fumer une clope dehors ; elle s’est envolée direct. Je parle de la clope bien sûr… Certains suggèrent de désactiver les détecteurs de fumée. Michel Houellebecq, dans son dernier roman, passe son temps à les dévisser dans les chambres d’hôtels où il séjourne. Non, mais il y a plus simple, m’explique la petite Camille, tu coinces une
Le lendemain, miracle. Le soleil pétarade dans le ciel. Vue spectaculaire sur le cirque immaculé de Alpes et ses sommets étincelants. Je peux enfin réaliser ce fantasme absolu : avoir les pistes pour moi tout seul ! Le lendemain, miracle. Le soleil pétarade dans le ciel. Vue spectaculaire sur le cirque immaculé de Alpes et ses sommets étincelants. Je peux enfin réaliser ce fantasme absolu : avoir les pistes pour moi tout seul ! Me voilà qui m’élance dans la poudreuse pareille à une page blanche sur laquelle je trace des calligraphies à l’encre de mes skis. Le Refuge de Solaise est un roman à lui tout seul.
chaussette dessus ; tous mes potes en résidence universitaire font ça. N’empêche, Adèle n’est pas rassurée ; elle a un tournage de film dans deux jours. Et si elle ne peut même pas redescendre ? Bah, tu y vas en dameuse. Il paraît que le patron de l’hôtel sait les conduire. Ou sinon il y a la luge, mais c’est plus risqué. Tout cela se termine au génépi, et direction le lit. Blanc sur blanc Le lendemain, le ciel n’a pas l’air de meilleure humeur. Blanc sur blanc. On dirait un tableau de Malevitch. La styliste avait prévu un drone pour le shooting. “Oublie, si tu le sors par ce temps, il termine en Italie.” Pour nous réconforter, l’hôtel nous a concocté un gargantuesque petit déjeuner : croissants, jambon du pays, tomme de vache. Dans la bibliothèque, je déniche les Mémoires glacées de Nicolas Vanier mais j’opte finalement pour les Tractatus de saint Augustin que j’ai apportés avec moi. On ne sait jamais : si je ne réchappe pas à ce périple, autant assurer ma place au paradis. Le reste de la journée se passe en interviews et visites des futurs espaces dont l’ouverture est prévue fin 2019 : les chambres avec vue plongeante sur la vallée et le lac du Chevril ; le dortoir avec ses couchages à deux niveaux pour les nostalgiques des Bronzés font du ski ; le ski-shop et la salle de projection pour les jours de
L’hôtel 18 chambres, à partir de 300 euros la nuit, petit déjeuner
à 23 heures.) Réservé à la clientèle de l’hôtel les autres soirs.
inclus. Couchette individuelle dans le dortoir à partir de 100 euros la nuit avec accès à tous les services de l’hôtel.
Le spa Sauna, hammam, piscine de 25 mètres couverte, 5 cabines de soins équipés des produits Julie
Le restaurant
Exertier, une marque savoyarde.
Ouvert tous les jours au public à l’heure du déjeuner.
Informations
Possibilité également de venir y
Tél. +33 7 77 14 12 90.
dîner un soir par semaine
info@lerefuge-valdisere.com
(les télécabines ferment alors
Lerefuge-valdisere.com
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À gauche : Doudoune en nylon et duvet, TATRAS. Combinaison en matière technique et masque de ski en acétate, CHANEL. Ceinture en vinyle, MAISON BOINET. Body en polyamide et modal, WOLFORD. Cagoule en laine polaire, GO SPORT. À droite : Combishort en matière technique, CHANEL. Combinaison intégrale en coton, MAISON MARGIELA. Banane en vinyle, EASTPAK. Bottes en cuir enduit, ACNE STUDIOS.
Chemise en coton, PRADA. Gants en coton, MAISONÂ MARGIELA.
Pull en laine polaire, KENZO. Legging en coton, DAMART. Chapka en matière technique, PRADA SUR MYTHERESA. Chaussettes en laine, ACNE STUDIOS. Boots lacées en caoutchouc, ILSE JACOBSEN.
À gauche : Combinaison en coton, GALERIES LAFAYETTE. Body en modal et élasthanne, WOLFORD. Cagoule en jersey, REPETTO. À droite : Body en nylon, BASERANGE. Body à col roulé en modal et élasthane, WOLFORD. Cagoule en coton, RUDI GERNREICH. Bob en matière technique, GANNI SUR MYTHERESA. Chaussettes en laine et bottes en cuir, ACNE STUDIOS.
Doudoune en nylon et duvet, TATRAS. Veste zippée en polaire sherpa, FILA. Chapka en matière technique, PRADA SUR MYTHERESA.
Doudoune en nylon et duvet, TATRAS. Sweat en jersey technique et pantalon en laine, MAISON KITSUNÉ.
Combinaison en cachemire et laine et masque de ski en acétate, CHANEL. Banane en cuir, OFF-WHITE SUR MATCHESFASHION. Guêtres en laine, GO SPORT. Boots en caoutchouc, ILSE JACOBSEN.
Veste et pantalon en denim, LEVI’S. T-shirt en jersey technique, MAISON KITSUNÉ. Body en modal et élasthanne, WOLFORD. Cagoule en laine, RUDI GERNREICH. Sac en cuir, GIVENCHY.
Doudoune en nylon et duvet, TATRAS. Ensemble en laine polaire sherpa, FILA. Bijoux, perso.
Robe en coton, chaussettes en laine et bottes en cuir, ACNE STUDIOS.
Doudoune en nylon et duvet, TATRAS. Body à col roulé en modal et élasthanne, WOLFORD. Body en jersey imprimé, COPERNI. Guêtres en laine, ACNE STUDIOS.
Veste en polaire sherpa, OFF-WHITE. Col roulé en coton, MAISON KITSUNÉ. Combinaison en toile enduite, collection Coco Neige, CHANEL. Boots et bijoux, perso. Coiffure et maquillage : Sergio Corvacho Assistant photo : Bertrand Jeannot Assistante stylisme : Alizée Hénot
CRÉATEURS
PAR ADRIENNE RIBES ET LAURE AMBROISE
Les cinq Nouveaux arrivants ou talents confirmés, ces designers font la saison.
Photos © Alexandre Faraci / Lacoste SS20 backstage © Stella McCartney SS20 © Hugo Comte / Coperni SS20 © Bottega Veneta SS20 © Patou SS20
Focus sur le fédérateur Guillaume Henry chez Patou, le duo connecté Arnaud Vaillant & Sébastien Meyer chez Coperni, la radicale Louise Trotter chez Lacoste, le minimal Daniel Lee chez Bottega Veneta
et l’engagée Stella McCartney pour sa marque éponyme.
fantastiques 127
CRÉATEURS
Patou selon Guillaume Henry
La marque Jean Patou reprend vie avec la nomination du designer Guillaume Henry comme directeur artistique. Une renaissance impulsée par LVMH. L’Officiel : Votre première rencontre avec Jean Patou ? Guillaume Henry : Cela remonte à loin ! C’est une maison dont j’ai entendu parler dans les années 80 lorsque j’étais un petit garçon qui s’intéressait à la mode. Christian Lacroix était alors son directeur artistique et son travail m’a ému à un point tel que j’ai eu envie d’en faire mon métier. Que connaissiez-vous du créateur et de son histoire ? Je n’étais pas très calé sur l’histoire de Jean Patou mais j’avais quelques connaissances et images en tête de son travail, avec ce côté Biarritz, Deauville, son utilisation du tricot jersey mais aussi cette dimension couture, années 20 et Joséphine Baker. Cela évoque également tout un héritage autour de la marque avec des noms comme Karl Lagerfeld (1959) ou Christian Lacroix (1981) qui en ont repris la direction artistique. Cette aventure a-t-elle changé votre vie ? Elle m’a permis de repenser mon métier autour des notions de produit, de client, de timing, de budget. Bref, des choses raisonnables, avec toujours l’envie de créer et surtout d’habiller des gens, ce qui était la philosophie de Jean Patou. D’ailleurs, la première femme qui l’a inspiré était sa sœur. Et sa motivation première n’était pas d’être un designer concept ou extravagant mais un designer de son époque pour les femmes qui l’entouraient. Avec Patou, ce très joli nom, j’ai donc envie d’habiller les gens que j’aime.
À l’occasion de votre première présentation, vous nous avez donné rendez-vous dans votre atelier, c’est un lieu qui vous est cher ? On est dans une maison qui fonctionne à l’ancienne, tout est fait ici dans nos ateliers. Ce n’est pas un hasard si dans notre logo, le o, cette lettre ronde, est plus grosse que les autres. On est dans l’union, le travail d’équipe, la générosité. Ici, l’atelier ne se trouve pas dans les combles, c’est la première pièce que l’on traverse. Il est sur une rue passante sur l’île de la Cité. Ni rive gauche ni rive droite. Patou n’est ni bourgeoise ni urbaine, on veut proposer une vraie mixité à une personne qui n’a pas toujours les moyens du luxe mais qui a le goût des belles choses. Parlez-nous de votre collection printemps-été 2020… Auparavent je travaillais mes collections comme des histoires, elles auraient pu commencer par “Il était une fois”, mais je ne suis plus du tout là-dedans. Je suis dans une démarche de garde-robe singulière. Patou est une marque complice, qui porte des références joyeuses, légères, sympathiques. J’aime cette notion de sympathie. Dans cette collection, il y a une dimension positive, c’est important dans une période où tout est très apocalyptique. Cette garde-robe est à l’image de celle de mes plus proches amies, qui ont des vêtements complices qu’elles vont porter pendant quinze ans et quelques pièces très éditées pour des moments plus exceptionnels. Quelques mots sur votre collection hiver 2020 ? Elle sera caniculaire ! Par Laure Ambroise
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Photos © Damien Blottière © Patou SS20
CRÉATEURS
Coperni selon Arnaud Vaillant et Sébastien Meyer
Depuis leur départ de la maison Courrèges, nous n’attendions qu’une chose : leur come-back. Chose faite en février 2019. L’occasion de parler mode, digital et communauté.
plus récent, se focalise sur les questions d’interactivité avec le consommateur et d’amusement. Peut-être que, créer une connexion en 2019, c’est communiquer du plaisir ?
