Robe et choker Alexander McQueen
CRYSTAL RENN’S MANIFESTO stylisme Victoria photographie
40
Bartlett
Paul empson
DANCING IN THE DARK AVEC QUEENTOIDE
50
Jennifer Eymère photographie Julien Vallon
Veste YSL Rive Gauche chez Anoushka Paris
stylisme
50
LE SAC CLÉO 5 À 7 DE SAINT LAURENT
22
texte Laure Ambroise
LE SAC MOONLIGHT DE FENDI
24
62
texte Laure Ambroise
THE MR AGENCY DE MELISSA REGAN
25
Pauline Borgogno
L’ENGAGEMENT SELON MARINA RINALDI
26 28
texte Laure Ambroise
TOM VAN DORPE ARRIVE CHEZ THE KOOPLES
30
texte Laure Ambroise
SPOILED LOVE, LE PREMIER ALBUM DE BUZZY LEE texte
texte
texte Violaine
photographie
Bellugeon photographie Raul Ruz
CHRISTIAN LACROIX X DESIGUAL, QUESTION DE TON
70
texte Laure Ambroise stylisme Vanessa photographie
Bellugeon Stella Berkofsky
AVEC MARCIA, TOUT SE TRANSFORME
76
texte Laure Ambroise
Kenzia Bengel de Vaulx Pierre-Ange Carlotti
photographie
38
Hervé Dewintre
LA MONTRE RM 71-02 DE RICHARD MILLE
62
stylisme Vanessa
stylisme
36
Stella Berkofsky
L’UPCYCLING AVEC IVANKA SMILENKO
Schütz
LE SAUTOIR VOLUTE CROISIÈRE DE CHANEL
texte
34
Noémie Lecoq
GUEN STEFANI, NOT JUST A GIRL
texte
32
Noémie Lecoq
LA BRIT FREAK SHYGIRL
56
texte Virginie Apiou
texte Laure Ambroise
LA COLLAB BIRKENSTOCK X CENTRAL SAINT MARTINS
SUZANNE LINDON, LA FORCE DE L’ÂGE
Robes Marina Rinaldi
texte
39
Hervé Dewintre
26
LES NOUVEAUX JOURS DE KENZO
84
texte Laure Ambroise stylisme
Kenzia Bengel de Vaulx Noël Manalili
photographie
SMELLS LIKE 90S SPIRIT texte
56
CINGA SAMSON texte
88
Maud Gabrielson
Sophie Rosemont
92
TINA KUNAKEY & VINCENT CASSEL
Tailleur Chanel
OUVERTURE MODE
136
RE:MIX
138
Vanessa Seward photographie Guen Fiore stylisme
RE:CLAIM
152
Gabrielle Marceca photographie Jon Ervin stylisme
RE:SET
164
Dora Fung photographie Corey Olsen stylisme
RE:BIRTH
Fabrizio Finizza photographie Alberto Maria Colombo
174
stylisme
LA PARISIENNE SELON MADAME D’ORA Tori Nergaard photographie Piper McDonald
186
stylisme
L’ART DE MEUBLER SELON PIERRE YOVANOVITCH
190
Nathalie Nort photographie Jules Faure texte
HOME SLICK, SLICK WOODS Paulina Castro photographie Jacques Burga
196
Robe Dolce & Gabbana
stylisme
114
LIGNES DE VIE, MATTHIEU SALVAING texte
96
Laure Ambroise
BROOKE SHIELDS & HELENA CHRISTENSEN
100
Fabia Di Drusco stylisme Arnold Milfort photographie Greg Lotus texte
JIMMY CHOO, LE SENS DE L’HUMEUR
104
Laure Ambroise & Caroline Mas photographie Chris Floyd & Flora Godivier textes
WESTMAN ATELIER, BEAUTÉ PURE texte
LES NOUVEAUX VERNIS GUCCI
109
Mélanie Mendelewitsch
Looks Tod’s
texte
108
Mélanie Mendelewitsch
174
LÈCHE-VITRINES DÉGUISÉ, AMALIA ULMAN
204
Audrey Wollen photographie Roeg Cohen texte
L’ARGENT RÉVOLUTIONNAIRE Tori Nergaard photographie Piper McDonald
208
Look, Heron Preston
stylisme
130
QUEENTOIDE, THE NEW FACE texte
NOUVEAUX PARFUMS À TESTER texte
110
Pauline Borgogno
111
Mélanie Mendelewitsch
OUVERTURE CAHIER GLOBAL
113
SIENNA MILLER & TWIGGY, FOLLES ANNÉES
114
Joshua Glass stylisme Cathy Kasterine photographie Tom Munro texte
LES RÊVES DE WALTER CHIAPPONI CHEZ TOD’S
130
Cristina Manfredi stylisme Giulio Martinelli photographie Simone Battistoni texte
196
L’ OFFICIEL N° 1047 – SPRING 2021
Directrice de la publication et de la rédaction Marie-José Susskind-Jalou L’OFFICIEL GLOBAL
L’OFFICIEL FRANCE
Contributing Global Chief Creative Officer Stefano Tonchi
Rédactrice en chef mode Vanessa Bellugeon
Rédactrice en chef magazine Adrienne Ribes
Executive editor Giampietro Baudo
Mode Senior fashion editor Laure Ambroise
Magazine Rédactrice en chef adjointe Léa Trichter-Pariente
Casting & Photographie Jennifer Eymère Joshua Glasgow
Joaillerie/Horlogerie Emily Minchella Hervé Dewintre
Département artistique Graphistes Giulia Gilebbi Luca Ballirò
Production Joshua Glasgow
Global Executive Director Giampietro Baudo Global Artistic and Casting Director Jennifer Eymère Global Contributing Creative Director Trey Laird Global Editorial Team Laure Ambroise | Mode Global Casting, Production & Booking Joshua Glasgow Global Digital Editorial Director Joshua Glass Global Head of Content Projects and Fashion Initiatives Caroline Grosso Consulting Executive Managing Editor Regan Solmo Global Graphic Team Giulia Gilebbi, Luca Ballirò Global Contributing Design Director Micheal Riso Global Managing Team Sabrina Abbas, Sara Ali, Jeanne Propeck
Beauté Mélanie Mendelewitsch Rédactrice parfum Antigone Schilling
Secrétariat de rédaction Secrétaire générale de la rédaction Jeanne Propeck
lofficiel.com Rédactrice en chef Karen Rouach Community manager Caroline Mas
CONTRIBUTEURS PHOTOGRAPHES Simone Battistoni Kenzia Bengel de Vaulx Stella Berkofsky Jacques Burga Pierre-Ange Carlotti Roeg Cohen Alberto Maria Colombo Paul Empson Jon Ervin Jules Faure Guen Fiore Chris Floyd & Fiona Godivier Samuel Ibram Greg Lotus Tom Munro Corey Olsen Raul Ruz Matthieu Salvaing Julien Vallon
Fabrizio Finizza Dora Fung Maud Gabrielson Cathy Kasterine Noémie Lecoq Noël Manalili Gabrielle Marceca Giulio Martinelli Piper McDonald & Tori Nergaard Arnold Milfort Nathalie Nort Sophie Rosemont Violaine Schütz Vanessa Seward Lee Trigg Audrey Wollen TRADUCTRICES Céline Gevevrey Hélène Guillon
RÉDACTEURS ET COLLABORATEURS Virginie Apiou Victoria Bartlett Pauline Borgogno Pauline Castro Fabia di Drusco
LES PUBLICATIONS DES ÉDITIONS JALOU L’Officiel de la Mode, L’Officiel Hommes, Jalouse, La Revue des Montres, L’Officiel Voyage, L’Officiel Fashion Week, L’Officiel Art, L’Officiel Chirurgie Esthétique. L’Officiel Allemagne, L’Officiel Hommes Allemagne, L’Officiel Argentine, L’Officiel Autriche, L’Officiel Belgique, L’Officiel Art Belgique, L’Officiel Brésil, L’Officiel Hommes Brésil, L’Officiel Chine, L’Officiel Hommes Chine, Jalouse Chine, L’Officiel Corée, L’Officiel Hommes Corée, La Revue des Montres Corée, L’Officiel Cyprus, L’Officiel Inde, L’Officiel Indonésie, L’Officiel Italie, L’Officiel Hommes Italie, L’Officiel Kazakhstan, L’Officiel Hommes Kazakhstan, L’Officiel Lettonie, L’Officiel Liban, L’Officiel Hommes Liban, L’Officiel Lituanie, L’Officiel Malaisie, L’Officiel Maroc, L’Officiel Hommes Maroc, L’Officiel Mexique,l’Officiel Monaco, L’Officiel Moyen-Orient, L’Officiel Hommes Moyen-Orient, L’Officiel Art Moyen-Orient, L’Officiel Pays-Bas, L’Officiel Hommes Pays-Bas, L’Officiel Pologne, L’Officiel Hommes Pologne, L’Officiel Russie, L’Officiel Singapour, L’Officiel Hommes Singapour, L’Officiel St Barth, L’Officiel Suisse, L’Officiel Hommes Suisse, L’Officiel Thaïlande, L’Officiel Hommes Thaïlande, L’Officiel Turquie, L’Officiel Hommes Turquie, L’Officiel Ukraine, L’Officiel Hommes Ukraine, L’Officiel USA, L’Officiel Hommes USA, L’Officiel Vietnam / Lofficiel.com
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L’ÉDITO Briser les règles, innover. S’inspirer du passé pour mieux expérimenter. C’est le point de départ de ce numéro de L’Officiel dédié aux collections printemps-été 2021. Et c’est le rôle de toutes les stars dans ces pages. Une icône symbolique du made in UK. Une jeune réalisatrice de talent. Une comédienne à l’esprit typiquement français. Un top modèle qui a transformé son style de vie en un manifeste social. Deux légendes qui ont écrit des pages importantes de l’histoire de la mode. Et un talent en devenir, choisi pour illustrer l’idée d’upcycling. En un mot : des figures pionnières. -Giampietro Baudo COVER STARS
: Sienna Miller en HERMÈS. Suzanne Lindon en CELINE PAR HEDI SLIMANE. Camille Razat en CHRISTIAN LACROIX X DESIGUAL. Crystal Renn en CHANEL (foulard SWATCHON). Brooke Shields et Helena Christensen en GEORGES HOBEIKA. Ivanka Smilenko en PRADA.
PhotosTom Munro, Stella Berkofsky, Paul Empson, Greg Lotus, Raul Ruz
TRAILBLAZER
L’NEWS
NOUVELLE vague Après les sacs Suzanne, Kaia, Kate, Loulou, Niki, Solferino, Monogram, voici le modèle 5 à 7 signé Saint Laurent par Anthony Vaccarello. Dans chaque création Saint Laurent, on retrouve des références cinématographiques ou musicales chères à son directeur artistique, Anthony Vaccarello. Pour ce modèle, il semble que ce soit le film culte Cléo de 5 à 7, de la réalisatrice de la nouvelle vague Agnès Varda, qui l’ait inspiré. UNE COLLECTION
Dévoilé à l’occasion du défilé printemps-été 2021 qui s’est déroulé en décembre dernier dans le désert marocain, on l’a vu porté avec le look cycliste, signature de la collection. Un mé-
lange des genres comme l’avait déjà été la sublime collection de l’hiver dernier, dans laquelle le designer avait marié le legging en vinyle avec des vestes épaulées et des blouses à col lavallière. UN STYLE
Empreint d’un style 70s/80s, le 5 à 7 joue la sobriété d’un cuir noir réhaussé d’un fermoir siglé doré. On aime aussi ses variations en cuir de veau brillant, crocodile mat, python et alligator brillant. Il se porte très court, sous l’épaule. C’est définitivement le sac de la femme Saint Laurent par Anthony Vaccarello. -Par Laure Ambroise
Photo Saint Laurent par Anthony Vaccarello
UNE HISTOIRE
To the MOON S’il n’y avait qu’une pièce à s’offrir ce printemps, ce serait le sac Moonlight de Fendi. Il faut dire que ce petit cartable compact en forme de demi-lune est d’une poésie folle, et n’est pas sans rappeler l’iconique Sunshine Shopper en reprenant tous ses codes : design rond, ornements latéraux, détails en plexiglas rigide effet écailles de tortue… Pratique, il peut se porter à la main ou en bandoulière grâce à sa sangle réglable. Ultime élégance propre à la maison italienne : les finitions impeccables et si discrètes. Le rabat frontal est garni de coutures sellier ton sur ton entièrement réalisées à la main, et s’agrémente d’une boucle en métal doré guillochée de l’emblématique logo FF.
Touche mode comme chuchotée, le logo FENDI Roma est embossé à chaud sous le rabat et se révèle à l’ouverture du sac. Il se dit que Silvia Venturini Fendi, la directrice artistique de la maison, a passé une grande partie de ses journées à regarder par la fenêtre lors de la création de sa collection printemps-été 2021… Regardait-elle la lune ? En tout cas, une fois de plus, elle a parfaitement réussi à cristalliser toutes nos envies d’évasion pour la saison ! Disponible en noir, marron, gris et vert, mais aussi jaune, orange et bleu clair. -Par Pauline Borgogno
Photo Fendi
La maison Fendi imagine un sac cartable dont la forme hémisphérique laisse rêveur.
L’NEWS
For For RENT Les mondes de la mode, de l’art et du design se l’arrachent. Avec un riche catalogue d’espaces parisiens d’exception, Melissa Regan propose un service locatif inédit inédit..
Photos DR
Ne vous fiez pas à sa blondeur angélique ni à sa frêle apparence. Si Melissa Regan semble tout droit sortie d’un film hollywoodien, cette Californienne a la tête bien vissée sur les épaules. Après des expériences dans la finance et la mode, la jeune femme s’est tournée vers l’événementiel haut de gamme. En 2016, riche d’un carnet d’adresses judicieusement fourni au fil des années, elle fonde The MR Agency, une entreprise proposant la location de lieux de haut standing à Paris. Tout type d’événement est envisageable : showroom pour professionnels de la mode, lancement de produit, pop up store, exposition, ou encore dîner privé ou corporate, les possibilités sont infinies, et les espaces plus exceptionnels les uns que les autres. La valeur ajoutée ? Zéro prise de tête. En confiant son projet à The MR Agency, le client est certain d’être pris en charge de A à Z. De l’aménagement du lieu à la bonne coordination de l’événement, Melissa s’engage à répondre avec exigence à tous les besoins. Depuis un an, la pandémie a durement touché le secteur de l’événementiel. Pour autant, The MR Agency a rapidement su s’adapter à la situation, faisant preuve d’une adaptabilité sans faille. Grandes maisons de mode comme marques de niche se sont retrouvées confrontées à un bouleversement complet de la présentation de leurs collections, mais aussi de leur mode de vente. Au-delà de l’organisation de quelques showrooms à Paris, nombreux sont ceux qui ont mis en place des présentations virtuelles pour faire face à la pandémie, obligeant l’agence à accompagner autrement ses clients. Désormais, Melissa ne met pas uniquement ses lieux à disposition, elle assiste des marques sur le long terme. Enfin, The MR Agency a récemment dévoilé un lieu unique : le Pavillon Rive Gauche. Cet établissement privatisable se distingue des autres espaces par sa vocation première, qui est celle d’un centre culturel, ouvert au public, au cœur du 5e arrondissement. Nul doute que sa programmation prochaine, entre expérience immersive et théâtrale ou festival de jazz, saura nous faire oublier ces derniers tristes mois. -Par Pauline Borgogno
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MARQUE De conviction
À l’occasion des 40 ans de Marina Rinaldi, reconnue pour sa mode inclusive inclusive,, L’Officiel a rencontré Lynne Webber, directrice générale de la maison.
Pourriez-vous nous redéfinir les grandes valeurs de la marque en quelques mots ? Rien n ne résume mieux nos valeurs que nos prises de parole et nos hashtags. Que ce soit en 1999, avec “Le style n’est pas une taille… c’est une attitude”, qui nous a permis de contribuer à démanteler l’un des plus forts préjugés autour de la beauté des femmes. Et, plus récemment, #rockyourconfidence qui a servi d’outil précieux pour motiver toutes les femmes, et en particulier les plus jeunes générations, à être à l’aise dans leur peau et à se libérer de toutes les obligations imposées par la société. En quoi Precious Lee, votre nouvelle égérie, incarne-t-elle les valeurs de la marque ? Precious est jeune, forte et motivée pour aider d’autres femmes à défendre leurs droits. Tout cela fait d’elle une personne parfaite pour incarner la marque, ou simplement lorsqu’il s’agit de promouvoir les nombreuses valeurs que nous avons en commun.
Connue pour ses collaborations, la marque Marina Rinaldi continue sur cette lancée avec Antonio Berardi. Parlez-nous de la nouvelle collection, et pourquoi ces collaborations vous tiennent tant à coeur ? Nous avons commencé ce projet en 2016 avec le designer Tsumori Chisato, et il continue de s’affirmer au fil des saisons. Cela nous a permis de réévaluer le positionnement de Marina Rinaldi en tant que marque de luxe, et nous avons atteint de nouvelles femmes tout aussi passionnées par la qualité et les tendances de la mode. La collaboration la plus récente avec Antonio Berardi est un projet très spécial qui célèbre les 40 ans d’héritage de la marque. Antonio a extrait de nos archives des pièces emblématiques des collections passées qui représentent les musts de la garde-robe de toute femme, et en a offert une interprétation contemporaine. Qui est la femme Marina Rinaldi en 2021 ? C’est une femme forte, confiante, qui se soucie d’elle-même et de l’environnement. Elle défend ses propres droits, mais aussi ceux de toutes les femmes. Marina Rinaldi a toujours été une marque engagée, surtout en termes d’inclusivité. De quelle façon le sera-t-elle cette année qui n’est vraiment pas une année comme les autres ? Nous avons débuté en tant que marque inclusive à une époque où l’inclusion n’était ni un mot du vocabulaire courant ni un outil de marketing à la mode comme c’est le cas aujourd’hui. Nous ne pouvons que continuer à être inclusifs dans tout ce que nous faisons, en restant fidèles à notre identité et à la vision du fondateur, Achille Maramotti, et en créant des collections qui s’adressent à toutes sortes de femmes, quels que soient leur âge, leurs goûts personnels ou leur style de vie.
Propos recueillis par LAURE AMBROISE 26
Photo Max Mara
Marina Rinaldi fête ses 40 ans cette année, comment allez-vous les célébrer ? LYNNE WEBBER : Depuis quatre décennies la marque se distingue par ses collections, la qualité des matériaux utilisés, l’excellence de la fabrication, la force de ses propositions et par la mise en avant de ses valeurs comme la positivité corporelle, la conscience du corps et l’inclusivité. Nous avons donc décidé de nous concentrer sur la collection et de créer, en son sein, une série de capsules qui réinterprètent certaines pièces emblématiques tirées de nos archives, soulignant ainsi comment la maison Marina Rinaldi a proposé, depuis sa création en 1980, des collections qui offrent à chaque femme la possibilité de jouer avec la mode et de se sentir parfaitement bien dans sa peau. L’OFFICIEL :
L’NEWS
ROBES MANTEAUX NOIRE ET BEIGE, “CAPSULE ANNIVERSAIRE MARINA RINALDI PAR ANTONIO BERARDI”, ET MANTEAU ROUGE, MARINA RINALDI.
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Après plusieurs mois de travail, la collaboration tant attendue entre la célèbre marque éco-responsable allemande Birkenstock et quatre élèves de l’école Central Saint Martins est née. Rencontre avec Fabio Piras, directeur du Master Fashion, et Alistair O’Neill, professeur du Bachelor Fashion History & Theory. Propos recueillis par LAURE AMBROISE
Photo Walter Pfeiffer pour Birkenstock, @ Birkenstock
SANDALE mondiale
L’O : Les quatre modèles gagnants sont très différents. Comment avez-
vous encouragé les étudiants à apporter leur propre sensibilité au projet ? FP : Les étudiants pensent souvent, à tort, que produit commercial est synonyme de design non créatif. Nous les encourageons à croire que sans leurs idées créatives, il n’y aurait pas de business.
L’O : Vous avez écrit sur le travail du photographe Walter Pfeiffer, notamment sur la façon pionnière avec laquelle il a abordé le thème de la fluidité de genre. Pourquoi l’avoir choisi pour cette campagne ? ALISTAIR O’NEILL : Walter est un photographe de mode assez unique, car en plus de son travail commercial, il continue à enseigner la photographie dans les écoles de design de Zurich. Nous pensions qu’il serait capable de capter cette collaboration dans toute son originalité.
DINGYUN ZHANG (1 ET 3)
Solidité et durabilité sont au cœur de sa proposition créative à base de nylon et de néoprène. Côté inspiration, le confort était moteur. Résultat : des sandales façon doudoune moelleuse (1) ou tressé arty (3, modèle Tallahassee Birkenstock MA Fashion Archive Project). ALEX WOLFE (2)
1
Inspiré par l’idée de l’homme en mouvement, ce créateur aime s’éloigner des règles et remettre en question les idées de genre. À l’occasion de cette collaboration, il a mixé l’humour et la masculinité juvénile avec une pointe de Britishness. ALECSANDER ROTHSCHILD (4)
L’OFFICIEL : Pourquoi cette collaboration est-elle hors du commun ?
FABIO PIRAS : Birkenstock a approché l’école avec cette proposition
de collaboration qui correspondait tout à fait à la formation de nos élèves. En tant que professeur, je veux que mes étudiants apprennent que leur créativité ne doit pas se détacher d’un potentiel commercial, bien au contraire. Travailler avec Birkenstock a été une expérience incroyablement formatrice et gratifiante pour tous les étudiants impliqués. Quatre d’entre eux ont été sélectionnés pour voir leurs créations produites à grande échelle et vendues dans le monde entier grâce au réseau de distribution de la marque et à sa force de communication. Il s’agit là d’une exposition significative pour les diplômés qui sont au début de leur carrière.
Qu’est-ce qui vous a surpris dans la façon dont les étudiants ont abordé les archives de Birkenstock et le projet dans sa globalité ? F.P. : J’ai été surpris de leur engagement immédiat, la plupart d’entre eux trouvant dans la sandale Birkenstock un objet familier, qui renvoit à des souvenirs personnels. Les étudiants en History & Theory ont, eux, voyagé à travers plusieurs pays pour découvrir la marque sous plusieurs angles. Leurs conclusions ont révélé la multitude d’interprétations de la Birkenstock, démontrant comment la fonctionnalité et les détails techniques peuvent coexister avec une imagination sans limite. Cette dualité a trouvé un écho auprès des étudiants en design et a défini le terrain sur lequel ils pouvaient ensuite remettre en question l’esthétique et l’identité de la marque, et mettre en avant leurs approches créatives.
Cet artiste danois doté d’une formation de tailleur a imaginé cette paire de sandales qui s’éloigne du minimalisme, esthétique qui, selon lui, colle trop souvent à la peau des créateurs de son pays. SASKIA LENAERTS (5)
Son travail est un manifeste, le reflet de son héritage et de son style de vie. Elle milite pour un monde non-violent et sans frontières. Elle a gardé ici l’idée de fonctionnalité de la fameuse semelle en liège, qu’elle a réinterprétée avec ses propres codes.
L’O :
2
3
L’O : Selon vous, quel était l’élément central recherché par les juges avant
de sélectionner les quatre gagnants – Dingyun Zhang, Alex Wolfe, Alecsander Rothschild et Saskia Lenaerts – de cette collaboration ? F.P. : Ils recherchaient des interprétations créatives et réalistes qui expriment autant la nouveauté que la viabilité commerciale. 29 4
5
NOUVEAU SOUFFLE Après plus de quinze années passées à New York, le styliste belge Tom Van Dorpe, connu pour ses multiples collaborations, reprend la direction artistique de la marque The Kooples. Rencontre. L’OFFICIEL : Vous avez été rédacteur de mode pour V Magazine et V Man, vous avez signé le stylisme des défilés de Rihanna pour Puma et multiplié les conseils pour les marques. Vous aimez le goût du défi… TOM VAN DORPE : La mode est un terrain de jeux géant où les possibilités sont multiples. Commencer dans ce milieu en travaillant pour un magazine est idéal pour rencontrer les photographes, proposer une idée et la vendre. Et c’est exactement ce que je fais aujourd’hui pour The Kooples. En plus, j’ai toujours travaillé la mode homme et femme, comme aujourd’hui chez The Kooples, ce qui est assez rare pour un styliste. Finalement, même si ces modes ne sont pas les mêmes, elles ont beaucoup de points communs, et encore plus aujourd’hui.
Vous avez repensé la marque de quelle façon ? Comme si j’avais retravaillé la ligne éditoriale d’un magazine. J’ai gardé son ADN, très fort, mais j’ai insufflé de la modernité aussi bien dans les campagnes publicitaires que sur les réseaux sociaux ou à travers le e-shopping dont j’ai élaboré chaque silhouette pour une visibilité plus digitale. Même si je n’ai pas étudié la mode comme un designer l’aurait fait, être styliste m’a permis de travailler en très étroite collaboration avec l’équipe. The Kooples est une histoire de mode, mais également de casting… La campagne de l’hiver dernier nous a permis de redéfinir visuellement l’image de la marque à travers des couples d’amants, de jeunes mariés, de parents, de frères, de sœurs ou d’âmes sœurs.