L’Officiel : Après le lancement de votre marque Coperni en 2013 (quatre collections jusqu’en 2015) et sept collections chez Courrèges, vous avez relancé votre marque l’an dernier. Quelles étaient les conditions de ce come-back ? Arnaud Vaillant et Sébastien Meyer : Prendre du plaisir, parler à notre public. Nous avons relancé Coperni de manière très naturelle – mais avec plus d’expérience, donc moins de stress, et surtout dans le but de créer des produits justes et désirables. Le prix est notre combat quotidien. Nous voulons nous ancrer dans la réalité avec des pièces à des prix abordables et habiller celles et ceux qui nous entourent. Nous avons aussi axé notre retour autour de projets digitaux pour être en contact direct avec nos clients et leur donner du pouvoir grâce à l’interactivité.
En deux saisons, vous avez proposé une garde-robe intelligente, qui mixe les codes couture, sixties et minimalistes 90s. Votre ADN ? L’idée du total look nous déplaît depuis toujours car elle emprisonne. Notre cliente doit se sentir libre de mixer une pièce Coperni avec d’autres qui lui sont chères. Nous voulons des modèles qui durent et ne sont pas associés fortement à une saison.
Coperni s’est rapprochée du digital avec @copernize_ your_life et, plus récemment, à l’occasion de la projection d’un court-métrage chez Apple pour le printemps-été 2020. Coperni est-elle une marque connectée ? Nous rêvons que Coperni soit la marque la plus connectée possible ! Nous sommes passionnés de technologie et c’est à nous de proposer de nouvelles solutions. Le format du défilé a été inventé il y a plus de 150 ans par Charles Frederick Worth… et depuis, plus rien. Avec les outils dont nous disposons, nous devrions être en mesure de créer plus de connexions et d’interactions. “Copernize your life” est une aventure interactive sur Instagram destinée à accompagner le retour de la marque et “Coperni Arcade”,
À quoi reconnaît-on une pièce Coperni ? Son effet trompe-l’œil ? Une forme numérique (sacs Swipe et Wifi) ? Le code QR des vêtements pour en identifier ses matières ? Une pièce Coperni doit répondre à plusieurs critères. Une simplicité de coupe, une idée de mouvement, un détail nouveau et une inspiration en général issue du design ou de la technologie. Avec qui travaille Coperni aujourd’hui ? Qui fait quoi ? Nous travaillons ensemble sur tous les aspects de l’entreprise. Même si nos rôles sont très séparés, Arnaud s’occupe du business. Je me charge de toute la création. Entre la traçabilité requise, le pouvoir des influenceuses, la vague sportswear… quel est votre cahier des charges ? Nous menons deux combats : l’innovation (du digital au durable) et le chic. Le mot “techno-chic” est le titre de notre cahier des charges. Par Laure Ambroise
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Photos © Jean du Sartel © Hugo Comte / Coperni SS20
CRÉATEURS
Lacoste selon Louise Trotter
Telle une tornade, la designer Louise Trotter, nouvelle venue chez Lacoste, assène sa vision radicale, androgyne et pointue au crocodile. Résultat ? Les fans comme les professionnels en redemandent. Une femme à la direction artistique de la maison Lacoste, jusque-là emmenée par des hommes (Christophe Lemaire, Felipe Oliveira Baptista), c’est une excellente nouvelle, un choix pertinent. Même si pour Louise Trotter la question de genre n’est pas l’essentiel et qu’elle ne fait pas un tabou de la différence homme-femme. Ses deux prédécesseurs avaient, en leur temps, et chacun à sa manière, écrit de jolies histoires. Il fallait une personnalité talentueuse et à l’identité de mode évidente pour prendre le relai. C’est chose faite. Louise Trotter, arrivée en octobre 2018, compte deux collections a son actif. Lorsqu’elle officiait chez Joseph, on avait senti la radicalité de la styliste britannique, ses silhouettes sans concession, ultra-précises, subtilement élégantes et décontractées. Elle y est restée neuf ans, et a su emmener la marque dans un monde minimal, puissant et poétique. À la fois très portable et presque intemporel. Des qualités qu’il faut posséder aujourd’hui dans ce monde de la mode un peu schizophrène. On sait d’elle qu’elle est née dans les années 70 dans le nord de l’Angleterre, que sa grand-mère était couturière, qu’elle est diplômée en design mode de l’université de Newcastle upon Tyne. Elle vénère Junya Watanabe, Rei Kawakubo, Comme des Garçons. Elle a fait ses classes chez Whistles, Calvin Klein, Gap et Tommy Hilfiger. Des enseignes qui lui ont permis de construire et d’affiner son identité et sa signature stylistique. Pour apprivoiser le célèbre crocodile, la Britannique aux dents
du bonheur et à la réputation low profile, peaufine son approche radicale, joue sur l’androgynie, les codes du streetwear et du sport pur. Et elle semble savoir la chance qu’elle a de pouvoir s’amuser avec un héritage aussi puissant. Cette maman de trois enfants jongle entre travail assidu – une qualité qu’elle a héritée de ses parents – et ténacité à toute épreuve. La voici désormais entourée d’une quarantaine de designers, une équipe qu’elle aime nourrir de références visuelles mais aussi sonores. En plus de superviser les collections, elle est aussi chargée de contrôler l’image de l’animal fétiche, superstar dans l’imaginaire français et international. D’emblée, Louise Trotter a puisé dans le vaste patrimoine des icônes nextdoor de la marque. Sa première collection a combiné unisexe, athleisure et minimalisme, poursuivant cette image BCBG et sportive qui séduit les fans de la marque. Avec cette deuxième collection printemps-été, elle réitère la performance et nous bluffe. Miss Trotter revisite les classiques du tennis et du golf : coupes franches, proportions légères, matières somptueuses, détails de cuir et de tricot twistés, volumes parfaitement maîtrisés… Le logo, quant à lui, s’imprime style Art déco et rencontre le monogramme L. Quant au crocodile de Robert Georges dessiné en 1926, il se renouvelle sur des poches plaquées ou sur des mocassins. Louise Trotter insuffle un esprit radicalement contemporain à l’héritage Lacoste, jouant sur le contraste, l’humour et la fidélité à une garde-robe qui met du chic et de l’élégance dans les habits du quotidien. Par Adrienne Ribes
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Photos Cyril Masson © Alexandre Faraci / Lacoste SS20 backstage Crédits © photo
CRÉATEURS
Bottega Veneta selon Daniel Lee
En deux collections, le nouveau designer de la maison Bottega Veneta, Daniel Lee, est devenu son héros incontesté et incontestable. Inconnu du grand public jusqu’à sa nomination en juin 2018, le nouveau designer de Bottega Veneta ne l’était pas davantage des plus grandes maisons. Pourtant, ce jeune Anglais, né à Bradford dans le Yorkshire, a étudié à la fameuse Central St Martins (promotion 2011) comme tout designer britannique qui se respecte, et dispose d’un CV impressionnant à seulement 33 ans. Sur ce dernier s’y succèdent Martin Margiela, Balenciaga au côté de Nicolas Ghesquière et surtout Phoebe Philo chez Céline (de 2012 à 2018) dont il fut le directeur du prêt-à-porter. Dès sa première collection – datée prefall – chez Bottega Veneta, Daniel Lee donne toute la mesure de son talent. Il y raconte sa garde-robe idéale à travers une mode stricte sans être austère, qui incarne l’idée d’une féminité assumée. Il poursuit sur sa lancée lors d’un premier défilé automne-hiver 2019-20 dans lequel il met en avant l’ADN de la marque italienne, avec bien évidement le célèbre cuir au tissage intrecciato, qu’il a revisité en format oversized. La femme Bottega s’y montre conquérante, vêtue de combinaisons de cuir, de jupes trapèzes et d’encolures basculées, le tout accessoirisé du sac The Sponge Pouch, l’emblématique pochette de Bottega Veneta, et de bottes motardes aux semelles à plates-formes démesurées. Chez Daniel Lee, les accessoires ne sont jamais uniquement des accessoires. Ils fusionnent avec la silhouette, imposant un tout cohérent. À peine montrés, ils sont sold out. Souvenez-vous, l’été dernier, des fameuses sandales nouées aux chevilles à semelles carrées
vues sur les Instagram de Rihanna (qui en possède pas loin d’une douzaine de paires) et de Rosie Huntington-Whiteley, qui affiche pas moins de 39 posts sur le sujet. Et ceci sans parler de la liste d’attente pour les mules BV Lido. Daniel Lee transforme donc tout ce qu’il touche en succès et continue avec sa collection printemps-été 2020, une ode au minimalisme avec une multitude de robes en maille côtelée près du corps aux découpes asymétriques ou graphiques, des trenchs en cuir XXL mais surtout le nouveau it-bag de la saison : le Hobo Intrecciato Oversized, une pure beauté. Sans même évoquer les très désirables mules de cette collection… Des inspirations de Danie Lee, on connaît certaines grandes lignes, telle l’Italie et sa culture, son sens de la famille et l’importance du cinéma. Mais aussi l’idée de la sensualité et une vision large de la beauté. Lorsque Daniel fait référence à des personnalités, il évoque Monica Vitti, PJ Harvey, Stefano Pilati ou Gianni Agnelli. Et de nombreux artistes tels qu’Irving Penn, Helmut Newton, Rachel Whiteread, et plus particulièrement Ellsworth Kelly, peintre et sculpteur américain dont les œuvres sont apparentées aux courants du Color Field painting et au minimalisme. C’est donc en moins d’un an que Daniel Lee chez Bottega Veneta est devenu l’un des designers les plus influents du monde de la mode, affichant pas moins de quatre récompenses remportées aux Bristish Fashion Awards en tant que Créateur de l’année, Créateur britannique de l’année - Vêtements femmes, Créateur d’accessoires de l’année et Marque de l’année. Un succès à couper le souffle. Par Laure Ambroise
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Photos © Bottega Veneta ©Bottega Veneta SS20
CRÉATEURS
Stella McCartney selon Stella McCartney
En matière de mode équitable, la créatrice ne lâche rien. Elle fait briller sur les podiums, et depuis le lancement de sa griffe éponyme en 2001, une approche contemporaine, glamour et éthique du tailoring, soucieuse du monde et des êtres qui le peuplent. Née en Angleterre en 1971, Stella McCartney est inscrite avec ses deux sœurs et son frère à l’école publique dans le Sussex. Elle grandit dans une ferme plutôt modeste, sans doute pour être protégée du star system et des turbulences du Swinging London dont font partie ses parents. Malgré cela, les chats ne faisant pas des chiens, la jeune fille est très vite attirée par la mode et le stylisme. Diplômée du St Martins College of Art & Design, son défilé de fin d’études ressemble à un happening rock’n’roll. Son père signe la bande-son, et les supermodèles de l’époque, Naomi Campbell, Yasmine Le Bon et Kate Moss – ses copines – composent un casting cinq étoiles. En 1997, à 26 ans, elle est nommée directrice artistique chez Chloé, succédant à Karl Lagerfeld. Elle y reste quatre ans, y rencontre Alasdhair Willis, qui devient son mari. Puis elle se lance et crée sa marque avec le soutien de Kering. L’union durera dix-sept ans. En juillet dernier elle annonce rejoindre l’écurie LVMH pour booster la stratégie de développement durable au sein de sa marque et des labels du groupe et ouvre une boutique à Londres qu’elle présente comme la plus durable de la ville. Elle réaffirme ses convictions pour une mode toujours plus responsable. Vegan comme sa mère, la moitié de ses collections est éco-responsable (coton organique, alpaga, polyester recyclé…) et surtout sans cuir ni fourrure. Sa marque green s’étend à la mode enfant depuis 2010, à la parfumerie
avec deux parfums, à la cosmétique avec la ligne Care (conçue sans paraben, conservateur et silicone), à la mode homme depuis 2017, mais aussi à de nombreuses collaborations, notamment avec Adidas. Ultra-inspirante, Stella McCartney est devenue chef de file d’un luxe éthique, montre que mode clean et business sont tout à fait compatibles. “Chaque jour nous défions l’industrie de la mode pour nous améliorer, questionnons le statu quo et provoquons le changement”, raconte-t-elle. Sa collection printemps-été à 75 % éco-friendly (“la collection la plus éco-responsable que nous ayons jamais imaginée”) convoque les amoureux de la nature : lignes sexy, volumes légers, robes bains de soleil en coton organique, coupe-vent en nylon régénéré, souliers à talons en bois issus d’une agriculture durable, tailleurs en drap de laine traçable… Comment faire de la mode un terrain de jeu désirable et engagé ? Stella McCartney semble avoir trouvé la réponse. Par Adrienne Ribes
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Photos © Mary McCartney © Stella McCartney SS20
Photo LV x Lol
Qiyana, membre du groupe virtuel True Damage, habillée en League of Legends, la collection capsule de Louis Vuitton.
TENDANCE
Le geek, c’est chic Collections inspirées des jeux vidéo, personnages de gaming habillés par les marques… les créateurs investissent le virtuel pour mieux séduire les nouvelles générations. Bienvenue dans la mode Second Life. PAR SOPHIE ABRIAT
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TENDANCE
L’an dernier, Louis Vuitton a créé son propre jeu vidéo baptisé “Endless Runner” au design rétro très années 80, inspiré du set du défilé automne/hiver 2019 présenté par Virgil Abloh.
personnages du jeu. Toujours pour la vie réelle, Louis Vuitton a également dévoilé sa collection capsule League of Legends, croisant références au jeu et inspirations personnelles de Nicolas Ghesquière. Pourquoi les marques s’inspirent-elles de l’univers du gaming, généralement associé à la figure réputé peu glamour du geek ? Le gaming, une culture à part entière Populaire, réservé aux geeks, sous-culture… Les clichés sur l’univers du gaming sont tenaces mais ils s’érodent progressivement. “Le gaming assoit sa place en tant que culture à part entière, c’est une forme d’entertainment avec ses propres référents que l’on consomme de la même façon qu’une série ou un film”, souligne Sofia Slimani, consultante insights de l’agence Nelly Rodi. “Il n’est d’ailleurs pas anodin que des géants de la Silicon Valley lancent leur plateforme de streaming de parties de jeux vidéo avec pour certaines, comme Twitch, plusieurs dizaines de millions de visiteurs uniques par mois”, ajoute Christelle Tartivel, qui travaille également au sein de Nelly Rodi en tant que creative manager. Et les jeux vidéo, au contenu de plus en plus esthétique, sont en interaction directe avec la musique, le cinéma, la mode, l’architecture, le design, etc. L’héroïne Qiyana, par exemple, a fait une apparition dans son look Louis Vuitton dans le premier clip vidéo du groupe virtuel de hip-hop True Damage lancé par Riot Game – le même studio américain qui a créé League of legends, lequel ne compte pas moins de 100 millions de joueurs mensuels. “Le jeu vidéo est une grammaire de création multiple dans son essence. De Tetris à Death Stranding – cette superproduction de Hideo Kojima, figure majeure de l’industrie du jeu vidéo (conçu avec des personnages interprétés par de véritables acteurs tels que Léa Seydoux) – en passant par Pac-Man : le panel est large”, souligne Mohamed Megdoul, fondateur de la revue Immersion consacrée au jeu vidéo. En France, le jeu vidéo représente la première industrie culturelle, devant la littérature, le cinéma et la musique. Il est même aujourd’hui considéré comme une forme d’art : dès 2013, le MoMA a fait l’acquisition de plusieurs dizaines de jeux vidéo – pour une collection permanente dans son département design – tels que Sims, Myst,
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Photo Burberry
En 2015, précurseur, Nicolas Ghesquière choisissait pour une campagne Louis Vuitton une héroïne du jeu Final Fantasy XIII, suscitant à l’époque de nombreuses interrogations sur notre rapport au virtuel et aux apparences. Depuis, les choses se sont accélérées et la mode s’est largement dématérialisée : influenceurs digitaux à la Lil Miquela, Blawko et Noonoouri, avatar-styliste Yoox Mirror, mannequins fictifs Balenciaga et Balmain, artistes numériques commissionnés par des marques, vêtements 100 % virtuels (signés Carlings ou The Fabricant), robots humanoïdes posant dans des séries mode… la fusion entre le monde réel et le monde virtuel est consommée. Dans ce contexte de digitalisation croissante, la mode se rapproche de plus en plus de l’univers des jeux vidéo, une culture à part avec ses codes, ses fans et ses propres règles. L’an dernier, Louis Vuitton a créé son propre jeu vidéo baptisé Endless Runner au design rétro très années 80, inspiré du set du défilé automne/hiver 2019 présenté par Virgil Abloh. Quant à Nicolas Ghesquière, il a imaginé une tenue pour Qiyana, héroïne du célèbre jeu vidéo League of Legends, le tout premier “skin” (personnage, en langue gaming) de prestige pour la Maison composé d’un haut cropped et d’un pantalon taille haute accompagné d’un sac Dauphine et des Star Trail boots. Enfin, Burberry a lancé, fin 2019, son premier jeu vidéo B Bounce : les joueurs s’amusent à faire bondir une mascotte en forme de biche jusqu’à atteindre la lune, grâce à des super-doudounes signées Riccardo Tisci. Mark Morris, vice-président senior du site e-commerce de Burberry, a ainsi déclaré : “B Bounce est notre première extension dans ce format pour divertir et toucher nos nouveaux clients les plus jeunes dans le monde entier. Nous savons qu’ils vivent dans un environnement de plus en plus ludique, en ligne et hors ligne. Nous avons hâte de les voir rejoindre la communauté Burberry et de leur faire découvrir la nouvelle collection de doudounes de cette manière.” Et depuis quelques mois, on peut également habiller les Sims avec des vêtements Moschino (Sims 4). Ces pièces sont disponibles en boutique : leggings, hoodies, sacs, etc. sont imaginés dans des imprimés qui imitent la pixellisation des vêtements des
La mascotte du jeu en ligne “B Bounce” de Burberry.