Puis j’ai élaboré les looks clés de la saison avec les fondamentaux de la marque toujours dans un esprit assez rock’n’roll. Pour le printemps-été, j’ai donné un contexte à la collection avec des références et une gamme de couleurs afin de pouvoir raconter une histoire et lier les collections homme et femme. Avant, chaque personne se définissait par rapport à un style établi – 70s, rock, boyish, etc., –, alors que maintenant, on mélange tout. Chaque vêtement ne doit pas correspondre à un style exclusif mais, au contraire, doit pouvoir s’en extraire pour être mélangé. The Kooples est une marque de luxe accessible avec un esprit urbain rock. Quelle touche avez-vous rajoutée à cet ADN ? J’aime l’idée de mélanger cette silhouette forte et pas très sage avec mon approche très “clean”, je pense que c’est ça le look du moment. Va-t-on retrouver la notion de “ la Parisienne” dans vos collections ? Quand j’ai rencontré Romain Guinier, le CEO de la maison, pour la première fois, il m’a expliqué que la femme The Kooples a une élégance rebelle. Et c’est exactement ainsi que je vois la Parisienne, toujours très élégante, mais avec un côté inattendu, casual. C’est très agréable d’avoir comme point de départ de mes collections cette femme que tout le monde adore. Qui sont vos muses, les couples qui vous inspirent ? Il y a bien sûr les mythiques Jane Birkin et Serge Gainsbourg, Johnny Depp et Winona Rider, Françoise Hardy et Jacques Dutronc… Mais je ne voulais pas partir de cette idée-là pour
Propos recueillis par LAURE AMBROISE
L’NEWS
donner un nouvel esprit à la marque. Il est difficile de dire qui sont les muses d’aujourd’hui, j’ai donc préféré m’attacher à des couples atypiques d’aujourd’hui. Pour ce printemps-été, ce sera Vincent Cassel et Tina Kunakey, cadrant à 100 % à cette nouvelle histoire que j’écris avec la marque. Lui est charismatique. Elle, très moderne, dans le moment, elle joue avec le glamour et le naturel et tous les codes de la féminité. En plus d’être la star de la nouvelle campagne, Tina a réalisé une collection pour vous… Un vestiaire pour Vincent avec des matières naturelles, du beige et du noir, qu’elle s’est approprié également. Alors que sur lui, c’est relax, sur elle, c’est plus boyish. Partager un vestiaire fait partie de son style, c’est ce qu’elle fait au quotidien. On retrouve donc un blazer droit magnifique, une chemise blanche, un T-shirt bien vieilli… En plus de cette collection, elle a imaginé un sac seau qui j’espère connaîtra le même succès que les collaborations précédentes.
Et votre collection printemps-été ? L’idée était une “rébellion positive”. La notion de rébellion de The Kooples est souvent dark, mais avec l’année qu’on vient de passer, j’ai voulu adoucir les choses avec des matières organiques et un style plus minimal, dans une première partie de collection, et dans la seconde,des imprimés, des pastels et du denim clair.
les fashion weeks et les shootings, c’était très intense. En m’installant à Paris, je voulais me concentrer sur une marque. La pandémie est un vrai choc, et me concentrer sur The Kooples me permet d’avancer. Et quand je regarde ce qu’on a accompli, on peut être content… Que ce soit la collaboration avec Tina, le travail avec les fournisseurs pour des matières organiques, l’unification des collections homme et femme, la diversité dans nos castings avec des couples gays ou trans afin d’être le plus inclusif possible. Honnêtement, c’est assez incroyable.
Photos DR
Arriver dans un nouveau pays, travailler pour une nouvelle marque, tout cela en pleine pandémie… Cela a-t-il affecté votre travail ? Pendant quinze ans, j’ai voyagé toutes les semaines entre
TOM VAN DORPE, DIRECTEUR ARTISTIQUE DE THE KOOPLES.
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La musique au CŒUR Au cinéma, on la connaît sous son propre nom, Sasha Spielberg, fille du réalisateur monumental. Sous le pseudo de Buzzy Lee, cette Californienne sort un premier album intimiste, intimiste, Spoiled Love, avec la complicité de Nicolas Jaar. Rencontre à distance avec une brillante (en)chanteuse. Par NOÉMIE LECOQ Par une nuit de décembre glaciale, on se connecte sur Zoom pour un rendez-vous entre Paris et Los Angeles. Buzzy Lee, apparaît à l’écran. Un sourire rayonnant illumine son visage, au naturel, encadré par une chevelure brune ondoyante. Derrière elle, des fenêtres laissent deviner le soleil californien. Son accueil chaleureux réduit immédiatement en miettes la distance qui nous sépare. “En 2020, j’ai traversé des périodes difficiles, à cause d’une rupture et du décès de mon grand-père, commence-t-elle. Mais j’ai aussi j’ai pu prendre le temps, de cuisiner, de lire, de regarder plein de films que je n’avais jamais vus, de marcher, de méditer, de faire de l’aquarelle… J’ai compris que la solitude ne me dérangeait pas, et ça a été une leçon très importante pour moi.” Autre événement majeur : Sasha a fêté son 30e anniversaire, une journée qu’elle a passée “principalement à répondre à tous les messages”, regrette-t-elle, mais qui a inauguré une nouvelle décennie réjouissante. Déjà croisée au cinéma dans certains films de son père, la Californienne s’est aussi illustrée en musique avec son frère Theo (au sein du duo indie-folk Wardell) et avec son ami Nicolas Jaar (pour leur projet Just Friends). Elle s’apprête à dévoiler fin janvier son premier album solo sous le pseudo de Buzzy Lee. “Le nom Spielberg était déjà pris, lâche-t-elle dans un éclat de rire. À l’origine, j’envisageais de sortir un EP en restant anonyme, mais c’était impossible si je voulais faire des concerts à visage découvert. J’ai juste envie que les gens découvrent ma musique sans idée préconçue, avant de lire ce nom de famille devant lequel je préfère parfois me dérober.” On comprend facilement cette envie de creuser son propre sillon et de se faire un prénom dans sa prestigieuse famille. De ses parents, le réalisateur Steven Spielberg et l’actrice Kate Capshaw, Sasha a hérité d’une passion pour la musique dès l’enfance. Elle nous confie que son père n’arrêtait pas d’écouter les Beatles et des musiques de films, tandis que sa mère passait en boucle des artistes comme Lucinda Williams, Ani DiFranco et toute la clique Lilith Fair des 90s. “Pour ma part, après une phase
pop, j’ai commencé à jouer de la guitare à l’âge de 12 ans. C’est à ce moment-là que je me suis mise à adorer Led Zeppelin et le rock.” Loin de ses obsessions d’ado, l’album Spoiled Love arbore des tonalités d’une beauté vertigineuse, apaisantes, minimalistes et intimistes. On pense aux arrangements verglacés du premier Lykke Li, à la voix de Zooey Deschanel chez She & Him, ou à la limpidité de Joni Mitchell. Derrière son synthé, la chanteuse compose ses chansons sur un ton direct. “J’aime les premiers jets. Mes paroles sont des phrases simples qui ressemblent beaucoup aux textes que j’écris dans mon journal intime. J’ai l’impression que plus les mots sont bruts et clairs, plus ils résonnent et expriment le fond de ma pensée.” Ces morceaux ont été façonnés avec l’artiste électro Nicolas Jaar, ami intime avec qui elle travaille depuis des années. Leur rencontre a eu lieu durant leur première année d’études à la prestigieuse université Brown. Ils avaient 18 ans et leur complicité est d’abord née d’un amour mutuel pour le groupe anglais Portishead. Sur Spoiled Love, ils élaborent ensemble des sonorités délicates, où le premier rôle est tenu par la voix de Sasha, ou plutôt deux pistes de voix superposées, façon John Lennon. “Nico m’apporte énormément. Il sait comment faire respirer une chanson, à petits coups de pinceaux. Il est capable de se changer en guide, voire en pom-pom girl quand j’en ai besoin, en coach aussi. Bref, il est incroyable !” Si la musique est son mode d’expression favori, Sasha utilise également la mode pour affirmer sa personnalité. “Ce que je porte en dit long sur moi, en particulier en live. Beaucoup de styles m’inspirent, comme celui des années 1940, ou le style western. J’ai eu des périodes où je ne m’habillais qu’avec les vêtements de mes petits amis, et j’adorais cette sensation de confort. D’ailleurs, il y a beaucoup d’artistes masculins dont j’admire les looks sur scène, David Bowie, Prince… Leur mélange de masculin et de fémin me fascine.” On pourrait en dire autant de son album d’une splendeur jamais ostentatoire, qui captive du début à la fin.
Photo Julia Brokaw
L’NEWS
BRIT freak
Avec son électro-rap hybride, la Londonienne Shygirl explore les différents aspects de sa féroce personnalité pour s’émanciper et aller toujours plus loin. 2021 lui appartient. Par NOÉMIE LECOQ Photographie SAMUEL IBRAM Casting JENNIFER EYMÈRE Stylisme LEE TRIGG Ne surtout pas se fier au pseudo qu’elle s’est choisi : Shygirl n’a pas grand-chose de shy (“timide”, en français). Il suffit de visionner un seul de ses clips pour s’en convaincre – le nocturne BB, l’acéré Uckers ou encore l’intense Slime, entre autres. Extravertie, déterminée, audacieuse, sexy et maîtresse d’elle-même, cette Londonienne n’a pas froid aux yeux. Elle ose laisser libre cours à ses expérimentations les plus radicales, comme Björk ou Aphex Twin avant elle. “Je n’ai jamais ressenti la moindre timidité, nous avoue-t-elle au bout du fil depuis son appartement londonien. Ça m’arrive, bien sûr, d’avoir des moments de nervosité ou d’appréhension, mais ça passe très vite, je me force à les surmonter pour aller de l’avant.
Faire semblant d’avoir confiance en soi, ça finit par donner une réelle assurance. Quand je me suis mise à chercher un nom de scène, le terme ‘shy’ m’a attirée parce que ce concept m’est totalement étranger. C’est l’exact opposé de ma personnalité !” Son tempérament de feu follet n’est pas incompatible avec un goût pour l’introspection, au contraire. Shygirl passe ainsi en revue les innombrables facettes d’elle-même sur l’EP Alias, sorti fin novembre. On y découvre ses quatre alter ego (Baddie, Bonk, Bovine et Bae) qui apparaissent dans ses clips sous forme d’avatars digitaux. “J’ai toujours eu envie d’explorer ces variantes de moi-même parce qu’elles reflètent ma musique, analyse-t-elle.
J’ai presque autodisséqué ces traits de caractère qui s’expriment le plus souvent en moi.” Cette galerie de personnages ne serait pas complète sans un dernier prénom en “B”, celui qui est inscrit sur le passeport de Shygirl : Blane, jeune femme complexe, originaire du sud de Londres, diplômée en photographie. Avant de lancer sa carrière musicale, elle passe par d’autres expériences à plein temps, dans une agence de design et en tant que bookeuse dans une agence de mannequins. À l’époque, elle note ses idées de chansons ou ses textes dans les transports en commun, juste pour elle-même, sans projeter de les partager. Depuis, plusieurs lignes sont venues s’ajouter à son CV : DJ, cofondatrice du label Nuxxe (maison mère de Coucou Chloé, Oklou et Sega Bodega), réalisatrice de ses propres clips, ou encore collaboratrice que l’avant-garde électro s’arrache (elle figure sur le dernier album de la productrice Arca et sur des morceaux de la tête chercheuse Sophie). Sa vision kaléidoscopique de la musique ne date pas d’hier. Quand on lui demande ses premières fascinations sonores, deux œuvres majeures remontent à la surface de sa mémoire : la BO du dessin animé Le Livre de la jungle et le foudroyant single de The Prodigy Firestarter. “Deux ambiances qui tranchent, reconnaît-elle en éclatant de rire. Bizarrement, ça me calmait toujours quand j’étais d’humeur chahuteuse à la maison.” C’est son ami Sega Bodega, intéressé par sa voix posée et son débit de mitraillette, qui la pousse à se lancer. En 2016, il l’invite à chanter sur un morceau qu’il prépare. Le résultat, intitulé Want More, donne effectivement envie d’en entendre davantage. “À ma grande surprise, tout s’est déroulé de façon très naturelle dès le départ, explique Shygirl. Je n’ai pas eu à faire de compromis. Je tente des choses, ce processus me plaît, et par un heureux hasard il y a d’autres gens qui apprécient aussi ce que je crée. Je poste mes nouvelles chansons au fur et à mesure, dès qu’elles sont prêtes. Le public me voit donc évoluer en temps réel, en même temps que je me révèle à moi-même.” Ses dernières mutations en date illuminent les sept morceaux futuristes de l’EP Alias. Le flow à la fois détaché et percutant de Shygirl se mêle à sa musique, savant mélange de toutes ses obsessions, du grime au R&B, du rap à l’acid house, de la drum’n’bass à la pop. La chanteuse aime se nourrir du travail
en équipe et s’entoure ici de guests tels que Sega Bodega et Sophie, fidèles de la première heure, mais aussi Karma Kid, Oscar Scheller et Happa. “En matière de création, j’ai tendance à vouloir tout faire, explique Shygirl. Les collaborations m’obligent à sortir de ma coquille et provoquent une spontanéité qui est difficile à obtenir pour une perfectionniste seule aux commandes. L’imprévu peut marcher à merveille. C’est aussi intéressant de voir de nouvelles façons de travailler. J’ai envie de découvrir tous les paramètres possibles pour ma musique. Mon premier EP était plus sombre et angoissé, j’avais l’impression d’entrer pour la première fois dans une pièce, de regarder si j’avais ma place. Avec ce nouvel EP, je me sens plus en confiance et je me promène dans tous les recoins, en adressant la parole à différentes personnes et en me frayant un chemin à travers les styles musicaux.” Cette quête de soi passe aussi par les vêtements qu’elle choisit de porter, utilisant la mode comme un moyen d’expression. On a pu entendre sa musique dès 2017 pour le lancement de Kenzo Folio, ou plus récemment, en octobre dernier, dans une campagne Mugler. “Je dois dire que mon look était un vrai désastre quand j’étais plus jeune, précise-t-elle avec humour. Plus tard, j’ai travaillé comme assistante de la styliste Mischa Notcutt, qui est aujourd’hui ma directrice créative, et j’ai énormément appris à ses côtés. Quand je me sens mal, je fais l’effort de bien m’habiller, par exemple de mettre une robe GmbH que j’adore, et ça m’aide à aller mieux. Les vêtements ont ce pouvoir-là. La mode est très importante pour cette raison précise, pas tant pour les tendances qu’elle dicte, mais pour nous aider à mieux cerner qui nous sommes et ce que nous avons envie de ressentir.” Aussi libre et débridée que sa musique, Shygirl devrait bientôt passer à l’étape suivante : la préparation d’un album qui, s’il se concrétise en 2021, pourrait tout emporter sur son passage. EP Alias (Because Music), disponible. PAGE DE GAUCHE: Accessoire de cou, NASIR MAZHAR. CI-DESSUS: Robe, MAXIMILIAN RAYNOR. Collier pompons
PEBBLE LONDON. CI-DESSOUS: Robe, 8 MONCLER X RICHARD QUINN. ASSISTANTES STYLISME: Joy Appiah et MAQUILLAGE: Luz Giraldo pour MAC
et Roman Sam pour FUDGE.
Sabira Haque. COSMETICS
porté en bracelet,
NOT JUST A GIRL
Glamour et excentrique, Gwen Stefani a été l’une des poster girls les plus excitantes des années 90 et 2000. L’ex-leader du groupe culte No Doubt, devenue pop star, coach et icône de mode, revient avec un nouveau single, Let Me Reintroduce Myself. Conversation avec une éternelle rebelle rebelle.. Propos recueillis par VIOLAINE SCHÜTZ Avec le revival des 90s, elle fait partie de ces filles dont on voit constamment les clichés du passé repostés sur Instagram. Crop top, cheveux platine, pantalons baggy, barrettes… à 51 ans, Gwen Stefani voit ses aventures stylistiques revenir en force sur les réseaux sociaux et dans la rue. Elle n’est pourtant pas qu’une pin-up punk. Avec le groupe No Doubt, elle s’est imposée dans le paysage rock des années 90 avant de devenir une pop star solo collaborant avec Dr Dre, Pharrell Williams et Prince. Son charisme et sa musique ont depuis influencé Rihanna, Katy Perry, Ariana Grande, Dua Lipa (qui a invité Gwen sur son album de remixes). L’OFFICIEL : D’où t’est venue l’idée de ce nouveau single ?
GWEN STEFANI : C’est un titre qui parle de mon insécurité, comme d’habitude (rires), avec autodérision. Ça évoque le fait d’écrire de la nouvelle musique alors que je me sentais sur la défensive, de se re-présenter aux autres. Je me suis dit : mais pourquoi être sur la défensive, je suis toujours moi, en fait. Je ne suis pas morte (rires). Je partage donc, innocemment, ce que je suis. LO : Revenir
au reggae-ska que tu faisais avec No Doubt est-il lié à la période difficile qu’on traverse, qui laisse le temps à la réflexion ? GS : Le dernier album que j’avais enregistré, This Is What The Truth Feels Like, correspond à un moment où je me sentais blessée (Gwen avait divorcé de Gavin Rossdale, père de ses trois garçons, chanteur du groupe Bush, ndlr). Et puis je suis tombée amoureuse (de Blake Shelton, superstar de la country), ce qui m’a transformée. Bref, c’est une combinaison de choses qui m’ont amenée au son de ce nouveau single. Les 25 ans de l’album Tragic Kingdom de No Doubt ont joué, sans doute. Il y a aussi tout ce qui se passe dans le monde autour de #metoo et des problèmes raciaux. On parlait déjà de ça avec No Doubt, à travers la musique ska des 70s qui primait l’unité et l’antiracisme. J’ai un ado à la maison qui écoute
aussi beaucoup de musique. Ça m’a rappelé qui j’étais à 14-15 ans et donné envie d’approfondir mon travail autour de la musique qui m’a définie : le ska et le reggae. LO : Qu’as-tu découvert pendant ces recherches sur le reggae et le ska ?
GS : C’était intéressant car je ne connaissais le reggae que par le prisme du ska. Quand j’avais 13 ans, je vivais en banlieue californienne, dans une famille simple et catholique, je ne connaissais rien au reggae. Lors de mes recherches, j’ai découvert l’existence de sœur Mary Ignatius Davies, une femme blanche, catholique, née dans les années 20, qui habitait à Kingston. Elle éduquait les jeunes garçons qui suivaient les cours de musique de l’orphelinat, devenu institution pour enfants en difficulté, Alpha Boy’s School. Quand j’ai appris l’existence de cette nonne qui enseignait à ces jeunes Jamaïcains qui allaient ensuite jouer avec Bob Marley, j’ai ressenti une étrange connexion avec elle. LO : Tu as créé la marque L.A.M.B. Quel rôle joue la mode dans ta vie ?
GS : La mode a toujours été là, depuis que je suis petite fille. Quand
j’allais à Disneyland, j’étais fascinée par les costumes, les couleurs. Ma mère était aussi très stylée dans les années 60. Et je regardais les vieux films hollywoodiens où tout le monde est si glam.
LO : Quand tu as écrit Just A Girl avec No Doubt, te rendais-tu compte
qu’il s’agissait d’un hymne féministe ? GS : Pas du tout, ce n’était que mon sentiment de l’époque. Au début de la vie, on n’a pas forcément conscience du genre auquel on appartient. C’est en grandissant qu’on se rend compte que c’est une force d’être une fille, mais que cela nous rend aussi vulnérable. Par la suite Just A Girl est devenu le nom de mon show à Las Vegas, et en interprétant la chanson sur scène je me suis rendu compte que c’était le titre le plus pertinent que j’ai jamais écrit.
Photo Jamie Nelson
L’NEWS
ESCALE à Venise La nouvelle collection de haute joaillerie Chanel offre une lecture contemporaine de Venise, ville chère à Mademoiselle.
Depuis son arrivée chez Chanel en 2009, Patrice Leguéreau, directeur du studio de création de joaillerie, dessine chaque année deux collections de haute joaillerie qui traduisent en pierres précieuses l’esprit et le cœur de Gabrielle Chanel. Dans cet imaginaire, Venise occupe naturellement une place de choix. L’INSPIRATION
La prédilection de Gabrielle Chanel pour la Sérénissime avait fourni le thème d’une collection de haute joaillerie en 2013. Cette collection avait marqué les esprits en matérialisant avec maestria le lion de saint Marc, les mosaïques byzantines et les dentelles de pierres du Grand Canal en plastron de diamants et en bracelets talismans. Patrice Leguéreau a souhaité de nouveau faire escale à Venise, s’attachant cette fois-ci au visage contemporain de la Cité des Doges. 38
LE SAVOIR-FAIRE
Les pierres tout d’abord : leur nombre, leur variété, leur pureté, leur rareté et la qualité de leurs appairages attestent le sérieux de l’ambition. Le style ensuite : divin, grâce à la modernité d’un trait soutenu par un artisanat rare. Ce geste précieux autorise la complexité des sertis et la multiplicité des emmaillements au service de la légèreté, à l’instar de ce sautoir (ci-dessus) sur lequel les spinelles rouges et les diamants développent leurs harmonies chromatiques dans une évocation saisissante des palines qui servent à amarrer les bateaux à l’entrée des palais vénitiens. Collier Volute Croisière en or jaune, or blanc, diamants, onyx et spinelles rouges, collection Escale à Venise, Chanel Haute Joaillerie. Pièce unique. -Par Hervé Dewintre
Photo DR
LE MYTHE
L’NEWS Énergie BRUTE La nouvelle collection féminine signée Richard Mille ressuscite l’indomptable liberté des 70s. LE MYTHE
On l’oublie parfois, mais la grammaire stylistique de Richard Mille, si remarquablement incarnée par le doux profil d’un boîtier de forme tonneau, s’est aussi largement exprimée par l’utilisation des minéraux et des pierres précieuses. La nouvelle collection imaginée par Cécile Guenat, directrice de la Création et du Développement de Richard Mille, s’inscrit dans cette tradition, tout en la renouvelant grâce à une utilisation avisée de pierres fines et précieuses aux couleurs vives. L’INSPIRATION
Il y a deux ans, la RM 71-01 Tourbillon Automatique Talisman – le premier projet de Cécile Guenat – posait les bases d’une vision conciliant innovation, caractère et féminité. Baptisées Bianca, Donna, Jane, Liz ou Paloma, les dix pièces de cette nouvelle collection confirment la pertinence de cette vision en s’inspirant de femmes qui ont façonné la société moderne. LE SAVOIR-FAIRE
Scintillant du boîtier à la masse oscillante, les dix versions de la RM 71-02 Tourbillon Automatique Talisman explorent toute le spectre chromatique grâce à un assortiment de pierres – tsavorites, spessartites, améthystes, diamants, spinelles, rubis, saphirs – ordonnées en motifs géométriques sur la lunette et le cadran. Montre RM 71-02 Tourbillon Automatique Talisman en or gris et rouge sertis, calibre maison CRMT1, mouvement tourbillon squeletté à remontage automatique, Richard Mille. Collection limitée de 10 pièces produites à 7 exemplaires. Ici, modèle Carmen serti de saphirs jaunes, diamants, tsavorites, saphirs, péridots, lapis-lazuli, chrysoprase citron et malachite. Bracelet en cuir verni métallique.
Photo DR
-Par Hervé Dewintre
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Crystal’s
MANIFESTO
Figure du body positivity made in Usa, le mannequin Crystal Renn incarne la liberté autant que l’engagement, et a l’art de se réinventer sans cesse. Une inspiration Une inspiration à elle tout seule. Photographie PAUL EMPSON Stylisme VICTORIA BARTLETT
L’ICÔNE
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CI-DESSUS : Robe en coton imprimé, VALENTINO. Turban, SWATCHON . PAGE DE GAUCHE : Sweat-shirt à capuche, jupe en coton et col roulé en jersey, PRADA. PAGE PRÉCÉDENTE : Top en coton imprimé, CHANEL. Turban, SWATCHON .
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CI-DESSUS : Top col roulé, MM6 MAISON MARGIELA. Jupe en soie imprimée, SACAI. Chapeau, SWATCHON. PAGE DE DROITE : Manteau, TIZIANO GUARDINI. Polo en coton et jupe plissée, LACOSTE. Turban, SWATCHON. Bague, VERSACE .
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CI-DESSUS : Minirobe
en crêpe, STELLA McCARTNEY. (Dessous) robe à paillettes, JIRI KALFAR. Chapeau et ceinture, SWATCHON. Sac en cuir vegan, ADELAIDE. Sabots, MOHOP. PAGE DE GAUCHE : Robe en patchwork de coton et satin imprimé, LOUIS VUITTON.