STYLE
“Le public du jeu vidéo n’est absolument pas celui qu’on s’imagine : l’âge moyen d’un joueur est de plus de 30 ans, et quasiment un joueur sur deux est une femme.” Mohamed Megdoul
Un espace infini de création et d’imaginaire Se dessine ainsi un écosystème global qui encourage les rapprochements mode/gaming. “Aujourd’hui, les directeurs artistiques dans les Maisons ont autour de 30 ans, ce sont souvent des personnes qui ont joué aux jeux vidéo et qui sont influencées par ces esthétiques. Il y a moins de réticences à aller piocher dans cet univers-là, qui constitue pour les marques de mode un véritable espace de création et d’imaginaire”, souligne Mohamed Megdoul. Surtout que, pour les nouvelles générations, le jeu est devenu un vrai marqueur d’identité. “C’est un moyen de sociabiliser qui est très fédérateur. En jouant, la génération Z partage des moments et des expériences avec ses amis et lorsque ces jeunes ne jouent pas, ils regardent des contenus liés à l’univers du gaming : des tournois de e-sport ou des vidéos YouTube sur les gamers, leurs nouvelles icônes, par exemple. C’est ici que les marques doivent venir les chercher, c’est un espace de visibilité
énorme pour elles, qui peut prendre la forme de partenariats, de placements produits… Et les marques commencent seulement à appréhender ces nouvelles règles du jeu”, appuie Ambre Venissac. Les jeux vidéo créent, en effet, des communautés de passionnés très soudées, autour d’esthétiques, de personnages et de performances. À titre d’exemple, en 2018, 200 millions d’utilisateurs de YouTube ont consommé des contenus dédiés au jeu vidéo quotidiennement sur cette plateforme. Rien d’étonnant donc à ce que la mode se lance à l’assaut de ce marché. “Le jeu vidéo est un média qui permet de toucher de nouvelles typologies de consommateurs, qui n’ont pas forcément le budget pour s’acheter des pièces réelles, mais qui ont, à travers le jeu, la possibilité de se lier à la marque de façon émotionnelle”, ajoute Ambre Venissac. Quid de la transformation en acte d’achat ? “Ce n’est pas parce qu’on joue à un jeu imaginé par une marque qu’on va acheter de vraies fringues. Il faut réussir à embarquer les gamers dans un nouvel imaginaire et, à ce niveau-là, certaines propositions de marques demeurent encore un peu gadget. Les gamers ont un fort esprit critique, si les marques ne s’investissent pas suffisamment, les critiques peuvent être violentes…, précise Mohamed Megdoul. Comme la mode a mis du temps à se positionner sur la culture urbaine et le rap, par exemple, elle prendra du temps à aller sur ce terrain-là, ajoute Sofia Slimani. D’une manière générale, Louis Vuitton se montre précurseur, il avait ouvert la voie avec sa collaboration avec Supreme en matière de streetwear et ce qu’il propose autour de League of Legends est pertinent.” Avec à la clef des opportunités business et créatives considérables.
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Photo Moschino /The Sims tm /EA
Another World, Space Invaders ou encore Super Mario Bros. “Le public du jeu vidéo n’est absolument pas celui qu’on s’imagine : l’âge moyen d’un joueur est de plus de 30 ans, quasiment un joueur sur deux est une femme et le public se féminise de plus en plus”, ajoute le spécialiste. L’univers des jeux vidéo d’arcade intéresse également les marques de luxe, en particulier dans le secteur de la beauté. En 2018, Chanel a ouvert à Tokyo et à Toronto des Coco Game Centers, des pop-up stor es beauté détournant l’univers des jeux d’arcade : les gloss remplaçaient les joysticks, la machine à pince permettait de piocher rouges à lèvres, vernis et fards à paupières… La même année, Dior imaginait un duel maquillage inédit entre son égérie Bella Hadid et la make-up artist coréenne Pony sous la forme d’un jeu vidéo à l’ancienne, surfant sur la tendance du rétro-gaming. “Pendant longtemps, la figure du geek, un passionné de high-tech et de science-fiction, souvent seul et perçu comme bizarre, a pu sembler en opposition avec les univers glamour de la mode et de la beauté. Mais cette image a beaucoup évolué, elle est devenue tendance et elle est aujourd’hui mieux valorisée d’un point de vue créatif et artistique”, souligne Ambre Venissac, responsable marketing mode et beauté au sein du bureau de tendances Carlin Creative.
Personnages vêtu en Moschino x Sims 4 dans le jeu vidéo Les Sims 4.
CINÉMA
Cœurs en feu Cavale sensuelle, brûlante et politique, le film “Queen & Slim” réinvente le road movie le poing levé. Il raconte l’Amérique d’aujourd’hui et les expériences complexes des Afro-américains dans cette société, devenant une œuvre totale de protest art.
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PAR DELPHINE VALLOIRE
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Jodie Turner-Smith et Daniel Kaluuya.
Photos Royalty Holdings LLC. Tous droits rĂŠservĂŠs - Andre D. Wagner via Universal Pictures International Entertainment 2019
Bokeem Woodbine, alias Uncle Earl dans le film.
Jodie Turner-Smith et Daniel Kaluuya.
CINÉMA
Par respect et pour capter au plus près les émotions, Melina Matsoukas a étudié les vidéos d’arrestations, de cette épidémie de morts violentes d’innocents qui ont provoqué la colère publique ces dernières années : Sandra Bland, Emmett Till, Trayvon Martin, Mike Brown, Eric Garner…
Les planètes se sont étrangement alignées pour permettre la genèse de Queen & Slim, qui compte déjà parmi ses adorateurs John Legend, Natalie Portman, Snoop Dogg et Jennifer Aniston. Tout d’abord avec la rencontre de deux femmes singulières qui ont créé et porté ce film à bout de bras, tout en gardant le pouvoir de A à Z pour raconter cette histoire. D’un côté, la réalisatrice Melina Matsoukas, dont c’est le premier longmétrage, qui a fait ses armes avec des vidéos, notamment Formation, de Beyoncé, et We Found Love, de Rihanna, pour lesquelles elle a gagné deux Grammy. De l’autre, la grande gueule surdouée Lena Waithe, scénariste et productrice (Master of None), mais aussi actrice dans le sous-estimé Ready Player One, de Steven Spielberg, et militante queer LGBT qui a grandi dans le très brutal South Side de Chicago avant d’étudier les films et scripts d’Aaron Sorkin, Spike Lee ou Spike Jonze. Celle-ci a mis sa vie dans ce scénario, des détails personnels mais aussi sa colère, comme elle l’explique sur le site Man Repeller : “J’ai vraiment écrit ça comme un cri de rébellion. […] C’était moi qui criais dans une pièce en écrivant sur moi-même, même si c’est un film très calme et intime. C’est une méditation sur le fait d’être noir, sur ce que signifie être noir en Amérique, ce que signifie tomber amoureux, ce que cela signifie de penser que vous vous connaissez vous-même, toutes ces choses…” Des interrogations complexes de toute une génération que l’on retrouve déclinées depuis novembre dans la meilleure série de l’année, Watchmen, sur HBO. L’histoire de Queen & Slim trouve directement sa source dans l’actualité brûlante des États-Unis et le mouvement Black Lives Matter. Par une nuit d’hiver à Cleveland, Ohio, un couple termine son rencard Tinder un peu raté dans un dinner. La fille (l’extraordinaire révélation Jodie Turner-Smith) est une avocate brillante mais dure et solitaire qui vient de perdre un procès avec son client condamné à la peine de mort. Le garçon est un gars gentil, employé croyant et prévenant (incarné par le phénomène
de Get Out Daniel Kaluuya). Il la raccompagne en voiture quand ils sont arrêtés pour infraction mineure par un flic raciste qui devient soudainement agressif. Une seconde et six jours Tout va très vite, le policier tire dans la cuisse de Queen – sortie de la voiture pour protéger les droits de Slim – et, après un combat rapide avec Slim dans la neige, le coup part. Slim et Queen deviennent des hors-la-loi en une fraction de seconde. Par respect et pour capter au plus près les émotions, Matsoukas a étudié les vidéos d’arrestations, de cette épidémie de morts violentes d’innocents qui ont provoqué la colère publique ces dernières années : Sandra Bland, Emmett Till, Trayvon Martin, Mike Brown, Eric Garner… Ici, tout est filmé par touches de sensations : le temps mort devant l’indicible, la neige teintée de sang, l’expression incrédule de Slim, en plein rush d’adrénaline, et l’instinct de survie qui reprend le contrôle. À ce moment-là, leur fuite commence, un voyage de six jours qui va les emmener de l’Ohio au Mississippi, jusqu’en Floride, louvoyant à l’aveugle entre vrais et faux amis. Premier stop : l’oncle de Queen, Earl (Bokeem Woodbine) à La Nouvelle-Orléans, un vétéran souffrant de stress post-traumatique qui vit dans son propre petit royaume retranché, une maison décrépite mais majestueuse avec son harem de princesses bling-bling. À la fois effrayant et sympathique, Earl surnomme ironiquement les deux fugitifs “les Black Bonnie and Clyde” mais finit par leur fournir un nom à contacter, un peu d’argent et une superbe Pontiac Catalina turquoise pour faire la route “cachés bien en vue”. Queen et Slim ressortent de là brusquement relookés malgré eux : robe panthère, bottes zébrées et coupe Grace Jones pour Queen et survêtement bordeaux en velours pour Slim, tous deux ultra-visibles mais bizarrement plus forts qu’avant.