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CI-DESSUS : Manteau et robe en crochet de coton et lunettes de soleil, BOTTEGA VENETA. Pantalon en soie, JIRI KALFAR. Sac, THEMOIRÈ. Sabots, MOHOP. PAGE DE DROITE : Veste sur mesure, THREEASFOUR using SWATCHON fabric . Robe plissée imprimée, PROENZA SCHOULER .
Leggings, COLLINA STRADA. Bagues, MOHOP. Sneakers, ACBC.
Coiffure : Kenta Koda et Shino. Maquillage : Saito Chichi. Assistant stylisme : Danielle Wellington.
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DANCING in the dark Ildjima, plus connue sous le nom de Queentoide Queentoide,, est une des new faces du moment moment.. Elle porte ici la collection Alexander McQueen printemps-été 2021 signée Sarah Burton. Photographie JULIEN VALLON Stylisme JENNIFER EYMÈRE
L’STYLE
CI-CONTRE : Pull corset en tricot, jupe culotte en cuir doux et escarpins en cuir et métal. PAGE PRÉCÉDENTE : Veste de motard et pantalon en cuir et denim délavé et escarpins en cuir et métal.
ALEXANDER McQUEEN
CI-DESSUS : Manteau à manches bouffantes en sergé de laine compact et choker en argent. PAGE DE DROITE : Veste de motard en cuir souple à manches bouffantes en tulle et jupe en tulle.
ALEXANDER McQUEEN
Coiffure : Yusuke Taniguchi. Maquillage : Lloyd Simmonds. Assistant photo : Florent Vindimian. Assistant stylisme : Kenzia Bengel de Vaulx.
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La force DE L’ÂGE Elle possède la grâce des filles qui font confiance à leur instinct. À 20 ans, Suzanne Lindon sort son premier film intitulé “Seize Printemps” et pose pour Hedi Slimane. Par VIRGINIE APIOU Photographie STELLA BERKOFSKY Stylisme JENNIFER EYMÈRE Quand elle vous parle, Suzanne Lindon manipule les deux minuscules pendentifs suspendus à son cou, dessinés à la main par la délicate marque italienne Merù Gioielli. L’un représente une fleur, une pensée bleue, l’autre une stripteaseuse avec la mention “Good Luck”. À peine visibles, ces petits bijoux ont l’exactitude discrète et fantasque des paroles d’une jeune femme scénariste, réalisatrice et actrice, qui ne voulait pas attendre. “J’ai écrit Seize Printemps à 15 ans. Pour moi, 16 ans est le cœur de l’adolescence. Dans la littérature que j’aime, les poèmes de Ronsard, j’ai l’impression que les filles ont 16 ans. 15 ans, il y a un côté majorité sexuelle que je voulais éviter. 18, c’est la majorité tout court, et 17 on s’en fout ! Donc 16 ans !” Seize Printemps, c’est l’histoire de Suzanne, une jeune fille qui tombe doucement amoureuse. “Elle a mon prénom pour plusieurs raisons. C’est un prénom que j’ai détesté enfant, et que j’ai aimé ado. Quand on est petit, être différent c’est dangereux. Pour s’intégrer, il vaut mieux ne pas avoir un prénom dissonant. Suzanne, c’est aussi le prénom d’un personnage
que j’aime : Sandrine Bonnaire dans À nos amours de Pialat. Et, dans un autre film qui m’avait beaucoup plu, petite, L’Effrontée de Claude Miller, Charlotte Gainsbourg jouait un personnage qui porte son propre prénom, Charlotte.” Avec Seize Printemps, Suzanne Lindon privilégie une adolescence plus sensuelle que sexuelle. “Je n’aime pas beaucoup les scènes d’amour au cinéma. Le seul baiser qui m’emporte est entre Ingrid Bergman et Cary Grant dans Les Enchaînés de Hitchcock, il dure cent ans ! Seize Printemps traite d’un rapport pudique entre un homme de 30 ans et une jeune fille. Aucun n’a plus de pouvoir que l’autre. Aucun n’a d’emprise sur l’autre. Leur histoire est instinctive et intellectuelle. Il fallait quand même qu’il se passe une chose physique entre eux, qu’ils aient leur moyen d’être sensuels l’un avec l’autre. C’est pour ça qu’ils dansent ensemble. C’est leur langage amoureux. C’est là qu’ils se retrouvent. La gestuelle ne trahit pas. On peut se cacher derrière ce qu’on dit, mais pas dans la manière dont on se place,
L’L’CINÉMA HEROINE
dont on s’offre au monde.” Dans son film, Suzanne Lindon danse aussi toute seule sur Señorita de Christophe, pour montrer son état insensé d’adolescente. “Moi, j’étais très extrême. Mes tristesses étaient infinies et mes joies immenses pour des choses qui étaient en fait banales.” Suzanne, son héroïne, lui ressemble, à la fois juste ce qu’il faut d’introverti et de fantasque. “Elle est ailleurs, bizarre, elle a son monde, elle fait des trucs que j’ai faits : embrasser son mur. Quand je suis tombée amoureuse d’un garçon, je l’ai fait vingt fois ! On se met en scène, on en a besoin, parce qu’on est tout seul.” Préparé en une semaine et tourné en trois, Seize Printemps est imaginé par une Suzanne Lindon atypique qui donne du sens à ses choix. “Ça parle d’un sujet universel, sans marqueur d’époque, donc il n’y a pas de téléphone portable dans le film, et aucun mot trop moderne. Je porte une chemise d’homme, légère comme mon personnage. Quelque chose de sensuel, séduisant. Les vêtements PAGE PRÉCÉDENTE : Veston
et pantalon de smocking flare en laine,
CELINE PAR HEDI SLIMANE. T-shirt, perso.
CI-DESSUS ET PAGE DE DROITE, À GAUCHE : Vêtements, perso. PAGE DE DROITE, À DROITE : Veste de smocking et veston,
CELINE PAR HEDI SLIMANE. T-shirt, perso.
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“ ‘SEIZE PRINTEMPS’ TRAITE D’UN rapport pudique ENTRE UN HOMME DE 30 ANS ET UNE JEUNE FILLE. Aucun N’A PLUS DE POUVOIR QUE L’AUTRE. AUCUN N’A d’emprise N’A d’emprise SUR L’AUTRE.”
m’aident. Le fait de mettre une cravate à Arnaud Valois, qui joue le rôle de l’amoureux, c’était important parce que les jeunes hommes en cravate, il y en a de moins en moins. C’est charmant et en même temps, je me demande : est-ce que c’est confortable ? Est-ce que l’homme se sent enfermé ou affirmé ?” Vêtue d’un long manteau de laine chinée recouvrant un T-shirt de coton blanc et un jean, Suzanne Lindon affiche son style. “J’ai ma façon d’être féminine. Je ne me suis jamais maquillée, je me mets très rarement en robe. Je ne sais pas marcher avec des talons. J’ai des goûts et je les assume.” Cette allure déterminée a été remarquée par Hedi Slimane. Avec la jeune Suzanne, Slimane a réalisé une série de clichés conciliant esthétique rock et esprit classique, basés sur des pièces atemporelles : marinière, chemisier, sweat oversized, pull col en V, blouson court ou veste sur T-shirt ciglé. Le créateur semble trouver en Suzanne une variation nouvelle de la silhouette “skinny”. Avec elle, il travaille la gestuelle des épaules pour un look qui pourrait apparaître androgyne, mais se révèle totalement féminin. “J’aime vraiment ce qu’il fait. Ce qui m’a intéressée, c’est sa vision. J’adore sa simplicité. Il n’y a pas plus compliqué que de faire simple, et lui le fait de façon sublime. J’adore son œil, c’est un regard qui porte une grâce extraordinaire, j’avais envie d’être vue par lui. C’est une rencontre importante pour moi, c’est un homme que j’aime beaucoup.” Suzanne Lindon est une indépendante très entourée. “J’ai vécu seule très tôt après avoir eu mon bac. Quand je tournais mon film, je rentrais seule chez moi le soir, pour être sûre et certaine que c’était moi seule qui le faisais, sans influence. Mais je suis très écoutée et aimée par mes parents (Sandrine Kiberlain et Vincent Lindon, ndlr) et mes amis. C’est rare. Ma vie est assez simple. J’ai envie de m’amuser et d’étudier.” Car il ne faudrait pas oublier que
la jeune femme a seulement 20 ans. “Avoir 20 ans, ça veut dire avoir envie d’y arriver, de changer les choses. C’est désirer. Avoir envie d’aimer et d’être aimée.” Est-elle amoureuse en ce moment ? “Non, j’aimerais bien, mais non. Ça ne se décide pas comme ça. Je suis une grande amoureuse. Je tombe amoureuse très facilement.” Le fait de parler d’amour fait naturellement revenir le cinéma dans la conversation. “Le cinéaste qui me parle d’amour, c’est François Truffaut. C’est une vision pure de l’amour. Les histoires d’amour de Truffaut sont des histoires d’amour que j’aimerais vivre. La Femme d’à côté est le plus grand film d’amour du monde. Je l’ai vu pour la première fois, j’avais 10 ans, et j’ai quand même compris que l’amour, c’était plus fort que tout ce que les deux héros, joués par Fanny Ardant et Gérard Depardieu, vivent.” Suzanne Lindon voit des films depuis qu’elle est toute petite. Elle cite tour à tour les films de Chaplin, Tootsie, Les Demoiselles de Rochefort, La Fièvre dans le sang d’Elia Kazan, Running on Empty de Sydney Lumet qu’elle a offert à tous ses amis. Elle aime les tempéraments engagés des cinéastes Valeria Bruni-Tedeschi ou James Gray. “J’adore voir les films deux fois, y compris quand je les ai détestés, car je déteste détester un film. Je veux comprendre pourquoi je ne l’ai pas aimé. J’adore aller au cinéma toute seule, donc pour les rendez-vous galants je passe des séances pourries, j’ai le trac, je suis concentrée sur le garçon qui est à côté de moi. Après, quand il me demande si j’ai aimé le film, je dis n’importe quoi.” Aujourd’hui Suzanne s’apprête à suivre des cours aux ArtsDéco de Paris, pour “aller à l’école avec des gens de mon âge et me donner des bases solides”, mais le grand projet, c’est de sortir Seize Printemps. Seize Printemps, de et avec Suzanne Lindon, avec aussi Arnaud Valois, Rebecca Marder… Sortie le 27 janvier 2021.
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CI-DESSUS : Chemise Western Sulky en coton, CELINE PAR HEDI SLIMANE. Débardeur, jean et tennis, perso. PAGE DE GAUCHE : Pull en cachemire, CELINE PAR HEDI SLIMANE. Veste, jean et baskets, perso. MAQUILLAGE : Christophe Danchaud. ASSISTANT PHOTO : Thomas Rigade. ASSISTANT STYLISME : Kenzia Bengel de Vaulx.
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UP Cycling Le mannequin français Ivanka Smilenko a prêté son visage à la campagne Hermès Twilly, au parfum L’Interdit de Givenchy, à la créatrice Vivienne Westwood, et a défilé récemment pour Chanel à l’occasion de son dernier défilé des métiers d’art. À l’occasion de ce spécial mode, elle prend la pose avec les pièces de la saison et les plus beaux vintage de sa mère. Photographie RAUL RUZ Stylisme VANESSA BELLUGEON
L’TREND
CI-DESSUS : Body et pantalon en jersey stretch, collier et boucles d’oreilles en laiton, or et jaspe, GIVENCHY. Ceinture et mocassins à talon en cuir de veau, CELINE PAR HEDI SLIMANE. Sac Kelly en cuir box, HERMÈS VINTAGE. PAGE DE DROITE : Robe en gabardine Re-Nylon, jupe en mohair, col roulé en viscose et escarpins en nylon, PRADA. Barrette en métal émaillé, VERSACE. Boucles d’oreilles en laiton, or et jaspe, GIVENCHY. PAGE PRÉCÉDENTE : Veste en gazar brodée de fils collection 1984, YSL RIVE GAUCHE ANOUSHKA PARIS. Blouse en polyester, PATOU. Jean en denim, HED MAYNER CHEZ ANOUSHKA PARIS. Barrette en métal émaillé, VERSACE. Chaussettes en laine vierge et cachemire, FALKE. Escarpins en satin et cristaux, MANOLO BLAHNIK.
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CI-DESSUS : Veste
sans manches en tweed de coton et minisac en cuir grené, CHANEL. Polo en coton, RALPH LAUREN. Jean en denim, HED MAYNER CHEZ ANOUSHKA PARIS. Jonc et bague plaqué or, ARISTOCRAZY. Barrette en métal émaillé, VERSACE. Escarpins en nylon, PRADA. PAGE DE DROITE : Veste cintrée en laine vierge, blouse en polyester et pantalon en laine vierge à plumes, PATOU. Boucles d’oreilles en laiton, or et jaspe, GIVENCHY. Collant en polyamide et élasthanne, CALZEDONIA. Sandales en cuir de veau, VERSACE.
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CI-DESSUS : Trench
en coton, STEVEN PASSARO. Sweat-shirt à capuche en viscose à manches en soie et bermuda en viscose et maille, MAX MARA. Sac Maillon Triomphe en cuir de veau, CELINE PAR HEDI SLIMANE. Barrette en métal émaillé, VERSACE. Solaires en acétate, PERSOL. Sandales en lin, ACNE STUDIOS. PAGE DE DROITE : Gilet et jupe en viscose et top brodé, MIU MIU. Collant en lycra, NICOLAS MESSINA. Ruban en velours lisse, MOKUBA. Sac en cuir de veau, VERSACE.
Coiffure : Leslie Thibaud. Maquillage : Sergio Corvacho. Assistant photo : Romain Hirtz. Assistant stylisme : Kenzia Bengel de Vaulx.
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Question de ton
Rencontre avec le couturier Monsieur Christian Lacroix à l’occasion de ses 10 ans de collaboration avec la marque méditerranéenne Desigual, incarnée dans ces pages par l’actrice française Camille Razat. Photographie STELLA BERKOFSKY Stylisme VANESSA BELLUGEON Propos recueillis par LAURE AMBROISE
L’L’COLLAB HEROINE
CI-DESSUS : La
petite robe fleurie signée Monsieur Christian Lacroix, DESIGUAL. Ceinture chaîne en métal doré, GUCCI. Lunettes de vue en acétate et chaînette en acrylique, EMMANUELLE KHANH. Collier torque en ambre et bronze, années 70, KARRY BERRY JEWELRY. Bracelets en or jaune, quartz et diamants et manchette en or jaune, CHANEL JOAILLERIE. Collant en voile, SAINT LAURENT PAR ANTHONY VACCARELLO. Babies en faux cuir verni, PATOU.
PAGES PRÉCÉDENTES, À GAUCHE : La veste de kimono Bird Light signée Monsieur Christian Lacroix, DESIGUAL. Chemise lavallière en crêpe de Chine, cycliste en viscose, collant en voile, camélia de cou en cuir verni, ceinture en cuir de veau et sandales en cuir verni, SAINT LAURENT PAR ANTHONY VACCARELLO. Sautoir en calcite, SIRCONSTANCE. Bagues en or jaune, grenats, tsavorites et onyx, CARTIER. Bracelets en or jaune, quartz et diamants, CHANEL JOAILLERIE. Montre en or beige et diamants à bracelet en tweed et métal, CHANEL HORLOGERIE. À DROITE : La veste Upcycling et la chemise Limoncello signées Monsieur Christian Lacroix, DESIGUAL. Jupe en jacquard de coton imprimé, PATOU. Boucles d’oreilles en résine, strass et métal, CHANEL. Bracelets en or jaune, quartz et diamants, manchette en or jaune et bague en or jaune motif matelassé, CHANEL JOAILLERIE.
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La robe Méditerranéenne signée Monsieur Christian Lacroix, DESIGUAL. Ceinture en métal doré et bottes en cuir imprimé python, GUCCI. Fédora à bords larges en laine, FRINGE AND FRANGE. Boucles d’oreilles dorées à l’or fin, GAS BIJOUX. Bracelet en or jaune, quartz et diamants, CHANEL JOAILLERIE. Bracelet en or jaune, émail et pierre de lune, Grima circa 1890, KARRY BERRY JEWELRY.
“JE REVENDIQUE CE CÔTÉ surchargé QUE CERTAINS TROUVENT EXCESSIF. JE N’Y VOIS QUE DE LA générosité générosité,, DE LA PASSION, DE LA vie vie.” .” Qu’est-ce que votre univers a de commun avec cette marque originaire de Barcelone ? CL : Une ferveur pour les couleurs et leurs mélanges, une fringale de motifs très élaborés, des volumes simples ou inattendus, un kaléidoscope d’influences tant exotiques qu’historiques. LO :
LO : Vous
CHRISTIAN LACROIX
L’OFFICIEL : Voilà dix ans que vous collaborez avec la marque Desigual.
Quel est le secret de cette longévité ? CHRISTIAN LACROIX : À peine avais-je quitté ma maison de couture que j’ai reçu un message des dirigeants de Desigual, que j’ai rencontrés à Paris, puis à Barcelone. De Desigual, je ne connaissais qu’un peu les produits mais l’organisation m’a emballé, et j’ai trouvé ce que je n’avais pas connu auparavant : une collaboration étroite depuis les prémices des collections jusqu’à leur finalisation, entre commerciaux, chefs de produits, designers, tous répartis en autant de petites équipes qu’il y a de stylistes. J’ai retrouvé ici ce que j’avais connu au tout début de Bazar, une seconde ligne de la maison Lacroix que j’aimais beaucoup. La première fois que j’ai remarqué des filles en manteaux aux motifs patchworks, j’ai pensé que c’était peut-être du vintage de Bazar, tant mes “clés” étaient là, avec les motifs, les couleurs, les métissages… Or c’était du Desigual, flamboyant et abordable, ce qui m’avait toujours tenu à cœur. En même temps, l’esprit Desigual n’est pas aussi simple à travailler qu’on pourrait le croire, c’est comme une langue qui demande à être pratiquée, et que je commence à parler couramment ! LO : Qui est la femme Lacroix x Desigual ?
CL : Elle est extravertie. Elle est plus sensuelle que sexy. Elle voyage,
elle aime la mode mais l’adapte à sa personnalité, sa silhouette. Je revendique ce côté surchargé que certains trouvent excessif. Je n’y vois que de la générosité, de la passion et de la vie.
PAGE DE GAUCHE : Le manteau court Spring et le T-shirt Sketches signés Monsieur Christian Lacroix, DESIGUAL. Pantalon large en soie et lin et ceinture en cuir de veau, LOUIS VUITTON. Boucles d’oreilles dorées à l’or fin, GAS BIJOUX.
Coiffure : Yusuke Taniguchi. Maquillage : Christophe Danchaud. Assistant photo : Thomas Rigade. Assistante stylisme : Lily Grace.
dites aimer travailler selon un cadre défini, quel est celui de votre collaboration avec Desigual ? CL : J’aime sentir que grâce aux équipes je peux avoir confiance dans un plan de collection qui saura équilibrer commercial et créatif, sans verser ni dans la banalité ni dans des extrêmes. Et les chefs de produits, issus des grands groupes textiles espagnols, maîtrisent extrêmement bien ces paramètres. Chaque saison est introduite par quelques mots de Thomas Meyer, le fondateur, que chacun interprète à sa manière, ce qui donne une certaine diversité de sensibilités, de la plus simple à la plus marquante. L’esprit Desigual est loin d’être passe-partout, il y a eu une multitude de plaisanteries, plutôt très drôles, qui ont circulé sur ce style bigarré, métissé et généreux. Il a donc fallu au fil des années et des situations, de l’évolution des sensibilités et du goût, slalomer pour les anticiper et être au rendez-vous des saisons. Les collections issues de cette collaboration sont à l’image de cette femme baroque que vous aimez tant. Qui est-elle réellement ? CL : Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours été attiré par les gens, filles et garçons, qui inventent leur propre style sans forcément suivre les tendances, des personnages flamboyants, à la fois sophistiqués et spirituels, audacieux et charismatiques. LO :
LO : L’Arlésienne de vos collections d’hier est-elle la même aujourd’hui ?
CL : Tout le monde connaît l’Arlésienne, cette femme qui rend fou d’amour sans que jamais on ne la voie. Je la cherche toujours, en sachant que je ne la trouverai jamais, mais cette quête continue de m’inspirer. Comme le dit le poème de Verlaine, “elle n’est jamais ni tout à fait la même ni tout à fait une autre”. Arles a une histoire d’amour avec la Catalogne. En tous les cas, Desigual lui va bien ! LO : Vous
avez toujours été faciné par le passé. Est-ce encore le cas avec Desigual ? CL : Oui mais différemment depuis le troisième millénaire, qui m’a appris à être ici et maintenant, au lieu de ne vivre que dans une nostalgie pathologique. Je continue à scruter le passé dans ses côtés les plus inattendus, précieux et insolites. Instagram est un bel outil pour cela. Mais avec Desigual, on voyage davantage autour d’un globe idéal, rêvé, imaginaire ou réel, plutôt que dans l’histoire. Desigual.com 75
TOUT SE transforme Plus que la sensation d’une saison, Marcia Marcia,, la marque dont tout le monde parle depuis son lancement à l’été 2018, est devenue l’obsession des Parisiennes engagées,, sexy et écolo. Rencontre avec sa fondatrice, Emma Reynaud. engagées Par LAURE AMBROISE Photographie PIERRE-ANGE CARLOTTI Casting JENJALOUSE Stylisme KENZIA BENGEL DE VAULX
L’CRÉATRICE
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CI-CONTRE : Combinaison en Econyl®, MARCIA. Boots, AEYDÉ. Derrière, Emma Reynaud, son mari Hugo Sélignac et leur fils, photographiés par Pierre-Ange Carlotti. PAGE PRÉCÉDENTE : Top en Econyl® orné de cristaux Swarovski, MARCIA. Jean en coton, GIVENCHY. Boots, DR. MARTENS.
C’est par une robe, la fameuse Tchikiboum, modèle nineties, entièrement ouverte sur le côté – une découpe inattendue, en dehors des clichés de la séduction – et à porter sans rien en dessous, que l’histoire de la marque Marcia, imaginée par Emma Reynaud, a commencé. Haute silhouette gracieuse, la jeune styliste s’était d’abord destinée à une carrière de danseuse classique, puis à celle de mannequin, avant de devenir la créatrice de mode que l’on connaît – elle a pu pour cela compter sur les conseils avisés de son amie la créatrice de bijoux Charlotte Chesnais. Avec Marcia, Emma avait envie de dévoiler “une autre féminité qui rime avec éco-responsabilité”. Une belle et bonne idée sur laquelle surfe de plus en plus l’industrie de la mode en réponse à notre nouvelle manière de consommer. Mais que pense-t-elle de la récente euphorie de l’upcycling (recyclage valorisant les pièces d’origine, ndlr), elle qui en a fait un des principes forts de sa marque 100 % made in France ? “C’est une prise de conscience considérable. Partir d’une pièce existante pour en créer une autre est le moyen le plus écologique qui soit de concevoir un vêtement. J’ai beaucoup d’admiration pour ces designers qui font de l’upcycling, comme Hala Moawad qui crée des vêtements à partir de chutes de cuir, ou Gaëlle Constantini qui a confectionné une robe à partir d’un rideau de l’Élysée. Cela demande un engagement sans faille et tellement de créativité. Transposer cela à l’échelle d’une production est un défi que j’aimerais relever.” Et ce défi n’est pas le seul. Car si toutes les grandes maisons savent réaliser un produit de luxe à partir de matériaux recyclés, elles ne le font pas forcément car les clients, eux, demeurent toujours aussi hésitants ! Le seul moyen, selon Emma, est que nous, les consommateurs, refusions d’acheter des vêtements qui ne sont pas confectionnés dans le respect de l’environnement, surtout ceux en matières synthétiques non recyclées. Avec Marcia, Emma n’utilise qu’une seule matière, l’Econyl® (nylon recyclé), fabriqué à partir de déchets, un challenge quotidien érigé en ligne directrice. Maintenant, elle se sent prête à explorer d’autres voies et à utiliser d’autres matières qui resteront bien et chemise en Econyl®, MARCIA. Boucles d’oreilles, CHARLOTTE CHESNAIS. PAGE DE DROITE : Robe en gabardine Re-Nylon, col roulé en viscose et mules à talon en cuir, PRADA. CI-DESSUS : Veste
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entendu respectueuses de l’environnement. Pour ce qui est du made in France, elle a toujours eu le flair pour trouver de bons ateliers français qui ont su s’adapter à son évolution. Le nom de sa marque, Marcia, est un hommage à la fameuse chanson des Rita Mitsouko, car Emma a le sens de la fête. Ses créations sont inspirées autant par Pascale Ogier dans Les Nuits de la pleine lune de Rohmer, que par la reine des 60s Edie Sedgwick ou son amie Elena Cavagnara, fameuse directrice de l’agence de photographes et talents Bomba. Son vestiaire idéal de party girl pousse le sexyness à l’extrême et son e-shop est le trombinoscope des filles les plus cool de Paris. Finalement, l’un ne va pas sans l’autre. “J’ai eu la chance d’avoir des amies inspirantes qui m’ont soutenue dès le début. Pour ma première campagne, j’ai proposé aux actrices Leïla Bekhti et Adèle Exarchopoulos de poser pour moi et elles ont accepté par amitié.” Et qui de mieux pour immortaliser sa collection que son meilleur ami le photographe Pierre-Ange Carlotti, connu pour ses collaborations avec Proenza Schouler, Jacquemus, etc. “Pierre-Ange est un ami de longue date dont j’ai toujours admiré le travail et le talent. C’est très stimulant de travailler avec lui. J’adore le regard qu’il pose sur les femmes.” Comme Emma aime le dire, “Marcia, c’est une histoire d’amitié, que cela soit avec mes muses, avec Pierre-Ange, ou avec mes amies qui travaillent dans la mode et qui m’ont énormément conseillée. Mais également une histoire d’amour, car mon mari (le producteur de cinéma Hugo Sélignac, ndlr) est associé dans l’aventure.” Plus qu’une histoire de mode, un style de vie et des convictions féministes et écologiques. Marciawear.com
“PARTIR D’UNE pièce EXISTANTE POUR EN créer UNE AUTRE EST LE MOYEN LE PLUS écologique QUI SOIT DE CONCEVOIR UN VÊTEMENT. J’ai BEAUCOUP D’ADMIRATION POUR CES designers QUI font DE L’UPCYCLING. CELA DEMANDE UN engagement SANS FAILLE ET TELLEMENT de CRÉATIVITÉ.”
en Econyl®, MARCIA. et minijupe en Econyl®, MARCIA. Mules en daim, AMINA MUADDI.
CI-DESSUS : Robe
PAGE DE DROITE : Veste, chemise
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Les
nouveaux jours
de
KENZO
Nommé en juillet 2019 directeur artistique des collections homme et femme de la maison Kenzo, le designer Felipe Oliveira Baptista revient aux fondamentaux aux fondamentaux de la marque avec une mode architecturale, inclusive et facile à porter. Rencontre. On raconte qu’au début des années 60, lorsque Kenzo Takada est parti de son Japon natal pour arriver, après six mois de voyage, dans notre chère capitale, la première chose qu’il a faite est d’aller danser toute la nuit. C’est alors la promesse de tous les possibles pour lui. Paris est la ville de l’insouciance et de la haute couture. Même s’il ne parle pas le français – ce qui l’amènera, pour son premier défilé, à se tromper de saison. Il connaît un langage plus universel : celui des couleurs. Il allie ainsi sa poésie asiatique à la rigueur des coupes occidentales, perçoit le dialecte de la nature et le vocabulaire des fleurs. L’époque était alors remplie de légèreté. Même si aujourd’hui les temps sont davantage au pragmatisme et que son arrivée au sein de la marque est plus réfléchie, le designer portugais Felipe Oliveira Baptista, nommé par le groupe LVMH
directeur artistique des collections homme et femme chez Kenzo à l’été 2019, est le créateur le plus attendu de la saison avec un premier défilé pour lequel l’excitation est palpable. Pour cette première collection, inspirée par l’idée du voyage, on (re) découvre sa maîtrise de la coupe, un beau travail sur l’ampleur avec de l’espace entre le corps et le vêtement, ce côté utilitaire qu’il affectionne tant, sa poésie d’une élégance folle, mais aussi ce côté facile à porter, joyeux, emporté par des imprimés propres à la marque. Sur eux, il pose un regard neuf et les impose sur des coupes plus radicales. Les archives de la marque, détenues par le collectionneur Olivier Châtenet, ont été rachetées par la maison Kenzo. Felipe Oliveira Baptista découvre donc tout ce patrimoine, avec une affection particulière pour les années 70.
Par LAURE AMBROISE Photographie NOËL MANALILI Stylisme KENZIA BENGEL DE VAULX
L’DESIGNER
FELIPE OLIVEIRA BAPTISTA, DIRECTEUR ARTISTIQUE DE KENZO.
“J’AIME l’architecture, l’image, la photo… LA MODE EST UN mélange DE tout cela, ELLE M’EST TOMBÉ DESSUS par HASARD.” Au moment de sa deuxième collection, la période est plus complexe. On nage en pleine crise sanitaire. “J’ai élaboré cette collection pendant le premier confinement. C’est un mélange d’inquiétude et de joie, avec une volonté d’optimisme pour s’en sortir. J’ai voulu mettre en avant ce rapprochement entre l’ homme et la nature avec cette idée de la régularisation de l’ écosystème”, explique-t-il. Cette collection est un appel à la beauté de l’extérieur, des jardins fleuris contrastés par de longs voiles protecteurs sur des chapeaux d’apiculteurs, soit une mode cocooning pour nomade en manque de voyage. Une collection entre fantasme, avec des imprimés décolorés presque flous, et réalité sanitaire et industrielle. N’oublions pas que l’abeille est la muse de cette collection – elle nous protège et ne consomme que ce dont elle a besoin. Ce qui nous amène à l’engagement de Felipe Oliveira Baptista : “Chez Kenzo, nous sommes engagés avec l’utilisation du coton bio à 80 %, et des cachemire, nylon et polyester recyclables. Nos packagings sont en matériaux éco-responsables. On a également un partenariat avec WWF pour soutenir l’objectif de doublement de la population de tigres à l’ état sauvage d’ici 2022.” Eh oui, le fameux tigre est bien là. Cette icône des collections de Humberto Leon et Carol Lim, anciens directeurs artistiques de la maison Kenzo de 2011 à 2019, est toujours présente avec Felipe Oliveira Baptista, dans un esprit plus engagé et plus arty puisqu’on le retrouve aussi sous forme d’imprimé tiré du travail de l’artiste lisboète Julio Pomar. On trouve dans tout le travail du designer l’idée “d’utile lié à l’agréable” : “J’ai toujours été très intéressé par l’utilitaire. J’aime ce côté pragmatique dans le vêtement, que l’on retrouve dans l’uniforme, que chaque chose corresponde à un besoin, une mode à la fois fonctionnelle et esthétique”, dit-il. En atteste son
À DROITE : Veste en voile de coton PAGE DE GAUCHE : (Portée en veste)
manteau/sac de couchage inspiré du vêtement à capuche des femmes des Açores, archipel dont il est originaire. Ses vêtements sont donc amovibles, réversibles, pratiques et pragmatiques. Plus qu’un style, une signature. Felipe Oliveira Baptista aime aussi toujours brouiller les frontières entre les générations dans ses collections : “Quel plus beau compliment que de voir porter un même vêtement par des gens d’ âges différents. Finalement, imaginer des vêtements pour tout le monde rend, d’une certaine façon, la marque inclusive.” En plus d’être styliste, Felipe Oliveira Baptista est dessinateur et photographe. “J’ai toujours été pluridisciplinaire, j’aime l’architecture, l’image, la photo… La mode est un mélange de tout cela, elle m’est tombé dessus par hasard.” Ce passionné d’art a été très touché par la dernière exposition de Christo au centre Pompidou. Quand on lui parle de collaborations, il explique qu’il aime mélanger son travail à celui des autres, comme il l’a fait avec Kansai Yamamoto, un créateur japonais légendaire (qui nous a quittés l’année dernière), connu pour ses collaborations excentriques dans les 70s avec David Bowie. Kenzo Takada, Felipe Oliveira Baptista : deux hommes, deux styles, mais une même énergie et un même goût du beau et de la poésie. Le nouveau directeur artistique rendra certainement un vibrant hommage à Kenzo Takada dans sa prochaine collection, la première présentée depuis que le fondateur nous a quittés.
et lin et robe débardeur en jersey, KENZO. Robe Utility en coton ottoman, robe en voile
de coton et sandales en jersey, KENZO. Coiffure et maquillage : Alix Perrot.
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SMELLS LIKE 90s SPIRIT Allure dépouillée, minimalisme assumé, inspiration des rave parties… Il flotte comme un air 90s dans les collections printemps-été 2021. Décryptage. et de volumes minutieusement exécutés, pulls en maille légère finement découpée, retour du logo au premier plan… Poussant le curseur encore plus loin, le duo a ressorti des archives une série d’imprimés aux connotations sixties pop, aperçus pour la première fois dans la collection automne-hiver 1996 de Prada, et ici réinterprétés sur de grandes jupes plissées associées à des hoodies. Ont suivi des pièces aux couleurs tantôt électriques tantôt sobres, et aux coupes faciles signées Daniel Lee chez Bottega Venetta, des polos zippés associés à des pantalons amples portés bas sur les hanches chez Coperni, d’élégants
Par MAUD GABRIELSON
Photos HL-ART
Les collections printemps-été 2021 découvertes en octobre dernier nous ont plongés dans une nostalgie rassurante et bienvenue. Un retour dans les années 1990, quand l’insouciance, bercée par un esprit de rébellion teinté de musique rock et électro, se reflétait dans les garde-robes, resserrées à l’essentiel. Le coup d’envoi a été donné notamment par la première collection imaginée en duo par Raf Simons et Miuccia Prada, pour la maison milanaise : minirobes trois trous déclinées dans un rose poudré ou un jaune très clair, ensemble chemise-pantalon noir rehaussé de drapé façon harnais, jeux de superpositions
L’ MOOD
Pour Éric Briones, auteur du livre Luxe et Résiliences : les clés pour rebondir face aux crises (éditions Dunod), le regain d’intérêt pour l’esthétique des années 1990 n’a rien de surprenant : “On peut dire que cela était presque écrit. En période de crise économique, sanitaire ou politique, comme celle que nous traversons aujourd’hui, on remarque un retour très fort vers la non-opulence. Comme une réponse mesurée à la folie du monde. La crise de 1929 a vu quant à elle éclore le travail de Coco Chanel, et celui-ci était tourné vers le noir, la liberté de mouvement, l’allègement du vêtement… Retrouver aujourd’hui l’épure des années 1990 s’inscrit parfaitement dans ce refus de l’opulence, cette envie d’un retour à l’essentiel, à l’important.” Ainsi, les couleurs se font plus discrètes, les coupes plus pratiques et utilitaires, les vêtements plus intemporels. Un avis partagé par Serge Carreira, professeur à Sciences-Po et spécialiste de la mode et du luxe : “Les crises engendrent des quêtes essentialistes et des envies de sobriété. C’est la même chose pour le vêtement, on privilégie le confort des tissus et des coupes, par exemple. Le minimalisme répond ainsi parfaitement à ce moment d’incertitude que nous traversons.” Et trouver dans les collections actuelles des références aux rave parties clandestines n’est pas non plus anodin : “cela exprime une forme de radicalité, quelque chose d’alternatif pour faire face à l’abondance. Indirectement, cela renvoie à un rejet de la superficialité. De plus, les ravers ont un rapport particulier au corps, à travers la danse. Ainsi, le vêtement permet ici de se réapproprier son corps”, continue l’expert. La récente décision de la maison Bottega Venetta de se retirer de tous les réseaux sociaux s’inscrit également dans cette radicalité à l’encontre du mouvement présent. “On y voit là également un rejet du trop-plein d’information, comme une envie d’apaisement”, commente, quant à lui, Éric Briones. 90
Beaucoup ayant grandi dans les années 1990, il n’est pas étonnant que les créateurs d’aujourd’hui se réapproprient cette période qui a marqué leur construction. Âgé de 35 ans, Matthew Williams, directeur artistique de Givenchy, a grandi en Californie où il fréquentait assidument les skate-parks et les DJ locaux. Dans une interview accordée au Figaro en octobre dernier, il reprenait la définition du luxe de Martin Margiela, autre grande figure de la mode des années 1990 : “Qualité, confort et intemporalité”, à laquelle il ajoutait la notion d’écoresponsabilité, thème cher aux nouvelles générations. Pour Leyla Néri, directrice du master en Fashion Design and the Arts de l’école de mode Parsons Paris, les étudiants actuels sont particulièrement intéressés par la mode des années 1990. “Il y a encore une dizaine d’années, nos étudiants ne s’y intéressaient pas vraiment. Aujourd’hui, ils posent beaucoup de questions à propos du travail de Helmut Lang ou de Raf Simons. Ce sont, pour eux, de véritables références, ils les voient comme des designers iconiques, et adhèrent particulièrement à la vision de Helmut Lang, qui n’était pas de créer des collections mais des garde-robes. Il avait cette volonté de faire des vêtements pour les vraies gens, qu’ils servent dans la vraie vie. C’est pour cela que l’on retrouve dans son travail une dimension utilitaire. De plus, le minimalisme n’était pas genré, et cela fait particulièrement écho aux préoccupations actuelles de nos étudiants.” Si l’héritage de créateurs comme Helmut Lang suscite des vocations, il soulève aussi des passions. C’est le cas du NewYorkais David Casavant, styliste de 30 ans, qui s’est constitué au fil des années une collection de pièces Helmut Lang à faire pâlir les plus fervents admirateurs. “J’ai actuellement plusieurs milliers de pièces, cela remplit presque mon appartement, s’amuse-t-il. J’ai commencé lorsque j’étais adolescent, sur e-bay. Son esthétique minimaliste correspond à ma personnalité plutôt discrète. Je traque les pièces qui me manquent pour reconstituer les collections complètes, saison après saison. Je pense que ce regain d’intérêt pour cette période et ces créateurs en particulier est renforcé par Internet, il est aujourd’hui beaucoup plus facile de retrouver en ligne les photos de ses collections, et donc de se projeter.” Et l’intérêt ne semble pas s’émousser, David Casavant admet en effet vivre en partie grâce à la location des pièces de sa collection, pour des évènements particuliers, des tournages de films ou simplement pour la vie de tous les jours. Comme l’envisageait Helmut Lang.
PAGE DE DROITE, DE HAUT EN BAS ET DE GAUCHE À DROITE : COLLECTIONS PRINTEMPS-ÉTÉ 2021, BOTTEGA VENETA, HERMÈS, JIL SANDER, PACO RABANNE ET PRADA. PAGE PRÉCÉDENTE : VUES DE L’EXPOSTION “AN INTERVENTION BY HELMUT LANG”, HELMUT LANG ARCHIVE, AU MAK (MUSÉE DES ARTS APPLIQUÉS) DE VIENNE, JUSQU’EN JANVIER 2022.
Photos Filippo Fior, DR
costumes noirs associés à des brassières en cuir et une absence apparente de maquillage chez Hermès, ou bien encore une flopée de petites robes à fines bretelles, évoquant les meilleures heures de Kate Moss, chez Paco Rabanne, Jil Sander, N°21 ou Gabriela Hearst. Accompagnant ces nombreuses références où l’épure se démarque, l’esprit “rave party”, cher aux nineties survoltées, n’est jamais bien loin. Ainsi, la première collection de l’Américain Matthew Williams pour Givenchy en est le parfait reflet. Si l’allure est, à première vue, résolument sobre – articulée autour de d’impeccables costumes beiges, de petites robes près du corps ou robes dos nu fatales –, l’irrévérence se niche dans les épaisses chaînes passées autour du cou et sur les anses des sacs, dans les tops en tulle transparent portés avec un short noir retroussé, dans les pièces en cuir craquelé ou encore dans les imposantes baskets et les escarpins cloutés. Un vocabulaire mode qui n’est pas sans rappeler celui de Helmut Lang, créateur autrichien phare des années 1980 et 1990, qui s’est retiré des podiums en 2005. Visionnaire, il a anticipé, tout au long de sa carrière, les grands courants sociaux dans ses collections : prépondérance de l’androgynie, montée en puissance des pièces issues du sport, vif intérêt pour les tissus techniques et mélange des matières. Désormais tourné vers l’art, il cultive la discrétion, mais a pourtant signé une collaboration avec la maison Saint Laurent pour une série de sculptures, en novembre dernier.
Cinga
SAMSON
À 35 ans, grâce à ses peintures mettant en scène de jeunes et beaux Africains, Cinga Samson est l’un des piliers de la scène du Cap, et l’un des peintres les plus courus du marché de l’art. Interview. Propos recueillis par SOPHIE ROSEMONT
C’est l’un des peintres les plus recherchés du moment, dont les portraits s’inscrivent dans la lignée d’artistes superstars tels les Américains Kerry James Marshall ou Kehinde Wiley. Sauf qu’il est Sud-Africain, et fier de l’être. Ses peintures à l’huile lui ont valu de remporter le prestigieux prix Tollman en 2017, et d’exposer aussi bien à Paris qu’à New York. Elles sont figuratives, larges, vives, situées entre le contemporain sud-africain et un passé riche des rituels des ancêtres. Elles brossent le portrait d’une jeunesse africaine à l’allure folle, consciente des possibilités de l’avenir sans pour autant renier le mysticisme dont elle a hérité et les infortunes auxquelles elle doit faire face au quotidien. Quand avez-vous commencé à peindre ? Très jeune. Adolescent, je testais énormément les couleurs. À 20 ans, j’ai pris la décision d’être peintre à plein temps. J’ai rejoint le collectif Isibane, au Cap, au sein duquel j’ai appris à me dévouer entièrement à l’art. Depuis, je n’ai jamais
L’OFFICIEL :
CINGA SAMSON :
arrêté de travailler et je dirige aujourd’hui un studio. Mes assistants viennent passer deux ou trois ans avec moi, ils n’ont pas forcément fait d’école mais se passionnent pour la peinture. Cela me permet d’agir, à mon niveau, pour l’essor culturel local et l’accompagnement des jeunes artistes. LO : Quelles couleurs vous attirent le plus ?
CS : Le rouge et le bleu. Le rouge, pour le vernis de ma mère – qui est décédée au début des années 2000. Je la revois en train de fumer, ses ongles aussi incandescents que la cigarette, c’était très glamour. Le bleu concerne mon rapport à la nature. C’est une couleur froide, aimée des enfants, assez simple et qui ne demande qu’à être mélangée avec d’autres, comme le vert. LO : Peut-on considérer vos peintures comme une mise en lumière de la
culture africaine, dans ce qu’elle a de plus complexe et multiple ? CS : C’est vrai, je souhaite produire quelque chose de profondément
Photo Guillaume Ziccarelli
L’ ARTISTE
beau, de haute qualité, car ce n’est pas des mots que les gens associent avec le continent africain. Peindre des toiles dont on devine qu’elles sont faites par un Africain, pas un Américain ou un Français. Et que les personnes de mon peuple s’y reconnaissent. Il faut absolument rompre avec ce cliché d’une Afrique rongée par la pauvreté, la maladie. Nous sommes davantage que ça, nous sommes fiers, doté d’un patrimoine exceptionnel. Nous avons du style, que beaucoup copient d’ailleurs. Quand on lit un livre sur l’histoire de l’art, il y a rarement plus de trois pages qui traitent le continent africain. Cela n’a aucun sens ! Notre art ne se réduit pas à la sculpture en bois, il est multiple et hybride. LO : En effet, les artistes africains, qu’ils viennent d’Afrique du Sud, comme vous, du Ghana ou du Mali, pratiquent aussi la peinture, la photographie, la céramique… CS : Absolument, mais ils restent marginalisés au sein de la grande industrie de l’art. Nous n’avons pas accès à la même visibilité que les Européens ou les Anglo-saxons. Prenons l’exemple de Burna Boy qui, même en étant une star internationale, constatait il y a peu que son nom était écrit plus petit sur les affiches que celui d’autres chanteurs ! C’est pour cette raison que je voulais proposer un travail fort où l’esthétique s’inscrit dans un contexte politique, une époque. Quand j’ai visité le Louvre, j’ai été épaté par des peintures qui sublimaient des périodes très importantes en France, que je ne connaissais pas, mais que je ressentais néanmoins. LO : En quoi Entabeni, la ville où vous avez grandi, reste importante
dans votre œuvre ? CS : Enfant, ma vie était très pragmatique ! J’étais un jeune garçon impliqué dans les tâches domestiques, je m’occupais des animaux de la ferme, dont je me sentais responsable. J’étais très obéissant…
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Quand je vivais à Entabeni, j’étais hébergé chez mon oncle et ma tante. Grandir dans cette ferme m’a rendu sensible à la nature et, plus tard, a influencé mon travail. Mes personnages doivent faire partie d’un tout. LO : Comment naissent vos peintures ? CS : Avec
une sensation. Un ressenti. Mon état d’esprit. Puis une image, que je crée lors une séance photographique où j’essaye d’être le plus créatif possible, et je commence à peindre. C’est tout un processus que je tiens à maîtriser de A à Z tout en me laissant porter par mon instinct.
LO : Quelles sont vos influences ?
CS : Avant tout, Francis Bacon. Je me suis longtemps inspiré de lui, j’ai tellement appris en me plongeant dans son univers… Rembrandt, également, dont La Ronde de nuit m’a toujours impressionné. Egon Schiele, dont la profondeur m’émeut. J’aime les sculptures de Louise Bourgeois et Giacometti. Tous ont en commun d’avoir produit des œuvres avec une énergie très forte, quasiment brutale. Sans compromis. Ils m’émeuvent et me poussent à être aussi honnête qu’eux. LO : Louise Bourgeois a souvent questionné la féminité, tout comme vous
interrogez la masculinité… Oui, cela fait partie de ma conversation artistique. Le type d’homme qu’on nous demande d’être est agressif, peu empathique, intimidant. Je ne me retrouve pas dans cette description, je parle doucement, j’agis calmement, je veux être à l’écoute. Enfant, j’étais très complexé. J’aurais bien voulu être macho pour être comme les autres, mais ce n’est pas dans ma nature. Il a fallu attendre mes 30 ans pour que je me sente enfin bien dans ma CS :
peau. Cela m’a inspiré plusieurs peintures, qui interrogent sur ce cliché qu’on nous impose. Ces jeunes hommes que vous peignez représentent-ils une part de vous-même ? CS : Sans doute, même si je ne les regarde pas de cette façon. Bien que je puise mon inspiration dans les traditions de mes ancêtres, je veux garder certaines choses secrètes sur moi-même et mon héritage… La pudeur est importante.
Photos courtesy Cinga Samson and Blank Projects Gallery
LO :
Vos personnages masculins sont dotés d’étranges yeux blancs… Pourquoi ? CS : Les pupilles m’ont toujours gêné dans mon travail. Je préfère ne pas les peindre, d’autant qu’en les laissant blanches, cela réveille une certaine spiritualité, une autre forme de puissance… Mais j’ai encore des difficultés à savoir d’où cela vient. Il m’a fallu du temps, par exemple, pour comprendre que les fleurs, prédominantes dans mon œuvre, me remémoraient mon enfance. Les premières années, je les ai passées avec ma mère qui faisait de très beaux bouquets, puis je suis parti vivre avec mon père, où il y avait également des fleurs partout. Ce n’est que plus tard que j’ai saisi toute leur beauté. LO :
LO : Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
CS : Sur quelque chose de très emportant pour moi : la violence. Celle à laquelle j’ai assisté dès mes 5 ans, quand j’ai vu mourir une personne sous mes yeux. Celle à laquelle j’ai été confronté récemment, en étant atteint du coronavirus. J’ai dû me battre pour rester en vie en voyant mon père en mourir, en décembre dernier. La mort est l’une des nombreuses violences auxquelles nous sommes confrontés au long de nos existences. C’est ce qui me consume actuellement, et que j’essaye de conjurer avec mon pinceau. LO : Quel est votre plus grand rêve ?
CS : De contribuer à l’histoire de l’art, de m’inscrire dans une mouvance de peintres qui viennent du monde entier et qui changeront la narration artistique !
PAGE DE GAUCHE :“Inyongo 5” (détail 10), Cinga Samson. CI-DESSUS, À GAUCHE :“Ibhungane 9” (2019-2020), Cinga Samson. À DROITE :“Inzikanzane 3” (2020), Cinga Samson.