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CINÉMA
“Pour moi, Queen était Malcolm X et Slim était Martin Luther King, et à la fin du film, ils changent de place.” Lena Waithe
Hypnose Dans cette étrange renaissance à la vie, ils sont accompagnés presque non-stop par une musique exaltante. Melina Matsoukas, qui travaille depuis des années avec Beyoncé, Solange, Rihanna ou Lady Gaga, a mis un maximum de signifiant dans sa BO supervisée par Devonté Hynes, de Blood Orange. Solange a donné une chanson, Almeda, et a aussi conseillé le Come Running, de Herbie Hancock. Lauren Hill a composé Guarding the Gates pour le film, son premier single depuis cinq ans. Matsoukas a aussi conclu un partenariat avec Motown Records pour s’assurer d’avoir le meilleur du hip-hop, de la soul, du blues et du R’n’B : des classiques (Duke Ellington et John Coltrane, Fela Kuti ou encore Runnin’, de The Pharcyde, en 1995) à la nouvelle garde (retenez bien ces noms : Choker, Moses Sumney, Vince Staples, 6lack, Mereba, Burna Boy) pour “honorer l’héritage de la musique noire et la diversité qui l’habite”. En ce qui concerne l’image, la sophistication prime, avec un soin maniaque du chef op’ Tat Radcliffe pour que chaque plan soit fort, presque hypnotique, un peu dans la lignée du Moonlight, de Barry Jenkins qui a remporté trois oscars en 2017. Toujours dans le même souci perfectionniste, la réalisatrice a choisi quatre photographes de plateau extraordinaires venus du monde de l’art, de la mode ou du photoreportage : Campbell Addy, Awol Erizku, Lelanie Foster et Andre D. Wagner qui ont tous interprété le film à leur manière (une exposition suivra peut-être en 2020). Le pouvoir de l’image La photographie intègre l’histoire quand un cliché magnifique du couple en cavale est pris par un gamin dans un garage et devient par hasard un symbole de la lutte de toute la communauté noire contre la brutalité policière. Dans le film, c’est Queen qui insiste pour que la photo soit prise :
“Les photos ne sont pas juste une histoire de vanité. Elles sont la preuve de notre existence.” Cette image devient étendard, sur les murs, les T-shirts, et ses effets secondaires, imprévisibles, se déroulent par ricochets parfois dévastateurs. De même, la vidéo de l’accident filmée automatiquement sur la voiture du policier devient virale, elle tourne sur tous les écrans montrant le drame et aussi l’innocence du couple en légitime défense. Devenus malgré eux les visages d’un combat, ils sont à la fois protégés et menacés par tous ceux qu’ils croisent, sans savoir qui est l’ami et qui est l’ennemi. Comme le jeune pompiste que Slim tente de braquer, bien plus terrifiant que lui, un amoureux des armes à feux au regard dément qui le supplie de tenir son Glock en susurrant : “Quelque chose dans le fait de tenir une arme létale me fait me sentir tellement vivant.” Made in USA. It’s complicated Queen et Slim tentent le destin de bien des façons comme pour se venger du mauvais coup de dés qui a fait basculer leurs vies. Ils traversent du nord au sud et en travers ce pays soumis à des vents contraires complexes, et la route les met progressivement à nu. Lena Waithe a construit son duo sur un schéma précis : “Pour moi, Queen était Malcolm X et Slim était Martin Luther King, et à la fin du film, ils changent de place.” Jour après jour, le duo imparfait devient couple et le chemin devient celui tout aussi dangereux de l’amour, qui mène de l’indifférence à la passion sacrificielle. Prêts à risquer leur vie pour une danse dans un boui-boui de campagne où un vieux musicien en Stetson et costume à paillettes (le légendaire Little Freddie King) chante un blues brûlant. Cette love story file au vent dans la Pontiac turquoise, de la neige au soleil, de la nuit à la lumière, jusqu’à une fin sublime, surprenante et élégiaque, bercée par le Doomed de Moses Sumney. Queen et Slim sont revenus à l’essence même de l’amour : deux personnes seules contre tous. Uniques.
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Photo Puppets & Puppets
L’artiste Jane Moseley en Puppets & Puppets collection printemps-été 2020.
DÉCRYPTAGE
Weirdos Les excentriques, ou “weirdos”, nous fascinent par leur étrangeté autant que par leur courage ou leurs intuitions. De l’inventeur Nikola Tesla à Lady Gaga, en passant par Warhol
Weirdos PAR DELPHINE VALLOIRE
ou Lynch, ils sont à la pointe de leur époque et peut-être
même de la prochaine. On les aime car ce sont eux qui vont changer le monde.
Weirdos 151
Photos New Line Cinema/Twin Peaks Productions - Jeff Katz Photography/Paisley Park Enterprises, Inc. - Emma McIntire/Getty Images for Spotify - Jaimie McCathy/Getty Images
De haut en bas : David Lynch sur le tournage de “Twin Peaks: Fire Walk with Me” ; Prince dans “Sign o’ Times” en 1987 ; Billie Eilish au Billie Eilish Experience par Spotify en mars dernier à Los Angeles ; Marc Jacobs au Love Ball III en juin dernier à New York.
DÉCRYPTAGE
“Les mêmes choses pour lesquelles j’ai été attaquée à l’époque sont devenues celles pour lesquelles je suis aujourd’hui récompensée.” Natasha Lyonne
Les cheveux rouges fous, un visage lunaire, Natasha Lyonne, actrice au parcours atypique même pour Hollywood, a créé, écrit, réalisé cette année pour Netfl ix une série sur un concept barjo : une geek trentenaire déglinguée (jouée par elle-même) n’arrête pas de revivre sa soirée d’anniversaire et de mourir de cinquante façons différentes. Un jour sans fi n, mais revu par Hunter S. Thompson. Russian Dolls a cartonné, un succès imprévu accompagné de nominations. Dans The Observer, Natasha Lyonne avoue : “Vous voyez, je suis un message d’espoir pour tous les weirdos qui ont passé un sale moment au lycée. Les mêmes choses pour lesquelles j’ai été attaquée à l’époque sont devenues celles pour lesquelles je suis aujourd’hui récompensée.” Difficile de défi nir exactement “weirdo”. La défi nition plébiscitée par l’institution de l’argot américain, Urban Dictionnary, donne à peu près ceci : “Quelqu’un qui est différent de tous les autres, mais c’est bien car il est lui-même et pas comme tous les autres connards artificiels qu’on voit aujourd’hui. C’est OK d’être un weirdo, et si quelqu’un vous dit le contraire, dites-lui de s’enfoncer un cactus là, dans le cul.” Dans un dictionnaire classique, on trouve une autre défi nition un peu moins encourageante : “Une personne qui est extraordinairement étrange ou excentrique.” Quelqu’un qui ose afficher une telle différence a forcément un certain penchant pour la création. Il n’est donc pas étonnant de croiser de sublimes weirdos sur la scène pop-rock internationale. Parmi eux, évidemment, on compte la reine du costume extravagant, Lady Gaga, et ses fans auto-proclamés “Petits monstres”, ou l’idole géniale Prince qui voulut, un temps, être rebaptisé sous le nom d’un symbole imprononçable. Dans une vidéo hilarante sur Vimeo, le réalisateur Kevin Smith raconte sa semaine avec Prince pour les besoins d’un documentaire sur la religion, où il est complètement dépassé par l’esprit tortueux du Kid de Minneapolis. Au bout de quelques jours, l’assistante personnelle du musicien tente de lui expliquer les choses : “Prince vit dans le monde de
Prince depuis un bout de temps. Il peut demander un chameau à 3 h du matin, ici dans le Minnesota, en janvier, sans s’imaginer que ce soit physiquement ou psychologiquement impossible. Ce n’est pas de la malice, seulement une autre manière de penser.” Évidemment, le public rit de bon cœur mais sous cette blague se trouve une vérité : ces personnages hors normes n’ont pas forcément la conscience de l’impossible. Ils tentent des expériences a priori irrationnelles pour réussir là où d’autres n’auraient vu que le mur des impossibles. Pour Greta Thunberg, 16 ans, il n’était pas fou de penser que l’on peut motiver les adolescents du monde entier pour régler les problèmes écologiques graves qui se posent aujourd’hui. Et les gouvernements sont en train d’expérimenter la vague internationale de manifestations générées par cette lycéenne suédoise. Perruque peroxydée À la fi n du xixe siècle, Nikola Tesla, ingénieur de génie serbo-croate, a inventé le courant alternatif, révolutionné l’approche de l’électricité et eu la prescience d’Internet et de la Wi-Fi, entre autres. Tout le monde l’a pris pour un fou, une perception un peu aggravée par ses bizarreries : sa mémoire eidétique (mémoire absolue, ndlr), sa phobie des perles, ses tocs, son amour fou des pigeons, entre autres. Il y a quinze ans, un entrepreneur visionnaire lui rend hommage en baptisant Tesla sa fi rme de construction de voitures électriques. Elon Musk n’est pas en reste de visions : après avoir fait fortune avec PayPal, il a fondé SpaceX, spécialisé dans l’aérospatiale et le service de transports dans l’espace ainsi qu’une compagnie de forage de tunnels en Californie appelée (ironiquement ?) The Boring Company, qui pourrait selon lui “être ou pas une réussite”. Ajoutez à cela quelques déclarations très farfelues, sur les extraterrestres, l’intelligence artificielle ou les cyborgs, ainsi qu’une étonnante romance avec la weirdo du rock, la chanteuse et artiste canadienne Grimes, et vous obtenez un parfait couple “weirdo power”.
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Photo Bun limited 2019
Matty Bovan collection printemps-ĂŠtĂŠ 2020.
DÉCRYPTAGE
“Vraiment, je ne suis pas si étrange. Tout le monde a son petit… les habitants de l’abîme et tout ça.” David Lynch
Une relation d’amour-haine avec le public que le maître du pop art, Andy Warhol, aurait sans doute apprécié comme une œuvre à part entière. Roi des weirdos, Warhol, avec son éternelle perruque peroxydée, son hypocondrie et son accumulation maladive d’objets du quotidien, eut la vision de cette gloire instantanée (“les quinze minutes de célébrité”) qui régit aujourd’hui les réseaux sociaux. Il a lui aussi été rejeté par les cercles d’art de New York dans les années 50 avant de créer lui-même son propre biotope, la Factory. David Lynch, le réalisateur de deux des fi lms les plus weirdos de l’histoire du cinéma – Eraserhead et Inland Empire – n’a lui non plus jamais fait de concession à la normalité. En 1979, durant une interview, il explique : “Vraiment, je ne suis pas si étrange. Tout le monde a son petit… les habitants de l’abîme et tout ça.” Depuis, il a aussi créé une série aussi sidérante qu’hallucinogène Twin Peaks: The Return en 2017, un petit bijou qui vrille le cerveau d’eff roi et ravit par son audace dans le même temps. Lynch, sans doute influencé par sa pratique de la méditation, a aussi expliqué : “Vous ne vous connaîtrez pas vousmême en vous parlant ou en vous regardant dans le miroir, mais en plongeant en profondeur et en expérimentant votre être.” Cette voix intérieure, de nombreux musiciens la suivent. Thom Yorke – dont le tube Creep avec Radiohead en 1993 est devenu l’hymne des weirdos (“But I’m a creep, I’m a weirdo / What the hell am I doing here ? / I don’t belong here”) – a réalisé en 2019 avec Paul Thomas Anderson un court-métrage de musique, Anima, diff usé sur Netfl ix. Billie Eilish, autre rebelle ultradouée, refuse, elle, de sourire ou de se vendre en look sexy au pays des pop-stars Barbie. Comme l’a écrit le fameux stratège de la Silicon Valley, Mike Lazerow, weirdo décomplexé : “Au lieu d’essayer de faire entrer nos enfants dans le moule, nous devrions les aider à célébrer leurs différences.”
Paillettes roses et crinolines géantes La grande prêtresse de la mode Diana Vreeland, qui avait une passion pour les excès, enjoignait déjà ses enfants à ne pas être dans la moyenne mais soit très mauvais soit excellents. Mentor de nouveaux canons de beauté comme Penelope Tree ou Cher, elle voyait la normalité comme une mort lente de la personnalité. Qui dit normal, dit ennui. Surtout dans la mode. Le créateur Marc Jacobs, par exemple, semble s’être libéré cette année sur son compte Instagram et porte avec une élégance teintée d’ironie des vestes à paillettes roses, des foulards et des baskets dans une tempête de couleurs des plus créatrices. La mode, à l’unisson, a rarement été autant inspirée. À Londres, le créateur Matty Bovan, vit à 29 ans avec ses parents dans le Yorkshire mais révolutionne les podiums à grands coups de crinolines géantes, déconstruites et bariolées. Au quotidien, il porte des cheveux arc-en-ciel, des looks délirants et du make-up depuis ses 16 ans. Il confiait à l’Evening Standard l’an dernier : “Aujourd’hui, je marchais jusqu’au métro, et ce vieil homme s’est mis à me dévisager, littéralement avec dégoût. J’ai pensé : ‘Yep, c’est OK.’ Parce que je n’aime pas les statu quo et je ne les ai jamais aimés.” Ce qui ne l’empêche pas aujourd’hui de travailler avec les meilleurs, Stephen Jones ou Katie Grand. Mais le grand gagnant du combat de l’étrange contre l’ennui reste bien entendu Alessandro Michele pour Gucci, champion ultime des weirdos, au succès flamboyant, qui porte en lui un profond amour de l’excentricité, de l’empathie et de la curiosité. Ses castings célèbrent les différences et bousculent les a priori avec des beautés atypiques comme Ellia Sophia. La collection Resort 2020 présentée à Rome constitue une parfaite ode au “beau bizarre”. Baudelairien, un idéal insolite de l’extra-ordinaire.
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DÉCO
La belle nature de Zanellazine À Varèse, en Lombardie, Giovanna Zighetti et Lucia Zamberletti pétrissent la terre et la culture. Et créent un monde de céramique bucolique aux couleurs vibrantes.
Photo CréditsRoberto photo Tomei
PAR THIBAULT DE MONTAIGU
Les collections Bloomen, Sassi Fioriti et Funghi de Zanellazine.
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Ci-contre, la collection Le Babe. Page de droite, la collection Bloomen.
DÉCO
“Ce qui est magique dans la céramique, c’est la possibilité de matérialiser une simple idée dans un objet concret en utilisant les quatre éléments naturels : le feu, la terre, l’air et l’eau.”
Photos Roberto Tomei
Giovanna Zighetti
Depuis quelques années, l’art de la céramique n’a jamais semblé aussi à la mode. En témoigne le succès de Zanellazine, un studio créé en 2012 par Giovanna Zighetti et sa nièce, Lucia Zamberletti, à Varèse, en Italie. L’histoire commence il y a quarante ans quand Giovanna découvre le travail de la terre cuite à Laveno, en Lombardie, la capitale de la céramique. Elle est immédiatement fascinée par “la possibilité de matérialiser une simple idée dans un objet concret en utilisant les quatre éléments naturels : le feu, la terre, l’air et l’eau”. Cette passion la conduit à effectuer des séjours à Schio, en Italie, puis en Bourgogne et en Toscane auprès d’un des maîtres de la discipline, Pietro Maddalena, pour perfectionner sa technique. Plus de trente ans plus tard, elle est rejointe par sa nièce Giovanna, consultante dans la mode, qui décide de quitter la ferveur milanaise pour retrouver sa ville natale de Varèse. Ensemble, elles commencent alors à créer des pièces uniques, à la fois baroques et chatoyantes, qui leur demandent de longues semaines de préparation. Leur inspiration puise principalement dans la nature, si présente à Varèse, “la ville des jardins” comme on la surnomme. Ainsi, la collection Bloomen associe
un totem en argile, pétri à la main, et des fleurs artificielles ou des plantes séchées qui proviennent directement de leurs jardins. La collection Funghi, qui décline différentes espèces de champignons, rappelle les longues cueillettes de cèpes et de chanterelles auxquelles s’adonnait Lucia dans son enfance. Dernière série en date : Terra Madre, inspirée des masques peints par les tribus de la vallée de l’Omo, en Éthiopie. Il fallait bien un écrin aussi étincelant que le château du Marais, petit bijou xviiie siècle à quelques kilomètres de Paris, pour organiser la première exposition de ces œuvres en France sous le patronage de Margherita Missoni, grande amie d’enfance de Lucia, avec la collaboration de la designeuse Dalila Formentini qui a réalisé des tables spécialement pour l’occasion. Splendeur que ces visages énigmatiques coiffés de fleurs et de plantes pour célébrer la nature à l’occasion de divers fêtes et rituels. Et preuve s’il en était que cet art multimillénaire trouve une résonance dans toutes les cultures, qu’elles soient antiques ou modernes. “Ce qui est magique dans la céramique, c’est de concrétiser un projet à partir de rien, et de travailler le temps”, comme le résume si bien Giovanna.
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LIFESTYLE
Bienvenue au Coucou, un hôtel de haute volée imaginé par le groupe Maisons Pariente et incarné par les sœurs du même nom, Leslie et Kimberley.
PAR KAREN ROUACH
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Photos Jérôme Galland, Sergio Covacho
Vol au-dessus du Coucou Méribel
Les sœurs Leslie et Kimberley Pariente.
LIFESTYLE
“J’ai appris que ce qui était trop à la mode se démodait, et donc qu’un lieu devait rester intemporel tout en étant branché, parce qu’une décoration ne se change pas chaque saison comme une collection !” Kimberley Pariente
En grande habituée des pistes de ski du domaine des 3 Vallées depuis toujours, la famille Pariente se devait d’installer son nouvel écrin hôtelier à Méribel. Cette station mythique, créée dans les années 30 par Peter Lindsay et l’architecte Charlotte Perriand, notamment, a ce luxe discret et décontracté que l’on ne retrouve nulle part ailleurs. Sur les hauteurs du Belvédère, au pied du rond-point des pistes, Le Coucou domine toute la vallée. Cinquante-cinq chambres, trente-neuf suites, deux chalets privés, deux restaurants, un spa, un Kid’s Club et un Teen Lab, une piscine intérieure et une extérieure, et surtout des vues à 360 degrés. Aux manettes du projet, on retrouve les sœurs Kimberley et Leslie Pariente, qui se sont lancées avec leur père dans l’hôtellerie, presque sans transition avec leur passé dans le prêt-à-porter. “Notre expérience dans le secteur de la mode nous donne aujourd’hui un regard plus créatif quand nous imaginons un hôtel, assure Kimberley. J’ai appris que ce qui était trop à la mode se démodait, et donc qu’un lieu devait rester intemporel tout en étant branché, parce qu’une décoration ne se change pas
chaque saison comme une collection !” Elles mettent le pied à l’étrier en 2013 avec l’ouverture de L’Apogée Courchevel (en collaboration avec Xavier Niel et le groupe Oetker Collection), puis avec l’Hôtel Crillon Le Brave au pied du mont Ventoux, pour enfin donner naissance au Lou Pinet à Saint-Tropez l’été dernier et au Coucou Méribel cet hiver. “Le Coucou était un véritable challenge, de A à Z, dans la mesure où il n’y avait qu’un seul hôtel 5 étoiles dans la station, la tendance étant plutôt aux chalets”, explique Leslie. Manifestement, la recette du succès, selon elles, réside dans le fait de bien s’entourer. L’architecture de Pierre Yovanovitch joue ici sur les contrastes, entre le vintage et le contemporain, le monumental et l’intimiste, la régularité impeccable et l’imperfection artisanale. “Pierre est un skieur, il connait les codes de la montagne, nous l’avons choisi comme une évidence”, se réjouissent encore les deux sœurs le jour de l’ouverture. Celui-ci a en effet livré une relecture du répertoire classique du style alpin à travers un regard contemporain, épuré mais chaleureux. Les deux restaurants de l’hôtel sont, eux, 162
le fruit d’une rencontre avec Riccardo Giraudi, qui y a installé son célèbre Beefbar en terrasse, et imaginé en exclusivité le restaurant italien Biancaneve pour le soir, tandis que Sophie Jacquemin a été désignée pour concevoir les Kid’s Club et Teen Lab, paradis pour enfants aux activités éclectiques. Enfin, pour expliquer son choix de spa, le premier au monde à être estampillé Tata Harper, Leslie lance : “Ma sœur et moi sommes des psychopathes en matières de crèmes. Il était important pour nous de ramener une marque de niche, qui n’attirerait pas seulement les clients de l’hôtel, mais aussi les curieux de la station.” Un choix engagé puisque cette ligne de soins lancée par une jeune mère de famille américaine relève le défi de ne proposer que des produits bio à la composition irréprochable, développés dans sa ferme de 500 hectares dans le Vermont. En 2021, Maisons Pariente inaugurera un hôtel 5 étoiles de 64 clés dans le Marais à Paris. “Là encore, nos hôtes se sentiront comme à la maison, assurent ces Parisiennes pure souche. L’esprit sera familial, mais pas familier”, une expression devenue au fil du temps le mantra de la famille.