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Lignes
DE VIE
Sillonnant le monde depuis plus de vingt ans à la recherche de lieux exceptionnels exceptionnels,, Matthieu Salvaing a photographié les plus belles maisons. Nous l’avons rencontré à l’occasion de la sortie de son dernier livre livre,, “Voyages intérieurs”. Propos recueillis par LAURE AMBROISE Photographie MATTHIEU SALVAING
De quelle façon la photographie est devenue une évidence, jusqu’à en devenir un métier ? MATTHIEU SALVAING : Après mes études à Paris, j’ai commencé à comprendre que, pour moi, la photographie donnait du sens, correspondait à mon mode d’expression, de partage et de vie, par l’incroyable liberté qu’elle offre. L’OFFICIEL :
Avoir grandi à Arles a-t-il été déterminant et, si oui, de quelle mabière ? MS : Il est évident qu’avoir grandi à Arles dans les années quatrevingts, alors que le festival était déjà tellement précurseur, m’a ouvert l’esprit. Avoir vu les photos de Mapplethorpe et tant d’autres grands photographes a été pour moi un vrai déclencheur. LO :
LO : Vous avez été l’assistant de plusieurs photographes de mode avant de devenir photographe spécialisé en architecture et décoration d’intérieur. Qu’est-ce qui vous a fait passer de l’un à l’autre ? MS : La collaboration avec d’autres photographes a été des plus instructives. Certains travaillent de manière très millimétrée, d’autres comme si la vie était une fête, mais toujours dans la
volonté de partager une émotion, de l’humain. Les lignes, les courbes, l’âme des lieux architecturaux me passionnent pour ce qu’elles racontent de l’humain, de l’intime et de l’émotion. Ma rencontre avec Oscar Niemeyer m’a définitivement porté vers la photographie d’architecture pour toutes ces raisons. LO : Racontez-nous votre coup cœur pour le Brésil à travers votre travail avec l’architecte Oscar Niemeyer à qui vous avez consacré une importante monographie, il y a plusieurs années… MS : J’ai rencontré Oscar par son petit-fils. Avec un crayon et une feuille, il m’a expliqué par le dessin toute la genèse de son travail : le trait, les courbes, bien d’autres choses encore et surtout une manière très vivante de voir l’architecture. Nous sommes devenus amis et je suis parti à la découverte du Brésil à travers ses réalisations, leur philosophie, leur humanité. J’aimais partager avec lui ses repas, les matchs de foot à la télé, d’une joie de vivre extraordinaire. Brésilien dans l’âme, Oscar aimait parler de politique et de Paris, qu’il adorait. Je lui donnais des nouvelles de la vie parisienne dont il aimait tant les terrasses et les femmes. Et lui m’a fait aimer le Brésil…
L’OEIL
LE PHOTOGRAPHE MATTHIEU SALVAING
LO : À
quoi reconnaît-on vos images ? à dire ! La couleur, et peut-être un mélange de construction classique et de chaleur. J’essaie toujours de rendre vivant et spontané un intérieur, ou des lignes d’architectures, dans la volonté de transmettre l’âme des lieux. MS : Difficile
LO : En quoi la relation entre l’homme et l’architecture vous émeut-elle ?
MS : En ce qu’elle dit de l’intime. L’émotion est là quand je sais reconnaître l’identité et l’humanité dans un lieu. LO : Vous
qui photographiez les plus incroyables intérieurs, quelles évolutions ont-ils connu ces dix dernières années en termes de style ? MS : Je trouve l’évolution de ces dernières années un peu folle
EN HAUT : Maison
du XIXe au cœur de Beyrouth, appartenant à l’homme d’affaires Ziad Dalloul. Le décorateur français Michel Charrière l’a accompagné durant 15 ans dans le choix du mobilier et des pièces d’art. DESSOUS : Maison traditionnelle marocaine restaurée et repensée par le Studio KO comme une oasis de repos, non loin de Marrakech.
La villa Los Arcos de San Juan, à Mérida au Mexique, du XVIIIe, rénovée par l’architecte d’intérieur John Prentice Powell. Elle fut déjà rénovée dans les années 30 lorsqu’elle fut offerte en cadeau de mariage à un couple fortuné.
et dangereuse, dans le sens où il y a une certaine uniformisation qui s’installe. Vous pouvez retrouver les mêmes intérieurs de São Paulo à Paris, car plus un seul hôtel ou villa ne se réalise sans une “signature” en vogue. Signature de grands talents sans aucun doute, mais je regrette que cette tendance soit au détriment de l’identité d’un lieu ou d’une culture. Je reste très attaché à la spontanéité et au caractère unique d’un lieu dans ce qu’il donne à voir de ses propriétaires. Les lieux atypiques sont d’autant plus inspirants qu’ils sont devenus très rares. Une photo, c’est une rencontre. De quelles personnalités gardezvous les plus beaux des souvenirs ? MS : Oscar Niemeyer est quelqu’un qui m’a beaucoup marqué dans ce qu’il m’a transmis, mais, de façon générale, tous ces lieux que j’ai eu la chance de photographier, qui portaient un caractère historique, une singularité, une créativité, sont aussi des rencontres exceptionnelles, avec les familles ou les équipes qui les font vivre à travers le temps. La place de l’humain dans mon métier est centrale, mes images sont une histoire de rencontres avec des gens et des architectures incroyables. LO :
LO : Vous avez récemment sorti votre livre Voyages intérieurs, pouvez-vous nous parler de votre sélection d’images et de l’histoire que vous avez eu envie de raconter ? MS : Je parlais tout à l’heure d’uniformisation. Voyages intérieurs va à l’encontre de cette notion. J’ai voulu emmener les lecteurs dans un voyage intimiste à travers le monde, et partager toute la singularité et l’identité, la personnalité unique qui habite certains lieux exceptionnels qui sont à l’image des personnes qui les ont rêvés ou commandés. On pourrait presque parler d’un voyage
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qui lutte contre certains effets nocifs de la mondialisation ! LO : Vous avez réalisé un travail sur le Liban et son architecture détruite
par la guerre, êtes-vous un photographe engagé ? MS : Mon travail sur l’architecture au Liban, auquel je tiens beaucoup, n’est pas encore terminé. Et vous avez raison, c’est une forme d’engagement. Vivre sans engagement est de moins en moins tenable dans la mondialisation actuelle. Ce serait être un peu aveugle que de ne pas se sentir concerné par les grands questionnements que traversent nos sociétés. Je suis très sensible aux notions de mémoire, d’identité et de traditions ancestrales qui se diluent ou se perdent. J’ai récemment fait un reportage en Éthiopie dans ce sens. Le rapport à la nature, l’art rupestre dans la vallée de l’Omo… tout cela a été un moment très fort pour moi. Chacun s’engage à la hauteur de ce qu’il peut, de ce qu’il perçoit ou de ce qui le touche. Voyages intérieurs, par Matthieu Salvaing (Rizzoli).
CI-DESSOUS, À GAUCHE : L’hôtel
Ivoire, ouvert en 1963 à Abidjan, voulu par le président Houphouët-Boigny et conçu par l'architecte israélien Moshe Mayer. Il reste le symbole de l’essor économique de la Côte d’Ivoire. À DROITE : La quinta El Cerrito, construite par l’architecte Gio Ponti, pour le couple de collectionneurs Armando et Anala Planchart, à Caracas.
Construit en 1690, le Palazzo Ruffo, à Naples, a été rénové par l’architecte Antonio Martiniello. À l’image du design italien, la décoration est un subtil mélange de pièces iconiques entre passé, présent et futur.
L’INTERVIEW FASHION Legends Au-delà de leur célébrité acquise dans la mode, Helena Christensen et Brooke Shields ont tracé leur propre chemin chemin.. La première est devenue une photographe une photographe et une directrice de création réputée, tandis que la seconde a toujours été un modèle et une performeuse bien en avance sur son temps. Ces supermodels se réunissent ici pour évoquer leurs jours de gloire et leur amitié durable. Ce ne sont pas seulement deux succès à scandale qui ont valu à Brooke Shields la couverture du magazine Time, la définissant comme “le look des années 80”. Certes, la malicieuse et dérangeante Violet dans le film La Petite de Louis Malle, et la campagne pour les jeans Calvin Klein, réalisée par Avedon et entrée dans l’histoire de la
publicité (“You want to know what comes between me and my Calvins ? Nothing”), ont eu une influence, mais Brooke reste “la” supermodel, la protagoniste d’innombrables couvertures de magazines, le visage que les stars de l’objectif de ces années-là, Avedon et Scavullo, photographiaient sans cesse. Helena Christensen, elle, est l’une des
Propos recueillis par FABIA DI DRUSCO Traduction HÉLÈNE GUILLON Photographie GREG LOTUS Stylisme ARNOLD MILFORT
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supermodels emblématiques des années 90. Capable d’électriser les professionnels comme le grand public avec son visage en cœur – résultat d’un mélange chromosomique entre un père danois et une mère péruvienne –, ses foulées ultra sexy sur les podiums des défilés de Gianni Versace et Thierry Mugler, et avec son aura de rock girl que lui a conférée son histoire d’amour avec Michael Hutchence, le chanteur mythique de INXS. L’OFFICIEL : Comment vous êtes-vous rencontrées ? BROOKE SHIELDS : J’ai été mannequin avant l’explosion du phénomène des supermodels, et je n’ai jamais fait de défilé. Pour moi, c’était un travail très solitaire, je quittais l’école, je m’enfermais dans un studio et ne voyais que le photographe et son équipe. Je n’avais aucune camaraderie avec les autres filles, j’étais toujours chaperonnée. Helena est le premier supermodel que j’ai rencontré. Elle devait me photographier pour Nylon, et j’ai été frappée par son air détendu, le fait qu’elle ne me mettait pas de pression, et ne semblait pas en ressentir elle-même. Quelque temps plus tard, nous nous sommes retrouvées voisines et avons commencé à faire de petites choses ensemble, prendre un café, se faire faire la manucure, et nous sommes devenues amies au fil du temps, aussi parce que nous avons beaucoup d’amis communs en dehors du monde du mannequinat. Avec tout ce qu’elle dégage de sexy, bohème, rock, Helena est tout ce que je ne suis pas, car j’ai passé ma vie à faire des choses pour plaire aux autres. Nous nous sommes dit très tôt que si nous étions deux animaux, je serais un petit chien gold retriever festif toujours en quête de câlins et d’attention, et elle serait une insondable chatte abyssine. Une de mes filles m’a dit que je devrais être un peu plus comme Helena, suivre ma route et ne pas me faire autant de soucis… L’O : Les débuts de votre carrière, Brooke, sont bien connus : à 11 mois,
vous étiez déjà l’égérie du savon Ivory, photographiée par Scavullo. Vous, Helena, comment avez-vous commencé ? HELENA CHRISTENSEN : Je venais de terminer le lycée et j’étais à Paris quand j’ai été arrêtée par quelqu’un qui travaillait pour une petite agence de mannequins. Je me suis dit : “Pourquoi pas ? Ça me permettrait de voyager et de prendre des photos dans des endroits intéressants”… À l’époque, j’étais déjà bien déterminée à devenir photographe. Quelles ont été les personnes et les étapes décisives dans votre parcours ? HC : Dès le début, des photographes célèbres comme Peter Lindbergh m’ont pris sous leur aile. Mais, tout aussi important dans la création de très belles images, il y a eu les équipes des shootings, les maquilleurs, les coiffeurs, les stylistes. En termes de moments, je pense au reportage de Peter Lindbergh avec l’alien (Vogue Italia mars 1990), les campagnes de Chanel photographiées par Karl Lagerfeld, et bien sûr le clip de Wicked Game de Chris Isaak réalisé par Herb Ritts. BS : J’ai travaillé avec de très grands photographes, Horst, Avedon, Meisel, Demarchelier, lui en particulier était une véritable machine de travail, mais il s’agissait toujours de jouer un rôle. Avec Bruce Weber et Albert Watson, c’était différent, car ils parvenaient à conserver des parties de mon vrai moi dans leurs photos. Bruce en particulier : travailler avec lui était épuisant parce que c’est quelqu’un qui ne te laisse jamais de répit, mais personne comme lui ne sait voir et faire émerger dans l’image ta vie intérieure, ton âme. En termes de moments, Pretty Baby (La Petite, en V.F.) est le meilleur film que j’ai fait, c’est de l’art pur, et les controverses qui ont suivi la sortie du film ont été aussi importantes car elles m’ont préparée L’O :
à tout. Louis Malle voulait capter mon innocence d’enfant, à 12 ans j’étais très ingénue sexuellement, mais en tant que NewYorkaise j’avais déjà entrevu la prostitution dans ce qu’elle a de dégradant, de sordide, même si sur le tournage j’étais très protégée. En revanche, d’un point de vue intellectuel, j’ai été adulte très jeune car, à 14 ans, je devais déjà m’occuper de ma mère. Elle m’emmenait voir des films de Fellini et des films français, j’ai grandi en regardant Simone Signoret, Catherine Deneuve, Sofia Loren, toutes des divas larger than life, tellement sophistiquées et sensuelles. Moi, j’étais le clown de la classe, j’ai toujours su que mon arme en tant qu’actrice ne serait jamais la sensualité mais l’humour. J’ai toujours choisi mes œuvres en pensant davantage à l’expérience elle-même qu’à la construction d’une carrière. Après Pretty Baby, j’aurais dû (et j’aurais pu) continuer à faire des films d’auteur avec des réalisateurs européens, mais en même temps il y avait l’école – je tournais tous mes films pendant les vacances d’été –, et puis avec ma mère, on se demandait : où aimerions-nous aller en vacances ? C’est dans cette perspective que j’ai vécu la plus belle expérience de ma carrière lors du tournage de Wanda Nevada, quatre mois passés en jean et en bottes, à monter à cheval dans le Grand Canyon et les déserts de l’Arizona… Je suis aussi très heureuse d’avoir tourné, dans cette tragique et triste période de pandémie, une comédie romantique en Écosse, A Castle for Christmas : j’ai vécu dans un château, je suis allée à cheval, il y avait de la neige… un remède parfait contre la dépression causée par la situation générale. Quand j’étais jeune, j’étais prête à souffrir pour l’art, aujourd’hui divertir me suffit. L’O : Quelle est votre relation avec la mode, Brooke avec vos Calvins,
et vous, Helena, qui avez contribué à faire revivre la mode vintage ? BS : En réalité, je n’ai jamais porté les jeans de Calvin Klein, même si j’ai toujours aimé son style, la pureté essentielle de sa ligne. Depuis mon enfance, j’ai toujours porté la vision des autres, et quand je tourne un film, je m’identifie tellement à mon personnage que j’adopte son style dans la vie quotidienne ; par exemple, maintenant que je viens de tourner en Écosse, je suis rentrée à la maison avec toute une série d’imprimés tartans. J’aime le confort et le classique, mon uniforme est : blazer bleu, pull à col roulé et jean. Dans ma tête, j’aimerais porter du Alexander McQueen et du Vivienne Westwood, mais je sais qu’en fait je ne me sentirais pas à l’aise. D’ailleurs, j’ai la structure physique d’une nageuse, je n’ai pas, comme Helena, un corps de mannequin. HC : J’ai toujours été fascinée par le vintage, déjà quand j’étais petite fille. Je ne sais pas exactement pourquoi, mais j’ai toujours aimé les choses et les gens des époques précédentes. J’aime le fait qu’une pièce ait été portée par une femme qui a vécu il y a peut-être cent ans et qui a aimé, ri et pleuré dans cette robe, je trouve ça poétique. Actuellement, avec Camilla Staerk, je suis curatrice de pièces anciennes et de deuxième main pour notre boutique en ligne Pawn, dont les bénéfices sont reversés à des organisations caritatives qui nous tiennent à cœur. PAGE DE GAUCHE : BROOKE, robe et boucles d’oreilles, CHANEL. Escarpins, JIMMY CHOO. Bague, HAMMERMAN. HELENA, robe, escarpins, boucles d’oreilles et sac, CHANEL. Bague, HAMMERMAN. PAGES PRÉCÉDENTES : BROOKE, robe, BRONX AND BANCO. Sandales, ALTUZARRA. Boucles d’oreilles, collier et bague, HAMMERMAN. HELENA, robe, EMPORIO ARMANI. Sandales, GIUSEPPE ZANOTTI. Boucles d’oreilles, JACOB & CO. MAQUILLAGE : Kale Teter avec les produits Chanel. ASSISTANT PHOTO : Ernesto Sempoll. MERCI À Tony McHale et Jennifer Cooke au Carlyle
NY.
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BEAUTÉ Pure
Encore une marque de make-up artist en plein egotrip, me direzvous ? L’enseigne lancée par la surdouée des pinceaux Gucci Westman se distingue pourtant de ses concurrents. Après avoir œuvré backstage lors des fashion weeks du monde entier et sublimé les plus grands noms de la mode et du septième art sur tapis rouge, la maquilleuse révolutionne l’approche de la clean beauty, et réussit l’accord parfait du beau et de l’éco-responsable. La clé de voûte d’une routine beauté selon Gucci Westman ? Le travail du teint à l’aide de produits en sticks. Crémeux, légers et faciles à combiner, ils s’imposent comme de nouveaux incontournables. “J’aime l’impression de contrôle que l’on a avec les sticks, explique-t-elle. Ils sont beaucoup plus faciles à utiliser 104
pour cibler des zones spécifiques. Leurs formulations onctueuses et nourrissantes fusionnent avec le teint et laissent une sensation aérienne, confortable, à la croisée du soin et du maquillage.” Coup de cœur assuré pour son extraordinaire mascara volumateur Eye Love You composé à 96 % d’ingrédients d’origine naturelle (cire d’abeille, huile de coco et de graine de tournesol), pour ses fards à paupières Eye Pods garantis sans silicones, parabènes ni sulfates, et enfin pour sa palette Lip Suede aux quatre fards mats veloutés intensément pigmentés. Le must absolu ? Ses sublimes pinceaux en nylon conçus chez Hakuhodo, le fabricant japonais le plus réputé au monde. -Par Mélanie Mendelewitsch
Photos DR
La make-up artist Gucci Westman lance sa marque de clean beauty de clean beauty Westman Atelier.
Photo DR
L’ BEAUTÉ
LAQUE Star Hommage aux films et actrices de l’âge d’or de Hollywood, la nouvelle collection de vernis Gucci nous fait déjà rêver. À la croisée du produit de beauté et de l’objet de déco, les vernis Gucci aux allures vintage sont tellement élégants qu’on aimerait pouvoir les conserver intacts. Inspirés de l’âge d’or hollywoodien, on les imagine aisément disposés dans un boudoir sexy, à portée de griffes d’une amazone glamour tirée à quatre épingles. À l’intérieur de ces flacons rétro, cinq nuances
étincelantes et addictives : Annabel Rose pour les adeptes du nude, un noir d’ébène nommé Crystal Black, l’incontournable rouge profond Myra Crimson et les Dorothy Turquoise et Melinda Green, touches cha toyantes qui nous aident à patienter jusqu’à la belle saison. -Par Mélanie Mendelewitsch
NEW face Comme sortie d’un conte contemporain, elle possède la grace d’un cygne, les jambes d’une gazelle et la fierté d’une lionne. Ses cheveux de jais sont aussi longs que des lianes sauvages, quant à son teint d’ébène, il est aussi profond qu’une roche volcanique, mais aussi doux et frais qu’un pétale de rose. Grâce à cet ADN hors du commun, la jeune femme prête son visage aux nouveaux artistes qui montent, comme dans le clip de Lala &ce, et figure dans les campagnes les plus tendances du moment, comme celle 106
de la marque Nodaleto. Et est en passe de devenir elle-même le prochain it model. Mais plus qu’une allure, Queentoide incarne des convictions. À la fois féministe et engagée, elle est l’image d’une génération soucieuse de son avenir, et s’impose désormais comme une figure parisienne incontournable. -Par Pauline Borgogno Manteau et choker ALEXANDER McQUEEN, maillot de bain INTIMISSIMI.
Photo Julien Vallon, Stylisme Jennifer Eymère
Avec son allure féline, la belle Ildjima – plus connue sous le nom de Queentoide sur les réseaux sociaux – est la nouvelle sensation de l’industrie du mannequinat.
L’ BEAUTÉ Nouveaux SILLAGES
Cinq parfums testés et approuvés pour débuter l’année en beauté. 1.
Rozu d’Aesop. Hommage du parfumeur Barnabé Fillion à la designer Charlotte Perriand et à la rose créée en son honneur, Rozu déploie toute la richesse de son bouquet floral réhaussé de notes délicates de shizo, vétiver, patchouli et myrrhe.
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2. Étoile Filante de Louis Vuitton. Solaire et inspirée, la dernière création de Jacques Cavallier-Belletrud fait la part belle à l’osmanthus, fleur vénérée de l’Empire céleste.
5. Iris Malikhân de Maison Crivelli. Aussi contrasté qu’addictif, le délicieux hymne à l’iris imaginé par Thibaud Crivelli joue sur la complémentarité des notes vertes de galbanum et de cyprès, duo qui vient se heurter à la sensualité de notes cuirées, vanillées et ambrées.
La Petite Robe Noire Eau de Parfum Nectar de Guerlain. Une nouvelle variation de la fragrance culte de la maison où la rose flirte avec les notes de miel et d’amande. Édition Limitée.
Photo DR
3.
Idôle de Lancôme. Ôde à l’empowerment et au self-love, la fragrance incarnée par la sublime Zendaya mêle un quatuor puissant de roses à la fleur de jasmin et au chypre blanc, bouquet intense et lumineux.
–Par Mélanie Mendelewitsch
LE SENS de l’humeur Jimmy Choo lance son nouveau parfum I Want Choo dont la signature olfactive est à l’image de la marque, glamour et audacieuse audacieuse.. Rencontre avec sa directrice artistique Sandra Choi, Choi, et avec le mannequin Coline Aulagnier, Aulagnier, la présentatrice TV Flora Coquerel et l’influenceuse Alexandra Guerain. Guerain. Propos recueillis par LAURE AMBROISE ET CAROLINE MAS Photographie CHRIS FLOYD ET FIONA GODIVIER
L’OFFICIEL :
Quelle est votre définition du glamour ?
SANDRA CHOI : Le glamour est intrinsèque à notre marque, pour
moi c’est une question de confiance et d’audace. LO: Où trouvez-vous vos inspirations ? SC: Je suis constamment inspirée, c’est la nature même du créateur. La mode vintage, l’architecture, la musique, la photographie, l’art et la nature, ou même une pochette d’album, sont autant d’éléments déclencheurs d’idées. Je suis curieuse de tout ce qui m’entoure et je cherche à retranscrire tout cela dans nos collections qui reflètent l’humeur du monde. Depuis que nous vivons cette période particulière, je suis plus sensible à la nature, la regarder s’épanouir est une source d’inspiration inépuisable. LO: Qui vous inspire ? SC: Les esprits forts. LO: Vos Jimmy Choo préférées ? SC: Les sandales Pasha, elles sont synonymes d’été et de vacances. LO: Et les plus extravagantes que vous ayez jamais portées ou créées ? SC: Une paire de sandales à plumes de la collection printempsété 1998, uniques en leur genre. LO: Quelle est votre relation au parfum ? SC: J’adore les parfums, j’en ai beaucoup. Je les porte en fonction de mon humeur. J’ai mon parfum signature, mon parfum pour l’été et un autre pour les voyages ! LO: En quoi votre nouveau parfum incarne-t-il la marque ?
SC: Il est glamour, pétillant comme un éclat de rire, il incarne parfaitement ces notions de complicité, de fête, de bonne humeur qui sont dans l’ADN de Jimmy Choo. LO: Qui est la femme I Want Choo ? SC: C’est une femme qui a confiance en elle. Elle est audacieuse et ne manque pas d’humour. LO: Avec quelle paire de chaussures I Want Choo se porterait le mieux ? SC: Les Minny, le modèle idéal pour faire la fête. LO: La campagne publicitaire est une invitation à la fête. Comment faites-vous entrer l’esprit festif chez vous, surtout en ce moment ? SC: Tout dépend de votre environnement, surtout maintenant que nous ne pouvons plus voir autant de monde. J’aime installer une ambiance à travers la décoration, des bougies, de bons plats et de bonnes bouteilles ! LO: Quels sont les ingrédients d’une fête réussie ? SC: La musique ! J’adore danser, et en soirée vous me trouverez toujours sur la piste de danse ! Quelle est votre note olfactive préférée ? SC: L’eucalyptus. LO: Créer un parfum ou des chaussures : le procédé est-il le même ? SC: Tous deux sont liés à nos sens et à nos sentiments. Une paire de chaussures peut vous mettre dans un certain état d’esprit, et je pense que c’est assez similaire avec le parfum. LA
En exclusivité chez Sephora, sur sephora.fr et dans les boutiques Jimmy Choo.
L’ BEAUTÉ
Photo Chris Floyd
SANDRA CHOI, DIRECTRICE ARTISTIQUE DE JIMMY CHOO.