Photos Jérôme Galland, Sergio Covacho
TÉTIÈRE LIFESTYLE L’OFFICIEL
Photos Jérôme Galland
LIFESTYLE
L’architecture de Pierre Yovanovitch joue ici sur les contrastes, entre le vintage et le contemporain, le monumental et l’intimiste, la régularité impeccable et l’imperfection artisanale. 165
BE WELL
1 ADOPTER Le kit antifroid créé par le DR. Barbara Sturm
2 TESTER Notre sélection de produits pour traverser l’hiver en beauté
3 DÉCOUVRIR La nouvelle fragrance Baie 19
Photo Guen Fiore
signée Le Labo
BE WELL
Photo DR © Dr Barbara Sturm. Glow essentials kit
1. Comment parer sa peau pour l’hiver ? En habituée des hivers glacés new-yorkais, le Dr. Barbara Sturm a créé un kit d’essentiels conçu pour répondre aux besoins de la peau face au froid. Entre les températures extérieures négatives qui assèchent la peau et les intérieurs surchauffés qui entraînent la déshydratation, la peau est mise à rude épreuve
en hiver. Elle a donc besoin d’une nutrition intense, qui respecte sa barrière naturelle, afin de rester saine et rayonnante. “Il est important d’utiliser des produits riches en lipides permettant de calmer les irritations, et de l’acide hyaluronique afin de repulper la peau en surface ainsi que les couches plus profondes de l’épiderme”, assure l’experte Barbara Sturm, qui livre un kit exclusif inspiré de sa propre routine beauté hivernale. Celui-ci comprend six produits pour prendre soin de sa peau pendant les mois les plus froids de l’année.
L’exfoliant visage élimine en douceur les peaux sèches et libère les pores, le nettoyant purifie et apaise grâce à de l’extrait d’aloe vera, la crème pour le visage, enrichie en molécules anti-inflammatoires et antioxydantes, répare et stimule l’éclat naturel, tandis que le sérum hyaluronique hautement concentré combat les signes de l’âge. Le sérum apaisant, lui, diminue l’apparence des ridules tout en soulageant les rougeurs et les irritations grâce à sa formule naturelle à base de plantes. Enfin, le masque pour le visage hydratation intense
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sollicitera la production des antioxydants naturels de l’épiderme. Par Karen Rouach
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2. Avis de grand froid Par Adrienne Ribes Photo Cécilia Poupon
De gauche à droite et de haut en bas : Elixir Vitae, ultime solution anti-rides, Tata Harper. Crème Ancienne, masque antioxidant visage au miel ultra-nourrissant, Fresh. La Crème pour le visage, Même. Baume Doré, peaux sèches, Lano, Lanolips. Crème Réparatrice, soin hydratant mains et ongles, Sisley. Le Baume Français, lèvres et zones sèches, Huygens.
Set design Cécilia Poupon
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De gauche à droite et de haut en bas : Mon Huile de Douche Relipidante, Laboratoire Giphar. Shiro Shampoo, gel lavant cheveux et corps, Sort of Coal chez Dover Street Market. Lip Glow Oil, Dior. Huile Nettoyante Visage, rose, géranium et abricot, 100 % végan, réchauffe la peau, Votary chez Dover Street Market. Skin Caviar, Masque Luxe Nuit, La Prairie. Complément alimentaire 360°, 100 % végan et naturel, Daluma chez Dover Street Market.
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3. Une affaire de goûts De passage à Paris, Eddie Roschi, cofondateur du Labo avec Fabrice Penot, se confie à L’Officiel. L’occasion de parler de Baie 19, la nouvelle fragrance de la maison, et du succès grandissant de cette griffe olfactive.
Aujourd’hui on se voit pour Baie 19… Eddie Roschi : Oui, mais on peut parler de plein de choses… L’idée de Baie 19, c’était de capter l’odeur du bitume aspergé par la pluie après une journée de soleil. Le résultat est quelque chose de très aérien, très sous-bois, patchouli. Avec un côté aussi un peu marin. Une fragrance très tendue pour finir. On retrouve quand même l’idée de départ : une petite route de campagne, il fait très chaud, puis il y a un orage, une odeur de bitume mêlée à celle de la terre… Comment continuer à trouver des odeurs après 17 parfums ? La vie qui s’enrichit, ça alimente votre éventail d’odeurs ? Absolument. Nous avons la chance avec Le Labo de travailler de façon complètement autonome. On ne demande l’avis de personne. C’est un privilège. Même en étant dans le groupe Estée Lauder, et avec toute une équipe de parfumeurs compétents
et créatifs, in fine, c’est nous, Fabrice et moi, qui tranchons. Un parfum est quelque chose de très personnel. Il ne s’agit pas de tendance. On y met toute notre sensibilité. Comment faites-vous pour accorder vos sensibilités ? En fait, nous travaillons chacun notre tour sur un parfum. On fait confiance au goût de l’autre. On n’est pas toujours d’accord. On discute. Mais au final, celui qui est à l’initiative du projet a le dernier mot. Ce n’est pas frustrant ? Non. Pour moi on développe encore trop de parfums. Il faudrait que cela soit moins rapide. Comment sait-on quand le parfum est prêt ? Je dois émotionnellement être convaincu. Et après ? Je le porte, et j’attends les remarques… Cela vous est-il arrivé que des remarque soient négatives ? Oui, l’année dernière, je n’ai pas réussi, avec mon parfumeur, à mettre en volume mon idée. C’était un problème technique. J’ai dû abandonner…Nous n’arrivions pas à garder l’odeur sur la peau. Y a-t-il une odeur derrière laquelle vous courez ? Pas vraiment. Je ne suis pas dans le mode Le Parfum, de Süskind, cette odeur impossible à transformer. Et une odeur vous fait chavirer ? Les odeurs qui me font chavirer sont liées aux souvenirs… elles restent dans le domaine de l’amour évidemment. Et vos enfants, quelles odeurs ont-ils ? L’odeur de la chambre de ma fille est unique. C’est l’odeur d’elle dans ses draps, petite odeur d’existence dans un endroit confiné. Pareil pour mon garçon, avec une petite touche caca, car il
a sa poubelle à couches ! Quand je vais rentrer chez moi, j’irai sentir les chambres de mes enfants. Votre compagne ? ou compagnon ? L’identité de l’autre, elle est sur les tempes. Là, vous découvrez sa véritable signature olfactive. C’est animal. On se renifle. Une odeur qui vous met mal à l’aise ? Aucune, à part peut-être celle des duty free d’aéroports, qui sentent toujours la même chose. Vous vivez avec les odeurs, c’est un monde que vous avez choisi ? Oui, j’adore. L’autre fois, j’ai déposé ma fille à l’école, il y avait un papa devant moi qui portait Santal 33, un de mes parfums ! Vous êtes allé le voir ? Ah non ! Surtout pas ! Mais j’étais heureux. J’adore sentir les bonnes odeurs dans le sillage des gens. On s’imagine l’histoire de la personne, pourquoi elle a choisi ce parfum. Et là, vous avez quelle odeur ? Ce matin, j’ai mis Thé Noir. C’est votre parfum préféré ? Non. J’aime Rose, Another, Thé Noir et Oud, cet espèce de monstre que personne ne porte. C’est tellement animal et sale, il faut oser. Ce parfum n’existe que quand il est porté. Il doit être incarné charnellement. Vous allez loin, vous êtes assez radical. Avec celui-là, oui. Il est fumé, ça sent le caoutchouc brûlé, le jambon… Y a-t-il des gens derrière ces parfums ? Peut-être, mais pour l’essentiel ils sont imaginaires. Ce ne sont pas des comédiens ou des chanteurs. Maintenant, si vous voulez, ça pourrait être Joaquin Phoenix dans un rôle bien hard. Vous parleriez de vocation ? Non. En fait, si on remonte un peu dans mon passé, j’ai étudié la
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chimie pour faire plaisir à mes parents, et en terminant mon diplôme de chimiste, j’ai eu mon premier boulot dans un groupe de parfums en Suisse. Puis de fil en aiguille, j’ai découvert ce monde. Vous auriez pu être nez ? Non, je ne serais pas capable, car il faut être monomaniaque. C’est comme un cuisinier, il doit être aux fourneaux et inventer des recettes non stop. Moi, j’aime diriger créativement un projet et me frotter à plusieurs facettes. Aujourd’hui, après New York, vous avez choisi de vivre au Portugal. Pourquoi ? Pour me rapprocher de la mer. Être dans une ville à taille plus humaine, ralentir nos vies. Tout en continuant à faire ce qu’on aime. Mais comment faites-vous ? Je travaille avec un parfumeur. C’est du téléphone, du DHL, des Fedex. Et mon associé est en Californie. C’est comme si j’habitais dans une forêt magnifique au cœur de la France et que je travaillais a Paris. J’ai eu besoin de ralentir ma vie et d’y voir plus clair. Et vous y voyez plus clair ? Oui, c’est certain. Quand on ralentit, qu’on s’arrête de courir, de faire du bruit… au bout d’un temps, la poussière retombe, se dissipe, et les choses essentielles restent. On est surtout tellement plus efficace. Comment vous situez-vous vis-à-vis de la planète ? Aujourd’hui, on se focalise sur ce que nous pourrions mieux faire. Aller vers du 100 % recyclé, et déjà du 100 % recyclable. Le Labo, avec sa double personnalité, est très attentif au monde, à son avenir. On ne fait pas de tests sur les animaux, on fait partie de la Peta aux États-Unis. On ne peut pas créer de la beauté en épuisant la nature, la vie, la tendresse ! Par Adrienne Ribes
Photos Le Labo