COLINE AULAGNIER
Vous organisez une fête entre amis à la maison. Quels sont les ingrédients du succès ? COLINE AULAGNIER : J’adore recevoir et cuisiner. De bons petits plats maison, une bonne playlist et le tour est joué ! ALEXANDRA GUERAIN : Je suis très “famille” et aime la simplicité. Pour moi, une soirée réussie est composée des gens que j’aime. FLORA COQUEREL : Il suffit d’être bien entouré. Ajoutez une table bien garnie et de la musique de qualité, et c’est le succès assuré. L’O : De qui est composée la soirée de vos rêves en 2021 ? CA : Simone Veil, Nelson Mandela, Albert Einstein… Plus simplement, mes amis et ma famille. AG : Beyoncé, Jean-Paul Belmondo et ma créatrice préférée, Miuccia Prada. FC : Aretha Franklin, Ray Charles, Beyoncé… Sans oublier Aya Nakamura ! L’O : Votre playlist incontournable pour une soirée ? CA : Tout dépend de la soirée et de mon humeur : jazz, soul, blues, rap ou variété française… J’écoute de tout ! AG : Jhené Aiko, Frank Ocean, Ariana Grande, Snoh Aalegra. FC : Une playlist éclectique pour faire plaisir à tous les invités. De Burna Boy à Michael Jackson, en passant par les Destiny’s Child, Wizkid, Angèle et Dua Lipa. L’O : Racontez-nous la meilleure soirée de votre vie… CA : Un dîner avec mon copain dans les caves de la Maison Ruinart, à Reims, à 38 mètres sous terre. Une super expérience ! L’OFFICIEL :
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AG : J’adore les soirées faites de surprises. Celles des fashion weeks sont toujours très surprenantes. FC : L’une des meilleures de ma vie s’est déroulée à Tahiti. C’était une soirée imprévue qui s’est terminée face au lever du soleil. L’O : Une rencontre improbable faite pendant l’une de vos soirées ? AG : Plutôt une rencontre manquée ! Je venais de quitter une soirée lorsque Frank Ocean y a fait son apparition… FC : Lors d’un déplacement à Los Angeles, j’ai eu la chance de croiser Viola Davis à une soirée qui précédait les Oscars. J’en garde un souvenir mémorable ! CA : Un soir, un ami m’a conviée à une fête où était invité tout le cinéma français. L’O : Vos ami(e)s vous appellent à la dernière minute pour que vous les rejoigniez dans un club branché de la capitale. Vous avez 15 minutes pour vous préparer. Décrivez-nous votre look infaillible… FC : Un jean taille haute, un bustier, une veste courte et des bottines ! Un look simple mais efficace pour danser toute la nuit. CA : J’opte pour la simplicité avec une chemise en soie, un jean et une paire de bottes. Le tout accessoirisé d’une pluie de bijoux. AG : Un blazer, un top à fines bretelles et un pantalon en cuir noir, sans oublier mon sac favori. Infaillible et confortable. L’O : Votre “ beauty prep” avant de sortir ? CA : Elle me prend cinq minutes car je n’aime pas trop me maquiller. Je commence par hydrater ma peau, puis j’applique un peu de fond de teint, une touche de poudre bonne mine, du mascara, un peu de parfum, et c’est parti ! AG : Je commence par ma routine de soin. Côté make-up, j’opte pour un look léger associé à un rouge à lèvres fort. Je finis par quelques notes de mon parfum préféré. FC : Je travaille d’abord le teint pour avoir bonne mine. Il m’arrive
ALEXANDRA GUERAIN
PHOTOS FIONA GODIVIER, STYLISME VANESSA BELLUGEON, COIFFURE ALIX GRANIER PASQUET ET CÉCILE MASSART, MAQUILLAGE SERGIO CORVACHO ET MARIE GUILLON, SET DESIGN CHLOÉ BARRIÈRE, ASSISTANT STYLISME KENZIA BENGEL
d’utiliser un rouge à lèvres rouge très mat qui tient pendant des heures. Côté cheveux, je les laisse naturels mais j’embarque un élastique avec moi, indispensable en soirée. L’O : En quoi le parfum est-il indispensable pour sortir ? AG : Un parfum, c’est comme une signature. Se parfumer, c’est comme s’habiller, c’est un moyen d’affirmer sa personnalité. CA : Le parfum est un indispensable du quotidien. Il fait partie de la personne qui le porte. FC : Oui, c’est une sorte de carte d’identité olfactive. L’O : L’odeur de la fête, selon vous ? CA : Le patchouli, dont je suis fan. AG : Moi je pense à des notes chaudes et épicées, synonymes de convivialité et de partage. FC : Une odeur épicée, mêlée à des notes fraîches d’agrumes. L’O : Le parfum d’une soirée réussie selon vous ? CA : Sans hésiter, I Want Choo de Jimmy Choo. CM COLINE : T-shirt, COURRÈGES. ALEXANDRA : Sandales, JIMMY CHOO. Veste, T-shirt, jean, perso. FLORA : Veste, VERSACE. Pantalon, ALBERTA FERRETTI .
Escarpins, JIMMY CHOO.
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MODE, JOAILLERIE & HORLOGERIE A.P.C. apc.fr ACBC acbc.com Acne Studios acnestudios.com Aeydé aeyde.com Alberta Ferretti albertaferretti.com Alexander McQueen alexandermcqueen.com Altuzarra altuzarra.com Amina Muaddi aminamuaddi.com Area area.nyc Aristocrazy aristocrazy.com Balenciaga balenciaga.com Birkenstock birkenstock.com Bottega Veneta bottegaveneta.com Blumarine blumarine.com Bronx and Banco bronxandbanco.com Bulgari bulgari.com Burberry burberry.com Calvin Klein calvinklein.fr Calzedonia calzedonia.com Cartier cartier.fr Celine celine.com Chanel chanel.com Charlotte Chesnais charlottechesnais.fr Charvet charvet.com Collina Strada collinastrada.com Courrèges courreges.com Desigual desigual.com Dion Lee dinlee.com Dior dior.com Dolce & Gabbana dolcegabbana.com Dr. Martens drmartens.com Dries Van Noten driesvannoten.com Emmanuelle Khanh ek.fr Emilio Pucci emiliopucci.com Emporio Armani armani.com Falke falke.com
Fendi fendi.com Fringe and Frange fringeandfrange.com Gas Bijoux gasbijoux.com Giuseppe Zanotti giuseppezanotti.com Givenchy givenchy.com Gucci gucci.com Hammerman hammermanjewels.com Hermès hermes.com Husbands husbands-paris.com Intimissimi intimissimi.com Jacob & Co jacobandco.com JW Anderson jwanderson.com Jimmy Choo jimmychoo.com Jiri Kalfar jirikalfar-shop.com Lacoste lacoste.com Loewe loewe.com Louis Vuitton louisvuitton.com Maison Margiela maisonmargiela.com Manolo Blahnik manoloblahnik.com Marcia marciawear.com Marina Rinaldi marinarinaldi.com Max Mara maxmara.com Maximilian Raynor maximilianraynor.com Michael Kors michaelkors.fr Miu Miu miumiu.com Mohop mohop.com Mokuba mokuba.fr Molly Goddard mollygoddard.com Moncler moncler.com Moschino moschino.com Moscot moscot.com Nasir Mazhar nasirmazhar.com Nicolas Messina nicolas-messina.com Patou patou.com Pebble London pebblelondon.com Persol persol.com Pinko pinko.com Preen by Thornton Bregazzi
preenbythortonbregazzi.com Prada prada.com Proenza Schouler proenzaschouler.com Ralph Lauren ralphlauren.fr Repetto repetto.fr Richard Mille richardmille.com Roger Vivier rogervivier.com Sacai sacai.jp Saint Laurent ysl.com Salvatore Ferragamo ferragamo.com Simone Rocha simonerocha.com Sinead Gorey sineadgorey.co.uk Sirconstance sirconstance.com Stella McCartney stellamccartney.com Stephen Jones stephenjonesmillinery.com Steven Passaro stevenpassaro.com Tagliatore 0205 tagliatore.com The Kooples thekooples.com Themoirè the-moire.com Threeasfour threeasfour.com Tiziano Guardini tizianoguardini.com Tod’s tods.com Valentino valentino.com Van Cleef & Arpels vancleefarpels.com Vanessa Seward vanessaseward.com Versace versace.com BEAUTE & LIFESTYLE Aesop aesop.com Gucci gucci.com Guerlain guerlain.com Intimissimi intimissimi.com Jimmy Choo jimmychoo.com Lancôme lancome.fr Louis Vuitton louisvuitton.com Maison Crivelli maisoncrivelli.com Sephora sephora.fr Westman Atelier westman-atelier.com
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À la parution du premier numéro de ce magazine, en 1921, une guerre mondiale venait de s’achever et la bataille contre un virus mortel avait enfin été gagnée. Les Années folles débutaient, l’art sous toutes ses formes s’épanouissait, et Paris en était l’épicentre. Cent ans plus tard, les temps ont bien changé, et nous espérons sincèrement que 2021 verra refleurir l’énergie rafraichissante et l’esprit créatif dont L’Officiel fut le témoin à ses débuts. Dans ce numéro, nous entamons un voyage à travers nos vastes archives, prélevant dans notre passé les germes de notre avenir. Nous allons dévoiler les histoires secrètes de L’Officiel, braquer les projecteurs sur les femmes et les hommes – rédacteurs et rédactrices, designers, photographes, illustrateurs et illustratrices – qui l’ont porté, et célébrer leur vie et leur talent. Nous posons sur notre héritage un regard empreint de la sensibilité d’aujourd’hui, non pour simplement le commémorer, mais pour en tirer les enseignements – et le partager. À l’automne, les archives complètes de L’Officiel – plus de 70 000 images de mode, d’art et de culture extraites de plus de 900 numéros de nos éditions du monde entier – seront disponibles dans une immense galerie en ligne. La Galerie du centenaire de L’Officiel sera un espace d’inspiration accueillant dans lequel nos lecteurs pourront s’amuser, apprendre et explorer le riche passé de ce magazine chargé d’histoire. Nous avons hâte de le partager avec vous.
Folles ANNÉES Des séries mode aux scènes de Broadway en passant par le grand écran,, Sienna Miller et Twiggy écran ont tout fait. Séparées par le confinement mais partageant un même esprit, les deux icônes parlent de leurs origines et du fait que le passé n’a jamais paru aussi actuel. Alors que démarre la seconde année de notre vie de chats domestiques, Sienna Miller porte des Ugg. L’actrice américaine, élevée en Angleterre, a toujours été fan de la controversée chaussure à moumoute, mais maintenant que s’ouvre une nouvelle ère pour le terrifiant hybride botte-chausson, ce choix apparaît particulièrement poignant. Comme nous tous, Sienna Miller a dû changer de rythme. Elle s’est faite préceptrice de sa fille, Marlowe, et a essayé de continuer à tourner pendant la pandémie. Dans son dernier film, présenté au festival de Sundance l’année dernière, elle livre une de ses plus puissantes interprétations. Réalisé par Tara Miele, Wander Darkly explore le concept de traumatisme en déconstruisant la relation de deux jeunes parents. “C’était intense mais presque cathartique”, explique Sienna Miller, qui joue la mère au côté de Diego Luna. Le film, confondant l’espace et le temps au moyen de longs plans d’une caméra qui ne sait où fixer son regard, dépeint fidèlement l’inconsistance de la mémoire. À l’autre bout de la ville, pas si loin, Dame Lesley Lawson – plus connue sous le surnom qui a secoué le monde de la mode, Twiggy – est en chaussons aussi. Ceux de la supermodèle des sixties ne sont pas siglés, mais Sienna et elle se réjouissent de la coïncidence. Pour deux amies de longue date – aux trajectoires parallèles sur bien des points –, il y a quelque chose d’un peu amer à ne se retrouver qu’en vidéoconférence. Mais dans ces temps sanitaires, on se console en se disant qu’on se reverra bientôt en vrai. Et probablement avec d’autres chaussures.
Propos recueillis par JOSHUA GLASS Traduction CÉLINE GENEVREY Photographie TOM MUNRO Stylisme CATHY KASTERINE
CI-CONTRE : T-shirt imprimé, pantalon ample en lin et soie et ceinture, LOUIS VUITTON. Bracelet, CARTIER. PAGE DE DROITE : Pull en shetland, col roulé ajouré en maille de viscose, jupe Re-Nylon en gabardine et escarpins, PRADA. PAGE PRÉCÉDENTE : Robe bicolore et sneakers, LOEWE. Bague, BULGARI.
CI-CONTRE : Chemise en popeline PAGE DE DROITE : Veste en laine
à nœud et top bijoux en perles et strass, SIMONE ROCHA. et short, CELINE PAR HEDI SLIMANE. Bracelet, CARTIER.
Cela fait longtemps que vous êtes proches. Vous vous souvenez de votre première rencontre ? SIENNA MILLER : Je tournais Casanova à Venise avec Leigh [Lawson, ndlr], le mari de Twiggy, en 2002 ou 2003. On est tombés amoureux super vite, non ? On se baladait en ville, on cuisinait des rôtis pour le déjeuner du dimanche. On avait une vraie bande. TWIGGY : C’était bien gentil à vous [Sienna et Leigh] de m’inclure. SM : On avait super besoin de toi ! T : Je me souviens de toi, Sienna, une splendide jeune femme qui allait devenir comme notre fille [rires]. Bien sûr, tes parents sont adorables, j’adore ta mère, mais quand ils ne sont pas là, on est tes parents adoptifs. Jusqu’à ce que ce virus nous frappe, la vie s’est écoulée à toute vitesse, on a pu rester jusqu’à un an ou deux sans se voir… Mais ce qui est bien avec les vrais amis, c’est qu’on peut reprendre la relation là où on l’a laissée, n’est-ce pas ? JOSHUA GLASS:
“JE DÉTESTERAIS DEVOIR SAUTER d’un AVION, MAIS une FOIS À TERRE, le SOUVENIR de L’AVOIR FAIT me DONNERAIT VRAIMENT le SENTIMENT D’AVOIR ACCOMPLI QUELQUE CHOSE.” JG : Sienna, en tant que mannequin débutant à Londres, avez-vous été
influencée par l’héritage imposant de Twiggy ? SM : Bien sûr, toutes les Anglaises ont été influencées par Twiggy. Elle était le symbole même de ce qui se passait à Londres à une époque qui me paraît avoir été la plus excitante de toutes. Elle ne ressemblait à rien de connu, et elle est restée une icône. On voit encore aujourd’hui des tendances qui descendent en ligne droite d’images célèbres de Twiggs, je n’imagine même pas ce que c’est d’être un mannequin de ce niveau. Pour moi, ce métier était un tremplin vers le cinéma ; c’était mon vrai but. Mais, évidemment, j’ai eu la coupe Twiggy, le maquillage. Je n’ai pas encore fait de descente dans tes placards, ce qui est incroyable, Twiggs. Il va vraiment falloir que je le fasse. Et puis elle est devenue cette actrice sublime, une mère géniale, une grand-mère géniale… T : Oh, tu es adorable ! Tu ne t’es pas trop mal débrouillée non plus, hein ? Quand j’y repense, c’était épatant d’être jeune à cette époque. Le système de classes anglais était en train d’évoluer, et c’est devenu très – chic, disons – d’être issu de la classe ouvrière, au cinéma, dans la mode, dans la musique. Tu vois les Beatles ? SM : Ils étaient cinq, c’est ça ? Les Fab Five ! [Rires.] T : Tout m’est tombé dessus à 16 ans. J’étais une écolière avec une drôle de tête et des jambes maigres. C’est pour ça qu’on m’a surnommée Twiggy [de twig, brindille, ndlr]. J’étais mod, et quand on était mod, on avait les cheveux soit très courts, soit très longs avec la raie au milieu, ce que j’avais moi, et on portait des jupes plissées grises sous le genou avec des Hush Puppies marron à lacets. Avec mes jambes, je devais ressembler à Olive Oyl ! Je me 120
T-shirt en coton imprimé, jupe plissée en laine motif logo, ceinture en cuir, chaussettes en crochet et mocassins en cuir et métal, GUCCI.
CI-CONTRE : Robe imprimé fleuri à col en plumes, SAINT LAURENT PAR ANTHONY VACCARELLO. PAGE DE GAUCHE : Robe en laine et soie et escarpins, FENDI. Bague, BULGARI.
Veste en tweed avec col, CHANEL.
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maquillais en m’inspirant d’une de mes poupées de chiffon, avec des cils pointus. Un jour, une copine m’a demandé de poser pour le magazine où elle travaillait – j’étais trop petite pour être mannequin, mais j’avais un “visage intéressant”, m’a-t-elle dit –, et elle m’a envoyée chez Leonard, un coiffeur chic de Mayfair. Je me souviens que j’avais les larmes aux yeux sur la chaise, parce que je ne voulais pas qu’on me coupe les cheveux. Quand il est arrivé, j’avais trop peur pour dire quoi que ce soit. C’est Barry Lategan qui m’a prise en photos, en noir et blanc, et elles étaient magnifiques. Leonard les a accrochées dans son salon, où un journaliste les a vues. Deux jours après, mon père ouvre son journal, et là, en pages centrales, un gros titre qui proclame “Twiggy : le visage de 1966”. Ma vie a changé.
“AUTREFOIS mes TENUES ÉTAIENT SCRUTÉES en PERMANENCE, au au BOUT BOUT d’un MOMENT J’AI FINI par ÊTRE TROP ATTENTIVE À mon IMAGE. APRÈS TOUT ÇA, JE VAIS SORTIR les PAILLETTES !” JG : Sienna, avez-vous connu des transformations comme ce qu’a vécu
Twiggy chez Leonard, qui vous ont affectée de manière inattendue mais profonde ? SM : Je ne sais pas si ç’a été aussi radical que ça, mais pour mon deuxième film, Alfie, on m’a fait une coupe particulière, avec une frange très seventies – un peu comme celle de Twiggs maintenant. C’était un style bohème qui allait bien avec les vêtements que je portais à l’époque. Je suppose que c’est resté mon “look” un certain temps. T : En tout cas c’est là que les gens ont commencé à repérer ton style. Parce que vraiment, Sienna, tu as un style très sûr. C’est ce que j’ai vécu dans les années soixante : on te demandait toujours ce que tu portais – qui tu portais – pour copier ton look. Et je dois dire que tu le portes toujours à merveille ! Le truc, c’est que ni toi ni moi ne l’avons planifié. Ça ne se calcule pas, ce qui nous est arrivé. SM : Non. Il faut vraiment que tu cliques avec l’air du temps au bon moment. L’une comme l’autre, vous êtes passées avec succès de la mode à l’écran, et avez eu des rôles inoubliables. On pense à Polly Browne pour vous, Twiggy, et à Tippi Hedren pour Sienna. Quel rôle a été le plus marquant pour vous ? T : Sienna a bien plus tourné que moi. J’aime tout ce qu’elle fait, pas seulement parce que c’est ma petite chérie, mais aussi parce que c’est une sacrée bonne actrice. Parfois – et particulièrement en Angleterre, je pense – il est très difficile pour une belle femme comme Sienna de voir son talent reconnu. Tu ne trouves pas ? SM : Cette idée qu’on ne peut pas être deux choses à la fois. JG :
T : C’est ça. Ken Russell a bouleversé ma vie. C’était le réalisateur le plus en vue d’Angleterre quand il m’a choisie pour The Boy Friend [1971]. Tout le monde lui a dit “elle chante faux” et “elle joue mal”, mais il s’en fichait, et sans lui, franchement, je serais restée mannequin. Quand quelqu’un croit en vous, ça marche du tonnerre. Mais mon expérience la plus marquante, c’est My One and Only [1983] à Broadway, parce que je n’avais jamais rien fait de tel. Le cinéma, c’était effrayant, mais finalement pas si différent du mannequinat. Ton rôle que je préfère, Sienna, c’est Edie Sedgwick [dans Factory Girl, en 2006, ndlr], tu le savais ? SM : En tout cas c’est un rôle qui m’a accompagnée longtemps. C’est toujours le cas avec les personnages imparfaits, parce qu’ils sont plus équilibrés. C’était facile de comprendre les raisons psychologiques qui ont fait d’Edie ce qu’elle était, et c’était marrant aussi de l’interpréter, parce qu’elle était charismatique et vivait à une époque fascinante. J’aurais pu rester des heures à écouter Brigid Berlin nous raconter des histoires de la Factory. J’ai gardé les collants et le justaucorps pendant des mois après le tournage, je voulais rester dans cette atmosphère. T : On m’a présentée à Andy Warhol quand je suis allée pour la première fois à New York, en 1967, et il m’a fait une de ces peurs ! J’étais tellement protégée, sérieuse… Je veux dire, ce que je faisais de pire, c’était fumer des cigarettes. Il y avait des garçons partout, la lumière était tamisée, il y avait de la musique. Et puis ce type au visage tout blanc et aux cheveux gris qui ressemblait à un cadavre ambulant s’est approché de moi. J’ai failli lui dire “Ça ne me plaît pas, ici, je veux rentrer !” Ç’a été mon seul passage à la Factory, mais j’ai rencontré Edie Sedgwick ! SM : Tu sais ce qu’on disait de cet endroit : tu peux rester, mais tu ne pourras plus partir. C’était un lieu consacré à la performance artistique, mais Warhol avait conçu l’espace de manière à pouvoir observer les gens en train d’imploser et de s’autodétruire. Pour un sadique, ça doit être captivant.
À propos de personnages imparfaits, Sienna, le sujet de votre dernier film, Wander Darkly, est le doute de soi. L’impossibilité de faire confiance à ses souvenirs ou à ses émotions. Avez-vous été affectée par la peur, l’appréhension ? SM : Il y a cette petite voix qui me parle à l’oreille, qui me démoralise ou essaie de me décourager dès que je suis face à un défi créatif. C’est mon mauvais génie. Je suis dans un sale état les veilles de première au théâtre. Mais j’ai l’impression que si je m’en débarrassais… je ne sais pas. Je détesterais devoir sauter d’un avion, mais une fois à terre, le souvenir de l’avoir fait me donnerait vraiment le sentiment d’avoir accompli quelque chose. Je compare ça à jouer sur scène, ou à avoir le premier rôle dans un film, parce que c’est indélébile. Ça m’excite beaucoup de faire ces choses qui me pétrifient, mais c’est toujours un combat, c’est sûr. Et toi, Twiggs ? T : C’est quand on dépasse cette peur et ce doute qu’on donne le meilleur de soi-même. Il y a parfois des gens qui disent ne jamais avoir le trac, mais en général ils ne sont pas très bons. SM : C’est au cœur même de ma créativité, de douter de moi. Et, le fait est, ce côté obscur m’attire, et je choisis certains sujets de films en conséquence. C’est curieux, parce que j’ai plutôt l’impression d’être quelqu’un de léger, mais mon travail prend un chemin différent. T : C’est bien de pouvoir explorer les deux côtés. Je n’ai jamais eu la chance d’essayer des choses plus sombres, j’aurais bien aimé. SM : Ouh, je vais réaliser un film super noir et tu joueras dedans. T : J’adorerais ! Tu sais, maintenant que je suis une vieille femme, j’aimerais vraiment jouer un rôle sans maquillage, avec une vieille perruque grise marrante. Quelque chose de vrai. On pourrait jouer une mère et sa fille. On serait parfaites ensemble. JG :
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PAGE DE DROITE : Robe
CI-CONTRE : Robe ceinturée, MIU MIU. en tissu dévoré rebrodée de strass, VALENTINO. Bague, BULGARI. Bracelet, CARTIER.
JG : La pandémie a eu pour conséquence d’alimenter une sorte de fascination pour le passé. Les créateurs revisitent leurs œuvres de jeunesse, les designers retournent à leurs concepts classiques. Que pensezvous de cette idée de réinjection culturelle ? T : Je reçois encore des lettres de fans, la plupart sont écrites par des femmes de mon âge, mais aussi par des jeunes filles, entre 16 et 24 ans, qui sont obsédées par la mode, la musique et l’art des 60s. C’est arrivé aussi pendant les années 80 et 90, et j’ai cru que ça allait s’arrêter, mais non. Je ne sais pas pourquoi le passé résonne aussi fort auprès des jeunes aujourd’hui. SM : Les sixties ont été une période si éclatante culturellement ; une renaissance comme on n’en connaîtra plus, à mon avis. Il me semble que la culture moderne est saturée d’informations. L’un des avantages de cette pandémie, c’est que tout le monde a été forcé de ralentir et de prendre conscience de la démesure de notre consommation. Les designers et les maisons comme Gucci, avec qui je travaille beaucoup, réduisent drastiquement leur volume de production. Métaphoriquement et littéralement, les gens explorent leurs placards et retrouvent des choses à porter. Nous n’avons pas besoin de consommer au rythme où nous le faisons – les temps sont incertains pour la planète. T : C’est à se demander s’il n’y a pas un être mystérieux, plus évolué, qui aurait organisé tout ça pour nous dire “Oh là, les amis, on se calme”. J’ai lu que les poissons reviennent dans certaines zones de l’océan où il y a moins d’activité humaine. Les oiseaux retrournent dans des endroits que les hommes ont quittés.
Dans cet esprit de retour en arrière, avez-vous changé d’avis sur certaines de vos opinions, de vos habitudes passées ? SM : J’ai du mal à méditer ces temps-ci, mais c’est toujours bien quand j’y arrive. Sinon, côté mode, quand tout ça sera fini, je vais me lâcher complètement. Auparavant mes tenues étaient scrutées en permanence, au bout d’un moment j’ai fini par être trop attentive à mon image. Maintenant, je suis en jean et pull pratiquement tous les jours, et j’ai une tonne de vêtements que je n’ai jamais portés. Après tout ça, je vais sortir les paillettes ! T : Je ne porte même plus de jeans ! J’ai passé l’année en survêtement. J’adorerais m’habiller élégamment de nouveau. SM : Plein de gens ne mettent même plus leur pantalon pour les réunions Zoom… Je me demande si nos années 20 seront comme celles du XXe siècle. T : Si on pouvait retourner à n’importe quelle période, j’aimerais bien faire un tour dans les Années folles. SM : Scott et Zelda Fitzgerald à Paris, Hemingway… Tu imagines ? T : Ils voyageaient pas mal, mais en bateau. Et ils s’habillaient pour dîner, c’était toujours très formel. SM : On devrait refaire ça. À la fin du confinement, je viens te voir. On se mettra en tenue de soirée. T : Oui, ça me plaît bien, un dîner habillé ! SM : Ou une soirée Années folles chez moi et un dîner habillé chez toi. T : J’adore. Tope-là. JG :
PAGE DE DROITE : Veste
MOLLY GODDARD.
à carreaux, tricot rayé, jupe en tulle et sabots,
Coiffure : Earl Simms. Maquillage : Wendy Rowe. Manucure : Jenni Draper. Assistants photo : Tom Hill, Russel Higton et Shane Ryan. Assistant stylisme : Benjamin Canares.
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Réapproprions-nous
LE RÊVE Il dirige les collections homme et femme de Tod’s. Rencontre avec Walter Chiapponi, un directeur artistique artisan à la recherche d’une nouvelle d’une nouvelle élégance. Quand il entre dans la pièce, Walter Chiapponi crée un véritable tourbillon. Mince, vif, il se déplace avec grâce dans l’espace, presque comme s’il ne posait pas les pieds sur terre : il soulève une bouffée d’énergie, un vent créatif. Milanais, timide et sans gêne à la fois, il est depuis octobre 2019 le directeur artistique des collections homme et femme de Tod’s. Il a juste eu le temps de débuter brillamment sur les podiums milanais en février dernier, avant de se retrouver, comme tout le monde, à vivre la période étrange que l’on sait. C’est la première fois que son nom apparaît au premier plan à l’échelle internationale, même s’il navigue depuis longtemps dans le monde des grandes maisons de mode. À l’Istituto Europeo di Design, il a reçu l’enseignement d’Alessandro Dell’Acqua, qui l’a pris avec lui à la fin des années 1990. De là, il est passé chez Blumarine, puis a répondu à l’appel de Riccardo Tisci, comme premier assistant pendant ses années chez Givenchy. Puis ce fut le tour de Valentino avec Alessandra Facchinetti, de Gucci à l’époque de Frida Giannini, avec Alessandro Michele comme collègue. Miu Miu a suivi et, en 2016, Bottega Veneta, d’abord aux côtés de Tomas Maier, puis de Daniel Lee. Habitué à travailler dans l’ombre, il a encore une pointe de gêne à apparaître dans la lumière. Mais il suffit de parler de stylisme pour que ses yeux s’allument.
Par CRISTINA MANFREDI Traduction HÉLÈNE GUILLON Photographie SIMONE BATTISTONI Stylisme GIULIO MARTINELLI
Walter Chiapponi (à gauche), directeur artistique de Tod’s, et les mannequins Mathilde et Thiam.
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Vous avez été appelé à définir les nouvelles orientations de Tod’s, mais comment décririez-vous l’ADN de la marque aujourd’hui ? WALTER CHIAPPONI : Je pense qu’il s’agit d’un cas unique dans le panorama italien, une marque conçue pour vivre le quotidien, et surtout les loisirs, ce qui est une vraie chance pour moi, car je dois m’occuper d’habiller les gens dans les moments où ils se consacrent à leurs hobbies et s’amusent. Mon travail consiste à faire évoluer cet état d’esprit, et certainement pas à le révolutionner. L’OFFICIEL :
LO : Selon vous, qu’est-ce qui, chez Tod’s, retient l’attention du public ?
Je pense qu’il y a une sorte de réconfort dans ce que nous offrons, c’est-à-dire des vêtements unissant l’élégance et le confort, sans banalité. Surtout, il n’y a rien de forcé, il n’y a pas d’obsession à être trendy. Nous fabriquons des pièces intemporelles, pour habiller et non déguiser les personnes. Nous voulons que les gens se sentent à l’aise, éventuellement avec de nouveaux points de vue liés aux formes, aux matériaux, aux couleurs, mais toujours avec une approche douce. Et nous visons à élargir notre public de référence. Dans l’imaginaire collectif, Tod’s s’adresse plutôt à des hommes et des femmes mûrs, moi j’essaie aussi de transmettre les codes de l’élégance, de la culture et du classicisme à des personnes plus jeunes. Le choix d’Aaron Altaras, un des acteurs de la série Netflix Unorthodox, comme visage de la nouvelle campagne, en témoigne.
WC :
LO : Impossible de parler de Tod’s sans penser à Diego Della Valle, qui a beaucoup pesé dans le succès mondial de l’entreprise familiale. Quelles relations peut-on avoir avec un tel personnage ? WC : C’est un dur à cuire, mais entre nous, ça a été le coup de foudre. Ce n’est pas la première fois que je développe une grande entente avec un patron, mais avec Diego Della Valle, c’est vraiment stimulant. Son approche du travail est différente de la mienne, mais un très beau dialogue s’est noué entre nous, avec de l’espace pour chacun. Il est très réservé, c’est un grand esthète, j’ai beaucoup à apprendre d’un entrepreneur comme lui. LO : Y a-t-il un aspect de son caractère que vous aimeriez lui voler ?
Toute sa culture, qui est vraiment impressionnante, et son sens du leadership. En cette année très difficile, il a su sourire et nous protéger de différentes manières, en prenant en compte les besoins de chacun. Dans mon cas, il m’a communiqué beaucoup d’encouragement et la volonté d’aller de l’avant, il n’a jamais donné aucun signe de dépression, ça a été incroyable.
WC :
Et des autres grandes maisons de mode pour lesquelles vous avez travaillé, quelles sont les expériences que vous avez retenues ? WC : J’ai eu la chance de travailler aux côtés de monstres sacrés de la mode et je les porte tous dans mon cœur, car chacun d’eux m’a donné quelque chose. D’une personnalité hors classe comme Miuccia Prada, j’admire la capacité à se remettre constamment en question, la lutte contre les stéréotypes de la beauté et le désir de rendre glamour ce que les autres ne regarderaient pas. Riccardo Tisci m’a guidé dans les méandres d’une imagerie plus populaire, LO :
CI-DESSUS : Veste en cuir, pull en coton, pantalon en lin doux, sac en toile et cuir et mocassins en cuir avec glands et semelle en caoutchouc, TOD’S. PAGE DE GAUCHE : Robe en coton structuré, sac en cuir à poignée réglable et sandales en cuir et métal doré, TOD’S. PAGE PRÉCÉDENTE, MATHILDE : Ensemble en daim et sandales en cuir à plates-formes en liège, TOD’S. THIAM : Saharienne en daim, chemise et pantalon en coton et chaussures, TOD’S.
“IL EN FAUT peu POUR QUE LA NONCHALANCE DEVIENNE de LA NÉGLIGENCE.” développée cependant dans une maison comme Givenchy. C’est avec Alessandro Dell’Acqua que j’ai commencé. À l’époque, c’était un prodige de la mode, qui en défiait certains canons, une expérience très formatrice pour moi. LO : Quelle est la plus grande responsabilité d’un créateur aujourd’hui ?
WC : Il faut réussir à susciter l’intérêt, à la fois pour le produit et pour la façon dont vous le présentez. Nous vivons un moment d’intense émotion, tout ce qui semble froid, rigide, graphique ne m’appartient pas. Pour faire ce métier, il faut être proactif, et avec constance. LO : Que vous a apporté l’année 2020 en termes d’expérience ?
WC : C’est l’année de ma vie où j’ai dû assumer le rôle de leader, et j’ai
compris que je savais le faire. Lors des nombreuses visioconférences avec mes collaborateurs, il était important d’entrer en contact d’une 133
manière ou d’une autre avec leurs familles, de mieux comprendre le quotidien de chacun. J’ai appris à connaître leurs maisons, leurs maris, leurs femmes, leurs enfants : l’interaction entre les sphères du privé et du travail m’a beaucoup apporté. À quoi devons-nous nous attendre en termes de tendance désormais ? WC : Je suis fatigué d’entendre parler de vêtements confortables, de pyjamas, de vêtements pour la maison. Il en faut peu pour que la nonchalance devienne de la négligence et, à la longue, elle a aussi des effets négatifs sur le plan psychologique. Il y a trop de joggings, de sneakers, moi je souhaite revoir des personnes qui soignent leur apparence, qui ont envie d’être élégants. La mode n’est pas seulement un T-shirt avec un grand logo. LO :
Et pourtant, beaucoup de gens prétendent que la mode n’est plus à la mode, vrai ou faux ? WC : Je crois que moi-même j’ai dit une phrase de ce genre une fois, et je le regrette, parce qu’elle a été mal interprétée. La créativité est moins prépondérante aujourd’hui qu’à mes débuts en 1996. À cette époque, nous avions laissé le minimal derrière nous et la vague des designers britanniques se répandait. Partout où l’on se tournait, il y avait quelque chose d’incroyable, c’était très amusant. Aujourd’hui, beaucoup de créateurs pensent davantage comme des entrepreneurs et sont allés trop loin en rendant la mode trop accessible. Certaines marques sont devenues hyperpopulaires, en LO :
faisant défiler ce que l’on peut déjà voir dans les rues, tandis qu’on a perdu l’idée d’offrir un rêve au public. La mode n’est pas morte, mais elle doit redevenir ambitieuse. Quelle est votre méthode de travail ? Je suis très précis et extrêmement ordonné, mais quand ma créativité se met en marche, je deviens un puits sans fond et à un certain moment, je dois m’arrêter, sinon je risque de continuer indéfiniment. Je suis un directeur artistique artisan, je travaille physiquement sur les choses, je coupe, je couds, je démonte et remonte les vêtements. J’aime “manipuler” une pièce développée par mes collaborateurs, non pas pour la détruire, mais pour la rapprocher le plus possible de ma vision. Je ne dessine pas beaucoup, je cherche plutôt le contact avec l’objet, une attitude consolidée par le temps passé avec Daniel Lee chez Bottega Veneta, pour lui aussi la manipulation et la spontanéité sont fondamentales.
LO :
WC :
“JE TRAVAILLE PHYSIQUEMENT SUR LES choses choses,, JE COUPE, JE COUDS, JE DÉMONTE ET REMONTE les VÊTEMENTS.” Quel rapport avez-vous avec votre équipe ? Je veux que les personnes avec lesquelles je travaille se sentent en famille, c’est un enseignement que je tiens de Frida Giannini et d’Alessandro Michele à Rome. Si vous mettez les gens à l’aise, ils vous suivront sans que vous ayez besoin d’être autoritaire. Mon ego n’est pas surdimensionné et je me concentre sur le bien de l’entreprise plutôt que sur moi-même.
LO :
WC :
Quelle est votre relation avec votre garde-robe personnelle ? J’ai une chambre immense et je possède plus de 500 paires de chaussures. Étant fan de certains de mes collègues supercréatifs, j’achète pour le plaisir de posséder des objets merveilleux. Mais je ne m’habille jamais de façon extrême, juste quelques touches extravagantes, pour le plaisir de surprendre.
LO :
WC :
Quel personnage a eu le plus d’importance dans votre vie ? Mon grand-père paternel, il était paysan et m’a appris l’humilité. Il ne comprenait pas ce que je faisais, mais il a toujours cru en moi. À la fin de mon premier défilé Tod’s, quand on m’a poussé pour aller saluer, c’est la première personne à laquelle j’ai pensé. Il s’appelait Sante, et son innocence, son authenticité, je les porte dans mon cœur, j’essaie de les faire miennes. LO :
WC :
PAGE DE DROITE, THIAM : Veste en cuir, pull, bermuda et chaussettes en coton et mocassins en cuir et caoutchouc avec glands et franges, TOD’S. MATHILDE : Blouse et jupe droite en coton, sac en cuir martelé avec logo, chaussettes en coton et sandales en cuir, TOD’S.
Coiffure et maquillage : Amy Kourouma
PLAY IT AGAIN. Ces temps-ci, le passé a plus la cote que le présent. On s’en rend compte alors que Taylor Swift et Bob Dylan sortent de nouvelles versions de leurs chansons : de vieux tubes remixés et remasterisés. Biberonnées à un Internet où elles découvrent le monde non de façon chronologique mais dans un fouillis visuel et sensoriel, nos jeunes générations mettent sur le même plan le vieux et le neuf – le déjà-vu et le réellement original – tant que le contexte s’y prête. C’est sans doute pourquoi les marques ont souvent décidé de se réinventer ces dernières saisons, exhumant leurs classiques pour les rhabiller aux couleurs des sensibilités de l’époque. Pour les collections printemps-été 2021, de nombreux designers, extrayant la crème de la crème de leurs archives, l’ont revisitée en explorant de nouvelles voies. En adoptant des valeurs comme le souci de la durabilité et une attention renouvelée à la diversité, à l’égalité ainsi qu’à l’inclusion sous toutes ses formes, ils ont replacé leurs designs historiques dans notre temps et donné un sens inédit à leurs anciens must-have. Qu’il s’agisse du nylon noir de Prada, de la logomania de Gucci, de la veste Bar de Dior ou du classique tailleur Chanel, les créateurs ont offert au public ce qu’il attendait d’eux : l’écho rassurant de la familiarité dans un monde égaré dans l’inconnu. Dans ce numéro, nous avons demandé à nos contributeurs de réinventer les défilés du printemps-été, d’injecter leurs goûts dans leurs silhouettes préférées. Ils ont choisi de placer ces pièces – des looks et accessoires iconiques – sous une lumière intime et dans un contexte hautement personnel. Dans “Re:Claim”, le mélange délibéré de pièces d’archives et de tendances actuelles démontre que l’atemporalité qui domine Internet a gagné la mode, et que le passé et le présent peuvent se rejoindre dans un même moment.
Re:
Mix Secouez votre style avec quelques-uns de vos classiques préférés. Stylisme VANESSA SEWARD Photographie GUEN FIORE
CI-CONTRE : Bomber
en nylon et chemise en denim, LE VIF VINTAGE. Jupe plissée en mohair, PRADA. Ballerines en cuir, A.P.C. Ceinture Vanessa, VANESSA SEWARD VINTAGE COLLECTION. Boucles d’oreilles en or jaune, CARTIER. PAGE DE GAUCHE : Chemise et cravate en coton, SÉBLINE. Costume en twill de laine, HUSBANDS. Collier en métal, résine et strass, CHANEL. Bague en or jaune, diamants, lapis lazuli, malachite et chrysoprase, DIOR JOAILLERIE. Bague en or rose, CARTIER. PAGE PRÉCÉDENTE : Cardigan en cachemire, CELINE PAR HEDI SLIMANE. Blouse en popeline, CHARVET. Pantalon en soie et escarpins en cuir, GUCCI. Lunettes de soleil en acétate, SAINT LAURENT PAR ANTHONY VACCARELLO. Sac en cuir de veau, HERMÈS. Nœud et bagues Chanel, VANESSA SEWARD VINTAGE COLLECTION.
Combinaison en coton, VANESSA SEWARD POUR LA REDOUTE COLLECTION. Pull en cachemire, A.P.C. Chemise en coton, SÉBLINE. Babies en cuir, GUCCI. Carré en soie, HERMÈS. Bague en or rose et boucles d’oreilles en or jaune, CARTIER. Bague en or jaune, diamants, lapis lazuli, malachite et chrysoprase, DIOR JOAILLERIE.
CI-CONTRE : Trench coat en gabardine de coton, MAX MARA. Combinaison en cuir, MIU MIU. Sac en veau cannelé, DIOR. Bague en or jaune, diamants, lapis lazuli, malachite et chrysoprase, bracelet en or jaune, diamants, lapis lazuli, malachite et chrysoprase et montre à quartz en or jaune, diamants, pierres et perles, DIOR JOAILLERIE. Bague en or rose et boucles d’oreilles en or jaune, CARTIER. PAGE DE GAUCHE : Robe en soie imprimée, chapeau en feutre et ceinture en métal, GUCCI. Sabots en cuir de veau lisse, HERMÈS. Bague en or rose et boucles d’oreilles en or jaune, CARTIER. Bague en or jaune, diamants, lapis lazuli, malachite et chrysoprase, DIOR JOAILLERIE.
CI-CONTRE : Pantalon large en soie et lin et ceinture en cuir de veau, LOUIS VUITTON. Chemise en denim brut, HUSBANDS. Foulard Celine, VANESSA SEWARD VINTAGE COLLECTION. Escarpins en cuir et métal, SAINT LAURENT PAR ANTHONY VACCARELLO. PAGE DE DROITE : Cardigan en cachemire, CHANEL. Chemise en satin, GUCCI. Ceinture en serpent, CELINE PAR HEDI SLIMANE. Lunettes de soleil en acétate et cuir de veau, CHANEL CHEZ MARC LE BIHAN. Boucles d’oreilles en or jaune, CARTIER.
Longue veste en jersey de laine, SAINT LAURENT PAR ANTHONY VACCARELLO. Jean en denim, A.P.C. Carré de soie, HERMÈS. Sandales en cuir de veau, CELINE PAR HEDI SLIMANE. Lunettes de soleil en acétate et diamants, MOSCOT CHEZ MARC LE BIHAN. Montre double tour en or jaune, bague en or jaune et diamants, bague à maillons en or rose et diamants et boucles d’oreilles en or jaune, CARTIER.
CI-CONTRE : Veste
et pantalon en coton doux, bottes en cuir Dior et ceinture en cuir, VANESSA SEWARD VINTAGE COLLECTION. Sac en cuir de veau, CELINE PAR HEDI SLIMANE. Boucles d’oreilles en or jaune et bague en or rose, CARTIER. Bague en or jaune, diamants, lapis lazuli, malachite et chrysoprase, DIOR JOAILLERIE. PAGE DE DROITE : Chemise ample en soie, jean en denim et poncho en alpaga, CELINE PAR HEDI SLIMANE. Foulard Charvet, VANESSA SEWARD VINTAGE COLLECTION. Ballerines en veau nappa, REPETTO. Montre double tour en or jaune, bague en or rose et boucles d’oreilles en or jaune, CARTIER. Bague en or jaune, diamants, lapis lazuli, malachite et chrysoprase, DIOR JOAILLERIE. Coiffure : Yusuke Taniguchi. Maquillage : Giulia Cohen. Assistant photo : Francesco Zinno. Assistant stylisme : Kenzia Bengel de Vaulx.
Appelez cela durabilité. Les meilleures combinaisons de la saison mêlent habilement nouvelles pièces et classiques vintage. Photographie JON ERV ERVIN Stylisme GABRIELLE MARCECA
CI-CONTRE : Veste, brassière
et casquette, CELINE PAR HEDI SLIMANE. Jupe, VERSACE FROM NEW YORK VINTAGE. Foulard, HERMÈS (VINTAGE). Chaussures, GUCCI.
PAGE DE GAUCHE : Manteau (porté dessous), MICHAEL KORS. Pull, MOSCHINO FROM JAMES VELORIA VINTAGE. Sandales, BOTTEGA VENETA. PAGE PRÉCÉDENTE : Veste, chemise
et jupe, SALVATORE FERRAGAMO. Sandales, BOTTEGA VENETA.
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CI-CONTRE : Robe, MIU
MIU.
PAGE DE GAUCHE : Robe, BOTTEGA VENETA.
157
CI-CONTRE : Blazer, short
et chaussettes, DRIES VAN NOTEN. Chemise (dessus), SAINT LAURENT FROM NEW YORK VINTAGE. Chemise (dessous), GUCCI. Sandales, BOTTEGA VENETA. PAGE DE GAUCHE : Top et pantalon, CHANEL. Chaussures, LOUIS VUITTON.
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CI-DESSUS : Top, ceinture
et chaussures, LOUIS VUITTON. Jupe, BALENCIAGA FROM JAMES VELORIA VINTAGE. KLEIN (VINTAGE). Chaussettes, GUCCI. Sandales, BOTTEGA VENETA.
PAGE DE DROITE : Robe, LOEWE. Pantalon, CALVIN
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CI-DESSUS : Manteau, veste, top, pantalon
et chaussures, PRADA. et bottes, BURBERRY. COIFFURE : Adam Szabo. MAQUILLAGE : Kuma. ASSISTANT PHOTO : Jeremy Hall. ASSISTANTE STYLISME : Megan Mattson. PAGE DE DROITE : Manteau, top, jupe, chapeau, sac
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Les sacs à main incontournables de la saison s’adaptent à de nouveaux contextes.
Photographie COREY OLSEN Réalisation DORA FUNG
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CI-CONTRE : Sac Coussin PM, LOUIS VUITTON. PAGE DE GAUCHE : Sac seau Horsebit 1955, GUCCI. PAGE PRÉCÉDENTE : Sac Cleo, PRADA.
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CI-CONTRE : Sac Mors de bride, HERMÈS. PAGE DE GAUCHE : Sac en cuir et perles, CHANEL. PAGE PRÉCÉDENTE : Sac en nappa crocheté, BOTTEGA VENETA.
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SET DESIGN : Alicia
CI-CONTRE : Sac Cut out, GIVENCHY. Sciberras. ASSISTANTS PHOTO : Scott Semler et Iain Emaline.
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Le printemps explose dans un triomphe de couleurs lumineuses lumineuses,, de motifs floraux en version all-over et d’architectures bucoliques extravagantes. Photographie ALBERTO MARIA COLOMBO Stylisme FABRIZIO FINIZZA
CI-DESSUS : Robe (dessus), SALVATORE FERRAGAMO. Robe (desous), ACNE STUDIOS. Escarpins, PRADA. PAGE DE DROITE : Veste, robe, foulard et sac, GUCCI. Sandales, ROGER VIVIER. PAGE PRÉCÉDENTE : Robe, CHANEL.
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CI-CONTRE : Chemise, LOEWE. PAGE DE DROITE : Veste, jupe, sacs et bracelets, CHANEL.
CI-CONTRE : Robe, EMILIO PUCCI. PAGE DE DROITE : Robe, BLUMARINE.
CI-DESSUS : Veste, TAGLIATORE 0205. Chemise, EMILIO PUCCI. Pantalon, PATOU. Sac, GIVENCHY. Escarpins, PRADA. PAGE DE GAUCHE : Veste et pantalon, PINKO. Chemise, EMILIO PUCCI. Sac, ROGER VIVIER. Escarpins, PRADA.
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CI-CONTRE : Robe, PRADA. PAGE DE DROITE : Robe, VALENTINO. Bracelet, VAN
CLEEF & ARPELS.
Coiffure : Liv Holst. Maquillage : Riccardo Morandin. Manucure : Carlotta Saettone. Assistants photo : Lorenzo Sampaolesi et Alessio Tirapani. Assistante stylisme : Lucia Fiore.
La Parisienne
Madame selon
d’Ora
Alors qu’approche le centenaire de L’Officiel L’Officiel,, cet automne, nous rendons hommage aux personnalités les plus marquantes de l’histoire du magazine et du monde de la mode. Ouvrons le bal avec cette photographe pionnière qui a introduit un intransigeant regard féminin dans une sphère jusque-là dominée par les hommes. Par PIPER MCDONALD & TORI NERGAARD Traduction CÉLINE GENEVREY
L’Officiel en un magazine plus visuel, pour satisfaire un public friand de rêves de haute couture. Née en 1881 à Vienne dans une riche famille juive, Dora Kallmus s’est fait appeler d’Ora tout au long de ses cinquante années de carrière. Son intérêt pour la photographie s’éveille alors qu’elle est assistante du fils du peintre autrichien Hans Makart. Son exceptionnel talent se révéle au fil du temps, et elle est en 1905 la première femme admise dans l’Association des photographes autrichiens. Après un court apprentissage à Berlin, elle rentre à Vienne en 1907 et ouvre son premier studio, Atelier d’Ora, avec le soutien financier de sa famille. Il était interdit aux femmes à l’époque de se former à la photographie, c’est donc son assistant et collaborateur Arthur Benda qui s’occupe de l’aspect technique. D’Ora, de son côté, se concentre sur la prospection des clients et l’élaboration de son propre style. Grâce à son excellente éducation, elle est aussi à l’aise parmi les aristocrates que dans le florissant milieu artistique des années 1920 et 1930. Son style informel et son charme inné sont de précieux atouts pour capturer au plus près la personnalité de ses modèles.