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Inouitoosh inouitoosh.com J.M. Weston jmweston.com Jaeger LeCoultre jaeger-lecoultre.com K-Way k-way.fr Karry’O karryo.com Karry Berreby karryberreby.com Kenzo kenzo.com Koibird koibird.com La Redoute laredoute.fr Laurence Dacade laurence-dacade.com Lanvin lanvin.com Levi’s levi.com Louis Vuitton louisvuitton.com Maison Boinet maisonboinet.fr Maison Kitsuné maisonkitsune.com Maison Margiela maisonmargiela.com Marc Jacobs marcjacobs.com Marcia marciawear.com Matches Fashion matchesfashion.com Max Mara maxmara.com Max&Moi maxemoi.com Michael Kors michaelkors.fr Miu Miu miumiu.com Molli molli.com Moncler moncler.com My Theresa mytheresa.com Marcia marciawear.com Nodaleto nodaleto.com Oakley oakley.com Off-White off—white.com Omega omegawatches.com Patek Philippe patek.com Paul & Joe paul&joe.fr Pinko pinko.com Prada prada.com Rado rado.com Repetto repetto.fr Richard Mille richardmille.com Rudy Gernreich rudigernreich.com Saint Laurent ysl.com Salvatore Ferragamo ferragamo.com Sandra Mansour sandramansour.com Tatras tatras-official.com
Un Jour Ailleurs unjourailleurs.com Valentino valentino.com Van Cleef & Arpels vancleefarpels.com Vanessa Seward vanessaseward.com Versace versace.com Vivienne Westwood viviennewestwood.com Wolford wolfordshop.fr BE WELL & LIFESTYLE Amalthéa amalthea.bio Daluma daluma.de Dior dior.com Dover Street Market doverstreetparfumsmarket.com Dr. Barbara Sturm dr-barbara-sturm.com Ebbio ebbio.it Fresh fresh.com Huygens huygens.fr La Prairie la-prairie.fr Laboratoire Giphar laboratoire-giphar.fr Lano lanolips.com Le Coucou lecoucoumeribel.com Le Labo lelabofragrances.com Même memecosmetics.fr Sha Wellness shawellnessclinic.com Sisley sisley-paris.com Sort of Coal sortofcoal.com Tata Harper tataharperskincare.com Votary votary.co.uk Zanellazine zanellazine.com
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SHOPPING
Laure de Sagazan Montre-moi tes chutes, je te dirai qui tu es ! Pas de conscience tranquille sans le sentiment d’apporter sa pièce à l’édifice. Que faire, lorsque les plus belles étoffes, utilisées pour la confection des robes de mariée Laure de Sagazan, s’amoncellent dans un coin de l’atelier, confettis bientôt oubliés ? Soucieux de participer à l’effort collectif qui touche, parmi tant d’autres, l’univers du textile, la maison Laure de Sagazan décide de faire du beau de ses chutes de robes. Ainsi, une ligne de trois culottes et un ensemble caraco-shorty voient le jour, créés dans les chutes des dentelles et soies d’exception de la maison. Des pièces délicates et raffinées, pour porter mieux et responsable.
Blanche Adepte des pièces intemporelles et des belles matières, Blanche crée des robes de mariée qui allie un design minimaliste, un sens des proportions et une sensibilité qui confèrent à chacune des pièces son caractère unique.
Culottes disponibles dès le 1er février dans le showroom Dès 35 euros.
Tél. 09 71 50 94 79.
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Photos DR
de la maison et sur la e-boutique de la marque. Blanche : 44, rue Étienne-Marcel 75002 Paris.
Horoscope Février 2020
Photo HO/European Space Agency/AFP
Par CHRYSTèle deSSoY
BÉLIER (21 mars-20 avril) FORME : une vitalité digne de votre tempérament de feu ! AMOUR : vous accumulez les conquêtes… Vous ancrer dans un port d’attache ne vous intéresse nullement en ce moment. VIE SOCIALE : une ambition sans borne vous pousse vers les sommets. Canalisez un peu mieux votre énergie et ciblez vos priorités ! MON CONSEIL : déployez vos ailes d’aventurier(ère).
CANCER (22 juin-22 juillet) FORME : vous retrouvez enfin le tonus. AMOUR : envie à la fois d’être libre et de vivre une grande passion… Vous réussissez à concilier ces états d’âme contradictoires, bravo ! VIE SOCIALE : vous commencez à vous faire une place au soleil. Vous vous libérez de tout un carcan de doutes et faites peau neuve. MON CONSEIL : ne cultivez plus la nostalgie du passé.
TAUREAU (21 avril-21 mai) FORME : Uranus dans votre ciel vous rebooste. AMOUR : de l’imprévu dans l’air… Vous aimeriez que vos amours riment avec toujours, sachez aussi vivre au présent. VIE SOCIALE : vous rêvez de nouveauté, de fantaisie ? Les astres vous aident à accéder à plus de liberté et d’épanouissement dans votre travail. MON CONSEIL : dépassez-vous !
LION (23 juillet-23 août) FORME : une énergie en hausse, vous savourez les délices de la vie ! AMOUR : c’est parti pour le show, vous jouez à fond la carte de la séduction, même si vous avez un peu de mal à rompre avec votre passé… VIE SOCIALE : vous éprouvez le désir de sortir de l’ombre, la léthargie fait place à l’action. MON CONSEIL : retrouvez votre détermination légendaire !
GÉMEAUX (22 mai-21 juin) FORME : éblouissante ! Quel enthousiasme ! AMOUR : les ondes positives abondent autour de vous, vous avez tout pour vous réconcilier avec l’amour et la chance… VIE SOCIALE : une toile de fond porteuse favorise votre ascension vers les cimes lumineuses… À vous de jouer désormais ! MON CONSEIL : privilégiez l’harmonie en toute chose.
VIERGE (24 août-23 septembre) FORME : au beau fixe. AMOUR : Jupiter qui éclaire votre ciel vous promet des moments heureux si vous débridez vos envies. Faites confiance à votre séduction ! VIE SOCIALE : les astres vous aident à semer des petites graines de chance sur votre chemin… Votre côté fourmi laborieuse va en bénéficier pleinement. MON CONSEIL : suivez votre bonne étoile.
BALANCE (24 septembre-23 octobre) FORME : cette fin d’hiver vous met en lumière… AMOUR : après un long moment de vague à l’âme, vous voyez à présent le bout du tunnel. Envolé cette chape de plomb qui vous sclérosait. VIE SOCIALE : vous voulez rompre avec le passé, vous faites tout pour que votre univers change. Votre aisance relationnelle est un de vos grands atouts. MON CONSEIL : misez sur votre sens de la communication.
CAPRICORNE (22 décembre-20 janvier) FORME : levez un peu le pied, attention au surmenage. AMOUR : Saturne disparaît peu à peu de votre ciel, vous êtes dans une période de renaissance et faites davantage confiance à la vie. VIE SOCIALE : là aussi vous avez à nouveau le vent en poupe, vous vous défaites des lourdeurs passées. Prenez sans hésiter la voie qui vous attire. MON CONSEIL : cultivez votre charisme.
SCORPION (24 octobre-22 novembre) FORME : une période un peu chahutée, vous passez facilement du rire aux larmes. AMOUR : coups de théâtre et rebondissements vont bon train : gare aux excès, recentrez-vous ! VIE SOCIALE : une opportunité pourrait vous sortir de votre zone de confort, saisissez-la, vous avez besoin de vous renouveler… MON CONSEIL : vivez vos folies !
VERSEAU (21 janvier-19 février) FORME : misez sur le sport, parfait pour votre moral. AMOUR : votre relation pourrait prendre une tournure plus officielle, soyez attentif(ve) aux moindres signes… VIE SOCIALE : apprenez à vous vendre, ne soyez pas trop modeste. Optez pour davantage de spontanéité dans vos rapports humains. MON CONSEIL : démarquezvous, mais avec bienveillance.
SAGITTAIRE (23 novembre-21 décembre) FORME : FORME : vous êtes un peu sous pression, évadez-vous ! AMOUR : quelques discussions orageuses, le courant passe mal, vous n’êtes pas très serein(ne) côté cœur. VIE SOCIALE : divers créneaux porteurs s’offrent à vous, pas de panique, chassez la confusion en canalisant votre énergie vers un but précis. MON CONSEIL : croyez en vous.
POISSONS (20 février-20 mars) FORME : votre ciel s’illumine en cette fin d’hiver… AMOUR : l’image du prince charmant ne relève plus du fantasme, ouvrez juste vos yeux… VIE SOCIALE : un désir d’autonomie s’empare de vous, vous avez envie de devenir votre propre chef, de vous singulariser. MON CONSEIL : improvisez et tout vous sourira !
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Dernières volontés 1
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5 1. Jouer au derviche tourneur dans une sculpturale doudoune de la nouvelle collection 1 Moncler Pierpaolo Piccioli. 2. Planifier une retraite de yoga tout en apprenant à cultiver un potager à la ferme rustique éco-responsable Ebbio, en Toscane. 3. S’appliquer l’huile de prune bio Amalthéa sur les lèvres pendant la saison de ski. 4. Porter les dernières mules Bottega Veneta, ultra-confortables, pendant les fashion weeks.
5. S’offrir un break bien-être (et bien mérité) au Shawellness, en Espagne, et tester la thérapie novatrice de stimulation cognitive à l’aide d’un bonnet-électrodes visant à dépister les maladies neurologiques et psychologiques (une technologie développée avec la NASA et l’université de Harvard). 6. S’approprier le look 70s combinaison-bottes par Vanessa Seward pour La Redoute. Par Vanessa Bellugeon
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Photos Moncler x Pierpaolo Piccioli, Romain Ricard, Bottega Veneta, Amalthea, Quenin de Briey, Sha Wellness Clinic
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30 AVRIL – 05 MAI 2020 BAS E LWOR LD.C OM
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