Considéré aujourd’hui comme un média visuel, le magazine de mode n’a pourtant pas toujours été synonyme de photographie. L’Officiel des débuts était caractérisé par le texte : on y décrivait les collections de mode en termes fleuris aux côtés d’illustrations techniques et d’interminables phrases bourrées de jargon juridique traitant des nouvelles et des événements du secteur textile. Il a fallu plusieurs années avant que la publication ne développe un langage qui lui soit propre. Une évolution que l’on doit en partie à Dora Kallmus, plus connue sous le nom de Madame d’Ora. Comme la presse de mode, la photo de mode était à son origine plutôt fonctionnelle. Elle était sévère et posée, son seul but étant de montrer son sujet, sans considération créative. Mais alors que la scène artistique explose au tout début du XXe siècle, des créateurs comme d’Ora expérimentent de nouvelles pratiques qui font entrer l’esthétique dans les pages du magazine. Les dessins de mode ne faisaient que remplir leur rôle dans un journal professionnel ; l’iconique directrice de la photographie allait accompagner la transformation de CI-DESSUS : Madame de Pinajeff photographiée pour L’Officiel en 1938. À DROITE : Madame Agnès photographiée pour L’Officiel en 1932, et un modèle
photographié pour L’Officiel en 1937. PAGES PRÉCÉDENTES : Autoportrait de Dora Kallmus, 1929 (courtesy of Ullsten Bild Collection).
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Quelque temps après avoir ouvert son studio professionnel à Paris, en 1925, d’Ora entame une longue collaboration avec L’Officiel et devient rapidement sa principale source de photographies de mode, immortalisant vêtements et accessoires de Chanel, Balenciaga, Schiaparelli, Jean Patou, Jeanne Lanvin et bien d’autres. Elle considère nombre de ces créateurs et artistes comme ses intimes. Elle est ainsi très tôt l’amie de Madame Agnès, une modiste et sculptrice française dont les chapeaux ont un grand succès de la fin des années 1920 aux années 1940. Une relation qui compte dans la carrière de d’Ora, à une époque où cet accessoire est incontournable dans la mode féminine. Au-delà de son travail pour le magazine, la photographe tire aussi le portrait d’icônes artistiques et culturelles comme Colette, Gustav Klimt, Josephine Baker, Coco Chanel et bien d’autres, les faisant souvent poser en haute couture. Au fil de son travail avec d’Ora, L’Officiel développe un puissant langage visuel et crée des formes qui reflètent l’art moderne de son époque. Cette collaboration a jeté les bases
Vers la fin des années 1930, le nom de d’Ora se fait de plus en plus rare dans L’Officiel. Alors que l’Europe voit approcher la guerre, elle vend son studio et quitte Paris en 1940. Bien que convertie au catholicisme en 1919, elle doit à ses origines juives de devoir se cacher jusqu’à la fin du conflit dans un couvent ardéchois. Puis elle quitte pour toujours la photo de mode. Lors de son retour à Paris après guerre, elle entame sur commande des Nations unies une série de photographies représentant des rescapés des camps de concentration et des réfugiées allemandes. Son dernier projet est une série réalisée dans divers abattoirs parisiens. Elle traite durant ces annéeslà de sujets sombres. Le reflet d’une existence marquée par la mort de la majeure partie de sa famille, y compris sa sœur Anna, durant la Shoah. Elle s’éteint en 1963 dans sa maison familiale de Frohnleiten, en Autriche. Au long de son remarquable demi-siècle de carrière, d’Ora a produit plus de 200 000 images. Elle a chroniqué le monde de la mode avec audace, donnant à voir son glamour et son attrait sans cacher son côté obscur. La presse de mode lui doit beaucoup.
de sa mutation, faisant évoluer le simple journal professionnel vers un format traitant de la mode, de l’art et du lifestyle qui allait faire date dans la culture féminine. Lorsque d’Ora entre au journal, l’équipe rédactionnelle et les contributeurs sont en majorité des hommes. Dans l’entre-deuxguerres, alors que ce magazine de mode est principalement lu par des femmes, ses colonnes sont singulièrement vides de propos et de points de vue féminins. À travers son objectif, et avec sa sensibilité, Madame d’Ora dépeint une Parisienne dans laquelle les lectrices peuvent se reconnaître. Elle fait de ses modèles des sujets actifs dialoguant avec son appareil photo, décidée à révéler leur personnalité par ses images. Les femmes se voient enfin sur la page comme actrices de leur propre histoire plutôt que comme des objets passifs sans autre but que d’être élégantes pour les hommes.
CI-DESSUS : Couvertures de L’Officiel de mai 1936 et d’août 1929. À DROITE : La princesse Leila Bederkhan photographiée pour L’Officiel
en 1936.
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L’art de MEUBLER Il sait comme nul autre mêler les arts, un certain sens de la mode et une intuition infaillible, argument d’un succès planétaire. Rencontre avec l’architecte d’intérieur Pierre Yovanovitch qui lance sa propre ligne de mobilier. Réalisation LAURE AMBROISE Propos recueillis par NATHALIE NORT Photographie JULES FAURE
C’est un homme terriblement occupé qui nous reçoit dans son agence parisienne, un immeuble XVIIIe en coulisses des Grands Boulevards. Près de cinquante jeunes designers et architectes travaillent avec lui entre ces murs, souvent pour des projets qui prennent corps loin, bien loin d’ici, à Andermatt, à Mayfair, ou encore à Méribel, Toulon ou New York – la maison Pierre Yovanovitch y ayant ouvert un bureau. Depuis cinq ans, les projets se multiplient, les voyages sont légion. C’est une ruche, une fabrique du désir. Bientôt, un restaurant dans le Sud de la France, là la scénographie d’un opéra l’an prochain. Bientôt encore, faudra-t-il pousser les murs pour montrer la ligne de mobilier que cet architecte d’intérieur en vue s’apprête à lancer. Car en vingt ans d’activité, il inscrit son style élégant et cultivé dans une narration qui valorise à la fois l’artisanat et l’art contemporain qu’il collectionne avec ferveur. Au-delà de Fabrègues, le château en Provence où il en expérimente les formes et les fonctions, le mobilier est bel et bien le prochain motto de Pierre Yovanovitch.
Pourquoi avoir bifurqué vers l’architecture d’intérieur, que vous pratiquez maintenant depuis vingt ans ? PY : C’est sans doute une inclinaison naturelle, depuis l’enfance je crois. J’ai aussi senti qu’il était trop tard pour être libre dans le monde de la mode, mais encore temps dans celui de l’architecture d’intérieur. Après avoir acheté, retapé et revendu mon premier studio, puis un deuxième un peu plus grand ; cela a commencé comme un jeu. Des copains m’ont confié leur appartement, puis le premier vrai client est arrivé. LO :
Quelles sont les influences qui vous ont guidé ? Je suis autodidacte, j’ai commencé par m’intéresser aux intérieurs classiques, ancrés dans la tradition française ou italienne des XVIIe et XVIIIe siècles, en en retenant les formes les plus épurées. Progressivement, j’ai recherché des influences plus originales, telles que la grâce suédoise ou la sécession viennoise. En 2006, en off de la Biennale des Antiquaires, le galeriste Éric Philippe et moi avions exposé une dizaine de très belles pièces de la Swedish Grace. Le succès fut immédiat. La découverte de ce mouvement néoclassique et du travail de Gunnar Asplund, l’un de ses chefs de file, m’ont inspiré. La vision postmoderniste d’un Louis Khan ou d’un Philip Johnson a aussi été importante. Et puis, j’ai eu la grande chance de croiser la route d’artistes hors
LO :
PY :
“Le DESIGNER TRAVAILLE la FORME, ET L’ARTISAN, la FONCTION.” norme, Jessaye Norman, Georg Baselitz, Daniel Buren, Tadashi Kawamata, ces derniers étant deux artistes phares accompagnés par Kamel Mennour, galeriste pour lequel je viens de réaliser l’architecture de son nouvel espace, rue du Pont-de-Lodi. Vous avez présidé le jury de Design Parade en 2018, quel regard portez-vous sur la jeune création actuelle ? PY : Contrairement à ma génération, les jeunes ont aujourd’hui accès à une telle quantité d’informations, via les réseaux sociaux, Pinterest ou Instagram, que certains finissent par s’enfermer parfois dans des “moods” un peu trompeurs. Le point positif de cet accès pléthorique est de permettre à certains caractères d’émerger, de montrer une identité qui leur est prolpre. Ce sont les caractères les plus affirmés et les plus sincères qui réussiront.
Que vous inspire la disparition du couturier Pierre Cardin dont vous avez été le collaborateur ? PIERRE YOVANOVITCH : C’est la fin d’un monde qui me rend triste et nostalgique. Il était l’un des grands visionnaires de son époque. On aimerait que ces gens-là vivent éternellement. Mais il s’est bien amusé durant son exceptionnelle et longue carrière. Et forcément, auprès de lui, je me suis bien amusé aussi. Imaginez ce que c’était pour un jeune homme que de travailler pour un monstre sacré. Il avait une forme de génie. Sa personnalité hors norme le rendait attachant. Pour moi, il était un “architecte du vêtement” : géométrie, maîtrise des couleurs et sens des détails. L’OFFICIEL :
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Quels sont les savoir-faire qui vous parlent le plus ? Ceux qui travaillent d’abord la matière, avant la forme : l’ébéniste, le céramiste, le verrier. J’adore me rendre en atelier LO :
PY :
CI-DESSUS ET PAGE DE DROITE : Le
château de Fabrègues, en Provence, résidence privée de l’architecte d’intérieur Pierre Yovanovitch. PAGE PRÉCÉDENTE : Prototypes de la nouvelle collection de mobilier signée Pierre Yovanovitch, dont la sortie est prévue au printemps.
Photos Jérôme Galland, Stephan Balkenhol, Georg Baselitz, DR
LO :
Canapé et table basse, design Pierre Yovanovitch. Au mur : “Augenkreuz”, de Stephan Balkenhol, 2012, galerie Thaddaeus Ropac.
Au dessus de la cheminée : “Saturn P”, de Peter Zimmermann, 2010, galerie Perrotin.
Fauteuils Asymétrie, design Pierre Yovanovitch. Au mur : “Strumenti musicali per manifesto blanco”, de Georg Baselitz, 2015, galerie Thaddaeus. Ropac.
Lampe potence Laura, collection Oops, design Pierre Yovanovitch.
Lampe potence Laura et chaises Monsieur et Madame Oops, design Pierre Yovanovitch.
Lampadaire James, chaises Monsieur et Madame Oops et table, design Pierre Yovanovitch.
Fauteuil Mad, lit Take Off, lampe E.T, cheminée Love, tapis Frolicking et couverture Lust, design Pierre Yovanovitch.
Fauteuil “Mad”, design Pierre Yovanovitch.
car dans chaque objet dessiné il y a ce dialogue essentiel avec l’artisan. Les contraintes interviennent souvent au cours de la réalisation du prototype. L’impératif de confort sur une assise changera la forme elle-même. Pour le marché américain, par exemple, où les gabarits sont différents, il faudra revoir la structure d’un fauteuil avant de la décliner en canapé XXL. En résumé, le designer travaille la forme, et l’artisan, la fonction. Pourquoi vous lancer dans l’édition de mobilier ? D’abord pour me libérer de l’engagement émotionnel qu’impose une commande d’architecture intérieure. Souvent, la réalisation du projet s’étend sur un temps long, surtout quand il s’agit d’une maison entière. C’est passionnant mais épuisant et, la plupart du temps, confidentiel, on ne peut montrer ce travail. Alors que l’édition de mobilier permet, elle, d’atteindre une audience plus large, de s’ouvrir au monde. Ça m’intéresse de créer une véritable LO :
Photos Jean-François Jaussaud/Luxproductions, Stephen Kent Johnson, Julien Oppenheim, Daniel Buren/ADAGP, Philippe Parreno, courtesy of the artists and Kamel Mennour, Paris/London
PY :
Tabouret. À Fabrègues, en 2017, elle a réalisé une fresque dans la chapelle. La rencontre avec un artiste me fait souvent évoluer profondément. Qu’allez-vous chercher au Salone del Mobile à Milan ? Ou dans d’autres foires ? PY : Le Salone est un moment majeur et je suis toujours impatient d’y assister pour voir ce foisonnement d’idées. Cela remet en cause la place que l’on occupe soi-même dans ce paysage. En temps normal je voyage beaucoup, et les foires, qu’il s’agisse de design, d’art contemporain ou d’arts décoratifs – TEFAF Maastricht, le Salone del Mobile à Milan, Art Basel and Design, Design Miami, la Fiac et Frieze – sont pour moi des références. LO :
“ÇA M’INTÉRESSE DE créer UNE VÉRITABLE identité, COMME UNE MARQUE DE MODE, AVEC des collections ET DU MOUVEMENT.” identité, comme une marque de mode, avec des collections et du mouvement. Avec mon équipe, on a compté quelque 800 meubles dessinés depuis les débuts de l’agence, c’est énorme. Mais on va d’abord sortir 75 pièces nouvelles : du manteau de cheminée à l’applique murale, chaque objet sera en édition limitée. Au château de Fabrègues, votre résidence privée en Provence, la nature, l’art contemporain et les arts décoratifs sont en osmose. Est-ce une vitrine d’un savoir-faire ? Quelque chose en perpétuel mouvement ? PY : Pour moi, Fabrègues doit être une synthèse, un art de vivre et, en ce sens, sera toujours un lieu en évolution. J’aime ce domaine un peu austère, isolé au milieu de 350 hectares, car il me permet d’expérimenter dans des domaines complémentaires : architecture, couleurs, paysage, agriculture. Pour reparler d’influences, j’ai ici une pensée pour Claire LO :
CI-DESSUS : Vues de l’exposition “Simultanément, travaux in situ et en mouvement” de Daniel Buren et Philippe Parreno, Kamel Mennour (5, rue du Pont-de-Lodi), Paris, 2020.
Quel voyage vous a le plus marqué ? Très récemment, le Brésil et le Bénin. J’ai un faible pour Brasilia, Le Havre ou Ljubljana qui sont toutes trois des villes marquées par un architecte. Mais s’il est un lieu qui m’a frappé dans sa cohérence, c’est la chapelle Notre-Dame-du-Haut, à Ronchamp en Haute-Saône. Dix ans après Le Corbusier, décédé entretemps, Jean Prouvé a ajouté un campanile et, en 2011, Renzo Piano a reconstruit la porterie et le monastère. Mais tous deux ont respecté l’œuvre sans jamais la cannibaliser. LO :
PY :
Comment continuez-vous à travailler dans cette période infiniment compliquée ? PY : Le plus naturellement possible. C’est-à-dire en maintenant des contacts directs, tout en étant prudent. LO :
195
Home
SLICK Attitude punk, volumes rococo et décorativisme effronté, bienvenue dans l’univers l’univers rock du supermodèle Slick Woods. Photographie JACQUES BURGA Stylisme PAULINA CASTRO
CI-DESSUS : Veste et minijupe, AREA. Chaussettes, FALKE. Boots, LOUIS VUITTON. PAGE DE GAUCHE : Robe et soutien-gorge, GIVENCHY. PAGE PRÉCÉDENTE : Manteau et jupe, ALEXANDER McQUEEN. Boucles d’oreilles, BONHEUR.
Colliers, bagues et montre, perso.
199
CI-DESSUS : Veste, sweater et pantalon, LOUIS VUITTON. Boucles d’oreilles, BONHEUR. PAGE DE DROITE : Veste, chemise, minijupe et chaussures, MIU MIU.
Colliers, bagues et montre, perso.
200
CI-DESSUS : Chemise, CAEIRO. Brassière, jupe et bottes, DOLCE & GABBANA. Boucles d’oreilles, BONHEUR. PAGE DE GAUCHE : Chemise, culotte, ceinture et boucles d’oreilles, SAINT LAURENT PAR ANTHONY VACCARELLO.
Chaussettes, FALKE. Derbies, ALEXANDER McQUEEN. Colliers, bagues et montre, perso.
Coiffure : Sheridan Ward. Maquillage : Bren Roberston. Assistant photo : Noah Raymond.
203
LÈCHEVITRINES
déguisé
Avec son long métrage El Planeta, comédie noire présentée à Sundance, Amalia Ulman se penche sur le déclassement social. Mon psy m’expliquait récemment qu’une faction de ma famille était comme coincée dans un drame interne d’excès et de privations, un ricochet incessant entre abondance écœurante et insupportable pénurie. Pour moi, c’est plutôt une comédie, mais je l’ai quand même noté dans mon calepin. Et puis, quelques jours plus tard, j’ai vu le premier film d’Amalia Ulman, El Planeta, qu’elle qualifie de “comédie noire sur l’expulsion”, et de nouveau j’ai griffonné “excès !” “privations !”. Le film raconte
l’histoire d’une mère et de sa fille, Maria et Leonor, interprétées avec talent par la mère d’Amalia, Ale Ulman, et elle-même, plongées brutalement dans la pauvreté après la mort du père de famille. Leurs soucis financiers enflent comme une vague – elles ont du mal à se payer à manger, leur électricité est coupée, la date d’expulsion approche –, mais elles restent attachées aux plaisirs de leur ancienne vie, montent diverses arnaques et embrouilles pour entretenir l’illusion de leur ancien niveau social.
Par AUDREY WOLLEN Traduction CÉLINE GENEVREY Photographie ROEG COHEN
CI-DESSUS : Extraits
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du film “El Planeta” d’Amalia Ulman, 2021.
famille est le souci de l’autre. On nous révèle progressivement qu’un accident de bus, des années auparavant, a laissé Leonor handicapée, souffrant de douleurs chroniques et de difficultés à marcher. Dans un mélange brillant d’intimité chamailleuse et d’esprit acéré, le film tire le portrait de deux femmes si dévouées l’une à l’autre et à leur fantaisie qu’elles en parviennent à occulter leurs contradictions. Par moments, on imaginerait presque qu’elles arriveront à s’en sortir par la seule force de leur croyance. Amalia Ulman, née en 1989, qui incarne Leonor, a écrit, réalisé et produit El Planeta, dont la première numérique a eu lieu au festival du film de Sundance 2021. Tourné dans sa ville de Gijón, dans les Asturies, en Espagne, et avec sa mère comme actrice, le film “a évidemment des aspects autobiographiques, notamment le handicap et l’expulsion”, reconnaît la cinéaste. Le scénario s’inspire de sa vie, et le style visuel de son art : “Les pâtisseries, le décor ‘toutà-1-euro’, les transitions, etc., sont des références directes à mes œuvres.” Amalia Ulman usait déjà de ces glissements entre vérité et fiction dans sa pratique artistique. Son travail le plus connu est Excellences & Perfections (2014), sur Instagram, où elle a élaboré et interprété une version scénarisée d’elle-même. Dans ces carrés, une jeune femme se construit, incarnant divers clichés de la féminité en ligne – avec tout ce que ça implique de déplacement d’érotisme : mammoplastie fictive (photos obscures de sa poitrine
Photos courtesy of the artist
Maria serre un peu plus son col de fourrure, tire sur la poignée de son sac Burberry comme si ce dernier était une porte qui pouvait s’ouvrir pour la mener quelque part. Leonor fait des achats compulsifs sur Internet, lit Le Printemps et le reste de William Carlos Williams à la lumière du hall d’entrée, décore sa chambre d’un T-shirt qui proclame “Il faut que j’avorte mon enfant intérieur”. Amalia Ulman place son héroïne au cœur de “cette économie dans laquelle, pour pouvoir se payer à manger, les influenceurs doivent vendre sur The RealReal les vêtements de luxe que les marques leur ont envoyés”, un cycle du trop et du pas assez. La pensée magique saupoudrée sur tous les aspects de leur vie ; un frigo vide, excepté les noms de leurs ennemis inscrits sur de petits bouts de papier gelés, piètres malédictions. Elles font leur shopping dans les grands magasins, aussi rayonnantes que les néons des salles qu’elles traversent, et rendent leurs articles dans les deux semaines. Elles ne travaillent pas, pas vraiment, du moins. Leur petit appartement est un temple dédié à leur chat, mystérieusement absent ; ces folles à chats sans chat habitent un espace empreint d’étrangeté et de chagrin. Elles font des festins de pâtisseries gratuites. Se gobergent au restaurant et font mettre la note sur le compte d’un politicien local, Leonor prétendant être sa maîtresse. Et puis on comprend que le ciment de cette
AMALIA ULMAN PLACE son HÉROÏNE AU CŒUR D’UNE ÉCONOMIE dans LAQUELLE, POUR POUVOIR SE PAYER À MANGER, les INFLUENCEURS VENDENT sur THE REALREAL les VÊTEMENTS DE LUXE que LES MARQUES leur ONT ENVOYÉS. bandée à l’appui), assiettes de demi-avocats, queues de cheval hautes et thigh gaps, T-shirts pastel à slogan, lingerie baroque, mentons pointés. Il s’agit là, clairement, d’un nouveau type de procédé narratif. Pourtant, comme nombre de représentations de jeunes filles de milieu aisé, il a été perçu comme une forme de mensonge, une arnaque, parce qu’une partie du public avait du mal à faire la différence entre Ulman l’artiste et Ulman l’objet d’art. L’arnaqueur, l’escroc peut-il être considéré comme une sorte d’auteur ? Quand je demande à Amalia si elle a des escrocs préférés, elle me répond : “Les histoires d’imposteurs les plus touchantes sont celles où le malfaiteur est un peu balourd. Généralement elles finissent mal parce qu’il est trop honnête.” Leonor n’est styliste que d’elle-même, étant dans l’impossibilité de sauter dans un avion pour aller faire un travail qui ne la paierait que de publicité. Cette boucle tautologique de l’économie des petits boulots fait écho à la situation de Maria, une maîtresse de maison sans maison. On ne l’avait pas vue venir, mais la mère de toutes les arnaques, évidemment, c’était le capitalisme mondial. Les costumes du film sont parmi les plus expressifs que j’ai pu voir récemment. Les tenues des héroïnes traduisent leurs joies, leurs fragilités et ce à quoi elles s’identifient. “Habiller Maria, c’était facile, parce que les gens de droite en Espagne, qui se croient élégants, portent un uniforme qui n’a pas varié depuis des décennies, explique Amalia. C’était plus complexe pour le personnage de Leonor, que Fiona Duncan m’a aidée à construire. Il me semblait important de montrer que si on laissait sa chance à Leonor en rémunérant son boulot de styliste, elle aurait vraiment du succès.” Leonor porte donc des vêtements d’une kyrielle de jeunes designers new-yorkais, comme Lou Dallas, Gauntlett Cheng, Veja, Women’s History Museum ou Martina Cox. Maria, elle, est presque toujours en pyjama, enroulée dans une couverture pour se tenir chaud, avec autour de la tête un bandeau de bain façon cartoon. Pour sortir,
elle se déguise en femme riche : fourrure, sac, lunettes de soleil. Quand j’interroge Amalia au sujet du chat disparu bien plus regretté que le père mort, elle explique : “El Planeta est une entreprise familiale, et Holga [le chat, ndlr] est un pilier de la structure de notre famille depuis quinze ans… Je ne pense pas que ce soit intentionnel, mais il est évident que les rôles de femmes et d’animaux dans le film ont plus de poids que ceux des hommes, qui sont périphériques et ne représentent rien de plus que l’instrument de leur survie.” Quand j’écrivais “excès” et “privations” dans mon carnet, je pensais au sens matériel, à l’argent. Mais je comprends que le film parle aussi de ce que signifie trop aimer ou pas assez, de la façon dont l’attention à l’autre, l’affection circulent entre les gens, à moins que ce flot ne soit perturbé, détourné par les barrières des rapports de classe, de l’exploitation et de la souffrance. Sans cela, l’amour pourrait continuer à tourner en rond, sans but mais avec une concentration accrue, comme deux femmes qui marchent côte à côte en faisant du lèche-vitrines. 207
Lors du siècle écoulé, l’argent a toujours été l’audacieux porte-drapeau de la nouveauté et du révolutionnaire. Depuis les tenues de soirée Art déco jusqu’aux promesses futuristes inspirées par la science-fiction, l’argenté a fait sensation dans les pages de L’Officiel tout au long de son histoire centenaire. Mais sa place dans la culture a aussi évolué. Durant les années 1930, il est le signe du glamour. Bien qu’en 1933 la photo couleur n’ait pas encore fait son apparition dans le magazine, l’éclat des robes d’argent d’Alix Barton est reconnaissable entre tous, même dans un austère noir et blanc. Dans les années soixante, le métal devient la définition même de l’ère spatiale. Les sequins et lamés élaborés par Pierre Cardin et André Courrèges, en phase avec la culture de leur temps, rendent palpable la soif de voyages interplanétaires et de technologie.
Rien de plus mod qu’une étincelante minirobe argentée. Dans les années 1990, la célébrité absolue s’exprime en lamé. Aussi flamboyante que les icônes des tabloïds, cette matière est intimement liée à la mode et aux superstars hollywoodiennes. Et tandis que ces dernières font vibrer les robes Paco Rabanne en cotte de maille de leur jeunesse, l’argent contine d’imprimer sa marque dans la première décennie des années 2000, entre les mains de créateurs comme Versace et Louis Vuitton. En 2021, les déclinaisons du métal blanc continuent de refléter l’esprit de jeunesse et les aspirations des générations passées. —Par Piper McDonald & Tori Nergaard
L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ. À CONSOMMER AVEC MODÉRATION.